CHAPITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ORGANISATION ET AU FONCTIONNEMENT DES POLICES MUNICIPALES

Article 4
Création d'une police municipale à Paris

L'article 4 de la proposition de loi tend à créer une police municipale à Paris. Il fait suite à l'adoption de la loi relative au statut de Paris , qui a étendu les compétences du maire de Paris en matière de police, réduisant d'autant les spécificités parisiennes par rapport aux compétences des maires des autres communes. Les agents de police municipale à Paris disposeraient des mêmes prérogatives que les agents de police municipale de droit commun.

Les statuts particuliers de ce nouveau corps d'emploi seraient définis par décret en Conseil d'État, car l'alignement des missions des agents de la Ville de Paris sur celles des agents de police municipale ne saurait se faire sans un alignement des conditions de recrutement et de formation de ces agents. La commission a toutefois précisé que la décision de création de cette police municipale relèvera d'une délibération du Conseil de Paris.

La commission a également décidé de l'abrogation de l'article du code de la sécurité intérieure relatif aux contrôleurs et aux agents de surveillance de Paris à compter du 1 er janvier 2026, ces agents ayant vocation à intégrer les futurs corps de la police municipale parisienne.

Paris a de tout temps été traversé par deux logiques contradictoires : tenir compte des spécificités politiques et historiques de cette ville, siège des pouvoirs publics constitutionnels, et rapprocher son régime juridique de celui applicable aux autres collectivités territoriales. Cette tension se retrouve dans la répartition actuelle des pouvoirs de police sur le territoire parisien.

Contrairement aux autres maires de France, le maire de Paris ne dispose pas d'un pouvoir de police administrative générale. L'autorité de police de droit commun est, sur le territoire parisien, le préfet de police de Paris. Certaines attributions en matière de police administrative ont toutefois été progressivement transférées de la préfecture de police à la mairie de Paris. Désormais, le maire de Paris dispose de compétences d'attribution en matière de police, limitativement énumérées mais qui vont en s'accroissant.

Poursuivant cette évolution, l'article 4 de la proposition de loi permet la création d'une police municipale parisienne , dont les statuts seraient définis par décret en Conseil d'État.

1. Une progressive normalisation de la répartition des compétences en matière de police à Paris

1.1 Le préfet de police de Paris : autorité de police de droit commun

La Ville de Paris est « soumise à un statut particulier en raison de sa qualité de siège des pouvoirs publics » 45 ( * ) . Contrairement aux autres maires de France, le maire de Paris ne détient ainsi pas les pouvoirs et attributions de police administrative. Ceux-ci sont attribués au préfet de police, qui est l'autorité de police de droit commun .

La détention de l'exclusivité des pouvoirs de police par un agent de l'État à Paris s'explique par le fait que Paris est la capitale de la France et, à ce titre, siège des pouvoirs publics constitutionnels. Elle constitue également la plus grande agglomération du pays, dans laquelle une population nombreuse se déplace chaque jour. Elle est enfin le lieu d'accueil de nombreuses manifestations d'ampleur, tant culturelles que sportives ou festives. Le préfet de police de Paris, créé par la loi du 28 pluviôse an VIII, est l'héritier du lieutenant général de police de Paris de l'Ancien régime, créé par un édit royal du 15 mars 1667.

Les compétences du préfet de police de Paris sont définies par l'arrêté du 12 messidor an VIII , toujours en vigueur. L'article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales dispose en effet que « dans la Ville de Paris, le préfet de police exerce les pouvoirs et attributions qui lui sont conférés par l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII qui détermine les fonctions du préfet de police à Paris et par les textes qui l'ont modifié ainsi que par les articles L. 2512-7 46 ( * ) , L. 2512-14 47 ( * ) et L. 2512-17 48 ( * ) ». Selon cet arrêté, les compétences du préfet de police sont larges. Sa section II, intitulée « Police générale », lui donne compétence en matière de passeports, cartes de sûreté, permissions de séjourner à Paris, mendicité, vagabondage, police des prisons, maisons publiques, attroupements, police de la librairie et imprimerie, police des théâtres, vente de poudres et salpêtres, émigrés, cultes, port d'armes, recherche des déserteurs et fêtes républicaines. Sa section III, intitulée « Police municipale », lui donne quant à elle compétence en matière de petite voirie, liberté et sûreté de la voie publique, salubrité de la cité, incendies, débordements, accidents sur la rivière, police de la Bourse et du Change, sûreté du Commerce, taxes et mercuriales, libre circulation des subsistances, patentes, marchandises prohibées, surveillance des places et lieux publics, approvisionnements, et protection et préservation des monuments et édifices publics.

On le voit, les compétences du préfet de police de Paris sont larges et leur formulation parfois obsolète. Pour résumer, il peut être considéré que le préfet de police de Paris a une compétence de police administrative générale , c'est-à-dire qu'il est en charge de garantir la sécurité, la tranquillité et la salubrité publiques.

1.2 Les compétences croissantes du maire de Paris en matière de police

Si le préfet de police demeure l'autorité de police de droit commun, un mouvement d'accroissement des compétences du maire de Paris en matière de police s'est initié depuis 1986, au détriment de celles du préfet de police .

La loi n° 86-1308 du 29 décembre 1986 portant adaptation du régime administratif et financier de la Ville de Paris attribue pour la première fois quatre compétences en matière de police au maire de Paris. Il s'agit de la police de la salubrité sur la voie publique, du maintien du bon ordre dans les foires et marchés, de la délivrance des permis de stationnement et des permissions et concessions d'emplacement sur la voie publique, et de la police de la conservation dans les dépendances domaniales incorporées au domaine public de la Ville de Paris. En 2002, avec la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité , s'ajoutent à cette liste la police des bruits de voisinage et la police de la circulation et du stationnement, sous réserve de nombreuses exceptions au profit du préfet de police. Avec la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire , les mesures de sûreté sur les monuments funéraires exigées en cas de danger grave et imminent et la réparation ou la démolition des monuments funéraires menaçant ruine sont désormais prescrites par le maire de Paris.

C'est dans ce contexte qu'est intervenue la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain , portant une véritable réforme des compétences de police du maire de Paris, afin de rapprocher le régime applicable dans la capitale du régime de droit commun . Si le Sénat s'était à cette occasion prononcé en faveur de l'attribution au maire de Paris de la compétence de droit commun en matière de police administrative tout en maintenant une compétence d'attribution au préfet de police, ce n'est pas cette voie qui a alors été retenue in fine . Dans la continuité de ce qui avait été fait depuis 1986, la loi de 2017 a simplement poursuivi le processus d'élargissement progressif des compétences d'attribution confiées au maire de Paris.

Désormais, le maire de Paris dispose des compétences suivantes en matière de police 49 ( * ) :

- la salubrité sur la voie publique ;

- la salubrité des bâtiments à usage d'habitation et d'hébergement ;

- la police des immeubles menaçant ruine ;

- les bruits de voisinage ;

- la police des funérailles et des lieux de sépulture ;

- le maintien du bon ordre dans les foires et marchés ;

- la police des baignades ;

- la police de la conservation dans les dépendances domaniales incorporées au domaine public de la Ville de Paris ;

- la défense extérieure contre l'incendie ;

- une partie de la police de circulation et du stationnement 50 ( * ) .

1.3 Les personnels parisiens exerçant des missions en matière de sécurité

Pour assurer le respect de ses prérogatives en matière de police, la Ville de Paris ne dispose pas de police municipale à proprement parler . L'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure prévoit en effet que seuls peuvent exercer les fonctions d'agent de police municipale des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les statuts particuliers prévus à l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale . Ceci exclut de fait la Ville de Paris , dont les statuts particuliers des fonctionnaires sont, sauf exception, définies par délibération de la Ville de Paris 51 ( * ) .

Le code de la sécurité intérieure autorise cependant la Ville de Paris à disposer d'agents en charge d'un service de police 52 ( * ) . Ceux-ci sont agrées par le seul procureur de la République 53 ( * ) et assermentés, mais ne sont pas agents de police judiciaire adjoints et disposent de prérogatives moindres que les agents de police municipale. La Ville dispose également d' agents de surveillance à Paris ainsi que de contrôleurs de la préfecture de police - relevant initialement de la préfecture de police de Paris, ils ont aujourd'hui été transférés à la Ville de Paris ou placés sous l'autorité du maire -, qui peuvent également exercer des pouvoirs de police judiciaire.

Les effectifs de ces agents disposant de prérogatives judiciaires ont connu une forte augmentation à la suite de la loi n° 2017-257 précitée, qui a accompagné les nombreux transferts de compétences de transferts de personnels : les agents de la préfecture de police exerçant des missions désormais transférées au maire de Paris ont ainsi été placés sous son autorité et intégrés dans les différents services de la ville.

