N° 139

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 3
AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE :
DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

Rapporteurs spéciaux : MM. Christian KLINGER et Victorin LUREL

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Claire Carrère-Gée, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, M. Georges Patient, Mme Sophie Primas, M. Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180

Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026)

L'ESSENTIEL

La mission comprend quatre programmes : le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » qui porte les dispositifs d'aide aux filières agricoles et forestières ainsi que les financements attribués par l'État en cofinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (PAC) ; le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » qui couvre pour l'essentiel des interventions visant à assurer la maîtrise des risques sanitaires et phytosanitaires affectant les animaux, les végétaux et les produits alimentaires ; le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » qui porte la plupart des moyens nécessaires à la couverture des coûts de gestion des missions du ministère ; et enfin le programme 381 « Allègements de cotisations et contributions sociales » qui couvre les compensations et allègements qui bénéficiaient antérieurement de l'affectation d'une part des recettes de TVA.

I. UNE DIMINUTION DES MOYENS QUI FRAPPE PRINCIPALEMENT LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE MAIS QUI NE REMET PAS EN CAUSE LE SOUTIEN IMPORTANT DE L'ÉTAT AU SECTEUR AGRICOLE

Évolution en AE en en CP des moyens alloués par programme entre 2025 et 2026

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programmes

LFI
pour 2025

PLF
pour 2026

Évolution

LFI
pour 2025

PLF
pour 2026

Évolution

149 - Compétitivité
et durabilité de l'agriculture,
de l'agroalimentaire, de la forêt (de la pêche et de l'aquaculture)

2 324

1 962

- 15,58 %

2 261

2 056

- 9,08 %

206 - Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation

921

839

- 8,83 %

854

838

- 1,88 %

215 - Conduite et pilotage
des politiques de l'agriculture

715

647

- 9,51 %

651

661

+ 1,62 %

381 - Allègements du coût
du travail en agriculture

448,5

449

+ 0,11 %

448

449

+ 0,11 %

Total pour la mission AAFAR*

4 409

3 898

- 11,59 %

4 215

4 005

- 4,98 %

Source : projets annuels de performances annexés au projet de loi de finances pour 2026

(en millions d'euros)

A. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS PRINCIPALEMENT AU DÉTRIMENT DE LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE

La mission est de nouveau mobilisée en 2026 en vue de contribuer à l'objectif de redressement des finances publiques : le texte déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale envisage une baisse de 11,59 % des autorisations d'engagement et de 4,98 % des crédits de paiement par rapport à 2025. La diminution des moyens alloués à la mission budgétaire est supportée essentiellement par les actions considérées comme pilotables par le ministère, c'est-à-dire celles qui portent en particulier sur la planification écologique.

Moyens alloués aux actions de la mission AAFAR
consacrées à la planification écologique

(en milliards d'euros)

Source : Commission des finances du Sénat

Ce choix, contraint par la situation budgétaire, contraste avec la situation antérieure : la loi de finances pour 2024 avait abouti à la création d'une action « planification écologique » dans chacun des programmes 149 et 206, bénéficiant d'un total de 1,3 milliard d'euros, ramené en 2025 à 491 millions d'euros et réduit pour 2026 à 143 millions d'euros. En deux ans, les autorisations d'engagement (AE) et les crédits de paiement (CP) directement dédiés à la planification écologique ont diminué respectivement de 67 % et de 59 %.

Les quatre programmes de la mission voient ainsi leurs crédits évoluer en 2026 de manière différente :

- le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt » (1,96 milliards d'euros en autorisation d'engagement contre 2,32 milliards en 2025), subit une contraction de 15,58 % des autorisations d'engagement et de 9,06 % des crédits de paiement, ce qui représente tout de même une réduction de 362 millions d'euros en AE et 205 millions d'euros en CP. À l'exception de l'action 27 « Moyens de mise en oeuvre des politiques publiques et gestion des interventions » qui bénéficie de 40 millions d'euros supplémentaires, toutes les actions voient leurs crédits légèrement diminuer, y compris ceux consacrés à la protection sociale, à la gestion des crises et des aléas et à la prise en charge assurantielle, voire diminuer fortement s'agissant de la planification écologique.

- le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation » (839,6 millions d'euros en AE (contre 921 millions d'euros en 2025, soit - 8,83 % en AE et - 1,88 % en CP) connaît également une diminution, en particulier en raison de la baisse des moyens alloués à la planification écologique. Les rapporteurs spéciaux se réjouissent néanmoins de la hausse des crédits consacrés à la lutte contre les maladies animales, destinés à permettre la prise en charge partielle par l'État des vaccins afin de lutter contre la propagation de diverses maladies (l'action 02 connait ainsi une majoration de ses AE de plus de 35 %) ;

- le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » (647 millions d'euros en AE contre 715 millions d'euros en 2025) subit une diminution de ses AE de 9,51 %, uniquement lié à l'ajournement, pour des raisons budgétaires, du projet de relocalisation, sur le site domanial de Maisons-Alfort (ENVA), des opérateurs du ministère actuellement situés à Montreuil. En parallèle, ses crédits de paiement augmentent de 1,92 % ;

- le programme 381 « Allégements du cout du travail en agriculture » (449 millions d'euros en PLF 2026 contre 448,5 millions d'euros en LFI 2025) connaît une quasi-stabilisation de ses crédits qui visent à lutter contre le travail non déclaré et la dégradation des conditions de travail.

B. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS POUR 2026 QUI NE DEVRAIT PAS ENTRAVER LES PROMESSES FORMULÉES À L'ÉGARD DU MONDE AGRICOLE MÊME SI DES POINTS D'ATTENTION DEMEURENT

L'effectivité d'une baisse des crédits dans le PLF pour 2026 est indéniable mais les rapporteurs spéciaux se sont principalement attachés à vérifier que le niveau des crédits envisagés était en adéquation avec le périmètre des politiques publiques conduites et qu'il permettait de couvrir les besoins pour financer les engagements formulés en faveur des agriculteurs.

Un grand nombre de dispositifs de soutien au secteur agricole sont, ou seront, financées sur les exercices 2025 et 2026 : fonds d'urgence pour le secteur viticole, dispositif de réduction du potentiel de production viticole, prêts bonifiés à l'attention du secteur viti-vinicole, fonds d'urgence visant à soutenir les exploitations d'élevage impactées par la maladie hémorragique épizootique (MHE), aide à la filière biologique, aide des planteurs de banane, aide pour la prise en charge d'une partie des pertes de production des éleveurs de volaille, indemnisation pour la prise en charge de la surmortalité liée à la fièvre catarrhale ovine (FCO), prêts garantis, dispositif « Fruits et légumes outre-mer », fonds d'urgence « soutien aux exploitations en difficulté suite aux inondations de 2024 » en Ille-et-Vilaine, fonds d'urgence au bénéfice des jeunes installés en viticulture, aide aux pépiniéristes en viticulture, fonds d'urgence pour soutenir les exploitations agricoles touchées par les incendies de l'Aude survenus à l'été 2025.

Certaines mesures attendues, non budgétaires ou fiscales, ont par ailleurs été prises (nouveau plan national loup, publication de mesures règlementaires sur le contentieux agricole, sur la simplification des mesures administratives préalables au curage, non-imposition sous conditions de 30 % des reprises de dotation pour épargne de précaution, la transformation de la dotation pour stock de vaches en une provision comptable ainsi que des avantages fiscaux destinés à favoriser la transmission de patrimoine vers les jeunes agriculteurs, prise en compte des 25 meilleures années pour le calcul de la pension de retraite, relèvement de 1,2 à 1,25 SMIC du seuil de dégressivité du dispositif travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi, dit TO- DE).

Un certain nombre d'engagements doit encore trouver une traduction correspondant à des dispositions fiscales qui figurent en première partie du projet de loi de finances pour 2026 (prorogation de trois ans du dotation pour épargne de précaution, prorogation de deux ans du crédits d'impôt « agriculture biologique », exonération d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés - sous condition d'affectation du montant de cette exonération - des plus-values et des profits sur stocks dégagés du fait de toute perception d'indemnités d'abattage pour raisons sanitaires).

Les rapporteurs spéciaux considèrent donc que la baisse des crédits de la mission n'entrave pas la capacité à répondre aux promesses formulées, d'autant que le niveau total des dépenses rattachés à la mission demeure élevé (environ 3 milliards d'euros) et le total des concours publics à l'agriculture demeure inchangé à 25,2 milliards d'euros si l'on prend en compte les crédits européens, les dépenses fiscales et sociales ainsi que le soutien apporté par les collectivités. Certes, la comparaison du PLF 2026 avec les crédits effectivement exécutés en 2024 fait ressortir un différentiel mais il s'agit en réalité d'un retour à un budget moins exceptionnel que ce que l'on a connu pendant la période 2022-2025 et qui est même supérieur d'un milliard d'euros, en CP, au total exécuté en 2021.

Les autorisations d'engagement et les crédits de paiement par programme :
comparaison exécution 2024 et PLF pour 2026

(en millions d'euros arrondis à l'entier le plus proche)

Source : Commission des finances du Sénat

Par ailleurs, la mission compte dix opérateurs. À l'exception de l'Office national des forêts, tous voient les moyens qui leur sont alloués à travers la mission diminuer ou être stabilisés (certains sont financés via plusieurs missions et cela ne signifie donc pas que leurs moyens d'ensemble diminuent). Il s'agit de l'Agence de services et de paiement (ASP), l'Institut français du cheval et de l'équitation, FranceAgriMer, l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer, le Centre national de la propriété forestière, l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), l'Institut national de formation des personnels du ministère de l'agriculture, l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique et enfin l'Institut national de l'origine et de la qualité.

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL » (CAS-DAR) : LE REHAUSSEMENT BIENVENU DU PLAFOND DE DÉPENSES

Le plafond de dépenses du CAS-DAR sera rehaussé, en 2026, pour atteindre 171 millions d'euros, Les rapporteurs spéciaux se réjouissent de ce rehaussement du plafond qu'ils ont encouragé en raison du différentiel entre les recettes (issues d'une taxe assise sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles) et les dépenses plafonnées à un niveau plus bas. Pour la première fois depuis 2014, le solde comptable du CAS-DAR devrait donc diminuer.

Ce CAS a été conçu pour soutenir la mise en oeuvre d'actions de recherche appliquée, d'études et d'expérimentations et de développement, dans le cadre du Programme national de développement agricole et rural (PNDAR). Cette hausse permettra le financement de plusieurs appels à projets par exemple « Investir pour élargir la palette des solutions mises à disposition des agriculteurs et développer les alternatives aux produits phytopharmaceutiques », lancé dans le cadre du « Plan d'action stratégique pour l'anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures » (PARSADA).

Réunie le 12 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte de d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

Réunie à nouveau le 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission confirme définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Action extérieure de l'État », « Aide publique au développement », « Cohésion des territoires », « Culture », « Immigration, asile et intégration », « Investir pour la France de 2030 », « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », « Sport, jeunesse et vie associative » ainsi que les comptes spéciaux et les articles qui s'y rattachent.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, les rapporteurs spéciaux n'avaient reçu aucune des réponses.

À la date d'examen en commission de la mission, le 12 novembre 2025, ils avaient obtenu 75 % des réponses.

PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT
ET AFFAIRES RURALES » (AAFAR) : UNE DIMINUTION DES CRÉDITS EN 2026 QUI FRAPPE PRINCIPALEMENT LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE MAIS QUI NE REMET PAS EN CAUSE LE SOUTIEN IMPORTANT DE L'ÉTAT AU SECTEUR AGRICOLE

Comme d'autres missions budgétaires, la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) ne couvre que partiellement les moyens correspondant à l'effort budgétaire consenti à destination des politiques publiques qu'elle vise.

En effet, en examinant cette mission, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ne sont formellement saisis que d'un cinquième environ des dépenses destinées au secteur agricole entendu au sens large. Le total des dépenses publiques en direction de l'agriculture, qui s'élèvera en 2026, comme en 2025, à environ 25,3 milliards d'euros selon les montants communiqués par le Ministère de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), comprend en effet, en sus des dépenses budgétaires de la mission à proprement parler et du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural » (CAS DAR), 21,3 milliards d'euros de concours publics à l'agriculture.

La part de la mission dans le total des concours publics consacrés en 2026 à l'agriculture recule légèrement en raison de la nouvelle diminution des crédits qui lui sont alloués (3,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement contre 4,4 milliards votés en LFI 2025, soit une baisse de 11,59 %, et 4 milliards d'euros en crédits de paiement contre 4,2 milliards d'euros votés en LFI 2025, soit un recul de 4,98 %) du fait notamment de la très forte baisse des seuls crédits réellement pilotables, à savoir ceux consacrés à la planification écologique.

Les rapporteurs spéciaux tiennent, à titre liminaire, à nuancer considérablement cette diminution, bien qu'elle paraisse importante si l'on se contente de comparer le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 et la loi de finances initiale (LFI) pour 2025.

D'une part, l'effort demandé à la mission en vue de contribuer au redressement des finances publiques est moindre que celui demandé à d'autres missions et demeure mesuré au regard du contexte budgétaire très contraint.

D'autre part, les crédits alloués à la mission, dans le cadre des lois de finances initiales pour les années 2022 à 2025, traduisaient un effort considérable de la part de l'État sur la politique agricole, le budget 2026 revenant dans une lignée plus proche des budgets antérieurs, tout en restant dans une moyenne haute. Enfin, il faut noter que l'État, au global, compense la baisse affichée des crédits de la mission par un effort supplémentaire en termes de dépenses fiscales et sociales au travers de dispositifs nouveaux qui étaient très attendus ou de dispositifs existants et prorogés. Le projet de loi de finances ainsi que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 portent des dispositifs très attendus par le secteur agricole comme la prise en compte des 25 meilleures années dans le calcul des pensions de retraite, la prorogation pour trois ans de la dotation pour épargne de précaution, l'exonération d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés - sous condition d'affectation du montant de cette exonération - des plus-values et des profits sur stocks dégagés du fait de toute perception d'indemnités d'abattage pour raisons sanitaires d'animaux affectés à la reproduction du cheptel pour les années 2025 à 2027.

La répartition de ces différents concours publics, par exercice depuis 2021, est récapitulée dans le tableau ci-après.

Concours publics à l'agriculture, l'alimentation et à la forêt

(Crédits de paiement, exprimés en millions d'euros)

 

Montant des concours publics engagé par exercice

2021

2022

2023

2024

2025

2026

Budget européen PAC

9 494

9 975

9 384

9 384

9 384

9 384

dont Paiements directs

6 736

6 726

6 736

6 736

6 710

6 710

dont Programmes sectoriels et Mesures de marché

640

640

640

640

666

666

dont deuxième pilier

2 118

2 609

2 008

2 008

2 008

2 008

Budget État (Loi de finances initiale jusqu'en 2024 et projet de loi de finances pour 2025)

5 418

5 444

6 479

7 507

7 005

6 829

dont budget mission AAFAR

3 038

3 007

3 858

4 747

4 216

4 006

dont budget mission « enseignement secondaire » - programme 143 « enseignement technique agricole »

1 483

1 527

1 596

1 696

1 712

1 715

dont budget mission MIRES (Programme 142)

363

378

424

443

422

428

dont CAS DAR

126

126

126

146

146

171

dont taxe fiscales affectées

408

406

475

475

509

509

Allègement charges sociales et fiscales

5 657

5 943

6 497

6 823

6 795

6 952

dont baisse des cotisations individuelles des exploitants

283

278

280

290

381

539 

dont allègements de cotisations patronales

5 374

5 665

6 217

6 533

6 414

6 413

Autres dépenses fiscales

2 315

2 695

2 310

2 239

2 937

3 090

dont dépenses fiscales agricoles

2 059

2 513

2 127

2 048

381

539

dont dépenses fiscales forêt

256

182

183

191

2 566

2 551

Compléments régionaux PAC

284

283

400

400

400

400

Retraitement des données (double décompte social)

- 207

- 130

- 561

- 578

- 612

- 592

Total agriculture crédits nationaux

13 467

14 235

15 125

16 391

15 866

15 867

Total agriculture tous concours

22 961

24 210

24 509

25 775

25 250

25 251

Source : Commission des finances du Sénat à partir de données fournies par le ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR 2026

Le contexte général du secteur agricole demeure globalement difficile et la mission AAFAR doit faire face au défi de concilier les fortes attentes liées aux enjeux et les moyens qui devront être optimisés.

