B. LA CONTROVERSE SUR LE CONTENU DE LA MISSION INTERMINISTÉRIELLE
Le
caractère fondamentalement interministériel de l'aide au
développement implique assez naturellement que cette dernière
soit intégrée dans une mission interministérielle, dont
les contours ne sont toutefois pas encore définis. Le ministère
du budget a en effet opté pour une logique
«
bottom-up
», consistant à définir
les programmes dans chaque ministère avant que les missions ne soient
connues. Cette démarche a suscité certaines
incompréhensions dans les ministères et des critiques de la Cour
des comptes. La définition des missions, qui devrait être connue
d'ici la fin de l'année, est néanmoins déterminante pour
le succès de la réforme car elle a une incidence directe sur le
pouvoir d'amendement du Parlement
73(
*
)
, et permet d'intégrer la
vocation interministérielle de nombreuses actions de l'Etat, et partant
de rendre plus lisible une action publique en prise avec la complexité,
comme de s'affranchir des structures administratives existantes.
Deux visions d'une mission interministérielle relative à l'APD
se confrontent
: le ministère des affaires
étrangères défend le principe d'une vaste mission
« action extérieure de l'Etat », qui regrouperait
grosso modo
tous les crédits actuellement rassemblés dans
le « jaune » du même titre, tandis que le
ministère du budget entend mettre en place une mission « aide
publique au développement ». Chaque ministère
communique sur sa propre conception en faisant mine d'ignorer l'alternative.
Votre rapporteur spécial considère qu'une mission
« aide publique au développement » serait plus
adaptée pour trois raisons
:
- elle serait plus conforme à la définition de l'article 7
de la loi organique, qui fait explicitement référence à
une « politique publique définie ». Or si l'APD
constitue bel et bien une politique publique aux contours relativement clairs,
impliquant une volonté et une stratégie, l'action
extérieure de l'Etat est davantage une conséquence
nécessaire de l'ouverture sur le monde de n'importe quel Etat ;
- elle présente une meilleure cohérence et un
périmètre mieux défini que l'action extérieure,
susceptible de chevauchements avec d'autres politiques publiques constitutives
de missions ;
- elle permettrait enfin de rendre lisible, sur les plans budgétaire et
organisationnel, l'action de la France en faveur du développement. Cette
transparence ne serait toutefois achevée que dès lors qu'elle
s'accompagnerait d'une harmonisation avec les données transmises au CAD.
L'architecture en trois programmes aujourd'hui prévue par le
ministère tend toutefois à faire obstacle à l'introduction
d'une telle mission,
puisque la participation du ministère à
l'APD n'est absolument pas identifiable dans un programme, ou à tout le
moins dans des actions dédiées.