Rapport d'information n° 353 (2022-2023) de Mmes Marie MERCIER et Laurence HARRIBEY , fait au nom de la commission des lois, déposé le 15 février 2023

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N° 353

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 février 2023

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur l' évaluation des services pénitentiaires d' insertion et de probation ,

Par Mmes Marie MERCIER et Laurence HARRIBEY,

Sénateur et Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet , président ; Mmes Catherine Di Folco, Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Christophe-André Frassa, Jérôme Durain, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Bonnecarrère, Mme Nathalie Goulet, M. Thani Mohamed Soilihi, Mmes Cécile Cukierman, Maryse Carrère, MM. Alain Marc, Guy Benarroche , vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Laurence Harribey, Muriel Jourda, Agnès Canayer , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Philippe Bas, Arnaud de Belenet, Mmes Nadine Bellurot, Catherine Belrhiti, Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Valérie Boyer, M. Mathieu Darnaud, Mmes Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Pierre Frogier, Mme Françoise Gatel, MM. Loïc Hervé, Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Mme Marie Mercier, MM. Alain Richard, Jean-Yves Roux, Jean-Pierre Sueur, Mme Lana Tetuanui, M. Dominique Théophile, Mmes Claudine Thomas, Dominique Vérien, M. Dany Wattebled .

LISTE DES PRINCIPALES PROPOSITIONS

___________

Proposition n° 1 : Poursuivre les recrutements pour arriver à 60 dossiers par CPIP et résorber les emplois précaires.

Proposition n° 2 : Faire passer les directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation en catégorie « A + » pour améliorer l'attractivité de la profession.

Proposition n° 3 : Renforcer la présence des assistants de service social, des psychologues et des surveillants pour faire vivre la pluridisciplinarité, sans négliger les fonctions support.

Proposition n° 4 : Développer les partenariats entre l'administration pénitentiaire et l'université afin de mener des travaux de recherche tendant à mieux évaluer l'efficacité des sanctions pénales et de la probation.

Proposition n° 5 : Sur le modèle de la loi « justice de proximité » du 8 avril 2021 en matière de travaux d'intérêt général, étudier la possibilité de confier certaines tâches assurées par le juge de l'application des peines au directeur pénitentiaire d'insertion et de probation.

Proposition n° 6 : Sensibiliser davantage les CPIP aux contraintes propres à l'instruction dans le cadre de leur formation.

Proposition n° 7 : Expérimenter une permanence des SPIP dans les tribunaux correctionnels afin de favoriser une relation plus fluide avec les formations de jugement.

Proposition n° 8 : Introduire une procédure d'habilitation des associations socio-judiciaires en s'inspirant de la pratique suivie dans le domaine de la protection judiciaire de la jeunesse.

Proposition n° 9 : Relancer le partenariat avec les missions locales en concluant une nouvelle convention pluriannuelle, assortie d'un financement adapté.

Proposition n° 10 : Promouvoir un accès encadré au numérique en détention, pour que la personne détenue gagne en autonomie dans son parcours de réinsertion et pour faciliter les échanges avec les partenaires extérieurs.

AVANT-PROPOS

Dans le cadre de ses travaux de contrôle et d'évaluation des politiques publiques, la commission des lois a décidé, en février l'année 2022, de s'intéresser au fonctionnement des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) . Elle a nommé Marie Mercier et Laurence Harribey rapporteurs de cette mission d'information.

La commission a souhaité apporter un éclairage sur l'activité de ces services, qui demeurent méconnus alors qu'ils jouent un rôle essentiel dans la chaîne pénale : ils veillent à la bonne exécution des peines, travaillent à prévenir la récidive et contribuent à la réinsertion des personnes placées sous main de justice (PPSMJ) 1 ( * ) . Peu de travaux parlementaires leur ont été spécifiquement consacrés, même s'ils sont évoqués dans le rapport publié, l'an dernier, par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale visant à identifier les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française 2 ( * ) .

Les SPIP sont souvent stigmatisés quand une personne soumise à un régime probatoire récidive : le service et ses agents se voient reprocher de ne pas avoir convenablement suivi la personne prise en charge, d'avoir péché par naïveté ou d'avoir mal anticipé les risques encourus, à la suite d'une libération conditionnelle par exemple. Les professionnels vivent mal ces critiques, qui font peu de cas de la difficulté de leur métier et qui ne tiennent pas compte de la part d'incertitude qui entoure nécessairement le comportement futur d'une PPSMJ, quelle que soit la qualité du contrôle et de l'accompagnement dont elle bénéficie.

Dans ce contexte, il est important d'évaluer le travail des SPIP de manière plus objective et dépassionnée. Au cours de leurs travaux, les rapporteurs ont rencontré des professionnels motivés, qui mettent tout en oeuvre pour réinsérer des personnes dont le parcours a souvent été chaotique, et qui interviennent après que les autres services publics ont échoué.

Depuis 2014, les SPIP ont bénéficié d'un renforcement significatif de leurs moyens humains et budgétaires, qui justifiait aussi de réaliser un bilan d'étape pour apprécier la manière dont ces moyens supplémentaires ont été utilisés, leur impact sur le terrain et les évolutions futures à envisager.

Les SPIP ont été créés en 1999, à partir de la fusion des anciens comités de probation et d'assistance aux libérés (CPAL) et des services socio-éducatifs qui intervenaient jusqu'alors en établissement pénitentiaire auprès des personnes détenues. La création des SPIP a ainsi permis de mettre fin au cloisonnement administratif qui existait auparavant, avec des services dédiés au milieu fermé et d'autres en charge du milieu ouvert. Cette nouvelle organisation a été voulue pour améliorer la continuité de la prise en charge entre milieu ouvert et milieu fermé.

On dénombre aujourd'hui 104 SPIP, en métropole et en outre-mer, les services étant organisés à l'échelle du département ou de la collectivité d'outre-mer. Le directeur du SPIP est placé sous l'autorité du directeur interrégional des services pénitentiaires (DISP) et dépend, au niveau central, de la direction de l'administration pénitentiaire (DAP), plus particulièrement de la sous-direction en charge de l'insertion et de la probation. Au sein de chaque département, en plus du siège départemental, le SPIP peut compter des antennes, dédiées à un ou plusieurs établissements pénitentiaires, au milieu ouvert ou à compétence mixte. La structuration des services a beaucoup progressé depuis une vingtaine d'années, la création, en 2005, du corps des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation (DPIP) marquant une étape importante dans ce processus.

Les SPIP assument des missions variées : ils jouent d'abord un rôle d'aide à la décision auprès des magistrats en leur apportant des informations sur la PPSMJ, au stade pré-sentenciel (réalisation d'enquêtes sociales) ou post-sentenciel (par exemple par la rédaction de rapports pour les commissions d'application des peines) ; ils sont également chargés de contrôler le respect par la PPSMJ de ses obligations, par exemple dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis probatoire ; enfin, ils travaillent à prévenir la récidive et à favoriser la réinsertion de la PPSMJ, ce qui suppose une approche pluridisciplinaire et l'animation d'un dense réseau de partenaires.

De fait, les SPIP coexistent avec un puissant secteur associatif et ils ont noué des partenariats avec différentes institutions, dans le champ de l'insertion et de l'emploi, qui leur apportent les compétences complémentaires dont ils ont besoin pour mener à bien leur mission de réinsertion.

Pour mener cette étude, les rapporteurs ont entendu 49 personnes d'horizons variés : représentants des organisations professionnelles, magistrats, avocats, visiteurs de prison, universitaires, représentants des institutions partenaires... Elles ont également effectué un déplacement à la prison des Baumettes, à Marseille, pour mieux appréhender la diversité des tâches accomplies par le SPIP dans un grand établissement pénitentiaire. Elles remercient les personnes entendues pour le temps qu'elles leur ont consacré, pour les informations qu'elles leur ont apportées, ainsi que pour la qualité des réflexions échangées.

Sans occulter les insuffisances qui persistent, le présent rapport dresse un premier bilan positif des transformations engagées et esquisse des pistes d'évolution pour conforter et amplifier les progrès réalisés , afin de surmonter les difficultés que rencontrent encore les professionnels sur le terrain.

I. UNE HAUSSE SENSIBLE DES MOYENS QUI S'EST ACCOMPAGNÉE D'UN TOURNANT DANS LES PRATIQUES PROFESSIONNELLES

Quelques chiffres méritent d'être rappelés pour illustrer l'effort réalisé par l'État concernant les moyens alloués aux SPIP, qui s'est conjugué à une évolution des pratiques professionnelles.

A. UN EFFORT DE RECRUTEMENT QUI A SURTOUT CONCERNÉ
LES CONSEILLERS PÉNITENTIAIRES D'INSERTION ET DE PROBATION

1. Une hausse des effectifs considérable

Les effectifs des SPIP ont connu une hausse significative depuis une dizaine d'années. Cette augmentation a eu pour point de départ l'engagement pris, le 9 octobre 2013, par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault de créer 1 000 postes sur trois ans, qui s'est effectivement traduit par la création de ces postes dans la loi de finances pour 2014 3 ( * ) .

Dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2015, le sénateur Jean-René Lecerf prenait acte « de la promesse tenue du Gouvernement de renforcer les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) de milieu ouvert avec la création de 1000 emplois en 2014 dont 650 postes de conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation » 4 ( * ) . Il regrettait, toutefois, le caractère encore insuffisant de cette augmentation au regard de la charge de travail des SPIP. Cette hausse des moyens s'est inscrite dans un contexte marqué par un renforcement de l'ensemble des moyens du ministère de la justice, destiné notamment à lutter plus efficacement contre le terrorisme et la radicalisation.

La seconde augmentation significative des moyens humains des SPIP a été consécutive à la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (LPJ). Ambitionnant de redonner du sens à la peine, les concepteurs de la LPJ ont jugé indispensable de renforcer les moyens des SPIP afin de permettre un meilleur accompagnement des PPSMJ. À partir de 2020, l'accroissement des moyens est également venu conforter la démarche voulue par le gouvernement de Jean Castex de construction d'une « justice de proximité ».

Au total, la LPJ a prévu la création de 1 500 emplois supplémentaires répartis comme suit :

Personnels en SPIP

2018

2019

2020

2021

2022

DPIP dont référent ANTIGIP

15

40

40

40

40

Psychologue

5

10

5

5

5

CPIP dont référent ANTIGIP

100

190

200

200

180

Assistant(e) de Service Social-ASS

13

45

35

23

19

Coordonnatrice et coordonnateur culturel

-

20

20

-

-

Personnel administratif

17

35

50

12

-

Personnel de surveillance

-

30

50

20

6

Sous-total renforcement des SPIP

150

400

400

300

250

Source : direction de l'administration pénitentiaire.

Ainsi, pris dans leur globalité, les effectifs des SPIP ont connu une augmentation de 21 % depuis 2018, passant de 5 576 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2018 à 6 736 en 2022. Comme le souligne la direction de l'administration pénitentiaire, si cette hausse a bénéficié à l'ensemble des corps affectés dans les SPIP, elle a principalement concerné le corps des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP) , qui est le plus nombreux, et les agents non titulaires. Le nombre de CPIP est ainsi passé de 3 102 ETP en 2018 à 3 702 en 2022. Celui des « non-titulaires social, médico-social et culture » a crû de 406 à 540 ETP sur la même période. L'accent mis sur le recrutement des CPIP est logique au regard de leur rôle central dans le fonctionnement des services.

Les missions des conseillers pénitentiaires
d'insertion et de probation

Les conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP) interviennent en prison auprès des personnes détenues, et en milieu ouvert auprès des personnes soumises à une mesure restrictive de liberté (contrôle judiciaire, surveillance électronique, libération conditionnelle...).

Ils aident à la décision judiciaire, participent à l'individualisation des peines et à leur exécution. Ils proposent des mesures d'aménagement de peine au magistrat compétent et veillent au respect des obligations (travail, soins, indemnisation des victimes...) prononcées par l'autorité judiciaire.

Ils travaillent sous l'autorité directe d'un directeur pénitentiaire d'insertion et de probation (DPIP).

Cette hausse des effectifs s'est accompagnée de l'élaboration d' organigrammes de références . Issue d'une démarche débutée en 2018, l'élaboration de ces organigrammes a eu pour objectif de déterminer finement les besoins en effectifs dans les sept filières que comptent les SPIP (directeur pénitentiaire d'insertion et de probation, CPIP, personnels administratifs, assistant de service social, psychologue, coordinateur d'activité et personnels de surveillance). Ils permettent ainsi « d'optimiser le suivi de l'arrivée des renforts et de donner plus de lisibilité et de visibilité aux services gestionnaires des ressources humaines » 5 ( * ) .

En moins de dix ans, les SPIP ont donc véritablement changé de dimension , passant d'à peine plus de 4 000 agents en 2013 à plus de 6 000 dix ans plus tard. L'augmentation des effectifs s'est accompagnée d'une forte hausse des moyens de fonctionnement consacrés aux actions de réinsertion, passés de 69 millions d'euros en 2016 à 122,6 millions d'euros dans le projet de budget pour 2023, soit une hausse de 77 % en sept ans.

Il serait cependant inexact d'en déduire que les SPIP sont aujourd'hui confortablement dotés en personnel : cet effort doit s'analyser, pour partie, comme un rattrapage après une longue période pendant laquelle les moyens des SPIP ont été négligés.

2. Une revalorisation statutaire

La hausse des effectifs s'est accompagnée d'une revalorisation statutaire des CPIP, destinée à améliorer l'attractivité du métier et à mieux reconnaître la qualification des agents. Cette revalorisation s'est principalement traduite par le passage du corps des CPIP de la catégorie B à la catégorie A de la fonction publique, en application de l'article 1 er du décret du 30 janvier 2019 6 ( * ) .

En outre, la création, en 2021, du RIFSEEP 7 ( * ) , qui a remplacé la majorité des anciennes primes, a entraîné, selon les chiffres de la direction de l'administration pénitentiaire (DAP), une revalorisation indemnitaire de 953 euros bruts annuels pour les CPIP de classe normale 8 ( * ) et de 1029 euros pour les CPIP de classe exceptionnelle. Entendu par la commission des lois du Sénat dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2023, le garde des sceaux a souligné que l'effort de revalorisation se poursuivait, rappelant que les CPIP ont « bénéficié du passage en catégorie A et d'une revalorisation indemnitaire de 220 euros par mois en 2022 » 9 ( * ) .

Cette revalorisation statutaire a certainement contribué à réduire le taux d'attrition 10 ( * ) des personnels d'insertion et de probation , passé de 3 % en 2019 à 1,9 % en 2021.

B. UNE NOUVELLE APPROCHE PROFESSIONNELLE DAVANTAGE TOURNÉE VERS LA CRIMINOLOGIE

Au-delà de l'évolution des effectifs et des changements statutaires, les personnes entendues par les rapporteurs ont souligné qu'une mutation s'était opérée, depuis une vingtaine d'années, dans les pratiques professionnelles des SPIP, afin de mieux prendre en compte les apports de la recherche en criminologie .

1. La volonté de tirer parti des apports de la recherche

Comme l'a expliqué aux rapporteurs le sociologue Christian Mouhanna, les SPIP, au moment de leur création, comptaient principalement dans leurs effectifs des assistantes sociales et des éducateurs de prison, dont l'activité relevait du champ du travail social. La situation a considérablement évolué sous l'influence de la recherche en criminologie, d'abord développée en Amérique du Nord puis acclimatée en France dans les années 2010.

Dès la fin des années 1970 est apparu au Canada le courant du « What works ? » qui cherche à évaluer l'efficacité des programmes de réhabilitation en s'appuyant sur des données scientifiques. Dans les années 1990, les chercheurs s'inscrivant dans ce courant ont élaboré un modèle de prise en charge des auteurs d'infraction, dénommé « Risques Besoins Réceptivité » (RBR), qui cherche à diminuer le risque de récidive. Ce modèle propose de commencer par évaluer le risque de récidive pour adapter en conséquence l'intensité du suivi ; il invite le service de probation à agir sur les paramètres qui peuvent favoriser la récidive chez la personne condamnée (valeurs et représentations, fréquentations, addiction, formation, insertion professionnelle...) ; enfin, il souligne la nécessité d'adapter la prise en charge à chaque condamné, en tenant compte de sa personnalité, de sa capacité et de sa motivation.