Le secteur agricole est, en premier lieu, particulièrement touché par les fortes tensions internationales qui s'intensifient : impact des crises ukrainienne, asiatique1(*) et au Proche-Orient sur les cours, tensions commerciales entre l'Europe, les États-Unis et la Chine qui frappent en particulier les spiritueux français2(*), renforcement des droits de douane américains, craintes des professionnels sur la concurrence déloyale que pourrait engendrer l'entrée en vigueur, de plus en plus probable, d'un accord UE-MERCOSUR, etc.

En deuxième lieu, les aléas climatiques et sanitaires ont durement frappé les milieux agricoles ces dernières années, même s'il faut reconnaitre que l'année 2025 est globalement moins marquante que les années précédentes : on notera, en particulier, que des foyers contagieux et des abattages imposés ont jalonné les derniers mois du fait notamment de la propagation de la dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNCB).

Par ailleurs, la situation économique générale ainsi que la situation politique (hausse de l'épargne en raison des incertitudes sur l'avenir qui contribue à une baisse de la consommation, fortes incertitudes concernant la fiscalité des entreprises. etc.) sont globalement défavorables au secteur.

Ce contexte et ces tensions se sont ainsi manifestées à l'occasion des élections des membres des 88 chambres d'agriculture départementales, interdépartementales ou territoriales et des 2 chambres d'agriculture de région sans chambre territoriale (Île-de-France et Corse), qui ont eu lieu en janvier 20253(*).

Ce panorama d'ensemble ne contribue pas à relancer l'attractivité d'un secteur par ailleurs caractérisé par une forte diminution du nombre d'exploitants et d'exploitations4(*) et par un vieillissement des exploitants5(*) ainsi que le relevait la Cour des comptes dans une enquête remise à la commission des finances au titre du 2° de l'article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances6(*), sans que la tendance ne parvienne, pour l'instant, à être inversée.

Comme l'ensemble des concours publics destinés à l'agriculture, les crédits de la mission AAFAR pour 2026 sont particulièrement scrutés par les professionnels du secteur. Ces crédits de la mission en 2026 sont répartis, comme l'an passé, entre quatre programmes :

le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » qui porte les dispositifs d'aide aux filières agricoles et forestières, et les financements attribués par l'État en cofinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (PAC) ;

- le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » qui couvre pour l'essentiel des interventions visant à assurer la maîtrise des risques sanitaires et phytosanitaires affectant les animaux, les végétaux et les produits alimentaires, ne réservant qu'une faible partie de ses interventions à la sécurité sanitaire des aliments proprement dite ;

- le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » est le programme support du ministère de l'agriculture et réunit la plupart des moyens nécessaires à la couverture des coûts de gestion des missions du ministère (en dehors de l'enseignement agricole qui est porté par le programme 143 « Enseignement technique agricole » de la mission « Enseignement scolaire ») ;

- et enfin le programme 381 « Allègements de cotisations et contributions sociales », créé par la loi de finances pour 2023, qui couvre les compensations et allègements qui bénéficiaient antérieurement de l'affectation d'une part des recettes de la TVA.

A. UNE DIMINUTION DES MOYENS ALLOUÉS À LA MISSION PRINCIPALEMENT AU DÉTRIMENT DE LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE

La mission est de nouveau mobilisée en 2026 en vue de contribuer à l'objectif de redressement des finances publiques : le texte déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale envisage une baisse des autorisations d'engagement de 11,59 % et une diminution des crédits de paiement de 4,98 %.

1. La diminution des crédits de la mission en 2026 cache de fortes disparités au sein des programmes et des actions

Derrière cette réduction d'ensemble des moyens alloués à la mission se cachent de fortes disparités entre les quatre programmes et au sein de ceux-ci : le principal programme en volume est lourdement amputé par rapport aux crédits votés en loi de finances pour 2025 (- 15,58 % en AE et - 9,06 % en CP pour le programme 149) tandis que les programmes 206 et 215 voient leurs moyens être contractés ou stabilisés dans des proportions moindres (- 8,83 % en AE et - 1,88 % en CP pour le programme 206 ; et - 9,51 % en AE et + 1,62 % en CP pour le programme 215). Enfin, le programme 381, qui ne comprend pas de crédits pilotables, finance un dispositif d'exonération des cotisations patronales pour l'embauche de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi (TO-DE) : il s'agit de la compensation versée à l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) ainsi que d'une partie de la compensation - le reste de la compensation est porté par le programme 149 - versée à la Caisse centrale de mutualité sociale agricole. Les moyens du programme 381 progressent de 0,11 % en AE comme en CP.

Le tableau ci-après récapitule les crédits alloués aux actions et aux sous-actions de chacun des quatre programmes en loi de finances initiale pour 2025 et dans le projet de loi de finances pour 2026 déposé à l'Assemblée nationale.

Crédits alloués aux actions et aux sous-actions des quatre programmes
de la mission AAFAR

(en euros)

 

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Programme / Action / Sous-action

LFI 2025

PLF 2026

Ouvertures

Variation annuelle

FdC et AdP attendus

Ouvertures

Variation annuelle

FdC et AdP attendus

149 - Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

2 324 795 264

1 962 488 837

- 15,58 %

960 000

2 261 317 665

2 056 447 002

- 9,06 %

960 000

21 - Adaptation des filières à l'évolution des marchés

250 264 254

234 009 850

- 6,49 %

 

250 869 648

234 452 078

- 6,54 %

 

22 - Gestion des crises et des aléas de la production agricole

220 769 139

110 900 000

- 49,77 %

 

218 914 084

110 900 000

- 49,34 %

 

23 - Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles

116 202 510

105 340 000

- 9,35 %

 

131 823 004

105 460 272

- 20,00 %

 

24 - Gestion équilibrée et durable des territoires

516 327 815

485 216 711

- 6,03 %

960 000

515 088 140

516 427 462

+ 0,26 %

960 000

25 - Protection sociale

156 920 000

142 950 000

- 8,90 %

 

156 920 000

142 950 000

- 8,90 %

 

26 - Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois

287 834 890

287 414 889

- 0,15 %

 

290 207 395

289 787 394

- 0,14 %

 

27 - Moyens de mise en oeuvre des politiques publiques et gestion des interventions

440 345 599

478 132 500

+ 8,58 %

 

440 345 599

478 132 500

+ 8,58 %

 

29 - Planification écologique

336 131 057

118 524 887

- 64,74 %

 

257 149 795

178 337 296

- 30,65 %

 

206 - Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation

921 078 512

839 725 962

- 8,83 %

6 568 267

32 699 940

854 636 527

838 604 272

- 1,88 %

6 568 267

32 699 940

01 - Santé, qualité et protection des végétaux

34 473 200

33 673 200

- 2,32 %

1 568 625

742 968

34 304 200

33 504 200

- 2,33 %

1 568 625

742 968

02 - Lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal

122 920 670

167 120 070

+ 35,96 %

1 829 616

31 836 822

122 920 670

163 120 070

+ 32,70 %

1 829 616

31 836 822

03 - Sécurité sanitaire de l'alimentation

112 272 579

103 667 500

- 7,66 %

3 003 326

106 256 127

103 667 500

- 2,44 %

3 003 326

04 - Actions transversales

125 617 626

129 749 536

+ 3,29 %

 

118 163 633

115 420 016

- 2,32 %

 

05 - Elimination des cadavres et des sous- produits animaux

4 000 000

4 000 000

   

4 000 000

4 000 000

   

06 - Mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation

359 677 352

370 705 156

+ 3,07 %

10 000

359 677 352

370 705 156

+ 3,07 %

10 000

08 - Politique de l'alimentation pour la Souveraineté Alimentaire

6 810 500

5 810 500

- 14,68 %

166 700

110 150

6 810 500

5 810 500

- 14,68 %

166 700

110 150

09 - Planification écologique - Stratégie de réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires

155 306 585

25 000 000

- 83,90 %

 

102 504 045

42 376 830

- 58,66 %

 

215 - Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture

715 254 065

647 230 656

- 9,51 %

6 822 452

651 189 597

661 770 785

+ 1,62 %

6 822 452

7 197 248

01 - Moyens de l'administration centrale

180 133 443

222 502 361

+ 23,52 %

562 976

181 485 396

226 508 902

+ 24,81 %

562 976

512 225

02 - Évaluation de l'impact des politiques publiques et information économique

12 268 347

17 104 586

+ 39,42 %

3 070 083

11 768 347

16 604 586

+ 41,10 %

3 070 083

4 189 496

03 - Moyens des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, des directions de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (et de la mer)

379 985 476

323 640 865

- 14,83 %

2 217 449

380 189 714

323 341 274

- 14,95 %

2 217 449

2 217 449

04 - Moyens communs

142 866 799

83 982 844

- 41,22 %

971 944

77 746 140

95 316 023

+ 22,60 %

971 944

278 078

381 - Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)

448 500 000

449 000 000

+ 0,11 %

 

448 500 000

449 000 000

+ 0,11 %

 

01 - Allègements de cotisations et contributions sociales

448 500 000

449 000 000

+ 0,11 %

 

448 500 000

449 000 000

+ 0,11 %

 

Totaux

4 409 627 841

3 898 445 455

- 11,59 %

13 390 719

33 659 940

4 215 643 789

4 005 822 059

- 4,98 %

13 390 719

40 857 188

*FdC et AdP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : programmes annuels de performance annexés au projet de loi de finances pour 2026

2. Des orientations qui conduisent à limiter fortement les crédits alloués à la planification écologique et, dans une moindre mesure, aux politiques de gestion des crises et des aléas

Dans l'ensemble, la diminution des moyens alloués à la mission budgétaire est importante. D'environ 500 millions d'euros en AE, elle est supportée essentiellement par les seules actions considérées comme pilotables par le ministère, c'est-à-dire :

- les actions qui portent la planification écologique, par rapport à la LFI 2025, l'action 29 « Planification écologique » du programme 149 perd ainsi 220 millions d'euros en AE et 80 millions d'euros en CP et l'action 09 « Planification écologique - Stratégie de réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires » du programme 206 voit son enveloppe réduite de 130 millions d'euros en AE et 60 millions d'euros en CP ;

- et les politiques de gestion des crises et des aléas de la production agricole : l'action 22 « Gestion des crises et des aléas de la production agricole » du programme 149 perd 110 millions d'euros en AE et 118 millions d'euros en CP par rapport à la LFI pour 2025.

En effet, de nombreuses dépenses au sein de la mission ne sont pilotables qu'à la marge, qu'il s'agisse des co-financements européens (qui sont perdus si l'État renonce à sa part de la dépense), des dépenses de personnel (les missions du ministère ne se prêtent que très peu à une contractualisation de courte durée) ou des aides allouées dans le cadre de crises sanitaires ou climatiques dont on pourrait difficilement priver les exploitants concernés dans le contexte actuel.

Le Gouvernement a donc fait le choix, pour respecter le cadre budgétaire contraint, d'une option politique de court terme, plutôt que l'investissement durable. Les conséquences de ces choix sont commentées dans la deuxième partie du présent rapport consacrée aux crédits par programme.

De la réduction des crédits découle un nouveau recul du verdissement de la mission. La loi de finances pour 2020 a prévu que le Gouvernement remette au Parlement, en annexe à chaque projet de loi de finances, un rapport consacré à « l'impact environnemental du budget ». Ce résultat est obtenu en comptabilisant « les crédits budgétaires, taxes affectées et dépenses fiscales ayant un impact favorable sur l'environnement ».

En l'espèce, le budget 2026 de la mission AAFAR porte un total de 1,31 milliard d'euros favorables à l'environnement - répartis entre 0,83 milliard d'euros de crédits budgétaires et taxes affectées et 470 millions d'euros de dépenses fiscales, contre 1,87 milliard d'euros en 2025 et 2,8 milliards d'euros en 2024.

Cela traduit un budget agricole et forestier de moins en moins engagé en matière environnementale depuis 2024. Ce choix, contraint par la situation budgétaire, contraste avec la situation antérieure : le PLF pour 2024 avait abouti à la création d'une action « planification écologique » dans chacun des programmes 149 et 206, bénéficiant d'un total de 1,3 milliard d'euros, ramené en 2025 à 491 millions d'euros et réduit pour 2026 à 143 millions d'euros (auxquels on peut ajouter 25 millions d'euros qui figurent, pour 2026, au compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural, cf. infra).

Moyens alloués aux deux actions de la mission AAFAR consacrées
à la planification écologique

(en milliards d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Source : Commission des finances du Sénat

3. Un niveau de crédits inférieur à la période exceptionnelle 2022- 2025 mais supérieur à ce qu'il était en 2021

La diminution des autorisations d'engagement et des crédits de paiement alloués à la mission pour 2026, même si elle est importante, doit être nuancée. Outre le maintien (évoqué supra) du total des concours publics alloués à l'agriculture en 2026 grâce à l'effort fiscal et social consenti via la première partie du PLF et via le PLFSS en cours d'examen par le Parlement, il faut souligner que la diminution cette année est consécutive à une période de 2022 à 2025 qui a mobilisé un niveau tout à fait exceptionnel de crédits en loi de finances initiale, en particulier l'année 2024 qui correspond à la dernière année pleinement exécutée. Certes, une partie de ces crédits, au cours de l'année 2024, avait fait l'objet d'annulation7(*) sans compter le recours au gel et au surgel en fin d'année 2024, mais le constat d'une forte diminution des moyens se confirme néanmoins.

En effet, en autorisations d'engagement, les moyens ouverts pour 2026 par rapport aux moyens effectivement consommés en 2024 diminuent de 24,84 %, ce qui est conséquent.

Les autorisations d'engagement par programme : exécution 2024 et PLF pour 2026

(en millions d'euros arrondis à l'entier le plus proche)

Source : commission des finances du Sénat

En crédits de paiement, la baisse des moyens pour 2026 par rapport aux moyens effectivement consommés en 2024 est moindre mais elle atteint tout de même 10,94 %, là aussi avec des différences entre les programmes qu'illustre le graphique ci-après.

Les crédits de paiement par programmes : exécution 2024 et PLF pour 2026

(en millions d'euros arrondis à l'entier le plus proche)

Source : Commission des finances du Sénat

S'agissant toujours des crédits de paiement, le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » bénéficierait donc de 2,06 milliards d'euros en 2026 contre 2,85 milliards d'euros exécutés en 2024 (ce montant exécuté était de 2,87 milliards d'euros en 2023, de 3,28 milliards d'euros en 2022, de 2,38 milliards d'euros en 2021 et de 1,71 milliard d'euros en 2020).

Les trois autres programmes voient leurs crédits de paiement ouverts pour 2026 approcher le montant exécuté en 2024. Pour le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », les quelque 839 millions d'euros ouverts en CP pour 2026 sont à mettre en regard avec les 870 millions d'euros exécutés en 2024 (en exécution, les CP s'élevaient à 770,29 millions d'euros exécutés en 2023, 791,68 millions d'euros en 2022, 608,3 millions d'euros en 2021 et 555,6 millions d'euros en 2020).

S'agissant du programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », qui bénéficiera en 2026 de 662 millions d'euros, c'est même une hausse de 7,3 % par rapport aux 617 millions d'euros exécutés en CP en 2024.

Il en est de même pour le programme 381 « Allègements de cotisations et contributions sociales » : avec 449 millions d'euros ouverts en CP pour 2026, le programme disposera de 2,5 % de crédits supplémentaires par rapport à la dépense constatée de 438 millions d'euros en CP 2024.

Les rapporteurs spéciaux soulignent le fait que les crédits de paiement pour 2023, tout en traduisant un niveau moins exceptionnel que pendant la parenthèse 2022-2025, restent supérieurs d'un milliard d'euros par rapport à l'exécution 2021.

Crédits de paiement exécutés sur la mission AAFAR depuis 2021

(en millions d'euros)

Note : Pour 2025 et 2026, il s'agit des crédits ouverts en LFI.

