M. le président. L’amendement n° 11 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement précédent, qui a été rejeté.

Il s’agissait de faire en sorte que les personnes qualifiées et les représentants d’associations d’usagers ne fassent plus partie de la commission de surveillance puisque nous demandions qu’ils soient intégrés au comité syndical.

Comme l’amendement n° 9 rectifié n’a pas été adopté, je retire cet amendement, monsieur le président, car nous souhaitons que ces personnes continuent à faire partie de la commission de surveillance.

M. le président. L’amendement n° 11 rectifié est retiré.

L’amendement n° 13, présenté par Mme Dumont, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Cet avis est réputé favorable s’il n’a pas été rendu, par écrit, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la transmission de la proposition de nomination faite par le représentant de l’État en Guadeloupe.

II. – Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cet avis est réputé favorable s’il n’a pas été rendu, par écrit, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la transmission de la proposition de nomination faite par le représentant de l’État en Guadeloupe.

III. – Alinéa 11

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cet avis est réputé favorable s’il n’a pas été rendu, par écrit, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la transmission de la proposition de nomination faite par le représentant de l’État en Guadeloupe.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Françoise Dumont, rapporteure. Cet amendement vise à clarifier la procédure de nomination à la commission de surveillance sur proposition du représentant de l’État en Guadeloupe, après avis, en fonction des membres, soit du président du syndicat mixte, soit des chambres consulaires de Guadeloupe, soit de l’association des maires de Guadeloupe.

Pour ce faire, il tend à prévoir les modalités de transmission de l’avis au préfet par les personnes consultées sur la proposition de nomination. Ces dernières disposeront d’un délai d’un mois afin de rendre par écrit leur avis au préfet. À défaut, celui-ci sera réputé favorable, afin de ne pas paralyser les procédures de nomination à la commission de surveillance.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 13.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 10 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Alinéa 23

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À la deuxième sollicitation d’inscription d’un sujet, l’inscription est de droit.

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Puisque mon amendement précédent a été rejeté, les usagers ne peuvent faire partie du comité syndical et sont donc représentés au sein de la commission de surveillance.

Or le texte prévoit que la commission de surveillance ne peut que suggérer l’inscription à l’ordre du jour des différents points. Le présent amendement vise donc à prévoir l’obligation de l’inscription à l’ordre du jour dès la deuxième demande, afin que puisse être débattue une question que la commission de surveillance trouverait particulièrement importante.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Dumont, rapporteure. L’amendement n° 10 rectifié de mon collègue Benarroche vise à rendre obligatoire l’inscription à l’ordre du jour du comité syndical d’une question dès la deuxième sollicitation de la commission de surveillance.

La commission des lois a précisé la procédure d’inscription à l’ordre du jour du comité syndical d’une question de la commission de surveillance en trouvant ainsi un nouvel équilibre.

Si cette question doit avoir un lien avec l’ordre du jour, elle peut désormais être inscrite à la demande de la majorité des membres ou sur proposition du seul président de la commission.

M. Benarroche souhaite aller plus loin et imposer l’inscription d’une question dès la deuxième demande par la commission de surveillance. Il me semble difficile d’adopter un tel amendement, dès lors que celui-ci tend à figer la procédure de sollicitation et à engorger l’ordre du jour du comité syndical.

Je propose de nous en tenir à la voie médiane trouvée par la commission, c’est-à-dire à une possibilité d’inscription à l’ordre du jour, en parallèle d’une possibilité d’émettre des avis et propositions sur tout sujet relevant de la compétence du syndicat mixte.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je comprends l’esprit de l’amendement. J’émettrai donc un avis de sagesse.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Comme notre collègue Mme Jasmin l’a souligné à plusieurs reprises, il est tout à fait important et utile de sécuriser les citoyens et de faire en sorte que les associations d’usagers considèrent qu’elles ont réellement un rôle à jouer, maintenant. Il faut regagner leur confiance.

