Article 9 (art. L. 125 du code électoral et tableaux n° 1 et 5 annexés au code électoral) - Adaptation des dispositions relatives aux députés et aux sénateurs de Mayotte

L'article 9 du projet de loi modifie, sans y apporter de changement de fond, les dispositions du code électoral relatives au nombre de députés et de sénateurs élus à Mayotte.

Plus précisément, il s'agit de modifier les tableaux annexés au code électoral afin que les lignes relatives à Mayotte dans le tableau n° 1 (qui fixe la répartition territoriale des députés) et dans le tableau n° 5 (qui détermine la répartition des sièges de sénateurs entre les séries) soient insérées au sein des lignes consacrées aux départements d'outre-mer, et non plus de celles qui concernent les collectivités d'outre-mer.

Votre commission a adopté l'article 9 sans modification .

Article 10 (art. 4, 38, 40 et 42-1 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte) - Prorogation jusqu'au 31 décembre 2013 de certaines ressources propres aux communes de Mayotte et création du fonds mahorais de développement économique, social et culturel

L'article 10 du projet de loi modifie la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, dont plusieurs articles demeurent en vigueur.

En premier lieu, il rétablit l'article 4 relatif aux compétences du préfet de Mayotte , abrogé par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer. Dans sa nouvelle rédaction, cet article dispose qu'est applicable de plein droit à Mayotte l'article 34 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et aux libertés des communes, des départements et des régions. Il s'agit ainsi de procéder à l'application à Mayotte du droit commun en matière de compétence des préfets de département, parallèlement à l'application du droit commun dans le domaine des collectivités territoriales.

Développant le contenu de l'article 72 de la Constitution, l'article 34 de la loi du 2 mars 1982 dispose notamment :

« Le préfet de département, représentant de l'Etat dans le département, est nommé par décret en conseil des ministres. Il représente chacun des membres du Gouvernement.

« Il a la charge des intérêts nationaux, du respect des lois, de l'ordre public et, dans les conditions fixées par la loi, assure le contrôle administratif du département, des communes et de leurs établissements publics qui ont leur siège dans le département.

« Il dirige les services de l'Etat dans le département sous réserve des exceptions limitativement énumérées par un décret en Conseil d'Etat.

« Sous réserve des exceptions prévues par décret, le préfet de département est seul habilité à engager l'Etat envers les communes, le département ou leurs groupements.

« Sur sa demande, le préfet de département reçoit des maires et du président du conseil général les informations nécessaires à l'exercice de ses attributions.

« Sur leur demande, le président du conseil général et les maires reçoivent du préfet de département les informations nécessaires à l'exercice de leurs attributions.

« Le représentant de l'Etat dans le département peut, dans le cas où il n'y aurait pas été pourvu par le président du conseil général, et après une mise en demeure restée sans résultat, exercer les attributions dévolues au président du conseil général en matière de police en vertu des dispositions de l'article 25 de la présente loi. »

Cette mention expresse de l'application à Mayotte de l'article 34 de la loi du 2 mars 1982 - qui aurait également pu figurer directement dans la loi de 1982 - correspond à la règle retenue pour rendre applicable à Mayotte le droit commun en vigueur : une mention expresse est jugée nécessaire.

Par amendement , votre commission a retiré de la nouvelle rédaction de l'article 4 de la loi de 2001 les mots « de plein droit », qui sont juridiquement inutiles quand bien même ils auraient une portée politique. Elle a également opéré quelques ajustements rédactionnels.

En deuxième lieu, l'article 10 proroge le versement aux communes de Mayotte de certaines ressources particulières instituées par la loi de 2001, jusqu'au 31 décembre 2013.

En effet, l'article 38 de la loi de 2001 a institué une dotation de rattrapage et de premier équipement, comportant une part de fonctionnement et une part d'investissement, dans des conditions prévues par chaque loi de finances, destinée à accompagner la montée en puissance des prérogatives des communes mahoraises. Cette dotation est versée aux communes via le fonds intercommunal de péréquation, maintenu jusqu'en 2014 par le projet de loi organique. L'article 40 de la loi de 2001 a institué quant à lui des centimes additionnels à l'impôt sur le revenu des personnes physiques, à un taux fixe de 5 % du principal de l'impôt. Prélevés sur les personnes physiques résidant à Mayotte, ces centimes additionnels profitent également aux communes via le fonds intercommunal de péréquation et ne leur sont pas directement attribués en fonction de la résidence fiscale des contribuables assujettis.

