M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.

Mme Frédérique Puissat. Je veux rappeler à M. le ministre que l'État a ponctionné 13 milliards d'euros à l'Unédic. Sans cet acte politique, nous ne serions pas déficitaires ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Bravo !

M. Jean-François Husson. De toute façon, l'État fait ce qu'il veut, quand il veut, comme il veut…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Éric Kerrouche, rapporteur. J'entends les propos de notre collègue. Toutefois, il faut raison garder.

Je rappelle juste que nous proposons de mettre en place un statut de l'élu local. Ce n'est pas, à titre personnel, le statut que j'appelle de mes vœux ; néanmoins, il marque une progression dans plusieurs domaines. Par définition, un statut doit encadrer trois moments du mandat : avant, pendant et après son exercice.

La solution que nous proposons pour l'allocation prévue à l'article 27 constitue précisément une forme de compensation au cas où. Compte tenu des publics concernés, cette mesure n'aura pas, me semble-t-il, d'incidence significative sur notre déficit. (Mme Élisabeth Doineau fait un signe de dénégation.) Elle offre en revanche une perspective aux élus, en leur permettant de savoir qu'ils pourront, à un moment donné, quitter leur mandat dans de bonnes conditions.

Cela vaut pour la validation des acquis de l'expérience comme pour l'allocation évoquée à l'article 27.

Il convient de garder la mesure dans les comparaisons que l'on établit avec le déficit global : la disposition concernera un nombre limité de personnes et vise seulement à accompagner les élus jusqu'à la fin de leur mission.

Encore une fois, si nous n'abordons pas la question de la sortie du mandat, il sera difficile de prétendre que nous mettons en place un statut complet. Ce raisonnement vaut pour la mesure adoptée à l'article 26 comme pour celle de l'article 27 : il s'agit d'apporter une sécurité et de donner une véritable lisibilité à la trajectoire des élus lorsqu'ils cessent d'exercer leurs fonctions.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. La démonstration vient d'en être faite par le rapporteur : il s'agit non pas de faire de la fonction d'élu un métier, au sens où vous l'entendez, mais bien de bâtir un statut – d'autant que les élus cotisent d'une manière ou d'une autre. Lorsqu'on s'interroge sur les dispositifs à mettre en place pour la fin de mandat ou l'après-mandat, il faut tenir compte du fait que les élus versent des cotisations, y compris à l'Ircantec, comme l'a rappelé Ronan Dantec.

Ce n'est donc pas un métier, mais c'est un statut dont nous définissons aujourd'hui les normes et les règles pour l'avant, le pendant et l'après-mandat. Il me paraît dès lors légitime de réfléchir à la manière dont les élus sortiront de leurs fonctions.

Il est également logique d'apporter de la clarté à celles et ceux qui souhaitent s'engager dans la vie publique, alors qu'ils exercent déjà une profession, disposent de revenus ou de droits à la retraite liés à leurs cotisations professionnelles, en leur disant : « Voilà ce qui se passera à la fin de votre mandat. »

Cette mesure ne concernera qu'un nombre limité de personnes. Peut-être, à terme, davantage d'élus s'engageront grâce à ce statut et aux avancées qu'il permettra. Mais en aucun cas on ne saurait considérer que les difficultés que connaît aujourd'hui notre pays en matière de retraites ou de déficit public seraient liées aux dispositions que nous adoptons sur le statut de l'élu.

Je partage donc l'avis du rapporteur et celui de la commission, et nous voterons contre ces amendements et ce sous-amendement.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 238 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 175 rectifié et 180 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 27.

(L'article 27 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le moment est venu pour moi de vous laisser à vos travaux, même si l'actualité quelque peu chargée m'amènera à revenir bien vite… (Sourires.) J'aurai grand plaisir à vous retrouver pour aborder d'autres sujets sérieux, que nous avons d'ailleurs un peu évoqués ce soir. Je sais que nous sommes attendus.

Je vous remercie toutes et tous de votre accueil et vous salue. (Applaudissements.)

M. le président. Nous en revenons au cours normal de la discussion du texte de la commission.

Nous poursuivons, au sein du chapitre II du titre II, l'examen de l'article 9 bis.

