N° 139

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 20
OUTRE-MER


Rapporteurs spéciaux : MM. Stéphane FOUASSIN et Georges PATIENT

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Claire Carrère-Gée, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, M. Georges Patient, Mme Sophie Primas, M. Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180

Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026)

L'ESSENTIEL

I. UNE BAISSE DE 4,5 % DES CRÉDITS DE LA MISSION EN RAISON DE LA RÉFORME DES EXONÉRATIONS « LODEOM »

A. UNE DIMINUTION DE 153 MILLIONS D'EUROS

Les crédits de la mission « Outre-mer » présentés dans le projet de loi de finances pour 2026 s'élèvent à 2,91 milliards d'euros en AE et à 2,83 milliards d'euros en CP, soit une baisse de 21,6 % en AE et de 5,4 % en CP par rapport à la LFI 2025. En volume, la mission « Outre-mer » a perdu 628 millions d'euros en AE et 153 millions d'euros de CP.

Évolution des crédits de la mission « Outre-mer » entre 2025 et 2026

(en euros)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Le programme 138 « Emploi outre-mer » voit son enveloppe particulièrement réduite, à hauteur de plus de 340 millions d'euros, en raison de la réforme des exonérations spécifiques aux outre-mer portée par l'article 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. Ces exonérations font l'objet d'une compensation à la sécurité sociale budgétée sur ce programme.

À l'inverse, les crédits du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » diminuent de 26,2 % en AE mais augmentent de 18,3% en CP.

Décomposition de l'évolution des crédits de la mission « Outre-mer »
au PLF 2026

(en millions d'euros et en CP)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

B. UNE BAISSE DES EXONÉRATIONS SOCIALES « LODEOM » INSOUTENABLE POUR LES ENTREPRISES ULTRAMARINES

La réforme des exonérations de compensation sociale dites « LODEOM » spécifiques aux outre-mer prévues par le PLFSS pour 2026 prévoit la suppression du barème « innovation et croissance », appliqué à certaines entreprises, l'alignement des régimes de Saint-Barthélemy et Saint-Martin sur celui des autres départements et régions d'outre-mer (DROM) et enfin la réduction des exonérations sur les rémunérations supérieures à 2 SMIC.

Les entreprises ultramarines subiraient une hausse de 5 % à 8 % de leur masse salariale, pour un coût total de 350 millions d'euros. Il s'agit d'une augmentation massive du coût du travail pour des entreprises parfois en très grande difficulté, notamment à Mayotte et à La Réunion, en raison des catastrophes naturelles récentes, ou encore dans les Antilles frappées par un coût de la vie très élevé.

II. UN SOUTIEN AUGMENTÉ AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

A. DES DOTATIONS EN HAUSSE POUR LES COLLECTIVITÉS EN RAISON DES CRISES RÉCENTES (MAYOTTE, LA NOUVELLE-CALÉDONIE, LA RÉUNION)

Les difficultés des collectivités ultramarines résident dans leurs charges de fonctionnement structurellement élevées, qui ne leur permettent pas de dégager une épargne brute suffisante. Elles ont donc besoin du soutien de l'État pour être en mesure d'investir.

L'action 6 « Collectivités territoriales » du programme 123 « Conditions de vie outre-mer », qui porte de telles dotations, est dotée de 490,2 millions d'euros en AE et de 452,7 millions d'euros en CP, en hausse de 105,5 millions d'euros en CP par rapport à la LFI pour 2025.

Le fonds de reconstruction de Mayotte est doté de

Suite au passage du cyclone Garance, une dotation de

Pour la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie,

 
 
 

en AE et de 125 millions d'euros en CP.

est prévue pour La Réunion.

de subvention sont prévus.

Le fonds de secours outre-mer est doté de 17,84 millions d'euros en CP, soit une hausse de 7 millions d'euros, pour répondre aux demandes d'indemnisation des producteurs de canne à sucre à La Réunion après le passage du cyclone Garance. Il est par ailleurs réformé, puisque la part « collectivité » du fonds est transférée à la dotation de solidarité en faveur de l'équipement des collectivités territoriales (DSEC).

