B. LA PROTECTION DES DROITS FONDAMENTAUX ET DES DÉFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME

1. Le dialogue post-suivi avec la Bulgarie

Jeudi 27 juin 2019, au nom de la commission du monitoring , M. Frank Schwabe (Allemagne - SOC) et M. Zsolt Németh (Hongrie - PPE/DC) ont présenté un rapport sur le dialogue post-suivi avec la Bulgarie. Une résolution a été adoptée à la suite de cette présentation.

La commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe, dite aussi « commission de suivi », a souhaité reconnaître les progrès substantiels réalisés par la Bulgarie depuis l'adoption en 2013 du dernier rapport sur le dialogue post-suivi. La Bulgarie a introduit une législation sur le pouvoir judiciaire et la lutte contre la corruption qui, à quelques exceptions près, est pleinement conforme aux normes du Conseil de l'Europe. Elle a également répondu à un certain nombre de préoccupations en suspens formulées par l'Assemblée parlementaire et d'autres mécanismes de suivi du Conseil de l'Europe.

Toutefois, la question de la pérennité et de l'irréversibilité des réformes ainsi que l'efficacité des mesures visant à combattre la corruption à haut niveau continuent à dépendre de la bonne application de la législation.

La commission de suivi a donc proposé de poursuivre un dialogue post-suivi avec la Bulgarie et d'évaluer, en juin 2020, les progrès réalisés dans les domaines suivants : le pouvoir judiciaire, la lutte contre la corruption à haut niveau, les médias, les droits fondamentaux des minorités, la lutte contre les discours de haine et la violence à l'égard des femmes.

Au cours du débat, M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin - Les Républicains) , a fait valoir que le dialogue post-suivi avec la Bulgarie avait permis des progrès substantiels, notamment en matière de procédure pénale. Néanmoins, dans ce domaine, des problèmes subsistent notamment pour la formation des magistrats. Une meilleure application des règles de l'État de droit favoriserait les investissements dans le pays. Par ailleurs, il a dénoncé les discours de haine tenus par des responsables politiques, notamment à l'égard des Roms. Enfin, les violences faites aux femmes restent un fléau alors que la Cour constitutionnelle s'est opposée à la ratification de la convention d'Istanbul. Il a donc appelé les parlementaires bulgares à oeuvrer pour respecter les objectifs de développement durable de l'Organisation des Nations Unies (ONU).

2. La nécessité de faire la lumière sur le meurtre de Boris Nemtsov

Jeudi 27 juin 2019, l'APCE a adopté, sur le rapport de M. Emanuelis Zingeris (Lituanie - PPE/DC), présenté au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme, une résolution sur la nécessité de faire la lumière sur le meurtre de Boris Nemtsov.

À travers ce texte, la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme se déclare rester profondément bouleversée par l'assassinat de Boris Nemtsov, leader de renommée internationale et figure de proue de l'opposition politique en Russie, juste à côté du Kremlin, à Moscou, le 27 février 2015.

Elle rappelle que cinq ressortissants tchétchènes ont été condamnés pour ce meurtre. Elle estime cependant que divers aspects de l'enquête et des réquisitions suscitent de sérieuses inquiétudes quant à l'indépendance et à l'efficacité des initiatives prises par les autorités pour identifier et poursuivre tous ceux qui ont pris part au crime, notamment ses instigateurs et ses organisateurs. Par conséquent les autorités russes sont appelées à rouvrir et à poursuivre l'enquête sur le meurtre en prenant une série de mesures spécifiques.

Les États membres et observateurs du Conseil de l'Europe sont également invités à rappeler aux autorités russes qu'il est nécessaire d'identifier et de poursuivre toutes les personnes impliquées dans le meurtre de Boris Nemtsov. Il serait, à cet égard, envisageable d'inclure sur la liste des personnes faisant l'objet de sanctions ciblées, en application des « lois Magnitski », celles qui ont fait échec aux mesures d'investigation requises pour identifier les instigateurs et les organisateurs du meurtre de Boris Nemtsov.

Au cours de la discussion générale, M. André Gattolin (Hauts-de-Seine - La République en Marche) a rendu hommage, en son nom et au nom de nombreux Français, à Boris Nemtsov, adversaire de la corruption et ardent défenseur de la dignité humaine et des valeurs démocratiques. Il a ensuite salué l'attachement de l'Assemblée parlementaire à faire la lumière sur cette affaire. En effet, l'enquête pose plusieurs questions et des doutes sérieux subsistent quant à la culpabilité des personnes condamnées. L'impossibilité d'obtenir un enregistrement vidéo de la scène qui s'est déroulée en pleine rue, à quelques pas du Kremlin et l'opportunité politique de cet assassinat - on sait que Boris Nemstov devait diriger un vaste rassemblement d'opposition à Moscou au lendemain de sa mort -, posent question. En conclusion, il a apporté son soutien à la résolution proposée par la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme.

