Article 155
(art. L. 653-9 nouveau du
code de commerce)
Coordination
Supprimé par l'Assemblée nationale , le présent article avait pour objet d'opérer une simple coordination au sein des dispositions relatives aux effets des sanctions professionnelles prononcées à l'égard des dirigeants de personnes morales.
Actuellement, l'article L. 625-9 du code de commerce prévoit que les dirigeants frappés de faillite personnelle ou de l'interdiction de gérer sont privés de l'exercice du droit de vote dans les assemblées des personnes morales soumises à une procédure collective et doivent céder les actions ou les parts sociales détenues dans la personne morale.
Outre la renumérotation de l'article L. 625-9 qui deviendrait l'article L. 653-9, le présent article se bornait à tirer les conséquences de la nouvelle numérotation des articles figurant sous le titre VI du code de commerce en actualisant le renvoi à l'interdiction de gérer qui aux termes de l'article 154 du projet de loi serait définie par l'article L. 653-8.
Sur la proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a jugé cette modification redondante avec le tableau de concordance figurant en annexe du projet de loi ( tableau I ).
Une autre modification du texte proposé pour l'article L. 653-9 figurait à l'article 183 du projet de loi pour en étendre l'application à la procédure de sauvegarde. Cette disposition a été supprimée par l'Assemblée nationale par coordination avec l'exclusion de cette procédure du champ des sanctions professionnelles prévue par l'article 148 du projet de loi.
Votre commission vous propose de maintenir la suppression de l'article 155.
Article 156
(art. L. 653-10 nouveau du
code de commerce)
Incapacité d'exercer une fonction publique
élective à titre facultatif en cas de faillite personnelle et
d'interdiction de gérer
Le présent article, complété par l'Assemblée nationale, a pour objet de permettre au tribunal de prononcer l'incapacité d'exercer une fonction publique élective à titre facultatif en cas de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer.
1. Les règles posées par la loi du 25 janvier 1985 : l'interdiction d'exercer une fonction publique élective, une peine accessoire de la faillite personnelle et de l'interdiction de gérer prononcée automatiquement
La loi du 13 juillet 1967 prévoyait que le jugement de règlement judiciaire ou de liquidation emportait de plein droit pour le débiteur ou les dirigeants une incapacité d'exercer une fonction élective. Ainsi, cette interdiction se présentait comme une conséquence automatique de l'ouverture d'une procédure collective, ce qui paraissait très sévère.
L'article 194 de la loi du 25 janvier 1985 a repris ce principe en l'atténuant. Il limitait cette interdiction aux personnes frappées de faillite personnelle ou d'une interdiction de gérer et aux personnes physiques mises en liquidation judiciaire. Le point de départ de la prise d'effet de l'incapacité était fixé au jour de la notification faite à l'intéressé.
Cette disposition a suscité de nombreuses critiques, notamment eu égard aux exigences de l'article 6, paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH). La Cour de cassation a cependant jugé cette disposition conforme à la CEDH 361 ( * ) , tandis que le Conseil d'Etat l'a estimé compatible avec l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques 362 ( * ) .
Dans une décision du 5 septembre 1996 rendue à propos de la déchéance d'un mandat parlementaire 363 ( * ) , le Conseil constitutionnel a estimé qu'un jugement de faillite personnelle devenu définitif emportait de plein droit la déchéance du parlementaire. Le Conseil d'Etat, saisi de la même affaire, s'est prononcé dans le même sens 364 ( * ) .
En revanche, saisi de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, le Conseil constitutionnel a jugé contraire au principe de nécessité des peines énoncé à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen son article 195-I-5° relatif aux cas d'inéligibilité au congrès et aux assemblées de province 365 ( * ) . Or, le dispositif censuré se bornait à étendre à cette collectivité d'outre-mer le principe posé par l'article 194 de la loi de 1985 lequel a donc également été censuré 366 ( * ) .
Tirant les conséquences de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 de codification de la partie législative du code de commerce a abrogé l'article 194 de la loi de 1985.
