Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Marcangeli, ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification. Monsieur le sénateur Chaize, le Gouvernement est particulièrement attentif aux projets d'élevage de la crevette Macrobrachium rosenbergii au sein des étangs, compte tenu du potentiel de diversification économique que représente une telle production pour une profession déjà très fragilisée par les phénomènes de prédation, mais aussi par les conséquences du changement climatique.
Cette forme de production s'inscrit d'ailleurs parmi les scénarios retenus dans le cadre du groupe de travail national sur les coproductions et l'aquaculture multitrophique intégrée (AMTI), l'objectif étant de réutiliser l'eau issue de l'élevage de poissons pour nourrir les crevettes durant la période estivale, le métabolisme et la croissance rapide de ces dernières le permettant.
Il convient que ce type de pratique vertueuse, reposant sur une logique écosystémique, puisse être davantage encouragé et simplifié dans notre pays.
Je tiens par ailleurs à vous confirmer, au nom du Gouvernement, que le projet d'instruction sur les installations aquacoles fermées est en cours de finalisation. Il tient compte des recommandations de l'Office français de la biodiversité (OFB) sur le dossier déposé par les professionnels.
Cette instruction devrait être signée dans les prochaines semaines. L'arrêté du 20 mars 2013 fixant, en application de l'article R. 432-6 du code de l'environnement, la liste des espèces de poissons non représentées dont l'introduction à d'autres fins que scientifiques peut être autorisée par le préfet pourra alors être modifié, de manière à inscrire la crevette Macrobrachium rosenbergii sur ladite liste.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize, pour la réplique.
M. Patrick Chaize. Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse plutôt favorable, dont les pisciculteurs du département de l'Ain prendront connaissance avec intérêt.
Vous comprendrez aisément que ces pisciculteurs ont besoin de visibilité pour investir et développer leurs entreprises dans les meilleures conditions.
reconnaissance officielle de la présence permanente du loup dans la nièvre
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la question n° 626, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le ministre, je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la situation totalement insupportable que rencontrent les éleveurs du département de la Nièvre face à la prédation du loup.
Les dégâts constatés sur le terrain sont en parfaite contradiction avec la situation officielle de la région Bourgogne-Franche-Comté, qui est exclue de la zone de présence du loup, car aucun comptage n'y a été effectué à ce jour.
Le 25 mars dernier, alors que j'interrogeais Mme la ministre de l'agriculture sur la fiabilité des méthodes de comptage du loup, celle-ci m'avait répondu que le site loupfrance.fr offrirait une cartographie précise et actualisée de la présence du loup sur le territoire national. Or, en me rendant sur ce site, je constate qu'il indique depuis des mois que les éléments recueillis dans la Nièvre sont en cours d'expertise.
La réalité est pourtant bien différente. Elle saute aux yeux de manière très cruelle. Les attaques de loups sont quasi quotidiennes. Il est donc impératif et urgent d'obtenir une classification qui corresponde à la réalité de la situation et, surtout, permette de prendre les mesures qui s'imposent.
Or, malgré l'urgence, le Gouvernement semble incapable de reconnaître administrativement la présence, certaine et régulière, de plusieurs loups qui causent dans la Nièvre des ravages épouvantables. La fréquence des attaques prouve d'ailleurs que la situation a échappé à tout contrôle.
J'aimerais donc savoir, monsieur le ministre, si la présence du loup dans mon département va enfin être officiellement reconnue selon la classification nationale en vigueur, et à quelle échéance la Nièvre sera enfin considérée comme un territoire concerné par la présence permanente du loup.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Marcangeli, ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification. Madame la sénatrice Sollogoub, l'Office français de la biodiversité (OFB) assure un suivi étroit de la population lupine sur l'ensemble du territoire national.
Ce suivi prend la forme d'une analyse d'indices génétiques visant à estimer le nombre d'individus constituant la population totale, ainsi que d'une analyse d'indices non génétiques – observations, photographies, etc. – permettant de préciser l'aire de répartition de l'espèce.
Pour qu'un territoire soit considéré comme une « zone de présence permanente » du loup, il est nécessaire que l'espèce y soit détectée durant deux hivers consécutifs.
