B. LA RÉDUCTION DU NOMBRE DE GRANDS PROJETS PATRIMONIAUX
Si les financements dédiés aux grands projets continuent de constituer une part importante des crédits du programme 175, les crédits de l'action 01 - Monuments historiques et patrimoine monumental diminuent de 34 % en AE et 21 % en CP par rapport à 2025.
Le montant total prévu au présent PLF pour les grands travaux est estimé par le ministère à 57 millions d'euros en AE et 137 millions d'euros en CP. Au moins 12 opérations n'ont pas d'AE inscrite au PLF.
Grands travaux sur le programme 175 en 2026
(en millions d'euros)
|
Projets |
AE |
CP |
|
GP-RMN - Nouveau Grand-Palais |
0,00 |
6,00 |
|
Schéma directeur Fontainebleau |
0,00 |
3,24 |
|
Schéma directeur Versailles |
13,49 |
8,67 |
|
Schéma directeur CNAC-GP |
2,00 |
28,03 |
|
Extension Pierrefitte-sur-Seine |
0,00 |
23,03 |
|
Schéma directeur Quadrilatère des archives - Rohan Soubise |
3,95 |
6,23 |
|
Malaquais - Restauration du Palais des études |
0,00 |
1,80 |
|
Palais de la cité - APIJ |
0,00 |
2,92 |
|
Palais de la cité - CMN |
0,00 |
2,88 |
|
Abbaye de Clairvaux |
12,50 |
15,60 |
|
Schéma directeur Mobilier national |
0,00 |
1,50 |
|
Compiègne - Sécurisation et restauration façades et terrasse |
0,00 |
1,50 |
|
Schéma directeur EPPPD-Musée de l'histoire de l'immigration |
0,00 |
2,24 |
|
PPI Musée Guimet |
2,89 |
2,88 |
|
Château de Gaillon |
2,39 |
2,60 |
|
Cathédrale de Nantes |
6,40 |
3,41 |
|
Musée de la Tapisserie de Bayeux - Rénovation et extension du musée |
0,00 |
3,50 |
|
Schéma directeur Musée du Louvre |
10,00 |
10,00 |
|
Tours de La Rochelle / CMN |
0,00 |
3,00 |
|
Mise en sécurité et refonte du Musée d'Archéologie Nationale |
0,75 |
3,75 |
|
Schéma directeur Oradour-sur-Glane |
1,45 |
1,00 |
|
ENSA de Versailles |
1,20 |
1,92 |
|
Musée de Sèvres - Restauration du clos et couvert |
0,00 |
1,20 |
Source : ministère de la culture
Le rapporteur spécial Vincent Eblé juge que ces diminutions sont problématiques au regard de l'inscription dans le temps long de la plupart de ces grands travaux, dont certains impliquent la mobilisation de moyens de grande ampleur. C'est par exemple particulièrement le cas du schéma directeur technique du Centre Pompidou, pour lesquels les travaux viennent de débuter et devraient se prolonger jusqu'en 2029.
Variation prévue entre 2025 et 2026 par grand projet
(en millions d'euros)
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Projet |
Variation en AE |
Variation en CP |
|
Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine |
- |
+ 6,0 |
|
Schéma directeur du Quadrilatère des archives |
+ 2,5 |
+ 0,7 |
|
Schéma directeur technique du Centre Pompidou |
+ 2 |
|
|
Mise en sécurité et refonte du Musée d'Archéologie National |
- 4,5 |
+ 2,8 |
|
Palais de la cité |
- 9,2 |
- 2,3 |
|
Schéma directeur de Versailles |
- |
- 4,9 |
|
Schéma directeur de Fontainebleau |
- 3,8 |
- 2,8 |
|
Tours de la Rochelle (CMN) |
- 14,7 |
- 2,4 |
Source : commission des finances d'après les données du ministère de la culture
Les travaux patrimoniaux se conçoivent généralement sur le temps long. Ainsi, l'extension du site des Archives Nationales à Pierrefitte-sur-Seine devrait s'étendre jusqu'en 2027. Les travaux engagés depuis 2021 sur le site parisien des Archives nationales, installé au sein du Quadrilatère des archives, en sont à la phase 2 alors que le schéma directeur comporte 6 phases.
Les montants en jeu sont par conséquent élevés, dans des sites d'ampleur internationale, alors que deux des chantiers concernent les schémas directeurs des grands châteaux franciliens. Le schéma directeur de Fontainebleau a pour objectif de sécuriser, restaurer et améliorer l'accueil du public. Le montant total de la phase 2, actuellement en cours, s'élève à 59,9 millions d'euros auxquels s'ajoutent un montant de 3,71 millions d'euros versé par le ministère de la transition écologique au titre des travaux sur le grand canal.