Source : Commission des finances du Sénat

Toutefois, les rapporteurs alertent sur une tendance, désormais bien installée s'agissant de la mission AAFAR qui consiste à procéder à des ouvertures massives de crédits en cours d'exercice, au grès des besoins, en AE comme en CP. Certes, par nature, la mission AAFAR est sujette à des aléas, mais le caractère imprévisible de ceux-ci est discutable. Cette tendance s'est confirmée en 2024 comme l'illustre le tableau ci-après.

Évolution des crédits de la mission « Cohésion des territoires » entre la loi de finances initiale et les crédits effectivement exécutés en 2023 et 2024

(en millions d'euros et en volume)

Programmes

 

Exécution 2023

Crédits ouverts en LFI 20248(*)

Total des crédits ouverts en 2024

Exécution 2024

Variation exécution 2024/2023

Écart exécution 2024/LFI 2024

Programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt »

AE

2 866

3 177

3 146

3 060

+ 6,77 %

+ 194

CP

2 908

2 736

2 897

2 573

- 11,52 %

- 335

Programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation »

AE

804,7

1 036

1 152

1 072

+ 33,22 %

+ 267

CP

770,3

906

1 000

870

+ 12,94 %

+ 100

Programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture »

AE

593,5

702

705

616

+ 3,8 %

+ 23

CP

597,4

682

627

617

+ 3,28 %

+ 20

Programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG) »

AE

433

423

438

438

+ 1,15 %

+ 5

CP

433

423

438

438

+ 1,15 %

+ 5

Total Mission

AE

4 697,6

5 338

5 511

5 186

+ 10,4 %

+ 488,4

CP

4 709

4 747

4 962

4 498

- 4,48 %

- 211

Note : AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. LFI : budgétisation en loi de finances initiale, y compris les prévisions de fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement ou de résultats de la gestion.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Pour davantage de détails sur la nature et le niveau élevé des mouvements infra-annuels de crédits au sein de la mission, les rapporteurs spéciaux renvoient à leur rapport consacré aux comptes de la mission pour l'année 20249(*).

B. UNE DIMINUTION QUI NE DEVRAIT PAS ENTRAVER LES PROMESSES FORMULÉES À L'ÉGARD DU MONDE AGRICOLE MÊME SI DES POINTS D'ATTENTION DEMEURENT

L'effectivité d'une baisse des crédits dans le PLF pour 2026 apparaît donc indéniable mais le périmètre de cette diminution peut être nuancé. Les rapporteurs spéciaux se sont principalement attachés à vérifier que le niveau des crédits envisagés pour 2026 est en adéquation avec le périmètre des politiques publiques conduites et qu'il intègre les engagements qui ont été pris à l'égard des agriculteurs depuis deux ans.

En effet, des tensions sociales chez les agriculteurs dans de nombreux États européens, dont la France, apparues au cours de l'année 2024, ont conduit les Gouvernement successifs à formaliser puis à confirmer un total de 70 engagements en tout, en faveur des agriculteurs qui sont progressivement mis en place.

Parmi les aides initiées depuis le début de cette crise (et qui sont, ou seront, financés sur les exercices 2024, 2025 et 2026) figurent :

- un fonds d'urgence pour le secteur viticole de 80 millions d'euros (soumis au régime de minimis), sous forme d'une aide de trésorerie exceptionnelle à destination des viticulteurs touchés par les pertes de production ou pertes économique subies en 2023, dans les régions Occitanie, Provence-Alpes Côte d'Azur, Nouvelle-Aquitaine et Auvergne-Rhône-Alpes ;

- un dispositif de réduction du potentiel de production viticole (dispositif structurel, dit d'« arrachage définitif ») doté d'une enveloppe de 110,4 millions d'euros ;

- un dispositif de prêts bonifiés, à hauteur de 1,9 million d'euros, à l'attention du secteur viti-vinicole ;

- un fonds d'urgence de 50 millions d'euros visant à soutenir les exploitations d'élevage impactées par la maladie hémorragique épizootique (MHE), et s'adressant aux éleveurs et aux commerçants en bestiaux ;

- une aide à la filière biologique de 105 millions d'euros, visant à prendre en charge une partie des pertes économiques engendrées par les conséquences de la guerre en Ukraine et de remédier ainsi aux problèmes de liquidité immédiats de ces exploitations en évitant des « déconversions » massives qui impacteraient le potentiel de production biologique français ;

- un dispositif d'aide exceptionnelle à la trésorerie, pour 9,5 millions d'euros, au bénéfice des planteurs de banane dessert dans les départements de Martinique et de Guadeloupe touchés par les conséquences de l'agression de la Russie contre l'Ukraine ;

- une aide complémentaire de 10 millions d'euros pour la prise en charge d'une partie des pertes de production des éleveurs de volaille en conséquence des mesures de police sanitaire mises en place pour lutter contre l'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) ;

- la mise en oeuvre du dispositif d'indemnisation pour la prise en charge de la surmortalité liée à la fièvre catarrhale ovine (FCO) dans les élevages ovins et bovins pour 75 millions d'euros ;

- un dispositif de prise en charge d'une partie des pertes économiques des exploitations apicoles engendrées par les conséquences de l'agression de l'Ukraine par la Russie sur la période correspondant à la déclaration de TVA pour 2023, d'un montant de 4,3 millions d'euros ;

- des soutiens à la trésorerie sous forme de prêts garantis, à concurrence de 85 millions d'euros ;

- une deuxième vague d'aide à l'arrachage sanitaire en Gironde pour 15,46 millions d'euros ;

- le dispositif « Fruits et légumes outre-mer » pour la Martinique et Mayotte, pour un peu plus de 100 000 euros ;

- un fonds d'urgence « soutien aux exploitations en difficulté suite aux inondations de 2024 » en Ille-et-Vilaine, d'un montant de 300 000 euros ;

- un fonds d'urgence lancé en juin 2025, au bénéficie des jeunes installés en viticulture, pour 9 millions d'euros ;

- une aide aux pépiniéristes en viticulture (1 million d'euros) mis en difficulté par les moindres achats de plants. Les rapporteurs spéciaux ont été informés du fait que cette situation pourrait s'aggraver à la suite des opérations d'arrachage définitif et seront attentifs aux moyens consacrés aux pépiniéristes en 2026 ;

- un fonds d'urgence pour soutenir les exploitations agricoles, en particulier viticoles, touchées par les incendies de l'Aude survenus à l'été 2025, pour un total de 7 millions d'euros incluant un dispositif de prise en charge des cotisations sociales d'un montant d'un million d'euros.

Certaines mesures attendues, non budgétaires ou fiscales, ont par ailleurs été prises : nouveau plan national loup, publication de mesures règlementaires sur le contentieux agricole, sur les obligations légales de débroussaillement, sur la simplification des mesures administratives préalables au curage, non-imposition sous condition de 30 % des reprises de dotation pour épargne de précaution, la transformation de la dotation pour stock de vaches en une provision comptable ainsi que des avantages fiscaux destinés à favoriser la transmission de patrimoine vers les jeunes agriculteurs, prise en compte des 25 meilleures années pour le calcul de la pension de retraite, relèvement de 1,2 à 1,25 SMIC du seuil de dégressivité du dispositif travailleurs occasionnels - demandeurs d'emploi, dit TO-DE.

Quelques promesses sont également en cours de discussion à l'échelle européenne, en particulier concernant l'effectivité des « clauses miroirs » en cas d'entrée en vigueur de l'accord UE-MERCOSUR.

Un certain nombre d'engagements doit encore trouver une traduction au plan national sur le fondement du projet de loi de finances pour 2026. Certains engagements se traduisent par des dispositions fiscales qui figurent en première partie du projet de loi de finances pour 2026 (prorogation de trois ans du dotation pour épargne de précaution, prorogation de deux ans du crédits d'impôt « agriculture biologique », exonération d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés - sous condition d'affectation du montant de cette exonération - des plus-values et des profits sur stocks dégagés du fait de toute perception d'indemnités d'abattage pour raisons sanitaires d'animaux affectés à la reproduction du cheptel pour les années 2025 à 2027, etc.). Les rapporteurs spéciaux renvoient au rapport général sur la première partie du PLF pour le détail des mesures prises.

Quelques-uns des engagements à l'égard des agriculteurs le seront sur le fondement du budget voté en seconde partie de la loi de finances. Les rapporteurs spéciaux se sont donc penchés sur l'adéquation des crédits budgétaires proposés aux engagements pris. Ils considèrent, à l'issue des nombreux échanges conduits que la baisse des crédits de la mission, même si elle donne lieu à des arbitrages qui seront politiquement débattus, n'entrave pas la capacité du Gouvernement à disposer des moyens de répondre, au cours de l'année 2026, aux attentes légitimes des agriculteurs. Ils constatent notamment le maintien des crédits destinés à alléger le coût du travail. Par ailleurs, même si des améliorations devront sans doute être apportées, les dépenses de personnel pour 2026 devraient permettre de ne pas entraver le niveau de services rendus aux agriculteurs. Toutefois, ils demeurent très vigilants s'agissant des dispositifs d'aide à l'installation.

1. Une stabilisation des dépenses de personnel par rapport à la LFI 2025

La mission est caractérisée par une stabilisation des dépenses de personnel. Celles-ci atteignent en 2026 un total de 940,99 millions d'euros en AE comme en CP, réparties entre les programmes 206 (369,81 millions d'euros, contre 358,78 millions d'euros en 2025 et 390,42 millions en 2024) et 215 (571,18 millions d'euros, contre 575,25 millions d'euros en 2025 et 592,44 millions d'euros en 2024) soit une quasi stabilisation (+ 6,96 millions d'euros, soit + 0,75 %) par rapport aux 934,03 millions d'euros de 2025.

Ces montants devraient permettre de couvrir les besoins pour 2026, sans toutefois laisser de marge de manoeuvre importante.

2. Des dispositifs d'allègement du coût du travail préservés

Le dispositif d'exonérations de cotisations patronales sur bas salaires TO-DE (travailleurs ouvriers demandeurs d'emplois) bénéficie à un employeur agricole qui souhaite recruter un travailleur saisonnier. Il est reconduit cette année encore.

Les crédits y afférant sont retracés dans l'action 25 « Protection sociale » du programme 149 (cf. infra). Les allègements du coût du travail en agriculture, qui sont destinés à compenser le manque à gagner lié à cette exonération à la Mutualité Sociale Agricole (MSA), ont été isolés dans le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture ». Ce programme ne comprend qu'une seule action intitulée « Allègement du coût du travail de la main-d'oeuvre saisonnière » pour un montant de 449 millions d'euros en 2026, contre 448,5 millions d'euros en 2024 et 423 millions d'euros en 2024 (cf. infra pour le commentaire par programme).

Les rapporteurs spéciaux constatent que l'effort porté sur ce dispositif, combiné à diverses mesures relevant des lois de financement de la sécurité sociale, témoigne de la volonté des gouvernements successifs de fluidifier le marché de l'emploi agricole, après l'inscription de l'agriculture dans la liste des secteurs de métiers à tension qui facilite le recrutement de la main-d'oeuvre hors Union européenne par la dispense de l'opposabilité de la situation de l'emploi.

3. Une attention particulière aux crédits budgétaires consacrés au renouvellement des générations

Le renouvellement des générations constitue un défi d'ampleur pour le secteur agricole. Alors que la moitié des nouveaux entrants dans le secteur n'est pas issu du monde agricole10(*), et ne dispose en conséquence d'aucun bien foncier agricole, la mise en place de politiques volontaristes pour attirer de nouveaux exploitants et travailleurs agricoles constitue une nécessité pour rétablir la souveraineté alimentaire. Comme le relevait la Cour des comptes dans une enquête remise à la commission des finances au titre du 2° de l'article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances11(*), 43 % des exploitants sont à l'heure actuelle âgés de 55 ans ou plus, et susceptibles de partir à la retraite d'ici à 2033. L'âge moyen des agriculteurs français est ainsi passé de 50,2 ans en 2010 à 51,4 ans en 2020. Or, le profil des candidats à l'installation évolue lui aussi. Si la transmission des exploitations s'est longtemps faite dans un cadre familial, elle s'opère principalement aujourd'hui au profit de nouveaux arrivants.

Une démarche volontariste pour rétablir l'attractivité du secteur agricole doit être mise en place et concerner tous les aspects de la vie professionnelle des intervenants : l'accès à la profession par des formations de qualité, l'acquisition du foncier agricole, le bénéfice d'un revenu digne, un juste rapport de force avec les autres acteurs économiques, une fiscalité adaptée, etc. Se sont ainsi multipliées les initiatives législatives12(*), en particulier pour l'accès au foncier, que ce soit pour faciliter l'accès à la propriété, ou à la location (comme c'est le cas de 40 % des exploitants agricoles aujourd'hui).

Le financement de l'aide à l'installation des agriculteurs provient à la fois de financements européens13(*), alloués par l'intermédiaire des régions, de dispositifs fiscaux (évoqués supra), d'avantages sociaux comme des exonérations de cotisations sociales à la mutualité sociale agricole (MSA) spécifiquement tournées vers les primo-installants, ainsi que de dotations budgétaires finançant des aides directes à l'installation ou des prêts bonifiés14(*).

Du fait de la transmission aux conseils régionaux de la gestion des aides non-surfaciques, en application de la PAC 2023-2027, incluant la « dotation aux jeunes agriculteurs » ainsi que les aides liées à la modernisation des installations, lesquelles constituent un vecteur indispensable avant toute transmission, l'action 23 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles » du programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » avait vu ses moyes diminuer entre 2023 et 2025 (116 millions d'euros en 2025 en autorisations d'engagement, contre 123 millions d'euros pour 2024 et 172 millions d'euros en 2023). Cet état de fait avait été compensé par un cumul des crédits supplémentaires à destination des régions qui avait abouti, au final, à un maintien des aides à l'installation en 2024 et en 2025, répondant là aussi aux engagements pris, d'autant qu'ils viennent en complément des mesures fiscales d'incitation à la transmission des exploitations agricoles portées à l'article 70 de la loi de finances pour 2025.

Ces mesures sont d'autant plus importantes que la France parvient péniblement, malgré toutes les mesures prises, à stabiliser le nombre annuel d'installations de nouveaux agriculteurs.

Nombre annuel d'installations d'exploitants agricoles en France
entre 2003 et 2023

Source : Réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Toutefois, les rapporteurs spéciaux notent, à ce stade, une incertitude dans le respect des promesses gouvernementales concernant les crédits budgétaires à destination des aides du programme d'accompagnement à l'installation et à la transmission en agriculture (AITA) tels qu'ils sont prévus, à ce stade, dans le PLF pour 2026.

Les AITA sont destinées à soutenir l'accompagnement des candidats à l'installation et la transmission des exploitations agricoles. Elles visent notamment à accompagner les jeunes s'installant hors du cadre familial, qui sont, comme indiqué précédemment, de plus en plus nombreux. Ce programme, qui n'est pas cofinancé par l'Union européenne, a pris le relais, en 2018, du programme pour l'installation des jeunes en agriculture et de développement des initiatives locales (PIDIL) en intégrant les dispositifs relevant de la préparation à l'installation. Le programme AITA permet d'adapter, dans les régions, des mesures nationales, ainsi que diverses interventions opérationnelles et financières diversifiées.

Afin de favoriser la mise en place d'interlocuteurs uniques dans le parcours d'aide à l'installation de nouveaux agriculteurs, qui constituent un élément essentiel dans la réussite du dispositif, l'État s'était engagé à relever les crédits budgétaires destinés à l'AITA à 20 millions d'euros : or, à ce stade, ce sont environ 13 millions d'euros qui sont inscrits en PLF pour 2026 pour l'AITA. Les rapporteurs spéciaux notent que les discussions entre le Gouvernement et les chambres d'agriculture se poursuivent sur ce point et ils ne prennent donc pas l'initiative, dans l'immédiat, d'un amendement de mouvement de crédits à ce sujet, préférant que se poursuive le dialogue. Ils soulignent toutefois l'importance du mécanisme et de son financement.

