C. LES RÉFORMES MENÉES ENTRE 1993 ET 2010 ONT EU DES EFFETS MASSIFS SUR LA SITUATION FINANCIÈRE DU SYSTÈME DE RETRAITE SANS POUR AUTANT PERMETTRE SON RETOUR À L'ÉQUILIBRE

1. Les réformes successives des retraites ont cherché à améliorer la soutenabilité financière du système de retraite
a) Le Livre blanc sur les retraites de Michel Rocard : faire face aux défis du papy-boom et de l'allongement de l'espérance de vie

La question de la soutenabilité financière de notre système de retraite a été véritablement posée pour la première fois en 1991 par le « Livre blanc sur les retraites » préfacé par Michel Rocard.

Ce Livre blanc démontrait clairement que le choc démographique du papy-boom et l'allongement de l'espérance de vie entraîneraient une dégradation du ratio cotisants / retraités qui, en l'absence de réforme, rendrait le système de retraite déficitaire.

b) La réforme Balladur de 1993

Dans le contexte de la récession de 1993, qui aggravait les risques de déficit du système de retraite évoqués par le Livre blanc de Michel Rocard, le gouvernement Balladur a adopté une première importante réforme des retraites.

Celle-ci prévoyait un allongement de la durée de cotisation pour l'obtention d'une retraite à taux plein au régime général et dans les régimes alignés de 150 à 160 trimestres, à raison d'un trimestre supplémentaire par année civile de naissance.

Elle procédait à un passage progressif du calcul du salaire de référence sur les 25 meilleures années et non sur les 10 meilleures années. Cette mesure, dont la montée en charge s'est achevée en 2008, était destinée à diminuer le taux de remplacement assuré par la pension de retraite.

Par ailleurs, cette réforme des retraites indexait les pensions sur les prix et non plus sur les salaires , ce qui, là encore, avait pour effet de faire diminuer mécaniquement le taux de croissance des pensions, les salaires évoluant plus rapidement que les prix.

Enfin, elle créait le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) destiné à financer les avantages d'assurance vieillesse non contributifs du système de retraite au nom de la solidarité nationale.

c) La création du Fonds de réserve pour les retraites en 1999

La loi de financement pour la sécurité sociale de 1999 a créé un Fonds de réserve pour les retraites destiné à compenser à partir de 2020 le pic des effets du papy-boom . Financé par les excédents du FSV et de la CNAVTS, par 65 % de la contribution de 2 % sur les revenus du patrimoine, par les produits de cession des licences UMTS et par les avoirs en déshérence des contrats d'assurance vie depuis 2007, le FRR, qui avait reçu plus de 25 milliards d'euros entre 1999 et 2008, a été utilisé à partir de 2011 pour financer les déficits du régime général et de la Cades.

d) La réforme Fillon du 21 août 2003

Cette ambitieuse réforme des retraites a prolongé le mouvement initié par la réforme Balladur en prévoyant d'allonger la durée de cotisation dans tous les régimes de retraite , à l'exception des régimes spéciaux. Elle a également défini la règle selon laquelle tout allongement d'espérance de vie devrait entraîner une augmentation de la durée de cotisation pour l'obtention d'une retraite à taux plein.

Pour éviter que les effets de l'allongement de la durée de cotisation viennent pénaliser les personnes ayant commencé à travailler très tôt, la réforme Fillon a mis en place un dispositif de retraite anticipée pour  carrière longues autorisant les départs avant 60 ans des personnes ayant obtenu tous leurs trimestres et ayant commencé à travailler avant l'âge de 18 ans.

Cette réforme a ouvert la possibilité de partir avant l'âge du taux plein automatique en se voyant appliquer une baisse de la pension (décote) ou de partir après en bénéficiant d'une hausse de la pension (surcote).

La réforme Fillon a également procédé à un alignement progressif de la durée de cotisation de la fonction publique sur celle du régime général . Elle a par ailleurs prévu que les pensions des anciens fonctionnaires seraient désormais indexées sur les prix et non plus sur le point d'indice de la fonction publique.

e) La réforme des régimes spéciaux de 2008

Cette réforme a instauré un rapprochement entre les règles en vigueur pour les principaux régimes spéciaux et les règles applicables à la fonction publique en prévoyant notamment un allongement de la durée d'assurance, l'indexation de la pension sur les prix et la mise en place d'une décote et d'une surcote.

f) La réforme Woerth du 9 novembre 2010

En vertu de cette réforme courageuse, l'âge légal d'ouverture des droits à la retraite est porté progressivement de 60 ans en 2010 à 62 ans au 1 er janvier 2017 , comme le prévoit l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale.

Age légal de départ à la retraite

Génération

Age légal de départ

Avant le 1 er juillet 1951

60 ans

A partir du 1 er juillet 1951

60 ans et 4 mois

A partir du 1 er janvier 1952

60 ans et 9 mois

A partir du 1 er janvier 1953

61 ans et 2 mois

A partir du 1 er janvier 1954

61 ans et 7 mois

A partir du 1 er janvier 1955

62 ans

Générations suivantes

62 ans

Source : Article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale.

L'âge d'obtention d'une retraite à taux plein (50 %), supérieur de cinq ans à l'âge légal, est pour sa part relevé progressivement de 65 ans à 67 ans , en vertu de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale.

Age d'obtention d'une retraite à taux plein

Génération

Age du taux plein

Avant le 1 er juillet 1951

65 ans

A partir du 1 er juillet 1951

65 ans et 4 mois

A partir du 1 er janvier 1952

65 ans et 9 mois

A partir du 1 er janvier 1953

66 ans et 2 mois

A partir du 1 er janvier 1954

66 ans et 7 mois

A partir du 1 er janvier 1955

67 ans

Générations suivantes

67 ans

Source : Article L. 351-8 du code de la sécurité sociale

2. Des réformes dont les effets sont massifs, même s'ils demeurent insuffisants

Effet sur la part des dépenses de retraites dans le PIB
des réformes de 1993 à 2014

Source : Rapport de la Commission pour l'avenir des retraites, juin 2013

Les réformes successives des retraites ont eu et auront à l'avenir un impact très important sur les dépenses de retraite.

En effet, ainsi que le montre le précédent graphique, la réforme de 1993 les réduira de 4,4 points de PIB en 2040, de 6,2 points de PIB si l'on y ajoute les réformes mises en place entre 2003 et 2009 et de près de 7 points de PIB si l'on tient compte de l'ensemble des réformes intervenues entre 1993 et 2014.

Il est donc faux de dire que rien n'a été fait en France pour réformer nos régimes de retraites et assurer leur soutenabilité financière . Pour autant, les mesures adoptées s'avèrent manifestement toujours insuffisantes pour garantir un retour à l'équilibre du système, pourtant indispensable pour assurer sa viabilité.

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