Peut-être pourrions-nous aborder ce débat de manière plus sereine, en nous demandant s’il revient bien à la sécurité sociale de soutenir les filières viticoles ou industrielles. Lui appartient-il vraiment d’aider les PME ?
Je suis la première à convenir de la nécessité de mener des politiques économiques dans certains secteurs. Faut-il pour autant démunir notre système de protection sociale ? Ce n’est pas mon avis, car une telle orientation joue contre l’intérêt de tous : elle signifie moins d’hôpitaux, moins de protection, des pensions moindres, etc.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Non, madame Gruny, nous n’avons pas changé !
Je souhaite toutefois que la discussion retrouve son sérieux : vous affirmez avec un aplomb incroyable que les travailleurs réclament des primes et de l’intéressement ; eh bien, nous ne croisons pas les mêmes interlocuteurs !
M. Olivier Paccaud. Ils veulent du pouvoir d’achat !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Je peux vous l’assurer : ce que les travailleurs de ce pays exigent aujourd’hui, comme Mme Lubin l’a fort bien rappelé, ce sont des augmentations de salaire.
Mme Sophie Primas. De salaire net !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Les salaires sont trop bas, ils ne sont pas à la hauteur.
Je vous rappelle d’ailleurs que les primes et l’intéressement ne sont pas pérennes et n’ouvrent aucun droit à la retraite. Évidemment, tout cela suscite votre intérêt, car cela coûte moins cher à l’entreprise, puisque ces dispositifs sont assortis d’exonérations.
Nous ne rencontrons décidément pas les mêmes personnes dans les entreprises.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1169 rectifié, 1317 rectifié et 1667 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1004.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 8 bis (nouveau)
I. – À titre expérimental, jusqu’au 31 décembre 2028, par dérogation au I de l’article L. 731-15 du code rural et de la pêche maritime, les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole peuvent opter pour que leurs cotisations soient calculées sur la base d’une estimation de leurs revenus professionnels de l’année en cours, sous réserve d’une régularisation ultérieure fondée sur les revenus professionnels définitifs constatés dans les conditions prévues à l’article L. 731-14 du même code.
II. – Un décret définit les conditions de mise en œuvre de l’expérimentation prévue au I du présent article. Il détermine notamment le délai minimal dans lequel les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole doivent formuler l’option mentionnée au même I avant sa prise d’effet, la durée minimale de validité de cette option ainsi que les conditions de sa reconduction et de sa dénonciation.
III. – Le présent article entre en vigueur le 1er octobre 2026.
M. le président. L’amendement n° 600, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation, portant notamment sur la pertinence de sa généralisation.
…. – L’article 21 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025 est abrogé.
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de précision.
M. le président. Le sous-amendement n° 1805 rectifié ter, présenté par MM. Cabanel, Duplomb et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mme Girardin, est ainsi libellé :
Amendement n° 600, alinéa 3
1° Remplacer les mots :
Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation,
par les mots :
Au plus tard le 31 décembre 2027, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de ladite expérimentation,
2° Compléter cet alinéa par les mots :
au 1er janvier 2029
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Ce sous-amendement tend à avancer de trois mois le délai limite d’évaluation prévu dans l’amendement de Mme la rapporteure générale pour le fixer au 31 décembre 2027.
Si l’évaluation se révèle convaincante, la généralisation du système pourra ainsi intervenir au 1er janvier 2028.
Je rappelle qu’il s’agit de permettre aux agriculteurs de s’acquitter de leurs cotisations sociales sur la base de l’année n. Cette catégorie socioprofessionnelle est la seule à ne pas disposer de ce choix.
Nous avions voté à l’unanimité une disposition identique lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2025. Malheureusement, monsieur le ministre, le décret correspondant n’a pas été publié et il nous faut remettre l’ouvrage sur le métier. Pour cela, un amendement a été déposé à l’Assemblée nationale et la rapporteure générale vient de proposer d’apporter une précision, mon sous-amendement tendant simplement à anticiper l’évaluation de trois mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ce sous-amendement ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement comme au sous-amendement.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1805 rectifié ter.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 600, modifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 392 rectifié, présenté par MM. Menonville, Mizzon, Pointereau et Bacci, Mme Billon, MM. Canévet, Dhersin et Kern, Mmes Antoine et Patru, MM. de Nicolaÿ, A. Marc et Bleunven, Mme Paoli-Gagin et M. Haye, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :
IV. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 731-10-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du II de l’article L. 731-15, en cas de cessation d’activité du chef d’exploitation ou d’entreprise agricole quelle qu’en soit la cause, les cotisations mentionnées au premier alinéa dues au titre de l’année au cours de laquelle est survenue la cessation, sont calculées selon les dispositions du I de l’article L. 731-15. » ;
2° Le II de l’article L. 731-15 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « précédant celle » sont supprimés ;
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les cotisations sont calculées, chaque année, à titre provisionnel, en pourcentage du revenu professionnel de l’année précédente. Pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole qui ont effectué l’option mentionnée à l’alinéa précédent lors de leur affiliation au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles ou lorsque la durée d’assujettissement ne permet pas de déterminer ledit revenu professionnel, les cotisations sont calculées à titre provisionnel sur la base d’une assiette fixée forfaitairement dans des conditions déterminées par décret. Lorsque le revenu professionnel est définitivement connu, la cotisation fait l’objet d’une régularisation.
