2. La phase contentieuse : la création en 2007 d'un recours spécial

Comme toutes les décisions administratives, les décisions de non admission au titre de l'asile sont susceptibles d'un recours devant la juridiction administrative.

La loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile a profondément modifié les modalités de ce recours.

Jusqu'alors, les décisions de refus d'entrée au titre de l'asile pouvaient faire l'objet d'un recours dans les conditions de droit commun. Trois voies étaient ainsi ouvertes : le recours en excès de pouvoir, le « référé suspension » ou le « référé liberté » 10 ( * ) .

En pratique, les requérants usaient de préférence du « référé liberté ». L'article L. 521-2 du code de justice administrative dispose que « saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. » 11 ( * )

Toutefois, ces différentes voies de droit comportaient une limite importante : elles n'avaient pas d'effet suspensif.

Raison pour laquelle la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), dans son arrêt Gebremedhin c/France rendu le 26 avril 2007, a jugé que l'absence d'un recours juridictionnel de plein droit suspensif ouvert aux étrangers dont la demande d'asile à la frontière a été refusée méconnaissait les articles 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) et 13 (droit à un recours effectif) de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En conséquence, la loi du 20 novembre 2007 a inséré un nouvel article L. 213-9 dans le CESEDA créant un recours en annulation de plein droit suspensif.

Cette procédure particulière 12 ( * ) est inspirée de celle applicable aux arrêtés de reconduite à la frontière notifiés par voie administrative à l'étranger en situation irrégulière interpellé par les forces de l'ordre 13 ( * ) .

L'étranger peut dans un délai de quarante-huit heures 14 ( * ) demander l'annulation de la décision. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné par lui statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine. Pendant le délai de recours et jusqu'à ce que le juge ait statué, aucune mesure d'éloignement ne peut être prise.

L'étranger peut demander le concours d'un interprète. L'audience se déroule sans commissaire du gouvernement comme pour le référé liberté.

L'audience peut se tenir par visio-conférence, sauf si l'étranger s'y oppose. Si cette possibilité est déjà ouverte devant le juge des libertés et de la détention pour les audiences de prolongation du maintien en zone d'attente ou en rétention administrative, c'est en revanche le seul cas dans lequel le juge administratif peut y avoir recours en matière de contentieux des étrangers.

Le jugement est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours, mais ce dernier n'est pas suspensif.

* 10 Cette dernière possibilité n'existe que depuis la loi n° 2000-597 du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives. Dans son arrêt Mme Hyacinthe du 12 janvier 2001, le Conseil d'Etat a jugé que l'exercice du droit d'asile figurait parmi les libertés fondamentales permettant la mise en oeuvre du référé-liberté.

* 11 Les décisions prises en application du « référé liberté » sont susceptibles d'appel -non suspensif- devant le conseil d'Etat dans les quinze jours suivant la notification ; il se prononce dans un délai de quarante-huit heures.

* 12 Le projet de loi initial tendait à créer un « référé liberté » suspensif. Cette solution avait néanmoins plusieurs inconvénients. En premier lieu, le requérant devait faire valoir l'urgence et l'atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale .En deuxième lieu, en référé, le juge prend les mesures d'urgence nécessaires en suspendant la décision contestée mais il ne se prononce pas au fond, ce qui laisse ouverte la possibilité d'un recours en annulation. Or, les tribunaux administratifs ont déjà des difficultés importantes pour absorber le contentieux.

* 13 Article L. 512-2 du CESEDA.

* 14 A l'initiative de votre commission des lois, ce délai a été porté de 24 à 48 heures.

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