TITRE II (SUITE)

FACILITER L'ENGAGEMENT DES ÉLUS LOCAUX ET AMÉLIORER LES CONDITIONS D'EXERCICE DU MANDAT

Chapitre II (Suite)

Faciliter la conciliation du mandat avec l'exercice d'une activité professionnelle

Article 27 (priorité)
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Après l'article 9 bis

Article 9 bis (suite)

Le code du travail est ainsi modifié :

1° (Supprimé)

2° (nouveau) La sous-section 8 de la section 2 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie est ainsi modifiée :

a) L'intitulé est ainsi rédigé : « Temps d'absence et congés des salariés candidats ou élus à un mandat parlementaire ou local » ;

b) Au début, il est ajouté un paragraphe 1 intitulé : « Congés des salariés candidats ou élus à un mandat parlementaire ou local » et comprenant les articles L. 3142-79 à L. 3142-88 ;

c) À l'article L. 3142-87, les mots : « de la présente sous-section » sont remplacés par les mots : « du présent paragraphe » ;

d) Il est ajouté un paragraphe 2 ainsi rédigé :

« Paragraphe 2

« Temps d'absence des salariés élus à un mandat local

« Art. L. 3142-88-1. – Les dispositions applicables aux salariés titulaires d'un mandat local sont définies :

« 1° Aux articles L. 2123-7 et 2123-25 du code général des collectivités territoriales pour les salariés membres d'un conseil municipal ;

« 2° Aux articles L. 3123-5 et L. 3123-20 du même code pour les salariés membres d'un conseil départemental ;

« 3° Aux articles L. 4135-5 et L. 4135-20 dudit code pour les salariés membres d'un conseil régional. »

M. le président. Les amendements nos 32 rectifié quater, 38 rectifié ter, 46 rectifié quinquies, 214 et 237 sont identiques.

L'amendement n° 32 rectifié quater est présenté par M. Menonville, Mme Antoine, MM. Henno, Mizzon, Maurey, Kern et Dhersin, Mme Florennes, MM. Pillefer, Bitz et Duffourg, Mmes Billon et Perrot, MM. Delcros et Courtial, Mmes Gacquerre et Jacquemet et M. Bleunven.

L'amendement n° 38 rectifié ter est présenté par M. Bacci, Mme Bellamy, M. Sido, Mmes Dumont et Bellurot, M. Grosperrin, Mme Canayer, M. Séné, Mmes Drexler et Aeschlimann et MM. Burgoa, Panunzi, Gueret, P. Vidal, Delia et Rojouan.

L'amendement n° 46 rectifié quinquies est présenté par MM. Haye, Cambier et Levi, Mme Morin-Desailly et MM. Canévet, L. Hervé et Hingray.

L'amendement n° 214 est présenté par M. Longeot.

L'amendement n° 237 est présenté par Mme Demas.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... – L'article L. 2123-25 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : « et des avantages sociaux tels que définis par voie règlementaire ».

La parole est à Mme Jocelyne Antoine, pour présenter l'amendement n° 32 rectifié quater.

Mme Jocelyne Antoine. Cet amendement tend à une assimiler systématiquement le temps d'absence légal à du temps de travail effectif pour la détermination des avantages sociaux tels que, notamment, les réductions du temps de travail, les treizièmes mois, les primes diverses et les tickets-restaurant.

En effet, le CGCT dispose expressément qu'il est interdit à tout employeur de prendre en considération les absences liées à l'exercice d'un mandat pour arrêter ses décisions en ce qui concerne l'octroi d'avantages sociaux.

M. le président. La parole est à M. Jean Bacci, pour présenter l'amendement n° 38 rectifié ter.

M. Jean Bacci. Mon amendement est quasi identique, dans son objet, à l'amendement n° 26 rectifié quinquies de ma collègue Sylviane Noël et qui a été adopté avant la suspension.

Il vise à ce que le temps d'absence légal d'un élu municipal soit assimilé à une durée de travail effective pour la détermination du droit aux prestations sociales « et des avantages sociaux tels que définis par voie réglementaire ».

Il serait souhaitable que ce principe soit inscrit dans le CGCT, en complément de l'article L. 2123-8 du même code.

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l'amendement n° 46 rectifié quinquies.