La présence du loup dans la Nièvre est connue et attestée. Cette espèce y a bien été détectée au cours de l'hiver 2024-2025, comme l'OFB l'a confirmé. Cette question ne fait donc pas l'objet d'un débat. Les curieux comme le grand public pourront prendre connaissance des résultats des analyses d'indices de présence du loup sur le site loupfrance.fr.
Si le loup est à nouveau détecté dans la Nièvre durant l'hiver 2025/2026, ce qui, me semble-t-il, ne manquera pas d'être le cas, ce département sera considéré comme une zone de présence permanente de cette espèce.
Toutefois, cette reconnaissance n'aura aucun impact sur les différents protocoles d'indemnisation, de financement des moyens de protection ou de délivrance des autorisations de défense pour les éleveurs qui en feraient la demande.
En effet, les éleveurs peuvent d'ores et déjà bénéficier d'une indemnisation en cas de déprédation pour laquelle la responsabilité du loup n'est pas exclue, obtenir des financements pour des moyens de protection, les communes de la Nièvre étant toutes classées dans les cercles 3, 2 ou 1, ou encore solliciter des autorisations préfectorales de tirs de défense, sous réserve d'avoir déployé les mesures de protection nécessaires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour la réplique.
Mme Nadia Sollogoub. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais sincèrement, ma question ne portait pas sur les indemnisations !
J'ai rendu visite, il y a quelques jours, à M. Bertrand Larue, éleveur à Achun. Il a subi neuf attaques de loups, ses brebis ont été égorgées, certaines ont survécu dans un état épouvantable, et tout cela en quelques semaines seulement ! Pour lui, ce n'est pas une question d'argent : il faut des autorisations de tir. Or on ne pourra pas les obtenir tant que la Nièvre ne sera pas classée comme une zone de présence permanente du loup, ce qui correspond à la réalité.
Monsieur le ministre, comment voulez-vous que l'on demande à nos éleveurs d'attendre encore un hiver ? L'OFB dispose des chiffres pertinents : 190 animaux morts, 127 blessés, 105 attaques, dont 80 attribuées sans conteste au loup. On ne peut pas leur demander d'attendre un hiver de plus : ce n'est pas possible !
interruption de la collecte de pneus agricoles usagés dans la loire
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, auteur de la question n° 629, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
M. Jean-Claude Tissot. Monsieur le ministre, les chambres d'agriculture organisent régulièrement des collectes de pneus agricoles usagés au sein des territoires ruraux.
Ces collectes sont particulièrement nécessaires au regard de la pollution suscitée par les pneus abandonnés, y compris la pollution visuelle, mais aussi des risques d'incendie.
Dans mon département de la Loire, ce sont plus de 7 000 tonnes de pneus qui ont été collectées depuis 2019. Toutefois, les collectes qui devaient se tenir au cours de cette année ont été annulées et reportées à une date non fixée. La cause de ce report est à chercher dans la volonté d'un des éco-organismes agréés par l'État de facturer les coûts de traitement aux chambres d'agriculture.
Cela semble contraire à l'esprit du dispositif en vigueur, instauré par le décret du 2 mars 2023, qui dispose que le financement des coûts de transport et de traitement des pneus est assumé par les éco-organismes agréés. Un arrêté du 27 juin 2023 est venu préciser que « l'éco-organisme collecte sans frais et pourvoit au traitement des déchets de pneumatiques ».
Dans un premier temps, les éco-organismes ont contesté devant le Conseil d'État l'intégration des pneus d'ensilage dans le dispositif. Ils ont été déboutés en mars dernier. Désormais, ils considèrent que la gratuité ne s'applique qu'à la collecte et non au traitement.
Ce faisant, l'éco-organisme qui opère sur le territoire ligérien a indiqué au cours du mois de mai dernier qu'il facturerait à la chambre d'agriculture le coût de traitement des pneus, et ce à hauteur de 82 euros par tonne. Ce différend de lecture a conduit à l'interruption des collectes pour l'heure.