Aujourd'hui, la direction de la prévention, de la sécurité et de la protection de la Ville de Paris, créée en 2016, est composée d'environ 3 500 agents qui sont chargés de la lutte contre les incivilités. La Ville compte deux corps de catégorie B (les contrôleurs et les techniciens de tranquillité publique et de surveillance) et deux corps de catégorie C (inspecteurs de sécurité de la Ville de Paris et agents de surveillance de Paris) exerçant des missions dans le domaine de la sécurité.

2. La création d'une véritable police municipale à Paris

2.1 Les perspectives d'une police municipale à Paris

Alors que Paris est aujourd'hui, avec Brest, la seule grande agglomération à ne pas disposer de police municipale, l'article 4 de la proposition de loi entend lui en ouvrir la possibilité.

La volonté de créer une police municipale à Paris a été annoncée par la maire de Paris fin janvier 2019 , qui prendra la suite de la direction de la prévention, de la sécurité et de la protection, qui a succédé en 2016 à la direction de la prévention et de la protection créée en 1996.

Selon les informations recueillies par vos rapporteurs, l'objectif de la Ville de Paris est de porter l'effectif de la direction à 5 000 agents. Parmi les 3 500 agents déjà présents, 2 500 auraient vocation à intégrer la future police municipale 54 ( * ) . Les missions de cette dernière seraient au nombre de trois :

- lutter contre les incivilités dans l'espace public ;

- veiller à la tranquillité publique « au plus près du citoyen » ;

- assurer la régulation des déplacements et la protection des piétons et des cyclistes.

2.2 L'article 4 de la proposition de loi

L'article 4 de la proposition de loi permet la création d'une police municipale à Paris.

À cette fin, il propose d'intégrer au titre III du code de la sécurité intérieure, consacré aux dispositions particulières applicables à Paris, un chapitre III relatif aux agents de police municipale exerçant leurs fonctions sur le territoire de la Ville de Paris. Ces agents verraient le droit commun de la police municipale s'appliquer à eux, à deux exceptions près :

- alors que les policiers municipaux sont formés par le centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), les agents de police municipale bénéficieraient, à Paris, d'une formation initiale et continue assurée par la Ville de Paris . Le contenu et la durée de ces formations seraient équivalents à ceux des formations dispensés aux agents des cadres d'emplois de la police municipale. La Ville de Paris pourrait, pour ce faire, passer une convention avec l'État et plus spécifiquement avec les organismes en charge de la formation des policiers nationaux et des gendarmes ;

- les agents de police municipale pourraient, à Paris, constater par procès-verbal les contraventions aux arrêtés du préfet de police relatifs au bon ordre, à la salubrité, à la sécurité et à la tranquillité publiques , à l'exception des interdictions de manifestation sur la voie publique. Cette exception, qui aligne les prérogatives des agents de police municipale à Paris sur celles des agents de surveillance de Paris, permet d'adapter les pouvoirs de la police municipale à la répartition dérogatoire des compétences en matière de police administrative sur le territoire parisien.

L'article prévoit également que les agents intégrés au sein des corps des agents de police municipale lors de la constitution initiale de ces cadres pourraient être dispensés d'une partie de la formation initiale à raison de la reconnaissance de leurs expériences professionnelles antérieures . L'article prévoyait initialement la possibilité de dispenser ces agents de l'ensemble de cette formation. Par l'adoption d'un amendement de Pacôme Rupin, l'Assemblée nationale a supprimé en séance publique cette possibilité et indiqué que la formation est obligatoire lorsqu'elle concerne des matières qui n'ont pas pu être acquise au titre de la reconnaissance des expériences professionnelles antérieures. La rédaction de ces dispositions mérite toutefois d'être clarifiée.

Enfin, et c'est le principal point d'achoppement entre le Gouvernement et la Ville de Paris, l'article 4 prévoit que les statuts particuliers des corps de la police municipale à Paris sont définis par un décret en Conseil d'État pris après avis du Conseil de Paris , par dérogation aux dispositions régissant habituellement la fonction publique parisienne. Ces statuts devront notamment fixer les conditions d'intégration, de reclassement et de formation des fonctionnaires de la Ville de Paris exerçant des fonctions d'agent de police municipale.

2.3 Trouver un équilibre entre droit commun et spécificités parisiennes

La commission des lois approuve pleinement la création d'une police municipale à Paris . L'évolution du risque sécuritaire et la prégnance de la menace terroriste nécessitent en effet que les forces de sécurité non étatiques montent en puissance, à Paris peut-être plus qu'ailleurs. Au fil des lois de 2002, 2008, 2014 puis 2017, le législateur a engagé un recentrage des compétences de la préfecture de police sur l'ordre et la sécurité publics et un rapprochement des compétences de la maire de Paris de celles des autres maires, ce qui justifie d'autant plus cette création.

Des travaux préparatoires en vue de la création d'une police municipale à Paris ont ainsi été menés entre la Ville de Paris et le ministère de l'intérieur depuis le début de l'année 2019. Abordée lors de la discussion du projet de loi de transformation de la fonction publique , puis du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique , la création de cette police municipale est la conséquence logique des transferts de compétences en matière de police intervenus précédemment .

Les dérogations à l'application du droit commun de la police municipale ont semblé justifiées à la commission . Les arrêtés du préfet de police pour lesquels les futurs policiers municipaux pourront constater les infractions relèvent en effet de compétences exercées par le maire dans les autres communes de France. Concernant la formation, la Ville de Paris ne relève pas du CNFPT. Cela justifie que les formations des futurs agents de police municipale ne soient pas assurées par cet organisme. La Ville de Paris a indiqué souhaiter créer une école de police municipale chargée de former ses agents. La commission des lois souligne toutefois qu'il sera nécessaire que les formateurs de cette école soient en mesure d'émettre des réserves sur certains candidats au statut d'agent de police municipale, comme peut le faire le CNFPT.

Afin de mettre en place cette école, la Ville de Paris a engagé des travaux approfondis avec le CNFPT pour élaborer les référentiels de ses formations et pour former ses formateurs. La commission des lois, pour permettre la formalisation de ces nécessaires travaux en commun, a prévu par l'adoption d'un amendement COM-234 rectifié bis de ses rapporteurs que la Ville de Paris pourrait également conventionner avec le CNFPT pour la formation de ses policiers municipaux , afin que ce dernier puisse apporter son appui et son expertise à la ville.

De la même manière, la commission des lois n'a pas vu d'objection aux exemptions d'une partie de la formation aux agents de la ville de Paris exerçant aujourd'hui des missions proches de celle de la police municipale et qui souhaiteraient intégrer les corps de la police municipale à Paris. Sont plus particulièrement visés les agents appartenant aujourd'hui aux corps des agents de la Ville de Paris chargés d'un service de police 55 ( * ) et les contrôleurs de la préfecture de Police et agents de surveillance de Paris 56 ( * ) . Par l'adoption du même amendement COM-234 rectifié bis , elle a clarifié la rédaction des dispositions concernées .

Concernant les modalités de définition des statuts des corps particuliers de la police municipale, la commission des lois est convaincue que l'alignement des missions des agents de la Ville de Paris sur celles des agents de police municipale ne saurait se faire sans un alignement des conditions de recrutement et de formation de ces agents . Elle a donc accepté le principe d'une définition des statuts particuliers des corps de la police municipale parisienne par décret en Conseil d'État. Elle a toutefois précisé que, si la définition des statuts relèvera d'un décret, la création effective de la police municipale sera décidée par une délibération du Conseil de Paris (même amendement COM-234 rectifié bis ).

Afin d'intégrer les maires d'arrondissement à la définition des politiques municipales en matière de sécurité et de tranquillité publiques et de la doctrine d'emploi de la future police municipale, la commission des lois a décidé de la création d'un Conseil parisien de sécurité, rassemblant le maire de Paris, les maires d'arrondissement et le préfet de police de Paris. Celui-ci se réunirait une fois par trimestre et serait consulté sur les sujets de sécurité ou touchant à la police municipale parisienne (adoption de deux amendements identiques COM-21 rectifié quater de Catherine Dumas et COM-57 rectifié de Pierre Charon).