II. DES PROGRAMMES ET DES ACTIONS HÉTÉROGÈNES DONT LES MOYENS ÉVOLUENT DE MANIÈRE DIFFÉRENTE

A. LE PROGRAMME 149 « COMPÉTITIVITÉ ET DURABILITÉ DE L'AGRICULTURE, DE L'AGROALIMENTAIRE ET DE LA FORÊT » DE NOUVEAU FORTEMENT AMPUTÉ

Ce programme rassemble les dotations visant à soutenir les filières agricoles et forestières, notamment par la transformation des modèles de production, l'amélioration de la performance économique et environnementale de l'agriculture, le soutien aux revenus des producteurs et une répartition plus équilibrée entre les différents maillons des filières. Ces objectifs doivent contribuer à la souveraineté alimentaire et venir en soutien à l'économie.

Il intervient dans le financement des aides nationales ou européennes en faveur des exploitations agricoles et des opérateurs des filières agroalimentaires, forestières et halieutiques.

La plupart de ces aides relèvent du second pilier de la politique agricole commune (PAC) à travers le Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural (ou FEADER), telles que l'appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations, le soutien aux investissements du Plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE), la dotation aux jeunes agriculteurs, le soutien au secteur de l'élevage dans les zones soumises à des contraintes naturelles principalement via les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN15(*)), les mesures en faveur de pratiques agricoles respectueuses de l'environnement et de la biodiversité (mesures agro-environnementales et climatiques -MAEC- et soutien à l'agriculture biologique) ainsi que les mesures contre la prédation.

Les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC)

Les mesures agroenvironnementales et climatiques permettent d'accompagner les exploitations agricoles qui s'engagent dans le développement de pratiques combinant performance économique et performance environnementale, ou dans le maintien de telles pratiques lorsqu'elles sont menacées de disparition.

Initialement instaurées dans le cadre de la PAC 2014-2020, elles prennent la forme d'aides ou d'indemnités compensatoires et contribuent à la préservation de la qualité de l'eau, de la biodiversité, des sols ou à la lutte contre le changement climatique. Les paramètres initiaux des MAEC (montant et forme du soutien en fonction du type d'activités) ont été définis en mai 2014 par le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire (CSO). Ces enjeux locaux sont donc très variables d'un territoire à un autre : dans les outre-mer par exemple, les MAEC sont principalement sectorielles (banane, canne à sucre, vergers, etc.)16(*).

Outre le fait qu'elles répondent à des enjeux localisés, les MAEC peuvent aussi s'inscrire dans une logique de système (système herbivore, etc.) ou contribuer à la préservation des ressources génétiques : sont prévus dans ce cadre des financements pour les races animales et végétales menacées ainsi que pour l'apiculture.

Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2023, la gouvernance des aides a été repensée : l'État est désormais l'autorité de gestion des aides surfaciques (MAEC, aides à l'agriculture biologique, etc.) tandis que les régions sont en charge de la gestion des aides non surfaciques, par exemple l'attribution des aides à l'installation versées dans le cadre du FEADER.

Source : Ministère de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire

Si l'on s'en tient à une comparaison LFI pour 2025 et PLF pour 2026, le programme 149 subit une contraction de 15,58 % des autorisations d'engagement et de 9,06 % des crédits de paiement, ce qui représente tout de même une réduction de 362 millions d'euros en AE et 205 millions d'euros en CP. Proportionnellement, c'est davantage que la baisse des crédits pour la mission dans son ensemble. Comme indiqué précédemment, cette forte diminution doit être observée à l'aune de l'augmentation exceptionnelle que le programme avait connu par le passé.

Au sein de ce programme, la quasi-totalité des sous-actions voient leurs AE et leurs CP diminuer, certes dans des proportions variables, afin de respecter à l'échelle du programme le plafond fixé. On notera de rares exceptions. Ainsi, l'action 27 « moyens de mises en oeuvre des politiques publiques et gestion des interventions » connaît une hausse de ses moyens de + 8,58 % en AE comme en CP. Cette action regroupe les moyens de fonctionnement de 8 des 10 opérateurs rattachés à la mission. Les crédits de l'action augmentent fortement mais cela ne traduit absolument pas un renforcement des moyens des opérateurs qui sont fortement mis à contribution (cf. infra). La hausse dans sa quasi-totalité vient abonder une provision pour aléas destinée à financer les refus d'apurement communautaire et les frais financiers associés qui sont susceptibles d'êtres notifiés par la Commission européenne. Cette provision pour aléas passe de 80 à 120 millions d'euros, ce qui explique la hausse des moyens alloués à l'action, les autres postes demeurant stables.

Interrogé par les rapporteurs spéciaux sur ce point, le ministère a fait savoir qu'il s'agissait de financer « la perspective jugée plutôt stable en matière de charges d'intérêts payées pour le préfinancement de la PAC, d'une part, et de plusieurs décisions de la Commission européenne attendues fin 2025 et début 2026 en matière de refus d'apurement communautaires, d'autre part. »

La seconde exception notable concerne la sous-action 24-01 « Hydraulique agricole et ouvrages domaniaux », renforcée de 20 millions d'euros en AE dans la perspective de poursuivre l'appui de l'État aux investissements collectifs dans la sécurisation de la ressource en eau. L'augmentation de la ressource en crédits de paiement (+ 8,4 millions d'euros) permettra d'honorer les engagements de l'État dans le cadre des deux premiers appels à projets du fonds hydraulique lancés en 2024 et 2025.

Les autres crédits du programme sont quasiment tous en diminution, mais dans des proportions qui varient.

L'action 21 « Adaptation des filières à l'évolution des marchés » porte des dispositifs destinés à favoriser l'adéquation des filières aux marchés. Elle perd 16 millions d'euros en AE comme en CP, passant de 250 à 234 millions d'euros.

Figure au sein de l'action 21 une sous-action « Intervention en faveur des filières ultra-marines » qui comprend les crédits du Comité interministériel des Outre-Mer (CIOM), certains crédits de l'Office de développement de l'économie agricole d'outre-mer (ODEADOM) ainsi que les crédits du plan urgence Guyane. Jusqu'en 2023, les crédits du CIOM s'élevaient à 45 millions d'euros par an conformément aux engagements pris par le Président de la République en octobre 2019. Son montant pour 2026 est stable, à 62 millions d'euros en AE comme en CP pour 2025.

La baisse des crédits de l'action 21 porte donc sur les autres sous-actions. Est notamment concerné, au sein de cette action, le Fonds Avenir Bio dont les crédits sont divisés par deux puisqu'il perd 9,2 millions d'euros. Mis en place dans le cadre du programme Ambition Bio 2017, qui vise à soutenir des projets de développement et de consolidation des filières biologiques, il accompagne financièrement les opérateurs économiques ayant des projets collectifs impliquant l'amont et l'aval des filières. Alors qu'il avait bénéficié d'une augmentation de ses moyens en 2024 (+ 5 millions d'euros), ses moyens ont été diminués d'autant en 2025 et sont quasiment amputés du double en 2026, pour porter son enveloppe annuelle à hauteur de 8,8 millions d'euros.

Le Comité interministériel des outre-mer (CIOM)

Le comité interministériel des outre-mer (CIOM) a pour objectif de fluidifier l'action publique dans les outre-mer et d'assurer le suivi des mesures figurant dans le livre bleu des outre-mer. Plusieurs des actions suivies dans le cadre du CIOM sont donc portées budgétairement par la mission AAFAR.

Ces crédits financent différentes mesures et filières : le régime spécifique d'approvisionnement, les actions en faveur des productions animales (primes animales, importation d'animaux vivants, structuration de l'élevage), les productions végétales de diversification, la filière canne-sucre-rhum, la filière banane, mais aussi la protection de la forêt amazonienne.

Lors du CIOM qui s'était tenu au mois de juillet 2023, la Première ministre avait annoncé un soutien renforcé pour atteindre les objectifs des plans de souveraineté alimentaire élaborés par les territoires ultramarins à hauteur de 15 millions d'euros supplémentaires dès 2024, pour atteindre un montant total de crédits du complément national CIOM de 60 millions d'euros. Plusieurs annonces spécifiques aux outre-mer avaient également été faites à cette occasion, comme le classement de la canne à sucre parmi les « cultures mineures » concernant l'encadrement des autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytosanitaires, afin de faciliter les demandes d'extension d'usage de la canne à sucre, par exemple à des produits phytosanitaires.

Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Michel Barnier a annoncé la tenue d'un nouveau comité interministériel des outre-mer qui s'est tenu en nuillet 2025. À cette occasion, le problème du coût de la vie dans les outre-mer et les récents mouvements sociaux que cette question a entraînés, en particulier dans les Antilles françaises ont été abordés. La situation de Mayotte a par ailleurs été évoquée.

Source : Site Internet du Ministère des Outre-Mer17(*)

La majeure partie des crédits (139,9 millions d'euros en AE comme en CP) est destinée au soutien de la production de sucre dans les départements et régions d'outre-mer, en particulier pour venir en aide aux planteurs de canne à sucre. Ces crédits sont reconduits à l'identique.

Les crédits consacrés à la protection sociale, à la gestion des crises et des aléas et à la prise en charge assurantielle diminuent.

L'action 22 « Gestion des crises et des aléas de la production agricole » perd ainsi quasiment 50 % de ses moyens, en AE comme en CP. On soulignera entre autres que la sous-action 22-02 « crises économiques et sanitaires » qui avait bénéficié de 10 millions d'euros en 202518(*), alors qu'elle n'est traditionnellement pas dotée en LFI en ce qu'elle supporte des dépenses de crises,( que le gouvernement estime, par nature, imprévisibles) n'est de nouveau pas dotée en PLF pour 2026.

L'action 22 du programme 149 comprend également les crédits destinés à financer la part étatique de l'assurance récolte. Elle avait financé, en 2024 comme en 2025, un ré-abondement du fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA). Créé en 2010, ce fonds a pris le relai du régime de garantie contre les calamités agricoles qui existait depuis 1964. La dotation budgétaire du fonds national de gestion des risques en agriculture (sous-action 22-05) diminue en 2026 de 60,5 millions d'euros, le ministère estimant dans les explications transmises qu'il existe un « faible besoin de paiement du fond au regard de ses réserves et du contexte de sinistralité ». Ainsi, l'effort consenti en 2024 et en 2025 n'a pas été renouvelé, même s'il faut malheureusement craindre, au regard des aléas climatiques, sanitaires et économiques qui s'intensifient, que l'exécution excède de nouveau ce montant et que des mouvements de crédits infra annuels seront nécessaires. Aux crédits alloués à ce fonds s'ajoute le produit, qui lui est dévolu, de la taxe additionnelle sur les contrats d'assurance agricole, dont le produit devrait rester stable, après la hausse connue en 2024, à la suite d'une revalorisation du taux appliqué et d'une augmentation progressive du taux de couverture, pour s'établir de nouveau, en 2026, à 120 millions d'euros. Il s'agit de contributions additionnelles aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance couvrant les dommages aux bâtiments, aux véhicules et au cheptel affectés aux exploitations agricoles et les risques de responsabilité civile ainsi qu'une contribution additionnelle applicable aux exploitations conchylicoles.

Le volet assurantiel comprend également une enveloppe de FEADER dévolue aux subventions à l'assurance récolte (184,5 millions d'euros en moyenne par an pour la programmation 2023 à 2027).

La diminution constatée en 2026 marque une interruption de l'effort budgétaire consenti depuis la réforme de l'assurance récolte en 202219(*). Depuis lors, le système assurantiel du secteur agricole repose sur un partage rééquilibré du risque entre l'État, les agriculteurs et les assureurs afin d'accompagner davantage le secteur qui subit la multiplication des aléas (épisodes climatiques d'ampleur, crises sanitaires, incendies, dégradations commises par des tiers, vol de matériel agricole, impact de la situation internationale sur les cours de matière première, etc.) et alors que les acteurs sont parfois contraints de renoncer à ce type d'assurance pour des motifs économiques. L'année 2026 constituera la quatrième année d'application de la réforme qui devrait à terme aboutir à une couverture des risques à « trois étages » :

- une absorption des risques de faible intensité à l'échelle individuelle de l'exploitation agricole ;

- une mutualisation entre les territoires et les filières concernant les risques d'intensité moyenne ;

- une indemnisation directe de l'État contre les risques dits « catastrophiques ».

L'action 23 « Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles » connaît une diminution de ses moyens pour les raisons déjà mentionnées (cf. supra) de transfert progressif de la compétence aux régions. En son sein, les rapporteurs spéciaux font toutefois état d'un regret : les dotations dédiées aux stages à l'installation (sous-action 23-03) sont en baisse de 7,4 millions d'euros en AE comme en CP (2,1 millions d'euros contre 9,5 millions d'euros un an plus tôt) : « l'absence de besoin de paiement identifié » évoqué par le Gouvernement n'a pas totalement convaincu les rapporteurs spéciaux. En outre, la dotation jeunes agriculteurs (sous-action 23-06) diminue de 140 000 euros en AE et de 6,7 millions d'euros en CP20(*), pour être portée à 170 000 euros en autorisations d'engagement et 290 272 euros en crédits de paiement. Cette compétence relève toutefois désormais des régions, l'État restent autorité de gestion à Mayotte.

L'action 24 consacrée à la « Gestion équilibrée et durable des territoires » perd environ 30 millions d'euros en AE (- 6,03 %) tandis que ses CP sont maintenus (+ 0,26 %). La baisse est liée à la diminution des moyens alloués à la sous action 24-08, consacrée aux mesures agro-environnementales climatiques (MAEC), qui perd 45 millions d'euros en AE, en raison du repli prévisible des souscriptions aux MAEC en 2026, pour la 3e année de la programmation.

L'action 25 « Protection sociale », qui comprend des mesures de soutien aux entreprises agricoles, correspond presque exclusivement à la compensation d'exonérations de charges sociales pour les travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi (TO-DE) : sont sollicités à ce titre 142,55 millions d'euros en 2026 soit une diminution de 13,5 millions d'euros, en AE comme en CP, de la dotation attribuée à l'exonération de charges sociales - TO-DE et contrats vendanges (sous-action 25-17). Cette diminution prévisionnelle est justifiée essentiellement par la crise viticole : selon les estimations établies par l'Agreste, au 1er septembre 2025, la production viticole française en 2025 s'élèverait à 37,4 millions d'hectolitres, en diminution de 13 % par rapport à la moyenne quinquennale. Ce recul est la conséquence logique des conditions météorologiques défavorables (canicule, sècheresse), mais également de l'importante réduction des surfaces viticoles. Plus de 20 000 hectares ont été arrachés depuis la dernière récolte, principalement dans le Bordelais (8 000 hectares), le Sud-Ouest (3 500 hectares) et le Languedoc-Roussillon (plus de 10 000 hectares).

Ces crédits au sein du programme 149 sont inscrits en complément des 449 millions d'euros du programme 381 : comme indiqué plus haut, les allègements du coût du travail en agriculture, qui sont destinés à compenser le manque à gagner lié à cette exonération à la mutualité sociale agricole (MSA), ont été isolés dans le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture » (cf. infra pour le détail du programme).

Enfin, les moyens alloués au développement durable et à la planification écologique (action 29) au sein du programme 149 chutent.

S'agissant de la planification écologique (action 29), plusieurs dispositifs font l'objet d'une baisse de dotations, à l'image du Plan haies (29-01) qui diminue de 35 M€ en AE et 7 M€ en CP et du fonds de souveraineté alimentaire et transitions (29-04) dont la dotation diminue de 81,0 M€ en AE et 21,7 M€ en CP dans le contexte de redressement des finances publiques.

Le tableau suivant récapitule les 10 sous-actions connaissant au sein du programme 149, en 2026, les plus fortes évolutions.