Aussi, monsieur le ministre, j'aimerais savoir quelle interprétation le Gouvernement a du dispositif mis en place par le décret du 2 mars 2023. Très concrètement, quel est le périmètre de la gratuité ?
Le cas échéant, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour faire appliquer l'esprit du dispositif et accompagner la réalisation de collectes véritablement sans frais ? Il me semble particulièrement important, monsieur le ministre, de soutenir ces processus de collecte, qui correspondent parfaitement à une démarche d'économie circulaire.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Marcangeli, ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification. Monsieur le sénateur, vous interrogez ma collègue Agnès Pannier-Runacher sur la gestion du stock des pneumatiques usagés utilisés pour la couverture des fourrages.
Il s'agit d'un enjeu important pour les exploitants agricoles, du fait des contraintes financières et opérationnelles de cette gestion. En outre, ces pneus présentent un risque environnemental avéré, car ils se dégradent et peuvent être une source de pollution.
C'est pourquoi la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) de pneumatiques a imposé aux éco-organismes agréés des obligations spécifiques dans ce domaine. Ainsi, les éco-organismes sont tenus de collecter sans frais et de pourvoir au traitement des déchets de pneus issus d'opérations collectives d'ensilage organisées à la demande des organismes et syndicats professionnels agricoles.
En 2024, les éco-organismes ont ainsi réalisé quinze opérations de collecte de ces déchets, pour un total d'environ 11 200 tonnes. Le contrat type des éco-organismes destiné aux exploitants agricoles a été transmis aux services placés sous la responsabilité de ma collègue Agnès Pannier-Runacher, qui l'ont validé ; il ne prévoit pas une prise en charge payante de ces déchets.
Toutefois, au regard de l'interprétation qu'ils ont faite de la décision du Conseil d'État du 25 mars 2025 que vous avez évoquée, les éco-organismes envisageraient bien de facturer le coût de traitement des pneus d'ensilage à la profession agricole, dans le cadre du contrat type qu'ils proposent aux organisations et syndicats agricoles. Les services de l'administration n'ont cependant pas reçu, à ce jour, de demande de modification de ce contrat type conforme à l'encadrement des filières REP.
L'interprétation que font les éco-organismes de la décision du Conseil d'État met toutefois en lumière la nécessité de clarifier l'article L. 541-10 du code de l'environnement, afin de lever toute ambiguïté sur le respect du principe de reprise sans frais des déchets de pneumatiques d'ensilage dans le cadre des obligations de cette filière REP.
Les équipes de Mme Pannier-Runacher se tiennent à votre disposition pour assurer le suivi de ce dossier.
mise en œuvre de la responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du bâtiment
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gueret, en remplacement de Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 558, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
M. Daniel Gueret. Monsieur le ministre, ma collègue Christine Bonfanti-Dossat, retenue par un événement de dernière minute, m'a demandé d'attirer votre attention sur la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi Agec.
Cette loi traduisait une promesse forte : instaurer une filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) pour les produits et matériaux de construction du bâtiment (PMCB), afin de mettre terme à une injustice persistante, obligeant les collectivités locales, donc les contribuables, à payer pour les déchets produits par des acteurs économiques privés.
Cette loi visait aussi à mettre fin aux décharges sauvages, à soulager les déchetteries publiques et à mieux structurer la gestion des déchets du bâtiment, en particulier ceux du second œuvre.
Néanmoins, cinq ans plus tard, le constat est amer. En 2024, seuls 6 % des déchets du bâtiment relevant de cette filière ont été collectés par les éco organismes agréés, alors que l'objectif initial était de 53 %.
Quant au réseau de points de collecte promis – un tous les dix à vingt kilomètres –, il reste largement virtuel. Les rares points existants sont inaccessibles ou saturés, et les points de reprise gratuite, obligatoires pour les gros distributeurs, sont très insuffisamment mis en place.
Pis encore, les collectivités territoriales, censées être soulagées par cette réforme, continuent à supporter l'essentiel de la charge. Dans les faits, les déchets du bâtiment continuent d'affluer dans les déchetteries publiques. Les dépôts sauvages se multiplient, faute de solution de proximité pour les artisans. Et les collectivités doivent encore assumer les coûts, l'organisation et, parfois même, les litiges qui en découlent.