La commission des lois s'est enfin interrogée sur le maintien dans le code de la sécurité intérieure des dispositions relatives aux agents de la Ville de Paris chargés d'un service de police et aux agents de surveillance de Paris . Comme l'a indiqué la mairie de Paris aux rapporteurs, les agents de l'article L. 532-1 du code de la sécurité intérieure (contrôleurs et agents de surveillance de Paris), hérités de la Préfecture de Police en 2018, ont vocation à intégrer les futurs corps de la police municipale. Cet article deviendra inutile à l'extinction, à terme, des corps de contrôleurs et d'agents de surveillance de Paris. À l'inverse, les agents relevant de l'article L. 531-1 recouvrent à la fois des agents ayant vocation à devenir des agents de police municipale et d'autres agents, comme les agents d'accueil et de surveillance, qui n'ont pas vocation à intégrer la future police municipale. Par l'adoption du même amendement COM-234 rectifié bis de ses rapporteurs, la commission a donc décidé l'abrogation de l'article L. 532-1 du code de la sécurité intérieure au 1 er janvier 2026 .

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .

Article 4 bis (nouveau)
Maintien de l'autorisation de port d'armes des agents chargés d'une mission de sécurité et des agents de surveillance de Paris un an après leur intégration dans les corps de la police municipale à Paris

Introduit par la commission, à l'initiative d'Alain Richard, l'article 4 bis de la proposition de loi prévoit que l'autorisation de port d'armes des agents chargés d'une mission de sécurité et des agents de surveillance de Paris reste valable jusqu'à un an après leur intégration dans les corps de la police municipale à Paris, afin de laisser au préfet de police le temps de renouveler l'ensemble des autorisations de port d'armes.

Les nouveaux policiers municipaux parisiens seront soumis aux dispositions du code de la sécurité intérieure relatives aux polices municipales , à l'exception des dérogations prévues à l'article 4 de la proposition de loi 57 ( * ) . Ils seront donc soumis au régime de port d'armes des policiers municipaux, défini à l'article L. 511-5 de ce code. Celui-ci prévoit que les agents de police municipale peuvent être autorisés nominativement par le représentant de l'État dans le département, sur demande motivée du maire, à porter une arme, à condition qu'une convention de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l'État ait été conclue.

Certains des agents de la Ville de Paris ayant vocation à intégrer la future police municipale parisienne bénéficient toutefois d'ores et déjà d'une autorisation de port d'armes . En application de l'arrêté du 25 juillet 2012 relatif à la détention et au port d'armes par certains agents de la ville de Paris chargés d'un service de police , les techniciens de tranquillité publique et surveillance, spécialité sécurité et protection, et les inspecteurs de sécurité de la ville de Paris, agréés par le procureur de la République et assermentés, sont autorisés à détenir et à porter les armes suivantes :

- matraque, bâton de défense de type « tonfa », matraque et bâton de défense de type « tonfa » télescopiques classés dans la 6 ème catégorie ;

- générateurs d'aérosol incapacitant ou lacrymogène classés dans la 6 ème catégorie.

Afin que cette autorisation de port d'armes soit maintenue lorsque ces agents intègreront la nouvelle police municipale de Paris, une disposition législative est nécessaire.

C'est l'objet de l' article 4 bis , introduit à l'initiative de la commission par l'adoption de l' amendement COM-210 d'Alain Richard. Celui-ci prévoit que l'autorisation de port d'armes des agents chargés d'une mission de sécurité et des agents de surveillance de Paris reste valable jusqu'à la délivrance d'autorisation individuelle de port d'armes par le préfet de police, et au maximum un an après leur intégration dans les corps de la police municipale à Paris . Cela permettra au préfet de police de Paris de bénéficier d'environ un an pour renouveler l'ensemble des autorisations de port d'armes de la police municipale parisienne.

La commission a adopté l'article 4 bis ainsi rédigé .

Article 5
Facilitation de la mutualisation des polices municipales entre plusieurs communes

L'article 5 de la proposition de loi vise à faciliter la mutualisation des polices municipales entre plusieurs communes. Actuellement limitée aux communes formant un ensemble d'un seul tenant de moins de 80 000 habitants, la possibilité de disposer d'un ou de plusieurs agents de police municipale en commun serait étendue à l'ensemble des communes, sans condition de seuil. L'article ouvrirait également aux communes la possibilité de se regrouper dans le cadre d'un syndicat intercommunal à vocation unique pour recruter des agents de police municipale.

La commission a adopté cet article, en rendant possible le maintien d'une convention de mutualisation entre plusieurs communes dans le cas où le critère de continuité territoriale ne serait plus rempli à la suite du retrait d'une commune membre, et en élargissant la possibilité de se regrouper au sein d'un syndicat intercommunal à vocation unique à l'ensemble des syndicats de communes.

La mutualisation des agents de police municipale entre plusieurs communes peut prendre deux formes distinctes. Dans un premier cas, les agents de police municipale sont recrutés par l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et mis à disposition des communes membres. Dans un second cas, des communes peuvent décider de se regrouper pour mutualiser leurs agents de police municipale, qui exercent alors tour à tour leurs compétences sur le territoire de chacune des communes.

L'article 5 de la proposition de loi vise à faciliter la mutualisation des polices municipales dans ce second cas de figure . Actuellement limitée aux communes formant un ensemble d'un seul tenant de moins de 80 000 habitants, la possibilité de disposer d'un ou de plusieurs agents de police municipale en commun, compétents sur le territoire de chacune des communes, serait étendue à l'ensemble des communes sans condition de seuil. L'article ouvrirait également aux communes la possibilité de se regrouper dans le cadre d'un syndicat intercommunal à vocation unique pour recruter des agents de police municipale .

1. La mutualisation des agents de police municipale entre plusieurs communes : des possibilités encore faiblement utilisées

Le code de la sécurité intérieure prévoit aujourd'hui deux dispositifs de mutualisation des polices municipales.

1.1 Le recrutement d'agents de police municipale dans un cadre intercommunal

L'article L. 512-2 du code de la sécurité intérieure permet à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de recruter, après accord des communes dans les conditions habituelles de majorité en matière d'intercommunalité, un ou plusieurs agents de police municipale afin de les mettre à disposition de l'ensemble des communes membres.

Avant la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique - dite « Engagement et proximité » -, il ne pouvait être procédé à ce recrutement qu'à la demande des maires de plusieurs communes membres de l'EPCI. À l'initiative de la commission des lois du Sénat, il a été décidé de conférer au président de l'EPCI un pouvoir d'initiative partagée avec les maires pour le recrutement d'agents de police municipale au niveau intercommunal.

Les agents de police municipale ainsi recrutés sont placés sous l'autorité hiérarchique du président de l'EPCI , qui en est l'autorité gestionnaire. Ils exercent leurs fonctions :

- soit sous l'autorité fonctionnelle du maire de la commune sur le territoire de laquelle ils exercent leurs missions ;

- soit sous l'autorité du président de l'EPCI lorsqu'ils sont chargés d'assurer l'exécution de ses décisions 58 ( * ) .

Une convention conclue entre l'établissement public de coopération intercommunale et chaque commune concernée fixe les modalités d'organisation et de financement de la mise à disposition des agents et de leurs équipements.

Les agents de police municipale recrutés par un EPCI à fiscalité propre doivent, comme ceux recrutés par une commune, être agréés et assermentés par le représentant de l'État dans le département et le procureur de la République territorialement compétent 59 ( * ) . Ils peuvent être autorisés par le représentant de l'État dans le département à porter une arme si l'ensemble des maires des communes auxquelles ils sont affectés le demande 60 ( * ) .

Il convient enfin de souligner qu'une commune appartenant à un EPCI à fiscalité propre qui a recruté des agents de police municipale peut malgré tout décider de recruter par elle-même ses propres agents de police municipale. Ces deux recrutements ne sont pas exclusifs.

1.2 La mutualisation d'agents de police municipale par des communes formant un ensemble d'un seul tenant de moins de 80 000 habitants

L'article L. 512-1 du code de la sécurité intérieure permet quant à lui aux communes de moins de 80 000 habitants formant un ensemble d'un seul tenant de mutualiser des agents de police municipale par le biais d'une convention. Il s'agit donc d'une mutualisation en dehors du cadre de l'EPCI à fiscalité propre 61 ( * ) .

Les agents de police municipale ainsi mutualisés sont de plein droit placés sous l'autorité fonctionnelle du maire de la commune sur le territoire de laquelle ils sont amenés à exercer leurs fonctions.

Les conditions de mutualisation sont définies par une convention conclue entre l'ensemble des communes concernées. Celle-ci précise notamment les modalités d'organisation et de financement de la mise en commun des agents et de leurs équipements.

1.3 Un faible recours aux mutualisations de police municipale

Face à la montée du sentiment d'insécurité, la mutualisation des polices municipales représente un enjeu majeur pour, comme le soulignaient déjà les sénateurs François Pillet et René Vandierendonck en 2012, « lutter contre la progression des inégalités territoriales devant la sécurité » 62 ( * ) .

