2. Les difficultés pratiques de mise en oeuvre

Votre commission des lois avait déjà eu l'occasion de relever les trois principaux obstacles auxquels se heurtait la mise en oeuvre de l'injonction de soins : la pénurie des psychiatres dans le secteur public, la faiblesse du nombre de spécialistes formés à la prise en charge thérapeutique de la délinquance sexuelle, l'insuffisance du nombre de médecins traitants 16 ( * ) . Ces constats ont gardé leur actualité. M. Etienne Blanc, dans le rapport de l'Assemblée nationale consacré à la prise en charge sanitaire, psychologique et psychiatrique des personnes majeures placées sous main de justice 17 ( * ) , constatait que 40 tribunaux de grande instance et 17 départements étaient dépourvus en 2009 de médecins coordonnateurs. Le Premier président Lamanda observait en particulier que « pour les quatre départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, les juges de l'application des peines ne peuvent faire appel qu'à une vingtaine de médecins coordonnateurs, ce qui n'autorise le suivi que d'environ quatre cent mesures. Ces médecins, souvent experts judiciaires, assurent leur rôle de coordonnateur, en sus de leur activité de praticien et de leurs missions d'expertise, laquelle leur interdit, au demeurant, d'être coordonnateur dans le même dossier ». Il concluait d'une manière générale que « les injonctions de soins ne peuvent être mises en place, de manière satisfaisantes, dans plus de la moitié des juridictions ».

Depuis 2008, plusieurs mesures ont visé néanmoins à surmonter ces difficultés :

- en matière de formation , l'arrêté du 24 mars 2009 a prévu à l'intention des médecins, autres que les psychiatres, pouvant être inscrits sur la liste des médecins coordonnateurs, une formation de cent heures, permettant d'acquérir à la fois des connaissances sur le contexte juridique de l'injonction de soins et la thérapeutique des auteurs de violences, notamment sexuelles ;

- sur le plan du recrutement , le décret du 4 novembre 2008 relatif à la surveillance de sûreté et à la rétention de sûreté a permis aux médecins coordonnateurs non psychiatres en exercice de poursuivre leur activité pendant les cinq années suivant la publication du décret ; en outre, les médecins psychiatres qui n'exercent plus peuvent demander leur inscription sur la liste des médecins coordonnateurs sans autre condition spécifique que celle d'avoir exercé en qualité de spécialiste pendant au moins cinq ans ;

- le nombre maximal de personnes suivies a été fixé à vingt par l'arrêté du 25 janvier 2008 contre quinze sous le régime antérieur ;

- la rémunération , sous la forme d'une indemnité forfaitaire, a été portée de 400 à 700 euros par année civile pour chaque personne suivie avec pour contrepartie l'exigence d'au moins une consultation par trimestre (arrêté du 25 janvier 2008).

Il apparaît encore trop tôt pour mesurer l'effet de ces différentes dispositions.

* 16 Rapport d'information n° 420 (2005-2006) sur les mesures de sûretés concernant les personnes dangereuses, MM. Philippe Goujon et Charles Gautier.

* 17 Rapport d'information n° 1811 (2008-2009), Juger et soigner : lutter contre les pathologies et addictions à l'origine de la récidive, MM. Jean-Luc Warsmann, président, et Etienne Blanc, rapporteur, au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale.

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