Les professionnels du secteur, eux aussi, s'inquiètent. En effet, ils cotisent à la filière via l'écocontribution, mais ne trouvent ni service adapté ni réseau opérationnel. Pendant ce temps, les éco-organismes agréés, chargés de la mise en œuvre de ces dispositions, peinent à remplir leurs obligations.
Cette filière REP est essentielle à la transition écologique. Elle ne peut pas échouer. Elle ne peut pas être abandonnée en rase campagne au détriment des territoires, des entreprises du bâtiment et des citoyens.
Aussi, monsieur le ministre, ma collègue Christine Bonfanti-Dossat vous demande si des mesures concrètes, immédiates et visibles vont être prises pour garantir la mise en œuvre pleine et entière de la REP PMCB ; si les obligations des éco-organismes seront renforcées et le déploiement des points de collecte, accéléré ; enfin, s'il sera garanti que les collectivités locales ne paieront plus les erreurs des autres.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Marcangeli, ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification. Monsieur le sénateur Gueret, au nom de votre collègue Christine Bonfanti-Dossat, vous appelez l'attention de ma collègue Agnès Pannier-Runacher sur les difficultés rencontrées par les acteurs de la filière à responsabilité élargie des producteurs concernant les produits et matériaux de construction du bâtiment.
Cette filière a été créée pour concourir à trois objectifs.
Le premier consiste à lutter contre les dépôts sauvages, notamment en créant un réseau de points de collecte, afin que les artisans du bâtiment puissent déposer les déchets triés au plus près de leurs chantiers.
Le deuxième objectif consiste à développer le recyclage des déchets du bâtiment, le secteur du bâtiment et des travaux publics étant la première filière économique productrice de déchets en France.
Le troisième objectif, enfin, portait sur le développement de l'écoconception des produits et matériaux de construction, afin d'en faciliter leur réemploi ou leur recyclage.
Cette filière était très attendue par les acteurs, notamment les collectivités territoriales, qui supportent aujourd'hui une partie des coûts de gestion des déchets du bâtiment et qui doivent en outre faire face au phénomène des dépôts sauvages, lequel leur coûte environ 400 millions d'euros par an.
Le déploiement de cette filière repose sur un principe de reprise gratuite des déchets, lorsqu'ils sont triés, et le développement d'un maillage resserré de points de collecte de proximité accessibles à tout détenteur, qu'il soit un particulier ou un professionnel du bâtiment. Pour assurer cette reprise sans frais, les éco-organismes ont l'obligation de soutenir financièrement les opérateurs qui assurent d'ores et déjà la collecte de ces déchets.
Les objectifs de déploiement de la REP PMCB étaient particulièrement ambitieux à sa création. Toutefois, sa mise en œuvre a rencontré des difficultés qui ont dégradé la maîtrise des coûts et ralenti le processus de déploiement des points de collecte.
Face aux préoccupations exprimées sur le sujet, la ministre Agnès Pannier-Runacher a annoncé le 20 mars dernier un moratoire sur les mesures qui devaient entrer en vigueur en 2025 et a lancé une grande consultation de l'ensemble des acteurs de la filière.
Des entretiens ont eu lieu au mois de mai dernier pour discuter des propositions formulées par les différents acteurs. Ma collègue annoncera à la fin du mois de juin, donc dans les prochains jours, le périmètre exact du moratoire et les orientations ayant vocation à structurer la refonte du cahier des charges. L'objectif principal est de mettre en place le nouveau cahier des charges avant la fin de l'année.
Mme la présidente. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq,
est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Alain Marc.)
PRÉSIDENCE DE M. Alain Marc
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
2
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à réformer le mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun.
3
Jeux Olympiques et Paralympiques de 2030
Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 (projet n° 630, texte de la commission n° 734, rapport n° 733, avis nos 714, 715, 720 et 711).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Demande de priorité
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, en application de l'article 44, alinéa 6, du règlement, la commission des lois demande que l'article 21 soit appelé en priorité, afin qu'il puisse être examiné après les amendements portant article additionnel après l'article 3.