L’adoption de cet amendement, qui n’est pas très contraignant, permettrait de le faire. Les usagers qui ne sont pas dans le comité syndical, mais qui siègent au sein du conseil de surveillance, verraient ainsi qu’ils peuvent effectivement jouer un rôle actif dans la gestion de l’eau en Guadeloupe.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 10 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié bis, présenté par M. Lurel, Mme Jasmin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il présente, à cette occasion, un rapport faisant état des travaux réalisés et des emprunts contractés au cours de l’année précédente, des investissements programmés et de l’évolution de la politique tarifaire des services publics d’eau potable et d’assainissement.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Le président du comité syndical ayant le pouvoir de décision – le directeur général est, quant à lui, ordonnateur – et disposant des informations, il me semble de bon sens de lui demander de présenter à la commission de surveillance un rapport faisant état des travaux réalisés, des emprunts contractés au cours de l’année précédente, des investissements programmés et de l’évolution de la politique tarifaire du service public d’eau potable et des services d’assainissement.

Informer sur les investissements programmés est particulièrement important, car les EPCI étaient quelque peu inquiets quant à leur répartition.

Il convient donc, pour des raisons de réciprocité et de symétrie, que le président du comité syndical se présente devant la commission de surveillance. Encore une fois, c’est du bon sens !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Dumont, rapporteure. Je ne puis que partager l’objectif de cet amendement ayant pour objet que le comité syndical présente à la commission de surveillance un rapport sur l’état financier du syndicat mixte. Cela permettra, me semble-t-il, de renforcer l’information des associations d’usagers sur les finances de ce syndicat et de parfaire leur contrôle.

La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est une bonne proposition que vient de présenter M. le ministre Lurel.

J’émets donc un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 8 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
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Article 3

Article additionnel après l’article 2

M. le président. L’amendement n° 5, présenté par Mme Jasmin, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le syndicat mixte créé en application de l’article 1er peut réclamer à toutes les entreprises qui ont été délégataires du service public de l’eau et de l’assainissement en Guadeloupe et dont les manquements ont été avérés la restitution d’une partie des rémunérations indûment perçues.

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. En Guadeloupe, il y a eu des carences à tous les niveaux – nous l’avons constaté, dit et redit –, c’est-à-dire à celui de l’État, de certains élus locaux et des délégataires du service public d’eau et d’assainissement. Ces derniers ont, en outre, bénéficié gracieusement et grassement de l’argent public, mais aussi de l’argent des usagers, lesquels sont pourtant privés d’eau, comme vous le savez désormais toutes et tous.

Cet amendement vise tout simplement à ce que ces opérateurs, délégataires du service public choisis par les services de l’État, restituent une partie des montants qu’ils ont perçus indûment. Cela concerne les différents syndicats, même si l’on ne sait plus lesquels sont viables…

Je demande solennellement, avec insistance, que des décisions soient prises, afin que les délégataires ayant bénéficié indûment de l’argent de l’État, des contribuables et de personnes en difficulté – ce sont en effet bien souvent les centres communaux d’action sociale, les CCAS qui ont payé pour certains de nos concitoyens –, restituent une partie des sommes perçues.

En effet, il s’agit ni plus ni moins d’une « profitation », comme on dit en créole !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Dumont, rapporteure. Je comprends naturellement l’intention de l’auteur de cet amendement, qui tend à prévoir que les entreprises délégataires du service public d’eau et d’assainissement ayant commis des manquements reversent les rémunérations indûment perçues.

Cet amendement me semble néanmoins inopportun.

Premièrement, son objet semble relever davantage de la compétence du juge que de celle du législateur. Il ne revient ainsi pas à ce dernier de se prononcer sur la nature des manquements avérés mentionnés, pas plus que sur l’étendue des rémunérations indûment perçues.

Si les personnes publiques attributaires de la compétence et délégantes se considéraient lésées dans les modalités d’exécution des contrats passés avec les entreprises délégataires, il leur reviendrait de saisir le juge administratif.

Deuxièmement, l’amendement semble juridiquement problématique et dépourvu d’effets concrets, faute de prévoir une procédure précise de recouvrement des sommes concernées.

Par ailleurs, une telle disposition placerait le syndicat mixte unique nouvellement créé dans la position de réclamer des sommes à des délégataires avec lesquels il n’a jamais contracté, les cocontractants étant les EPCI exerçant aujourd’hui la compétence.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. À l’occasion de l’essentiel de ce dernier amendement déposé sur ce texte, je souhaite redire devant la Haute Assemblée que le principe du contrôle de légalité consiste à s’assurer que les actes sont conformes à la loi de la République que vous votez.

En aucun cas les préfets ne peuvent se servir du contrôle de légalité pour contrôler des choix politiques d’opportunité. Si tel était le cas, il faudrait contrôler l’action du Gouvernement pour que les instructions soient données dans le bon sens.