Les 10 sous-actions du programme 149 connaissant les évolutions les plus significatives en PLF pour 2026

(en millions d'euros)

Sous-action concernée

Exécution 2024

Loi de finances initiale 2025

Projet de loi de finances 2026

Évolution -

PLF 2026 / LFI 2025

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

22-02

Crises économiques et sanitaires

389

198,3

10

10

0

0

- 10

- 10

22-05

FNGRA

186,7

186,7

205,5

205,5

109,6

109,6

- 95,9

- 95,9

23-03

Stages à l'installation

2,6

2,5

9,5

9,5

2,1

2,1

- 7,4

- 7,4

23-06

Dotation jeunes agriculteurs

0,3

3,4

0,06

7

0,2

0,3

0,14

- 6,7

24-01

Hydraulique agricole

1,8

3,7

1,8

3,7

20,9

12,1

+ 19,2

+ 8,4

24-08

Mesures agro-environnementales régionales

64,2

115

90,1

87

45

85

- 45,1

- 1,9

25-17

Exonérations de charges sociales

179,7

179,7

156,5

156,5

143

143

- 13,5

- 13,5

27-08

Apurement communautaire

156

156

80

80

120

120

+ 40

+ 40

29-01

Plan haies

79,8

40,1

45

35

10

27,9

- 35

- 7,1

29-04

Fonds de souveraineté alimentaire et transitions

112

14,2

91,8

50,8

10,8

29,1

- 81

- 21,7

Source : réponse aux questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

B. LE PROGRAMME 206 « SÉCURITÉ ET QUALITÉ SANITAIRES DE L'ALIMENTATION » ÉGALEMENT TOUCHÉ PAR LA DIMINUTION DES CRÉDITS

Placé sous la responsabilité de la direction générale de l'alimentation (DGAL), le programme 206 est doté, pour 2026, de 839,6 millions d'euros en AE (contre 921 millions d'euros en 2025) et 836 millions d'euros en CP (contre 854 millions d'euros un an auparavant) soit des diminutions respectives de 8,83 % et de 1,88 % par rapport à la LFI 2025.

Il finance les démarches renforçant la durabilité de l'alimentation et prévenant les maladies végétales ou animales, ainsi que leurs effets sur l'homme, via le contrôle de l'utilisation des pesticides et du bien-être animal. Ces dotations sont regroupées au sein de huit actions : santé, qualité et protection des végétaux (action 01), lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal (action 02), sécurité sanitaire de l'alimentation (action 03), actions transversales (action 04), élimination des cadavres et des sous-produits animaux (action 05), mise en oeuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation (action 06), qualité de l'alimentation et offre alimentaire (action 08) ainsi que l'action 09, créée en 2024, dotée de 25 millions d'euros en 2026 contre 160 millions en 2025 et 250 millions d'euros en 2024, consacrée à la planification écologique, et plus spécifiquement dédiée à la stratégie de réduction des produits phytosanitaires.

Outre la très forte diminution de crédits frappant l'action 09 (- 83,90 %), la baisse des crédits du programme touche notamment l'action 08 « Politique de l'alimentation pour la souveraineté alimentaire » : l'action sera créditée de 5,81 millions d'euros en AE comme en CP, contre 6,81 millions d'euros en 2025 (soit - 14,68 %).

À rebours de ces diminutions, la hausse des crédits dédiés à l'action 02 « lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal » fait l'objet d'un satisfecit des rapporteurs spéciaux. Alors qu'un choix inverse avait été fait l'an dernier, ce qui était difficilement compréhensible, dans un contexte sanitaire mondial toujours plus incertain, il faut se réjouir de cette décision et espérer qu'elle puisse à terme avoir un impact sur la qualité et la sécurité de l'alimentation. C'est d'autant plus important que l'année 2025 a été marquée par de nouveaux drames sanitaires21(*).

C'est pourquoi les rapporteurs appellent à un renforcement des contrôles externes comme internes dans un secteur dont les marges ont été considérablement réduites22(*).

C. LE PROGRAMME 215 « CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L'AGRICULTURE » GLOBALEMENT STABILISÉ SI L'ON FAIT ABSTRACTION DE L'AJOURNEMENT DU PROJET DE RELOCALISATION À MAISONS-ALFORT

Ce programme rassemble les dotations allouées aux moyens en personnel et en fonctionnement de l'administration centrale et de certains services déconcentrés départementaux ou régionaux pour le pilotage et la mise en oeuvre opérationnelle sur tout le territoire des politiques publiques portées par le ministère, hors celles relevant du secteur sanitaire (programme 206) et de l'enseignement (programme 143 « Enseignement technique agricole » relevant de la mission « Enseignement scolaire »).

Ses crédits sont rassemblés dans 4 actions : moyens de l'administration centrale (action 01), évaluation de l'impact des politiques publiques et information économique (action 02), moyens des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, des directions de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (action 03) et moyens communs (action 04).

Géré par le secrétariat général du ministère, le programme comprend les moyens de personnel et de fonctionnement en matière d'accessibilité pour les usagers, de développement des systèmes d'information, de projets immobiliers, de formation continue, d'action sanitaire et sociale ou encore de communication.

L'enveloppe allouée pour 2025 s'élève à 647 millions d'euros en AE et 661 millions d'euros en CP, incluant 7,2 millions d'euros de fonds de concours (FDC), soit une baisse de 9,51 % en AE mais une hausse de 1,62 % en CP par rapport à l'exercice 2025.

La diminution en AE s'explique en grande partie par l'ajournement, pour des raisons budgétaires, du projet de relocalisation, sur le site domanial de Maisons-Alfort (ENVA), des opérateurs du ministère logés actuellement à Montreuil. Cela représente une baisse de 68,74 millions d'euros en AE par rapport à la LFI 2025, c'est-à-dire l'équivalent de la totalité des AE perdus par rapport à l'an dernier.

D. UN EFFORT MAINTENU À DESTINATION DU PROGRAMME 381 « ALLÈGEMENTS DU COÛT DU TRAVAIL EN AGRICULTURE »

Cette action facilite l'embauche de travailleurs occasionnels pour réaliser des activités agricoles à travers une exonération partielle de cotisations patronales, pour un montant qui couvre la différence avec le coût des contrats concernés si ces derniers n'avaient bénéficié que des allégements généraux renforcés.

71 000 entreprises, soit près de la moitié des structures du secteur de la production agricole employant des salariés, sont concernées pour un total d'exonérations représentant 31 % du volume global des heures salariées dans le secteur agricole. Compte tenu du désavantage compétitif que pourrait représenter le coût du travail dans un secteur aussi concurrentiel, les rapporteurs soulignent l'importance de ce programme, en particulier en ce qu'il permet de lutter contre le travail non déclaré et la dégradation des conditions de travail qui en résulterait.

Alors qu'entre 2019 et 2022, le dispositif était financé par une fraction de la TVA, il l'est depuis intégralement, comme avant 2019, sur crédits budgétaires du ministère chargé de l'agriculture. Le surplus d'exonération lié au maintien d'un plateau d'exonération totale à 1,2 SMIC23(*) par rapport aux allègements généraux, reste compensé sur les crédits du programme budgétaire 149. Les estimations ont été réalisées en tenant compte des prévisions d'évolution du SMIC, en raison de la forte élasticité des rémunérations des travailleurs saisonniers à ce salaire minimum, ce qui en fait le principal facteur d'évolution du coût du dispositif TO-DE.

Enfin, il faut souligner qu'une partie de la compensation versée à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole provient, par ailleurs, du programme 149 (cf. supra).

III. DIX OPÉRATEURS GLOBALEMENT MIS À CONTRIBUTION SUR LE PLAN BUDGÉTAIRE

La mission compte dix opérateurs qui lui sont budgétairement rattachés, parmi lesquels huit relèvent du programme 149 : l'Agence de services et de paiement, le Centre national de la propriété forestière, FranceAgriMer, l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique, l'Institut français du cheval et de l'équitation, l'Institut national de l'origine et de la qualité, l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer et l'Office national des forêts. Les deux autres opérateurs sont rattachés, pour l'un au programme 206 (l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail) et l'autre au programme 215 (l'Institut national de formation des personnels du ministère de l'agriculture).

Parmi les dix opérateurs, 7 sont frappés d'une diminution des crédits alloués via le programme 149 (ce qui ne signifie pas nécessairement que le total des fonds publics diminue pour ces mêmes opérateurs puisque plusieurs d'entre eux bénéficient de financements croisés).

L'Agence de services et de paiement (ASP) - établissement public à caractère administratif sous la tutelle des ministres chargés de l'agriculture et de l'emploi qui contribue à la gestion administrative et financière d'aides publiques et assure un suivi et une évaluation des politiques publiques - perdra un peu plus de 180 millions d'euros en AE et 110 millions euros en CP en 2026 sur le programme 149. Sur le champ des politiques agricoles, l'ASP est le principal organisme payeur du Fonds européen agricole de garantie et du Fonds européen agricole pour le développement rural. Toutefois, ce sont plus de neuf programmes répartis dans plusieurs missions qui assurent le financement de l'ASP, via des subventions pour charges de service public, des subventions pour charges d'investissement, des transferts de crédits et des dotations.

L'institut français du cheval et de l'équitation, opérateur unique de l'État pour la filière équine, verra ses crédits passer de 42,7 millions d'euros à 40,5 millions d'euros (du fait d'une baisse de transferts issus du programme 149 alors qu'en parallèle la subvention pour charges de service public issue du programme 219 « Sport », qui ne relève pas de la présente mission, est maintenue).

FranceAgriMer verra ses AE passer de 304 millions d'euros à 238 millions d'euros et ses CP passer de 269 à 256 millions d'euros. Cette diminution résulte principalement de la baisse des transferts issus du programme 206 pour partie compensée par une hausse des transferts alloués au titre du programme 776 du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural » (cf. infra).

L'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer (ODEADOM), principalement financé par le programme 149, perdra environ 183 000 euros sur sa subvention pour charges de service public (SCSP)24(*) et verra son plafond d'emploi passer de 41 à 40 ETPT. Interrogés à ce sujet, les services de l'ODEADOM ont confirmé que cette baisse et la perte d'un ETPT pourraient entraîner de « graves difficultés sur le fonctionnement de l'établissement ainsi que sur ses capacités à remplir les missions, notamment celles d'organisme payeur, qui lui sont confiées dans le cadre du contrat d'objectifs et de performance signé l'an passé ». L'office assure en effet chaque année le paiement d'environ 360 millions d'euros d'aides agricoles, à destination des départements d'outre-mer, de Saint-Pierre et Miquelon et de Saint-Martin. Il assure un rôle d'expertise technique et économique des filières et d'évaluation des politiques publiques qui y sont mises en oeuvre.

Le Centre national de la propriété forestière (17,08 millions d'euros en AE contre 17,5 millions d'euros en 2024, et 17,3 millions en CP, contre 17,5 millions d'euros en LFI 2025) connaît une diminution de ses moyens qui s'explique exclusivement par une baisse de la subvention pour charges de service public qui lui est alloué à travers le programme 149.

L'Institut national de l'origine et de la qualité bénéficiera d'une subvention pour charges de service public amoindrie via le programme 149 (16,98 millions d'euros en 2026 contre 17,54 millions d'euros en 2025).

L'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique dont le financement étatique est divisé par deux, passant à 12,49 millions d'euros, contre 25,9 millions d'euros en 2025, du fait de la baisse des transferts alloués par le programme 149.

Parmi les autres opérateurs, un seul bénéficie d'une consolidation de ses moyens, entre autres afin de faire face à la densification progressive de leurs missions. Il s'agit de l'Office national des forêts (257,4 millions d'euros contre 256,8 millions d'euros en 2025 dont environ 228 millions d'euros au titre du programme 149 dont la contribution à l'opérateur n'évolue pas). La légère revalorisation des crédits s'explique principalement par la montée en puissance des actions au titre du renouvellement forestier.

Les 2 derniers opérateurs voient leurs moyens globalement stabilisés. C'est le cas de :

- l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail - ANSES - (116,07 millions d'euros en CP en 2026 contre 117,65 millions d'euros en 2025 mais 120,4 millions d'euros en AE en 2026, contre 117,42 millions d'euros en AE en 2025). Cet unique opérateur du programme 206 est placé sous la responsabilité de six directions d'administration centrale, ce qui témoigne de la transversalité de ses missions. Elle contribue à assurer la sécurité sanitaire humaine dans les domaines de l'environnement, du travail et de l'alimentation, mais également la protection de la santé et du bien-être des animaux, la protection de la santé des végétaux et l'évaluation des propriétés nutritionnelles et fonctionnelles des aliments ;

- l'Institut national de formation des personnels du ministère de l'agriculture (INFOMA) bénéficie en 2026, d'environ 988 000 euros en AE (contre 990 000 euros un an plus tôt) et 987 000 euros en CP (contre 986 000 euros un an auparavant). L'INFOMA est un établissement public administratif créé par le décret n° 97-270 du 19 mars 1997. Il est chargé de la formation professionnelle initiale des agents du corps des techniciens supérieurs du ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire (MASA) dans les 3 spécialités suivantes : forêt et territoires ruraux, techniques et économie agricoles, vétérinaire et alimentaire, du grade de technicien au grade de technicien supérieur.

DEUXIÈME PARTIE
LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL » (CAS-DAR) : UN PLAFOND DE DÉPENSES ENFIN REVALORISÉ AU NIVEAU DES RECETTES RÉELLEMENT PERÇUES

I. UN COMPTE DÉDIÉ À L'INNOVATION EN MATIÈRE AGRICOLE DONT LES CRÉDITS SONT REVALORISÉS POUR 2026 AFIN DE RAPPROCHER LE MONTANT DES DÉPENSES DU PLAFOND DE RECETTES

Le Compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CAS-DAR) a pour objet d'accompagner la transformation des systèmes agricoles et de favoriser la transition des filières. Il retrace en recettes le produit de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles prévue à l'article 302 bis MB du code général des impôts et en dépenses, les opérations relatives au développement agricole et rural.

La taxe « développement agricole et rural » est assise sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles. Elle comprend une part forfaitaire, d'un montant de 90 euros par exploitant imposable25(*), et une part proportionnelle au chiffre d'affaires des exploitations agricoles de l'année n-1 (ou du dernier exercice clos), c'est-à-dire du chiffre d'affaires 2024 pour l'exercice budgétaire 2025. La partie proportionnelle s'établit à 0,19 % du chiffre d'affaires - hors TVA- jusqu'à 370 000 euros de chiffre d'affaires, auxquels s'ajoutent 0,05 % du chiffre d'affaires au-delà de 370 000 euros.

Ce CAS a été conçu pour soutenir la mise en oeuvre d'actions de recherche appliquée, d'études et d'expérimentations et de développement, pour détecter les innovations de terrain, permettre leur analyse et faciliter leur diffusion, notamment dans le cadre du Programme national de développement agricole et rural (PNDAR).

A. LE PROGRAMME NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL (PNDAR) 2022- 2027

Le compte est étroitement lié au PNDAR car il en finance les objectifs. Le PNDAR 2014-2020, prolongé en 2021, visait à soutenir l'orientation de l'agriculture française vers la triple performance économique, environnementale et sociale.

Le PNDAR 2022-2027 met l'accent sur la transition agro-écologique afin de prendre en compte la dimension environnementale et la création de valeur économique. Il tend à favoriser une diffusion plus large des connaissances et des méthodes en agro-écologie, notamment s'agissant des « innovations de rupture »26(*).

Ayant réduit les 21 objectifs du précédent PNDAR à 9, le PNDAR 2022-2027 cible d'avantage son périmètre d'action : il comprend un volet de mobilisation en faveur de l'économie, de l'emploi et des territoires, un volet d'autonomie vis-à-vis des ressources fossiles et d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre, un volet d'amélioration de la résilience de l'agriculture et des systèmes alimentaires face aux changements globaux et aux aléas biotiques, climatiques et économiques, et un volet de bien-être animal. Ces objectifs n'ont pas vocation à être modifiés pour 2026, ainsi que l'a confirmé la direction générale de l'enseignement et de la recherche du MASAF aux rapporteurs spéciaux.

Le CAS-DAR finance les démarches entreprises au titre de 9 objectifs, dans le cadre des programmes 775 et 776.

Les neuf objectifs du PNDAR

1) La création des chaînes de valeur équitables favorisant une relocalisation des productions agricoles et la compétitivité des filières et des entreprises ;

2) Le renouvellement des générations en agriculture par l'accompagnement de l'installation et la transmission, ainsi que l'amélioration de la qualité de vie au travail et les démarches de réflexion sur le sens des métiers en agriculture ;

3) La réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'agriculture, et le développement des techniques permettant de stocker du carbone et sa valorisation ;

4) L'autonomie protéique et azotée de l'agriculture française et des territoires ;

5) La valorisation et préservation de l'agro-biodiversité ;

6) L'adaptation des systèmes de production animale et végétale face aux aléas et au changement climatique, en s'appuyant notamment sur une gestion économe et efficiente de l'eau ;

7) La gestion intégrée de la santé animale et végétale ;

8) L'amélioration du bien-être animal ainsi que la poursuite des transitions pour rester acteur des marchés et générer de la valeur au sein des filières ;

9) La mobilisation du levier du numérique pour soutenir la conception, le pilotage, le déploiement et la valorisation de systèmes de production agricole innovants et performants.