M. le président. Je suis donc saisi d'une demande d'examen par priorité de l'article 21, afin que celui-ci puisse être examiné après les amendements portant article additionnel après l'article 3.
Selon l'article 44, alinéa 6, de notre règlement, la priorité est de droit lorsqu'elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner le projet de loi relatif à l'organisation dans les Alpes françaises des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2030. Ce texte vise à poser les fondations qui permettront de livrer les Jeux dans les meilleures conditions tout en veillant au respect du droit.
Pour rappel, la France s'est vue attribuer l'organisation des XXVIe jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver par le Comité international olympique (CIO) le 24 juillet dernier. Cette attribution est le fruit d'une collaboration entre l'État, les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) et Auvergne-Rhône-Alpes (Aura), le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et le Comité paralympique et sportif français (CPSF).
L'attribution définitive des Jeux a été finalisée par la signature du contrat hôte olympique par le CIO le 9 avril 2025. Cette signature a été rendue possible grâce à la mise en place de plusieurs garanties apportées par l'État, notamment dans le cadre de la loi de finances pour 2025. Par ailleurs, le Premier ministre a signé les deux lettres de garantie nécessaires, l'une le 2 octobre 2024, l'autre le 14 mars 2025.
Nous devons collectivement mesurer la chance unique que nous avons d'organiser les jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 dans notre pays, six ans seulement après les Jeux de Paris 2024. Ils auront lieu du 1er au 17 février 2030 pour la période olympique et du 1er au 10 mars 2030 pour la période paralympique.
À cette occasion, nous accueillerons en France plus de 3 200 athlètes, 3 000 journalistes et 20 000 volontaires. Environ 2 millions de billets seront mis en vente. Au total, une vingtaine de collectivités locales françaises seront engagées dans ce magnifique projet.
La capacité à livrer un tel événement repose bien évidemment sur les organisateurs, qui jouent un rôle majeur, mais aussi sur l'engagement sans faille des forces de sécurité. Enfin, rien ne serait possible, je tiens à le souligner, mesdames, messieurs les sénateurs, sans votre travail, qui permet de doter le comité d'organisation d'un arsenal législatif donnant à chacun les moyens de remplir ses missions dans les meilleures conditions.
Tel est précisément l'objet de ce projet de loi : donner collectivement les moyens de réussir l'aventure des jeux Olympiques et paralympiques de 2030 dans les Alpes françaises. Ce texte est en quelque sorte une boîte à outils, qui permettra de réaliser les différents ouvrages nécessaires ; elle doit rester opérationnelle, précise et aussi concise que possible.
Ce projet de loi s'inscrit dans la continuité de l'expérience acquise, en reprenant les dispositions des précédentes lois votées en 2018 et en 2023 pour l'organisation des Jeux de Paris de 2024.
Aujourd'hui, nous renforçons ou nous améliorons certains dispositifs et nous en adaptons d'autres aux particularités des zones de montagne. Enfin, nous proposons de nouvelles mesures, utiles, en nous fondant sur le retour d'expérience des Jeux de Paris 2024.
La livraison d'un tel événement de portée mondiale est toujours complexe, mais elle suppose également de prendre en compte la spécificité d'un environnement, la montagne, confronté au changement climatique, auquel il faut s'adapter. Nous devons tous avoir conscience des craintes et des attentes que ce texte suscite. Ce projet doit être exemplaire du point de vue environnemental. Nous sommes bien sûr très attendus sur ce sujet.
De même, dans la période budgétaire que nous connaissons, nous devons trouver les voies et moyens pour organiser les Jeux dans le cadre d'un budget raisonné, raisonnable et maîtrisé.
Avant d'entrer dans le détail du texte, permettez-moi une petite incise plus générale. Souvenez-vous, nous avions, pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, de grandes ambitions. Nous voulions des Jeux populaires, inclusifs, responsables, paritaires, dans le cadre d'un budget maîtrisé. Nous avions évidemment aussi de fortes attentes en termes de médailles.