Ces ressources dérogatoires, la seconde fiscale et la première non, sont nécessaires, du fait de l'absence de fiscalité communale de droit commun, pour répondre aux besoins de financement des communes mahoraises.

Ces deux ressources avaient été initialement instituées par la loi de 2001 pour durer jusqu'en 2007. Compte tenu de l'allongement des délais du processus de départementalisation et des retards accumulés en matière fiscale, la loi n° 2007-224 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer a préféré prévoir, sans mentionner de date particulière, que ces ressources existeraient « jusqu'à l'accession de Mayotte au régime de département et région d'outre-mer défini à l'article 73 de la Constitution ». Cette dernière étape devait permettre de supprimer ces ressources spécifiques du fait de l'entrée en vigueur de la fiscalité locale de droit commun. Toutefois, en raison des retards persistants dans la préparation matérielle et juridique de la mise en place de cette fiscalité locale, son entrée en vigueur est repoussée au 1 er janvier 2014. Par conséquent, l'article 10 du projet de loi prévoit la prorogation de ces ressources jusqu'au fin 2013.

Votre commission approuve cette prorogation et insiste pour que la mise en place de la fiscalité locale de droit commun puisse effectivement avoir lieu dès le 1 er janvier 2014, toutes les opérations préparatoires pouvant être achevées dans les trois prochaines années. Selon votre rapporteur, l'extinction programmée de ces ressources particulières, si elle a bien lieu en 2014, pose à nouveau la question de l'application à Mayotte, à terme, de la fiscalité locale spécifique aux départements et régions d'outre-mer. Votre commission a déjà prévu l'application notamment de la taxe spéciale sur les carburants en 2014, ainsi que, par amendement après l'article 10, de l'octroi de mer.

En troisième lieu, l'article 10 substitue, au plus tard au 31 décembre 2013, un fonds mahorais de développement économique, social et culturel au fonds mahorais de développement institué par la loi de 2001.

La mise en place de ce nouveau fonds confirme un engagement de l'Etat contenu dans le Pacte pour la départementalisation de Mayotte, présenté le 8 janvier 2009, deux mois avant la consultation de la population mahoraise organisée le 29 mars 2009. L'objet de ce fonds est précisément circonscrit par le projet de loi, qui insère à cet effet un article 42-1 dans la loi de 2001 : il s'agit de subventionner des projets publics ou privés pour « le développement des secteurs économiques créateurs d'emplois, des structures d'accueil et d'hébergement et des actions dans les domaines sociaux et de la solidarité, du logement social et pour la résorption de l'habitat insalubre ». Le champ d'application de ce fonds est ainsi relativement large, tout en étant précis dans les objectifs poursuivis et adapté aux réalités locales. Il permettra ainsi de soutenir des projets d'investissements tant privés que publics, mais également des opérations de développement social et de construction de logements.

Les personnes éligibles aux subventions du fonds sont, d'une part, les personnes morales de droit privé et, d'autre part, les collectivités territoriales de Mayotte (communes et Département de Mayotte), leurs établissements publics et les autres personnes morales de droit public (chambres consulaires par exemple). Le projet de loi prévoit ainsi que le fonds est divisé en deux sections. Ainsi, du côté du secteur privé, seront principalement concernées les associations et les sociétés commerciales, à l'exclusion des entrepreneurs individuels de toute nature, qui ne disposent pas de la personnalité morale. Les subventions seront attribuées par projet et non pour financer des dépenses de structure et de fonctionnement, selon des modalités fixées par décret.