À partir de la fin des années 1990, les recherches sur la désistance, qui désigne le processus de sortie de la délinquance, ont complété les travaux du courant « What works ? » en s'intéressant aux facteurs de l'arrêt des carrières délinquantes. L'agent de probation est invité à renforcer les points forts, les ressources et la motivation de l'auteur d'infraction, la qualité de la relation établie avec le probationnaire étant un solide point d'appui pour le désengagement de la délinquance.

Dans le prolongement des deux courants précédents, des chercheurs ont développé la notion de « Core Correctional Practices » qui insiste sur l'importance de la « manière de faire » de l'agent de probation, dont le discours et le comportement doivent encourager les comportements « pro-sociaux ». L'agent de probation doit aider l'auteur d'infraction à résoudre ses problèmes, en lui expliquant comment faire et en mobilisant des partenaires.

2. La diffusion de nouvelles pratiques professionnelles

La diffusion en France de ces avancées de la recherche en criminologie, et des pratiques professionnelles qui en découlent, s'est opérée progressivement.

La circulaire de la DAP n° 113/PMJ1 du 19 mars 2008 relative aux missions et aux méthodes d'intervention des SPIP a marqué une étape importante en inscrivant pour la première fois la prévention de la récidive comme finalité de l'action des SPIP . Elle préconise de procéder d'abord à un diagnostic de la situation de la PPSMJ avant d'élaborer un programme de prévention de la récidive (volet criminologique) et un programme d'insertion (volet social).

La conférence de consensus sur la prévention de la récidive, organisée par le ministère de la justice au début de l'année 2013, a également contribué à mettre cet objectif au centre de l'attention des pouvoirs publics et a mis en évidence le rôle positif de la probation. Les conclusions de la conférence de consensus invitaient à un « renforcement conséquent des moyens dédiés aux services, dont les effectifs devront se rapprocher des normes européennes en la matière ».

C'est cependant le premier Répertoire des pratiques opérationnelles (RPO 1), déployé dans les SPIP à partir de 2018, qui a détaillé avec le plus de précision les pratiques et les savoirs mis en oeuvre par les professionnels, en faisant le lien entre les connaissances théoriques et les méthodes de travail. Contenant trame d'entretien, guide d'évaluation et modèle de rapport, le RPO 1 a favorisé une homogénéisation et une normalisation des pratiques professionnelles .

Si certains observateurs, comme Christian Mouhanna, ont pu regretter l'apparition d'un suivi trop standardisé, la plupart des interlocuteurs entendus ont estimé que ces évolutions avaient contribué à structurer le travail des SPIP et à harmoniser les pratiques. Les professionnels perçoivent le gain qu'ils peuvent retirer de la mise en oeuvre de solutions fondées sur les acquis de la recherche en termes d'efficacité. L'ancrage dans la criminologie permet aussi d'affirmer l'originalité du métier de la probation, qui ne constitue pas une simple déclinaison du travail social auprès d'un public particulier.

3. Une acculturation progressive

L'accent nouveau mis sur la criminologie a toutefois rencontré des résistances chez les professionnels les plus anciens, attachés à leur identité de travailleur social.

Ancienne directrice de l'administration pénitentiaire, Isabelle Gorce a souligné auprès des rapporteurs à quel point la rédaction du RPO 1 avait représenté un tournant, voire une « révolution intellectuelle » pour des CPIP désormais invités à s'intéresser aux ressorts personnels du délinquant. Dans sa contribution écrite adressée aux rapporteurs, l'Observatoire international des prisons (OIP) souligne des « différences de pratiques professionnelles et de philosophie entre les CPIP de différentes générations : les nouvelles se perçoivent davantage comme des psychologues-criminologues, les anciennes se qualifient plus volontiers de « travailleurs sociaux » et regrettent que la réalisation de rapports toujours plus nombreux empiète sur le temps d'entretien ».

Le recrutement des CPIP a évolué en cohérence avec ces nouvelles orientations, donnant plus de place aux juristes , parfois sensibilisés à la criminologie au cours de leurs études, au détriment des profils d'assistant de service social ou d'éducateur. Il en résulte la coexistence de différentes cultures professionnelles qui donne l'image d' un corps des CPIP encore en transition .

L'École nationale de l'administration pénitentiaire (Enap), qui forme l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire, a adapté ses enseignements pour donner plus de place à la criminologie ainsi qu'à la psychologie. Dès leur première année de scolarité, les futurs CPIP sont formés à la conduite des entretiens, à la rédaction de rapports et aux techniques d'évaluation. La criminologie leur donne des outils pour faire évoluer la personne, repérer ses points forts et ses blocages, tandis que la psychologie les aide à mieux comprendre les mécanismes de construction de la personnalité, les pathologies présentes en milieu carcéral ou encore les méthodes de prise en charge.

Plusieurs interlocuteurs, par exemple Isabelle Gorce et l'universitaire Martine Herzog-Evans, ont proposé de prolonger la transformation du métier de CPIP en les déchargeant des tâches d'animation socioculturelle réalisées en prison, ce qui leur permettrait de se concentrer encore davantage sur la prévention de la récidive.

Les activités socioculturelles, souvent organisées en partenariat avec des associations, revêtent des formes variées : séances de cinéma, ou ateliers d'écriture, jeux de sociétés, pratiques artistiques... Elles sont conduites dans un but de resocialisation de la personne incarcérée. Lors de leur déplacement à l'établissement pénitentiaire des Baumettes, les rapporteurs ont notamment observé le partenariat mis en place entre le SPIP et l'association Lieux fictifs, qui réalise des courts-métrages donnant l'occasion à la personne détenue de réfléchir à son parcours et favorisant l'acquisition de compétences techniques. La présence d'un coordinateur culturel dans certains SPIP constitue un véritable atout pour développer ces actions et faire le lien entre les intervenants, l'administration pénitentiaire et les détenus.

Dans l'absolu, la réalisation des activités socioculturelles pourrait être confiée aux directeurs des services pénitentiaires, qui continueraient à les faire vivre avec des partenaires extérieurs, tout en donnant plus de place pour leur organisation aux surveillants et à des personnels dédiés.

Toutefois, il peut y avoir une certaine cohérence à conserver ces activités au sein des SPIP, qui ont besoin d'une palette d'outils variés pour atteindre leurs objectifs : en favorisant les liens avec l'extérieur, en ouvrant les condamnés à de nouveaux horizons, les activités socioculturelles contribuent à la lutte contre la récidive et les exclure du champ de compétences des SPIP priverait peut-être ces services d'un levier d'action utile.

C. DE PREMIERS RÉSULTATS APPRÉCIABLES

1. Des recrutements à mettre en regard de la hausse du nombre de personnes placées sous main de justice et de la diversification des tâches des SPIP

Les efforts de recrutement en faveur des SPIP doivent bien sûr être analysés au regard de l'évolution de leur charge de travail : renforcer les effectifs ne se traduira pas par une amélioration de la qualité de la prise en charge si le nombre de PPSMJ augmente fortement en parallèle.

Concernant la population carcérale, si l'on met de côté le moment très particulier du confinement du printemps 2020, la tendance est à l'augmentation et les établissements pénitentiaires, notamment les maisons d'arrêt, demeurent largement sur-occupés. Ainsi, la population carcérale a retrouvé, au 1 er janvier 2023 un niveau proche de son record historique, soit 72 173 11 ( * ) personnes, à comparer à un effectif de 72 575 personnes détenues en mars 2020. Après être passé sous les 100 % pendant la crise sanitaire, le taux de densité carcérale atteint aujourd'hui 119 % pour l'ensemble des établissements de détention et 141,3 % pour les seules maisons d'arrêts.

À titre de comparaison, 70 059 personnes étaient incarcérées au 1 er janvier 2019, peu de temps avant l'entrée en vigueur de la LPJ, et 67 075 l'étaient au 1 er janvier 2014, la population carcérale ayant ainsi augmenté de 7,6 % en neuf ans.

Le milieu ouvert a lui aussi connu une hausse d'activité qui s'explique notamment par le développement de la surveillance électronique. Or, ce mode de surveillance impacte directement les personnels des SPIP qui ont parmi leurs missions d'évaluer la faisabilité de telles mesures puis d'en assurer la mise en oeuvre et le suivi.

Au stade pré-sentenciel ou post-sentenciel, la surveillance électronique a connu un essor considérable depuis une dizaine d'années, en raison de la volonté des pouvoirs publics de développer les alternatives à l'incarcération. Concernant la surveillance électronique fixe 12 ( * ) , on ne dénombrait que 5 000 placements simultanés en mars 2010 mais ce nombre a atteint les 10 000 trois ans plus tard. Une nouvelle impulsion a été donnée par la LPJ du 23 mars 2019, qui a encouragé la libération sous contrainte avant la fin de la peine. Au début de l'année 2022, on comptait ainsi près de 15 000 placements.

S'agissant de la surveillance électronique mobile, l'évolution la plus notable a été le déploiement, à compter d'octobre 2020, du bracelet anti-rapprochement (BAR), destiné à protéger les victimes de violences conjugales. En août 2022, près de 800 auteurs de violences et autant de victimes portaient un BAR.

Ce bref rappel montre que l'augmentation des moyens des SPIP a été absorbée, pour partie, par la hausse de leur volume d'activité. En additionnant milieu ouvert et milieu fermé, les SPIP prennent en charge autour de 250 000 personnes, ce qui est considérable, d'autant que ces personnes présentent des profils très divers.

2. Une baisse du nombre de dossiers par CPIP

Le nombre de dossiers à traiter par conseiller semble être un indicateur relativement fiable de la charge de travail supportée par les SPIP. À cet égard, le nombre moyen de PPSMJ suivies par un même CPIP a été positivement impacté par les efforts de recrutement fournis depuis 2018. Ainsi, ce taux a connu une baisse de 11,6 % entre 2018 et 2021, passant de 79,9 PPSMJ par CPIP à 70,6.

Des témoignages de terrain ont confirmé cette amélioration : une CPIP en poste dans l'établissement pénitentiaire des Baumettes a par exemple indiqué aux rapporteurs avoir assumé la charge de 160 dossiers au moment de son entrée en fonction il y a vingt ans, contre 90 aujourd'hui. Le portefeuille reste important mais la réduction est notable.

Cette amélioration statistique doit toutefois être relativisée à deux titres. Le premier est que l'objectif de 60 PPSMJ par CPIP, qui sert de référence au niveau européen, reste encore lointain et nécessitera des efforts supplémentaires. Le second est que cette moyenne nationale cache des situations très différentes d'un territoire à un autre ( cf. tableau infra ). À titre d'exemple, l'évolution la plus favorable est celle connue outre-mer (- 31 %) mais le ratio y demeure le moins bon à l'échelle nationale.

DISP

2018

2019

2020

2021

Évolution
2018-2021

Nombre
de PPSMJ suivies
par CPIP

Bordeaux

75,7

71,6

69,0

71,0

- 6,2 %

Dijon

81,6

80,7

74,9

73,2

- 10,3 %

Lille

72,6

70,0

65,6

65,4

- 9,9 %

Lyon

77,3

74,9

71,1

71,5

- 7,5 %

Marseille

73,1

67,9

67,0

68,6

- 6,1 %

MOM

109,1

73,2

73,7

75,3

- 31,0 %

Paris

80,9

80,2

67,2

69,5

- 14,1 %

Rennes

80,1

78,9

72,8

72,1

- 9,9 %

Strasbourg

79,0

73,1

65,6

67,4

- 14,7 %

Toulouse

86,9

80,0

73,5

74,5

- 14,3 %

Moyenne

79,9

75,3

69,7

70,6

- 11,6 %

Source : direction de l'administration pénitentiaire.

3. Une évaluation qualitative plus délicate

L'évolution de la qualité du travail des SPIP est plus délicate à apprécier, ne pouvant être saisie au travers d'indicateurs statistiques mais seulement au gré des témoignages recueillis.

Le travail des CPIP est aujourd'hui davantage formalisé et il donne lieu à un plus grand nombre d'écrits. Les CPIP rendent compte plus fréquemment de leur activité et ont souvent le sentiment que le niveau d'exigence à leur égard s'est accru. Comme le souligne l'Association nationale des juges d'application des peines (ANJAP), « les missions des SPIP ont très fortement évolué et se sont complexifiées, leur demandant des démarches supplémentaires, une pluri-disciplinarité : suivis radicalisation, BAR, violences intra-familiales entre autres (victimes à aviser, veiller aux interdictions de contact ou de paraître, prévoir éventuellement un BAR...). Les condamnés souffrent souvent d'addiction et/ou de troubles de comportement, sont particulièrement précarisés » 13 ( * ) . Les transformations du métier rendent plus difficiles les comparaisons à travers le temps.

Beaucoup de magistrats entendus ont cependant indiqué que la qualité des écrits avait augmenté, ce qui est cohérent avec les évolutions décrites précédemment concernant le recrutement et la formation des CPIP. Le niveau de compétences des CPIP s'est élevé en ce qui concerne les connaissances juridiques, la conduite d'entretien ou la rédaction de rapports. Pour l'ANJAP, la qualité du travail réalisée par les CPIP a progressé, comme l'illustre notamment leur implication réussie dans les dispositifs de lutte contre la radicalisation ou l'attention nouvelle portée, ces dernières années, aux violences intrafamiliales, les SPIP ayant pris l'habitude d'aviser les victimes à chaque étape de la procédure ou de travailler avec France Victimes.

Pour autant, toutes les difficultés n'ont pas été résorbées, l'association nationale des visiteurs de personnes sous main de justice (ANVP) regrettant par exemple la persistance de trop nombreuses sorties de prison insuffisamment préparées. Dans ses réponses écrites au questionnaire des rapporteurs, l'association indique ainsi être sollicité « souvent au dernier moment pour prendre en charge des personnes sans aucune organisation de leur sortie hors un ticket de transport et un peu d'argent de leur pécule s'ils ont pu travailler » 14 ( * ) .

Le Conseil national des barreaux (CNB) est peut-être l'interlocuteur qui porte le jugement le plus sévère sur l'activité des SPIP. Selon lui, « malgré le renforcement des moyens alloués aux SPIP, les avocats ne constatent pas d'évolution dans la qualité du travail réalisé par ces derniers » 15 ( * ) . Il évoque les difficultés rencontrées par les avocats comme par leurs clients pour rencontrer les CPIP. Il déplore que les rapports remis par les SPIP au juge d'application des peines soient trop souvent transmis à l'avocat « la veille ou le jour même de l'audience devant le juge d'application des peines. Ces délais ne permettent pas à l'avocat d'apporter des éléments constructifs au dossier en vue d'éclairer la décision du juge et de défendre efficacement son client » 16 ( * ) . Le CNB pointe également un défaut de culture juridique des CPIP concernant le droit des étrangers, les estimant « insuffisamment formés sur les durées et modalités des procédures (renouvellement de pièces, mesure d'éloignement) et sur les délais de recours qui sont extrêmement courts pour les détenus étrangers, ce qui peut, en conséquence, entraver la capacité de ces derniers à exercer leurs droits » 17 ( * ) .

On peut se demander si ce jugement sévère ne reflète pas un problème plus structurel de positionnement des SPIP par rapport aux avocats et une insuffisante présence des SPIP auprès des juridictions de jugement, point qui sera examiné plus loin dans ce rapport.

Par ailleurs, il semble particulièrement difficile d'évaluer l'impact des modifications structurelles connues par les SPIP sur la récidive et la réinsertion des PPSMJ. Une telle évaluation nécessiterait de mener des travaux de recherche universitaire ad hoc en lien étroit avec l'administration pénitentiaire qui ne sont pas encore mis en oeuvre, comme le souligne Martine Herzog-Evans, professeur à l'Université de Reims : « Malheureusement l'administration pénitentiaire n'a pas, contrairement à d'autres États, une politique d'ouverture à la recherche indépendante qui permettrait de mesurer les effets de changements de politique institutionnelle » .

