Article 176
(art. L. 662-3 nouveau du code de
commerce)
Nouvel intitulé du chapitre II du titre VI consacré
à d'autres dispositions - Coordinations
Le présent article, supprimé par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement tend à opérer des coordinations avec la nouvelle structure du livre VI du code de commerce.
Son paragraphe I tendait à créer un nouveau chapitre consacré à d'autres dispositions que celles relatives aux voies de recours au sein du titre VI relatif aux dispositions générales de procédure.
Son paragraphe II proposait de modifier des renvois au sein de l'article L. 627-3 relatif à la prise en charge par le Trésor public des frais de justice, sous forme d'avances remboursables en fin de procédure, en cas d'impécuniosité du débiteur.
Les députés ont jugé ces dispositions redondantes avec les tableaux annexés au projet de loi.
Votre commission vous propose par un amendement de rétablir cet article pour y accueillir la dérogation aux règles de compétence territoriale des juridictions civiles appelées à statuer en matière commerciale figurant à l'article 175 afin de la faire figurer au sein du chapitre consacré à des dispositions diverses sous un article L. 662-2 et non au sein des dispositions relatives aux voies de recours.
Elle vous propose de rétablir l'article 176 ainsi rédigé .
Article 176 bis (nouveau)
(art. L. 662-2-1
nouveau du code de commerce)
Rémunération des mandataires de
justice
Inséré par l'Assemblée nationale sur la proposition de Mme Arlette Grosskost avec les avis favorables de la commission des lois et du Gouvernement, le présent article tend à déplacer les modalités de rémunération des mandataires de justice définies actuellement au livre VIII du code de commerce « De quelques professions réglementées » au sein des règles applicables aux procédures collectives, sous réserve de modifications marginales.
1. Le droit en vigueur
Actuellement , l'article L. 814-6 du code de commerce, issu de l'article 37 de la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise, renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer les modalités de rémunération des administrateurs et mandataires judiciaires . Les règles de prise en charge de la rémunération des personnes appelées sur la demande des mandataires de justice à effectuer au profit de l'entreprise certaines tâches techniques non comprises dans les missions qui leur sont confiées et n'entrant pas dans leur compétence habituelle sont également renvoyées à un décret en Conseil d'Etat.
La loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce a modifié ce dispositif par une simple coordination avec la création d'une liste d'inscription nationale pour les mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation.
Avant les modifications opérées en 2004, le décret n° 85-1390 fixant le tarif des administrateurs judiciaires en matière commerciale et des mandataires liquidateurs prévoyait que cette rémunération comportait un droit fixe d'un montant de 2.287 euros et un droit proportionnel, non au résultat du travail du mandataire, mais au travail lui-même évalué à partir de critères définis en fonction du chiffre d'affaires de l'entreprise en période d'observation, du prix de cession, du montant des créances rejetées ou des réalisations et recouvrements d'actifs.
Le rapport d'enquête sur l'organisation et le fonctionnement des tribunaux de commerce publié en juillet 1998 408 ( * ) a dénoncé ce mécanisme dont la complexité était souvent mise à profit par les mandataires pour prélever des sommes indues. Une simplification de la réglementation et notamment des barèmes avait été souhaitée afin d'éviter des comportements frauduleux et de permettre aux acteurs de la procédure de mieux contrôler le travail des mandataires.
Dans le même esprit, votre rapporteur , à l'époque rapporteur de la loi du 3 janvier 2003 précitée, avait également mis en exergue le « caractère pernicieux » des modalités de rémunération en vigueur , notant que les critères du tarif actuel paraissaient dangereux du fait de leur absence de neutralité sur la procédure . « Ainsi, le fait que la rémunération de l'administrateur judiciaire due au titre de la poursuite de l'activité pendant la période d'observation soit fonction du seul chiffre d'affaires est une incitation à un allongement de la durée de celle-ci. Par ailleurs, la cession de l'entreprise donnant lieu à la perception d'un droit particulier, cela tend à privilégier les plans de cession sur les plans de continuation. (...). Le fait que le représentant des créanciers soit rémunéré en proportion du nombre de créances rejetées n'est pas de nature à encourager à défendre les intérêts de ceux qu'il est censé représenter et défendre » 409 ( * ) .
Votre rapporteur, lors de l'examen de ce texte en première lecture en séance publique, le 21 février 2002, avait fait valoir qu'il ne fallait « pas encourager la conclusion à tout prix de plans de continuation, au risque d'un échec du plan encore plus douloureux qu'une liquidation ou qu'une cession intervenue plus tôt » 410 ( * ) . Lors de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur ce même texte, le 5 décembre 2002, votre rapporteur réaffirmait « l'urgence qui s'attache à la révision des tarifs de ces professionnels », rappelant que le Sénat n'avait accepté de remédier au problème de l'impécuniosité des procédures 411 ( * ) que dans la perspective d'une refonte du décret fixant le tarif.
En réponse M. Pierre Bédier, alors secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice avait reconnu que le tarif actuel n'était « pas parvenu à créer un équilibre équitable , tant pour les justiciables qui en supportent le coût que pour les professionnels qui en bénéficient. » Il avait même souligné le paradoxe selon lequel le tarif « peut avoir un effet direct sur le traitement des procédures collectives » tout en étant « susceptible d'orienter certaines diligences au détriment de l'intérêt du dossier . » Dans ces conditions, il avait jugé indispensable une réforme d'ensemble du tarif des mandataires judiciaires tout en indiquant qu'elle ne pouvait être mise en oeuvre dans l'urgence, notant qu' « un tel choix ne serait pas compatible avec la rénovation globale du droit des procédures collectives, également indispensable. Le tarif devra en effet tenir compte des nouvelles missions qui seront alors dévolues à chacun de leurs acteurs. » Le Gouvernement s'était donc engagé à mener ce chantier « parallèlement » à celui du droit de la faillite.
