III. LA NÉCESSAIRE CONFORMITÉ DE LA LÉGISLATION AVEC LE DROIT CONSTITUTIONNEL ET LE DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE

Il convient de rappeler que l'action du législateur doit respecter les exigences constitutionnelles et le droit de l'Union européenne.

S'agissant des exigences constitutionnelles, le droit en vigueur doit être conforme à la liberté d'entreprendre, à la liberté contractuelle, et au droit de propriété.

Dans les trois cas, il ne peut apporter aux conditions d'exercice de ces libertés que « des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi ».

Dans sa décision relative au projet de loi ALUR 147 ( * ) , le Conseil constitutionnel avait estimé que le législateur poursuivait un objectif d'intérêt général de lutte contre la pénurie de logements destinés à la location, que les dispositions de l'article 16 de la loi étaient en adéquation avec l'objectif poursuivi et que les atteintes qui en résultaient à l'exercice du droit de propriété ne revêtaient pas un caractère disproportionné au regard de cet objectif.

S'agissant du respect du droit européen, il convient d'examiner la législation en vigueur au regard de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique , dite « e-commerce » .

L'article 3 de la directive dite « e-commerce » pose un principe d'interdiction pour les Etats membres de restreindre la libre circulation des services de la société de l'information, sauf mesures nécessaires au maintien de l'ordre public (entre autres motifs), prises à l'encontre d'un service qui constitue un risque sérieux et grave d'atteinte à cet objectif et proportionnées à cet objectif 148 ( * ) . Le caractère facultatif et à la discrétion des communes correspond sans aucun doute au critère de proportionnalité, de même que la régulation prioritaire des résidences secondaires au titre de la législation du changement d'usage, puisque la location de résidences principales à des fins touristiques n'a pas pour effet de soustraire des logements à l'habitat permanent.

L'article 14 de cette même directive pose le principe d'absence de responsabilité des hébergeurs de contenu sauf s'ils ont connaissance de l'activité ou de l'information illicite. En ce dernier cas, l'hébergeur doit agir promptement pour retirer les informations ou rendre l'accès à celles-ci impossible. Une juridiction ou une autorité administrative peut néanmoins toujours exiger de l'hébergeur qu'il mette un terme à une violation ou qu'il prévienne cette violation, de même que les Etats membres peuvent toujours instaurer des procédures régissant le retrait de ces ionformations ou les actions pour en rendre l'accès impossible.

En conséquence, l'article 15 interdit aux Etats membres d'imposer aux hébergeurs une obligation dgénérale de surveillance des informations qu'ils transmettent ou stockent ou une obligation générale de rechercher activemet des faits ou des circonstances révélant des activités illicites.

La qualification d'hébergeur - ou, plus précisément, de prestataire de services de la société de l'information consistant à stocker des informations fournies par un destinataire du service - et le régime atténué de responsabilité qui en découle est toutefois pas évidente. La jurisprudence de la cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a pour cela retenu le critère du « rôle actif » de la plateforme numérique concernée : lorsque la plateforme a un tel « rôle actif » et ne se limite pas à fournir une prestation technique de stockage de données, ce régime de responsabilité atténué ne s'applique pas. La caractérisation de ce rôle actif dépend des activités des plateformes concernées dans une logique d'appréciation au cas par cas. Le renforcement des obligations légales incombant à ces plateformes peut également leur conférer un tel rôle actif.

L'obligation de notification aux autorités européennes

La directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoit une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, qui impose de transmettre les projets de législation et de réglementation en la matière à la Commission européenne.

Dans ce cadre, la commission a envoyé aux autorités françases un avis circonstancié sur les dispositions issues de la loi pour une République numérique. La Commission n'a pas clôturé formellement la procédure, mais elle n'a pas émis d'objection, à la suite de la réponse des autorités françaises, ce qui a conduit à prévoir la mise en place d'une mesure règlementaire d'application, via le décret simple du 28 avril 2017 sur le numéro d'enregistrement. L'article 51 du projet de loi ELAN a également faire l'objet d'une nouvelle notification à la Commission.


* 147 Décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014.

* 148 Ces mesures doivent également faire l'objet d'un échange préalable entre l'État les adoptant et l'État dont provient le service de la société de l'information.

Page mise à jour le

Partager cette page