B. DES CRÉDITS RÉHAUSSÉS POUR LES CONTRATS DE CONVERGENCE ET DE TRANSFORMATION, MAIS INSUFFISANTS POUR COUVRIR LES ENGAGEMENTS CONTRACTUALISÉS

Les crédits alloués à l'action 2 « Aménagement du territoire » du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » finançant les contrats de convergence et de transformation (CCT), s'élèvent à 158,5 millions d'euros en AE et à 181,7 millions d'euros en CP, soit une baisse de 26 millions d'euros en AE, mais une hausse bienvenue de 90,1 millions d'euros en CP par rapport à la LFI 2025.

Toutefois, seuls 46 % des montants contractualisés et 33,7 % des engagements pourront alors être couverts. Cette situation est particulièrement dommageable, alors que la période de contractualisation ne s'étend que jusqu'à 2027.

Montant contractualisé, engagé et consommé en 2025 et 2026
sur les CCT de deuxième génération (2024-2027)

(en millions d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

III. UNE STABILITÉ DES CRÉDITS EN FAVEUR DE LA CONTINUITÉ TERRITORIALE ET DU LOGEMENT SOCIAL

A. DES DOTATIONS DE CONTINUITÉ TERRITORIALE MAINTENUES, MAIS INSUFFISANTES PAR RAPPORT AUX BESOINS

Les crédits prévus pour 2026 au titre de la continuité territoriale s'élèvent à 76,9 millions d'euros en AE et à 76,8 millions d'euros en CP, soit une hausse de 2,6 %.

Toutefois, les moyens de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) baissent de 2,5 millions d'euros et surtout de 5 équivalents temps pleins (ETP). Cette diminution des emplois est à déplorer au vu de l'importance de LADOM pour les populations ultramarines, d'autant qu'elle devrait mettre en oeuvre en 2026 les nouveaux dispositifs de continuité territoriale adoptés en LFI 2024.

Il est par ailleurs frappant de constater que la dotation de continuité territoriale attribuée à la Corse est de 187 millions d'euros, soit un montant trois fois plus élevé que pour les outre-mer, pour une population nettement moins nombreuse. Une telle situation est particulièrement regrettable.

B. DES CRÉDITS POUR LE LOGEMENT SOCIAL NE PERMETTANT PAS D'ATTEINDRE LES CIBLES DE FINANCEMENT D'HABITATIONS

Entre la LFI 2025 et le PLF 2026, l'action 1 « Logement » enregistre une baisse de 11 % en AE mais une hausse bienvenue de 11,9 % en CP, qui doit lui permettre de couvrir ses engagements passés.

La loi1(*) du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer (EROM) a prévu une cible de construction de 150 000 logements neufs et réhabilités dans les outre-mer entre 2017 et 2027. Pourtant, en sept ans, la cible n'a été atteinte qu'à 61 %.

Évolution du nombre de logements aidés entre 2018 et 2024

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

IV. À L'ÉCHELLE DU BUDGET GÉNÉRAL DE L'ÉTAT, UNE BAISSE DES FINANCEMENTS EN OUTRE-MER

Le montant total des contributions budgétaires pour les outre-mer s'élève, en PLF 2026, à 20,04 milliards d'euros en AE et 21,9 milliards d'euros en CP, soit une diminution de 11,2 % en AE et de 7,3 % en CP par rapport à la LFI 2025.

Cette baisse est essentiellement due à l'affectation de 3,2 milliards d'euros de taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), en remplacement de crédits budgétaires. En les excluant, les dépenses de l'État en faveur du budget des outre-mer ne sont réduites que de 4,8 % en AE et de 1,5 % en CP, essentiellement en raison de la mission « Outre-mer », de la mission « Sécurité » et de la Mission « Écologie ».

Évolution des missions dans l'effort total en faveur de l'outre-mer
entre 2020 et 2026

(en milliards d'euros et en CP)

Source : commission des finances d'après les documents budgétaires

Réunie le 4 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.

Réunie à nouveau le mercredi 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Action extérieure de l'État », « Aide publique au développement », « Cohésion des territoires », « Culture », « Immigration, asile et intégration », « Investir pour la France 2030 », « Monde combattant, mémoire et liens avec la nation », « Sport, jeunesse et vie associative », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, les rapporteurs spéciaux n'avaient reçu aucune des réponses.

À la date d'examen en commission de la mission le 4 novembre, ils ont obtenu 99 % des réponses.


* 1 Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

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