Toutefois, la DAP indique avoir débuté en 2022 des travaux nécessaires à l'interconnexion de données, dans le but de rénover son approche de l'évaluation de la récidive. Elle souhaite, d'une part, appréhender la récidive sur la base d'une « comparaison avec un groupe de contrôle qui, bien qu'ayant des caractéristiques égales (même motif de condamnation, même âge, etc. ) n'a pas été détenu » afin de mieux évaluer l'efficacité du système pénitentiaire. Elle souhaite également accompagner l'évaluation de la récidive d'autres indicateurs et évaluer le système pénitentiaire en regardant « bien au-delà de la seule incarcération, en prenant notamment en compte l'ensemble du parcours pénal » .

II. UN INVESTISSEMENT QUI DOIT ÊTRE POURSUIVI EN VEILLANT À GARANTIR LA PLURIDISCIPLINARITÉ DES SERVICES

Les progrès accomplis doivent être consolidés si la France veut se rapprocher des meilleurs standards européens. L'effort consenti pour l'insertion et la probation doit être considéré comme un investissement qui peut être source d'économies s'il entraîne une baisse de la récidive.

A. UN EFFORT À POURSUIVRE

1. Des besoins demeurent non satisfaits

Les représentants de l'USM entendus par les rapporteurs ont estimé que les recrutements opérés ces dernières années avaient permis de « pallier des carences manifestes », sans que la situation devienne pour autant confortable. Une priorisation des tâches reste nécessaire ; l'attention portée actuellement à la lutte contre les violences intrafamiliales retarde par exemple la mise en oeuvre de peines de travail d'intérêt général (TIG) ou de sursis probatoire, ce qui n'est pas encore pleinement satisfaisant.

Cette appréciation nuancée reflète bien la réalité observée par les rapporteurs. Les efforts de recrutement entamés à juste titre depuis 2014 méritent donc d'être poursuivis pour se rapprocher de l'objectif quantitatif de 60 PPSMJ par CPIP . Si le nombre de PPSMJ reste stable, la création d'environ 600 postes de CPIP supplémentaires serait nécessaire pour y parvenir. Le coût de ces créations de postes peut être évalué autour de 25 millions d'euros (hors compte d'affectation spéciale Pensions).

La poursuite des recrutements permettrait également de réduire le nombre d'emplois précaires. Les rencontres sur le terrain ont permis de constater qu'un certain nombre de postes sont occupés par des agents non-titulaires et que certains autres postes souffrent d'absences prolongées qui ne sont pas toujours compensées malgré l'importante charge de travail (arrêts maladie, congés maternité).

Afin de pallier ces absences, les rapporteurs suggèrent que le nombre de CPIP placés soit augmenté et que le dispositif concerne toutes les catégories d'agents des SPIP, comme le préconise la Conférence nationale des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation (CNDIP).

Développé sur le fondement d'une circulaire du 25 avril 2013 18 ( * ) , le statut de CPIP placé est proche de celui des magistrats placés auprès des premiers présidents de cour d'appel pour assurer des remplacements de magistrat absents au sein du ressort de ladite cour. Ainsi, le CPIP concerné est placé auprès d'un pôle de rattachement de sa direction interrégionale. Il « vient renforcer un service en difficulté du fait de l'absence momentanée d'un ou plusieurs CPIP. Il ne doit pas combler un poste vacant mais pallier une carence temporaire en personnel du fait de circonstances particulières (par exemple : congé longue maladie, congé maternité, congé parental...) ou d'absences de longue durée (par exemple : plusieurs agents en position de disponibilités, détachements, congés de longue durée...) 19 ( * ) ».

Cette politique de ressources humaines ambitieuse doit nécessairement s'accompagner d'une politique immobilière cohérente. La DAP indique avoir pris des mesures en conséquence avec, notamment, près de 10 millions d'euros affectés aux opérations immobilières en 2022 et un plan mis en oeuvre sur la période 2023-2027 ayant pour objet d'améliorer les conditions d'installation des SPIP.

Proposition n° 1 :  Poursuivre les recrutements pour arriver à 60 dossiers par CPIP et résorber les emplois précaires.

2. Revaloriser le métier de DPIP

Le métier de DPIP souffre d'une faible attractivité qui se traduit par un nombre important de postes vacants : 93 en 2022. L'Union nationale des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation (UNDPIP) a exprimé ce malaise en regrettant de constater « mois après mois, l'aggravation des postes vacants, l'absence d'organigramme de référence ainsi que le sentiment d'épuisement grandissant d'un corps alimenté par l'absence de perspectives d'évolution » .

La revalorisation du statut des CPIP a réduit l'écart de rémunération avec les directeurs, ce qui a pu entraîner pour ces derniers une perte de motivation et le sentiment d'être déconsidéré.

Pour l'UNDPIP, le développement des recrutements et la fidélisation des agents concernés supposeraient de travailler sur trois axes : la valorisation des missions confiées aux DPIP, le développement des passerelles permettant de dynamiser le déroulement de leurs carrières, enfin une revalorisation statutaire.

Sur ce dernier point, les rapporteurs appellent de leurs voeux que soit poursuivie la réflexion sur la reconnaissance des DPIP comme hauts fonctionnaires avec un passage en catégorie « A+ » 20 ( * ) et une revalorisation de leur traitement indiciaire en conséquence. En 2021, le coût d'une telle évolution avait été évalué à un peu plus de 4 millions d'euros pour environ 480 ETP. Depuis, des mesures de revalorisation indemnitaire et indiciaire ont été adoptées et la DAP réfléchit à une réforme statutaire visant à mieux reconnaître les contraintes professionnelles et les responsabilités des DPIP. La commission encourage ces évolutions nécessaires pour apporter à cette profession une reconnaissance matérielle à la hauteur des responsabilités qui lui sont confiées .

Proposition n° 2 :  Faire passer les directeurs pénitentiaires d'insertion
et de probation en catégorie « A + » pour améliorer l'attractivité de la profession.

B. LA NÉCESSAIRE PLURIDISCIPLINARITÉ

L'orientation de l'activité des CPIP vers la criminologie rend plus nécessaire qu'autrefois la pluridisciplinarité dans les services : un SPIP ne peut plus être composé d'un DPIP et de CPIP « hommes-orchestres ». La DAP partage cette analyse, la circulaire du 19 mars 2008 mentionnant à plusieurs la nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire, et des progrès en ce sens ont été réalisés.

Cependant, les retours de terrain montrent que dans de trop nombreux services les travailleurs sociaux, les psychologues et les personnels administratifs demeurent trop peu nombreux pour assurer un fonctionnement vraiment satisfaisant.

1. Ne pas négliger le travail social

Dans un rapport rendu en 2009, avant de devenir directrice de l'administration pénitentiaire, Isabelle Gorce notait déjà que l'ancrage de l'identité professionnelle des CPIP dans le champ pénal et criminologique impliquait le recrutement de travailleurs sociaux , notamment en détention. La DAP a retenu cette recommandation et a procédé à des recrutements dans la période récente : si l'on comptait 61,6 ETPT d'assistants de service social en 2017, on en dénombrait 104,1 en 2022, soit une progression de 69 % en cinq ans.

Évolution du nombre d'assistants
de service social (en ETPT)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Évolution

61,6

54,8

81,6

107,4

100,5

104,1

+ 69 %

Source : Direction de l'administration pénitentiaire.

Toutefois, si l'évolution est spectaculaire en proportion, elle reste modeste en valeur absolue : on compte, en définitive, à peine plus d'un assistant de service social en moyenne par département, ce qui reste peu pour s'occuper d'un public cumulant les handicaps, pour lequel l'accès aux droits et à l'emploi se heurte à de multiples obstacles. Si les PPMSJ peuvent, en milieu ouvert, accéder plus facilement à l'offre de services de droit commun, les personnes détenues ont besoin, notamment au moment de préparer la sortie, qu'un important travail social soit réalisé, la question de l'accès au logement étant particulièrement problématique.

Plusieurs acteurs de l'insertion ont noté que les CPIP ne connaissaient pas toujours les dispositifs de droit commun accessibles en milieu ouvert, ce qui n'est guère surprenant puisque la criminologie est devenue leur coeur de métier, mais souligne une fois encore la nécessité de compter des travailleurs sociaux dans les équipes. De même, la représentante de Pôle emploi entendue par les rapporteurs a estimé que la présence d'un travailleur social au sein du SPIP facilitait l'accompagnement global des PPSMJ et favorisait la continuité des parcours.

Il convient donc de poursuivre le recrutement d'assistants de services sociaux, en se donnant comme premier objectif d'atteindre rapidement l'effectif affiché dans les organigrammes de référence, soit 150 ETPT .

Le même raisonnement vaut pour le recrutement de psychologues . La présence de psychologues devrait être généralisée dans tous les services, afin d'apporter un appui aux CPIP notamment pour la mise en oeuvre des obligations de soin. L'effectif de référence établi par la DAP prévoit à terme l'emploi de 127 psychologues.

2. Des fonctions support indispensables pour le bon fonctionnement des services

Les interlocuteurs de la mission ont régulièrement souligné l'importance du rôle du personnel administratif dans le fonctionnement des services. Des agents administratifs en nombre suffisant et bien formés permettent aux CPIP, aux psychologues et aux travailleurs sociaux de se consacrer entièrement au suivi des PPSMJ.

Les SPIP emploient des attachés d'administration, fonctionnaires de catégorie A, qui sont plus particulièrement responsables des ressources humaines et du contrôle de gestion, des secrétaires administratifs, qui encadrent les agents d'exécution et assurent la gestion économique, financière et administrative du service, enfin des adjoints administratifs.

Les personnels administratifs sont ceux dont les effectifs ont le plus faiblement augmenté au cours des années récentes (hausse de 3 % à 4 %), sauf pour les contractuels (+ 55 %).

Corps

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Évolution

Attachés d'administration

29,6

29,6

30,7

27,9

30,8

30,5

+ 3 %

Secrétaires administratifs

142,5

142,8

150,9

149,6

146,3

156,5

+ 9,8 %

Adjoints administratifs

552,3

545,0

561,0

576,1

574,6

579,9

+ 5 %

Non-titulaires administratifs

64,5

81,8

90,7

100

100,2

121,5

+ 88,3 %

Effectif Global

788,9

798,6

833,3

853,6

851,9

888,4

+ 12,6 %

Source : Direction de l'administration pénitentiaire.

Certaines organisations syndicales plaident pour la création d'un véritable greffe des services d'insertion et de probation, à l'instar du greffe pénitentiaire dans les prisons, pour structurer davantage la fonction administrative. Il n'est pas certain que la création d'un service de greffe à proprement parler s'impose, elle pourrait rendre plus complexe l'organisation, mais il convient de veiller à ce que les SPIP disposent partout du personnel administratif adéquat. En particulier, la présence d'un attaché dans un service est perçue très positivement pour la plus-value qu'elle apporte en termes d'organisation. Un personnel administratif bien formé pourrait décharger les CPIP de certaines tâches de contrôle ou de collecte de pièces que la PPSMJ doit fournir dans le cadre de l'exécution de sa peine, permettant aux conseillers de se concentrer sur l'accompagnement.

3. Des surveillants pénitentiaires acteurs de l'insertion et de la probation

Depuis le début des années 2010, les surveillants pénitentiaires sont présents en plus grand nombre dans les SPIP. Aujourd'hui, environ trois cents surveillants pénitentiaires sont affectés dans ces services. Le renforcement de leur présence a été concomitant de l'essor des mesures de placement sous surveillance électronique , fixe ou mobile. Les surveillants sont chargés de poser et retirer les bracelets électroniques et contribuent au suivi des mesures.

Au-delà de la mise en oeuvre de ces mesures de contrainte, les surveillants participent à la sécurité et au fonctionnement quotidien des services. En outre, ils apportent, surtout en détention, un regard différent sur les personnes suivies, utile pour mieux évaluer leurs chances de réinsertion et le risque de récidive.

Plusieurs professionnels entendus par les rapporteurs ont fait observer que le comportement de la PPSMJ pouvait changer pendant le temps de son entretien avec le CPIP : sachant qu'un avis favorable l'aidera à obtenir une remise ou un aménagement de peine, elle aura naturellement tendance à se présenter sous son meilleur jour. Au quotidien, les surveillants peuvent observer leur comportement de la PPSMJ sans ce filtre et ils seront donc en mesure d'apporter un regard complémentaire de celui du CPIP.

En matière d'organisation, cet apport du personnel de surveillance a été consacré par la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire du 22 décembre 2021, qui a modifié l'article 712-4-1 du code de procédure pénale afin de prévoir la présence, au sein de la commission de l'application des peines, d'un représentant du corps de commandement ou du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance. La commission est chargée d'émettre un avis sur certaines décisions en matière d'exécution des peines afin d'éclairer la décision du juge de l'application des peines (JAP). Cette reconnaissance s'inscrit dans la démarche générale de promotion de la notion de surveillant « acteur », soit un surveillant dont la capacité d'initiative est valorisée et dont la contribution à la politique de réinsertion est reconnue.

Le travail en cours sur les effectifs de référence en SPIP prévoit un abondement des postes de surveillants afin de répondre à la montée en charge de la surveillance électronique : à terme, 396 surveillants et 19 premiers surveillants devraient être affectés dans les services.

Proposition n° 3 :  Renforcer la présence des assistants de service social, des psychologues et des surveillants pour faire vivre la pluridisciplinarité, sans négliger les fonctions support.

C. DES AMÉLIORATIONS À RECHERCHER DANS L'ORGANISATION DES SERVICES

Les auditions menées par les rapporteurs ont montré que le monde de l'insertion et de la probation était également traversé par un débat relatif à son organisation institutionnelle.

1. Des propositions de réforme institutionnelle en débat

Comme cela été indiqué, les SPIP dépendent actuellement d'une sous-direction de l'insertion et de la probation, qui fait partie intégrante de la direction de l'administration pénitentiaire (DAP).

Cette organisation administrative n'est pas toujours jugée optimale : certains estiment qu'elle ne permet pas de donner au travail d'insertion et de probation toute la place qu'il mérite, en raison de la prédominance, au sein de l'administration pénitentiaire, des préoccupations tenant à la sécurité et au fonctionnement des établissements.

Lors des États généraux de la justice, le groupe thématique « justice pénitentiaire et de réinsertion », présidé par Isabelle Gorce, a ainsi plaidé en faveur de la création d'une agence de la prévention de la récidive et de la probation, rattachée à la DAP. L'agence jouirait d'une plus grande souplesse dans son organisation et dans son recrutement, d'un positionnement interministériel plus affirmé, d'un « décentrage » par rapport au poids de la gestion carcérale, enfin d'un accès à des fonds européens pour mener des expérimentations. Elle pourrait absorber l'actuelle agence du travail d'intérêt général et de l'insertion professionnelle (Atigip). Dans les territoires, l'agence serait dotée de délégations régionales, qui seraient les interlocuteurs des directions interrégionales des services pénitentiaires (DISP).

L'agence serait dirigée par un conseil d'administration, au sein duquel pourraient siéger les partenaires des SPIP, ce qui ne manquerait pas de renforcer leur implication dans cette politique partagée. Lui serait adjoint un conseil scientifique, ce qui favoriserait un resserrement des liens avec le monde de la recherche.

Toutefois, la proposition de créer une agence n'a pas été retenue dans le rapport définitif des États généraux de la justice, probablement en raison des interrogations qu'elle soulève : la création d'une agence, même si elle est liée à la DAP par une convention d'objectifs et de gestion, ne risque-t-elle pas de faire naître de nouveaux problèmes de coordination ? Des inquiétudes se sont également fait jour concernant le risque d'une moindre continuité de la prise en charge entre milieu fermé et milieu ouvert si une agence extérieure aux établissements pénitentiaire prenait en charge l'activité d'insertion et de probation.

Plus globalement, on peut s'interroger sur les effets de cette « agencisation » de l'État qui fait échapper toujours plus de services à l'autorité hiérarchique du ministre, ce qui pose question en termes de responsabilité et peut compliquer la conduite de politiques publiques cohérentes.

Une proposition alternative de réforme organisationnelle est défendue notamment par l'universitaire Martine Herzog-Evans : la création d'une direction de la probation à part entière, qui fusionnerait avec la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ).

Il est vrai que l'organisation de la prise en charge des mineurs délinquants diffère aujourd'hui de celle des majeurs. Une direction distincte de l'administration pénitentiaire, la DPJJ, est responsable de la prise en charge des mineurs en milieu ouvert et de leur accompagnement éducatif dans les établissements pénitentiaires, les éducateurs de la PJJ travaillant en collaboration avec le personnel pénitentiaire.