Vous en conviendrez, tous ces objectifs ont été atteints et certains même dépassés, le Comité d'organisation de Paris 2024 ayant dégagé un excédent budgétaire de 76 millions d'euros. Ce boni va revenir au sport français, et je m'en félicite. Néanmoins, cet excédent n'exclut pas, je tiens à être claire sur ce point, un budget ambitieux pour le ministère des sports. Je tenais à le dire, car certains, un peu facilement, pourraient être tentés de faire cette confusion.
À partir de 2018, dans la perspective des jeux de 2024 – j'étais bien placée pour le savoir –, la France avait doté le ministère des sports d'un budget important, ce qui nous a permis de faire preuve d'ambition de 2018 à aujourd'hui. Il ne serait pas entendable d'agir différemment dans la perspective des jeux de 2030. Les Jeux doivent être non pas une parenthèse, mais un levier en faveur du développement du sport d'ici à 2030.
Ces nouveaux moyens ont permis le développement de la pratique, l'émergence de nouveaux équipements et la rénovation d'autres, ainsi que l'accueil de nouveaux pratiquants, notamment ceux qui sont en situation de handicap. Il nous faut poursuivre dans cette voie.
Néanmoins, j'ai pleinement conscience de la gravité de la situation budgétaire que nous connaissons ; elle exige que nous ayons le sens des responsabilités et que nous fassions un bon usage des deniers publics. Mais je vois également dans ce contexte une occasion formidable de renforcer l'efficience de l'utilisation des deniers publics.
Dans une période où notre jeunesse peut parfois sembler désœuvrée, où la santé mentale est érigée en grande cause nationale et où la sédentarité et les problèmes de santé qui y sont associés progressent, on ne peut pas faire l'économie du sport. De plus en plus d'études le démontrent, investir dans le sport permet de réaliser des économies dans de nombreux domaines. Investir dans le sport, c'est aussi prévenir de futures dépenses publiques.
Je suis tentée de dire, et je suis sûre que vous me rejoindrez sur ce point, que préserver le budget du sport revient à garantir un retour sur investissement économique, social et de santé publique à court, à moyen et à long terme. Ces débats, nous les aurons lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2026. J'y serai particulièrement sensible et attentive.
J'en reviens au texte. Il compte trente-sept articles, que l'on peut répartir en quatre grandes séries de dispositions.
Les premières sont relatives à la livraison des Jeux, plus particulièrement au respect des stipulations du contrat hôte olympique conclu entre les régions, le CNOSF et le Comité international olympique.
Ces dispositions permettent d'attribuer au Comité d'organisation la qualité d'organisateur de compétitions sportives. Elles transfèrent des droits de propriété intellectuelle du CNOSF au Cojop. Un certain nombre de mesures garantissent aussi les droits des partenaires, y compris en matière de publicité.
La deuxième série de dispositions vise à instaurer un cadre éthique et un contrôle strict de l'Agence française anticorruption, mais aussi de la Cour des comptes, ainsi qu'une extension des compétences de l'Agence française de lutte contre le dopage.
La troisième série de dispositions vise à faire en sorte que les Jeux se déroulent dans de bonnes conditions, notamment en matière de réalisation d'infrastructures, grâce à la simplification des procédures, comme cela a été fait lors de Paris 2024. Tel est notamment l'objet des permis à double état délivrés pour la construction des villages olympique et paralympique. Bien que les bâtiments aient une seconde vie, leur construction ne nécessite qu'un seul permis.
Ces dispositions, qui s'appuient sur la réussite de Paris 2024, tiennent également compte des spécificités des territoires de montagne. Ainsi, l'article 20, qui prévoit une expérimentation, vise à accélérer la rénovation énergétique des immeubles collectifs en copropriété, afin de lutter contre le phénomène des lits froids, un sujet crucial dans nos territoires de montagne. Il s'agit d'une mesure forte en matière d'héritage.
Certaines dispositions visent à prévoir de bonnes conditions de sécurité lors des Jeux en tirant les enseignements de Paris 2024.
Ces mesures s'appuient sur ce qui a fonctionné en 2024, tout en levant des freins qui ont alors été identifiés. Je pense aux interdictions de paraître qui, pour les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, passaient par la prise de mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (Micas) très contraignantes. La mesure proposée dans ce projet de loi est plus simple administrativement : le texte prévoit une interdiction de paraître limitée aux sites où se dérouleront les épreuves.
