B. LA NÉCESSAIRE PLURIDISCIPLINARITÉ

L'orientation de l'activité des CPIP vers la criminologie rend plus nécessaire qu'autrefois la pluridisciplinarité dans les services : un SPIP ne peut plus être composé d'un DPIP et de CPIP « hommes-orchestres ». La DAP partage cette analyse, la circulaire du 19 mars 2008 mentionnant à plusieurs la nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire, et des progrès en ce sens ont été réalisés.

Cependant, les retours de terrain montrent que dans de trop nombreux services les travailleurs sociaux, les psychologues et les personnels administratifs demeurent trop peu nombreux pour assurer un fonctionnement vraiment satisfaisant.

1. Ne pas négliger le travail social

Dans un rapport rendu en 2009, avant de devenir directrice de l'administration pénitentiaire, Isabelle Gorce notait déjà que l'ancrage de l'identité professionnelle des CPIP dans le champ pénal et criminologique impliquait le recrutement de travailleurs sociaux , notamment en détention. La DAP a retenu cette recommandation et a procédé à des recrutements dans la période récente : si l'on comptait 61,6 ETPT d'assistants de service social en 2017, on en dénombrait 104,1 en 2022, soit une progression de 69 % en cinq ans.

Évolution du nombre d'assistants
de service social (en ETPT)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Évolution

61,6

54,8

81,6

107,4

100,5

104,1

+ 69 %

Source : Direction de l'administration pénitentiaire.

Toutefois, si l'évolution est spectaculaire en proportion, elle reste modeste en valeur absolue : on compte, en définitive, à peine plus d'un assistant de service social en moyenne par département, ce qui reste peu pour s'occuper d'un public cumulant les handicaps, pour lequel l'accès aux droits et à l'emploi se heurte à de multiples obstacles. Si les PPMSJ peuvent, en milieu ouvert, accéder plus facilement à l'offre de services de droit commun, les personnes détenues ont besoin, notamment au moment de préparer la sortie, qu'un important travail social soit réalisé, la question de l'accès au logement étant particulièrement problématique.

Plusieurs acteurs de l'insertion ont noté que les CPIP ne connaissaient pas toujours les dispositifs de droit commun accessibles en milieu ouvert, ce qui n'est guère surprenant puisque la criminologie est devenue leur coeur de métier, mais souligne une fois encore la nécessité de compter des travailleurs sociaux dans les équipes. De même, la représentante de Pôle emploi entendue par les rapporteurs a estimé que la présence d'un travailleur social au sein du SPIP facilitait l'accompagnement global des PPSMJ et favorisait la continuité des parcours.

Il convient donc de poursuivre le recrutement d'assistants de services sociaux, en se donnant comme premier objectif d'atteindre rapidement l'effectif affiché dans les organigrammes de référence, soit 150 ETPT .

Le même raisonnement vaut pour le recrutement de psychologues . La présence de psychologues devrait être généralisée dans tous les services, afin d'apporter un appui aux CPIP notamment pour la mise en oeuvre des obligations de soin. L'effectif de référence établi par la DAP prévoit à terme l'emploi de 127 psychologues.

2. Des fonctions support indispensables pour le bon fonctionnement des services

Les interlocuteurs de la mission ont régulièrement souligné l'importance du rôle du personnel administratif dans le fonctionnement des services. Des agents administratifs en nombre suffisant et bien formés permettent aux CPIP, aux psychologues et aux travailleurs sociaux de se consacrer entièrement au suivi des PPSMJ.

Les SPIP emploient des attachés d'administration, fonctionnaires de catégorie A, qui sont plus particulièrement responsables des ressources humaines et du contrôle de gestion, des secrétaires administratifs, qui encadrent les agents d'exécution et assurent la gestion économique, financière et administrative du service, enfin des adjoints administratifs.