La création d'une nouvelle direction donnerait plus de visibilité, au sein du ministère de la justice, à l'activité éducative et de réinsertion. Les membres du personnel pourraient travailler auprès de mineurs comme de majeurs, ce qui favoriserait la continuité dans les parcours de prise en charge et offrirait plus de diversité dans les parcours de carrière.

Si ces réflexions sont stimulantes, les rapporteurs ont toutefois observé qu'elles étaient peu présentes, voire absentes, des échanges qu'elles ont eues avec les organisations représentatives des CPIP, des DPIP ou des magistrats. Sans doute perfectible, l'organisation institutionnelle actuelle ne semble pas préoccuper les professionnels de terrain ni être perçue comme un frein à leur action.

Il convient cependant d'affirmer plus nettement la dimension interministérielle de la politique de réinsertion des PPSMJ. En mars 2022, le garde des sceaux, la ministre du travail et la ministre déléguée à l'insertion ont signé une feuille de route visant à accompagner la réinsertion professionnelle des personnes placées sous main de justice, ce qui est une bonne initiative. Cette feuille de route vise à développer les compétences des PPSMJ, mineures comme majeures, par la formation, le travail et l'accompagnement à la réinsertion. Cette action conjointe entre ministères mérite d'être encouragée et déclinée à l'échelon territorial. Le travail entre ministères ne doit pas dépendre des bonnes volontés rencontrées localement mais être systématisé.

2. Une structuration à poursuivre

Comme cela a été indiqué, la diffusion du RPO 1 dans les services a contribué à harmoniser les pratiques. Cet effort de structuration de l'action des SPIP mérite d'être poursuivi, en veillant à ne pas tomber dans l'écueil de la bureaucratisation ou d'un contrôle trop tatillon qui stériliserait les capacités d'initiative et l'innovation.

Dans le courant de l'année 2022, la DAP a diffusé auprès de ses services déconcentrés le RPO 2, consacré à la formation et aux compétences des personnels intervenant en SPIP. Elle a en parallèle poursuivi la rédaction du RPO 3, relatif au fonctionnement et à l'organisation des services, en lien avec l'élaboration des organigrammes de référence. Elle a enfin engagé les travaux pour l'élaboration du RPO 4 consacré au pilotage et à l'évaluation de l'activité des SPIP.

Les SPIP seront ainsi très prochainement dotés de référentiels complets sur lesquels assoir leurs pratiques professionnelles et leur organisation partout sur le territoire.

Un autre vecteur de modernisation réside, dans l'administration pénitentiaire comme dans les services judiciaires, dans l' amélioration des outils informatiques . Sur ce point, il convient d'être attentif au déploiement annoncé pour le courant de l'année 2023 de la nouvelle application Prisme (Probation Insertion Suivi Mesure Évaluation), développée depuis 2019 et qui a vocation à remplacer l'application APPI (Application des peines, probation et insertion) que les SPIP utilisaient depuis une vingtaine d'années.

Cette nouvelle application poursuit plusieurs objectifs : améliorer l'évaluation de la situation des PPSMJ, fluidifier et accélérer le partage d'informations, augmenter la fiabilité des données, permettre davantage d'extractions de données pour produire des statistiques locales et nationales. L'application permettra de centraliser les informations fournies par les partenaires des SPIP.

Le calendrier des travaux des rapporteurs ne leur a pas permis de s'intéresser au déploiement de Prisme et à ses retombées sur le travail des personnels mais il s'agit d'un point qui pourra faire l'objet d'évaluations ultérieures, par exemple à l'occasion de l'examen des crédits de la mission « Justice » dans le projet de loi de finances.

Un autre axe de transformation auquel les rapporteurs sont sensibles et celui du renforcement des liens entre les SPIP et le monde de la recherche . Le fait que les travaux universitaires qui ont influencé les pratiques professionnelles depuis une vingtaine d'année proviennent, pour l'essentiel, des pays anglo-saxons témoigne du retard qu'accuse la recherche française dans ce domaine.

Martine Herzog-Evans a témoigné faire partie d'un groupe de 250chercheurs qui travaillent au Royaume-Uni avec le ministère de la justice et elle a souligné l'absence en France d'une organisation équivalente. Il en résulte un manque d'études à la méthodologie rigoureuse permettant d'évaluer les effets de telle peine ou de telle mesure d'aménagement sur la récidive. De surcroît, l'administration pénitentiaire publie peu de statistiques sur lesquelles les chercheurs pourraient baser leurs travaux.

Ce retard s'explique aussi historiquement par le manque d'intérêt de l'université française pour la criminologie. C'est donc un chantier de longue haleine qu'il faut engager entre la DAP et des universités partenaires pour développer ce domaine de recherche, dont les conclusions constitueraient un précieux outil de pilotage pour l'administration pénitentiaire.

Proposition n° 4 :  Développer les partenariats entre l'administration pénitentiaire et l'université afin de mener des travaux de recherche tendant à mieux évaluer l'efficacité des sanctions pénales et de la probation.

3. Une performance à replacer dans le contexte plus général de la politique pénale

Si les rapporteurs n'ont pas étudié la politique pénale en tant que telle, il leur paraît indispensable de souligner que l'investissement consenti par la Nation dans les SPIP ne pourra porter complètement ses fruits que s'il s'adosse à une politique pénale cohérente.

À cet égard, l'inflation du nombre de détenus, qui se rapproche des plus hauts historiques, constitue un motif de préoccupation : même mieux dotés, les SPIP se trouvent en difficulté pour assurer un suivi de qualité dans des établissements surpeuplés. Dans certains établissements, comme à Bordeaux-Gradignan, le taux d'occupation est supérieur à 200 % ; or les effectifs des services pénitentiaires sont établis sur la base de la capacité théorique des prisons, non sur le nombre de détenus réellement accueillis.

Les personnes entendues ont en particulier attiré l'attention des rapporteurs sur le problème posé par les personnes détenues pour de courtes peines : il est très difficile pour le SPIP, surtout dans une maison d'arrêt surpeuplée, d'entamer pendant la durée d'une courte peine un travail efficace de prévention de la récidive.

Il conviendra donc de mener rapidement une réflexion sur les effets du « bloc peine », expression qui fait référence aux articles de la loi du 23 mars 2019 qui ont réformé le régime des peines. Alors que le « bloc peine » avait pour objectif de réduire le recours aux courtes peines d'emprisonnement, pour privilégier les alternatives à l'incarcération, le bilan que l'on peut ébaucher après quatre années d'application paraît décevant. À ce sujet, le rapport du comité des États généraux de la justice, dit rapport « Sauvé », indique que « si, depuis la loi du 23 mars 2019 et son dispositif de « bloc peine », le recours à la peine d'un mois d'emprisonnement ferme est proscrit et le prononcé de peines comprises entre un mois et six mois moins fréquent, la part des peines d'emprisonnement ferme comprises entre six mois et un an a en parallèle augmenté, faisant ainsi apparaître un allongement de la durée moyenne des courtes peines prononcées par les tribunaux correctionnels ». Les courtes peines d'emprisonnement contribuent ainsi toujours de manière importante à la surpopulation carcérale.

Le rapport Sauvé n'appelle pas à une réforme immédiate du « bloc peine », considérant qu'il est encore trop tôt pour en dresser le bilan définitif, mais la question reviendra sans nul doute bientôt en débat.

III. DES SERVICES AU CoeUR D'UN RÉSEAU D'ACTEURS

Les SPIP oeuvrent au service de l'autorité judiciaire et en lien avec de multiples partenaires. Une coordination et une relation de travail confiantes sont indispensables pour atteindre les objectifs poursuivis.

A. LE LIEN AVEC L'AUTORITÉ JUDICIAIRE

1. Le juge d'application des peines, interlocuteur privilégié du SPIP

Les SPIP et les juges d'application des peines (JAP) collaborent étroitement au quotidien, les premiers ayant notamment pour mission d'assister les seconds 21 ( * ) . Les SPIP sont saisis par les JAP dans le cadre d'un mandat judiciaire leur confiant le suivi d'une mesure judiciaire donnée, via une ordonnance portant, le cas échéant, des instructions précises.

Dispositions juridiques
encadrant les relations entre les JAP et les SPIP

Le juge de l'application des peines est assisté par le service pénitentiaire d'insertion et de probation (article R. 57-3 et D. 49-27 du code de procédure pénale).

Selon les articles D. 574 et D. 575 du même code, le SPIP s'assure que la personne confiée au service se soumet aux mesures de contrôle et respecte les obligations qui lui sont imposées.

Le SPIP propose également toute modification des mesures en cours (ajout ou retrait d'une obligation particulière par exemple, changement de régime, etc. ) et rend compte de leur respect ou de leur violation. Le juge de l'application des peines, avec les autres magistrats mandants, détermine les orientations générales relatives à l'exécution des mesures confiées au SPIP (article D. 576 du code de procédure pénale).

Le SPIP définit les modalités de la prise en charge des personnes placées sous main de justice et les met en oeuvre, après en avoir avisé le magistrat mandant qui peut, le cas échéant, faire toutes observations utiles (article D. 577 du code de procédure pénale).

L'article 712-1 du même code dispose que « les juridictions sont avisées, par les services d'insertion et de probation, des modalités de prise en charge des personnes condamnées, définies et mises en oeuvre par ces services. Elles peuvent faire procéder aux modifications qu'elles jugent nécessaires au renforcement du contrôle de l'exécution de la peine ».

Source : contribution écrite de l'ANJAP

Pour ce qui concerne le suivi en milieu ouvert, le mandat est automatique puisque les peines d'emprisonnement assorties pour partie du sursis probatoire impliquent un avis de convocation à comparaitre devant le SPIP, en application de l'article 741-1 du code de procédure pénale.

La situation est différente pour les condamnés à une peine d'emprisonnement ferme laissés libres à l'audience. L'article 723-15 du code de procédure pénale dispose que, pour déterminer les modalités d'exécution de sa peine, le condamné est convoqué en premier lieu devant le juge de l'application des peines, puis devant le SPIP à moins que le JAP n'en décide autrement. L'ANJAP constate que les procédures effectivement mises en oeuvre peuvent varier : « les pratiques sont plus aléatoires, en fonction notamment de la taille des juridictions et surtout des effectifs des SPIP. Certains JAP saisissent systématiquement le SPIP quand d'autres ne le font presque jamais tellement les services sont engorgés (notamment Paris et sa couronne) » 22 ( * ) .

En milieu fermé, le JAP saisit le SPIP dans le cadre du débat contradictoire mis en place en application de l'article 712-6 du code de procédure pénale lorsqu'un condamné détenu sollicite un aménagement de peine, cet article précisant que le jugement est rendu « après avis du représentant de l'administration pénitentiaire » . En outre, l'article 712-4-1 du code de procédure pénale prévoit que « les décisions en matière d'application des peines sont prises après avis de la commission de l'application des peines » notamment composée d'un membre du SPIP.

Récemment, la loi « Justice de proximité » du 8 avril 2021 23 ( * ) est venue faire bouger la ligne de partage entre les compétences respectives des JAP et des DPIP en transférant de l'un à l'autre le soin de décider des modalités d'exécution de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général sauf, dans l'hypothèse où le JAP aurait décidé de les fixer lui-même. En conséquence, le DPIP possède désormais une compétence de principe qui peut toutefois être ponctuellement levée toutes les fois où le JAP souhaite l'exercer lui-même.

Les rapporteurs considèrent que le nouvel équilibre trouvé en matière de TIG pourrait, le cas échéant inspirer de nouveaux transferts de compétences, qui allègeraient quelque peu la lourde charge de travail des JAP tout en donnant de nouvelles responsabilités aux DPIP. En ce sens, l'ANJAP propose par exemple de confier de nouvelles compétences au SPIP en matière d'aménagement de peine ab initio : une fois le principe de l'aménagement de peine décidé, le SPIP pourrait « utilement déterminer les horaires, date d'écrou et le lieu d'assignation. De la même manière, en cas de changement de lieu d'assignation durant la mesure de détention à domicile sous surveillance électronique, le DPIP pourrait avoir compétence pour faire lui-même la modification ».

De même, l'ANJAP propose d'étudier la faculté de déléguer aux DPIP les permissions de sortie des détenus à domicile sous surveillance électronique, en semi-libertés et en placements extérieurs, sur le modèle de la délégation des permissions de sortie des détenus aux chefs d'établissement pénitentiaire permise par la loi du 23 mars 2019 24 ( * ) .

Les rapporteurs soutiennent ces réflexions qui visent à apporter de la fluidité dans la conduite des procédures et contribuent à la revalorisation du rôle des DPIP.

Proposition n° 5 :  Sur le modèle de la loi « justice de proximité » du 8 avril 2021 en matière de travaux d'intérêt général, étudier la possibilité de confier certaines tâches assurées par le juge de l'application des peines au directeur pénitentiaire d'insertion et de probation.

2. Le juge d'instruction, un partenaire plus occasionnel

Les relations entre les SPIP et les juges d'instruction (JI) sont plus occasionnelles, bien que les SPIP puissent être amenés à mettre en oeuvre des mesures de sureté ou des enquêtes sociales à la demande des magistrats instructeurs.

Les travaux conduits par les rapporteurs ont révélé la nécessité de mieux sensibiliser les CPIP aux contraintes inhérentes à l'instruction qui sont, il est vrai, le reflet d'un droit procédural devenu complexe. Selon l'association française des magistrats instructeurs (AFMI), les informations transmises par les SPIP ne sont pas toujours suffisamment formalisées pour pouvoir être versées à la procédure et soumises au contradictoire. Un rapport formalisé et signé doit être fourni, un appel téléphonique ou un courrier électronique ne pouvant s'y substituer. Les associations socio-judiciaires avec lesquelles travaillent les magistrats instructeurs, rompues à l'instruction, semblent plus sensibles à ces contraintes.

L'AFMI a également regretté que le délai nécessaire à la pose d'un bracelet électronique soit habituellement de l'ordre de trois à cinq jours. Ce délai n'est pas gênant si la personne mise en cause est en détention provisoire mais expose à un risque de fuite dans le cas contraire.

Proposition n° 6 : Sensibiliser davantage les CPIP aux contraintes propres à l'instruction dans le cadre de leur formation.

3. Un rapprochement à rechercher avec les formations de jugement

Très présent auprès du JAP, le SPIP l'est moins auprès de la formation de jugement, qui peut pourtant décider d'un aménagement de peine ab initio ou qui peut souhaiter qu'une peine en milieu ouvert soit mise à exécution très rapidement.

La proposition 10.1 du rapport thématique remis dans le cadre des États généraux de la justice par le groupe de travail « justice pénitentiaire et de réinsertion » présidé par Isabelle Gorce, préconise d'expérimenter l'organisation d'une permanence des SPIP au sein du tribunal correctionnel. Cette permanence permettrait, d'une part, au CPIP d'assister aux audiences, d'autre part, de recevoir le condamné juste après l'audience. Cette proposition a été retenue dans le rapport du comité des États généraux de la justice.

Comme l'expose le rapport précité, cette permanence faciliterait l'information du condamné sur les suites concrètes de sa condamnation, juste après son prononcé, permettrait de lui remettre une convocation au SPIP dans un délai très court ou de poser immédiatement un bracelet anti-rapprochement ou un bracelet électronique. On peut ajouter qu'elle faciliterait aussi les rapports avec les avocats, familiers des palais de justice, alors que l'audition du CNB a montré que leurs liens étaient souvent distendus.

Proposition n° 7 : Expérimenter une permanence des SPIP dans les tribunaux correctionnels afin de favoriser une relation plus fluide avec les formations de jugement.

B. LES ASSOCIATIONS SOCIO-JUDICIAIRES : CONSTRUIRE UN CLIMAT DE CONFIANCE

L'activité d'insertion et de probation se caractérise par la coexistence d'un secteur public - les SPIP - et d'associations socio-judiciaires de droit privé, qui peuvent se voir confier les mêmes missions. Les rapporteurs ont constaté que cette coexistence était parfois source de rivalités et de méfiance, les SPIP craignant qu'un recours accru aux associations entraîne une « marchandisation » de leurs activités, tandis que les associations estiment que leur savoir-faire et leur capacité d'innovation ne sont pas considérés à leur juste valeur par le secteur public.