Dans cette attente, le décret n° 2004-518 du 10 juin 2004 portant diverses dispositions relatives aux administrateurs judiciaires et aux mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises a procédé à une première modification du décret de 1985 .
Plusieurs dispositions de la réforme tarifaire issue du décret du 10 juin 2004 méritent d'être signalées car elles constituent un premier pas vers une remise à plat de la tarification des mandataires judiciaires. Peuvent être notamment citées : - la suppression du droit proportionnel -très controversé- de 5 % calculé sur la différence entre le montant de la créance déclarée et celui de la créance définitivement admise alloué au représentant des créanciers pour toute créance contestée. Les sommes perçues sur le fondement de ce dispositif donnaient lieu à des montants excessifs qui représentaient environ 15 % du chiffre d'affaires des mandataires ; - le blocage du tiers de la rémunération des mandataires jusqu'à la clôture du dossier ; - l'interdiction de toute perception d'acompte sur la rémunération sans justification de l'accomplissement des actes donnant lieu à la perception de cette rémunération. Outre que cette mesure est de nature à accélérer les clôtures, elle met un terme à une politique de prélèvement d'acomptes très excessive. La réforme n'a pas revalorisé la rémunération des mandataires. Cependant, en contrepartie de la suppression du droit assis sur la vérification des créances, certaines mesures ont été prises pour corriger certaines situations : - le versement d'une indemnité complémentaire aux émoluments perçus de 1.500 euros, permettant une rémunération forfaitaire dans les dossiers « impécunieux » c'est-à-dire comportant de très faibles actifs ; - la simplification du tarif prévu pour l'établissement des relevés des créances des salariés, ce droit s'élevant désormais à 120 euros par salarié, quelle que soit la taille de l'entreprise. |
2. Les modifications apportées par le projet de loi
Le présent article apporte peu de modifications sur le fond au dispositif actuel :
- il remplace le renvoi à un décret simple par un renvoi à un décret en Conseil d'Etat ;
- il supprime la référence à la rémunération des personnes appelées sur la demande des mandataires judicaires à effectuer des missions techniques indépendantes de celles confiées à ces derniers. Cette modification tire les conséquences des nouvelles modalités de désignation des techniciens prévues par le présent projet de loi qui confie cette tâche au juge-commissaire (article L. 621-8) 412 ( * ) ;
- il reproduit, sous réserve de modifications rédactionnelles, une disposition énoncée à l'article 19 du décret qui exclut toute autre rémunération ou remboursement de frais pour les mêmes diligences. Il s'agit de réaffirmer la volonté du législateur d'éviter des dérives tarifaires et des comportements frauduleux. Cette disposition tend à interdire la possibilité d'obtenir des rémunérations concomitantes à celles prévues par le tarif au prétexte qu'elles étaient relatives à des diligences complémentaires.
La modification la plus significative et porteuse de changement résulte paradoxalement d'une modification de pure forme tenant au déplacement du contenu de l'article L. 814-6 à l'article L. 662-2-1. En effet, ce changement de place démontre la volonté de mettre fin aux contradictions entre le mode de rémunération des mandataires de justice et la protection des intérêts des entreprises recherchée par les procédures collectives . En conséquence, il est proposé d'abroger l'article L. 814-6 et de remplacer les renvois à cet article dans divers articles relatifs au statut des mandataires de justice par un renvoi au nouvel article L. 662-2-1 (articles L. 811-1, L. 812-1, L. 814-7 et L. 958-1).
Votre rapporteur interprète cette démarche comme un premier pas vers une remise à plat du tarif. Il paraît indispensable que les pouvoirs publics engagent un travail de concertation avec les professionnels concernés, les magistrats consulaires et les autres acteurs de la procédure pour proposer une réforme consensuelle et respectueuse du droit des procédures collectives.
Le ministère de la justice a indiqué à votre rapporteur sa volonté de poursuivre cet effort en vue de rendre le tarif des mandataires judiciaires plus juste et plus vertueux . Les règles pourraient être simplifiées . En outre, le Gouvernement a annoncé son intention de définir un seuil au-delà duquel les rémunérations proportionnelles seraient supprimées et remplacées par une taxe fixée par le juge. De plus, la stricte séparation en deux missions distinctes de celle de commissaire à l'exécution du plan de cession, revenant essentiellement aux administrateurs, devrait permettre de mettre un terme à certaines rémunérations mal définies et source de nombreux excès. En contrepartie, la rémunération des administrateurs judiciaires devrait être valorisée lorsqu'un plan de sauvegarde ou de redressement aura été obtenu.
Le Gouvernement a fait des efforts significatifs pour accroître le contrôle de la tarification, ce dont votre commission ne peut que se féliciter.
Elle vous soumet un amendement pour déplacer le contenu de cet article pour le faire figurer au sein d'un chapitre dédié aux frais de procédure sous l'article L. 663-2 413 ( * ) .
En conséquence, elle vous propose de supprimer l'article 176 bis .
* 408 Rapport d'enquête sur l'organisation et le fonctionnement des tribunaux de commerce élaboré conjointement par l'inspection générale des finances et l'inspection générale des services judiciaires - juillet 1998.
* 409 Rapport n° 180 (Sénat, 2001-2002) de M. Jean-Jacques Hyest.
* 410 Débats du 21 février 2002, JO Sénat du 22 février 2002, p. 1757.
* 411 Une révision urgente du tarif rendait nécessaire le défraiement des procédures impécunieuses qui représentait environ 40 % des dossiers avant l'adoption de la loi de 2003.
* 412 Voir supra, le commentaire de l'article 20 du projet de loi.
* 413 Voir l'article additionnel après l'article 178.