OPINIONS DES GROUPES POLITIQUES

I. OPINION DES COMMISSAIRES MEMBRES DES GROUPES UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (UMP), UNION CENTRISTE ET RÉPUBLICAINE (UCR) ET DE LA RÉUNION ADMINISTRATIVE DES SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (NI)

Les commissaires de la commission des finances, membres des groupes de l'opposition sénatoriale, saluent à titre liminaire l'effort du Gouvernement qui a fourni et présenté au Parlement, dès le 11 avril, dans des délais particulièrement contraints , le présent projet de programme de stabilité 2012-2016, permettant ainsi le parfait respect des dispositions de l'article 14 de la dernière loi de programmation des finances publiques 62 ( * ) .

Le document soumis à notre examen mérite d'être salué sur trois aspects essentiels :

- il révèle a posteriori le caractère réaliste de la programmation élaborée par le Gouvernement voici un an ;

- il présente des hypothèses de croissance crédibles, révélatrices d'une approche plus mesurée que celle des années passées ;

- enfin, l'infléchissement en matière de maîtrise de la dépense publique apparaît tangible, rompant ainsi avec des décennies de tergiversations et d'impuissance.

Une programmation réaliste

La commission des finances a prêté une attention constante, sous toutes les majorités, à la qualité des scenarii d'évolution des finances publiques formulés par le Gouvernement, n'hésitant jamais à souligner les failles de raisonnement ou les efforts insuffisamment documentés et à dénoncer le caractère généralement assez théorique des programmations successives depuis 1999. Elle ne peut donc que saluer aujourd'hui le respect scrupuleux (et même au-delà) par l'exécutif de la feuille de route qu'il s'était assignée voici un an .

La réduction des déficits publics a ainsi été plus importante que l'objectif initialement fixé : alors qu'il était de 6 % de la production nationale dans la loi de finances pour 2011, chiffre revu à 5,7 % dans le précédent programme de stabilité, le déficit finalement notifié aux autorités communautaires a été ramené à 5,2 %. La France est ainsi en avance sur sa trajectoire cible, ce qui rend d'autant plus vraisemblable la réalisation de l'objectif de retour au seuil de 3 % en 2013 et à l'équilibre dès 2016.

La crédibilité de notre pays est d'autant plus forte que, face à la dégradation de la conjoncture, manifeste à partir de l'été 2011, le Gouvernement a immédiatement pris les mesures qui lui permettaient de garantir la trajectoire intangible de réduction des déficits publics, à travers les deux plans « Fillon » des 24 août et 7 novembre 2011, n'hésitant pas à modifier l'équilibre du projet de loi de finances pour 2012 en cours d'examen et à en durcir le volet « dépenses ».

Le Gouvernement a raison de souligner que, pour prix d'un volontarisme tout à fait inédit en période électorale, pour la première fois depuis 1960, les dépenses publiques (Etat, sécurité sociale et collectivités territoriales) ont été globalement stabilisées . Il s'agit d'une performance remarquable, qui devra impérativement être confirmée au cours des prochains mois.

En ce sens, la France doit maintenant finaliser le processus d'insertion d'une règle d'équilibre dans sa Constitution . Le texte adopté dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale et le Sénat, le 13 juillet 2011, doit être complété pour être conforme au traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) signé en février et dont la mise en oeuvre engage la crédibilité et l'avenir de l'ensemble des Etats de l'Union européenne.

Des hypothèses de croissance crédibles

Le souci de crédibilité manifesté par le Gouvernement se retrouve dans la formulation prudente des hypothèses macroéconomiques qui fondent sa programmation . Rompant avec plusieurs décennies de prévisions, parfois excessivement volontaristes, qui ne se vérifiaient pas toujours dans la réalité, celui-ci a révisé, en cours d'année, son scénario de croissance pour 2011 pour le ramener de 2 % dans le précédent programme de stabilité, à 1,75 % dans le collectif budgétaire de septembre, en ligne avec le taux effectivement constaté l'an dernier (1,7 %).