« Par dérogation au précédent alinéa, les cotisations peuvent être calculées à titre provisionnel sur la base d’une assiette forfaitaire dès lors que les éléments d’appréciation sur l’importance des revenus professionnels des assurés au cours de l’année au titre de laquelle la cotisation est due établissent que ces revenus sont différents de l’assiette retenue en application de cet alinéa. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret. »
V. – Le IV du présent article entre en vigueur au 1er janvier 2027.
VI. – Pour compenser la perte de recettes résultant du IV, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Anne-Sophie Patru.
Mme Anne-Sophie Patru. L’an dernier avait été proposée une expérimentation visant à calculer les cotisations des chefs d’entreprise avec une assiette forfaitaire, avant régularisation, sur la base des revenus de l’année.
Faute de mise en œuvre de ce dispositif, les agriculteurs demeurent dans l’attente d’une réponse à la forte variabilité de leurs revenus ; ils sont contraints de solliciter chaque année des mesures exceptionnelles pour les secteurs en crise.
Dans un contexte d’aléas fréquents et de variations importantes des revenus, il apparaît nécessaire d’adapter le mécanisme de calcul des cotisations pour mieux coller à la réalité économique des exploitations.
À ce jour, deux assiettes coexistent : la moyenne triennale, qui apporte une certaine stabilité, et l’assiette n-1, plus réactive, mais parfois insuffisamment représentative lorsque les revenus évoluent rapidement d’une année à l’autre.
Environ un tiers des exploitants a besoin de disposer d’une assiette plus contemporaine, permettant de tenir compte des revenus de l’année en cours.
C’est pourquoi il est proposé d’introduire, à partir de 2027, une option permettant de cotiser sur les revenus réels de l’année n. Le fonctionnement en serait simple : un acompte fondé sur le dernier revenu connu, avec la possibilité pour l’exploitant de l’ajuster si nécessaire, suivi d’une régularisation une fois les revenus de l’année établis.
Cette option serait engagée pour cinq ans, sur le modèle des dispositifs existants, afin d’assurer stabilité et lisibilité. En cas de cessation d’activité, elle serait automatiquement levée pour éviter des situations inadaptées au moment de la transmission ou de l’arrêt de l’activité.
L’inscription de cette mesure dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, pour une entrée en vigueur en 2027, permettrait de fixer un cadre clair et de laisser le temps aux organismes sociaux d’adapter leurs systèmes. Il s’agit d’une évolution pragmatique, destinée à offrir aux exploitants un outil supplémentaire pour gérer la variabilité de leurs revenus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’amendement que vous présentez soulève une difficulté : son objet ne s’articule pas bien avec l’article 8 bis, que nous venons d’adopter et qui prévoit une expérimentation sur le même sujet.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Sans prolonger les discussions outre mesure, relevons que la mise en œuvre de cet amendement entraînerait des complications peut-être plus importantes que les difficultés qu’il vise à résoudre.
Une expérimentation est prévue. Nous proposons d’attendre son terme pour en tirer les résultats et réexaminer sereinement les sujets que vous abordez.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Je suis également défavorable à cet amendement.
Nous avons travaillé sur ce dispositif l’an dernier et avons constaté qu’une expérimentation était nécessaire. Notons tout de même qu’il répond à une attente forte des agriculteurs.
Toutefois, monsieur le ministre, je le répète, vous devrez prendre rapidement le décret d’application pour permettre aux acteurs concernés, notamment la Mutualité sociale agricole (MSA), de calculer l’assiette des cotisations d’ici au 1er octobre 2026, date de l’entrée en vigueur du dispositif. Quelques mois de travail sont nécessaires pour que, à cette échéance, le système soit efficient.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 392 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 8 bis, modifié.
