Art. L. 462-5 du code de l'action sociale et des familles :
Préposé d'établissement hébergeant des majeurs désigné
en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs

L'article L. 462-5 nouveau du code de l'action sociale et des familles détermine les conditions de nomination des préposés d'un établissement hébergeant des majeurs.

Si la majeure partie des mesures de protection des majeurs est exercée par des membres de la famille ou des proches de la personne protégée ou par un professionnel extérieur à une institution médicale ou sociale, bon nombre d'entre elles sont également exercées dans le cadre d'établissements de santé ou d'établissements sociaux ou médico-sociaux.

Selon les chiffres fournis par le Gouvernement, 92.100 mesures ont été confiées en 2006 à des préposés d'établissements de santé, de soins, de cure et des établissements sociaux et médico-sociaux. Environ un tiers, soit à peu près 30.000 mesures, sont exercées par les établissements sociaux et médico-sociaux .

Mesures de protection prises en charge par un préposé

Estimations

Système actuel

Système réformé

2006

2009

2013

Etablissements sociaux et médico-sociaux

Nombre de préposés (nombre de personnes
et non en ETPT)

1 382

1 607

1 680

Nombre d'établissements disposant d'un préposé

921

1 071

1 120

Nombre de majeurs pris en charge
par des préposés d'établissement

27 633

33 656

42 763

Nombre d'établissements publics dont la capacité est supérieure à 80 places

1 521

1 530

1 600

Etablissements hospitaliers

Nombre de préposés (nombre de personnes
et non en ETPT)

992

1 680

1 733

Nombre d'établissements disposant d'un préposé

331

1120

1155

Nombre de majeurs pris en charge
par des préposés

64 478

78 531

99 780

Nombre d'établissements dont la capacité
est supérieure à 80 places

1 520

1 600

1 650

Total des mesures de gérances prises en charge par un préposé

92 111

112 188

142 543

* Le nombre d'établissements disposant d'un préposé peut être inférieur au nombre d'établissements publics ayant une capacité supérieure à 80 places en raison de la possibilité de créer des groupements (d'intérêt public, de coopération sanitaire ou de coopération sociale ou médico-sociale). Par ailleurs certains établissements peuvent n'avoir aucune mesure de protection.

Source DGAS

L'objet du présent article est donc de préciser les conditions de nomination et d'exercice, au sein de ces structures, des personnes qui seront amenées à exécuter les mesures prévues par le juge.

En réalité, le dispositif proposé par le Gouvernement ne vise pas à instaurer, en droit positif, la possibilité pour des établissements sociaux ou médico-sociaux de désigner des préposés en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs. Prenant acte du droit positif qui permet à ces établissements de désigner parmi leurs agents des gérants de tutelles, il tend à leur imposer de le faire.

Le principe d'une obligation de désignation

Contrairement au droit positif, le texte proposé impose la désignation , en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, des personnes qui seront chargées, au sein de l'établissement, d'exercer les mesures de protection ordonnées par le juge lorsque l'établissement concerné :

- relève du 6° ou du 7° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles , c'est-à-dire est soit un établissement accueillant des personnes âgées ou leur apportant à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale, soit un établissement accueillant des personnes adultes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, leur apportant à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou leur assurant un accompagnement médico-social en milieu ouvert ;

- héberge des personnes adultes handicapées ou des personnes âgées . Les établissements se contentant d'assurer un dispositif d'accompagnement ou d'accueil ne seront donc pas concernés par cette obligation ;

- dispose d'une capacité d'accueil supérieure à un seuil fixé par décret. Il s'agit ainsi de limiter l'obligation à des établissements présentant une certaine importance. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le seuil fixé serait de 80 lits. En deçà de ce seuil, l'établissement aura simplement la faculté de désigner un de ses agents en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs ;

- est public . Cette condition supplémentaire a été apportée par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse des députés. Il a en effet été jugé que l'obligation de désignation d'un mandataire par tout établissement, qu'il soit public ou privé, pourrait poser des difficultés pour les structures de taille moyenne, qui n'ont pas les moyens financiers de se conformer à cette exigence et craignent de se trouver placées en situation de conflit d'intérêts.

En conséquence de la rédaction adoptée par les députés, les établissements gérés par des associations ou des personnes morales de droit privé auront simplement la faculté de désigner un préposé . Pour autant, le maillage du territoire national devrait être bien assuré, les structures sous statut public étant relativement bien réparties sur l'ensemble de la France.

Votre commission estime que la désignation - a fortiori si elle est obligatoire- d'un préposé d'un établissement en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs soulève la question sensible de l'indépendance de la personne exerçant la charge tutélaire par rapport à la structure qui héberge le majeur protégé. En effet, une indépendance effective du tuteur ou du curateur est le meilleur moyen d'éviter une emprise totale de l'établissement sur la personne vulnérable. Or, il est des décisions qui doivent être prises avec une totale indépendance par rapport à l'établissement, telle par exemple la décision de modifier les conditions de prise en charge du majeur afin qu'il passe à une existence plus autonome.

Elle considère que l'existence d'un préposé d'établissement n'est pas nécessairement de nature à créer un conflit d'intérêts. Tout dépend en effet des conditions, internes à chaque établissement, dans lesquelles le préposé mandataire est amené à exercer les fonctions qu'il a reçues de l'autorité judiciaire.

Aussi votre commission vous propose-t-elle de conserver le compromis trouvé à l'Assemblée nationale. Elle vous soumettra néanmoins, à l'article L. 462-6 du code de l'action sociale et des familles, un dispositif spécifique destiné à garantir une indépendance effective du préposé dans l'exercice de sa mission de protection.

Les aménagements possibles

L'obligation de désignation fait l'objet de deux aménagements, laissés à l'appréciation des établissements tenus de désigner un de leurs agents en qualité de MJPM. Ils auront ainsi la possibilité, s'ils le souhaitent, d' « externaliser » l'exercice de la fonction de MJPM .

D'une part, ces établissements pourront confier l'exercice des mesures de protection à un service mandataire judiciaire à la protection des majeurs avec lequel ils ont un lien organique . Il pourra s'agir d'un service géré :

- soit par l'établissement lui-même ;

- soit par un syndicat inter-hospitalier, un groupement d'intérêt public, un groupement de coopération sanitaire ou un groupement de coopération sociale ou médico-sociale dont il est membre.

Les conditions de fonctionnement de ce service seront fixées par décret. Votre commission vous soumet un amendement destiné à supprimer cette précision inutile, le Gouvernement ayant toujours compétence pour prendre des décrets simples d'application de la loi.

D'autre part, ces établissements pourront également recourir, par voie de convention , aux prestations d'un autre établissement. A l'initiative de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a, avec l'avis favorable du Gouvernement, précisé que cette convention pourra intervenir avec un autre établissement disposant :

- soit d'un service mandataire à la protection des majeurs ;

- soit d'un ou de plusieurs agents désignés en qualité de mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Le texte adopté prévoit que ces personnes devront avoir été déclarées auprès du représentant de l'État, ce qui paraît néanmoins aller de soi.

Votre commission approuve la souplesse ainsi introduite par ces possibilités de délégation, qui permettront le regroupement des compétences autour de services mandataires plus étoffés et mieux à même de remplir leur mission de protection.

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