M. Loïc Hervé. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 214 et 237 ne sont pas soutenus.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Éric Kerrouche, rapporteur. Comme le rappelle l'objet même de ces amendements, l'article L. 2123-8 du CGCT interdit à tout employeur de prendre en considération les absences des salariés titulaires d'un mandat local pour arrêter ses décisions en ce qui concerne l'octroi des avantages sociaux.

Il n'est donc pas utile de mentionner à nouveau, dans un article du même chapitre de ce code, que les salariés élus locaux ne peuvent pas, au regard de la loi, être pénalisés pour l'octroi d'avantages sociaux du fait de leurs absences au travail pour l'exercice de leur mandat local.

Je sais, chers collègues, que j'ai dit la même chose tout à l'heure et que vous ne m'avez pas cru ! Néanmoins, je le répète encore une fois : il n'est pas nécessaire d'ajouter cette disposition.

Ces amendements étant déjà satisfaits, j'en sollicite le retrait ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Même avis : retrait, sinon avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 32 rectifié quater, 38 rectifié ter et 46 rectifié quinquies.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis, modifié.

(L'article 9 bis est adopté.)

Article 9 bis (suite)
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Article 10

Après l'article 9 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 7 rectifié bis est présenté par Mme Romagny, M. J.B. Blanc, Mme Herzog, MM. Henno, Cambier et Genet, Mme Guidez, M. Duffourg, Mme Billon, MM. Menonville, Milon et Parigi, Mme Morin-Desailly, M. Courtial, Mme Saint-Pé, MM. Delcros, Lemoyne et Bruyen et Mmes Jacquemet et Antoine.

L'amendement n° 234 est présenté par Mme Demas.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 9 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le titre II du livre Ier de la première partie du code du travail, il est inséré un titre ... ainsi rédigé :

« Titre...

« Garanties accordées aux salariés titulaires d'un mandat municipal

« Chapitre unique

« Art. L. .... – Dans l'exercice de leur activité professionnelle, les salariés titulaires d'un mandat municipal bénéficient des dispositions de la section 1 du chapitre III du titre II du livre premier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales. »

La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour présenter l'amendement n° 7 rectifié bis.

Mme Anne-Sophie Romagny. Le présent amendement vise à rendre plus lisibles auprès des directions des ressources humaines les dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux garanties accordées aux titulaires de mandats municipaux en créant un article de renvoi au sein du code du travail.

Cet amendement est rédigé de manière que la référence ainsi créée ne soit pas exclusive d'autres dispositions ou droits dont peuvent bénéficier les élus municipaux.

M. le président. L'amendement n° 234 n'est pas soutenu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Éric Kerrouche, rapporteur. Madame Romagny, la commission comprend votre souci. Néanmoins, votre amendement a exactement le même objet que la création d'un renvoi au sein du code du travail vers les dispositions du CGCT pour mettre en avant les garanties des salariés élus locaux, notamment en ce qui concerne leur droit à absences et les garanties qui y sont liées, qui vient d'être adoptée à l'article 9 bis.

Votre amendement est donc redondant avec ces dispositions que nous venons de voter.

De plus, il tend à insérer ces dispositions à un autre endroit du code, ce que nous estimons moins favorable et moins lisible – il n'est pas utile de créer un titre entier pour un seul article.

Nous partageons votre préoccupation, mais, dès lors que votre demande est satisfaite, nous sollicitons le retrait de votre amendement ; à défaut, l'avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Françoise Gatel, ministre. Madame la sénatrice, comme M. le rapporteur, nous comprenons très bien le souci qui est le vôtre de viser juste et de viser simplement.

Dans le même temps, nous souhaitons que la rédaction des codes soit aussi simple que possible, et la demande que vous formulez est d'ores et déjà satisfaite.

Par conséquent, le Gouvernement sollicite le retrait de votre amendement.

M. le président. Madame Romagny, l'amendement n° 7 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Anne-Sophie Romagny. J'entends les arguments de lisibilité ; ils m'importent. Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 7 rectifié bis est retiré.

Après l'article 9 bis
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local
Article 11

Article 10

I. – La première partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifiée :

1° Le chapitre unique du titre II du livre VI est complété par un article L. 1621-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 1621-6. – I. – L'employeur privé ou public d'un élu local, les travailleurs indépendants, les membres des professions libérales et non salariées qui sont titulaires d'un mandat d'élu local peuvent conclure avec la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont l'élu est membre une convention qui précise les mesures destinées à faciliter, au-delà des obligations prévues par le présent code, l'exercice du mandat local.