(L’article 8 bis est adopté.)
Après l’article 8 bis
M. le président. L’amendement n° 992 rectifié, présenté par MM. Duplomb, Menonville, J.M. Boyer, Dhersin, Naturel, Hugonet, de Nicolaÿ et Houpert, Mme V. Boyer, M. Sol, Mme Richer, MM. Mizzon, H. Leroy et Bonhomme, Mme Micouleau, M. Chatillon, Mme Loisier, MM. Savin et Margueritte, Mme Canayer, MM. Brisson, Somon et Séné, Mme Patru, M. Fargeot, Mmes Malet, Lassarade, Drexler et Di Folco, MM. Sido, J.B. Blanc, Panunzi, Pointereau et Gueret, Mme Pluchet, MM. Rojouan, Anglars, Rapin, Gremillet et Genet, Mme Romagny, MM. Levi et D. Laurent et Mme Dumont, est ainsi libellé :
Après l’article 8 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la seconde phrase du onzième alinéa de l’article L. 321-5 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « personnes », sont insérés les mots : « exercent leur activité à titre secondaire ou ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Anglars.
M. Jean-Claude Anglars. Il s’agit d’un amendement de Laurent Duplomb.
Dans le souci d’améliorer la protection sociale et la retraite des membres de la famille des exploitants agricoles, l’exercice sous le statut de collaborateur d’exploitation a été limité à cinq années à compter du 1er janvier 2022 par la loi du 17 décembre 2021 visant à assurer la revalorisation des pensions de retraites agricoles les plus faibles, dite loi Chassaigne 2.
Au 1er janvier 2027, environ 10 000 collaborateurs seront tenus d’opter pour un autre statut, qu’il s’agisse de celui de chef d’exploitation ou de celui de salarié de l’exploitation. À défaut de choix, l’assuré sera considéré comme salarié.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a prévu de ne pas limiter cette durée pour les collaborateurs en fin de carrière qui atteindront 67 ans au 1er janvier 2032. Ces derniers pourront prolonger leur activité en tant que collaborateurs jusqu’à la liquidation de leurs droits à pension.
Le présent amendement vise à permettre aux collaborateurs à titre secondaire de déroger également au délai de cinq ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous revenez sur l’équilibre que nous avons atteint l’année dernière lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale.
Il ne me semble pas souhaitable que nous remettions ainsi en question chaque année les dispositifs votés ensemble.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. La dérogation que vous proposez, monsieur le sénateur, pour les conjoints exerçant en parallèle une activité salariée aurait pour conséquence de permettre à un grand nombre de collaborateurs d’exploitation de conserver leur statut. Une telle disposition réduirait considérablement la portée de la mesure adoptée par le Parlement.
De surcroît, telle qu’elle est rédigée, votre mesure s’applique uniquement aux collaborateurs exerçant à titre secondaire au 1er janvier 2022, alors que leur situation a pu évoluer depuis.
Pour ces deux raisons, je suis au regret de vous demander le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Anglars, l’amendement n° 992 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Anglars. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 992 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 916 est présenté par Mme Bélim.
L’amendement n° 1471 est présenté par Mme Malet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1° du I de l’article 26 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les travailleurs indépendants, les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole exerçant leur activité en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, le montant total des cotisations et contributions sociales dues, après application des exonérations prévues à l’article L. 781-6 du code rural et de la pêche maritime, ne peut excéder le montant dont ils étaient redevables au titre de l’année 2024, revalorisé annuellement dans des conditions fixées par décret. Les modalités d’application sont définies par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Audrey Bélim, pour présenter l’amendement n° 916.
Mme Audrey Bélim. L’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit une habilitation à légiférer par ordonnance, dans un délai de trois ans, pour réformer l’assiette sociale des exploitants agricoles ultramarins.
Les simulations réalisées par Cerfrance Réunion sur ce nouveau régime sont sans appel : les cotisations sociales des agriculteurs réunionnais passeraient, en moyenne, de 2 243 euros à près de 15 000 euros.
Qui peut sérieusement imaginer que nos agriculteurs seront capables d’absorber un tel choc ? À La Réunion, les exploitations sont dix fois plus petites que dans l’Hexagone et l’insularité, les risques climatiques et les surcoûts structurels pèsent fortement sur les exploitations.
Cet amendement vise à mettre en place un bouclier. Il ne s’agit pas d’un caprice : un mécanisme de plafonnement est nécessaire pour empêcher une explosion brutale des charges. Rien n’oblige à passer par voie d’ordonnance pour adopter cette assiette sociale, nous sommes en mesure de légiférer ici et maintenant.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 1471.