1. Un secteur associatif présent aux différentes étapes de la chaîne pénale

Les associations socio-judiciaires sont devenues des acteurs majeurs de la chaîne pénale et il ne ressort pas des auditions des rapporteurs que l'accroissement des moyens des SPIP se soit accompagné d'un moindre recours aux associations.

En matière d'insertion et de probation, elles interviennent à la demande des JI, des JAP ou des SPIP eux-mêmes. La souplesse permise par leur statut de droit privé, notamment en matière de recrutement, favorise une capacité d'innovation qui enrichit l'offre de services à la disposition des magistrats.

Entendue par les rapporteurs, la fédération Citoyens et Justice qui regroupe 150 associations socio-judiciaires indique que ses membres sont mandatés aussi bien en pré-sentenciel qu'en post-sentenciel. En pré-sentenciel, les associations interviennent tant pour la mise en oeuvre de mesures alternatives aux poursuites telles que les stages, les mesures d'investigation ou les mesures alternatives à la détention provisoire. Une mesure de contrôle judiciaire peut, par exemple, imposer à la personne mise en examen de « se présenter périodiquement aux services, associations habilitées ou autorités désignés par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention » 25 ( * ) ou de répondre à leurs convocations 26 ( * ) . En post-sentenciel, les associations socio-judiciaires peuvent participer à la mise en oeuvre des peines alternatives à l'emprisonnement (TIG, peines de stage, détention à domicile sous surveillance électronique... 27 ( * ) ) ou des aménagements de peines d'emprisonnement 28 ( * ) .

Historiquement, le secteur associatif est surtout présent sur le pré-sentenciel alors que les SPIP dominent sur le post-sentenciel. La présence des associations sur le pré-sentenciel est souvent expliquée par le manque de moyens des SPIP qui fait obstacle à ce qu'ils puissent assumer concomitamment l'ensemble des tâches. Toutefois, ce constat varie de manière importante localement, en fonction, notamment, de la présence des associations socio-judiciaires sur le territoire 29 ( * ) . Comme le souligne l'UNDPIP, « sur certains territoires, l'associatif vient prendre des parts dans les missions plus traditionnelles du SPIP en assurant le suivi de certaines mesures probatoires (notamment en matière de violences intrafamiliales)» .

Au moment de l'adoption de la LPJ, le ministère de la justice avait pour ambition de repositionner les SPIP sur le pré-sentenciel, et notamment sur la réalisation des enquêtes sociales rapides. Cette réorientation semble avoir été appliquée de manière très inégale sur le territoire au vu des témoignages recueillis par les rapporteurs.

2. La difficulté d'envisager une répartition des tâches uniforme sur l'ensemble du territoire

La cohabitation du secteur associatif et des SPIP incite à s'interroger sur l'opportunité de délimiter plus clairement leurs compétences respectives. Or, les travaux conduits par les rapporteurs montrent qu'aucune ligne de partage consensuelle n'émerge.

Ainsi, le rapport thématique précité produit dans le cadre des États généraux de la justice parait privilégier une répartition « horizontale ». La proposition 2 préconise « de structurer davantage l'intervention du SPIP, en le positionnant en priorité sur l'évaluation du risque de récidive et la conception de programmes de prise en charge adaptés aux problématiques de chaque probationnaire » . Les associations prendraient ensuite le relais en se voyant déléguer la mise en oeuvre effective des mesures décidées par les SPIP. In fine , comme l'indique la proposition 2.3, une telle démarche reviendrait à externaliser une partie de l'activité des SPIP en distinguant ce qui relève de la sphère de la conception et du travail criminologique de ce qui ressort de la prise en charge socio-éducative. Cette répartition des compétences est également suggérée par la conférence nationale des procureurs de la République (CNPR).

D'autres acteurs préconisent plutôt une répartition verticale, par types de tâches. Ainsi, l'ANJAP suggère, par exemple, « une expérimentation sur une autonomie complète du secteur associatif, sur des mesures précises tel le placement extérieur » qui ne constituerait pas, selon elle, une remise en cause de la qualité du suivi du SPIP mais le fait de « proposer un accompagnement différentiel » . Elle préconise également un renforcement de la place du secteur associatif dans le suivi des condamnés en matière de TIG.

L'Union syndicale de la magistrature (USM) a suggéré de retenir une répartition qui fonctionne de manière satisfaisante dans certains territoires, sans pour autant la rendre rigide : le secteur associatif réalise les enquêtes sociales rapides en cas de comparution immédiate, il met en oeuvre les stages et les contrôles judiciaires simples ; le SPIP, quant à lui, met en oeuvre les contrôles judiciaires avec pose d'un bracelet électronique et réalise les enquêtes plus longues nécessaires pour décider d'un aménagement de peine ab initio .

Les rapporteurs considèrent que la proposition de recentrer les SPIP sur des tâches de conception de programme, dont la mise en oeuvre concrète serait confiée aux associations, est intéressante mais irait à rebours des efforts de recrutement réalisés ces dernières années pour étoffer les effectifs des services. Elle remettrait en cause l'identité professionnelle des SPIP et poserait la question de la conduite de la politique d'insertion et de probation dans les territoires peu pourvus en associations.

Plutôt que d'imposer un schéma unique, il paraît préférable de s'en remettre à l'intelligence des territoires pour permettre aux magistrats de faire appel soit au SPIP soit au secteur associatif en fonction des compétences et des moyens disponibles et de la nature du mandat judiciaire à mettre en oeuvre.

3. Pour des relations renouvelées avec le secteur associatif

Actuellement, les magistrats ont la possibilité de faire appel au SPIP ou à une association. Certaines organisations professionnelles de DPIP paraissent tentées de faire du SPIP l'interlocuteur unique du magistrat : le SPIP serait alors le destinataire de tous les mandats judiciaires et il pourrait éventuellement sous-traiter certaines mesures à une association.

Un tel mode d'organisation priverait cependant les magistrats d'une faculté de choix à laquelle ils semblent attachés. L'USM indique, par exemple que « pour la grande majorité des JAP interrogés, il apparait essentiel de rester maître quant au choix du service saisi. ». Un magistrat habitué à travailler avec une association dont il connaît le professionnalisme peut légitimement être réticent à renoncer à ce contact direct. Les associations peuvent craindre pour leur part que les SPIP préfèrent réaliser les missions en interne et fassent peu appel à elles. Il pourrait en résulter une moindre émulation entre secteurs public et privé préjudiciable à l'innovation.

Dans un contexte marqué par la défiance, il convient sans doute de privilégier des initiatives de nature à rétablir la confiance avant d'envisager une remise en cause de l'organisation actuelle. Un dialogue et une concertation plus approfondis entre la DAP et le secteur associatif permettraient déjà aux associations de se sentir mieux reconnues. Elles éprouvent encore aujourd'hui une certaine amertume concernant la décision prise dans le cadre de la LPJ de repositionner les SPIP sur le pré-sentenciel, estimant ne pas avoir été à l'époque suffisamment associées à la prise de décision.

Pour affirmer encore plus nettement le partenariat entre l'administration pénitentiaire et le secteur associatif, la conclusion de chartes peut également être envisagée, sur le modèle du projet de charte nationale d'engagements réciproques élaborée par l'administration pénitentiaire en collaboration avec la fédération Citoyens et Justice sur la réalisation des enquêtes sociales rapides.

Enfin, la piste d'un agrément ou d'une habilitation des associations par l'administration pénitentiaire, s'inspirant de la pratique suivie par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) 30 ( * ) , a retenu l'attention des rapporteurs. Aujourd'hui, seules doivent être habilitées, depuis le 1 er avril 2022, les structures de placement extérieur.

L'habilitation apporterait aux magistrats la garantie de la qualité de la prise en charge et de la probité des personnels exerçant au sein de ces structures. Une telle garantie paraît justifiée tant au regard du caractère sensible des missions exercées par les associations socio-judicaires que de la précarité des personnes suivies. Une telle démarche permettrait, par exemple, d'imposer des règles en matière de financement ou de recrutement. Elle favoriserait une relation confiante avec le secteur public, assuré de la qualité des prestations réalisées par le milieu associatif. L'habilitation serait conditionnée au respect d'un cahier des charges contrôlé régulièrement.

Proposition n° 8 : Introduire une procédure d'habilitation des associations socio-judiciaires en s'inspirant de la pratique suivie dans le domaine de la protection judiciaire de la jeunesse.

C. LES PARTENAIRES INDISPENSABLES POUR LA CONTINUITÉ DES PARCOURS

Les SPIP ont besoin de s'appuyer sur des partenaires extérieurs pour construire des parcours d'insertion cohérents et faire le lien entre le milieu fermé et le milieu ouvert. En milieu ouvert, les PPSMJ ont accès aux dispositifs de droit commun mais il convient de les orienter et d'éviter les ruptures dans les parcours. Les rapporteurs ont concentré leur attention sur la formation et l'insertion professionnelle et sur la question du logement, tout en étant conscients de l'apport d'autres acteurs notamment dans le domaine de l'éducation et de la santé.

1. Des liens à approfondir avec le monde de l'insertion

Les acteurs de l'insertion 31 ( * ) entendus par les rapporteurs ont fait état des relations de travail régulières et confiantes avec les SPIP, quoiqu'encore perfectibles.

Le manque de connaissance fine par certains CPIP des dispositifs de droit commun et le nombre insuffisant d'assistants de services sociaux conduisent parfois à ce que des sorties de prison soient insuffisamment préparées. Les modalités de la collaboration avec les SPIP au plan local ne sont pas toujours formalisées et dépendent alors beaucoup de la qualité des liens interpersonnels, qui peut varier au gré des mutations professionnelles.

Une difficulté majeure à laquelle sont confrontés les acteurs de l'insertion qui accompagnent les personnes sortant de détention tient au manque de logements ou de places d'hébergement disponibles. Pour tenter d'y remédier, certains SPIP ont passé des conventions avec les services intégrés de l'accueil et de l'orientation 32 ( * ) (SIAO) présents dans leur territoire, comme les y invite une circulaire de 2016 33 ( * ) . Le décalage entre le « temps judiciaire » et le délai nécessaire pour obtenir un hébergement, compte tenu des listes d'attente, ne permet cependant pas toujours de proposer une solution à chaque détenu qui arrive en fin de peine.

Plusieurs pistes pourraient permettre d'améliorer l'accès au logement en fin de peine. Travailler plus en amont, bien avant la fin de la détention, est indispensable. La désignation dans les SIAO d'un référent « justice » contribue à fluidifier les échanges et améliore les chances de réussite des parcours. La désignation d'un plus grand nombre de référents doit donc être encouragée. Enfin, le recours à la mesure de placement à l'extérieur peut faciliter la transition entre la détention et l'accès à un logement pérenne. Le placement à l'extérieur repose sur un partenariat entre l'administration pénitentiaire et des associations qui fournissent l'hébergement et l'accompagnement social. Il demeure encore peu utilisé, notamment en raison de ses modalités de financement qui offrent peu de visibilité aux associations 34 ( * ) .

Un autre champ de l'insertion dans lequel la DAP garde une marge de progression concerne les relations avec le secteur de l'insertion par l'activité économique 35 ( * ) (IAE). Les associations entendues ont le sentiment que beaucoup de SPIP méconnaissent l'appui que pourrait apporter l'IAE à la réinsertion des PPSMJ.

Il est vrai que le partenariat entre les SPIP et l'IAE est récent : c'est seulement depuis la publication, en septembre 2019, du « pacte d'ambition pour l'IAE », que les SPIP ont la possibilité d'orienter les PPSMJ vers les employeurs de l'IAE. Les SPIP peuvent délivrer des « Pass IAE » ouvrant droit à un parcours dans une structure de l'IAE pour une durée maximale de vingt-quatre mois. Au début de l'année 2022, 84 SPIP étaient inscrits sur la « plateforme de l'inclusion » en tant que prescripteurs, cette plateforme ayant vocation à mettre en relation les personnes les plus éloignées de l'emploi avec les employeurs de l'IAE.

Les visiteurs de prison :
un rôle à valoriser auprès des détenus

Les SPIP travaillent avec les visiteurs de prison, regroupés dans une Association nationale des visiteurs de personnes sous main de justice (ANVP) dont les rapporteurs ont entendu des représentants. Les visiteurs de prison sont des bénévoles qui accompagnent, dans la durée, des personnes détenues et parfois des personnes en milieu ouvert isolées après une longue peine. Plusieurs milliers de personnes sont visitées chaque année.

Les visiteurs de prison exercent leur activité en lien avec le SPIP, à qui il revient de sélectionner les personnes qui se portent volontaires, puis de préparer un dossier d'agrément, traité par la direction interrégionale des services pénitentiaires, enfin d'indiquer au visiteur quel détenu il va rencontrer.

Pourtant, l'ANVP regrette que ses échanges avec les SPIP ne soient pas plus nourris : dans beaucoup de départements, une seule réunion est organisée chaque année, ce qui permet de dresser un bilan d'activité mais pas d'échanger véritablement sur les actions de fond. Les SPIP ne doivent pas négliger l'apport des visiteurs de prison, qui contribuent à soutenir les personnes condamnées dans leur parcours de réinsertion. Des réunions plus régulières, par exemple une fois par trimestre, aideraient les visiteurs de prison à se sentir mieux reconnus et favoriseraient une association plus étroite au service d'un objectif partagé.

Enfin, les acteurs de l'insertion soulignent la nécessité d'anticiper sur la fin de la détention pour garantir l'accès aux droits en temps utiles, en s'inspirant des bonnes pratiques observées localement. À Saint-Nazaire par exemple, la caisse d'allocations familiales prépare le dossier ouvrant droit au revenu de solidarité active (RSA) avant la libération du détenu, pour que l'allocation puisse lui être versée dès le premier mois d'ouverture des droits. Garantir un revenu minimum dès la fin de la détention, en mobilisant les dispositifs de droit commun, contribue aussi à éloigner le risque de récidive en garantissant un minimum de ressources à la personne qui vient d'être libérée.

L'accès aux papiers d'identité :
la nécessaire implication des préfectures

Disposer d'une carte nationale d'identité (CNI) constitue souvent le préalable indispensable à la réalisation de démarches concrètes de réinsertion.

Partant de ce constat, le ministère de la justice a diffusé, le 23 octobre 2012, une circulaire relative à la demande et à la délivrance de la carte nationale d'identité aux personnes détenues. Cette circulaire invite les SPIP à faire preuve d'une vigilance toute particulière à l'entrée et à la sortie de détention pour identifier les personnes ne disposant pas d'une pièce d'identité valide. Le cas échéant, il revient aux SPIP de collecter les données et les pièces nécessaires à la constitution du dossier de demande de renouvellement de la CNI, puis d'informer la personne détenue de l'état d'avancement de son dossier.

Lors de leur déplacement à l'établissement pénitentiaire des Baumettes, les rapporteurs ont appris que la préfecture des Bouches-du-Rhône avait développé une démarche proactive, envoyant des agents dans l'établissement pénitentiaire pour faciliter les démarches. Mais les associations d'insertion notent que toutes les préfectures n'ont pas le même niveau d'implication. Les services de l'État gagneraient à s'inspirer des meilleures pratiques afin que l'absence de papiers d'identité ne fasse pas obstacle au bon déroulement du parcours de réinsertion.

2. L'indispensable partenariat avec le service public de l'emploi

Le partenariat entre le ministère de la justice et Pôle emploi est ancien puisqu'il remonte à 1993. Il est formalisé dans une convention-cadre nationale, renouvelée tous les trois ans, qui prévoit l'intervention de conseillers Pôle emploi/Justice (CPEJ) dans les établissements pénitentiaires. Le ministère de la justice finance ce partenariat à hauteur d'environ 800 000 euros chaque année. En 2022, 164 conseillers intervenaient dans les établissements, ce qui correspond à 70 ETPT, les conseillers passant une partie de leur temps en agence. Environ 9 500 personnes détenues sont accompagnées par Pôle emploi chaque année.

En milieu ouvert, les PPSMJ ont accès aux dispositifs de droit commun, ce qui implique de travailler la transition entre le « dedans » et le « dehors » pour assurer la continuité des parcours.