Vous dites qu’il y a eu des carences de l’État au niveau du contrôle de légalité. Ce n’est pas exact.

Certes, il y a eu des carences de l’État par ailleurs. M. le ministre Lurel, qui a occupé les fonctions qui sont aujourd’hui les miennes, sait ainsi que le recouvrement des créances relève des compétences du Trésor public. Or on sait que les choses n’ont pas été faites comme il aurait fallu… Mon rôle est de défendre les agents du service public, mais aussi de reconnaître qu’il y a eu des problèmes lorsque tel a été le cas, ce que je fais sereinement et simplement.

Ce n’est pas via le contrôle de légalité en tant que tel qu’il convenait d’interroger certains modes de gestion de l’eau, sur lesquels il conviendra en effet de se pencher. Sans relancer le débat sur le sujet, je tenais à le redire.

Lors de la discussion générale, Mme Varaillas, sénatrice du groupe CRCE, a évoqué différentes entreprises. En vérité, il n’y a pas aujourd’hui une seule entreprise privée qui ait envie de venir en Guadeloupe pour assurer ces missions !

La situation y est à ce point dramatique et difficile que l’on se trouve plutôt en position d’interroger exclusivement la puissance publique. C’est ce que nous faisons à l’occasion de l’examen de cette proposition de loi. À cet égard, le modèle de régie ne démérite pas, comme on dit en Normandie… Telles sont les précisions que je voulais donner sur ce sujet.

En ce qui concerne cet amendement, j’émets un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Monsieur le ministre, je ne résiste pas au plaisir de vous répondre,…

M. Sébastien Lecornu, ministre. Non, jamais ! (Sourires.)

M. Victorin Lurel. … non pour entrer en confrontation, mais pour m’étonner.

Au travers de l’amendement présenté par notre collègue, c’est un vrai problème qui est posé. Je n’oublie pas qu’il y a eu un procès, au cours duquel un acteur important – mais c’est l’arbre qui cachait la forêt – n’a pas hésité à me nommer, disant que, lorsque j’étais ministre, j’avais donné des instructions au représentant de l’État, donc au préfet de région, pour payer des travaux qui n’avaient pas été réalisés, donc en l’absence de service fait.

On a trouvé des avocats pour plaider cela ! Il est vrai que l’on reconnaît la liberté d’expression des avocats au sein des prétoires… Cela a tout de même fait débat en Guadeloupe, je tenais à le dire.

Les dispositions de cet amendement recueillent donc deux avis défavorables… Pour autant, nous avons une véritable chance : le député guadeloupéen Olivier Serva a été nommé rapporteur de la commission d’enquête parlementaire relative à la mainmise sur l’eau par les intérêts privés, laquelle concerne non pas, bien sûr, la situation en Guadeloupe, mais l’eau en tant que bien de la Nation.

Cette commission d’enquête disposant de moyens d’investigation, peut-être faudra-t-il s’interroger dans ce cadre, au-delà des éventuelles défaillances du contrôle de légalité, sur les actes graves qui ont été commis et qu’il sera intéressant de mettre au grand jour.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 5
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 3

(Suppression maintenue)

Vote sur l’ensemble

Article 3
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Nous l’avons dit, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’en tiendra à une abstention constructive.

Pourquoi l’abstention ? À l’Assemblée nationale, nos collègues socialistes ont en effet voté le texte, mais il est vrai que, au Sénat, nous sommes davantage sensibles aux atteintes portées à la libre administration des collectivités territoriales et à l’article 72 de la Constitution. Nous pensons fondamentalement, au sein de notre groupe, qu’il y a là une atteinte de cette sorte.

Cela étant, je suis du pays et, dans mon territoire, il commence à y avoir des problèmes d’eau, alors que tel n’était pas le cas auparavant…

Dans le cadre de mon mandat exécutif régional, j’ai vu des élus qui ne parvenaient pas à s’entendre. Au-delà de ce que nous reprochons au texte, notamment sa brutalité – monsieur le ministre, des actes quelque peu comminatoires ont récemment été adressés à un exécutif territorial… –, nous comprenons la méthode, mais nous ne l’approuvons pas.

Cependant, il faut être réaliste : c’est la seule solution pour obliger les élus à s’entendre. Pour cette seule raison, mon groupe s’abstiendra. En effet, je l’avoue, ce texte contribue à faire avancer les choses, certes en recourant à une méthode, encore une fois, quelque peu brutale – pour ne pas dire brutaliste, comme on dit en peinture ou en architecture.