Enfin, l'article 36 vise à pérenniser les mesures d'assainissement prises pour les bateaux et les établissements flottants, en aval de Paris, afin de garantir la baignabilité de la Seine. C'est là un très bel exemple de l'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.
Le texte initial a été examiné par les cinq commissions saisies au fond et pour avis. Un certain nombre d'amendements ont été adoptés, afin d'apporter des précisions utiles. D'autres ont visé à modifier substantiellement le texte et amené le Gouvernement à présenter des amendements de rétablissement.
Il en est ainsi de l'article 5, qui prévoyait d'autoriser les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur à contribuer à la garantie accordée au CIO pour couvrir un éventuel déficit du Cojop. Cette disposition ouvrait seulement une possibilité, laquelle ne pouvait reposer que sur l'existence d'un accord entre l'État et les régions.
Les régions ont indéniablement joué un rôle majeur dans l'obtention de ces Jeux. L'État a apporté les garanties demandées par le Comité international olympique. Au regard de l'enjeu de sobriété budgétaire qui nous incombe collectivement, il m'apparaît utile que chacun puisse être solidaire d'un déficit éventuel.
Il en va de même pour l'article additionnel 18 bis adopté en commission, qui prévoit que l'artificialisation inhérente aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ne sera pas décomptée dans le ZAN.
Si les projections d'artificialisation étaient importantes, la question se poserait en effet de ne pas obérer les capacités d'artificialisation des communes concernées. Cependant, le projet des Alpes 2030 sera particulièrement économe en surfaces à artificialiser, puisque 95 % des sites de compétition des Jeux existent déjà. Le seul bâtiment neuf réalisé le sera à Nice – c'est une patinoire –, sur un site déjà urbanisé.
Il en va de même pour les villages de Nice et de Briançon. Seuls les villages de Savoie et de Haute-Savoie seront réalisés sur du foncier non artificialisé, ainsi que, potentiellement, quelques bâtiments connexes. Alors que l'un des enjeux de ce projet est d'être vertueux d'un point de vue écologique, comptabiliser cette artificialisation raisonnable dans le ZAN me semble nourrir cette ambition.
D'autres amendements adoptés en commission visent à enrichir le débat parlementaire et à ouvrir des perspectives qui ne figuraient pas dans le texte initial. Je pense notamment à l'amendement de M. le rapporteur Kern ; ce dernier a supprimé la présence des parlementaires au sein du comité d'éthique et des rémunérations du comité d'organisation, préférant la remise d'un rapport annuel au Parlement. Il vous appartient de définir de quelle façon vous souhaitez être associés à ces enjeux importants, mesdames, messieurs les sénateurs.
En outre, Mme la rapporteure Berthet a déposé un amendement visant à compléter l'article 24 concernant les servitudes relatives aux pistes de ski et aux remontées mécaniques, afin d'y introduire l'accès aux tremplins et à la piste de bobsleigh. Le texte initial incluait les rampes de neige. Néanmoins, nous comprenons que cette précision puisse être utile, dans la mesure où elle ne crée pas d'a contrario.
L'adoption d'autres amendements a permis de clarifier certains points de la version initiale du texte. Ainsi de celui de M. le rapporteur Arnaud qui vise à clarifier les conditions d'extension du dispositif d'enquête administrative pour les personnels intérimaires travaillant au sein des entreprises de transport collectif. Il en va de même de l'amendement de M. le rapporteur Michallet tendant à corriger un oubli dans la version initiale du texte.
Enfin, différents amendements de Mme la rapporteure Demas ont pour objet de renforcer le cadre de contrôle et d'exercice des médecins amenés à intervenir pendant les jeux Olympiques et Paralympiques.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je connais votre attachement à la fois à la bonne organisation des jeux des Alpes françaises de 2030 et à la réussite collective et responsable de ce projet, sur le modèle des Jeux de Paris 2024. Je me réjouis par avance de la qualité des échanges que nous allons avoir sur ce projet de loi.