À cet effet, le programme mobilise le réseau des chambres d'agriculture, les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR), les organismes de sélection animale (OS), les dynamiques de groupes, les démarches territorialisées et les approches inter-filières agricoles.

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

B. DES PROGRAMMES TOURNÉS VERS LE DÉVELOPPEMENT ET LA RECHERCHE DONT LES CRÉDITS POUR 2026 SONT RECONDUITS POUR L'UN ET FORTEMENT REVALORISÉS POUR L'AUTRE

1. Le programme 775 « Développement et transfert en agriculture » : des crédits totaux reconduits à l'identique en 2026, avec une légère évolution de la répartition entre les deux actions

Ce programme tend à financer le renouvellement par les agriculteurs de la conception des systèmes agricoles plus innovants et performants d'un point de vue économique, environnemental et social, en mettant en oeuvre des principes agro-écologiques27(*).

Il comprend deux actions, une action principale consacrée au « Développement et transfert », mobilisant 67,9 millions d'euros, soit 99,96 % des crédits de la mission (cf. infra pour le détail des interventions conduites) et une action regroupant les fonctions supports pour 30 000 euros.28(*) Le total des deux actions est identique à celui voté en loi de finances initiale pour 2025. Les dix premiers bénéficiaires de crédits du CASDAR au titre du programme 775 sont détaillés dans le tableau ci-après.

Les dix principaux bénéficiaires du programme 775
sur le dernier exercice entièrement exécuté (2024)

Chambre régionale d'agriculture (CRA) bénéficiaire

Montant d'AE perçues (en 2024, euros)

Part perçue du total des AE
du programme 775*

CRA Nouvelle Aquitaine

5 682 533,85

8,68 %

CRA Occitanie

5 113 392,90

7,81 %

CRA Auvergne Rhône Alpes

4 690 786,80

7,17 %

CRA Grand Est

3 395 287,35

5,19 %

CRA Bretagne

2 974 338,98

4,55 %

CRA Pays de la Loire

2 817 341,10

4,31 %

CRA Bourgogne Franche Comté

2 435 076,00

3,72 %

CRA Hauts de France

2 255 096,03

3,45 %

CRA Normandie

2 235 639,00

3,42 %

CRA PACA

2 111 072,25

3,23 %

Note : Pour les projets collaboratifs, le chef de file reçoit l'ensemble de la subvention, dont il reverse une quote-part à ses partenaires. Ainsi, une partie des subventions listées a pu être reversée.

Source : direction générale de l'enseignement et de la recherche du MASAF

Le financement des actions de développement des nouvelles pratiques dans les exploitations agricoles s'effectue principalement au travers du réseau des chambres d'agriculture. Sont aussi subventionnées des actions via les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR) ainsi qu'un programme d'appui à la génétique animale.

Pour le programme 775, l'objectif assigné, assis sur deux indicateurs, demeure le même que lors des exercices précédents : « Orienter l'action des structures chargées du conseil aux agriculteurs et de l'accompagnement des démarches collectives de développement, en cohérence avec les objectifs principaux du PNDAR ; accompagner les transitions des exploitations agricoles vers des systèmes plus résilients et sobres en intrants, tenant compte des besoins des agriculteurs, des consommateurs et des attentes des citoyens, par le conseil dans le cadre de démarches collectives, le transfert de connaissances, de méthodes et d'outils actionnables par les agriculteurs, le développement des compétences ».

Il vise à transmettre aux agriculteurs les éléments à caractère scientifique, organisationnel et technique nécessaires à l'évolution de leur activité vers une agriculture performante, du point de vue économique, environnemental et social.

2. Le programme 776 « Recherche appliquée et innovation en agriculture » bénéficie d'une forte revalorisation de ses moyens dans le cadre du « PARSADA »

Le programme 776 vise à soutenir l'innovation » dès l'émergence des projets, notamment dans le domaine de la transition agro-écologique, tout en favorisant une dynamique de capitalisation, de diffusion massive, impliquant notamment le conseil et la formation agricoles29(*). Il comporte deux actions consacrées à la « Recherche appliquée et [à l'] innovation » (102,57 millions d'euros en 2026, en AE comme en CP, contre 77, 57 millions d'euros en 2025) et aux « Fonctions supports » (500 000 euros en AE comme en CP en 2026 comme l'an passé).

Les dix premiers bénéficiaires de crédits du CASDAR au titre du programme 776 au cours du dernier exercice intégralement exécuté (2024) sont détaillés dans le tableau ci-après.

Les dix principaux bénéficiaires du programme 776 en 2024

Bénéficiaire

Montant d'AE perçues

Part perçue du total des AE du programme 776*

Institut de l'élevage (IDEL)

14 082 694

14.31 %

Institut du végétal ARVALIS -

11 951 508

12.14 %

Institut français de la vigne (IFV)

12 322 463

12.52 %

Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL)

5 708 424

5.80 %

Réseau des instituts techniques agricoles (ACTA)

5 031 411

5.11 %

Institut français des industries du porc (IFIP)

4 540 156

4.61 %

ITAVI - Institut technique des filières avicole, cunicole et piscicole

3 814 403

3.88 %

ASTREDHOR - Institut des professionnels du végétal

2 393 949

2,43 %

ITAB - Institut de l'agriculture et de l'alimentation biologiques

2 081 024

2,11 % 

Chambre régionale d'agriculture de Bretagne

1 643 532

2,20 %

Note : Pour les projets collaboratifs, le chef de file reçoit l'ensemble de la subvention, dont il reverse une quote-part à ses partenaires. Ainsi, une partie des subventions listées a pu être reversée.

Source : direction générale de l'enseignement et de la recherche du MASAF via les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Par rapport à ce qui avait été constaté sur l'exercice 2023, les rapporteurs spéciaux prennent acte d'évolutions significatives intervenues au cours du dernier exercice intégralement exécuté, à savoir 2024, qui témoignent d'une progressive réorientation des crédits qui sont davantage fléchés vers de nouveaux enjeux.

En premier lieu, l'institut français de la vigne (IFV) a vu les crédits qui lui sont alloués à travers le CAS-DAR être majorés d'environ 4 millions d'euros entre 2023 et 2024 pour tenir compte de la mise en place du projet Vitilience30(*) (2,56 millions d'euros en AE), ainsi que de l'augmentation de la part versée à FranceAgriMer dans le cadre de différents appels à projets (+ 1,55 million d'euros). En deuxième lieu, l'institut des professionnels du végétal, ASTREDHOR : s'est vu alloué 1,49 million d'euros également dans le cadre de sa participation à des appels à projet délégués à FranceAgriMer. Enfin, l'institut de l'agriculture et de l'alimentation biologiques (ITAB) a bénéficié d'un million d'euros, également pour financer sa participation à des appels à projet délégués à FranceAgriMer.

Piloté par la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt, le programme s'est vu assigné l'objectif, qui ne change pas en 2026, de « renforcer le continuum entre recherche et innovation agricole pour accélérer l'émergence et l'appropriation d'innovations répondant aux enjeux d'une quadruple performance sociale, économique, sanitaire et environnementale. »

Pour cette raison, figurent parmi les indicateurs de performance du programme la capacité des acteurs à développer des partenariats multi-acteurs au niveau européen, la capacité à diffuser les résultats des recherches menées (quantifiable par le nombre d'articles publiés) et l'audience des actions de formations.

Chaque année, le tiers de l'enveloppe environ est dédié aux appels à projets dans la maquette prévisionnelle. Rappelons que ces projets de recherche appliquée et de développement agricole ainsi que les programmes annuels des instituts techniques agricoles financés par le CASDAR doivent produire des résultats utilisables par les agriculteurs car les recettes du CAS-DAR proviennent de la taxe sur les exploitations agricoles. En conséquence, la plupart des projets sont réalisés sous le mode innovation non protégée.

Pour 2026, l'enveloppe budgétaire du programme est largement revalorisée (+ 25 millions d'euros, soit + 32,02 %) par rapport à ce qui avait été adopté en loi de finances initiale pour 2025, cela afin de contribuer aux efforts de recherche dans le cadre du plan d'action stratégique pour l'anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (le « PARSADA »).

Un renforcement en 2026 des moyens du programme pour répondre
aux nouveaux objectifs assignés au « PARSADA »

Afin de ne pas laisser les agriculteurs sans solution face au potentiel retrait de substances actives au niveau européen, le gouvernement a initié au printemps 2023 un plan d'action destiné à identifier de nouveaux moyens techniques pour protéger les cultures. Le « plan d'action stratégique pour l'anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures », mieux identifié par son sigle PARSADA, est opérationnel depuis 2024.

Une réunion du comité inter-filières, associant des représentants des filières (interprofessions et instituts techniques) et différents partenaires scientifiques et professionnels (notamment l'INRAE, ANSES, CIRAD, Chambres d'agriculture France, etc.), s'est tenue le 22 juillet 2025 et a été l'occasion de valider huit nouveaux plans d'actions , visant à lutter contre des menaces majeures pour les filières agricoles françaises (ravageurs, adventices, maladies...) :

- les insectes « piqueurs suceurs » pour la filière horticulture ;

- la gestion des sclérotinioses pour la filière fruits et légumes transformés ;

- le mildiou des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) ;

- le mildiou du houblon (Pseudoperonospora humuli) ;

- les bioagresseurs de la canne à sucre pour la filière cultures ultra marines ;

- la gestion de l'enherbement et de fin de cycles en bananeraies pour la filière « cultures ultra marines » ;

- la lutte contre les maladies dans les cultures de diversification végétale pour la filière « cultures ultra-marines » ;

- et les ravageurs pour la filière de production agriculture biologique.

Au total, le PARSADA porte désormais 28 actions. Dans le prolongement de l'appel à manifestation d'intérêt « Investir pour élargir la palette des solutions mises à disposition des agriculteurs et développer les alternatives aux produits phytopharmaceutiques », lancé en mai 2025, un appel à projets « PARSADA » a été lancé le 30 juin 2025. Piloté par FranceAgriMer et doté d'un budget de 45 millions d'euros au titre de la planification écologique, pour l'année 2025, il a vocation à être renforcé encore en 2026, ce qui justifie la hausse de crédits alloués au programme. Les rapporteurs spéciaux constatent en outre que cette hausse des financements du Parsada à travers le CAS DAR compense partiellement la forte diminution, dans le projet de loi de finances pour 2026, des crédits budgétaires.

II. UNE SOUS-CONSOMMATION CHRONIQUE DES CRÉDITS AU REGARD DU NIVEAU DE RECETTES QUI A ENFIN CONDUIT LES GOUVERNEMENTS À RÉAGIR ET À DONNER SUITE AUX PRÉCONISATIONS DES PARLEMENTAIRES DEPUIS 2024

A. DEPUIS 2018, DES RECETTES RÉGULIÈREMENT SUPÉRIEURES AU PLAFOND DE DÉPENSES, CE QUI CONDUIT ENFIN À UNE REVALORISATION

Les recettes du compte d'affectation spéciale proviennent, depuis 2015 (cf. supra) de la taxe « développement agricole et rural » qui lui est intégralement affectée. Elle est calculée sur le chiffre d'affaires total des exploitations agricoles, sans distinction du type ou du mode de production. Depuis 2018, les recettes constatées sont supérieures au plafond autorisé de dépenses : paradoxalement, ce différentiel conduit le CAS DAR à présenter un solde comptable largement excédentaire, qui a quasiment atteint, à fin 2024 l'équivalent d'une année de recettes, alors même qu'il est principalement financé par les agriculteurs.

Le plafond de dépenses du CAS-DAR a été rehaussé, dans la loi de finances pour 2024, de 20 millions d'euros pour atteindre 146 millions d'euros, après plusieurs années de stabilité à 126 millions d'euros. Cette hausse s'est opérée en cours de navette parlementaire, par le vote de deux amendements successifs (de 5 millions d'euros puis 15 millions d'euros supplémentaires, dans les deux cas à l'Assemblée nationale) afin de réduire le différentiel entre les recettes et les dépenses. Pour 2025, le plafond de dépenses avait été reconduit mais le gouvernement propose une nouvelle hausse en 2026, plus substantielle, de 25 millions d'euros afin de le porter à 171 millions d'euros.

Les rapporteurs spéciaux se réjouissent de ce nouveau rehaussement du plafond qu'ils ont d'ailleurs vivement encouragé, soutenant d'aller « au bout de la démarche en fixant désormais un plafond de dépenses davantage aligné sur le prévisionnel de recettes globalement fiable chaque année31(*) ».

Ils avaient d'ailleurs indiqué qu'à défaut d'un tel rehaussement, une réflexion sur la pertinence du périmètre et du niveau de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles aurait été nécessaire, dès lors que son produit est exclusivement affecté à une politique publique dont le besoin de financement serait inférieur au produit collecté. Cette option n'avait toutefois pas la faveur des rapporteurs spéciaux qui constatent, d'une part, que la part de la taxe dans le chiffre d'affaires des exploitations diminue sous l'effet de l'inflation et, d'autre part, que le besoin de financement des politiques publiques soutenues par le CAS DAR est conséquent, ce qui justifie d'autoriser un montant de dépenses plus important.

Il n'était en effet pas durablement justifiable de constater un différentiel important entre les recettes et les dépenses d'un compte d'affectation spéciale, justement fait pour contourner le principe de non-affectation et mettre en regard recettes et dépenses liées à une même politique publique. Le nouveau plafond de dépenses autorisé devrait donc mettre un terme à la situation dénoncée jusqu'alors par les rapporteurs spéciaux et devrait enfin conduire à diminuer le solde comptable du CAS DAR qui n'a pas cessé de croître ces dernières années, ce qui était devenu incompréhensible au regard des besoins de financement en matière de recherche agricole. Les services du ministère ont ainsi confirmé lors de leur audition par les rapporteurs spéciaux que le nouveau plafond était supérieur aux prévisions de recettes pour 2026, maintenues à 146 millions d'euros, ce qui conduira « le différentiel à être comblé par le solde du CASDAR, constitué des excédents de recettes des années antérieures ».

Exécution des recettes et des dépenses du CAS-DAR

(en millions d'euros)

Année

Recettes

Dépenses

Plafond

Solde comptable cumulé

2009

113,50

110,55

113,5 en AE et 118,5 en CP

53,02

2010

105,06

108,50

114,5 en AE et 119,5 en CP

46,7

2011

110,45

108,38

110,5

48,72

2012

116,75

114,35

110,5

51,13

2013

120,47

106,98

110,5

64,73

2014

117,10

132,40

125,5

49,43

2015

137,10

131,20

147,5

55,23

2016

130,80

129,20

147,5

56,83

2017

133,4

128, 9

147,5

62,13

2018

136,5

131,2

136

67,6

2019

142,9

130,5

136

80

2020

140,3

127,1

136

93,2

2021

138,4

113,7

126

118

2022

136

132

126

121,09

2023

154,9

141

126

134,24

2024

151,9

143,63

146

142,51

Source : Commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Le CAS-DAR est donc caractérisé par trois tendances :

une ouverture de crédits annuelle structurellement supérieure aux montants disponibles, en raison des restes à payer et du caractère pluriannuel des dépenses ;

une sous-consommation des crédits par rapport aux recettes. Comme constaté depuis plusieurs exercices par la Cour des comptes32(*), ce faible taux d'exécution s'explique par des « prévisions de recettes extrêmement prudentes [qui] conduisent à des ouvertures de crédits en fin d'année qui ne peuvent, de fait, être consommées ». Cela est resté vrai malgré le rehaussement du plafond de dépenses en 2024 mais devrait connaitre une nouvelle tendance en 2025, et surtout à partir de 2026, du fait d'un rehaussement des dépenses effectivement engagées ;

une dynamique des recettes qui dépasse le plafond depuis huit ans, et qui justifiait d'autant plus que ce dernier soit de nouveau relevé.