« L'employeur ayant conclu cette convention peut se voir attribuer le label “employeur partenaire de la démocratie locale”, dans des conditions prévues par décret. Ce décret détermine notamment les critères d'attribution du label, qui tiennent compte du taux de présence des élus locaux dans l'entreprise ou l'organisme public ou privé, du nombre d'heures d'autorisation d'absence avec maintien de la rémunération et des conditions de disponibilité pour formation.

« La collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont l'élu est membre adresse à l'employeur qui s'est vu attribuer ce label toute information utile à la mise en œuvre de la réduction d'impôt prévue à l'article 238 bis du code général des impôts.

« II. – (Supprimé)

« III. – L'employeur titulaire du label mentionné au I du présent article peut utiliser le logo de ce label, notamment dans ses supports de communication. Son utilisation ne doit toutefois pas nuire à l'image des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale et des élus concernés. » ;

2° (Supprimé)

II. – (Supprimé)

III. – L'article L. 22-10-35 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Les actions visant à promouvoir l'engagement des citoyens dans la démocratie locale et, le cas échéant, le bénéfice du label “employeur partenaire de la démocratie locale” mentionné à l'article L. 1621-6 du code général des collectivités territoriales. » ;

2° À l'avant-dernier alinéa, après la référence : « L. 233-26 », sont insérés les mots : « du présent code » et les mots : « et 2° » sont remplacés par les mots : « à 3° du présent article ».

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, sur l'article.

M. Simon Uzenat. Cet article crée un label « employeur partenaire de la démocratie locale ». Nous souscrivons évidemment à cet objectif. Cependant, et nous avons déjà eu l'occasion de débattre lors de la première lecture, il faut que la fonction publique au sens large soit pleinement mobilisée.

J'espère que vous m'écoutez, madame la ministre, car le message vous est directement destiné…

À cet égard, nous avons interpellé plusieurs de vos prédécesseurs. En effet, lorsque l'on regarde ce qui se passe dans l'éducation nationale, dans un certain nombre d'établissements de santé ainsi que dans les directions des finances publiques, on se rend compte que l'État est très, très loin d'être exemplaire dans la façon dont il traite ses agents qui sont par ailleurs élus locaux.

Nous avons recueilli de nombreux témoignages d'élus dont on peut dire qu'ils sont non pas seulement incorrectement traités en raison de leur engagement électif, mais véritablement maltraités.

Cette situation, madame la ministre, n'est absolument pas acceptable.

Sur la possibilité de libérer des créneaux, mais aussi, évidemment, sur la rémunération – facultative – des heures d'absence, qui fait également l'objet du label en question, il faut que l'État soit au rendez-vous.

J'espère donc pouvoir compter sur vous pour bien faire passer le message à vos collègues et pour que celui-ci redescende jusqu'aux niveaux les plus locaux.

Entre méconnaissance et, parfois, maltraitance – honnêtement, nous en sommes là –, des élus nous ont rapporté qu'ils vivaient des situations personnelles particulièrement éprouvantes dans le cadre de leur activité professionnelle.

Il est temps de prendre la mesure de la situation et de prendre les dispositions qui s'imposent. J'espère pouvoir compter sur vous, madame la ministre !

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l'article.

M. Marc Laménie. Je salue le travail de la commission des lois sur ce texte important. Le rapport est de qualité, et je mesure le travail qu'a représenté la rédaction de ses 170 pages.

J'irai dans le même sens que mon collègue concernant l'article 10, relatif à la création du label « employeur partenaire de la démocratie locale ».

S'exprimant sur les articles précédents, de nombreux collègues ont rappelé que l'engagement, le dévouement, le fait d'être tourné vers les autres, de ne pas compter son temps sont des qualités humaines que doivent avoir les élus de proximité, dont l'engagement est bénévole ou quasi bénévole.

Cette valorisation de l'engagement au niveau des employeurs qui emploient des élus locaux est aussi une marque de confiance à l'égard de ces derniers.

On peut établir un parallèle avec les sapeurs-pompiers salariés, car c'est en soutenant ce très grand engagement que l'on peut susciter des vocations. De fait, le partenariat avec les entreprises est essentiel pour que les sapeurs-pompiers puissent dégager du temps et de la disponibilité. Les collectivités territoriales le proposent également.