3. L'assassinat de Mme Daphne Caruana Galizia et l'État de droit à Malte

Mercredi 26 juin 2019, l'APCE a adopté, sur le rapport de M. Pieter Omtzigt (Pays-Bas - PPE/DC), présenté au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme, une résolution sur l'assassinat de Mme Daphne Caruana Galizia et l'État de droit à Malte et ailleurs.

Le débat s'est déroulé sous la présidence de Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation française , en sa qualité de vice-présidente de l'APCE.

Daphne Caruana Galizia, la journaliste d'investigation la plus connue de Malte, a été assassinée le 16 octobre 2017. Ce meurtre et le fait que les autorités maltaises n'aient toujours pas traduit en justice les assassins présumés ou identifié les commanditaires de son assassinat soulèvent de graves questions à propos de l'État de droit à Malte.

La commission des questions juridiques et des droits de l'Homme, sur la base des investigations de son rapporteur, a constaté une série de défaillances fondamentales dans le système de freins et de contrepoids à Malte, qui a permis à de nombreux scandales majeurs de rester impunis ces dernières années, ce qui porte gravement atteinte à l'État de droit. Malgré certaines mesures récentes, Malte doit encore procéder à une réforme globale profonde, en soumettant par exemple le Premier ministre à un système efficace de freins et contrepoids, en garantissant l'indépendance de la justice et en renforçant les services répressifs et les autres instances de l'État de droit.

Les autorités maltaises ont donc été invitées à prendre une série de mesures, y compris à mettre en oeuvre les réformes recommandées par la Commission de Venise et le groupe d'États contre la corruption (GRECO) et à mettre fin au climat ambiant d'impunité.

La commission des questions juridiques et des droits de l'Homme estime que ces questions présentent également une pertinence directe pour son analyse de la réaction des autorités à l'assassinat de Daphne Caruana Galizia. De nombreuses préoccupations relatives à l'enquête ouverte au sujet de cet assassinat ayant été identifiées, Malte est donc appelée à mettre en place, dans un délai de trois mois, une enquête publique indépendante.

M. Jacques Maire (Hauts-de-Seine - La République en Marche) , s'exprimant au nom du groupe ADLE, a condamné l'assassinat de Daphne Caruana Galizia. Celui-ci met en lumière la corruption qui frappe la classe politique à Malte, facilitée par la faiblesse de la supervision financière et l'insuffisante séparation des pouvoirs. Si le Premier ministre, Joseph Muscat, a sollicité les services d'enquêteurs étrangers et a présenté une nouvelle loi tendant à renforcer la liberté de la presse, les commanditaires de ce meurtre n'ont pas encore été identifiés et le rapport montre qu'il y a une vraie présomption d'obstruction. Dès lors, le groupe ADLE a demandé d'une part, une enquête publique indépendante si l'enquête en cours n'aboutit pas rapidement, et d'autre part, la mise en oeuvre à Malte des recommandations du GRECO et de la Commission de Venise.

M. André Gattolin (Hauts-de-Seine - La République en Marche) a mis en lumière le paradoxe qui existe entre la situation à Malte et son intégration européenne poussée. Il a déploré que l'Union européenne ne s'inquiète pas davantage de la situation sur l'île, malgré l'assassinat à la voiture piégée de la journaliste Daphne Caruana Galizia. Les inquiétudes de l'APCE sur ce qui se passe à Malte montrent l'importance du rôle du Conseil de l'Europe. Les obstructions à l'enquête posent problème, même à Europol, qui se plaint du manque de coopération des autorités maltaises. Il a souhaité, par conséquent, que Malte soit placée sous procédure de suivi.

4. La dénonciation de certaines politiques et pratiques en matière de renvoi de migrants dans les États membres du Conseil de l'Europe

Vendredi 28 juin 2019, l'APCE a adopté, sur le rapport de Mme Tineke Strik (Pays-Bas - SOC), présenté au nom de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, une résolution et une recommandation sur les politiques et pratiques en matière de renvoi des migrants dans les États membres du Conseil de l'Europe.

Les pratiques et les politiques de renvoi sont un phénomène croissant aux frontières de l'Europe, et constituent une violation flagrante des droits des demandeurs d'asile et des réfugiés, y compris le droit de demander l'asile et la protection contre le non-refoulement, qui sont au coeur du droit international des réfugiés et des droits de l'Homme.

Face à la gravité des violations des droits de l'Homme, les Gouvernements des États membres sont exhortés à protéger les demandeurs d'asile, les réfugiés et les migrants arrivant à leurs frontières, ainsi qu'à s'abstenir de tout renvoi, afin de permettre une surveillance indépendante, et mener une enquête approfondie sur toutes les allégations de renvois. Les États membres sont également invités à promouvoir le travail des ONG nationales et internationales, en s'abstenant de toute action portant atteinte à leurs activités légitimes visant à sauver des vies humaines.

Des informations et preuves persistantes font état de traitements inhumains et dégradants infligés par des États membres et leurs agences dans le cadre de ces renvois: intimidations, prise ou destruction de biens des migrants, et même recours à la violence et à la privation de nourriture ou de services de base pour les migrants. Le rapport fait état de cas de renvois constatés et propose des recommandations destinées à y mettre fin.

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