D. LES DISPOSITIFS BILINGUES : DES LEÇONS À TIRER
La
dénomination de « bilingue » se réfère
à la finalité de dispositifs visant
l'acquisition d'une
connaissance de la langue ainsi que de compétences interculturelles plus
approfondies
, grâce à un renforcement de la place de la langue
dans les enseignements et le développement d'aptitudes intellectuelles
transversales. L'objectif est de modifier le comportement des
élèves face à l'apprentissage. En effet, comme le souligne
l'enquête Eurydice sur l'enseignement des langues en milieu scolaire en
Europe,
« un excellent moyen de progresser dans une langue
étrangère consiste à l'utiliser dans un but précis,
de sorte que la langue devienne un moyen d'atteindre un objectif plutôt
qu'une fin en soi ».
Il est aujourd'hui instructif de dresser le bilan d'expériences qui sont
parvenues à s'ancrer dans notre système éducatif, et de
se servir de leur dynamique pour rénover l'enseignement des
langues.
1. Les sections européennes, dix ans après : un dispositif riche d'enseignements pour l'ensemble du système d'apprentissage des langues vivantes
Dix ans
après leur mise en place, les sections européennes ont fait la
preuve de leur succès. En 1999, un rapport de l'IGEN l'affirme
expressément :
« L'efficacité des sections
européennes qui exposent davantage les élèves à la
langue étrangère et leur permettent un meilleur apprentissage de
celle-ci par l'apport déterminant d'un enseignement renforcé en
langue dans un champ plus ouvert (originalité du dispositif), n'est plus
à démontrer. »
Si l'on fait parfois le reproche à ces sections d'être
réservées à une minorité d'élèves, il
semble à votre rapporteur regrettable que ce dispositif n'ait qu'une
diffusion limitée, alors que le bilan de ses dix premières
années est fructueux.
a) Une réelle montée en puissance
(1) Le cadre général
Les
sections européennes et les sections de langue orientale,
créées en 1992
54
(
*
)
, ont pour ambition de favoriser «
la
formation du plus grand nombre d'élèves à un niveau proche
du bilinguisme, assorti d'une connaissance approfondie de la culture des pays
étrangers
». Pour ce faire, la pédagogie
développée dans ces sections repose sur les principes
suivants :
- un horaire d'enseignement linguistique et culturel renforcé
pendant les deux premières années, à raison de deux heures
supplémentaires par semaine, le cursus débutant en principe
à partir de la classe de 4
ème
, et se poursuivant
jusqu'en Terminale ;
- l'enseignement dans la langue de la section, sur l'horaire normal, de
tout ou partie d'une ou plusieurs
disciplines non linguistiques
fondamentales (DNL, histoire, géographie, biologie, mathématiques
par exemple), en principe à partir de la classe de 2
nde
;
- l'organisation d'activités culturelles et d'échanges, dans
le cadre du projet d'établissement.
La scolarité y est sanctionnée par la mention « section
européenne » ou « section de langue
orientale » portée sur le diplôme du baccalauréat.
Le financement de ces sections est pris sur les moyens de
l'établissement. Leur succès est souvent porté par une
bonne intégration au projet d'établissement.
(2) Un dispositif consolidé
Si les sections européennes ont connu un accroissement numérique significatif, passant d'une centaine initialement à près de 2 500 en 2001-2002 55 ( * ) , elles restent encore trop confidentielles. L'objectif fixé par Jack Lang en 2001, lequel envisageait la perspective d'étendre les sections européennes à l'ensemble des établissements d'ici dix ans, semble encore hors de portée...
RENTRÉE 2002 - RÉPARTITION DES
ÉLÈVES
DES SECTIONS EUROPÉENNES
|
|
COLLÈGES |
LYCÉES |
LYCÉES PROFESSIONNELS |
|||
Nombre d'établissements |
Public |
1 361 |
504 |
75 |
|||
Privé |
246 |
129 |
11 |
||||
Total |
1 607 |
633 |
86 |
||||
Effectifs
|
6 ème |
3 536 |
2 nde G |
18 533 |
BEP |
1 313 |
|
5 ème |
6 028 |
1 ère G |
12 855 |
Bac
pro
|
1 385 |
||
4 ème |
36 407 |
1 ère techno |
710 |
|
|
||
3 ème |
33 472 |
T G ale |
9 681 |
|
|
||
|
|
T techno |
541 |
|
|
||
Total |
79 433 |
Total |
42 320 |
Total |
2 698 |
Toutefois, des mesures récentes sont venues consolider le dispositif,
pour l'élargir et le rendre plus attractif :
- d'une part, comme on l'a vu, la
formule a été
progressivement étendue et adaptée aux élèves de
lycées professionnels
, pour répondre aux besoins accrus
d'exportation à l'étranger des diplômés de ces
filières ;
- d'autre part, les
conditions d'obtention de l'indication
« section européenne » (ou « section
langue orientale ») sur le diplôme du bac ont été
assouplies.
Il s'agit de
donner un attrait supplémentaire
à ces sections, alors que l'échéance du
baccalauréat et le surcroît de travail qu'elles
représentent découragent souvent les élèves de
Terminale à poursuivre dans cette voie. On observe ainsi un recul des
effectifs entre le collège et le lycée. Or la continuité
de l'enseignement dans ces sections en garantit tout l'intérêt.
Dès la session 2004, les modalités seront les suivantes :
- pour promouvoir une plus grande diversification, la possibilité
d'obtenir cette mention est étendue à la LV2 (la langue de
la section peut être passée comme épreuve obligatoire de
LV1 ou de LV2) ;
- la note minimale requise pour cette épreuve, jusqu'alors de 14
sur 20, est abaissée à 12 sur 20 ;
- l'évaluation spécifique, qui allie contrôle continu
et épreuve terminale (oral comptant pour 80 % de la note et
évaluation continue comptant pour 20 %), pourra être choisie
par l'élève comme épreuve facultative : s'il
n'obtient pas la moyenne, la note pourra ainsi ne pas être prise en
compte pour l'obtention du bac, alors qu'il fallait auparavant obtenir au moins
la moyenne.
Ces mesures répondent partiellement aux
critiques et
dysfonctionnements
auxquels se heurte le dispositif des sections
européennes, qui sont autant de
symptômes
révélateurs des blocages qui entravent l'ensemble de notre
système d'enseignement des langues vivantes.
* 54 Circulaire n° 92-234 du 19 août 1992 (BO n° 33 du 30 septembre 1992).
* 55 Selon une enquête menée par la délégation aux relations internationales et à la coopération.