Monsieur le ministre, j’attends du Gouvernement qu’il prenne des engagements fermes avant le 1er septembre prochain, date que vous avez vous-même fixée pour dissoudre le Siaeag, et faire entrer en vigueur vos textes.

Le Gouvernement doit nous dire très clairement qu’il accompagnera le plan de plus de 1 milliard d’euros consacrés à la Guadeloupe ; 10 millions d’euros ont été versés jusqu’à présent, alors qu’il nous faudrait entre 700 et 800 millions d’euros.

Des formules existent, et je me suis épuisé à faire des propositions. Il serait par exemple possible de prévoir une subvention pendant cinq ans ; à raison de 40 millions d’euros par an, cela représenterait 200 millions. Ou peut-être faudrait-il un prêt à long terme, avec amortissement sur trente ans, garanti par l’État, qui serait accordé par l’une ou l’autre des institutions financières – je ne les nomme pas ; on les connaît, et elles ont l’habitude de faire cela.

Encore une fois, mon groupe s’abstiendra sur la proposition de loi.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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5

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour un rappel au règlement.

Mme Céline Brulin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention se fonde sur l’article 36 de notre règlement.

Le Gouvernement a demandé, hier, que la suite de l’examen de la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école soit inscrite à l’ordre du jour de ce mercredi 10 mars, à l’issue de l’espace réservé au groupe RDPI, et éventuellement le soir, en vertu de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution. Cette initiative inédite, me semble-t-il, pose question.

Nous demandons que l’article 48 de la Constitution soit examiné avec la plus grande précision. Son alinéa 3 donne un grand pouvoir au Gouvernement pour enclencher l’ordre du jour prioritaire, mais son alinéa 4 accorde une compétence exclusive à l’assemblée concernée pour organiser l’ordre du jour des séances consacrées à l’initiative parlementaire, dit « ordre du jour réservé ».

Permettez-moi d’en donner lecture : « Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour arrêté par chaque assemblée, à l’initiative des groupes d’opposition de l’assemblée intéressée, ainsi qu’à celle des groupes minoritaires. »

La conférence des présidents a fait le choix de ne pas recourir à la soirée de ce jour de séance réservée à l’initiative parlementaire. Ce n’est pas pour autant que le Gouvernement peut l’utiliser à sa guise. L’alinéa 4 l’interdit même expressément.

Par ailleurs, nous estimons que cette intervention du Gouvernement rompt l’égalité de traitement entre les groupes. En effet, ceux qui ne soutiennent pas le Gouvernement ont un espace limité à quatre heures et ceux – je devrais plutôt dire celui, en l’occurrence – qui le soutiennent ont droit à une rallonge. L’esprit de la Constitution est bafoué !

M. Gérard Lahellec. Tout à fait !

Mme Céline Brulin. Le Gouvernement a déjà trop souvent pris l’habitude d’utiliser les propositions de loi, non soumises à l’avis du Conseil d’État et dépourvues d’étude d’impact, comme véhicules législatifs. Aujourd’hui, il en vient à utiliser les espaces réservés aux groupes !

Nous suggérons que cette proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école poursuive son chemin législatif sous une forme plus claire et, je dirais même plus honnête : celle d’un projet de loi. Parce que c’est en réalité ce qu’elle est ! Nous demandons également l’application stricte de l’article 48, alinéa 4 de la Constitution. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

Il sera transmis à la conférence des présidents, qui en débattra si nécessaire.

6

 
Dossier législatif : proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école
Discussion générale (suite)

Fonction de directrice ou de directeur d’école

Discussion d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, créant la fonction de directrice ou de directeur d’école (proposition n° 566 [2019-2020], texte de la commission n° 406, rapport n° 405).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux que soit présentée aujourd’hui au Sénat la proposition de loi de Mme la députée Cécile Rilhac.

Cette proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école est l’occasion pour moi de rappeler une nouvelle fois, devant la représentation nationale, l’engagement remarquable de ces directeurs depuis le début de la crise sanitaire.