Les personnels administratifs sont ceux dont les effectifs ont le plus faiblement augmenté au cours des années récentes (hausse de 3 % à 4 %), sauf pour les contractuels (+ 55 %).

Corps

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Évolution

Attachés d'administration

29,6

29,6

30,7

27,9

30,8

30,5

+ 3 %

Secrétaires administratifs

142,5

142,8

150,9

149,6

146,3

156,5

+ 9,8 %

Adjoints administratifs

552,3

545,0

561,0

576,1

574,6

579,9

+ 5 %

Non-titulaires administratifs

64,5

81,8

90,7

100

100,2

121,5

+ 88,3 %

Effectif Global

788,9

798,6

833,3

853,6

851,9

888,4

+ 12,6 %

Source : Direction de l'administration pénitentiaire.

Certaines organisations syndicales plaident pour la création d'un véritable greffe des services d'insertion et de probation, à l'instar du greffe pénitentiaire dans les prisons, pour structurer davantage la fonction administrative. Il n'est pas certain que la création d'un service de greffe à proprement parler s'impose, elle pourrait rendre plus complexe l'organisation, mais il convient de veiller à ce que les SPIP disposent partout du personnel administratif adéquat. En particulier, la présence d'un attaché dans un service est perçue très positivement pour la plus-value qu'elle apporte en termes d'organisation. Un personnel administratif bien formé pourrait décharger les CPIP de certaines tâches de contrôle ou de collecte de pièces que la PPSMJ doit fournir dans le cadre de l'exécution de sa peine, permettant aux conseillers de se concentrer sur l'accompagnement.

3. Des surveillants pénitentiaires acteurs de l'insertion et de la probation

Depuis le début des années 2010, les surveillants pénitentiaires sont présents en plus grand nombre dans les SPIP. Aujourd'hui, environ trois cents surveillants pénitentiaires sont affectés dans ces services. Le renforcement de leur présence a été concomitant de l'essor des mesures de placement sous surveillance électronique , fixe ou mobile. Les surveillants sont chargés de poser et retirer les bracelets électroniques et contribuent au suivi des mesures.

Au-delà de la mise en oeuvre de ces mesures de contrainte, les surveillants participent à la sécurité et au fonctionnement quotidien des services. En outre, ils apportent, surtout en détention, un regard différent sur les personnes suivies, utile pour mieux évaluer leurs chances de réinsertion et le risque de récidive.

Plusieurs professionnels entendus par les rapporteurs ont fait observer que le comportement de la PPSMJ pouvait changer pendant le temps de son entretien avec le CPIP : sachant qu'un avis favorable l'aidera à obtenir une remise ou un aménagement de peine, elle aura naturellement tendance à se présenter sous son meilleur jour. Au quotidien, les surveillants peuvent observer leur comportement de la PPSMJ sans ce filtre et ils seront donc en mesure d'apporter un regard complémentaire de celui du CPIP.

En matière d'organisation, cet apport du personnel de surveillance a été consacré par la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire du 22 décembre 2021, qui a modifié l'article 712-4-1 du code de procédure pénale afin de prévoir la présence, au sein de la commission de l'application des peines, d'un représentant du corps de commandement ou du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance. La commission est chargée d'émettre un avis sur certaines décisions en matière d'exécution des peines afin d'éclairer la décision du juge de l'application des peines (JAP). Cette reconnaissance s'inscrit dans la démarche générale de promotion de la notion de surveillant « acteur », soit un surveillant dont la capacité d'initiative est valorisée et dont la contribution à la politique de réinsertion est reconnue.

Le travail en cours sur les effectifs de référence en SPIP prévoit un abondement des postes de surveillants afin de répondre à la montée en charge de la surveillance électronique : à terme, 396 surveillants et 19 premiers surveillants devraient être affectés dans les services.

Proposition n° 3 :  Renforcer la présence des assistants de service social, des psychologues et des surveillants pour faire vivre la pluridisciplinarité, sans négliger les fonctions support.

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