C. UN « LÂCHER PRISE » : L'IGN RÉVOLUTIONNE SON MODÈLE

Confronté à une crise de légitimité et d'identité ainsi qu'au processus d'ouverture des données, l'IGN a entrepris une refondation de son modèle . Celle-ci a été formalisée dans plusieurs documents stratégiques : le projet d'établissement de 2019, le contrat d'objectifs et de performance (COP) 2020-2024 signé en novembre 2020, la démarche « #IGN2021 » lancée en octobre 2020 ou encore le nouveau cadrage stratégique présenté en novembre 2021.

La présentation du nouveau modèle de l'IGN dans son contrat d'objectifs
et de performance (COP) 2020-2024

Dans la dynamique de la stratégie d'État-plateforme modernisant l'action publique et de la révolution des usages numériques, l'IGN a mené en 2019 une transformation profonde, dans un contexte de contraintes économiques liées à la trajectoire des finances publiques. L'institut a fait évoluer sa mission historique de production-diffusion de données, son organisation, son modèle économique et ses méthodes de travail pour satisfaire un impératif : renforcer l'appui direct aux politiques publiques. Sa nouvelle feuille de route rééquilibre son activité de producteur-diffuseur, au profit de celle, plus large, d'architecte référent des données géographiques et forestières nécessaires à l'exercice souverain des politiques publiques.

Du fait du dimensionnement de ses capacités, de son niveau d'expertise et de son positionnement national, l'IGN est appelé à intervenir principalement dans de grands projets d'équipement en données descriptives du territoire qui joueront un rôle structurant pour les politiques publiques. Comme tenu des besoins croissants dans ce domaine, l'IGN doit se positionner comme un opérateur interministériel mobilisant ses ressources en fonction des priorités des porteurs des politiques publiques, au niveau tant des services de l'État qu'à celui des établissements publics chargés de décliner certaines politiques ou des collectivités territoriales compétentes en la matière. Cela induit la capacité pour l'IGN de reconfigurer l'allocation de ses capacités dans le temps, selon un cycle pluriannuel correspondant au délai nécessaire pour mener à terme les étapes clés des grands projets pris en charge, afin de s'adapter à l'évolution des besoins des politiques publiques.

En devenant l'opérateur interministériel des données géographiques souveraines, il ne s'agit pas pour l'IGN de produire ou d'entretenir les données de façon autonome mais d'animer un dispositif collaboratif de travail en confiance avec un écosystème de partenaires, afin de garantir la qualité des données clefs pour l'action publique.

La transformation de l'IGN repose aussi sur une meilleure prise en compte des usages et des besoins nouveaux en information géolocalisée, répondant à une logique d'aide à la décision publique et de coproduction de services en partenariat avec des acteurs publics et privés ainsi qu'en interaction, le cas échéant, avec les citoyens. Dans ce contexte de transformation et d'approche nouvelle, l'IGN porte le projet majeur de géoplateforme nationale.

Source : contrat d'objectifs et de performance (COP) 2020-2024 de l'IGN

D'une mission historique de production-diffusion d'information géographique, parfois pour des besoins très spécifiques, l'IGN évolue de plus en plus vers des rôles d'agrégateur de données tierces, d'expert, de coordinateur, de facilitateur ou encore de certificateur . Cette évolution profonde ne va pas de soi, elle s'apparente à un véritable « lâcher prise » pour l'institut et ses personnels. Le rapporteur spécial mesure toute l'ampleur des changements qu'elle induit .

Le nouveau modèle de l'IGN entend ainsi cantonner ses activités de production aux seules données socles souveraines. Certaines d'entre-elles pouvant néanmoins également être collectées par d'autres acteurs puis certifiées par l'institut. L'institut n'entend plus assurer une multitude de petites prestations d'informations géolocalisées ponctuelles mais uniquement des productions à forts enjeux susceptibles d'être déployées à l'échelle nationale .

L'IGN recentre donc son action sur la production des données souveraines ainsi que sur le pilotage de vastes projets d'information géographique utiles à l'accompagnement de grandes politiques publiques . Le financement de ces projets est assumé par les commanditaires institutionnels, principalement des ministères, en recourant le cas échéant à une contribution de fonds interministériels tels que le fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP). Ces flux financiers abondent le budget de l'IGN en plus de sa subvention pour charges de service public (SCSP) et conditionnent la viabilité économique du nouveau modèle de l'institut.

Pour ces grands projets, et sur le modèle des contrats de défense conclus avec le ministère des armées, l'IGN travaille en partenariat avec les entreprises privées et recourt très largement à la sous-traitance . Dans son nouveau modèle, la production en propre de l'IGN doit devenir l'exception tandis que ses activités de pilotage de la sous-traitance ou d' assistance à maîtrise d'ouvrage (MOA) vont prendre une part beaucoup plus significative. Cela implique notamment un enjeu déterminant de montée en compétence sur ces rôles émergents .

Au fil des auditions conduites dans le cadre de sa mission de contrôle, le rapporteur spécial a pu constater que ses partenaires saluent de façon unanime le processus de transformation de l'IGN et son nouveau positionnement. Il a notamment retenu le point de vue affirmé par le président de l'Afigéo : « l'IGN doit être garant de l'excellence des données au service du citoyen, de l'économie, des décisions politiques. C'est sur ce domaine qu'il est légitime » .

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