2. En dépit de l'incertitude des statistiques, il apparaît que la très grande majorité des jeunes intéressés demandent la nationalité française et que peu de décisions de refus leur sont opposées

On ne peut que déplorer les incertitudes et le caractère lacunaire des statistiques disponibles relatives à la manifestation de volonté ; de l'aveu même de Mme Elisabeth Guigou, Garde des sceaux, ministre de la justice, " il faut être très prudent " en la matière.

Les statistiques disponibles font cependant apparaître qu'une très grande majorité des jeunes intéressés demandent à acquérir la nationalité française. Selon les chiffres du ministère de la justice cités par M. Marceau Long dans son intervention devant votre commission des Lois : " la manifestation de volonté a donné lieu en 1994, à 33.255 acquisitions, en 1995 à 30.526 acquisitions, en 1996 à 29.845 acquisitions. Il apparaît que les jeunes nés en 1977 et 1978 ont à plus de 90 % manifesté leur volonté de devenir français, ceux nés en 1979 l'ont fait dans une proportion de plus de 80 % et ceux nés en 1980 s'étaient déjà manifestés à concurrence de 47 % dès la première année " (sous-direction statistique du ministère de la justice, juillet 1997).

Les jeunes effectuent de plus en plus souvent cette démarche assez tôt, entre 16 et 18 ans, l'âge moyen des déclarants étant légèrement supérieur à 17 ans ; chaque année, davantage de jeunes déposent leur demande dès 16 ans : 32 % en 1994, 43 % en 1995 et 46 % en 1996.

Il semblerait cependant, selon M. Paul Lagarde, professeur de droit à l'université de Paris I, comme selon le Garde des sceaux, qu'environ 10 à 15 % des jeunes susceptibles d'acquérir la nationalité française selon cette procédure ne l'auraient pas demandée, mais parmi ceux qui se sont abstenus de toute démarche, il est impossible de distinguer ceux qui n'auraient pas été en mesure de manifester leur volonté faute d'information par exemple, de ceux qui refusent délibérément de devenir Français.

Peut-on soutenir, dans ces conditions, que l'ensemble de ces jeunes auraient été " laissés au bord de la route ", selon l'expression du Garde des sceaux ?

En tout état de cause, le taux de refus d'enregistrement des manifestations de volonté est très faible : 1,6 % en 1994 (644 refus sur 40.915 souscriptions), 2,5 % en 1995 (814 refus sur 32.222 souscriptions), 2,5 % en 1996 (809 refus sur 31.963 souscriptions). Encore faut-il déduire, parmi ces refus, ceux qui résultent du seul fait que les intéressés étaient déjà Français sans le savoir (et qui représenteraient 30 % de l'ensemble des refus selon M. Marceau Long).

Les autres refus sont essentiellement motivés par l'insuffisance de preuve de la résidence en France des intéressés au cours des cinq années précédant la manifestation de volonté.

Or, la condition de résidence étant maintenue par le projet de loi, dans l'hypothèse où l'on reviendrait à une acquisition automatique de la nationalité française à la majorité, les intéressés devraient justifier de la preuve de cette résidence lorsqu'ils seraient amenés à demander un certificat de nationalité française ; ils risqueraient alors de se voir opposer la même proportion de refus pour cette même raison.

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