Force est de constater toutefois qu'en pratique, les communes recourant à la mutualisation de leur police municipale sont peu nombreuses . Selon les chiffres de la délégation ministérielle aux partenariats, aux stratégies et aux innovations de sécurité, seule une quarantaine de dispositifs de mutualisation des agents de police municipale existait en 2018. Ce chiffre recouvre tant la mutualisation dans le cadre d'un EPCI à fiscalité propre, que celle réalisée par les communes d'un seul tenant.

La mutualisation des polices municipales présente toutefois de nombreux avantages pour les communes comme pour les citoyens. Ces avantages, comme le rappelaient Mathieu Darnaud et Françoise Gatel dans leur rapport sur le projet de loi Engagement et proximité , sont tant « d'ordre financier , en permettant notamment des économies d'échelle importantes pour les acquisitions de matériels ou de technologies utilisées par les agents de police, [que d'ordre] opérationnel , [car la mutualisation] permet de fluidifier les échanges et la coordination avec les autres acteurs locaux de sécurité, qu'il s'agisse du préfet, des forces de la police nationale et de la gendarmerie nationale ou encore du parquet, qui se retrouvent confrontés à un nombre plus réduit d'interlocuteurs ».

2. Encourager la mutualisation des polices municipales en adaptant les dispositifs aux réalités du terrain

L'article 5 de la proposition de loi faciliterait la mutualisation des polices municipales entre plusieurs communes . Actuellement limitée aux communes formant un ensemble d'un seul tenant de moins de 80 000 habitants, la possibilité de disposer d'un ou de plusieurs agents de police municipale en commun, compétents sur le territoire de chacune des communes, serait étendue à l'ensemble des communes, sans condition de seuil . La commission des lois, par l'adoption de l' amendement COM-235 rectifié de ses rapporteurs, a rendu possible le maintien de la mutualisation entre plusieurs communes par convention si, à la suite du retrait d'une ou plusieurs communes de la convention, elles ne forment plus un ensemble d'un seul tenant .

L'Assemblée nationale a également, à l'initiative de Valérie Six, ouvert la possibilité pour les communes de se regrouper dans le cadre d'un syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) pour recruter des agents de police municipale , avec deux avis favorables des rapporteurs et du Gouvernement. Le Gouvernement a toutefois indiqué qu'il était nécessaire que ce dispositif soit retravaillé avant d'être adopté.

Par le même amendement COM-235 rectifié , la commission des lois a donc entièrement réécrit le dispositif de mutualisation du recrutement des agents de police municipale, en l'élargissant à l'ensemble des syndicats de communes . Les communes pourraient ainsi se regrouper à l'échelle d'un syndicat de communes pour recruter en commun des agents de police municipale. Les statuts du syndicat fixeraient les modalités d'organisation et de financement de la mise à disposition des agents et de leurs équipements, et seraient transmis au préfet. Le syndicat de communes et les communes membres devraient se doter d'une convention de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l'État. Les agents ainsi recrutés seraient placés sous l'autorité fonctionnelle du maire lors de l'exercice de leurs fonctions sur le territoire d'une commune. Enfin, les communes ne pourraient pas cumuler les différents types de mutualisation.

La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié .

Article 6 (supprimé)
Durée minimale d'engagement des agents de police municipale

L'article 6 de la proposition de loi tend à instituer un engagement de servir pendant une durée minimale la commune ou l'établissement public qui prend en charge la formation d'un agent de police municipale. Le policier municipal qui romprait son engagement devrait rembourser à la collectivité le montant du traitement net et des indemnités perçues pendant la formation.

La commission a considéré que ce dispositif était excessivement rigide, et risquait de pénaliser les communes qui peinent déjà à attirer des agents de police municipale. Le risque financier reposerait par ailleurs directement sur l'agent, alors que les communes disposent déjà de possibilités leur permettant de se voir rembourser la formation exposée pour l'agent. La commission a donc supprimé l'article.

Il existe aujourd'hui une forte concurrence entre les communes pour attirer des agents de police municipale. Afin de fidéliser les agents recrutés, l'article 6 de la proposition de loi prévoit de créer un engagement de servir la commune ou l'établissement public qui prend en charge la formation de l'agent . Concrètement, les agents de police municipale souscriraient un engagement de servir la commune ou l'établissement public ayant pris en charge la formation pour une durée allant de trois à cinq ans à compter de la date de leur titularisation. Le policier municipal qui romprait son engagement devrait rembourser à la collectivité le montant du traitement net et des indemnités perçues pendant sa formation.

1. Des possibilités existantes de remboursement de la rémunération et des formations complémentaires des agents de police municipale en cas de mutation moins de trois ans après la titularisation

Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport sur les polices municipales, « les collectivités rencontrent des difficultés de recrutement qui entrainent, ensuite, des problèmes de fidélisation des agents. Une concurrence entre collectivités s'est installée, alimentée notamment par la disparité des régimes indemnitaires » 63 ( * ) .

Or, la durée et le coût de la formation initiale des agents de la fonction publique territoriale représentent un investissement non négligeable pour les collectivités qui décident de l'embauche d'un nouvel agent, notamment d'un agent de police municipale.

C'est la raison pour laquelle le droit de la fonction publique territoriale prévoit qu'en cas de mutation de l'agent dans les trois ans suivant sa titularisation, la commune ou l'EPCI d'accueil doit verser à la commune d'origine une indemnité correspondant au montant de la rémunération perçue par l'agent pendant sa formation initiale et au coût des éventuelles formations complémentaires. S'il n'y a pas d'accord sur le montant de l'indemnité, la collectivité territoriale ou l'établissement public d'accueil rembourse la totalité des dépenses engagées par la collectivité territoriale ou l'établissement public d'origine 64 ( * ) .

2. Faire peser le risque financier sur l'agent : un dangereux précédent

Afin de responsabiliser l'agent de police municipale, l'article 6 de la proposition de loi impose un engagement de servir la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) qui a pris en charge sa formation . Concrètement, les agents de police municipale souscriraient un engagement de servir la commune ou l'EPCI ayant pris en charge la formation pour une durée allant de trois à cinq ans à compter de la date de titularisation. Le policier municipal qui romprait son engagement devrait rembourser à la collectivité le montant du traitement net et des indemnités perçues pendant la formation. Il ne pourrait être dispensé de tout ou partie de ce remboursement qu'en cas de motif impérieux - notamment tiré de son état de santé ou de nécessités d'ordre familial. Cette dispense, ainsi que la part de salaire sur laquelle elle porterait, serait à la discrétion du maire ou du président de l'EPCI.

La commission a considéré que le dispositif proposé était excessivement rigide . Alors que de nombreux maires font état de difficultés de fidélisation des policiers municipaux, notamment pour les communes les moins attractives, il risquerait d'accroitre leurs difficultés. Il n'y a en effet pas de pénurie d'offre sur le marché des policiers municipaux. Selon les informations recueillies par les rapporteurs, plus de 700 policiers municipaux sont inscrits sur les listes d'aptitude et sont en attente d'un poste. Parmi eux, 450 sont en recherche depuis plus d'un an . Une obligation de servir la commune pendant une durée longue combinée à un risque financier pesant sur les agents risquerait d'accroître la tendance de ces derniers à attendre une meilleure opportunité.

Il n'existe par ailleurs aujourd'hui aucun cadre d'emplois qui prévoit une durée minimale d'engagement à l'issue de la formation initiale . L'article 6 créerait donc un précédent, qui risquerait d'être étendu à d'autres cadres d'emplois de la fonction publique territoriale.

La commission a donc estimé que le droit en vigueur était équilibré et combinait de manière satisfaisante possibilités de remboursement pour les communes et établissement public d'origine et liberté des agents publics. Elle a donc adopté l' amendement de suppression COM-236 de ses rapporteurs.

La commission a supprimé l'article 6.

Article 6 bis A
Mise en commun temporaire d'agents de police municipale, au-delà du niveau intercommunal, pour répondre à une catastrophe naturelle ou technologique

Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture, par l'adoption de deux amendements de Alain Perea en séance publique avec deux avis favorables de la commission et du Gouvernement, l'article 6 bis A de la proposition de loi vise à permettre la mise en commun temporaire d'agents de police municipale au-delà du niveau intercommunal pour faire face à une catastrophe naturelle ou technologique.

Approuvant cet article dans son principe, la commission a précisé qu'à l'instar des mises en commun temporaires d'agents de police municipale déjà prévues par l'article L. 512-3 du code de la sécurité intérieure, les agents de police mis en commun pour faire face à une catastrophe naturelle ou technologique ne pourront intervenir qu'en matière de police administrative.

L'article 6 bis A de la proposition de loi prévoit un régime spécifique de mise en commun des agents de police pour faire face à une catastrophe naturelle ou technologique, permettant une anticipation et une mise en commun sur un périmètre géographique plus large que celui actuellement prévu.

