B. LES NÉGOCIATIONS TRÈS DIFFICILES DU SOUTIEN INITIAL

1. Le cavalier seul de l'Allemagne en 2007 et le rapprochement franco-britannique de 2008-2010

En 2007, sous l'impulsion de la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni, les six nations ont cherché à mettre en place un marché de soutien commun suite à une mise en concurrence lancée le plus tôt possible après cinq années de soutien initial confié à AMSL sans mise en concurrence.

Cette démarche n'a pas abouti, à la suite du retrait en juillet 2007 de l'Allemagne et du Royaume-Uni. L'approche commune s'est heurtée à une opposition sur le recours au constructeur AMSL, comme maître d'oeuvre du soutien, demandé par le Royaume-Uni mais refusé par l'Allemagne.

A la suite de cet échec d'une tentative commune, la France a donné la priorité à l'examen d'une coopération avec l'Allemagne car il fallait dans cette hypothèse disposer très rapidement d'un projet d'appel d'offres commun, l'Allemagne souhaitant émettre son appel d'offres pour janvier 2008 afin d'obtenir l'approbation du marché par son Parlement avant la fin de la législature de mi 2009.

Malgré une avancée significative des travaux, il est apparu impossible d'aboutir à un appel d'offres commun satisfaisant pour janvier 2008. L'Allemagne a ainsi publié le 21 décembre 2007 un avis d'appel à candidatures pour son seul besoin, ce qui a entraîné l'arrêt des travaux communs.

Depuis janvier 2008 et en parallèle, la France a réorienté sa coopération vers le Royaume-Uni, avec qui elle a décidé de préparer un marché commun pour la réalisation des activités de soutien hors coeur commun.

Une demande d'offre initiale a été envoyée à AMSL en août 2008 avec une mise à jour en avril 2010. Les deux pays ont convenu de fixer un jalon en décembre 2010 afin de juger de la qualité de la première offre industrielle attendue à l'automne 2010 ainsi que de l'intérêt de cette coopération.

Puis les six pays participant au programme ont décidé de concentrer leurs efforts sur la mise en place d'un coeur commun du soutien et sur la préparation d'une organisation entre les États pour les activités communes de soutien.

Le coeur commun de soutien et la coopération franco-britannique sur le soutien initial seraient couverts par un MoU fin 2010. Par la suite, l'arrangement spécifique décrivant les activités franco-britanniques pourrait être signé.

Depuis, l'Allemagne qui ne recevra ses premiers avions qu'en novembre 2014 soit vingt mois après le nôtre réexamine de nouvelles solutions.

Ce cavalier seul de l'Allemagne est d'autant plus surprenant qu'une coopération entre nos deux pays dans la formation des personnels est en cours de négociation. Un MoU en cours de finalisation prévoit la formation d'une partie des personnels navigants allemands en France, sur la base d'Orléans, pour les vols tactiques (à la fois les vols réels et l'entraînement sur simulateurs) en échange d'une formation au type en Allemagne pour une partie des pilotes français. Quant à la formation de l'ensemble des mécaniciens français elle se fera en Allemagne, à Wunstorf, en Basse Saxe, au plus tôt à l'été 2015. D'ici là, tous suivront les cours à Séville. Par ailleurs, l'Allemagne et la France sont les deux principales nations contributrices de l'EATC, pour ce qui est du partage opérationnel.

Cette absence de coopération dans le domaine du soutien tiendrait au fait que les Allemands seraient réticents au partage des pièces de rechange (« spares pooling ») alors que les Français y sont très favorables et y voient un axe fort de réduction des coûts. Les responsables allemands, y compris les industriels de MTU rencontrés par vos rapporteurs à Munich, considèrent qu'il est impossible de donner un prix à une pièce usagée et que dans ces conditions ils ne voient pas pourquoi ils devraient récupérer un matériel « usé » par une autre nation qui vole beaucoup plus qu'eux.

Cette approche est radicalement différente de l'approche anglo-saxonne telle que développée par exemple dans le « club C 17 » et qui ne prend pas en compte le degré d'usure des pièces 8 ( * ) .

Enfin, Français et Allemands ont un différend sur l'« aircraft off-take », c'est-à-dire le nombre exact d'avions commandés. L'Allemagne a en effet profité des renégociations début 2010 pour réduire sa flotte de 60 à 53 aéronefs (transformant sept achats ferme en options). En outre, l'Allemagne a de plus annoncé en octobre 2011 une nouvelle cible de 40 exemplaires pour sa flotte, sans préciser les modalités de la réduction.

Les représentants allemands cherchent donc à obtenir un partage des coûts non récurrents (dont le soutien fait partie) calculé sur la base de 53 avions et non plus 60 avions, position qui n'est pas partagée par les autres partenaires du programme (y compris le Royaume-Uni qui réduit aussi sa flotte), compte tenu de l'accord qui avait été conclu en 2010 au moment de la renégociation et qui stipulait que la réduction de commande d'un pays ne devait pas désavantager les autres.


* 8 C'est pourtant le cas des aéronefs d'origine américaine achetés sous contrat FMS (Foreign Military Sales).

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