B. DES MODIFICATIONS TECHNIQUES NOMBREUSES APPORTÉES PAR LA COMMISSION DES LOIS EN PREMIÈRE LECTURE

1. La réécriture de l'article 1er de la proposition de loi relatif à la responsabilité civile et pénale du citoyen sauveteur

L'article premier de la proposition de loi tendait à créer un « statut de citoyen sauveteur » afin de mieux protéger les personnes venant en aide de manière volontaire et bénévole aux victimes d'une urgence vitale.

Compte tenu de l'état du droit positif, la commission des lois ne pouvait que constater l'absence de vide juridique s'agissant de la protection des sauveteurs occasionnels , tant pour l'indemnisation des dommages qu'ils subiraient que pour la sanction et l'indemnisation de ceux qu'ils pourraient causer par leur faute. En effet, le droit positif assure déjà largement la protection juridique du sauveteur occasionnel et permet, en théorie, d'écarter sa responsabilité tant pénale que civile du fait d'un dommage qu'il aurait causé lors de son intervention.

En outre, le régime jurisprudentiel des collaborateurs occasionnels ou bénévoles du service public permet d'assurer l'indemnisation, par la puissance publique, de la victime d'un dommage, qu'elle soit sauveteur ou sauvée.

Pour autant, la commission des lois avait jugé pertinent de consolider dans la loi le régime de responsabilité applicable aux personnes intervenant comme des sauveteurs occasionnels et bénévoles. En effet, une telle démarche permettrait de garantir une meilleure accessibilité du droit pour les personnes mises en cause et d'éviter d'éventuelles difficultés de qualification juridique pour le juge.

À l'initiative d'un amendement de son rapporteur 10 ( * ) , la commission des lois avait donc adopté une rédaction alternative de l'article premier. Elle tendait à redéfinir les conditions d'intervention des sauveteurs en visant l'assistance à une personne en situation de péril grave et imminent, et non plus celle d' « urgence vitale » , ou de « détresse cardio-respiratoire » , qui s'apparentaient davantage à des notions médicales et qui semblaient trop restrictives.

Cette nouvelle rédaction tendait également à supprimer des dispositions qui auraient imposé au sauveteur occasionnel de pratiquer un massage cardiaque, considérant qu'elles pourraient les décourager d'agir.

Enfin, elle visait à remplacer l'expression de « citoyen sauveteur » par celle de « sauveteur occasionnel et bénévole » , qui semblait plus appropriée au concours apporté à l'exercice d'un service public.

En second lieu, la commission des lois avait souhaité maintenir la référence à la notion de collaborateur occasionnel et bénévole du service public . Elle avait considéré que s'y référer dans la loi n'était pas une nouveauté et aurait le mérite de garantir l'indemnisation par la puissance publique, tant du dommage causé par le collaborateur que du dommage qu'il aurait subi.

Même si les cas dans lesquels sa responsabilité peut être engagée sont rares, la commission des lois avait maintenu le principe de l'atténuation de la responsabilité pénale du sauveteur occasionnel et bénévole , dans l'hypothèse où ce sauveteur commettrait un délit non intentionnel lors de son intervention.

Enfin, elle avait souhaité apporter au régime spécial de responsabilité civile qui serait créé au bénéfice du sauveteur occasionnel, une correction de nature à l'exonérer pour tous les préjudices qu'il pourrait causer lors de son intervention, sauf faute lourde ou intentionnelle de sa part, et pas seulement pour ceux causés à la personne secourue elle-même.

En séance publique, le rapporteur avait souhaité tenir compte d'une partie des remarques soulevées par un amendement déposé par le groupe La République en Marche à l'article premier 11 ( * ) . Un amendement de séance adopté à son initiative 12 ( * ) avait réintroduit l'obligation d'appeler les secours et de prendre les premières dispositions pour toute personne et non pas pour les seuls sauveteurs occasionnels. Toutefois, cet amendement écartait la possibilité d'élargir le champ de la proposition de loi à tous les acteurs de la sécurité civile, comme le prévoyait l'amendement du groupe La République en Marche puisque l'objectif poursuivi par la proposition de loi est bien de consacrer un régime spécial pour les seuls sauveteurs occasionnels.

2. Les autres modifications essentiellement techniques opérées en première lecture
a) La suppression de dispositions de nature réglementaire

L'article 2 de la proposition transmise par l'Assemblée nationale visait à modifier les dispositions du code de l'éducation relatives à la sensibilisation des élèves en apportant des précisons sur la continuité et le programme de ces formations. Il apparaissait néanmoins que ces précisons relevaient du domaine du règlement et qu'elles sont, d'ailleurs, pleinement satisfaites par les règlements actuellement en vigueur . À l'initiative du rapporteur, la commission des lois avait donc supprimé l'article en conséquence 13 ( * ) .

