Article 153
(art. L. 653-5 nouveau du
code de commerce)
Saisine du tribunal aux fins de faillite personnelle -
Impossibilité pour le juge-commissaire de siéger
dans la
formation de jugement
Le présent article, modifié par l'Assemblée nationale, a pour objet de modifier la liste des titulaires du pouvoir de saisir le tribunal pour demander qu'il prononce la faillite personnelle du débiteur. En outre, il tend à interdire au juge-commissaire de siéger dans la formation de jugement appelée à prononcer la faillite personnelle ou à participer au délibéré.
1. Les règles de saisine du tribunal
Actuellement , les modalités de saisine du tribunal énoncées à l'article L. 625-7 du code de commerce sont identiques à celles prévues pour l'action en comblement de l'insuffisance d'actif. Elles s'appliquent à tous les cas de faillite personnelle (articles L. 625-3 à L. 625-6).
Outre la renumérotation de l'article L. 625-7 qui deviendrait l'article L. 653-7 et l'actualisation des références par coordination avec la nouvelle structure du livre VI du code de commerce, le présent article prévoit un dispositif identique à celui défini à l'article 144 du projet de loi.
Sur la proposition de leur commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, les députés ont apporté des modifications similaires à celles adoptées à l'article 144 du projet de loi.
Par cohérence, votre commission vous propose un amendement de précision sur la majorité des créanciers, identique à celui qu'elle vous a précédemment soumis à l'article 144 du projet de loi.
2. L'impartialité de la formation de jugement
Sur la proposition de Mme Arlette Grosskost et avec l'avis favorable de sa commission des lois et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a complété cet article par un nouvel alinéa destiné à garantir l'impartialité de la formation de jugement. Elle a posé le principe de la stricte séparation de l'autorité de jugement chargée de statuer sur les sanctions professionnelles et de l'autorité chargée de veiller au déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en présence . Ce dispositif serait applicable aux juridictions commerciales comme aux tribunaux de grande instance à compétence commerciale.
Les exigences qui découlent du droit à un procès équitable au sens de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales imposent qu'une affaire soit jugée par des juges indépendants. La Cour européenne des droits de l'homme a rendu de nombreuses décisions en ce sens 357 ( * ) . Cette jurisprudence doit être prise en compte et appliquée au procès commercial. L'implication du juge-commissaire dans le déroulement de la procédure de redressement ou de liquidation rend inopportune sa participation au jugement comme sa présence au délibéré. La cour d'appel de Versailles 358 ( * ) a jugé contraire au principe d'impartialité qu'un juge-commissaire rende un avis sur un dossier et participe au prononcé des sanctions qui concernent ce même dossier, estimant que dans cette hypothèse, celui-ci forgeait son appréciation avant le jugement.
Comme l'a souligné, M. Jean-François de Valbray, alors premier substitut, chef de la section commerciale du tribunal de commerce de Nanterre, au cours de l'audience solennelle de rentrée en 2003, il « ne saurait y avoir cumul des missions et des mandats sans risque de conflits avec les principes directeurs d'un débat équitable et transparent, mis en oeuvre par des acteurs indépendants.(...) L'information du débiteur et de l'organe de poursuite doit être complète. Mais si le rapport du juge-commissaire, pivot de la procédure, est nécessaire et primordial, il me paraît regrettable que ce magistrat fasse partie de la formation de jugement, quelles que puissent être les précautions et habiletés dont il pourra s'entourer... ».
Certains tribunaux de commerce comme ceux de Créteil, Nanterre ou Paris sont même allés plus loin en créant des chambres spécialisées en matière de sanctions.
Souscrivant à l'initiative de l'Assemblée nationale, votre commission vous soumet un amendement d'amélioration rédactionnelle.
Elle vous propose d'adopter l'article 153 ainsi modifié .
* 357 Arrêts Delcourt contre Belgique du 17 janvier 1970 et de Cubber contre Belgique du 26 octobre 1984 selon lesquels le principe d'impartialité impose une séparation entre les fonctions de poursuite, d'instruction et de jugement.
* 358 Arrêt du 12 novembre 1993.