N° 381

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 mars 2020

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi (procédure accélérée) d' urgence pour faire face à l' épidémie de Covid - 19
et sur le projet de loi organique (procédure accélérée) d' urgence pour faire face
à l' épidémie de Covid-19 ,

Par M. Philippe BAS,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François-Noël Buffet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Di Folco, MM. Jacques Bigot, André Reichardt, Mme Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, M. Loïc Hervé, Mme Marie Mercier , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Vincent Segouin, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Sénat :

376 , 377 , 379 , 380 , 382 et 383 (2019-2020)

L'ESSENTIEL

Réunie le 19 mars 2020, la commission des lois a adopté, sur le rapport de Philippe Bas (Les Républicains - Manche), le projet de loi n° 376 (2019-2020) et le projet de loi organique n° 377 (2019-2020) d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 .

Au regard de la dégradation de la situation épidémiologique, ces textes poursuivent trois principaux objectifs :

- reporter la tenue du second tour des élections municipales et communautaires, qui devait se dérouler le 22 mars 2020 ;

- donner une base légale aux mesures de confinement de la population en créant un « état d'urgence sanitaire » ;

- habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour prendre des mesures d'urgence économique et d'adaptation contre l'épidémie.

La commission des lois a pleinement adhéré à l'objectif de ce projet de loi, dont les dispositions revêtent un caractère à la fois exceptionnel et transitoire . Elle adopté 37 amendements sur le projet de loi afin d'assurer sa sécurité juridique et de prévoir de nouvelles mesures d'adaptation face au virus Covid-19 .

Les huit principaux apports de la commission des lois

1. Assurer la sincérité du second tour des élections municipales , en fixant une date cohérente pour le dépôt des candidatures et en prolongeant le mandat des actuels conseillers municipaux lorsque le conseil municipal n'a pas été élu au complet dès le premier tour.

2. Permettre au Gouvernement d'organiser les élections municipales à une date différente en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie , en fonction des conditions sanitaires de chacun de ces territoires.

3. Prévoir des précautions particulières pour la première réunion des conseils municipaux afin de préserver la santé des élus et des agents de la commune.

4. Faciliter le fonctionnement des assemblées délibérantes des collectivités territoriales, par exemple en autorisant le recours aux téléconférences et en assouplissant le calendrier de la procédure budgétaire.

5. Garantir la continuité du fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre d'ici au second tour des élections municipales et communautaires et proroger le mandat des membres des structures de coopération comme les syndicats de communes ou les syndicats mixtes.

6. Mieux encadrer l'état d'urgence sanitaire afin de s'assurer de la proportionnalité des mesures prises et de la protection des droits et libertés constitutionnellement garantis.

7 . Donner un caractère temporaire au dispositif de l'état d'urgence sanitaire , qui pourrait ensuite être pérennisé par le Parlement.

8. Renforcer les pouvoirs de contrôle du Parlement pour suivre l'application de la présente loi mais également les conséquences sanitaires de l'épidémie de Covid-19.

I. UNE CRISE ÉPIDÉMIOLOGIQUE MAJEURE

Apparue en Chine en novembre 2019, l'épidémie de Covid-19 a déjà touché 194 213 personnes à travers le monde, pour 7 869 décès 1 ( * ) . Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'Europe constitue le nouvel épicentre de l'épidémie , avec une augmentation exponentielle du nombre de cas en Italie, en Espagne et en France.

Notre pays est en guerre face au Covid-19, qui constitue « la plus grave crise sanitaire qu'ait connu la France depuis un siècle » 2 ( * ) . 9 134 contaminations ont été recensées sur le territoire national, pour 244 décès 3 ( * ) .

Comme le souligne le professeur Catherine Leport, infectiologue, « cette infection est à dominante respiratoire avec des signes d'affections respiratoires hautes ou basses, les formes basses étant les plus graves car exposant à la survenue d'un syndrome de détresse respiratoire aiguë, c'est-à-dire une défaillance des fonctions respiratoires » 4 ( * ) .

Ce virus nécessite la mobilisation générale des soignants , dont l'engagement de chaque instant doit être salué, et, plus globalement, de tous les Français, qui doivent respecter les « gestes barrières » recommandés par les autorités sanitaires .

Il nécessite également de prendre des mesures fortes de confinement pour freiner la propagation de l'épidémie.

Les principales mesures de lutte contre le Covid-19

Le 14 mars 2020, la lutte contre l'épidémie est entrée dans son stade 3 . En conséquence, les commerces « non essentiels » ont fermé leurs portes et les rassemblements de plus de 100 personnes ont été interdits 5 ( * ) .

Lors de son intervention télévisée du 16 mars 2020, le Président de la République a annoncé un durcissement des conditions de confinement : à compter du 17 mars, 12 heures et jusqu'au 31 mars minimum, les déplacements hors du domicile sont interdits 6 ( * ) .

Seules cinq exceptions sont prévues : trajets professionnels insusceptibles d'être différés, achat de fournitures de première nécessité ou nécessaires à l'activité professionnelle, déplacements pour motif de santé, déplacements pour un « motif familial impérieux » et déplacements « brefs, à proximité du domicile, liés à l'activité physique individuelle des personnes [...] et aux besoins des animaux de compagnie ». Les personnes concernées doivent se munir d'une attestation justifiant leur déplacement, sous peine d'amende.

Cette situation appelle sans conteste des mesures d'urgence pour assurer une lutte sanitaire efficace et adapter, pendant la durée de l'épidémie, certains dispositifs juridiques de permettre à la nation de faire face aux conséquences de cette crise sur le fonctionnement des institutions locales ainsi que sur l'économie tout entière.


* 1 Source : Santé publique France, au 18 mars 2020.

* 2 Allocutions télévisées du Président de la République des 12 et 16 mars 2020.

* 3 Source : Santé publique France, au 18 mars 2020.

* 4 Compte rendu de la table ronde organisée par la commission des affaires sociales du Sénat sur les risques liés au Coronavirus Covid-19 et les mesures prises par les pouvoirs publics pour lutter contre sa transmission, 26 février 2020.

* 5 Arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19.

* 6 Décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19.

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