Un raisonnement similaire avait été appliqué à l'article 4, qui prévoyait d'inscrire dans la partie législative du code du travail un droit à la formation aux premiers secours pour tout salarié, alors que la partie réglementaire de ce code prévoit déjà avec précision les cas dans lesquels cette formation est obligatoire 14 ( * ) .

Les dispositions législatives que tendait à introduire l'article 2 bis étaient, elles aussi, inutiles au regard des règlements applicables . Cet article tendait à ajouter le secourisme dans le champ des formations dispensées par les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (INSPÉ) alors que les futurs enseignants doivent déjà obligatoirement détenir une attestation de secourisme 15 ( * ) .

L'article 3 tendait à modifier les dispositions applicables à l'examen du permis de conduire afin de préciser que les notions élémentaires de premiers secours sur lesquelles porte l'évaluation faisaient « notamment » état de l'utilité du massage cardiaque et du défibrillateur automatisé externe. Devant l'absence de portée normative induite par l'utilisation de cet adverbe, la commission des lois avait également décidé de supprimer cet article 16 ( * ) .

L'article 5 bis de la proposition de loi visait à préciser, dans le code du sport, que « les programmes de formation des professions des activités physiques et sportives comprennent un enseignement sur le sport pour les handicapés » . La commission des lois avait supprimé ces dispositions au motif qu'elles n'étaient pas du domaine de la loi et qu'elles étaient déjà satisfaites par les règlements en vigueur.

L'article 6 de la proposition de loi avait pour objet de créer une journée nationale de lutte contre l'arrêt cardiaque et de sensibilisation aux gestes qui sauvent. La commission des lois du Sénat avait toutefois constaté que la création d'une journée nationale ne relève pas du domaine de la loi fixé par l'article 34 de la Constitution et avait supprimé l'article en conséquence 17 ( * ) .

Enfin, la commission des lois s'était tenue à la position habituelle du Sénat et avait supprimé l'article 12 bis de la proposition de loi, prévoyant la demande de rapports au Gouvernement 18 ( * ) .

b) Des clarifications techniques

La commission des lois avait supprimé une partie des dispositions de l'article 5 de la proposition de loi afin d'exclure les entraineurs sportifs professionnels des bénéficiaires de la formation en secourisme que tendait à créer cet article. Elle avait en revanche conservé les dispositions tendant à créer une obligation de formation au secourisme à destination des juges et arbitres par les fédérations agréées . Le rapporteur avait considéré qu'il s'agirait « d'une véritable avancée » 19 ( * ) puisque le contenu de ces formations est jusqu'à présent fixé par ces fédérations et que certaines n'y incluent pas nécessairement une sensibilisation au secourisme.

La proposition de loi tendait également à établir une clarification relative aux acteurs de la formation au secourisme. Ainsi, son article 7 tendait à consolider, dans la partie législative du code de la sécurité intérieure, la liste des personnes autorisées à accomplir les actes de sensibilisation au secourisme. Il tendait à reprendre les dispositions préexistantes applicables aux associations de sécurité civile agréées et à donner un fondement législatif aux habilitations que le pouvoir réglementaire attribue déjà par arrêté à certains organismes de sécurité civile.

La commission des lois avait conservé ces dispositions et avait inclus dans cette liste certains services des établissements de santé listés par décret, car beaucoup d'entre eux détiennent les compétences nécessaires pour assurer une formation au secourisme 20 ( * ) .

Enfin, l'article 11 de la proposition de loi tendait à renforcer les sanctions pénales en cas de vol ou de dégradation de défibrillateurs cardiaques. La commission des lois avait estimé ce renforcement légitime compte tenu de l'objectif recherché de punir plus sévèrement les auteurs d'infractions pouvant conduire indirectement au décès d'une personne, faute de matériel de premier secours disponible. Toutefois, elle avait constaté que la notion d' « objets nécessaires à la sécurité et à la santé des personnes » que visait l'article était insuffisamment précise et permettrait d'aggraver les sanctions pénales pour le vol ou la dégradation de nombreux biens autres que les seuls défibrillateurs automatiques.

Elle avait donc restreint la nature des objets dont le vol ou le vandalisme serait puni plus sévèrement au « matériel destiné à prodiguer des soins de premier secours » 21 ( * ) .


* 10 Amendement COM-2.

* 11 Amendement n° 2.

* 12 Amendement n° 4.

* 13 Amendement de suppression COM-7.

* 14 Amendement de suppression COM-10.

* 15 Amendement de suppression COM-8.

* 16 Amendement de suppression COM-9.

* 17 Amendement de suppression COM-13.

* 18 Amendement de suppression COM-14.

* 19 Intervention en commission du 16 octobre 2019.

* 20 Amendement COM- 15 rect.

* 21 Amendement COM- 4.

Page mise à jour le

Partager cette page