B. LES RECOMMANDATIONS

Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, votre rapporteur souhaite faire deux types de recommandation : des recommandations structurelles, qui visent tous les bassins et constituent autant de conditions sine qua non pour une contribution française efficace à l'instauration d'un système d'alerte aux tsunamis; des recommandations par bassin pour tenir compte des spécificités de chaque zone et de l'exposition variable des côtes françaises au risque de tsunami.

1. Deux remarques préalables

Au préalable, votre rapporteur souhaite faire deux remarques que le gouvernement devra non seulement garder à l'esprit dans sa réflexion sur l'architecture souhaitable pour un système d'alerte aux tsunamis, mais sur lesquelles il lui faudra également communiquer.

La première remarque concerne les spécifités de l'aléa de tsunami et ses conséquences en matière de gestion du risque.

Les tsunamis sont des phénomènes rares et qui exigent des instruments de détection sophistiqués et des dispositifs d'alerte très réactifs compte tenu de la brièveté des délais de réaction et des risques de fausse alerte. Les choix qui seront pris pour arrêter l'architecture du système d'alerte dépendront d'un arbitrage entre les coûts d'un dispositif d'alerte au regard de la fréquence de l'aléa. Cet arbitrage devra être arrêté de manière transparente et figurer dans tous les plans d'organisation des secours en aval.

La deuxième remarque souligne les limites d'un dispositif d'alerte.

Contrairement à une opinion souvent répandue chez nos concitoyens, le risque « zéro » n'existe pas : même si un système d'alerte aux tsunamis performant est mis en place, il n'empêchera pas dans tous les cas la perte de vies humaines. En effet, si les effets néfastes des tsunamis régionaux et lointains peuvent être fortement réduits, les moyens de prévention sont plus limités à l'encontre d'un tsunami local qui déferle sur la côte en quelques minutes. Dans ce cas là, seule une sensibilisation préalable de la population aux bons réflexes peut s'avérer efficace. Ce message devra donc être passé pour éviter tout malentendu entre les autorités chargées de la protection civile et la population.

2. Les recommandations structurelles

Elles s'articulent autour de quatre axes : la définition d'un système d'alerte cohérent; la mise à disposition d'un budget pluriannuel pérenne; l'intégration du risque tsunami dans une logique multirisque pour l'acquisition des instruments de mesure du niveau de la mer et l'expérimentation sur la base du volontariat de la gestion de l'alerte aux tsunamis locaux.

a) La définition d'un système d'alerte cohérent

Cinq conditions doivent être remplies pour mettre en place un système d'alerte cohérent : désigner un coordinateur général; disposer des outils de mesure adaptés; s'appuyer sur une connaissance approfondie de l'aléa; répondre de manière adaptée en cas d'occurrence de l'aléa; sensibiliser et éduquer la population.

(1) Désigner un coordinateur général

La conception d'un système d'alerte aux tsunamis implique un grand nombre de partenaires dont les structures de fonctionnement, les intérêts et la conception qu'ils peuvent avoir d'un système d'alerte aux tsunamis sont très variés et parfois contradictoires. Un coordinateur général est donc doublement nécessaire.

D'une part, il a vocation, en coopération avec les organismes associés au projet, à définir les grandes lignes directives de ce dernier pour en assurer la cohérence interne. Il lui faudra ainsi arrêter le contenu et la coordination des contributions françaises dans les quatre bassins. Il devra également s'assurer en collaboration avec le comité national de la Commission océanographique intergouvernementale que la France participe aux réunions des 4 groupes intergouvernementaux de coordination et qu'elle est représentée dans chaque groupe de travail. Le comité national doit donc disposer des crédits nécessaires pour financer la participation des délégués français à ces réunions et assurer la fonction de secrétariat.

D'autre part, il lui revient de fixer les responsabilités et les missions de chacun et de définir un calendrier prévisionnel pour la réalisation du projet.

Deux pistes de réflexion sont envisageables :

- la création d'une délégation interministérielle sur le modèle de la délégation interministérielle post-tsunami : cette structure s'était montrée efficace pour réaliser un projet concret sur une période déterminée impliquant un grand nombre de partenaires;

- l'attribution de ce rôle de pilotage au secrétariat général de la mer : plusieurs arguments peuvent être avancés en faveur de cette solution. D'abord, cette administration est placée directement sous l'autorité du Premier ministre. Cette position privilégiée lui donne une autorité incontestable sur les autres partenaires et lui permet d'accélérer les arbitrages nécessaires en cas de désaccord. Ensuite, c'est une administration qui est habituée à travailler avec plusieurs organismes concernés par la mise en place d'un système d'alerte (SHOM, IFREMER) et qui connaît donc bien leur fonctionnement interne. Enfin, le succès d'Extraplac 74 ( * ) coordonné par le secrétariat général de la mer témoigne de sa capacité à gérer un projet équivalent. Il semblerait que le gouvernement privilégierait cette solution.

S'il ne revient pas à votre rapporteur d'arrêter tous les détails de l'architecture du futur système d'alerte français aux tsunamis, il estime que ce dernier doit comporter la création d'un centre d'alerte national géré par le CEA et dont le champ d'intervention à court terme concernerait l'alerte en Méditerranée/Atlantique Nord-Est, dans les Caraïbes et dans l'océan Indien en cas de tsunamis dont l'arrivée sur le littoral est prévue plus de 15 minutes après la détection de l'événement générateur du tsunami. Une fois ce dispositif en place et rodé, une deuxième étape pourrait être envisagée pour l'extension des missions du centre national d'alerte à l'alerte en cas de tsunamis locaux dans des zones définies au préalable et équipées des instruments de mesure et de diffusion de l'alerte nécessaires.

Par ailleurs, il reviendra à ce centre national d'alerte d'assumer également les fonctions de centre d'alerte régional pour la Méditerranée occidentale, pour les Caraïbes et pour la zone ouest de l'océan Indien, en collaboration avec les autres centres régionaux.

* 74 Extraplac est le programme français d'extension du plateau continental. La convention des Nations Unies sur le droit de la mer traite des espaces maritimes, de leur exploitation, de la navigation, de leur prospection et du régime minier des fonds marins. Cette convention autorise sous certaines conditions les Etats côtiers à étendre les zones maritimes sous leur juridiction au-delà des limites de la zone économique exclusive. Les dossiers de revendications seront examinés par une commission spécialisée des Nations Unies avant le 13 mai 2009. La France a donc décidé, à travers le projet Extraplac, de préparer les dossiers pour toutes les zones d'extension potentielle.

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