1. La mise en commun temporaire d'agents de police municipale pour faire face à un évènement exceptionnel

Dès 1999, il a été donné aux communes limitrophes ou appartenant à une même agglomération la possibilité de mettre en commun leurs moyens en matière de police municipale lors d'évènements exceptionnels.

L'article L. 512-3 du code de la sécurité intérieure permet ainsi une mise en commun temporaire des agents de police municipale dans trois cas limitativement énumérés :

- lors d'une manifestation exceptionnelle, notamment à caractère culturel, récréatif ou sportif . La circulaire relative à l'application de la loi n° 99-91 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales précise que cette hypothèse « vise notamment le cas de manifestations sportives, de concerts ou de spectacles divers, à l'occasion desquels des mesures de surveillance de la voie publique, des enceintes sportives ou du lieu de la manifestation peuvent être nécessaires. Il s'agit d'hypothèses exceptionnelles : les manifestations traditionnelles, habituellement gérées par la commune dans de bonnes conditions, ne devraient pas, en règle générale, nécessiter la mise en commun de moyens » 65 ( * ) ;

- à l'occasion d'un afflux important de population ;

- en cas de catastrophe naturelle .

Les communes autorisées à mutualiser de manière temporaire doivent être limitrophes ou appartenir à une même agglomération . L'utilisation en commun des agents de police municipale est autorisée par arrêté du préfet , qui en fixe les conditions et les modalités au vu des propositions des maires des communes concernées.

La mise en commun temporaire d'agents de police municipale ne peut s'exercer qu'en matière de police administrative . En vertu de l'article 21-1 du code de procédure pénale en effet, les agents de police municipale n'exercent leurs fonctions de police judiciaire que dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions habituelles, c'est-à-dire dans leur commune.

2. Créer un régime assoupli pour les catastrophes naturelles ou technologiques, afin d'assurer une réaction rapide

À l'initiative d'Alain Perea, l'Assemblée nationale a créé en séance publique un régime spécifique de mise en commun temporaire d'agents de police municipale pour les catastrophes naturelles ou technologiques . Par dérogation aux exigences exposées ci-avant :

- les communes autorisées à mettre en commun leurs agents ne devraient plus appartenir à une même agglomération, mais pourraient appartenir à un même département ou à un département limitrophe ;

- les communes pourraient conclure une convention cadre préalable avec le représentant de l'État , ce qui leur permettrait d'autoriser la mise en commun de leurs forces de police municipale sans attendre la prise d'un arrêté préfectoral.

La commission des lois a considéré que la conclusion de conventions cadres préalables entre les communes et l'État était susceptible d'accélérer la réactivité des communes dès qu'une catastrophe naturelle ou technologique se déclarerait. Elle s'est toutefois interrogée sur le cadre géographique proposé, qui lui a semblé particulièrement large.

L'objectif poursuivi, qui est de permettre aux communes disposant d'une police municipale conséquente d'intervenir en cas de catastrophe naturelle ou technologique dans leur département ou un département limitrophe, alors même que les communes concernées ou leurs voisines ne disposent pas nécessairement d'une police municipale organisée, lui a toutefois semblé légitime. Cette extension est en effet à même contribuer à la réduction des inégalités territoriales. La commission des lois a toutefois précisé, par l'adoption d'un amendement COM-230 de ses rapporteurs, que cette mise en commun , à l'instar de celle déjà prévue dans la législation, ne peut s'exercer qu'en matière de police administrative .

La commission a adopté l'article 6 bis A ainsi modifié .

Article 6 bis
Sécurisation de la création des brigades cynophiles de police municipale

Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture avec l'adoption en commission d'un amendement de sa présidente, l'article 6 bis de la proposition de loi tend à sécuriser la création de brigades cynophiles de police municipale.

La commission a adopté cet article, tout en ouvrant la possibilité de mettre en place des brigades cynophiles aux polices intercommunales, et en précisant les obligations de formation et de dressage pesant sur ces brigades.

Selon la Cour des comptes, 178 communes ou établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) étaient dotés d'une ou plusieurs brigades canines en 2019 66 ( * ) . Or, aucune disposition législative ou règlementaire ne régit aujourd'hui spécifiquement l'utilisation d'un chien par les services de police municipale.

Considérant que l'emploi des chiens en matière de sécurité publique n'est pas neutre en termes de responsabilités, l' article 6 bis , introduit en commission à l'Assemblée nationale à l'initiative de la présidente de la commission des lois Yaël Braun-Pivet, avec deux avis favorables des rapporteurs et du Gouvernement, dote les brigades cynophiles de police municipale d'un cadre juridique .

La création d'une brigade cynophile de police municipale relèverait de la décision du maire, et un décret en Conseil d'État viendrait préciser les conditions de création et d'emploi de la brigade, les modalités d'exercice de ses missions, ainsi que les conditions de propriété et de garde des chiens.

1. L'absence d'encadrement spécifique de la création de brigade cynophile de police municipale, entraînant un flou persistant

1.1 Une utilisation libre sous réserve d'en garantir la maîtrise

Si le champ de compétences des policiers municipaux est régi par le titre I er du livre V du code de la sécurité intérieure 67 ( * ) , aucune de ses dispositions de nature règlementaire ou législative ne mentionne l'utilisation des chiens parmi les armements autorisés .

Dans le silence des textes, le ministère de l'intérieur ainsi que certains maires considèrent que la constitution de brigade cynophile de police municipale est libre 68 ( * ) . La mention de ces brigades dans des dispositions règlementaires non codifiées accrédite cette thèse 69 ( * ) . Les brigades cynophiles de police municipale doivent agir dans le cadre des missions qui leur sont confiées par le maire, en application de l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure. Elles ne remplissent donc pas les mêmes missions que les brigades cynophiles de la police nationale : leur utilisation est exclue dans le cadre des missions propres aux brigades spécialisées de cette dernière (recherche de stupéfiants, d'explosif ou en cas d'avalanches par exemple). Ceci étant, les règles de droit commun fixées par le code pénal et le code de procédure pénale s'appliquent 70 ( * ) et les chiens peuvent être utilisés en cas de légitime défense, d'interpellation de l'auteur d'un crime ou d'un délit flagrant ou d'état de nécessité du policier.

Le maire qui décide de la création d'une brigade cynophile doit, au regard des risques inhérents à sa responsabilité, s'assurer de la bonne utilisation des chiens en question et du respect des exigences de formation qui s'appliquent aux maîtres-chiens . Le chien est en effet considéré comme une arme dès lors qu'il est utilisé pour tuer, blesser ou menacer, y compris dans le cadre d'une utilisation professionnelle ou comme moyen de défense 71 ( * ) . L'article 1243 du code civil prévoit quant à lui que le propriétaire d'un animal ou celui qui s'en sert, pendant qu'il est à son usage, est responsable du dommage qu'il a causé.

Il n'existe cependant pas de dispositions particulières relatives aux obligations de formation des maîtres-chiens dans la police municipale . En l'absence de cadre spécifique, le cadre général s'applique : la détention de chiens d'attaque et de chiens de garde et de défense est ainsi subordonnée à l'obtention d'une attestation d'aptitude sanctionnant une formation portant sur l'éducation et le comportement canins et sur la prévention des accidents, ainsi qu'à la délivrance d'un permis de détention. L'article L. 211-18 du code rural et de la pêche maritime prévoit que ces exigences « ne s'appliquent pas aux services et unités de la police nationale, des armées, de la gendarmerie, des douanes et des services publics de secours, utilisateurs de chiens ». Les services de police municipale n'étant pas explicitement cités, la législation sur les chiens catégorisés s'applique .

1.2 Un flou persistant autour de l'utilisation des brigades cynophiles de la police municipale

Depuis les années 1990, l'utilisation de chiens au sein de la police municipale s'est banalisée. 178 polices municipales disposaient de brigades cynophiles en 2019 . L'attrait des polices municipales pour la mise en place de brigade cynophile est lié à l'image dissuasive du chien, qui permet également d'assister les agents de police municipale dans leurs missions quotidiennes.

En pratique toutefois, et en l'absence de tout encadrement par les textes, on observe une grande variété de situations. L'animal peut ainsi appartenir au conducteur du chien ou à la collectivité employeur, son entretien peut relever du propriétaire ou être assurée au sein d'un chenil municipal, et les missions confiées à ces unités diffèrent grandement 72 ( * ) .

Ces raisons ont conduit la Cour des comptes à considérer qu'il serait nécessaire de clarifier et d'encadrer les missions susceptibles d'être confiées aux brigades cynophiles de la police municipale , d'autant plus que la police nationale y recourt parfois 73 ( * ) .