Évolution de 2015 à 2026 des AE et CP du CAS-DAR

(en euros)

 

Crédits inscrits (1)

Exécution (2)

Solde

AE

CP

AE

CP

AE

CP

2015

138 958 426

180 206 929

137 346 485

131 320 500

1 611 941

48 886 429

2016

132 423 401

179 697 888

126 045 839

129 207 058

6 377 562

50 490 830

2017

139 797 774

183 911 042

131 669 045

128 949 787

8 128 729

54 961 255

2018

139 694 988

190 961 255

131 655 785

131 220 395

8 039 203

59 740 860

2019

144 411 404

195 740 860

139 475 784

130 480 516

4 935 620

65 260 344

2020

141 091 317

203 260 344

135 457 011

127 146 729

5 634 306

76 113 615

2021

139 695 593

212 113 614

126 400 574

113 716 634

13 295 019

98 396 979

2022 

136 639 043

224 396 979

132 732 712

141 501 272

19 502 723

82 895 707

2023

145 502 723

227 223 683

141 061 426

141 753 681

4 441 297

85 470 002

2024

175 828 661

259 842 924

156 229 149

143 633 774

19 599 514

116 209 149

2025 (prévision)

164 110 856

262 209 149

164 110 856

149 210 565

-

112 998 584

2026 (prévision)

171 000 000

283 998 584

171 000 000

171 000 000

-

-

Notes : (1) Les crédits en AE et CP correspondent aux crédits ouverts en LFI, dans la limite de la recette du CAS-DAR, majorés des reports de crédits de l'année N-1 sur l'année N et des éventuelles ouvertures de crédits en gestion (décret de virement, arrêté, loi de finances rectificative).

(2) L'exécution en AE est minorée des retraits sur engagements des années antérieures (données Chorus).

Source : Commission des finances du Sénat, d'après les données recueillies dans les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

B. UNE GESTION FINANCIÈRE QUI DEMEURE COMPLEXE

La gestion budgétaire et comptable du CAS-DAR est soumise aux règles suivantes quant aux reports.

1. Les règles relatives aux crédits budgétaires

Les crédits budgétaires (AE et CP) sont ouverts à hauteur des montants prévus en loi de finances initiale qui se fondent sur une estimation du montant de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles.

Les AE et les CP budgétaires non consommés en fin d'année donnent lieu un arrêté de report sur l'année suivante. Les raisons en sont multiples. Un porteur de projet peut, à titre d'illustration, demander une prolongation de son projet ce qui modifie les décaissements prévus.

En outre, il convient de relever qu'une partie des crédits ouverts sont en réalité gagés sur des projets déjà engagés. Le niveau élevé des reports de crédits de paiement33(*) résulte des crédits non consommés qui proviennent principalement des restes à payer. Un programme financé par le CAS-DAR fait généralement l'objet de paiements répartis sur plusieurs années.

2. Les règles relatives aux recettes

Si la recette est supérieure au montant ouvert en LFI, cette ressource supplémentaire ne peut être engagée à moins d'une ouverture de crédits.

Cette dernière prend deux formes, celle d'un arrêté conjoint d'ouverture en gestion de l'excédent de recettes constaté, entre le ministre chargé de l'agriculture et celui chargé des comptes publics, ou celle d'une autorisation en loi de finances rectificative des excédents de recettes, y compris pour les années antérieures. Ces ouvertures de crédits supplémentaires apportent une souplesse de gestion malgré la fixation d'un plafond.

Toutefois, elle n'est en rien obligatoire et, dans les faits, le différentiel entre les ressources et les dépenses contribue au solde comptable du CAS DAR, en application du II de l'article 21 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF)34(*).

Ce solde comptable cumulé constaté sur le CAS au 31 décembre 2024 s'établissait à 142,51 millions d'euros contre 134,24 millions d'euros un an auparavant, soit une nouvelle augmentation de 6,16 %.

EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) et compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 4 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Christian Klinger et Victorin Lurel, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (AAFAR) et compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural ».

M. Claude Raynal, président. - Dans le cadre de nos travaux relatifs au projet de loi de finances (PLF) pour 2026, nous examinons à présent le rapport spécial de MM. Christian Klinger et Victorin Lurel sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar).

M. Christian Klinger, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ». - Année après année, nous constatons que le contexte général du secteur agricole demeure particulièrement difficile : la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » doit concilier des enjeux toujours plus contraignants et des moyens qu'il faut optimiser. Vous le savez parfaitement, la situation que connaissent les agriculteurs français n'est pas réjouissante ; cela justifie que nous soyons proactifs à leur égard.

Le secteur agricole est d'abord touché par les fortes tensions internationales. Les conséquences de ces tensions sur les approvisionnements, sur nos exportations et sur les cours des matières premières sont multiples : entre la guerre en Ukraine, le conflit au Proche-Orient, les tensions entre le Cambodge et la Thaïlande, les tensions commerciales entre l'Europe et la Chine, le renforcement des droits de douane américains, ou encore l'entrée en vigueur, de plus en plus probable, de l'accord UE-Mercosur, nous voyons bien que le contexte n'est pas favorable.

Ensuite, les aléas climatiques et sanitaires ont durement frappé les milieux agricoles ces dernières années, même s'il faut reconnaître une relative amélioration, puisque l'année 2025 a globalement connu moins de crises que les années précédentes. Cependant, on regrette cette année quelques foyers contagieux et des abattages imposés ; je pense notamment à la propagation de la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) des bovins.

Face à ce contexte difficile, le Parlement est au rendez-vous depuis deux ans. Nous avons adopté plusieurs dispositifs, bien au-delà des clivages partisans, pour aider les agriculteurs à traverser ces turbulences. Je pense à la facilitation du recours à la dotation pour épargne de précaution, à diverses mesures d'aides à l'installation et à plus de 740 millions d'euros d'aides exceptionnelles qui sont ou seront versées en 2025 et en 2026 : ainsi du fonds d'urgence pour le secteur viticole, du dispositif de réduction du potentiel de production viticole, des prêts bonifiés à l'attention du secteur vitivinicole, du fonds d'urgence visant à soutenir les exploitations d'élevage impactées par la maladie hémorragique épizootique, des aides à la filière biologique, des aides aux planteurs de banane, de la prise en charge d'une partie des pertes de production des éleveurs de volaille, de l'indemnisation pour la prise en charge de la surmortalité liée à la fièvre catarrhale ovine, des prêts garantis, du dispositif pour les fruits et légumes outre-mer, du fonds d'urgence de soutien aux exploitations en difficulté à la suite des inondations de 2024 en Ille-et-Vilaine, du fonds d'urgence au bénéficie des jeunes installés en viticulture, de l'aide aux pépiniéristes en viticulture, ou encore du fonds d'urgence pour soutenir les exploitations agricoles touchées par les incendies de l'Aude survenus à l'été 2025. Il est indéniable que les pouvoirs publics se préoccupent de la question agricole, et tant mieux !

Cet engagement se traduit par le fait que le total des concours publics consacrés à l'agriculture sera, de nouveau, maintenu en 2026. Si l'on totalise les crédits européens de la politique agricole commune (PAC), les dépenses sociales, les mesures fiscales, les crédits de la présente mission et du Casdar, ceux qui, comme l'enseignement technique agricole, relèvent d'autres missions, ce sont 25,3 milliards d'euros que nous consacrerons en 2026 à l'agriculture, à l'alimentation et à la forêt, soit à peu près l'équivalent de l'effort de 2025.

Au vu du contexte budgétaire, c'est un effort colossal que de maintenir le total des dépenses publiques pour l'agriculture.

De fait, la répartition de ce total évolue progressivement. Des crédits qui figuraient auparavant dans la présente mission sont mis ailleurs, et sous une autre forme, pour soutenir d'autres priorités. C'est aussi la conséquence des revendications des agriculteurs, qui ont abouti à 70 engagements gouvernementaux qui ne transitent pas forcément par cette mission.

Comme l'an dernier, nous avons donc fait le choix de regarder les crédits dévolus à l'agriculture dans leur ensemble et non pas seulement sous le seul prisme de la mission qui, historiquement, ne représente que 20 % du total des crédits agricoles.

Nous nous sommes donc posé une unique question, qui guide la plupart de nos travaux : les crédits pour l'agriculture, dans leur ensemble, vont-ils permettre de répondre aux principales attentes des professionnels du secteur, sans pour autant dégrader notre souveraineté ?

Cette question est légitime, puisque les autorisations d'engagement (AE) diminuent de 11,59 % et les crédits de paiement (CP) de presque 5 %, mais en plus de la traditionnelle comparaison avec l'exercice précédent de 2025, il nous a semblé pertinent de comparer le PLF pour 2026 avec la dernière année exécutée, c'est-à-dire 2024. Nous avons aussi examiné ce qui se faisait avant la parenthèse exceptionnelle 2022-2025 : quand on compare ce projet de budget avec le dernier budget non exceptionnel, exécuté en 2021, on constate que le niveau des crédits de paiement pour 2026 est supérieur de 1 milliard d'euros à celui de 2021.

J'estime donc, au-delà des apparences, que l'effort est globalement soutenu. Bien sûr, nous aimerions faire plus. Bien sûr, ce n'est pas suffisant, et je partage certaines des pistes d'amélioration que Victorin Lurel va détailler, mais je considère que ces crédits répondent à l'essentiel des attentes des professionnels dans un contexte budgétaire objectivement très difficile.

C'est pourquoi, pour ma part, je vous proposerai de voter en faveur des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale.

M. Victorin Lurel, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ». - Si l'on accepte de prendre en compte tous les paramètres, comme l'a fait Christian Klinger à l'instant, je reconnais qu'un effort est consenti par les pouvoirs publics. On perçoit bien toute la difficulté de concilier la nécessité de redresser les finances publiques et le soutien à des politiques aussi transversales que celles dont nous parlons.

En revanche, il me semble difficile de faire abstraction de quelques caractéristiques des crédits de cette mission pour 2026 ; je dois dire qu'il y a encore, selon moi, une marge de progression. C'est pourquoi nous avons souligné dans notre rapport plusieurs points de vigilance.

D'abord, je regrette vivement que nous renoncions, à ce point, à la transition écologique dans ce budget. Notre mission n'est pas la seule concernée par ce renoncement, mais l'effort qui avait été fait en matière écologique n'est pas reconduit. Les données chiffrées sont éloquentes : en deux ans, les crédits de paiement consacrés à la planification écologique ont diminué de 67 %. Il faut bien voir que, concrètement, on renonce à accompagner les agriculteurs dans la transition écologique ; nous risquons ainsi de creuser le fossé entre les exploitants agricoles et la population.

Ce n'est pas le seul point inquiétant dans ce budget, loin de là. Ainsi, les moyens alloués à l'action n° 22 « Gestion des crises et des aléas de la production agricole » du programme 149 diminuent quasiment de 50 %, tout comme les crédits consacrés aux mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec), qui perdent la moitié de leurs autorisations d'engagement, soit 45 millions d'euros.

Sont également en baisse les crédits destinés à financer la part étatique de l'assurance récolte, les crédits alloués au fonds Avenir Bio, qui sont divisés par deux, soit une baisse de 9,2 millions d'euros, ainsi que les crédits pour le stage d'accompagnement à l'installation des agriculteurs, qui passent de 9,6 millions à 2,5 millions d'euros. Le transfert aux régions de la gestion de toutes les aides non surfaciques, dont les aides à l'installation, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) 2023-2027, explique cette dernière diminution, mais on aurait pu espérer la sanctuarisation de quelques aspects essentiels au sein de l'action consacrée à l'appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles - je pense en particulier aux aides du programme d'accompagnement à l'installation et la transmission en agriculture (AITA), ainsi qu'aux stages d'accompagnement à l'installation.

Nous détaillons aussi dans le rapport le rôle crucial des dix opérateurs rattachés à cette mission ; or neuf d'entre eux voient les moyens qui leur sont alloués via la mission diminuer pour 2026. Cela ne signifie pas forcément que ces opérateurs perdent des moyens, puisqu'ils sont souvent financés au travers de plusieurs missions budgétaires. Seul l'Office national des forêts (ONF) voit ses crédits très légèrement progresser - tant mieux ! -, mais son schéma d'emploi laisse apparaître une diminution de 37 équivalents temps plein (ETP), ce qui ne me semble pas compatible avec les enjeux forestiers majeurs.

Que dire, enfin, de la baisse de 1 million d'euros des crédits destinés à la souveraineté alimentaire dans ce projet de budget ?

Tout cela ferait beaucoup s'il n'y avait pas, par ailleurs, quelques points positifs dans ce budget. Je me réjouis par exemple de la consolidation de certains dispositifs favorables aux travailleurs, comme la préservation des crédits consacrés aux fameux TO-DE (travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi) du programme 381, qui anticipe les conséquences de deux mesures très positives pour les agriculteurs : la prise en compte des vingt-cinq meilleures années pour le calcul des pensions de retraite, qui se met en place progressivement pour une entrée en vigueur au 1er janvier prochain, et le rehaussement de 1,2 à 1,25 Smic du seuil de dégressivité du dispositif des TO-DE.

On le sait bien, l'agriculture est un secteur très concurrentiel ; si nous n'adaptons pas nos règles, nous favoriserons une certaine précarisation. L'exonération de certaines charges ou cotisations, dont bénéficient 71 000 entreprises, soit à peu près la moitié des structures agricoles employant un salarié, permet de maintenir environ un tiers du volume global des heures salariées dans le secteur agricole, tout en donnant lieu à une compensation pour la Mutualité sociale agricole (MSA). C'est un moyen de lutter contre le travail illégal et les conséquences qu'il entraîne, en particulier pour des emplois à faible valeur ajoutée. C'est également un point auquel je prête une attention particulière dans les outre-mer, où le salariat agricole joue un rôle central.

À rebours des diminutions que j'ai citées, la hausse des crédits alloués à la lutte contre les maladies animales fait l'objet d'un satisfecit dans notre rapport. Alors qu'un choix inverse avait été fait l'an dernier, ce qui était difficilement compréhensible dans un contexte sanitaire mondial toujours plus incertain, il faut se réjouir de cette décision et espérer qu'elle puisse, à terme, avoir un effet positif sur la qualité et la sécurité de l'alimentation. C'est d'autant plus important que l'année 2025 a été marquée par quelques drames sanitaires liés à la vente de viande impropre à la consommation.

Enfin, nous exprimons notre pleine satisfaction à l'égard du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural », puisque nous avons été pleinement entendus.

Le Casdar est financé exclusivement par une recette assise sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles. Les dépenses, pour leur part, étaient jusqu'à présent plafonnées à un niveau insuffisant, ce qui conduisait, année après année, compte tenu du différentiel avec les recettes, à la croissance du solde comptable. Cela devenait problématique, puisque cet argent ne servait pas à ce à quoi il était destiné, à savoir le soutien à la mise en oeuvre d'actions de recherche appliquée, d'études, d'expérimentations et de développement, dans le cadre du programme national de développement agricole et rural (PNDAR).

Nous avions franchi une première étape en 2024, avec une première revalorisation de 15 millions d'euros, qui se verra amplifiée en 2026. Avec un plafond porté à 171 millions d'euros, soit une hausse de 25 millions d'euros, l'argent collecté via la taxe pourra être intégralement utilisé pour les deux programmes que compte le Casdar. Pour la première fois depuis 2014, le solde comptable du Casdar devrait donc diminuer. Cette hausse permettra le financement de plusieurs appels à projets, par exemple celui intitulé « Investir pour élargir la palette des solutions mises à disposition des agriculteurs et développer les alternatives aux produits phytopharmaceutiques ». L'insistance des parlementaires pour obtenir ce rehaussement du plafond a donc payé.

Pour autant, au regard des marges de progression que j'ai mentionnées, vous aurez compris que je m'abstiendrai, à ce stade, sur les crédits de cette mission, tout en gardant espoir que des améliorations interviendront ; je suis en revanche d'ores et déjà favorable à l'adoption des crédits du Casdar.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La conclusion était presque inattendue après tant de critiques, mon cher collègue ! Mais même si les positions exprimées sont différentes, sinon opposées, elles sont toujours constructives.