La phase 2.2 du schéma directeur de Versailles est plus ambitieuse en termes de crédits budgétaires. Elle vise la mise en sécurité, la mise en sûreté, la rénovation et la modernisation technique des réseaux et le traitement climatique du Corps central Nord. Son coût total est estimé à 198 millions d'euros.
Concernant la reconversion de l'ancienne abbaye de Clairvaux, celle-ci a été cédée par l'administration pénitentiaire. Le chantier en cours concerne la restauration du clos et couvert, pour un montant de 60 millions d'euros pour le seul grand cloître et jusqu'à 200 millions d'euros pour l'ensemble du couvert. 12,5 millions d'euros en AE et 15,6 millions d'euros en CP sont prévus en 2026. Comme chaque année, les rapporteurs soulignent qu'étant donné la taille du site et l'ampleur des enjeux, plusieurs points d'inquiétude peuvent-être soulignés : la rénovation du grand cloître, si elle est une étape nécessaire, ne permet pas pour autant d'envisager dans un futur proche la valorisation économique du site.
En revanche, les rapporteurs spéciaux se félicitent de la réouverture complète (pour la nef dès décembre 2024 et pour les tours depuis septembre 2025) de Notre-Dame de Paris.
Les constats positifs de la Cour des
comptes
sur le chantier de Notre-Dame de Paris
La Cour a rendu en septembre 2025 une évaluation positive du chantier de la cathédrale après l'incendie5(*). Elle salue « une restauration menée à bon terme, dans des délais exigeants et pour un coût maîtrisé ».
Le coût de cette phase de travaux avait été évalué en mai 2022 à 552 millions d'euros, dont 125,4 millions d'euros de provisions réparties entre hausse de prix (66,5 millions d'euros), aléas et imprévus (38,63 millions d'euros) et risques calendaires (20,22 millions d'euros). Cette dernière provision permettait en cas de nécessité de tenir l'échéance de 2024. Elle a donné lieu à une analyse approfondie du comité d'audit du conseil d'administration avec la présentation de trois scenarii permettant, comme l'avait suggéré la Cour dans son rapport de 2022, d'évaluer le rapport entre le coût de la prolongation du chantier et des dépenses qui auraient été engagées dans le seul but de tenir l'échéance de 2024. Cette étude a pu confirmer que « les mesures prises pour assurer le respect du calendrier de 2024 seront en toute hypothèse d'un coût inférieur à celui généré par un glissement du délai ».
Cette mise à niveau des équipements de sécurité mais aussi de sûreté pour faire face au flux considérable de visiteurs, conduit à une augmentation importante des charges de fonctionnement, qui doublent par rapport à leur niveau avant l'incendie. Celles-ci devraient représenter en année pleine une dépense de 5,2 millions d'euros, dont 3,2 millions d'euros à la charge du Diocèse de Paris et 2 millions d'euros pour l'État.
Au 31 mars 2024, le montant des dons au titre de la souscription nationale était évalué par l'établissement public à 843 millions d'euros, chiffre légèrement supérieur à celui anticipé en 2020 au vu des promesses (825 millions d'euros). Le budget de la phase de restauration permettant la réouverture en 2024 a été établi à 552 millions d'euros, faisant suite à un budget de 165 millions d'euros pour la phase de sécurisation et consolidation. Dès le début de la restauration, la question du financement par les dons de la troisième phase de travaux visant à traiter les pathologies antérieures à l'incendie et à assurer une restauration d'ensemble de l'édifice a été posée tant par les fondations que par l'établissement public. Le ministère de la culture, l'établissement public et les trois fondations collectrices ont approuvé le principe selon lequel la collecte auprès des donateurs individuels alimente exclusivement les première et deuxième phases de travaux. Seuls les dons des grands mécènes et entreprises seront, avec leur accord explicite, d'ores et déjà obtenu, réorientés vers la troisième phase de travaux. Ces accords permettent désormais d'affecter le solde de la collecte, soit au moins 140 millions d'euros en fonction de la clôture des derniers marchés de la deuxième phase, au financement de la troisième phase du chantier. Ce montant est supérieur à celui envisagé de 130 millions d'euros dans le rapport de la Cour de 2022 et sera abondé par une nouvelle levée de fonds déjà engagée par l'établissement public.
Le respect du budget de la phase de restauration liée à l'incendie doit être souligné. Il résulte d'un suivi rigoureux par la maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre, avec une forte implication du comité d'audit et une attention soutenue des fondations. Même si le chantier est exceptionnel, également par l'engagement des entreprises, des leçons pourraient être tirées par le ministère de la culture en termes de pilotage et de gestion financière par les maîtres d'ouvrages d'autres grands chantiers de monuments historiques.
Source : Cour des comptes
* 5 Le chantier de la cathédrale de Notre-Dame - septembre 2025, Cour des comptes.