2. L'article 6 bis : la création d'un cadre juridique pour les brigades cynophiles de la police municipale

2.1 Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Introduit en commission des lois à l'Assemblée nationale à l'initiative de sa présidente, l'article 6 bis vise, selon les termes de l'objet de l'amendement, « à sécuriser la création de brigades canines de police municipale en les dotant un cadre juridique clair ».

Plus précisément, l'article prévoit que la création d'une brigade cynophile relève de la décision du maire de la commune, sous réserve de l'existence d'une convention de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l'État. La brigade est créée exclusivement pour l'accomplissement des missions mentionnées à l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure.

L'article renvoie à un décret en Conseil d'État pour préciser les conditions de création et d'emploi de la brigade, les modalités d'exercice de ses missions, ainsi que les conditions de propriété et de garde des chiens. Un amendement de Loïc Dombreval adopté en séance publique est venu ajouter un objectif de respect du bien-être animal.

2.2 La position de la commission

En matière de formation des brigades cynophiles, la police municipale fait office de retardataire par rapport à la gendarmerie et à la police nationales. La mise en place d'une formation adaptée, menée par le centre national de la fonction publique territoriale, est souhaitable.

L'introduction d'un cadre juridique clair pour les brigades cynophiles de la police municipale est donc une véritable avancée. Par l'adoption de l' amendement COM-237 de ses rapporteurs, la commission a renvoyé au décret en Conseil d'État la définition des obligations de formation et de dressage qui pèseront sur les brigades , et a exempté ces dernières des formations privées.

Elle a également, par l'adoption du même amendement COM-237 , ouvert la possibilité de disposer d'une brigade cynophile aux polices intercommunales . La décision de créer la brigade relèvera dans ce cas d'une décision conjointe du président de l'intercommunalité et des maires des communes membres dans lesquelles les agents de police municipale exercent leurs missions.

La commission a adopté l'article 6 bis ainsi modifié .

Article 6 ter (non modifié)
Suppression de l'avis de la commission consultative des polices municipales préalablement à l'inspection d'un service de police municipale

Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture par l'adoption en commission d'un amendement du Gouvernement, avec un avis favorable des rapporteurs, l'article 6 de la proposition de loi prévoit de supprimer l'avis de la commission consultative des polices municipales préalablement à l'inspection d'un service de police municipale, afin de permettre un accroissement des contrôles et de recentrer la commission consultative sur les enjeux nationaux.

La commission a adopté cet article sans modification .

Afin de « renforcer la qualité des polices municipales » 74 ( * ) , la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales a institué une procédure de vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police municipale par le ministère de l'intérieur 75 ( * ) . Cette vérification s'effectue à la demande du maire, du président de l'établissement public de coopération intercommunale, du préfet du département ou du procureur de la République, et après avis de la commission consultative des polices municipales.

Alors que les polices municipales voient leurs prérogatives renforcées, un accroissement des contrôles semble nécessaire. C'est la raison pour laquelle l' article 6 ter de la proposition de loi supprime l'avis de la commission consultative des polices municipales . Cette dernière ne se réunit en effet qu'une fois par an, ce qui retarde d'autant les éventuels contrôles.

1. Une vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police municipale par le ministère de l'intérieur peu mise en oeuvre

1.1 Le nécessaire contrôle des polices municipales

La loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales a institué, par son article 4, une procédure de vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police municipale par le ministère de l'intérieur . Cette procédure est décidée par le ministre de l'intérieur, à la demande du maire, du préfet de département, du procureur de la République, ou, le cas échéant, du président de l'établissement public de coopération intercommunale, après avis de la commission consultative des polices municipales (CCPM) 76 ( * ) .

Une fois la vérification décidée, le ministre de l'intérieur en fixe les modalités après consultation du maire ou, le cas échéant, après consultation du président de l'établissement public de coopération intercommunale et de chacun des maires concernés. Cette vérification peut être opérée par les services d'inspection générale de l'État . Trois corps d'inspection sont plus particulièrement visés, puisqu'ils sont placés sous l'autorité du ministère de l'intérieur : l'inspection générale de l'administration (IGA), l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN).

Les conclusions de la vérification sont transmises au représentant de l'État dans le département, au procureur de la République, au maire de la ou des communes concernées et, le cas échéant, au président de l'établissement public de coopération intercommunale.

Alors que les compétences des polices municipales sont progressivement accrues , et que l'article 1 er de la proposition de loi relative à la sécurité globale propose de leur attribuer des compétences en matière de constatations de délits, les contrôles des services de police municipale prennent une importance croissante .

1.2 Une procédure de contrôle peu utilisée

En pratique toutefois, la procédure de contrôle d'un service de police municipale prévue à l'article L. 513-1 du code de la sécurité intérieure est peu utilisée . Depuis sa création, seules deux enquêtes ont été diligentées.

Cela s'explique par une faible appétence locale pour demander des inspections par l'État des services de police municipale, et la faible fréquence des réunions de la CCPM. Celle-ci se réunit en effet environ une fois par an, ce qui peut constituer un frein à une éventuelle saisine.

Il semble donc nécessaire de renforcer l'utilisation de la procédure de contrôle des services de police municipale, afin de s'assurer de leur bon fonctionnement . Pour ce faire, les députés Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue proposaient, dans leur rapport D'un continuum de sécurité vers une sécurité globale , de supprimer l'avis préalable de la commission consultative des polices municipales et de créer au sein de l'IGA une mission permanente de contrôle des polices municipales, qui serait réalisée avec le concours de l'IGPN et de l'IGGN 77 ( * ) . Pour mener ces contrôles des polices municipales, la Cour des comptes proposait également deux autres possibilités : les inspecteurs en service extraordinaire à l'IGA pourraient étoffer les équipes d'une éventuelle mission de contrôle des polices municipales ; un dispositif pourrait être institué, sur le modèle de l'inspection des services de renseignement, dans lequel les équipes seraient constituées ponctuellement en puisant dans le vivier de différents corps d'inspection 78 ( * ) .

2. Supprimer l'avis préalable de la CCPM pour augmenter le nombre de vérifications réalisées

Introduit à l'initiative du Gouvernement en commission à l'Assemblée nationale, l'article 6 ter de la proposition de loi supprimerait l'avis préalable de la CCPM pour diligenter une vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police .

Selon l'objet de l'amendement adopté, cette modification poursuit deux objectifs principaux :

- permettre un renforcement du contrôle administratif des services de police municipale , lié notamment à l'octroi à titre expérimental de prérogatives plus importantes aux agents de police municipale et à leur hiérarchie ;

- recentrer la commission consultative des polices municipales sur les enjeux nationaux plutôt que sur les situations locales .

La commission consultative des polices municipales, créée par l'article 3 de la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales 79 ( * ) , a un rôle de conseil technique auprès des pouvoirs publics. Elle est notamment consultée sur la définition des caractéristiques de la carte professionnelle et des catégories et normes techniques des autres équipements 80 ( * ) , ainsi que sur l'établissement du code de déontologie des agents de police municipale 81 ( * ) . L'avis sur le déclenchement de la procédure de vérification d'un service fait office d'exception, puisqu'il la conduit à se prononcer sur une situation locale, dont elle peut ne pas avoir précisément connaissance .

Il importe toutefois de souligner que la suppression de l'avis préalable de la commission consultative, s'il s'agit d'une étape importante, ne suffira pas à donner une impulsion significative en faveur d'une augmentation du nombre de procédures de vérification de services de police municipale . Il sera nécessaire, en lien avec les préfets, de conduire une démarche pédagogique auprès des élus locaux pour expliquer le sens et l'intérêt d'un contrôle externe de leurs polices municipales.

La commission a adopté l'article 6 ter sans modification.

Article 6 quater A (nouveau)
Systématisation des conventions de coordination et renforcement de leur contenu

Introduit par la commission, à l'initiative de ses rapporteurs, l'article 6 quater A de la proposition de loi vise, d'une part, à rendre obligatoire la conclusion d'une convention de coordination entre des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l'État dès le premier agent de police municipale. Il vise, d'autre part, à renforcer leur contenu en prévoyant qu'un diagnostic préalable des problématiques de sûreté et de sécurité auxquelles sont confrontées les communes est réalisé.

Créées par la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales , les conventions de coordination visent à améliorer la coopération opérationnelle entre les services de police municipale et les forces de sécurité nationale territorialement compétentes.

Régies par les articles L. 512-4 à L. 512-7 du code de la sécurité intérieure, ces conventions précisent, territoire par territoire, les missions prioritaires, notamment judiciaires, confiées aux agents de police municipale ainsi que la nature et les lieux de leurs interventions, eu égard à leurs modalités d'équipement et d'armement. Elles déterminent les modalités selon lesquelles ces interventions sont coordonnées avec celles de la police et de la gendarmerie nationales et précisent la doctrine d'emploi du service de police municipale.