Pôle emploi comme la DAP paraissent satisfaits de la qualité de leur partenariat, la représentante de Pôle emploi entendue par les rapporteurs qualifiant le SPIP de « tour de contrôle », ce qui est une manière d'insister sur son rôle de coordination et d'orientation. Des bonnes pratiques sont mises en oeuvre dans certaines régions : dans les Hauts-de-France et en Nouvelle-Aquitaine, ont été désignés des « conseillers relais » emploi-justice qui garantissent un bon passage de témoin avec le SPIP.

La DAP regrette cependant, en ce qui concerne le suivi des personnes en détention, que le suivi par Pôle emploi débute seulement dans les six mois précédant la sortie de détention . On peut comprendre que les conseillers souhaitent concentrer leurs efforts sur les personnes qui vont bientôt revenir sur le marché de l'emploi. À l'usage, il semble cependant que le début du suivi soit trop tardif au regard des besoins d'un public souvent très éloigné de l'emploi et qui réclame donc un travail au long cours. Il serait ainsi intéressant que le suivi puisse démarrer plus en amont, en fonction de l'évaluation réalisée par le SPIP et par Pôle emploi de la distance à l'emploi de la PPSMJ.

De leur côté, les conseillers de Pôle emploi regrettent que certains parcours de formation et de retour à l'emploi qu'ils échafaudent n'aboutissent pas en raison d'une décision mal anticipée du JAP, soit qu'il refuse une libération anticipée, soit qu'il accorde un aménagement de peine plus tôt que prévu. Ces aléas sont inhérents à l'exercice de l'office du juge. Mais le SPIP a sans doute un rôle à jouer pour assurer mieux encore l'interface entre les préoccupations du JAP et celles des conseillers de Pôle emploi.

Le partenariat avec les missions locales paraît quant à lui moins structuré. Pourtant, les missions locales disposent d'une expertise en matière d'accompagnement global des jeunes de seize à vingt-cinq ans, qui peut être précieuse auprès de jeunes condamnés majeurs. L'accord-cadre qui liait le ministère de la justice et l'Union nationale des missions locales (UNML) sur la période 2017-2020 est arrivé à échéance et n'a pas été renouvelé, en raison notamment de l'absence de participation financière du ministère de la justice.

Néanmoins, des conseillers des missions locales interviennent toujours dans les établissements pénitentiaires. En 2015, date de la dernière enquête effectuée par l'UNML dans son réseau, 50 ETPT avaient été recensés. Des accords-cadres ont parfois été signés au niveau régional, par exemple en Ile-de-France, dans le Grand Est ou en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Des chefs d'établissement signent des conventions avec les missions locales présentes dans leur territoire, mais elles portent plus sur les aspects réglementaires et de sécurité que sur la réinsertion des jeunes détenus.

Au total, le ministère de la justice paraît peu investir ce partenariat avec les missions locales, alors que les jeunes détenus n'accèdent pas toujours spontanément aux dispositifs de droit commun, faute de papiers ou d'hébergement, et ont donc besoin d'un accompagnement intensif.

Proposition n° 9 : Relancer le partenariat avec les missions locales en concluant une nouvelle convention pluriannuelle, assortie d'un financement adapté.

Enfin, les rapporteurs ont noté avec intérêt qu'une trentaine de SPIP avaient décidé, de leur propre initiative, de s'inscrire dans les services publics de l'insertion et de l'emploi (SPIE). Structures souples, les SPIE rassemblent toutes les organisations appelées à participer au retour à l'emploi d'une personne (Pôle emploi et mission locale, caisse d'allocations familiales, centre communal d'action sociale, conseil départemental, associations...). Il est trop tôt pour en dresser un bilan mais il conviendra, le moment venu, d'évaluer si la participation des SPIP apporte une plus-value pour le retour à l'emploi des PPSMJ.

3. L'accès à la formation

Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, la formation professionnelle des personnes détenues est une compétence des régions, et non plus de l'État. Le transfert de compétences s'est opéré à partir de 2015 pour les établissements en gestion publique et de 2018 pour les établissements en gestion déléguée. Dans les établissements construits en partenariat public-privé avant 2014, la formation relève encore du prestataire privé jusqu'à l'arrivée à échéance des contrats.

Les rapporteurs n'ont pas étudié de manière approfondie la question de la formation professionnelle des détenus, qui se situait à la lisière de l'objet de la mission d'information. Elles rappellent cependant que le transfert aux régions s'est accompagné d'une baisse sensible du nombre de personnes détenues bénéficiant d'une formation, passé de 20 000 en 2007 à moins de 9 000 aujourd'hui.

Pourtant, dans ses réponses écrites au questionnaire des rapporteurs, Régions de France indique que « les régions dressent un bilan positif de la loi du 5 mars 2014 dans son volet formation des personnes détenues. Après une phase d'acculturation et de clarification du rôle et des compétences de chacun, la Région est aujourd'hui insérée dans l'écosystème de la détention. Les relations sont plus fluides avec l'administration pénitentiaire, notamment pour la co-élaboration des appels d'offres, la détermination conjointe des besoins et de l'évolution de l'offre en fonction de la durée des peines et des plateaux techniques ». Régions de France met également en avant une amélioration récente de la proportion de détenus ayant bénéficié d'un dispositif de formation professionnelle, ce taux étant passé de 7 % en 2020 à 8,42 % en 2021.

Une convention nationale, renouvelée en 2022, lie le ministère de la justice à Régions de France jusqu'en 2026. Elle vise à partager les objectifs, harmoniser les pratiques entre les régions et préciser les modalités de suivi et d'évaluation de la politique mise en oeuvre. L'augmentation du nombre de places en formation professionnelle et de la part des formations qualifiantes figurent au premier rang des priorités arrêtées par la convention.

A l'heure actuelle, les liens entre les SPIP et les conseils régionaux demeurent d'intensité très variable selon les territoires. Selon Régions de France, la relation est quasi-quotidienne, en Auvergne-Rhône-Alpes, entre le SPIP et l'interlocuteur référent à la région. En revanche, dans certains départements bretons, une rencontre est organisée seulement une fois par à an l'occasion d'un comité de pilotage dédié à la formation professionnelle. De même, en Région Sud-Provence-Alpes-Côte d'Azur, les SPIP participent à quelques réunions d'information afin de prendre connaissance des actions de formation menées, mais ne constituent pas un interlocuteur privilégié.

Des marges de progrès existent donc pour resserrer les liens, dans de nombreux territoires, entre les SPIP et les conseils régionaux. Compte tenu du faible niveau de qualification des personnes détenues, l'accès à la formation constitue bien souvent le préalable à leur insertion sur le marché du travail. La DAP suggère d'affecter dans les SPIP des conseillers d'insertion professionnelle (CIP), qui seraient chargés de l'évaluation socioprofessionnelle des personnes détenues et travailleraient à leur orientation. Le recrutement de tels conseillers faciliterait certainement les échanges avec les régions pour la formation, ainsi qu'avec Pôle emploi ou les missions locales pour la recherche d'emploi.

4. L'intérêt d'une ouverture au numérique en détention

Au cours de leurs travaux, les rapporteurs ont été à plusieurs reprises alertés sur le problème posé par le faible accès des détenus à internet. Le cadre en vigueur, issu d'une circulaire de la DAP du 13 octobre 2009 36 ( * ) , est jugé trop restrictif par les professionnels qui oeuvrent à la réinsertion des détenus.

D'une manière générale, alors que le numérique est partout présent dans les sociétés modernes, il paraît difficile de préparer les personnes incarcérées à leur retour à la liberté en les tenant à l'écart de l'usage d'internet. La situation d'« illectronisme » qui peut en résulter ne constitue pas un gage de réinsertion.

Pendant la durée de la détention, les CPIP essaient souvent de responsabiliser les personnes détenues, en les incitant à accomplir elles-mêmes certaines démarches. Mais l'absence d'accès à internet a au contraire pour effet de les rendre dépendantes de leur CPIP. Le suivi d'une formation, la recherche d'emploi sont également compliqués. L'accroissement du recours au numérique pour la formation fait d'ailleurs partie des priorités retenues dans la convention qui lie l'administration pénitentiaire à Régions de France.

La DAP est désireuse d'avancer sur ce dossier. Une expérimentation, le Numérique en Détention (NED), est en cours à la maison d'arrêt de Dijon depuis avril 2021, au centre de détention de Melun depuis novembre 2021 et à la maison d'arrêt de Strasbourg depuis le début de l'année 2023. Les personnes détenues ont accès à un Espace Numérique de Travail (ENT) leur permettant de suivre des enseignements. Elles pourront consulter IPRO 360°, la plateforme de l'insertion professionnelle des PPSMJ, qui ouvre accès à une gamme de services : une cartographie des activités de travail pénitentiaire, de formation professionnelle et des dispositifs d'accompagnement vers l'emploi ; les outils de Pôle emploi permettant de rechercher un emploi ou une formation professionnelle à l'extérieur ou de s'informer sur ses droits ; enfin un dossier professionnel intégrant l'ensemble des informations et documents nécessaires à la PPSMJ pour assurer sa réinsertion professionnelle.

Les rapporteurs ne méconnaissent pas les obstacles à l'usage du numérique en détention : il ne doit pas se développer au détriment de la sécurité dans les établissements pénitentiaires, ce qui suppose de mettre en place des solutions techniques adaptées. Elles encouragent cependant la DAP à poursuivre l'expérimentation en cours, et à en dresser dès que possible un bilan, en formant le voeu que le retour d'expérience sera suffisamment positif pour autoriser une généralisation rapide, qui faciliterait grandement le travail des professionnels de l'insertion et de la probation.

Proposition n° 10 : Promouvoir un accès encadré au numérique en détention, pour que la personne détenue gagne en autonomie dans son parcours de réinsertion et pour faciliter les échanges avec les partenaires extérieurs.

EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 15 FÉVRIER 2023

M. François-Noël Buffet , président . - Nous abordons maintenant l'examen du rapport d'information sur les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP).

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Nous avons le plaisir de vous présenter les conclusions de la mission d'information que nous avons conduite au cours de l'année écoulée afin d'évaluer l'activité des SPIP.

Ces services demeurent peu connus, alors qu'ils jouent un rôle important dans la chaîne pénale. Ils assurent l'articulation entre le « dedans », la prison, et le « dehors », la vie en dehors de la détention. Ils assument d'abord une mission d'aide à la décision auprès des magistrats en leur apportant des informations sur les personnes placées sous main de justice. Ils sont également chargés de contrôler le respect des obligations imposées par le juge, par exemple dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis probatoire. Enfin, ils travaillent à prévenir la récidive et à favoriser la réinsertion. Ils sont en quelque sorte une tour de contrôle.

Alors pourquoi évaluer les SPIP ? Ces services ont bénéficié de renforts substantiels depuis bientôt dix ans. Entre 2014 et 2023, leurs effectifs sont passés de 4 000 à 6 700 agents. La création d'un millier de postes a été décidée en 2014 par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, puis la loi de programmation pour la justice 2018-2022 a autorisé 1 500 embauches supplémentaires. S'y est ajoutée une revalorisation statutaire puisque le corps des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP) est passé de la catégorie B à la catégorie A de la fonction publique en janvier 2019. Un bilan d'étape nous a donc semblé utile afin d'apprécier l'impact de cet effort budgétaire et d'estimer s'il demeure des besoins insatisfaits.

Trop souvent, l'activité des SPIP est évoquée à l'occasion d'un drame, par exemple si une personne condamnée commet un nouveau crime après une libération conditionnelle. Les CPIP vivent mal ces mises en cause répétées, et il a nous a paru important de procéder à une évaluation plus objective et dépassionnée de leur activité. Ces agents sont extrêmement investis dans leur métier.

On dénombre aujourd'hui 104 SPIP, en métropole et en outre-mer, les services étant organisés à l'échelle du département ou de la collectivité. Le directeur du SPIP est placé sous l'autorité du directeur interrégional des services pénitentiaires et dépend, au niveau central, de la direction de l'administration pénitentiaire (DAP), plus particulièrement de la sous-direction en charge de l'insertion et de la probation. Au sein de chaque département, le SPIP peut compter des antennes, dédiées à un ou plusieurs établissements pénitentiaires, au milieu ouvert ou à compétence mixte. La structuration des services a beaucoup progressé depuis une vingtaine d'années, la création, en 2005, du corps des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation (DPIP) marquant une étape importante dans ce processus, de même que la création récente d'organigrammes de référence.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Marie Mercier vient de rappeler que les SPIP avaient bénéficié d'importants recrutements. La quarantaine d'auditions auxquelles nous avons procédé ont cependant montré qu'ils avaient connu une transformation profonde de leur métier qui va bien au-delà de cet aspect quantitatif.

Les SPIP sont nés assez récemment, en 1999, de la fusion des comités de probation et d'assistance aux libérés et des services socio-éducatifs qui intervenaient dans les établissements pénitentiaires. À l'origine, leur activité s'inscrivait donc dans le champ du travail social et éducatif, ce qui n'est plus vraiment le cas aujourd'hui. La culture socio-éducative reste néanmoins encore très présente.

Sous l'influence de la recherche menée dans les pays anglo-saxons - la France était à la traîne sur ce sujet -, l'activité des CPIP a en effet évolué pour s'ancrer désormais dans la criminologie. On est passé d'une mission socio-éducative à une mission d'évaluation du risque de récidive. Après le diagnostic sur ce risque, le CPIP élabore un programme de prévention de la récidive, avec des actions individualisées. Le recrutement des CPIP s'est modifié en conséquence, faisant désormais la part belle aux juristes, de même que les enseignements dispensés par l'École nationale d'administration pénitentiaire (Enap).

Au sein du corps des CPIP, coexistent aujourd'hui deux cultures professionnelles : les plus anciens se considèrent encore comme des travailleurs sociaux et regrettent l'évolution de leur métier, les plus jeunes se perçoivent comme des psychologues-criminologues. La tendance est la même dans les pays anglo-saxons et nordiques.

Si l'on dresse un premier bilan des transformations que nous venons d'esquisser, on relève un certain nombre de résultats positifs. Malgré l'augmentation du nombre de personnes détenues et du nombre de personnes suivies en milieu ouvert, les recrutements effectués ont permis de faire diminuer le nombre de dossiers suivis par chaque CPIP, passé de 80 il y a cinq ans à environ 70 aujourd'hui, avec d'importantes différences territoriales. Le renforcement des SPIP a par ailleurs accompagné la montée en puissance de la surveillance électronique.

Les juges de l'application des peines (JAP) perçoivent une amélioration de la qualité des écrits qui leur sont remis. La direction de l'administration pénitentiaire a mis en place un référentiel des pratiques opérationnelles (RPO 1), une méthodologie importée des pays anglo-saxons, qui a contribué à harmoniser les pratiques des professionnels, même s'il ne faut pas tomber dans une systématisation des pratiques et faire disparaître la dimension humaine. Les SPIP se sont investis avec succès dans la lutte contre la radicalisation et contre les violences intrafamiliales.

Certains de nos interlocuteurs ont toutefois exprimé un jugement plus critique. L'Association nationale des visiteurs de personnes sous main de justice a ainsi déploré que trop de sorties de détention restent insuffisamment préparées. Le Conseil national des barreaux (CNB) a également regretté que les rapports remis par le SPIP au juge de l'application des peines soient transmis trop tardivement à l'avocat, ce qui ne lui ne permet pas de préparer convenablement la défense de son client. Le CNB a perçu des lacunes concernant la maîtrise du droit des étrangers chez certains conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation.

Il est difficile d'apprécier si l'effort consenti en faveur des SPIP a eu un impact sur la récidive. La direction de l'administration pénitentiaire est consciente de cette difficulté et elle souhaite désormais bénéficier d'outils méthodologiques pour appréhender la récidive sur la base d'une comparaison avec un groupe de contrôle, ce qui permettrait de mieux évaluer l'efficacité des peines et de la probation.

Dans ce contexte, nous croyons utile de renforcer pendant encore quelques années les effectifs des SPIP, en veillant à garantir la pluridisciplinarité des équipes. Les recrutements opérés jusqu'à présent ont permis de remédier aux manques les plus criants, sans que la situation devienne pour autant confortable.