La commission des lois a introduit un dispositif pour ces conventions entre employeurs publics et privés et associations représentatives d'élus. Ce nouveau label s'inscrit dans le même esprit.

Notre groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc cet article.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, sur l'article.

M. Jean-Marie Mizzon. Nous savons tous que l'exercice d'un mandat local est très difficile, singulièrement lorsque l'on est salarié, qui plus est salarié du privé, et plus encore salarié d'une petite entreprise. Imagine-t-on la difficulté que représente, pour celui qui travaille chez un boulanger, le fait de demander une autorisation d'absence à son patron ?

Mais je voudrais, ce soir, madame la ministre, insister sur une situation qui n'est pas souvent évoquée ici, parce que nous n'avons pas le pouvoir de lui trouver une solution – seul l'exécutif l'a – : celle des salariés transfrontaliers. De fait, les Français salariés au Luxembourg ou en Allemagne – pour ce qui concerne mon département – ou en Italie ou en Espagne n'ont aucun droit.

Que des entreprises soient partenaires de la démocratie locale est une excellente chose. Mais il faut bien se rendre compte que, dans les départements frontaliers, un tel label n'a pas de sens ! Cela ne parle à personne. Je l'ai dit maintes fois ici et à mes préfets successifs, mais je ne vois la situation avancer en rien.

Dans certaines communes de mon département, par exemple, 90 % à 95 % de la population travaille de l'autre côté de la frontière, en Allemagne, au Luxembourg, voire en Belgique. Or ces salariés n'ont aucun droit !

Le risque est grand qu'il n'y ait, demain, aucun candidat à l'exercice des mandats locaux dans ces communes, parce que l'on ne peut pas être au four et au moulin.

Je sais que vous m'avez entendu, madame la ministre. Surtout, je sais que vous m'avez compris et que vous agirez, et je vous en remercie ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Jean Bacci et Olivier Paccaud applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, sur l'article.

M. Ronan Dantec. La question est importante.

Il se trouve que les maires de l'ouest de la Loire-Atlantique étaient réunis en assemblée générale samedi dernier – je salue mes collègues ici présents qui y ont participé. Notre collègue Jean-Marie Mizzon a évoqué les petites entreprises, mais, dans ce grand bassin industriel, les maires sont plutôt employés de grandes entreprises. Ils ont témoigné de l'ampleur de la dégradation, dans ces entreprises, de l'acceptation de l'action de l'élu local.

Longtemps, les très grandes entreprises ont globalement été assez favorables à compter quelques élus locaux en leur sein, ces derniers leur servant parfois à faire passer des messages sur le territoire. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas.

Ces maires nous parlent de la dégradation de leur situation dans les grandes entreprises. Outre qu'il doit participer à des événements qui sont prévus – typiquement, aux réunions du conseil municipal –, un maire peut être obligé de partir précipitamment à l'occasion d'un décès, d'un accident, etc. Or certaines entreprises rechignent aujourd'hui à laisser les élus partir et à se montrer souples.

Il faut trouver une solution. Sans vouloir du tout faire injure à ceux qui ont proposé le label, nous voyons bien que nous bricolons un peu pour que ces grandes entreprises prennent conscience de la dégradation de la prise en compte du travail de l'élu local.

Je me demande, en complément, si le rapport RSE des entreprises ne devrait pas comporter un paragraphe sur la manière dont elles gèrent ceux qui, dans l'entreprise, sont aussi élus locaux.

Quoi qu'il en soit, cette dégradation de l'acceptation de l'action de l'élu local dans les entreprises est un enjeu dont nous entendons énormément parler sur le terrain.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Françoise Gatel, ministre. Le sujet que nous abordons est tout aussi important que les autres points du texte.

Je souhaite faire écho à ce que les uns et les autres ont pu dire.

Nous savons tous qu'une grande majorité de maires sont des retraités, parce que c'est un moment de leur vie où ils ont envie de donner, de servir, de se sentir utiles. Pour ma part, je m'en réjouis.

Cependant, nous devons aussi permettre de faciliter l'engagement des personnes qui travaillent et même des étudiants – tel est précisément l'objectif de ce texte.