Les moyens budgétaires consacrés à l'agriculture sont importants, plus importants même qu'à une époque récente, mais l'intervention de nombreux opérateurs complique la lisibilité de ces politiques. De nombreux secteurs de notre agriculture connaissent des difficultés, au-delà des épizooties. Il importe surtout que l'agriculture française redevienne la première en Europe, comme elle l'était encore il y a dix ans ; nous devons examiner les raisons de ce déclin et imaginer des voies nouvelles. Certes, le secteur agricole, qui faisait il y a quelques décennies la prospérité de nombre de nos territoires, a largement été supplanté par d'autres secteurs, mais la souveraineté alimentaire est un enjeu croissant dans le monde entier.

Je vous remercie tous deux pour la qualité de vos travaux. Il est impossible d'apporter une réponse seulement budgétaire aux mécontentements exprimés par nos agriculteurs. La colère dirigée contre l'accord UE-Mercosur cache mille et une situations différentes : nous avons aujourd'hui de multiples agricultures plutôt qu'un modèle unifié.

M. Marc Laménie. - Merci à nos rapporteurs pour ce travail de qualité. Oui, la situation du monde agricole s'est largement détériorée au fil des ans.

Les moyens alloués aux chambres d'agriculture, qui assistent les agriculteurs dans des démarches de plus en plus compliquées, restent-ils stables ?

La loi Duplomb a-t-elle des conséquences financières visibles dans le PLF 2026 ?

Enfin, qu'en est-il des moyens humains sur le terrain ? Les effectifs pourraient-ils augmenter si l'on puisait dans ceux de l'administration centrale ?

M. Albéric de Montgolfier. - Le programme 149 permettra-t-il, à lui seul, à nos agriculteurs de rester compétitifs si l'accord UE-Mercosur était définitivement approuvé ?

Le programme 206 finance-t-il les contrôles à l'importation de produits alimentaires, en particulier provenant du Mercosur, ou bien ces contrôles relèvent-ils d'autres programmes ? Cet accord devrait conduire à une hausse considérable des importations ; on nous promet des contrôles sanitaires, mais comment ceux-ci seront-ils financés ?

Mme Nathalie Goulet. - Les documents budgétaires détaillent-ils par programme les ETP du ministère de l'agriculture et de ses subdivisions ?

M. Michel Canévet. - Les actions mises en oeuvre en faveur de la viticulture répondent-elles aux enjeux actuels de la profession ? Notre commission des affaires économiques, dans un récent rapport d'information, appelle à des actions fortes pour relancer cette activité importante pour l'économie nationale.

Qu'est-ce qui explique la baisse significative des autorisations d'engagement de cette mission, alors que les crédits de paiement sont plus stables ? La répartition des moyens entre l'administration centrale et les territoires vous paraît-elle adaptée, ou bien faudrait-il consentir un effort de réduction de la première au profit d'une présence territoriale accrue ?

M. Victorin Lurel, rapporteur spécial. - Les points de vue ne sont pas aussi contradictoires qu'on pourrait le penser, monsieur le rapporteur général ; simplement, je me résous mal à accepter ce recul considérable, pour ne pas dire cet abandon des crédits consacrés à la planification écologique. Certes, on peut se satisfaire que les crédits de cette mission soient globalement maintenus, mais neuf des dix opérateurs concernés voient leurs crédits diminuer. L'Office de développement de l'économie agricole d'outre-mer (Odéadom) perd 100 millions d'euros, près de la moitié de son budget ! La situation de l'ONF est plus satisfaisante, mais il perd tout de même 37 ETP.

Nous convenons qu'il y a aujourd'hui plusieurs types d'agriculture, qui exigent des politiques particulières. Nous sommes aussi bien conscients des craintes suscitées par l'accord UE-Mercosur. Les fluctuations politiques en la matière font peser une grande incertitude ; le Président de la République a beaucoup varié sur ce point. Cela dit, nous ne sommes pas excessivement pessimistes : si le budget diminue par rapport à la période exceptionnelle 2022-2025, les crédits restent supérieurs à la moyenne quinquennale.

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. - Vous avez raison, monsieur le rapporteur général : pour l'agriculture, on ne peut pas se contenter d'une réponse budgétaire. Une alerte est lancée cette année : alors que notre agriculture, si vertueuse, était d'ordinaire notre deuxième ou troisième ligne exportatrice, elle risque d'être déficitaire en 2025, ce qui est absolument ahurissant.

Le budget de l'agriculture connaît une baisse globale de quelque 200 millions d'euros. Les rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques proposent de modifier la ventilation de cette diminution, en ponctionnant l'administration centrale pour affecter ces sommes à des actions bénéficiant directement aux agriculteurs.

Madame Goulet, les effectifs du ministère de l'agriculture devraient passer de 11 734 à 11 546 ETPT, soit une baisse de presque 200 ETPT et nous disposons effectivement de la répartition par programme dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2026.

Monsieur Laménie, la loi Duplomb a indirectement un effet sur le Casdar : 25 millions d'euros supplémentaires iront à la recherche sur l'utilisation des produits phytosanitaires et la modification des pratiques culturales.

M. Victorin Lurel, rapporteur spécial. - Monsieur Laménie, la dotation des chambres d'agriculture est maintenue à 334 720 915 euros et l'article 36 du projet de loi de finances prévoit en parallèle le déplafonnement du montant de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) qui finance le réseau des chambres.

Les moyens du ministère sont aussi globalement maintenus. Pour ce qui est de la répartition entre administration centrale et services déconcentrés, je n'ai pas de réponse précise à vous apporter. Peut-être faudrait-il déconcentrer davantage ; en tout cas, les services ne nous disent pas manquer de moyens.

Monsieur de Montgolfier, un contrôle sanitaire aux frontières est bien opéré, en particulier par l'Inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières. Certains estiment que le contrôle phytosanitaire est défaillant. Je ne saurais vous dire à cet instant quel programme en assure le financement, et à quelle hauteur.

Monsieur Canévet, beaucoup d'actions sont mobilisées pour la viticulture, notamment des fonds d'urgence. La politique d'arrachage continue : sont concernés 8 000 hectares dans le Bordelais, 10 000 hectares dans le sud-est.

M. Christian Klinger, rapporteur spécial. - Ce soutien à la viticulture via les fonds d'urgence est réel, mais il se révélera sûrement insuffisant face aux défaillances à prévoir. La crise économique est là, la crise sociale va arriver ; certains exploitants ne peuvent plus payer leurs fournisseurs, voire ne se rémunèrent plus eux-mêmes. Il faudra certainement des actions supplémentaires en 2026 et 2027.

Enfin, je précise que si les moyens déconcentrés diminuent au sein du programme 215, c'est la conséquence du transfert de certaines compétences de l'État aux régions.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

*

* *

Réunie à nouveau le mercredi 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé définitivement ses votes émis sur toutes les missions, tous les budgets annexes, tous les comptes spéciaux et les articles rattachés aux missions, ainsi que les amendements qu'elle a adoptés, à l'exception des votes émis pour les missions « Action extérieure de l'État », « Aide publique au développement », « Cohésion des territoires », « Culture », « Immigration, asile et intégration », « Investir pour la France 2030 », « Monde combattant, mémoire et liens avec la nation », « Sport, jeunesse et vie associative », ainsi que des comptes spéciaux qui s'y rattachent.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Cabinet de Mme Annie GENEVARD, ministre de l'Agriculture, de l'Agro-alimentaire et de la Souveraineté alimentaire

- M. Victor MABILLE, conseiller budgétaire, gestion des risques, protection sociale et dialogue social ;

- M. Gaëtan SANTOS, conseiller parlementaire ;

- Mme Anne GIREL-ZAJDENWEBER, conseillère biodiversité, planification écologique, stratégie écophyto et adaptation au changement climatique.

Ministère de l'Agriculture, de l'Agro-alimentaire et de la Souveraineté alimentaire

- M. Serge LHERMITTE, directeur général adjoint de la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) ;

- M. Sébastien COLLIAT, chef du service des affaires financières, sociales et logistiques ;

- M. Loïc AGNES, chef du service du pilotage de la performance sanitaire et de l'international (SPPSI) ;

- Mme Fanny DUFUMIER, adjointe à la sous-directrice du pilotage des ressources et des services.

Conseil National de l'Expertise Foncière Agricole et Forestière (CNEFAF)

- M. Jean-Luc BARTMANN, vice-président et expert forestier ;

- Mme Geneviève MARTEAU, vice-président ;

- Mme Célia HOUVER, cabinet Euralia.

Syndicat des exploitants de la filière bois (SEFB)

- M. David CAILLOUEL, président ;

- M. Samuel BELLEE, vice-président ;

- Mme Annabelle JACQUEMIN GUILLAUME, déléguée générale.

Confédération paysanne

- M. Nicolas FORTIN, secrétaire national ;

- M. Thomas GIBERT, porte-parole.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2026.html


* 1 Les tensions, en 2025, entre le Cambodge et la Thaïlande ont un impact sur les cours agricoles.

* 2 La Fédération française des spiritueux a confirmé auprès des rapporteurs spéciaux ce qu'elle avait exprimé l'an passé : « l'instauration de droits supplémentaires sur les eaux de vie de vin en Chine et le retour de droits supplémentaires aux Etats-Unis met en péril les deux-tiers de la valeur exportée ».

* 3 À l'exception de l'élection des membres de la Chambre d'agriculture de la pêche et de l'aquaculture de Mayotte (CAPAM) qui n'a pas pu être organisé, en raison du passage du cyclone CHIDO, et a été reportée au mois de janvier 2026.

* 4 En moins de soixante-dix ans, le nombre d'exploitants a été divisé par cinq : de plus de 2,5 millions en 1955, le nombre d'exploitants est passé à 764 000 en 2000 puis à 496 000 en 2020. Corollaire de cette évolution, le nombre d'exploitations agricoles diminue fortement pour se situer en France métropolitaine à 389 000 en 2020.

* 5 43 % des exploitants sont à l'heure actuelle âgés de 55 ans ou plus, et susceptibles de partir à la retraite d'ici à 2033. L'âge moyen des agriculteurs français est ainsi passé de 50,2 ans en 2010 à 51,4 ans en 2020, année du dernier recensement agricole.

* 6  Cour des comptes, La politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles, communication à la commission des finances du Sénat, avril 2023.

* 7 Le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits a abouti à l'annulation, en AE comme en CP de 60 011 065 euros sur le programme 215 et de 10 512 570 euros sur le programme 206.

* 8 Crédits ouverts en loi de finances initiale hors fonds de concours (FDC) et attributions de produits (AdP).

* 9 Projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024 : Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, rapport n° 743 (2024-2025), tome II, annexe 3, de MM. Christian Klinger et Victorin Lurel, déposé le 18 juin 2025.

* 10 Sur ces deux points, on se reportera utilement au rapport d'information « On ne naît pas agriculteur, on le devient », de MM. Vincent SEGOUIN et Patrice JOLY, fait au nom de la commission des finances, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur la politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles.

* 11  Cour des comptes, La politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles, communication à la commission des finances du Sénat, avril 2023.

* 12 Sur le contexte défavorable à l'accès au foncier agricole, on se reportera utilement au rapport n° 61 (2023-2024), déposé le 25 octobre 2023, de M. Christian Klinger sur la proposition de loi visant à associer les épargnants à la transmission des exploitations agricoles françaises.

* 13 Ces financements européens comprennent des aides du premier pilier de la PAC : l'aide complémentaire au revenu pour les jeunes agriculteurs (ACJA) qui a pris la suite à partir de 2023 du paiement en faveur des jeunes agriculteurs (PJA) de la programmation 2015-2022, ainsi que des aides du second pilier de la PAC comme la dotation jeunes agriculteurs (DJA) - et les prêts bonifiés jusqu'en 2017)- auxquelles s'ajoutent des majorations des aides à l'investissement prévues dans le plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE).

* 14 À la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour des comptes a établi, en avril 2023, une synthèse de ces divers dispositifs dans son enquête consacrée à « La politique d'installation des nouveaux agriculteurs et de transmission des exploitations agricoles ».

* 15 L'ICHN est une aide en faveur des agriculteurs exerçant leur activité dans des zones défavorisées par l'altitude, de fortes pentes ou d'autres caractéristiques physiques pénalisantes du territoire.

* 16 Le Préfet de Région a compétence pour publier, par voie d'arrêté, les MAEC ouvertes sur le territoire de la Région concernée : voir pour exemple l'arrêté du 13 octobre 2025 du Préfet de la région Guadeloupe.

* 17 Consulté le vendredi 8 novembre 2025.

* 18 À la suite d'un amendement de crédits en ce sens adopté à l'Assemblée nationale.

* 19  Loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d'orientation relative à une meilleure diffusion de l'assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

* 20 Le Gouvernement a fait savoir aux rapporteurs spéciaux que la baisse importante en CP est « liée à la cinétique de paiement des dossiers de la PAC, compte tenu du fait que la date limite de paiements au titre de la programmation précédente (RDR 3) est fixée au 31 décembre 2025 ».

* 21 Une série d'intoxications alimentaires, dont un cas mortel, est survenue dans l'Aisne au mois de juin 2025 pour lesquelles un lien avec de la viande avariée a été établi.

* 22 L'ANIA fait valoir des marges comprises entre 2,2 et 3,2 % d'après une analyse économique réalisée par la Banque de France sur la base des bilans comptables des industriels alimentaires sur la période 2018-2023.

* 23 Ce plateau d'exonération a vocation à passer à 1,25 SMIC dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

* 24 Celle-ci passerait de 5 188 089 euros en 2025 à 5 005 965 euros en 2026.

* 25 Ce montant est fixé par arrêté conjoint du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé du budget dans les limites fixées au III de l'article 302 bis MB précité du code général des impôts, c'est-à-dire entre 76 et 92 euros.

* 26 Ce terme, théorisé par le Professeur Clayton Christensen vise les innovations qui révolutionnent radicalement les habitudes d'un marché et qui peuvent altérer substantiellement le poids économique d'entreprises bien implantées qui n'auraient pas anticipé l'évolution.

* 27 À cet effet, le programme mobilise le réseau des chambres d'agriculture, les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR), les organismes de sélection animale (OS), les dynamiques de groupes, les démarches territorialisées et les approches inter-filières agricoles (source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux).

* 28 Les crédits de cette action sont en forte baisse par rapport à 2025 (ils s'élevaient alors à 74 400 euros, ce qui représente une diminution de 59,68 %). Ils couvrent des frais de fonctionnement (déplacements, réunion, jury, stages, formations) ainsi que les frais engagés pour des travaux d'évaluation des programmes et des projets (comités scientifiques, évaluation externe...) ou de contrôle de l'utilisation des crédits par les corps de contrôle de l'État.

* 29 Ce programme fait appel au réseau des instituts techniques agricoles (ITA) ainsi qu'à l'ensemble des acteurs de la recherche, de l'enseignement et du développement dans le cadre de partenariats (source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux).

* 30 Il s'agit d'un projet financé par le CASDAR et porté par l'IFV, qui mobilise 20 partenaires et vise à la création d'un réseau de démonstrateurs innovants au sein de 12 régions viticoles pour une meilleure résilience des vignobles français face au changement climatique.

* 31 Projet de loi de finances pour 2025, rapport général n° 144 (2024-2025), tome III, annexe 3, mission « Agriculture, alimentation, forêts et affaires rurales », de MM. Christian Klinger et Victorin Lurel , déposé le 21 novembre 2024.

* 32 Cf. la note d'exécution budgétaire du Compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural », pour l'exercice 2024 (avril 2025).

* 33 Le projet annuel de performances, annexé au projet de loi de finances pour 2026, fait état d'un montant estimé de restes à payer à fin 2025, qui seront réglés en 2026, 2027 et 2028, en raison de reports, de 24 323 256 euros sur le programme 775 et de 78 246 808 euros sur le programme 776.

* 34 « II. - Sauf dérogation expresse prévue par une loi de finances, aucun versement au profit du budget général, d'un budget annexe ou d'un compte spécial ne peut être effectué à partir d'un compte d'affectation spéciale. [...]

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