Nous proposons de viser un ratio de 60 dossiers par CPIP en moyenne - je rappelle que nous en sommes plutôt à 70, voire plus dans certains territoires. Ce ratio est souvent cité comme une référence dans les comparaisons européennes. Le recrutement de 600 CPIP supplémentaires permettrait d'atteindre cet objectif. L'investissement peut être source d'économies s'il permet d'obtenir de meilleurs résultats en termes de réinsertion. Il doit bien sûr s'accompagner d'une politique immobilière adaptée. Lorsque je me suis rendue au SPIP de Bordeaux dans mon département de la Gironde, j'ai constaté que les conditions n'étaient pas optimales.

Se pose aussi la question de l'attractivité de la filière : si le statut des CPIP a été revalorisé avec leur passage en catégorie A, le métier de directeur pénitentiaire d'insertion et de probation (DPIP) demeure en revanche insuffisamment attractif. L'an dernier, plus de 90 postes de DPIP étaient vacants. Les directeurs constatent que l'écart de rémunération avec les CPIP s'est beaucoup réduit. La personnalité du directeur et sa capacité à faire travailler ensemble une série de métiers sont également des facteurs importants. Une revalorisation de leur traitement indiciaire pour le rapprocher des A+ mérite d'être envisagée. Son impact budgétaire serait modique puisque l'on compte moins de 500 DPIP en équivalent temps plein.

J'ai évoqué le tournant vers la criminologie qui a fait évoluer les pratiques professionnelles des CPIP. Pour porter ses fruits, il doit s'accompagner à notre sens d'une véritable pluridisciplinarité dans les services. Il ne faut pas oublier l'aspect insertion et accompagnement social, ce qui suppose la mise en place d'un écosystème d'acteurs. À Marseille, nous avons vu que tous les acteurs étaient réunis autour de la table, chacun dans son rôle.

L'ancrage de l'identité professionnelle des CPIP dans le champ pénal implique, en contrepartie, le recrutement d'assistants de service social. Leur nombre dans les SPIP est passé en cinq ans de 61 à 104. En moyenne, on en compte donc à peine plus d'un par département ! L'objectif serait de porter le nombre d'assistants de service social à 150.

Les personnes entendues ont en outre insisté sur l'importance des fonctions support. Certaines organisations syndicales plaident pour la création d'un greffe des services d'insertion et de probation. Nous n'avons pas retenu cette proposition - d'autant que nous manquons déjà de greffiers -, mais il nous paraît important de rappeler la nécessité de disposer dans les SPIP d'un personnel administratif bien formé, afin que les conseillers puissent se concentrer sur leur coeur de mission.

Enfin, il nous faut évoquer l'apport des surveillants pénitentiaires au fonctionnement des SPIP. Leur présence est indispensable : ils apportent un regard complémentaire de celui du CPIP sur le comportement de la personne condamnée qu'ils observent au quotidien.

J'évoquerai à présent les questions d'organisation avant de rendre la parole à Marie Mercier qui traitera de l'enjeu central des partenariats.

Au cours des États généraux de la justice a été débattue l'idée de créer une agence de la prévention de la récidive et de la probation. Cette proposition était défendue par le groupe thématique « justice pénitentiaire et de réinsertion », mais elle n'a pas été retenue dans le rapport définitif, le rapport Sauvé.

Pour ses promoteurs - je pense notamment à Isabelle Gorce, ancienne directrice de l'administration pénitentiaire -, la création d'une agence présenterait plusieurs avantages : souplesse dans l'organisation et le recrutement, positionnement interministériel plus affirmé et « décentrage » par rapport au poids de la gestion carcérale. Mais, selon nous, elle ferait aussi courir le risque d'une coordination plus difficile avec la DAP et celui d'une moindre continuité entre le milieu fermé et le milieu ouvert, ce qui explique que nous ne l'ayons pas retenue.

Plutôt qu'un grand « mécano » institutionnel, nous insistons sur l'importance du travail interministériel, qui doit être organisé au niveau national et décliné localement. En mars 2022, une feuille de route a été signée par le ministre de la justice, la ministre du travail et la ministre déléguée à l'insertion pour accompagner la réinsertion professionnelle des personnes placées sous main de justice, ce qui est un exemple de bonne pratique.

Nous soulignons également l'intérêt qu'il y aurait à resserrer les liens entre l'administration pénitentiaire et le monde universitaire pour développer la recherche en criminologie, ainsi que l'évaluation des politiques pénales.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Le dernier volet de notre étude est consacré aux relations qu'entretient le SPIP avec l'autorité judiciaire, avec les associations socio-judiciaires et avec ses partenaires dans le champ de l'emploi et de l'insertion. Le SPIP doit préparer la sortie, sur le plan tant du logement que de l'emploi.

C'est avec le juge de l'application des peines (JAP) que le SPIP travaille le plus étroitement, notamment pour préparer les mesures d'aménagement de peine. La loi « Justice de proximité » du 8 avril 2021 a transféré au directeur pénitentiaire d'insertion et de probation certaines tâches assumées jusque-là par le JAP, en ce qui concerne la mise en oeuvre des peines de travail d'intérêt général. D'autres ajustements de ce type seraient à notre avis envisageables, ce qui allégerait la charge de travail des JAP tout en donnant davantage de responsabilités aux DPIP.

Avec le juge d'instruction, les interactions sont plus ponctuelles : le SPIP peut être amené à réaliser à sa demande une enquête sociale ou à mettre en oeuvre une mesure de sûreté. Les juges d'instruction que nous avons entendus nous ont cependant alertées sur la nécessité de mieux sensibiliser les CPIP aux contraintes propres à l'instruction, qui imposent le respect d'un certain formalisme pour qu'un document puisse être soumis au contradictoire. C'est un point sur lequel la formation des CPIP pourrait donc être améliorée.

Pour resserrer les liens entre le SPIP et la formation de jugement, nous vous proposons également d'expérimenter une permanence du SPIP auprès du tribunal correctionnel, ce qui permettrait d'amorcer sans délai le suivi du condamné dès le prononcé de la peine.

L'activité d'insertion et de probation se caractérise par la coexistence d'un secteur public - les SPIP - et d'associations socio-judiciaires de droit privé, qui peuvent se voir confier les mêmes missions. Nous avons observé que la relation entre ces deux catégories d'acteurs était parfois empreinte de méfiance alors qu'ils poursuivent le même objectif.

Historiquement, le secteur associatif est surtout présent sur le pré-sentenciel, et les SPIP sur le post-sentenciel. Au moment de l'adoption de la loi de programmation pour la justice, la Chancellerie avait pour ambition de repositionner les SPIP sur le pré-sentenciel, notamment en leur confiant plus d'enquêtes sociales rapides, mais cette orientation semble avoir été appliquée de manière très inégale sur le territoire au vu des témoignages que nous avons recueillis.

Nous avons réfléchi à ce qui pourrait constituer une répartition des tâches optimales entre le secteur public et le secteur associatif, mais nous avons rapidement rencontré un écueil : le tissu associatif étant très hétérogène selon les territoires, il ne nous paraît pas réaliste d'appliquer de manière rigide une formule unique.

En revanche, pour renforcer la confiance entre les acteurs, nous pensons qu'il serait judicieux de mettre en place une habilitation des associations, sur le modèle de ce qui existe pour la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Une telle habilitation, renouvelée régulièrement, apporterait aux magistrats la garantie de la qualité de la prise en charge et de la probité des personnels exerçant au sein de ces structures.

Par ailleurs, je crois utile d'évoquer les partenariats tissés entre les SPIP et les acteurs de l'insertion, de la formation et de l'emploi. Le SPIP a besoin de s'appuyer sur des partenaires extérieurs pour construire des parcours cohérents et faire le lien entre le milieu fermé et le milieu ouvert.

Dans le champ de l'insertion, nos interlocuteurs ont souligné que la question de l'accès à un logement à la fin de la détention restait souvent problématique. Les SPIP devraient travailler plus en amont avec les services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO). Un recours plus fréquent au placement à l'extérieur permettrait également d'organiser des transitions plus fluides entre la détention et la fin de la peine. Il faut préparer la sortie et éviter la récidive.

Concernant le service public de l'emploi, nous avons observé que les rapports avec Pôle emploi étaient anciens et structurés, tandis que le partenariat avec les missions locales paraît quelque peu négligé. La convention entre l'Union nationale des missions locales et le ministère de la justice, arrivée à échéance en 2020, n'a jamais été renouvelée. Conclure une nouvelle convention serait une bonne manière de relancer le partenariat au service de la réinsertion des jeunes placés sous main de justice.

Dans le champ de la formation, les échanges que nous avons eus avec Régions de France suggèrent que les rapports entre les SPIP et les conseils régionaux demeurent très disparates selon les territoires. Si en Auvergne-Rhône-Alpes des échanges existent au quotidien entre le SPIP et le référent formation à la région, dans d'autres territoires les rapports se résument à quelques réunions d'information dans l'année. Beaucoup reste donc à faire alors que le nombre de personnes détenues bénéficiant d'une formation a baissé depuis le transfert de cette compétence aux régions, passant de 20 000 en 2007 à 9 000 aujourd'hui. Une dégringolade, alors même que les formations sont bien suivies par les détenus !

Un élément transversal qu'il me paraît important de mentionner pour terminer concerne l'accès au numérique en détention. Alors que le numérique est partout présent dans nos sociétés, il est paradoxal de vouloir préparer la sortie de détention en interdisant l'utilisation d'internet. Les CPIP sont tentés de responsabiliser les personnes détenues en leur faisant accomplir seules certaines démarches, mais l'absence d'accès à internet a au contraire pour effet de les rendre dépendantes de leur CPIP. La recherche d'emploi, le suivi d'une formation sont également compliqués. Désireuse d'avancer sur ce sujet, la DAP mène une expérimentation dans plusieurs établissements pénitentiaires. Sans méconnaître les enjeux en termes de sécurité, nous espérons que cette expérimentation sera concluante et que l'accès au numérique pourra être élargi dans l'ensemble des établissements.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Pour conclure cette présentation, j'aimerais replacer notre objet d'étude dans le contexte plus général de notre politique pénale.

Il va sans dire que les efforts consentis pour remédier aux sous-effectifs dans les SPIP seront de peu de portée si le nombre de personnes emprisonnées ou suivies en milieu ouvert continue d'augmenter. Il est difficile, quelle que soit la bonne volonté des personnels, d'accompagner vers la réinsertion les personnes détenues lorsque le taux d'occupation de l'établissement pénitentiaire atteint 150 % ou 200 %, comme dans la prison de Gradignan.

Les courtes peines de prison sont particulièrement difficiles à gérer pour le SPIP, car elles ne permettent pas d'amorcer un véritable travail de réinsertion. Dans ce cas, le risque est grand que la prison fonctionne surtout comme une école de la délinquance. La loi de programmation pour la justice comportait un « bloc peine » qui avait pour ambition de réduire le nombre de courtes peines d'emprisonnement. À ce jour, le bilan que l'on peut en dresser est décevant : le rapport Sauvé indique que le prononcé de peines comprises entre un et six mois d'emprisonnement est devenu moins fréquent, mais que le nombre de peines entre six mois et un an a augmenté en parallèle, entraînant un allongement de la durée moyenne des courtes peines.

Nous ne pourrons faire l'économie à terme d'une évaluation de ces dispositions qui conditionnent en grande partie le succès ou l'échec de nos efforts en matière de réinsertion et de probation. D'où nos dix propositions, que nous avons organisées en deux chapitres : la poursuite de l'investissement en veillant à garantir la pluridisciplinarité des services ; des services au coeur d'un réseau d'acteurs.

M. François-Noël Buffet , président . - Merci pour ce travail précis.

M. Alain Marc . - Je félicite les rapporteures pour leur travail. Leurs conclusions corroborent ce que nous constatons régulièrement lors de la préparation de l'avis budgétaire sur l'administration pénitentiaire. Je pense particulièrement à la question de l'évaluation, qui est, pour l'ensemble des politiques publiques, nettement insuffisante. D'autant que l'évaluation est souvent conduite en interne, par le ministère de la justice... Il faudrait prendre exemple sur les pays anglo-saxons, dans lesquels l'évaluation est faite de façon régulière et approfondie.

S'agissant de la politique immobilière, le ministère loue, quelquefois à des prix exorbitants, des locaux, pas forcément toujours adaptés. Pourriez-vous m'apporter des précisions sur ce point ?

Lors de ma visite de l'Enap l'année dernière, le problème du faible nombre de candidats au concours de surveillant pénitentiaire avait été évoqué. La situation est-elle la même pour les CPIP ? Disposez-vous de chiffres pour 2022 ?

Mme Brigitte Lherbier . - Je connais bien le sujet pour avoir dirigé un Institut d'études judiciaires pendant vingt-cinq ans. La criminologie est une matière intellectuellement passionnante, que les étudiants suivaient pour préparer les concours de la magistrature ou de commissaire de police. Mais ils ne souhaitaient pas en faire leur métier, car ils avaient du mal à trouver ensuite des postes correspondant à leur niveau de formation.

Les SPIP font peur ! À Tourcoing et à Roubaix, nous avons mis en place de nombreux chantiers d'insertion et des travaux d'intérêt général, en lien avec les SPIP. La collaboration avec les JAP permet de trouver les meilleurs candidats à la réinsertion. Même en faisant preuve d'une grande volonté, il est toutefois très difficile de trouver des places pour les anciens détenus en raison de la frilosité et des craintes de ceux qui pourraient les accueillir.

M. Alain Richard . - Je salue la qualité du travail de nos collègues. L'une de leurs recommandations me paraît particulièrement judicieuse, celle de prévoir l'agrément des associations. Le chemin est escarpé : dans notre pays, le droit des associations est une vache sacrée !

Les associations péri-administratives sont devenues une technique de gestion de services publics dans un certain nombre de domaines socio-éducatifs. Ce sont des associations sans associés : le noyau des intervenants est constitué de personnes respectables, souvent issues du milieu professionnel, comme des procureurs ou des avocats à la retraite. Évaluer ces personnes pour déterminer de la pertinence d'une association relève de la fiction ! Le mécanisme d'agrément permettrait en réalité de faire une inspection du personnel salarié. Si une telle disposition était inscrite dans la loi, les termes choisis devront être bien pesés. Avons-nous des précédents d'homologations d'associations de ce type ? Le contrôle devrait porter sur la réalité de la prestation de service.

M. Guy Benarroche . - Je remercie les rapporteures pour l'exhaustivité de leur travail. Les SPIP ont un rôle majeur pour éviter la récidive et réinsérer les personnes qui sortent de détention.

À Marseille, les CPIP suivent une centaine de dossiers, bien au-delà de la moyenne nationale. De nombreux personnels quittent leur poste, et les budgets alloués ne sont pas suffisants.

Le rapport Sauvé préconisait de revaloriser les DPIP pour les rapprocher des A+. Leur maintien en catégorie A, comme les CPIP, pose problème pour l'évolution de carrière de ce corps. Le garde des Sceaux avait envisagé une mise en place de cette mesure de revalorisation en 2023 ou 2024. Avez-vous des éléments d'information sur ce sujet ?

Mme Catherine Di Folco . - Je remercie les rapporteures pour leur travail très fourni.

De nombreuses préconisations ont des conséquences financières. Quelle serait l'enveloppe financière nécessaire pour leur mise en oeuvre ?

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Sur l'évaluation, nous sommes tous d'accord ! Certains analystes disent qu'une politique publique est là non pour résoudre un problème, mais pour révéler la manière selon laquelle on envisage ce problème. L'évaluation de notre politique pénale montrerait qu'on accorde davantage d'importance à la question pénitentiaire qu'à la prévention de la récidive. Le rapport Sauvé est intéressant car il ouvre d'autres champs de perception.

En ce qui concerne la politique immobilière, j'ai constaté à Bordeaux que les locaux étaient également loués, à des tarifs élevés. Le déménagement est repoussé d'année en année. L'argument souvent invoqué est celui de la flexibilité qu'offrirait une location, qui permet de s'adapter aux besoins.

S'agissant du dernier concours externe de CPIP, le nombre d'inscrits était de 2 332, mais 842 candidats seulement étaient présents aux épreuves : 410 admissibles, et 211 admis. La sélection est bonne si on la rapporte au nombre d'inscrits, moins si on la compare au nombre de candidats ayant réellement passé l'épreuve.