Pour autant, il ne faut pas ignorer la réalité des entreprises. Je prendrai un exemple. Comme beaucoup d'entre nous ici, j'ai été maire, et je vous avoue que, lorsque les trois pompiers volontaires de l'équipe des espaces verts de ma commune devaient lâcher les tondeuses le vendredi après-midi, mes concitoyens avaient du mal à admettre que la pelouse ne fût pas correctement tondue… La réalité est donc compliquée.

J'entends, monsieur le sénateur Uzenat, que l'État doit être exemplaire et qu'il doit mettre en œuvre les adaptations nécessaires pour permettre à un fonctionnaire d'exercer son mandat.

Pour ma part, je n'ai pas le sentiment que les fonctionnaires élus sont maltraités. Je connais beaucoup de maires qui sont fonctionnaires. Certains sont dans des situations particulièrement difficiles, comme les enseignants, les médecins et les infirmières, que vous avez évoqués, monsieur le sénateur. Il faut avouer qu'il est un peu compliqué, pour un proviseur, de gérer, la veille pour le lendemain, la demande d'absence d'un enseignant qui ne pourra pas assurer le face-à-face pédagogique que les élèves et les parents attendent… De même, il est compliqué, pour une infirmière, d'expliquer qu'elle ne reviendra s'occuper des malades que le lundi parce qu'elle a besoin de s'absenter.

J'ai déjà échangé sur la situation dans l'éducation nationale avec Élisabeth Borne, et je reprendrai la conversation avec son successeur. On m'a déjà dit que l'on essaierait d'y être attentif. Pour ma part, je le suis, mais il faut prendre en compte la spécificité des situations.

Pour ce qui concerne les transfrontaliers, cher monsieur Mizzon, je vous ai entendu ! Je dirais même que je vous ai compris… (Sourires.) Laissez-moi vous répondre.

M. Jean-Marie Mizzon. Je vous écoute ! (Mêmes mouvements.)

Mme Françoise Gatel, ministre. Je pense que vous et moi serons d'accord pour dire que, si la loi française s'applique aux entreprises françaises, le Sénat ne peut, malgré tout son pouvoir, obliger les entreprises suisses ou allemandes à suivre des consignes que nous aurions – nous, et non l'Europe – décidées. C'est la limite de l'exercice.

Je sais très bien que vous m'avez entendue, que vous m'avez écoutée et que vous m'avez comprise. (Sourires sur les travées du groupe UC.)

J'entends que la situation des petites entreprises constitue une particularité. Quand vous êtes employé chez un boulanger, quand vous êtes vous-même boulanger, vous êtes confronté au même problème que l'enseignant ou l'infirmière : vous ne pouvez pas quitter votre fournil pour vous rendre à la mairie.

Ces situations resteront compliquées. Je pense que le travail que nous sommes en train de faire ici ne réglera pas tout, compte tenu de la diversité de situations. Cependant, nous devons continuer à progresser, pour améliorer les choses.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Bien dit, madame la ministre !

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l'article.

Mme Cécile Cukierman. Cet article est lui aussi essentiel : il doit à permettre à celles et à ceux qui ont une activité professionnelle de rendre celle-ci compatible avec leur mandat d'élu.

Mes propos surprendront peut-être, mais je pense que l'on ne peut pas tout mettre sur le même plan. Je suis sincèrement désolée, mais la situation d'un enseignant n'est pas comparable à celle d'un salarié de la boulangerie !

De fait, nous sommes d'abord les héritiers d'un certain nombre de lois qui ne sont pas satisfaisantes.

Mme Françoise Gatel, ministre. Oui !

Mme Cécile Cukierman. Pour y avoir été confrontée en tant qu'enseignante, je pourrais vous en retracer l'histoire et notamment vous expliquer pourquoi, après qu'un ministre qui avait des comptes à l'étranger eut déclaré le contraire, « les yeux dans les yeux », devant l'Assemblée nationale, on a refait une loi qui a fragilisé la fonction publique dans le statut de l'élu qui lui est propre.

Cependant, quand vous êtes fonctionnaire, vous pouvez demander un temps partiel et, une fois le mandat terminé, vous pouvez demander à reprendre votre activité à temps complet. Autrement dit, tout va bien !

Quand vous êtes salarié du privé, comme je l'ai déjà dit plusieurs fois, ce n'est pas la même histoire.