Les subventions du fonds sont attribuées par le préfet de Mayotte, après avis d'un comité de gestion. Pour les projets privés, le comité de gestion comporte des représentants de l'Etat, des représentants du conseil économique, social et culturel et des personnalités qualifiées, mais pas de représentants du Département de Mayotte. Votre commission a procédé à une coordination pour substituer aux représentants du conseil économique, social et culturel des représentants des deux conseils consultatifs locaux, dont elle souhaite le maintien. Elle a aussi souhaité que le Département de Mayotte soit représenté dans ce comité de gestion pour les projets privés, en raison des compétences régionales nouvelles qu'il exercera en matière de développement économique. Pour les projets publics, le comité de gestion comporte, outre des représentants de l'Etat et des personnalités qualifiées, des représentants des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des autres personnes morales de droit public. Considérant l'expression « collectivités territoriales de Mayotte » trop imprécise pour caractériser la composition du comité de gestion, votre commission a souhaité que celui-ci comprenne explicitement des représentants du Département de Mayotte et des communes de Mayotte. Enfin, les deux comités de gestion sont présidés par le préfet, solution cohérente avec la pratique en matière de fonds locaux spécifiques outre-mer 52 ( * ) . Les conditions exactes de composition seront définies par décret.

A titre de comparaison, financé par des concours de l'Etat, de la collectivité départementale de Mayotte et de la Communauté européenne, le fonds mahorais de développement était d'un usage moins souple. Il visait à octroyer des subventions complémentaires aux financements prévus dans des conventions entre l'Etat et la collectivité départementale de Mayotte en vue de mettre en oeuvre des projets publics ou privés d'aménagement et d'équipement ou de soutien aux entreprises. Ce fonds ne comportait pas de comité de gestion mais faisait l'objet d'un rapport annuel au président du conseil général. Dans le nouveau fonds, le Département de Mayotte serait présent dans les comités de gestion des deux sections, bénéficiant ainsi d'une information immédiate.

Le projet de loi prévoit enfin, selon une formulation un peu lourde, que le fonds entre en activité à une date fixée par décret et qui ne devra pas être postérieure au 31 décembre 2013. Votre rapporteur déplore ces renvois multiples au décret, qui ne contribuent pas à la lisibilité de la loi et ne sont guère utiles juridiquement compte tenu du pouvoir réglementaire général d'application des lois dont dispose le Gouvernement.

Par coordination, le projet de loi abroge l'article 43 de la loi de 2001 relatif au fonds mahorais de développement, à compter du jour de la mise en place du nouveau fonds.

Le projet de loi ne précise pas l'origine des dotations du fonds. On peut dès lors considérer que l'Etat y pourvoira, dans les conditions prévues par la loi de finances chaque année. La durée du fonds est illimitée.

Auditionnée par votre commission, Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer, a indiqué que ce fonds serait doté de trente millions sur trois ans, dix millions étant d'ores et déjà inscrits en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2011.

Ce fonds mahorais de développement économique, social et culturel suscite d'importantes attentes de la part des élus mahorais. Ainsi, dans l'avis favorable rendu le 19 juillet dernier par le conseil général de Mayotte sur les deux projets de loi organique et ordinaire, la mise en place rapide de ce fonds, dès la création du Département de Mayotte en 2011, constituait la seconde réserve énoncée, la première consistant à demander le maintien des deux conseils consultatifs locaux actuels.

Le Gouvernement s'est déjà engagé publiquement pour une mise en place effective de ce fonds dès l'année 2011, dans les mois suivants l'érection de Mayotte en collectivité unique de l'article 73. Aussi, outre une clarification rédactionnelle, votre commission a-t-elle adopté un amendement présenté par son rapporteur consistant à prévoir une mise en place du fonds au plus tard au 31 décembre 2011, et non au 31 décembre 2013, veille de l'entrée en vigueur annoncée pour la fiscalité locale de droit commun.

Enfin, votre commission a poursuivi le « toilettage » de la loi de 2001 engagé par l'article 10 du projet de loi, en procédant à quelques modifications.