M. Alain Marc . - Le tamis a de larges mailles !

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Le passage en catégorie A a tout de même amélioré l'attractivité du métier. Nous n'avons pas d'information précise sur la revalorisation du statut des directeurs.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Je partage la réflexion de Brigitte Lherbier. Comment donner envie de faire le métier de CPIP ?

Monsieur Richard, en ce qui concerne l'agrément, il faudrait s'inspirer du mécanisme d'habilitation pour les associations intervenant dans le champ de la PJJ et de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Les sachants qui occupent leur retraite dans les associations s'octroient en quelque sorte un mandat à vie.

M. Alain Richard . - Heureusement qu'ils sont là !

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Oui, et nous en sommes ravis. Mais ils ne doivent pas, j'y insiste, s'octroyer un mandat à vie.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - L'agrément permettrait de prévoir des critères d'évaluation, et présenterait l'avantage d'être valable pour une certaine durée, par exemple cinq ans. Il est bon de devoir rendre des comptes.

Nous n'avons pas d'éléments précis sur le chiffrage financier de nos propositions.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Nous attendons la réponse de la DAP que nous avons interrogée à ce sujet.

Mme Laurence Harribey , rapporteure . - Nous avons été passionnées par le sujet, mais nous devons rester humbles. Il s'agit d'un rapport d'étape, et nous ne proposons pas de faire une révolution institutionnelle. La commission des lois doit continuer à suivre ce sujet, car nous assistons à un changement important du métier.

Mme Marie Mercier , rapporteur . - Il faudrait faire un effort budgétaire, mais il serait modeste au regard de l'objectif, éviter la récidive. Les directeurs savent que certains détenus qui sortent risquent de retourner en prison. Comme l'a dit l'une des personnes que nous avons entendues, il ne faut pas construire de prisons sinon elles se remplissent... Nous avons visité le centre pénitentiaire des Baumettes-II : alors qu'il venait d'être inauguré, il était déjà plein !

M. François-Noël Buffet , président . - Dans le cadre des États généraux de la justice, nous avons fortement insisté non seulement sur l'importance de prévoir les moyens humains, matériels et financiers nécessaires pour permettre aux SPIP d'accomplir leurs missions, mais également sur la nécessité d'une évaluation.

Les recommandations sont adoptées.

La commission adopte le rapport d'information et en autorise la publication.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de la justice

Direction de l'administration pénitentiaire (DAP)

M. Laurent Ridel , directeur

Fédération nationale Citoyens et Justice

M. Stéphane Landreau , directeur général

Mme Stéphanie Lassalle , conseillère technique post sententiel

École nationale d'administration pénitentiaire (Enap)

M. Jean-Philippe Mayol , directeur adjoint

Mme Nathalie Jaffre , directrice de la formation

Mme Rodrigues Deliot , chef adjoint du département probation et criminologie

M. Brahim Hatchane , chef de l'unité de formation des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation (CPIP)

Mme Laurence Soulie , cheffe adjointe de l'unité de formation des directeurs (DSP et DPIP)

Conférence nationale de procureurs de la République (CNPR)

M. Arnaud Laraize , procureur de la République près le tribunal judiciaire de Sens

M. Nicolas Septe , procureur de la République près le tribunal judiciaire d'Ajaccio

Conférence Nationale des Directeurs Pénitentiaires d'Insertion et de Probation (CNDPIP)

M. Loïc Nael , directeur fonctionnel du SPIP de la Vienne

M. Pierrick Leneuveu , directeur fonctionnel des SPIP Gard et Lozère

M. François Monteso , directeur fonctionnel du SPIP d'Eure-et-Loir

Organisations représentatives des personnels d'insertion et de probation

Syndicat FO Justice cadres supérieurs

Mme Mounia El Bouch , membre, directeur des services pénitentiaires

Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP-CFDT)

M. Jean-François Fogliarino , directeur fonctionnel SPIP du Bas-Rhin

Mme Nina Miel , directeur pénitentiaire d'insertion et de probation de Tarbes

Syndicat national pénitentiaire - Force ouvrière direction (SNP-FO Direction)

Mme Lorraine Vin , secrétaire nationale, directrice des services pénitentiaires

Mme Valérie Mousseef , secrétaire nationale FO Direction et directrice de la maison d'arrêt de Nice

Union nationale des directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation (UNDPIP-CFE-CGC)

Mme Laure Soudre , secrétaire générale (DISP Bordeaux)

Mme Constance Margrit , secrétaire générale adjointe (DISP Marseille)

CGT-Insertion probation

Mme Marion Bonneaud , secrétaire nationale, conseillère pénitentiaire d'insertion et de probation

M. Julien Magnier , secrétaire national, conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation

Union FO Justice CPIP

Mme Farida Ed-Dafiri , adjointe au Secrétaire général

Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire - Fédération syndicale unitaire (SNEPAP-FSU)

M. André Blanc , directeur pénitentiaire d'insertion et de probation

Mme Annabelle Bouche , conseillère pénitentiaire d'insertion et de probation

Mme Marianne Girard , conseillère pénitentiaire d'insertion et de probation

Mme Virginie Sauteraud , conseillère pénitentiaire d'insertion et de probation

Association nationale des juges de l'application des peines (ANJAP)

Mme Céline Bertetto , vice-présidente chargée de l'application des peines au tribunal judiciaire de Mâcon et membre du conseil d'administration de l'ANJAP

Association française des magistrats instructeurs (AFMI)

Mme Sarah Peillon , secrétaire générale adjointe de l'AFMI et juge d'instruction au tribunal de Dunkerque

Syndicat de la magistrature

Mme Anne-Sophie Wallach , secrétaire générale

Syndicat Unité Magistrats

M. Marc Lifchitz , magistrat, secrétaire général adjoint

Union syndicale des magistrats (USM)

Mme Cécile Mamelin , vice-présidente

M. Ludovic Friat , secrétaire général

Conseil national des barreaux (CNB)

M. Boris Kessel , vice-président de la commission Libertés et droits de l'homme du CNB.

M. Charles Renard , chargé de mission Affaires publiques

Observatoire international des prisons (OIP)

Mme Camille Brénot , militante de l'OIP, journaliste et ancienne détenue

Mme Prune Missoffe , responsable analyses et plaidoyer

Mme Charline Becker , coordinatrice interrégionale pour la région Sud-Est

Association nationale des visiteurs de personnes sous main de justice (ANVP)

M. Yves-Marie Brient , président

M. Didier Bazin , secrétaire adjoint

Pôle emploi - Direction des partenariats et de la territorialisation

Mme Ivane Squelbut , directrice des partenariats et de la territorialisation

Union nationale des missions locales (UNML)

M. Arnaud Collignon , membre du bureau de l'UNML en charge de ce sujet

Mme Valérie Garde , chargée de mission à l'UNML

Mme Samra Lambert , secrétaire générale

Associations d'insertion

Emmaüs France

Mme Marion Moulin , responsable nationale de groupes, branche économie solidaire et insertion

Fédération des acteurs de la solidarité

Mme Alice Tallon , chargée de mission justice/jeunes

L'Ilôt

M. Pierre-Jean Petit , directeur général

M. Charles Barbezat , directeur des nouveaux projets

Personnalités qualifiées

Mme Isabelle Gorce , première présidente de la Cour d'appel de Bordeaux, présidente du groupe de travail « Justice pénitentiaire et de réinsertion » dans le cadre des États généraux de la justice

Mme Martine Herzog-Evans , professeur de droit pénal à l'Université de Reims, spécialiste de l'exécution des peines

M. Christian Mouhanna , sociologue, directeur du centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP)

PROGRAMME DU DÉPLACEMENT
À L'ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE
DES BAUMETTES-II À MARSEILLE

Mardi 28 juin 2022

11 h 30 Accueil au centre pénitentiaire. Présentation de la structure par la cheffe d'établissement et le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation.

Thierry Alves, directeur interrégional des services pénitentiaires de Marseille, Carole Chevalier, cheffe du Département des politiques d'insertion, de probation et de prévention de la récidive (DPIPPR)

Karine LAGIER, cheffe d'établissement

13 h 00 Déjeuner de travail

Ali Zoghlami, coordonnateur départemental de la surveillance électronique

Gaëlle Lecoroller, cheffe de service à l'AVAD

14 h 00 Visite des Baumettes-II et rencontre avec l'équipe SPIP. Présentation du partenariat avec Wake up Café.

Aurélie Bédu-Seys, directrice adjointe, Sylviane Véniat, cheffe d'antenne, Laetitia Atlan et Charlotte Tremblais, DPIP, Caroline Leray, Charlotte le Luyer, Marine Pellat, Aicha Bedrouni et Émilie Lefort, CPIP, Manon Distani et  Silma Baccari, assistantes de service social, Elena Gantzer et Delphine Petit, de Wake up café.

15 h 30 Visite de la Structure d'Accompagnement vers la Sortie, en associant la DPIP de proximité et le coordonnateur d'activités pour mise en avant de la diversité des activités programmées, et présentation du partenariat avec Lieux Fictifs.

Raphaël Julien, coordonnateur d'activités

Joseph Cesarini, et Javier Gorleri, de Lieux fictifs

17 h 00 Présentation du restaurant d'application « Les beaux-Mets » dont l'ouverture est prévue en septembre 2022.

TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI

N° de la proposition°

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

1

Poursuivre
les recrutements pour arriver à 60 dossiers
par CPIP et résorber
les emplois précaires

Ministère
de la justice

2023-2027

Loi de finances

2

Faire passer les directeurs pénitentiaires d'insertion et de probation en catégorie « A + » pour améliorer l'attractivité
de la profession

Ministère
de la justice

2025

Règlement

Loi de finances

3

Renforcer la présence des assistants de service social, des psychologues et des surveillants pour faire vivre la pluridisciplinarité, sans négliger les fonctions support.

Ministère
de la justice

2023-2027

Loi de finances

4

Développer les partenariats entre l'administration pénitentiaire et l'université afin de mener des travaux de recherche tendant à mieux évaluer l'efficacité des sanctions pénales et de la probation

Ministère
de la justice
et universités partenaires

2023-2027

Conventions et financement de projets

5

Sur le modèle de la loi « justice de proximité » du 8 avril 2021 en matière de travaux d'intérêt général, étudier la possibilité de confier certaines tâches assurées par le juge de l'application des peines au directeur pénitentiaire d'insertion et de probation

Ministère
de la justice
en concertation avec les organisations représentatives

2025

Loi

6

Sensibiliser davantage les CPIP aux contraintes propres à l'instruction dans le cadre de leur formation.

École nationale de l'administration

pénitentiaire

2025

Mesure administrative

7

Expérimenter une permanence des SPIP dans les tribunaux correctionnels afin de favoriser une relation plus fluide avec les formations de jugement

Ministère
de la justice

2025

Mesure administrative

8

Introduire une procédure d'habilitation des associations socio-judiciaires en s'inspirant de la pratique suivie dans le domaine de la protection judiciaire de la jeunesse

Ministère
de la justice

2025

Loi et règlement

9

Relancer le partenariat avec les missions locales
en concluant une nouvelle convention pluriannuelle, assortie d'un financement adapté

Ministère
de la justice
et
Union nationale des missions locales

2025

Convention

10

Promouvoir un accès encadré au numérique en détention, pour que la personne détenue gagne en autonomie dans son parcours de réinsertion et pour faciliter les échanges avec les partenaires extérieurs

Ministère de la justice

2025

Mesure administrative


* 1 Les PPSMJ sont les personnes qui font l'objet d'une mesure restrictive ou privative de liberté, soit dans un cadre pré-sentenciel (détention provisoire, contrôle judiciaire), soit après avoir été condamnées (peine de prison ou peine effectuée en milieu ouvert).

* 2 Rapport n° 4906 « Au-delà des hommes et des murs : la prison, une composante à part entière de la Nation », fait par Caroline Abadie au nom de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale visant à identifier les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française.

* 3 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 4 Rapport n° 114 (2014-2015) de Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois sur les crédits du programme « administration pénitentiaire » au sein de la mission « justice » du projet de loi de finances pour 2015, page 5.

* 5 Ibidem .

* 6 Décret n° 2019-50 du 30 janvier 2019 portant statut particulier du corps des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation.

* 7 RIFSEEP : régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel

* 8 Les deux classes du grade de CPIP normal ont été fusionnées au 1 er janvier 2021 à la suite de la modification de l'article 2 du décret de 2019 précité.

* 9 Cf. le compte rendu de l'audition du garde des Sceaux le 8 novembre 2022, annexé au rapport n° 121 (2022-2023) d'Alain Marc, rapporteur pour la commission des lois sur les crédits du programme « administration pénitentiaire » au sein de la mission « justice » du projet de loi de finances pour 2023 (page 39).

* 10 Le taux d'attrition permet de mesurer le nombre de départs rapporté à l'effectif.

* 11 L'ensemble de ces chiffres sont issus des statistiques mensuelles de l'administration pénitentiaire.

* 12 La surveillance électronique fixe peut être prononcée au stade pré-sentenciel (assignation à résidence sous surveillance électronique), en tant que peine correctionnelle (détention à domicile sous surveillance électronique) ou dans le cadre d'un aménagement de peine ou d'une libération sous contrainte.

* 13 Réponse écrite au questionnaire des rapporteurs.

* 14 Réponse écrite au questionnaire des rapporteurs.

* 15 Réponse écrite au questionnaire des rapporteurs.

* 16 Ibidem .

* 17 Ibidem .

* 18 Circulaire du 25 avril 2013 relative aux modalités d'exercice de la fonction de conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation placés NOR : JUSK1340022C.

* 19 Ibidem .

* 20 La catégorie « A+ » n'existe pas au sens du code général de la fonction publique qui ne reconnait pour l'heure que les catégories A, B et C à l'article L. 411-2 mais désigne, dans la pratique, la catégorie des hauts fonctionnaires dans les différentes fonctions publiques.

* 21 Article R. 57-3 du code de procédure pénale et R. 113-27 du code pénitentiaire.

* 22 Réponse écrite au questionnaire des rapporteurs.

* 23 Articles 5 à 8 de la loi n° 2021-401 du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale modifiant notamment les articles 13122 et 131-36 du code pénal.

* 24 Article 85 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, modifiant l'article 712-5 du code de procédure pénale.

* 25 5° de l'article 138 du code de procédure pénale.

* 26 Ibidem , 6°.

* 27 Peines prévues à l'article 131-3 du code pénal en matière correctionnelle.

* 28 Article 723-15 du code de procédure pénale.

* 29 Entendu au nom de la Conférence nationale des procureurs de la République, le procureur d'Ajaccio a par exemple indiqué qu'aucune association socio-judiciaire n'était implantée dans le ressort de son tribunal. Le SPIP assume en conséquence l'ensemble des tâches.

* 30 L'habilitation est délivrée par le représentant de l'État dans le département, après avis du président du conseil départemental et instruction par les directions déconcentrées de la PJJ.

* 31 Fédération des acteurs de l'insertion (FAS), Emmaüs et l'association l'Ilôt.

* 32 Créé en 2010, le SIAO coordonne et régule dans chaque département le secteur de l'accueil, de l'hébergement et de l'accompagnement vers l'insertion et le logement des personnes sans domicile.

* 33 Circulaire interministérielle n° DGCS/DIHAL/DAP/2016/151 du 13 mai 2016 relative à la coordination entre les services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) et les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), pour l'hébergement et l'accès au logement des personnes sortant de détention ou faisant l'objet d'un placement à l'extérieur.

* 34 Environ 2 000 nouvelles mesures de placement à l'extérieur sont prononcées caque année et de l'ordre d'un millier de personnes bénéficient simultanément, à un instant donné, de la mesure.

* 35 L'insertion par l'activité économique (IAE) permet à des personnes sans emploi et rencontrant des difficultés sociales et professionnelles de bénéficier d'un contrat de travail. Les structures de l'IAE sont les entreprises d'insertion et les entreprises de travail temporaire d'insertion (EI et ETTI), les ateliers et chantiers d'insertion (ACI) et les associations intermédiaires (AI).

* 36 Circulaire de la DAP en date du 13 octobre 2009 relative à l'accès à l'informatique pour les personnes placées sous main de justice.

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