C. DES CAS COMPLEXES À GÉRER DANS NOMBRE DE DÉPARTEMENTS

La révision en cours des SDCI implique, dans certains territoires, des bouleversements majeurs dans la recomposition des intercommunalités.

Un grand nombre de propositions dessinées par les préfets, si elles n'étaient pas modifiées par les CDCI, présage une mise en place délicate à conduire des nouvelles intercommunalités.

En effet, la lecture des projets préfectoraux de SDCI permet de recenser des opérations complexes, qu'il s'agisse du nombre des communes regroupées au sein d'un même EPCI à fiscalité propre ou du nombre de fusions créant la nouvelle communauté.

1. La multiplication des communautés « XXL »

Cette dénomination d'intercommunalités « XXL » a été retenue par l'Assemblée des communautés de France (AdCF) pour les intercommunalités constituées de 50 communes et plus.

Ces grands groupements préexistaient à la révision en cours des schémas. L'AdCF en a décompté 46 au 1 er janvier 2015. Le plus vaste, la communauté de communes de la Haute-Saintonge (Charente-Maritime), compte 131 communes-membres 6 ( * ) .

Les « XXL » sont cependant appelées à se multiplier en nombre et en effectif communal, certains projets de schéma prévoyant des EPCI à fiscalité propre de plus de 200 communes. Certes, ces derniers - de l'ordre de quelques unités - sont l'exception mais en revanche une quinzaine de projets présentent des communautés de plus de 100 communes.

Quelques exemples d'intercommunalités « XXL »
prévues dans les projets préfectoraux

Ain : 2 de 54 et 75 communes ; Aisne : 2 à 51 et 101 communes ; Ardèche : 2 à 72 et 73 communes ; Ardennes : 1 à 59 communes ; Ariège : 4 à 56 (2 fois), 95 et 98 communes ; Aveyron : 1 à 79 communes ; Calvados : 5 à 56, 68, 74, 106 et 108 communes ; Charente : 4 à 56 (deux fois), 63 et 82 communes ; Corrèze : 3 à 57, 65 et 69 communes ; Côtes-d'Armor : 2 à 51 et 60 communes ; Creuse : 2 à 73 et 93 communes ; Drôme : 2 à 65 et 67 communes ; Eure-et-Loir : 2 à 57 et 58 communes ; Gard : 1 à 75 communes ; Haute-Garonne : 4 à 55, 58, 77 et 105 communes ; Gers : 1 à 76 communes ; Gironde : 2 à 50 et 65 communes ; Indre-et-Loire : 2 à 67 et 72 communes ; Jura : 1 à 141 communes ; Loire : 3 à 61, 81 et 89 communes ; Haute-Loire : 3 à 60, 91 et 106 communes ; Manche : 4 à 85, 110, 163 et 210 communes ; Marne : 5 à 61, 67 (2 fois), 71 et 79 communes ; Meurthe-et-Moselle : 1 à 55 communes ; Meuse : 2 à 101 et 107 communes ; Oise : 1 à 61 communes ; Pas-de-Calais : 3 à 55, 104 et 205 7 ( * ) communes ; Puy-de-Dôme : 2 à 58 et 92 communes ; Pyrénées-Atlantiques : 1 à 158 communes ; Hautes-Pyrénées : 5 à 50, 54, 58, 70 et 72 communes ; Haut-Rhin : 1 à 79 communes ; Seine-Maritime : 6 à 54, 61, 62, 65, 77 et 81 communes ; Somme : 5 à 56, 62, 70, 71, et 120 communes ; Vosges : 5 à 62, 70, 75, 77 et 80 communes.

Pour sa part, l'AdCF 8 ( * ) a recensé 142 propositions de communautés « XXL » -prévues par plus de la moitié des projets préfectoraux- « pour beaucoup en zone à dominante rurale, mais pas exclusivement », dont 92 projets rassemblant entre 50 et 74 communes et 50 au-dessus de cet effectif. Selon son recensement, 502 intercommunalités sont en conséquence concernées, « soit plus de 10 000 communes et presque 8,4 millions d'habitants », relevant de 466 communautés de communes, 34 communautés d'agglomération et 2 communautés urbaines.

La taille de ces intercommunalités soulève en premier lieu la question de leur gouvernance. Quelle peut être la part prise à la conduite de la collectivité par les plus petites communes au sein d'un organe délibérant nécessairement pléthorique, chaque commune disposant de droit d'un siège, quelle que soit sa population ?

Par ailleurs, ces intercommunalités XXL sont proposées indépendamment de la situation démographique de leur département d'implantation. Les projets de schéma de la Creuse, du Gers, de la Meuse en prévoient pour une densité départementale respective de 21,8, 30,3 et 31 habitants au kilomètre carré. Se pose inévitablement la question de la gestion d'une collectivité dotée de compétences de proximité sur un vaste territoire. C'est notamment le cas d'une fusion projetée dans le Cantal qui s'étendrait sur 1 366,34 km 2 ou d'une nouvelle agglomération d'une superficie de 1 236,83 km 2 dans l'Ain.

2. Les difficultés engendrées par les fusions

Les projets préfectoraux de SDCI privilégient majoritairement le choix d'élargir les périmètres intercommunaux par la fusion bloc par bloc.

Or, créer un nouvel EPCI à fiscalité propre par le regroupement de communautés préexistantes est une opération délicate qu'il convient de préparer minutieusement pour assurer sa réussite.

Quatre chantiers sont principalement concernés : l'harmonisation des compétences précédemment exercées par les établissements fusionnés ; le rapprochement de leur fiscalité, d'autant plus ardu quand les anciennes communautés avait choisi des systèmes différents - fiscalité professionnelle unique ou fiscalité additionnelle - ; le choix de la répartition des sièges entre les communes membres au sein du nouvel établissement ; la réorganisation des services par leur unification et la gestion des personnels qui y étaient affectés, qu'il s'agisse de leur nouvelle affectation ou de leurs conditions d'emploi.

L'AdCF, dans une note de mars 2016 établie d'après une enquête qu'elle a menée sur les fusions réalisées au cours de la dernière décennie, indique la nécessité d'un délai moyen de préparation de 15 mois : « Dans le cas où la fusion a été effectuée en moins d'un an, il apparaît que de nombreux éléments de difficultés n'ont pas pu être pleinement anticipés ».

Dans la mise en oeuvre des SDCI s'ils sont appliqués en l'état, l'exercice sera d'autant plus ardu que de nombreux projets prévoient des fusions multiples, de trois communautés et plus. On peut citer, à titre d'exemples, des fusions de cinq communautés (105 communes) en Haute-Garonne, six (65 communes) en Corrèze, 7 (77 communes) dans l'Ain, 8 (95 communes) dans l'Ariège, sans compter le projet de communauté basque rassemblant les dix EPCI à fiscalité propre du périmètre (Pyrénées-Atlantiques) ou la réorganisation proposée pour le Cotentin regroupant 11 communautés de communes auxquelles s'ajouterait la commune nouvelle de Cherbourg-en-Cotentin.


* 6 Cf. étude commune AdCF, association des directeurs généraux des communautés et Caisse des dépôts et consignations - « Grandes communautés : de l'exception à la généralisation » (2016).

* 7 Dans le schéma finalement arrêté, ce périmètre a été scindé en trois EPCI à fiscalité propre par une décision conjointe du préfet et de la CDCI.

* 8 Cf. Communautés XXL : s'adapter au changement d'échelle (janvier 2016).

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