Les conventions de coordination sont conclues entre le maire de la commune, le président de l'établissement public de coopération intercommunale le cas échéant, le représentant de l'État dans le département et le procureur de la République territorialement compétent .

Jusqu'en 2019, les conventions de coordination étaient obligatoires pour les services de police municipale comportant plus de cinq agents, y compris les agents mis à disposition de la commune par un établissement public de coopération intercommunale. À l'initiative de la commission des lois à l'occasion de la discussion du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, le seuil à compter duquel la signature d'une convention est obligatoire a été abaissé de cinq à trois agents 82 ( * ) .

Convaincue de l'utilité d'une concertation entre les différentes forces de sécurité et ce, quel que soit le nombre d'agents de police municipale, la commission a souhaité aller plus loin à l'occasion de la discussion de la proposition de loi. Elle a donc, par l'adoption de l' amendement COM-248 de ses rapporteurs, rendue obligatoire la conclusion d'une convention de coordination dès lors que la commune dispose d'un service de police municipale .

Afin d'assurer l'adaptation de ces conventions aux réalités locales, elle a également prévu de compléter leur contenu afin d'inclure un diagnostic préalable des problématiques de sûreté et de sécurité auxquelles sont confrontées les communes (même amendement COM-248 ). Les conventions sont en effet aujourd'hui trop souvent des documents types 83 ( * ) , qui doivent être davantage adaptées aux spécificités du territoire afin de les rendre plus opérationnelles.

La commission a adopté l'article 6 quater A ainsi rédigé .

Article 6 quater B (nouveau)
Composition et compétences de la commission consultative des polices municipales

Introduit par la commission, à l'initiative de Françoise Gatel et de Alain Richard, l'article 6 quater B de la proposition de loi vise à modifier la composition et les compétences de la commission consultative des polices municipales.

Régie par l'article L. 514-1 du code de la sécurité intérieure, la commission consultative des polices municipales a un rôle de conseil des pouvoirs publics sur l'ensemble des questions relatives aux polices municipales .

Elle est composée :

- pour un tiers de représentants des maires des communes employant des agents de police municipale ;

- pour un tiers de représentants de l'État ;

- et, pour le dernier tiers, de représentants des agents de police municipale choisis par les organisations syndicales représentatives des fonctionnaires territoriaux.

Elle est présidée par un maire élu en son sein, qui a voix prépondérante en cas de partage égal des voix.

La commission a choisi, par l'adoption de deux amendements identiques COM-140 rectifié bis et COM-224 rectifié ter , d' élargir le premier collège aux représentants des maires et adjoints au maire des communes employant des agents de police municipale ou faisant partie d'un établissement public de coopération intercommunale employant des agents de police municipale .

La commission a également précisé le rôle de la commission consultative des polices municipales, afin de la recentrer sur l'organisation et les doctrines d'emploi des polices municipales . La loi indique aujourd'hui simplement que celle-ci est consultée sur la définition des caractéristiques de la carte professionnelle ainsi que des catégories et des normes techniques des autres équipements 84 ( * ) , de même que sur l'établissement du code de déontologie des agents de police municipale 85 ( * ) . La loi prévoit également qu'elle donne un avis sur le déclenchement de la procédure de vérification de l'organisation et du fonctionnement d'un service de police municipale par le ministère de l'intérieur 86 ( * ) . Cet avis serait toutefois supprimé par l'article 6 ter de la proposition de loi 87 ( * ) . Par l'adoption des deux amendements identiques COM-140 rectifié bis et COM-224 rectifié ter de Françoise Gatel et Alain Richard, la commission a renvoyé les sujets relatifs au statut des agents de police municipale au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale .

La commission a adopté l'article 6 quater B ainsi rédigé .

Article 6 quater (supprimé)
Utilisation d'appareils photographiques par les gardes champêtres

Introduit par l'Assemblée nationale par l'adoption de six amendements identiques l'article 6 quater de la proposition de loi tend à définir le régime l'utilisation par les gardes champêtres d'appareils photographiques fixes ou mobiles à des fins de constat d'infractions.

La commission a supprimé cet article.

La captation d'images, que ce soit au moyen d'un appareil photographique ou d'une caméra, est susceptible de porter une atteinte au droit au respect de la vie privée , qui est protégé tant par la Constitution que par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Des limites au recours à la captation d'image ont ainsi été prévues tant par le Conseil constitutionnel que par la Cour européenne des droits de l'homme. Ce recours doit ainsi être prévu par la loi et être nécessaire et proportionné à l'objectif visé.

L'usage d'appareils photographiques fixes ou mobiles par les gardes champêtres est soumis à deux régimes juridiques différents selon la finalité de l'opération :

- s'ils sont utilisés afin de prévenir la commission d'infractions, leur usage s'inscrit dans le cadre de missions de police administrative ;

- s'ils sont utilisés afin d'établir la preuve d'une infraction dans le cadre d'une enquête, leur usage relève d'une opération de police judiciaire.

Dans le cadre des opérations de police judiciaire , l'usage de ces appareils est encadré strictement par le code de procédure pénale et la jurisprudence. Une autorisation préalable d'un magistrat est nécessaire pour toute installation d'un dispositif fixe sur la voie publique. Sur les lieux privés, ces dispositifs sont autorisés uniquement dans le cadre d'enquêtes relatives à la criminalité organisée et sur autorisation préalable d'un magistrat.

Dans le cadre de l'exercice des missions de police administrative , l'usage d'appareils photographiques fixes ou mobiles par les forces de sécurité intérieure n'est permis que sur la voie publique, sauf cas très spécifique. Seul l'usage des caméras de vidéoprotection bénéficie d'un cadre juridique clairement identifié (articles L. 251-1 et suivants du code de la sécurité intérieure). Ces dispositions prévoient que les autorités publiques compétentes et les commerçants peuvent avoir recours à de tels dispositifs sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité préfectorale, de l'information claire et permanente du public de leur existence et de la garantie qu'ils ne permettent pas de visualiser l'intérieur des immeubles ou leurs entrées.

Souhaitant élargir les possibilités d'usage d'appareils photographiques fixes ou mobiles, l'Assemblée nationale , à l'initiative de Jacques Cattin, Raphaël Schellenberger, Yves Hemedinger, Emmanuelle Ménard, Valérie Petit, et Olivier Becht a introduit en séance publique l'article 6 quater qui vise à définir le régime l'utilisation par les gardes champêtres d'appareils photographiques fixes ou mobiles à des fins de constat d'infractions .

Plus précisément, serait inséré dans le code de procédure pénale un article permettant aux gardes champêtres d'avoir recours à des appareils photographiques fixes ou mobiles afin de constater les infractions pour lesquelles ils sont compétents en application de l'article L. 521-1 du code de la sécurité intérieure (contraventions aux arrêtés municipaux et à certaines dispositions du code de la route) ainsi que celles qui portent atteinte aux propriétés situées sur leur commune.

Cet article ne présente toutefois pas suffisamment de garanties au regard de la jurisprudence constitutionnelle et conventionnelle . Inséré dans le chapitre 1 er du titre 1 er du livre 1 er du code de procédure pénale intitulé « De la police judiciaire », sa rédaction laisse à penser qu'il concerne également les opérations de police administrative. Son articulation avec les dispositifs généraux prévus dans le code de la sécurité intérieure n'est ainsi pas assurée, car il permettrait d'une part l'usage de tels dispositifs dans les lieux privés - ce qui est expressément prohibé actuellement en matière de police administrative - et ne prévoirait pas d'autre part d'information du public.

Si l'article doit à l'inverse être compris comme encadrant uniquement les opérations de police judiciaire menées par les gardes champêtres, il est redondant avec les dispositions existantes pour les lieux publics, et sans garanties suffisantes pour les lieux privés.

Enfin, les modalités de conservation et de destruction des images prises par les appareils photographiques utilisés par les gardes champêtres ne sont pas clairement définies par l'article.

Au vu de ces éléments, la commission des lois a considéré que les dispositifs existants étaient satisfaisants. Elle a donc, par l'adoption de l' amendement COM-238 des rapporteurs, supprimé l'article 6 quater .

La commission a supprimé l'article 6 quater .

Article 6 quinquies
Renvoi à un arrêté du ministre de l'intérieur pour la définition des caractéristiques et normes techniques de la carte professionnelle, de la tenue, de la signalisation des véhicules et des types d'équipement des gardes champêtres

L'article 6 quinquies de la proposition de loi tend à uniformiser l'identification et l'équipement des gardes champêtres sur tout le territoire national, à l'instar des agents de police municipale.

La commission a adopté cet article, en prévoyant que le port de la tenue et de la carte professionnelle des gardes champêtres serait obligatoire pendant leur service.

Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture, par l'adoption en séance publique d'un amendement des rapporteurs avec un avis favorable du Gouvernement, l'article 6 quinquies de la proposition de loi prévoit qu'un arrêté du ministre de l'intérieur définit les caractéristiques et normes techniques de la carte professionnelle, de la tenue, de la signalisation des véhicules et des types d'équipement des gardes champêtres, et ce afin de ne pas entrainer de confusion avec ceux utilisés par la police et la gendarmerie nationale.

La tenue et l'équipement des gardes champêtres ne font à l'heure actuelle l'objet d'aucune règlementation spécifique . Si une circulaire du ministère de l'intérieur du 20 janvier 1937 complétée par une circulaire n° 348 du 10 juillet 1970, invite les maires à veiller à la tenue des gardes champêtres et au port de façon constante des attributs de leur fonction, et les incite à les doter d'un uniforme, la seule obligation , inscrite à l'article R. 522-1 du code de la sécurité intérieure, concerne le port sur le bras d'une plaque où sont inscrits les mots : « La Loi » ainsi que le nom de la municipalité et celui du garde . L'uniforme et l'équipement des gardes champêtres sont donc, à cette seule exception près, à la discrétion du maire ou du président de l'établissement public employeur.

À l'inverse, depuis la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales , les tenues et équipements dont sont dotés les agents de police municipale font l'objet d'une identification commune à tous les services de police municipale, fixée par arrêté du ministre de l'intérieur 88 ( * ) .

Introduit par l'Assemblée nationale en séance publique, l'article 6 quinquies dispose qu'un arrêté du ministre de l'intérieur fixe les caractéristiques et normes techniques de la carte professionnelle, de la tenue, de la signalisation des véhicules ainsi que les types d'équipements, qui ne doivent entrainer aucune confusion avec ceux utilisés par la police et la gendarmerie nationales . À l'instar des services de police municipale, il est en effet souhaitable d'éviter que la tenue des gardes champêtres entraîne une confusion avec la police ou la gendarmerie nationales. L'article L. 433-15 du code pénal punit par ailleurs de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait, par toute personne, de porter publiquement un costume ou un uniforme réservé à la police nationale ou aux militaires.

Contrairement aux services de police municipale, l'article ne précise cependant pas, d'une part, que ces tenues et équipements font l'objet d'une identification commune à tous les services et, d'autre part, que le port de la carte professionnelle et de la tenue est obligatoire pendant le service .

Par l'adoption d'un amendement COM-231 de ses rapporteurs, la commission a donc précisé que la carte professionnelle, la tenue, la signalisation des véhicules de service et les types d'équipement dont sont dotés les gardes champêtres font l'objet d'une identification commune 89 ( * ) .

Les gardes champêtres disposant de pouvoirs de constatation d'infractions, elle a jugé pertinent, afin que les citoyens puissent être en capacité de les identifier immédiatement, de prévoir que le port de la carte professionnelle et de la tenue est obligatoire pendant le service (même amendement COM-231 ).

La commission a adopté l'article 6 quinquies ainsi modifié .


* 45 Conseil constitutionnel, décision n° 2009-588 DC du 6 août 2009.

* 46 Exécution, dans la limite des compétences du préfet de police, des délibérations du conseil de Paris et, le cas échéant, des conseils d'arrondissement.

* 47 Conditions de circulation ou de stationnement sur certains sites, voies ou portions fixés par arrêté du préfet de police après avis du maire de Paris.

* 48 Secours et défense contre l'incendie.

* 49 Article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales.

* 50 Article L. 2512-14 du code général des collectivités territoriales.

* 51 Article 118 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale .

* 52 Article L. 531-1 du code de la sécurité intérieure.

* 53 Contrairement aux agents de police municipale, qui sont également agrées par le représentant de l'État dans le département. Le préfet de police donne cependant un avis au procureur de la République sur l'agrément des agents de la Ville de Paris chargés d'un service de police (article R. 5311-7 du code de la sécurité intérieure).

* 54 20 agents de catégories A, 240 agents de catégorie B, 2250 agents de catégorie C.

* 55 Article L. 531-1 du code de la sécurité intérieure.

* 56 Article L. 532-1 du code de la sécurité intérieure.

* 57 Voir, pour plus de précisions, le commentaire de l'article 4.

* 58 Si celui-ci s'est vu transférer, en application des dispositions de l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales, certains pouvoirs de police spéciale.

* 59 Article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure.

* 60 Article L. 511-5 du code de la sécurité intérieure.

* 61 Les communes membres d'un EPCI à fiscalité propre ayant mis en place une police intercommunale ne peuvent d'ailleurs avoir recours à ce régime.

* 62 Rapport d'information n° 782 (2011-2012) de François Pillet et René Vandierendonck, De la police municipale à la police territoriale : mieux assurer la tranquillité publique , fait au nom de la commission des lois et déposé le 26 septembre 2012.

* 63 Cour des comptes, Les polices municipales , rapport public thématique 2020, p. 116.

* 64 Article 51 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale .

* 65 Circulaire NOR/INT/D/99/00095/C relative à l'application de la loi n° 99 91 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales , p9.

* 66 Cour des comptes, Les polices municipales , rapport public thématique 2020.

* 67 Auquel renvoie l'article L. 2212-5 du code général des collectivités territoriales.

* 68 Voir la réponse ministérielle n° 66024 du 4 octobre 2005 à la question de l'ancien député Philippe Cochet, consultable à l'adresse suivante : http://questions.assemblee-nationale.fr/q12/12-66024QE.htm .

* 69 L'existence des brigades cynophile de police municipale est mentionnée dans deux dispositions règlementaires : le décret n° 2004-102 du 30 janvier 2004 relatif à la tenue des agents de police municipale pris en application de l'article L. 412-52 du code des communes prévoit une tenue d'uniforme des brigades cynophiles dans son annexe 8 ; les conventions-cadre communale et intercommunale de coordination annexées au décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale mentionne l'existence de brigade cynophiles au sein d'un service de police municipale dans son article 17.

* 70 Comme l'a rappelé la réponse ministérielle à la question n° 113101 de l'ancien député Thierry Mariani du 17 avril 2007, consultable à l'adresse suivante : http://questions.assemblee-nationale.fr/q12/12-113101QE.htm .

* 71 Quatrième alinéa de l'article 132-75 du code pénal.

* 72 Certaines polices municipales disposent d'ailleurs de chiens dressés à la recherche d'infractions en matière de produits stupéfiants, ce qui interroge car ces actions ne relèvent pas des attributions de la police municipale.

* 73 Cour des comptes, Les polices municipales , rapport public thématique 2020, p. 51.

* 74 Rapport n° 455 (1997-1998) de Jean-Paul Delevoye sur le projet de loi relatif aux polices municipales, fait au nom de la commission des lois et déposé le 27 mai 1998. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l97-455/l97-455.html .

* 75 Désormais codifiée à l'article L. 513-1 du code de la sécurité intérieure.

* 76 L'article 119 de la loi n° 2009-256 du 12 mai 2009 d e simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures a ouvert aux présidents d'établissement public de coopération intercommunale la possibilité de demander au ministère de l'intérieur de vérifier l'organisation et le fonctionnement d'un service de police municipale. Lorsqu'elle émane du président de l'EPCI, la demande de vérification ne peut porter que sur la mise à disposition des agents de police municipale ou leurs équipements.

* 77 Proposition n° 42 du rapport de Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue, D'un continuum de sécurité vers une sécurité globale , déposé en septembre 2018.

* 78 Cour des comptes, Les polices municipales , rapport public thématique 2020, pp. 128-129.

* 79 Désormais codifié à l'article L. 514-1 du code de la sécurité intérieure.

* 80 Article L. 511-4 du code de la sécurité intérieure.

* 81 Article L. 515-1 du code de la sécurité intérieure.

* 82 Article 58 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique .

* 83 Un modèle de convention type est défini par le décret n° 2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale .

* 84 Article L. 511-4 du code de la sécurité intérieure.

* 85 Article L. 515-1 du code de la sécurité intérieure.

* 86 Article L. 513-1 du code de la sécurité intérieure.

* 87 Voir, pour plus de précisions, le commentaire de l'article 6 ter .

* 88 Article L. 511-4 du code de la sécurité intérieure.

* 89 Conformément à la position de la commission des lois lors de l'examen du projet de loi relatif aux polices municipales en 1999, il ne semble en effet pas opportun d'uniformiser totalement les équipements des gardes champêtres. Outre le coût que cela représenterait pour les communes, il est important de souligner que les gardes champêtres ne peuvent être considérés comme un corps homogène du fait du principe de libre administration des collectivités territoriales.

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