Si nous pouvons afficher aujourd’hui une maîtrise des chaînes de contamination dans les écoles, et ce depuis plusieurs mois, avec un nombre de cas de contamination stable et un nombre très bas de fermetures de classes et d’écoles, ciblées par territoire, et si nous pouvons nous enorgueillir que notre pays soit l’un des seuls au monde à laisser les écoles ouvertes, nous le devons à tous nos professeurs, et tout particulièrement aux directrices et directeurs d’école.

Ceux-ci ont en effet eu un comportement remarquable depuis un an, que ce soit pendant la période de confinement, lorsqu’il fallait aller à la rencontre des familles, durant le déconfinement, quand il était nécessaire de s’adapter, ou encore aujourd’hui, pour que se poursuive l’instruction des élèves.

C’est en effet grâce à eux et à nos professeurs que nous pouvons proposer un modèle, celui de l’école de la République, qui correspond à nos racines les plus profondes. C’est un motif de fierté collective et de gratitude envers nos professeurs, nos directrices et nos directeurs d’école.

Ces directeurs, dès l’annonce de la fermeture des écoles en mars dernier, se sont mobilisés pour maintenir le lien avec les familles. Ce sont encore eux qui, dès le 11 mai dernier, ont permis à nos écoles de rouvrir, en respectant l’exigence du protocole sanitaire qui s’appliquait.

Ce sont eux aussi qui, depuis septembre, veillent à l’application de l’ensemble des mesures sanitaires et mettent en œuvre les mesures d’accompagnement personnalisé qui s’imposent pour beaucoup d’élèves. Il y aurait mille et un exemples à donner de l’ampleur de leur travail et de leur engagement de chaque jour. Les parents d’élèves le savent, qui les voient agir au quotidien.

D’année en année, les missions et les responsabilités des directrices et directeurs d’école se sont considérablement accrues. Aujourd’hui plus qu’hier, ils doivent dialoguer avec les parents d’élèves, les collectivités, porter le cadre de l’institution et le garantir, accompagner les évaluations nationales et les évolutions pédagogiques.

Ces évolutions exigent des compétences plus importantes au quotidien, un positionnement plus fort dans notre institution, des responsabilités plus grandes et mieux reconnues.

Ces évolutions sont nécessaires. Et cette conviction, mesdames, messieurs les sénateurs, a toujours été la mienne.

Depuis mon arrivée au Gouvernement, vous le savez, j’ai fait de l’école primaire la priorité de mon ministère. Malgré la baisse constante des effectifs dans les classes – moins 195 000 élèves depuis 2017, ce qui doit, je le dis souvent, nous alerter sur les enjeux démographiques –, ce sont 7 500 postes qui ont été créés dans le premier degré depuis quatre ans, et 2 616 lors de la dernière rentrée.

Dès l’été 2019, j’ai souhaité que le chantier de l’amélioration de la situation des directrices et des directeurs d’école fasse partie de l’agenda social du ministère. Comme vous le savez, nous avons ainsi conduit une phase de diagnostic qui a reposé, pour partie, sur une consultation en ligne à laquelle les deux tiers des directeurs ont répondu.

Nous avons rendu publics les résultats de cette consultation, qui nous a permis de mesurer l’ampleur de l’attente de nos directrices et directeurs d’école. Les travaux ont été engagés, et les premières réponses ont été apportées. Depuis septembre dernier, en effet, plusieurs évolutions permettent d’améliorer l’exercice de leurs missions. J’en évoquerai les principales.

En premier lieu, afin de leur donner plus d’autonomie dans l’exercice de leur métier et d’alléger leurs tâches administratives, j’ai souhaité qu’ils aient la pleine responsabilité de la programmation et de la mise en œuvre des 108 heures annuelles de service dans le cadre réglementaire existant.

Cette mesure s’est accompagnée d’une rationalisation du nombre et du calendrier des enquêtes, ainsi que d’une recherche d’amélioration de leurs outils numériques de gestion. Tout cela contribue à alléger le carcan administratif et à redonner aux directeurs d’école les marges de manœuvre nécessaires, pour leur permettre de se recentrer sur l’essentiel, à savoir le pilotage de leur école.

En deuxième lieu, j’ai souhaité que les directrices et directeurs d’école soient plus et mieux entourés, afin qu’ils ne se sentent plus isolés dans leur travail quotidien.

Nous avons ainsi augmenté les aides administratives, et 2 500 nouveaux jeunes en service civique sont désormais mobilisés pour les épauler. S’y ajoutent 900 nouveaux contrats de préprofessionnalisation signés ou en cours de signature. Ces contrats permettent à des jeunes qui se destinent au métier de professeur de s’y préparer, tout en renforçant les capacités d’encadrement de l’école.