Votre commission a adopté un amendement abrogeant l'article 10 de la loi de 2001, relatif au comptable des communes de Mayotte et de la collectivité départementale de Mayotte. En effet, l'article 1 er du projet de loi rend applicables à Mayotte les dispositions générales du code relatives au comptable des collectivités (articles L. 1617-1 et suivants), tandis que, d'une part, l'article L. 2572-67 prévoit expressément l'application aux communes de Mayotte des articles L. 2343-1 et L. 2343-2 relatifs au comptable de la commune et, d'autre part, l'article 4 du projet de loi rend applicable au Département de Mayotte l'article L. 3342-1 relatif au comptable du département.

Par ailleurs, les articles 34 à 37 attribuent aux communes de Mayotte ou à leurs groupements des compétences particulières en matière de ports de plaisance, d'enseignement primaire, d'organisation des transports urbains et, en lien avec le conseil général, de gestion de déchets. Votre rapporteur estime que ces dispositions devront, pour celles d'entre elles qui le justifient, être prises en compte dans la mise à jour des dispositions du code concernant les communes de Mayotte, à laquelle aurait procédé l'article 2 du projet de loi.

Outre les articles d'application temporaire ou périmée, demeureront en vigueur dans la loi de 2001 les principales dispositions suivantes :

- les articles 34 à 37 relatifs aux communes mentionnés ci-dessus ;

- jusqu'au 31 décembre 2003, l'article 38 relatif à la dotation de rattrapage et de premier équipement ;

- jusqu'au 31 décembre 2003, l'article 40 relatif aux centimes additionnels à l'impôt sur le revenu des personnes physiques ;

- l'article 44 permettant la création d'un groupement d'intérêt public pour exercer des activités d'information, d'étude, d'expertise, de prospection et de conseil contribuant au développement économique. Cette disposition devait permettre, conformément à l'Accord sur l'avenir de Mayotte de 2000, la mise en place d'une agence de développement économique, qui ne semble jamais avoir été constituée sous cette forme ;

- l'article 45 relatif à l'organisation des chambres consulaires propre à Mayotte. Pour se rapprocher du droit commun, cette organisation a prévu la mise en place de trois chambres à la place de l'unique et ancienne chambre professionnelle de Mayotte : chambre de commerce et d'industrie, chambre de métiers et de l'artisanat, chambre de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture. En matière consulaire, le droit commun devra aussi trouver à s'appliquer directement, via vraisemblablement l'ordonnance devant modifier le code de commerce, prévue à l'article 27 du projet de loi, le cas échéant avec les adaptations nécessaires telles que la dénomination et les compétences données à la chambre d'agriculture, qui tiennent compte des réalités locales. A cet égard, il convient de noter que la chambre d'agriculture de Mayotte est la seule de France à tenir effectivement le registre de l'agriculture prévu depuis 1988 par l'article L. 311-2 du code rural, sous la forme adaptée du registre de l'agriculture, de la pêche et l'aquaculture de Mayotte (RAPAM) ;

- l'article 64-1 relatif aux agents publics locaux de Mayotte. Votre rapporteur souligne que la mise à niveau juridique de la fonction publique locale constitue également un enjeu de la départementalisation, compte tenu de la complexité de la situation actuelle, dans laquelle de nombreux agents du conseil général sont mis à disposition des services relevant des compétences de l'Etat, et réciproquement, au point que l'étude d'impact jointe au projet de loi évoque la nécessaire « désimbrication des personnels » et la fin du système des mises à disposition, dérogatoire au droit commun de la mise à disposition dans la fonction publique. Cette mise à niveau suppose également d'achever le processus d'intégration des agents locaux dans les cadres généraux d'emploi de la fonction publique, notamment territoriale ;

- l'article 65, à lire parallèlement à l'article 64-1, qui prévoit la prise en charge ou le remboursement par l'Etat des dépenses des services relevant de sa compétence et le système des mises à disposition ;

- l'article 76 qui traite des mesures d'exécution des actes antérieurs à 1976 encore en vigueur de l'ancienne assemblée territoriale ou de l'ancienne chambre des députés des Comores.

Votre commission a adopté l'article 10 ainsi modifié .


* 52 Par exemple, créé par le décret n° 90-442 du 29 mai 1990 après les ravages du cyclone Hugo, le fonds interministériel pour la reconstruction de la Guadeloupe relevait de la compétence du préfet et ne comportait pas de comité de gestion associant les élus.

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