2. Le dispositif prévu par le projet de loi : le rétablissement de l'interdiction d'exercer des fonctions publiques électives sous des modalités compatibles avec les exigences constitutionnelles
Le présent article propose de rétablir l'interdiction d'exercer des fonctions publiques électives comme peine complémentaire de la faillite personnelle. Cette mesure serait définie à l'article L. 653-10 du code de commerce.
Le dispositif serait assoupli par rapport aux règles issues de la loi du 25 janvier 1985 :
- l'interdiction de gérer et la mise en liquidation judiciaire ne pourraient plus donner lieu à l'interdiction d'exercer des fonctions publiques électives ; celle-ci serait désormais réservée à la sanction personnelle la plus grave , à savoir la faillite personnelle ;
- cette mesure ne serait plus automatique ; le tribunal serait désormais libre de la prononcer ou non.
Le point de départ de cette déchéance serait identique à celui qui était fixé par la loi de 1985, à savoir la date de la notification de l'incapacité à l'intéressé par le ministère public.
L'Assemblée nationale a approuvé ces dispositions qu'elle a complétées, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, pour en renforcer la cohérence.
Le projet de loi initial était muet quant à la durée de cette mesure, la seule précision à cet égard étant apportée par l'article 157 du projet de loi (texte proposé pour l'article L. 653-11), selon lequel l'incapacité d'exercer une fonction publique élective cesse de plein droit au terme fixé pour la faillite personnelle, laquelle ne peut être supérieure à quinze ans.
M. Xavier de Roux, rapporteur à l'Assemblée nationale, a estimé que deux arguments rendaient nécessaires de préciser le dispositif :
- d'une part, il a craint que l'absence d'indication selon laquelle la durée de l'interdiction devait être égale à celle de la faillite, dont elle n'est que le complément, soit contraire au principe constitutionnel de nécessité des peines ;
- d'autre part, il a jugé nécessaire de fixer une durée maximale cohérente avec des dispositions de même nature comme l'interdiction d'exercer une fonction publique élective prononcée comme une peine complémentaire de la banqueroute dont l'article L. 626-5 367 ( * ) , par un renvoi à l'article 131-26 du code pénal, fixe la durée maximale à cinq ans. Comme l'a fait observer M. Xavier de Roux, « on notera que le tribunal de commerce pourrait aux termes du projet, prononcer une incapacité élective de quinze ans, soit une durée trois fois plus longue » que la peine complémentaire du délit de banqueroute 368 ( * ) .
Telle sont les raisons pour lesquelles, les députés ont jugé nécessaire d'ajouter que « l'incapacité d'exercer une fonction publique élective est prononcée pour une durée égale à celle de la faillite personnelle dans la limite de cinq ans ».
Votre commission souscrit pleinement à cette démarche qui contribue à garantir un régime de sanctions proportionné aux fautes commises.
Elle vous propose d'adopter l'article 156 sans modification .
* 361 Ch. commerciale, 9 juillet 1996, affaire Bernard Tapie.
* 362 Conseil d'Etat, 8 janvier 1997, affaire Bernard Tapie
* 363 Affaire Bernard Tapie.
* 364 Conseil d'Etat, arrêt précité.
* 365 Décision n° 99-410 DC du 15 mars 1999.
* 366 Le Conseil constitutionnel a estimé qu'« en instituant une incapacité d'exercer une fonction publique élective d'une durée en principe au moins égal à cinq ans, applicable de plein droit à toute personne physique à l'égard de laquelle a été prononcée la faillite personnelle, l'interdiction prévue à l'article 192 de la loi du 25 janvier 1985 ou la liquidation judiciaire, sans que le juge qui décide de ces mesures ait à se prononcer expressément sur ladite incapacité, l'article 194 méconnaît le principe de nécessité des peines ».
* 367 Renuméroté sous l'article L. 654-5 par le tableau I joint en annexe du projet de loi.
* 368 Débats du 8 mars 2005, 3 ème séance, JOAN du 9 mars 2009, p. 1800.