En complément de ces appuis précieux, sinon indispensables, et dans l’attente du vote de la proposition de loi, nous expérimentons depuis la dernière rentrée une fonction de référent pour les directrices et directeurs d’école.

Placés auprès des directions des services départementaux de l’éducation nationale, ces référents leur apportent écoute et conseils dans l’exercice de leurs missions. Cet accompagnement vient compléter les deux journées de formation minimum désormais accordées aux directrices et directeurs.

Dès la mi-octobre, j’ai confié à Jean-Michel Coignard, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, une mission de suivi sur la mise en place des mesures annoncées à la rentrée 2020.

En troisième et dernier lieu, une indemnité exceptionnelle de 450 euros a été versée à l’automne aux directeurs d’école afin de reconnaître leur rôle fondamental dans la gestion de la crise sanitaire. Il y a quelques jours, cette indemnité de 450 euros a été pérennisée et a fait l’objet d’une publication, ce qui marque une étape supplémentaire, mais non définitive, pour la juste reconnaissance des conditions d’exercice de ces professionnels. Dans le cadre du Grenelle de l’éducation, nous continuerons à revaloriser cette fonction.

Pour en venir aux travaux qui sont encore sur le métier, j’évoquerai la question des décharges et celle des délégations de compétences.

À la rentrée de 2021, comme je m’y étais engagé, un nouveau régime des décharges sera installé. J’ai d’ores et déjà annoncé que 600 emplois supplémentaires seraient consacrés au renforcement des décharges des directrices et directeurs d’école, leur répartition ayant fait l’objet d’une large concertation avec les organisations représentatives.

Enfin, en ce moment même, nous travaillons avec les partenaires sociaux sur la possibilité d’une délégation de compétences des inspecteurs de l’éducation nationale. Comme je l’ai dit à l’Assemblée nationale, j’y suis favorable ; nous en reparlerons sans doute. Les directeurs bénéficieraient alors de marges de manœuvre beaucoup plus grandes, dans une juste adéquation avec leur niveau de responsabilité réel.

Ces réflexions ont été portées dans le cadre du Grenelle de l’éducation. Elles visent à mieux identifier et mieux reconnaître les responsabilités des directeurs d’école.

Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les évolutions qui sont déjà réalisées et celles qui sont à venir. Je veux croire que cet exposé vous aura montré combien notre ministère a pris à bras-le-corps cette question, dont les enjeux sont intimement liés à la réussite de nos élèves.

L’étape d’aujourd’hui est très importante. La proposition de loi de Mme la députée Cécile Rilhac, que je salue, a pour objet de consacrer, sinon de renforcer, par la loi la plupart des mesures que je viens de vous présenter, qu’il s’agisse de la reconnaissance nécessaire de la fonction de directrice ou directeur d’école, de l’autonomie de ces professionnels, de l’accompagnement matériel et humain auquel ils pourront prétendre et du nouveau régime de décharges dont ils bénéficieront.

Je tiens encore une fois à rendre hommage au travail de Mme Rilhac, qui n’a pas été seulement d’élaboration, mais aussi de concertation. Ces sujets complexes méritent en effet d’être mûris grâce aux discussions avec l’ensemble des acteurs de terrain, auxquels je souhaite m’adresser par votre intermédiaire, mesdames, messieurs les sénateurs ; je veux leur dire notre gratitude et notre reconnaissance, mot que j’utilise dans son sens le plus fort.

Le présent débat et les votes qui vont intervenir sont en effet une manière de rappeler que cette fonction est essentielle et de prévoir les moyens juridiques et matériels qui correspondent à cette reconnaissance.

Cette proposition de loi assied ainsi la place légitime que nous devons donner aux directrices et directeurs d’école dans notre institution, au bénéfice de tout notre système éducatif.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je sais à quel point vous êtes attachés à cette question, sur laquelle certains d’entre vous ont beaucoup travaillé. Des concertations ont également eu lieu au sein du Sénat, et je veux vous en remercier.

Cette proposition de loi peut déboucher sur une loi qui traduirait un consensus : la reconnaissance de cette fonction, exprimée avec force par la représentation nationale. J’accueille favorablement ce texte, que je vous invite à adopter largement à l’issue de nos débats. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)