c) Au niveau local, une réelle sensibilisation aux risques de tsunami
Au cours de cette étude, votre rapporteur a constaté une sensibilisation des hommes politiques aux risques naturels proportionnelle à leur proximité avec la population. Au-delà des effets d'annonce, la prévention du risque de tsunami n'apparaît guère comme une priorité nationale comme en témoignent les tergiversations observées depuis près de deux ans pour arrêter la position officielle de la France. En revanche, elle fait l'objet d'une réelle implication politique au niveau local, notamment parce qu'elle obéit à une demande sociale forte.
Les exemples des politiques conduites par les conseils généraux des Alpes maritimes et de la Martinique illustrent la volonté des collectivités territoriales de se prémunir contre les risques naturels.
Le département des Alpes maritimes est soumis à la plupart des risques naturels, depuis les feux de forêt jusqu'aux avalanches en passant par les glissements de terrain, la sécheresse, les tremblements de terre, les tsunamis et les inondations. Sous l'impulsion de son président, M. Christian Estrosi, le conseil général a lancé une stratégie de prévention des risques naturels et notamment des risques géophysiques avec la volonté d'en faire un pôle de compétence du département, utilisant une situation géologique à risques comme un moteur de développement économique.
Dans ce cadre, une convention a été signée en 2003 entre le conseil général des Alpes maritimes et le Groupement d'Intérêt Scientifique « Centre Universitaire de Réflexion pour une Agence des Risques Environnementaux (dit GIS CURARE) 55 ( * ) . Ce dernier a pour objet de montrer qu'il est pertinent de regrouper les compétences scientifiques et techniques dans le domaine de l'environnement et des risques naturels pour analyser et comprendre les phénomènes environnementaux et répondre aux sollicitations sociales et à la commande publique. Cette démonstration qui se termine en décembre 2007 doit faciliter l'émergence d'un pôle de compétence « risques naturels » dans les Alpes maritimes puis en région PACA (Provence-Alpes-Côte d'Azur) et préfigure la future agence des risques environnementaux qui devrait être créée en 2008 et qui a vocation à être sollicitée par les entreprises devant faire des expertises dans cette région et plus généralement sur l'ensemble de l'Arc latin. En effet, la région Languedoc-Roussillon est également concernée par la création de ladite agence et les relations déjà développées avec les agences pour les risques environnementaux italienne et espagnole permettent d'envisager l'essor d'une expertise reconnue en matière de risques géologiques autour de la Méditerranée.
Depuis son lancement, le GIS CURARE a focalisé son action sur trois problématiques, dont celle concernant les tsunamis et les instabilités gravitaires en mer 56 ( * ) . L'objectif recherché était de localiser précisément les failles actives en milieu sous-marin et les zones propices aux glissements sédimentaires. Il s'agissait de quantifier les volumes susceptibles de glisser et modéliser l'ampleur des tsunamis locaux attendus en cas d'effondrement sous-marin. Ces études financées pour moitié par le conseil général ont donc contribué à une meilleure connaissance de l'aléa dans une zone particulièrement concernée par les tsunamis locaux liés à un glissement de terrain.
Par ailleurs, après le tsunami de Sumatra, le président du conseil général des Alpes maritimes a demandé au GIS CURARE d'organiser pour la fin février 2005 un colloque international sur le thème : « Pour un réseau d'alerte tsunami en Méditerranée occidentale ». A cette occasion, M. Christian Estrosi a insisté sur la nécessité de mettre en place un réseau d'alerte en Méditerranée. Après ce colloque et compte tenu de l'implication du GIS CURARE dans les travaux organisés par la délégation française pour préparer les réunions du GIC/SATANEM, le directeur du GIS CURARE avait été nommé contact national pour la zone Méditerranée/Atlantique Nord-Est par le président du comité national de la commission océanographique internationale.
Enfin, l'organisation par la France de la deuxième session du GIC/SATANEM en mai 2006 démontrait la volonté politique de notre pays d'aboutir rapidement à la mise en place d'un système d'alerte aux tsunamis en Méditerranée. Le fait que cette réunion se soit tenue à Nice s'explique cependant par l'engagement fort du président du conseil général, alors ministre délégué à l'aménagement du territoire, en faveur d'un tel dispositif.
Lors de son déplacement en Martinique , votre rapporteur a constaté que le conseil général de ce département, présidé par notre collègue Claude Lise était également très actif en matière de prévention des risques naturels.
D'abord, le conseil général a soutenu la création du système d'information géographique de la Martinique. Il s'agit d'un ensemble d'informations géographiques issues de cartes numérisées, de photos scannées, de mesures de tous types réalisées en temps réel, de levés de terrain, de renseignements socio-économiques, urbanistiques etc ayant vocation à aider la prise de décision en matière de gestion des risques et d'aménagement du territoire. Cet outil peut ainsi servir à cartographier le risque de submersion du littoral pour une commune précise en cas de tsunami en superposant la carte d'inondation et la carte cadastrale 57 ( * ) .
Ensuite, le conseil général de la Martinique a lancé une campagne de sensibilisation aux risques naturels auprès de la population à travers un outil pédagogique innovant : la caravane de la prévention aux risques majeurs. Cette caravane composée de trois chapiteaux de 25m² chacun abrite des expositions, des films pédagogiques sur les risques majeurs, un quiz multimédia et un jeu multimédia pour les enfants de 6 à 12 ans. En ce qui concerne l'information sur les tsunamis, l'un des films présente le séisme du 26 décembre 2004 et le tsunami qui l'a suivi à partir de témoignages et de documents scientifiques. Les visiteurs peuvent également visionner une modélisation numérique développée par le CEA.
Enfin, le conseil général déploie un important réseau d'instruments de mesure (houlographes, stations météorologiques, accéléromètres) pour améliorer la connaissance et la surveillance des risques naturels. Il a également mis en place un marégraphe au prêcheur qui a vocation à servir pour la surveillance des tsunamis, même si sa mission principale est la meilleure connaissance des surcotes marines lors des marées de tempête. Une autre station devrait être installée sur la côte atlantique dans la commune du François.
* 55 Le GIS CURARE regroupait à l'origine 5 partenaires : l'université de Nice-Sophia Antipolis, l'Université Pierre et Marie Curie, le CNRS, l'Institut de Recherche et Développement et la société ACRI ST. Se sont ensuite greffés à cette initiative le BRGM et l'IFREMER ainsi que le SHOM et le conservatoire national des arts et métiers.
* 56 Les deux autres problématiques concernaient les glissements et les instabilités gravitaires dans la Haute-Vallée de la Tinée et l'estimation des mouvements forts lors de séismes majeurs sur le littoral.
* 57 Votre rapporteur tient cependant à faire remarquer qu'aucune carte des zones inondables fiable ne peut être actuellement produite pour les Antilles dans la mesure où les modélisations de tsunami se heurtent à l'absence de bathymétrie précise pour la zone allant de 0 à 200 mètres tout autour des Antilles françaises.