Conformément à ce langage de vérité , la prévision de croissance du PIB de + 0,7 % en 2012 apparaît bien documentée et l'écart avec les prévisions intérimaires de la Commission européenne (fixées à + 0,4 %) est justifié sur la base d'une analyse réaliste (reprise plus rapide de l'activité, d'ores et déjà mesurée par l'Insee, qui estime que l'acquis de croissance à l'issue du premier semestre devrait s'établir à 0,5 % et que la croissance redémarrerait dès le deuxième trimestre).

Les projections de 1,75 % en 2013, puis de 2 % par an en 2014, 2015 et 2016, sont, à juste titre, rapportées à la croissance potentielle (1,7 %) pour souligner leur caractère encore aléatoire. Nous sommes naturellement attachés à ce que les hypothèses formulées demeurent prudentes .

En tout état de cause, la France va devoir se doter d'un organe national indépendant, jouissant d'une véritable autonomie fonctionnelle par rapport aux autorités budgétaires , selon le principe déjà en vigueur chez plusieurs de nos partenaires d'Europe du nord, afin de faire reposer sa programmation sur des scénarii macroéconomiques exempts de tout soupçon de complaisance à l'égard de l'exécutif. Les nouvelles règles de gouvernance budgétaire européennes nous l'imposent. La mise en place d'un tel dispositif, préconisé de longue date par le Sénat, ne fera que conforter la démarche initiée par le Gouvernement actuel.

Un effort réel de maîtrise des dépenses

La double norme de dépense (« zéro valeur » hors charge de la dette et pensions des fonctionnaires de l'Etat, « zéro volume » en prenant en compte ces deux postes) a été respectée, et même davantage, en 2011 : sur le périmètre « zéro valeur », les dépenses exécutées sont inférieures de 200 millions d'euros au plafond prévu en loi de finances initiale ; sur le périmètre « zéro volume », elles ont progressé à un rythme inférieur aux prévisions d'inflation associées à la loi de finances initiale. Pour la première fois depuis 1945, les dépenses de l'Etat hors dette et pensions ont ainsi baissé d'une année sur l'autre en valeur .

En ce qui concerne les dépenses de sécurité sociale, l'inflexion très nette des charges d'assurance maladie a permis le respect, pour la deuxième année consécutive, de l'Ondam voté par le Parlement en PLFSS, ce qui est là encore inédit.

Les collectivités locales ont également été invitées à prendre leur part dans la maîtrise des dépenses courantes avec la diminution des concours financiers qui leur sont attribués par l'Etat.

La conjonction de ces efforts a permis d'obtenir, en 2011, une stabilisation en volume des dépenses publiques qui crédibilise le taux d'évolution de 0,4% sur lequel repose la trajectoire de retour à l'équilibre

Le respect de cette trajectoire s'appuie, en effet, sur un plan d'effort de 115 milliards d'euros dont les deux tiers concernent des économies en dépenses. Cette démarche est la seule viable : la priorité donnée ainsi à la maîtrise des dépenses publiques sur les hausses d'impôts permettra de préserver la croissance de notre économie.

Le Gouvernement ne doit cependant pas relâcher ses efforts pour désigner de la façon la plus précise possible les segments de la dépense publique qui devront supporter des réductions de leur montant , et indiquer les règles arithmétiques qui seront le cas échéant appliquées. Par ailleurs, le calcul des dotations de l'Etat aux collectivités locales devrait impérativement faire référence à des ratios de bonne gestion, dans le respect du principe de libre administration.

Ceci supposerait que le « moratoire sur les normes » annoncé par le Gouvernement soit bien effectif.

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Le document que le Gouvernement s'apprête à transmettre aux instances communautaires définit la trajectoire budgétaire à partir de laquelle doit être élaborée l'action de la puissance publique pour l'année en cours et les cinq prochains exercices. Quelle que soit l'issue des élections présidentielles et législatives, le Gouvernement devra s'y conformer . Tout écart ne manquerait pas d'être sanctionné par un renchérissement du coût de notre dette qui nous ferait inévitablement dévier de la trajectoire définie avec courage et persévérance par l'exécutif en place. L'accroissement du spread avec l'Allemagne constaté ces derniers mois doit nous inciter à la plus grande prudence : rien n'est acquis et nous devons rester vigilants pour garantir à notre pays un retour pérenne sur la voie de la prospérité.


* 62 Loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Le délai limite pour la transmission du projet de programme de stabilité était le 16 avril.

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