II. LA CRÉATION D'UN REVENU DE CONTINUITÉ ASSURANT LA PROTECTION DES ARTISTES AUTEURS PEUT ÊTRE AJUSTÉE
A. CRÉER UN REVENU DE CONTINUITÉ POUR LES ARTISTES AUTEURS POUR POURSUIVRE LA CONSOLIDATION DE LEURS DROITS SOCIAUX
1. La création d'une couverture du risque de discontinuité de l'activité proposé à l'article 2 du texte
La présente proposition de loi vise à garantir une continuité de revenus des artistes auteurs professionnels. Bien entendu, la proposition de loi devra être complétée par d'autres mesures de lutte contre la précarité des artistes auteurs, puisque celle-ci trouve aussi ses racines dans la faiblesse de leur position face aux commanditaires et aux diffuseurs.
La rapporteure souscrit pleinement à la proposition de loi qui s'inscrit dans les mouvements passés du législateur, qui, depuis 1975, enrichit les droits sociaux des artistes auteurs. Par ce texte, il convient de leur reconnaître la pleine qualité de travailleur, et l'assurance sociale contre la perte de revenus qui va de pair.
L'article 2 inscrit au sein du code du travail la création d'un revenu de remplacement pour les artistes auteurs répondant à des conditions de ressources et de niveau de revenu d'activité antérieur sur les douze derniers mois. Son montant, proportionnel aux revenus d'activité perçus l'année précédente, dans la limite d'un plancher, serait fixé par décret mais ne pourrait être inférieur à 85 % du Smic. Il serait versé par France Travail et financé par le régime d'assurance chômage de l'Unédic.
2. Les ajustements souhaités par la rapporteure pour redéfinir l'éligibilité au revenu et donner plus de place au dialogue social
Les travaux de la rapporteure ont néanmoins fait ressortir le besoin de faire évoluer les paramètres de ce revenu novateur sur quelques points.
Tout d'abord, la rapporteure a proposé un amendement afin de redéfinir les conditions de ce régime protecteur pour les artistes auteurs sans pour autant les déresponsabiliser. Il paraît souhaitable de mieux cibler l'éligibilité du revenu de remplacement, en limitant l'ouverture de ce droit aux personnes exclusivement affiliées à la sécurité sociale des artistes auteurs et de rehausser le seuil exigé de revenus antérieurs, dans la limite de 900 Smic horaire. Pour les personnes qui n'exerceraient pas leur activité artistique à titre exclusif, la rapporteure propose de créer une commission chargée d'attester la pratique professionnelle des arts du demandeur. Le législateur pourra s'inspirer du modèle développé en Belgique, où la commission du travail des arts, récemment réformée par une loi de décembre 2022, semble tenir ses promesses. Composée de représentants des organismes publics, des syndicats et d'experts des différents secteurs artistiques, cette commission délivre les attestations qui établissent une activité professionnelle principale dans les arts.
La rapporteure estime également nécessaire de préciser les obligations incombant aux bénéficiaires du revenu pour satisfaire la condition requise par France Travail de recherche d'emploi. Les artistes auteurs devraient notamment justifier des actes positifs et répétés en vue de développer leur activité artistique, la diffusion ou l'exploitation commerciale de leurs oeuvres.
Enfin, il apparaît important à la rapporteure de conforter le rôle du dialogue social dans la définition et la mise en oeuvre de ce revenu. Sur le modèle du régime des intermittents, les organisations représentatives des artistes auteurs et des diffuseurs, sous l'orientation définie par les organisations représentatives au plan interprofessionnel, pourraient être chargées de négocier un accord annexé à la convention d'assurance chômage. Cet accord définirait les règles spécifiques applicables au revenu et pourrait faire l'objet - dans le cadre d'une clause de revoyure - de nouvelles négociations au bout de quatre ans.