Mme Viviane Malet. Cet amendement est identique au précédent.
L’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 autorise le Gouvernement à réformer par ordonnance, dans un délai de trois ans, l’assiette sociale des exploitants agricoles ultramarins en l’alignant sur celle de l’Hexagone.
Un tel alignement risque d’entraîner une hausse très forte des cotisations. Des simulations montrent qu’une application inadaptée du futur régime pourrait multiplier par six ou sept les prélèvements sociaux, mettant en danger la viabilité d’exploitations déjà fragilisées par des surcoûts structurels, les risques climatiques et un marché réduit.
Le présent amendement d’appel tend donc à plafonner les cotisations au niveau de 2024, avec une revalorisation annuelle par décret, afin de protéger l’économie agricole ultramarine d’un choc brutal.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie nos collègues qui défendent les outre-mer. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodéom).
Toutefois, vous proposez ici autre chose : la mise en place d’une niche sociale. Or, au vu de la situation des finances publiques, je ne saurais me permettre d’émettre un avis favorable.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Mesdames les sénatrices, comme vous l’avez souligné, le Gouvernement est habilité à agir par ordonnance et, partant, à traiter sur le fond les questions que vous soulevez.
Je rappelle que l’habilitation à réformer par ordonnance l’assiette des cotisations des non-salariés agricoles ultramarins est prévue à l’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.
Ces ordonnances peuvent inclure toutes les mesures d’adaptation nécessaires pour tenir compte des caractéristiques et des contraintes particulières de ces territoires.
Le 2° du I de cet article habilite ainsi le Gouvernement à prendre toutes les mesures d’adaptation des dispositifs d’exonération afin d’atténuer les effets en matière de prélèvements sociaux, y compris en étendant ces exonérations à la CSG et à la CRDS, que les non-salariés agricoles n’acquittent pas aujourd’hui.
Je vous l’assure, le Gouvernement sera particulièrement vigilant à ce que cette réforme ne porte pas atteinte à la viabilité des exploitations ultramarines.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, je serai au regret d’émettre un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je suis assez surpris. Nous plaidons depuis longtemps pour que la réforme des retraites soit adaptée aux réalités agricoles des outre-mer. Or, après plusieurs années, vous proposez aujourd’hui une ordonnance. Nous nous battons pour que le système actuel soit revu et corrigé, mais en association avec les socioprofessionnels et les élus. Dans ce texte, pourtant, vous demandez une habilitation à légiférer par ordonnance. J’avoue ma surprise !
Le système est très complexe, et contrairement à ce qu’affirme notre excellente rapporteure générale, il ne s’agit pas d’une niche : il existe un régime social et fiscal spécifique pour les agriculteurs ultramarins. Certes, ce système est aujourd’hui quelque peu dépassé et il faut le moderniser.
Pour autant, il n’est pas opportun de formuler cette demande aujourd’hui, alors que nous attendons des études réalisées en amont avec les socioprofessionnels.
Ayant été moi-même directeur de chambre d’agriculture pendant quinze ans, je connais quelque peu le sujet. Demander de légiférer maintenant, en gravant dans le marbre de ce texte cette liberté, n’est pas réaliste. Vous ne pourrez pas vous en sortir, même avec un délai de trois ans, compte tenu de la complexité des modèles agricoles outre-mer.
La sagesse commande de réaliser d’abord des études et d’y associer les élus ; vous aviserez ensuite en vue de la loi de financement pour 2027, mais pas maintenant.
Je ne cache pas ma surprise : l’engagement et la promesse d’associer les acteurs en amont ne sont pas respectés, alors que nous avons rencontré à cette fin tous les ministres chargés de la santé, du social et des outre-mer.
J’avoue que je n’avais pas prêté attention à cet amendement visant à vous habiliter à procéder par ordonnance.
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. J’y insiste : des promesses n’ont pas été tenues.
Une fois de plus, nous assistons à un exercice qui ne réussit jamais : ce n’est pas parce qu’une mesure est positive dans l’Hexagone qu’elle le sera pour nos territoires. L’adaptation doit absolument devenir un automatisme ; il est impératif de prendre en considération nos territoires ultramarins.
Chez moi, les exploitations couvrent en moyenne 6,3 hectares ; ici, la moyenne s’établit à 63 hectares. Nous pratiquons une agriculture familiale ; la situation n’est donc pas la même.
Encore une fois, on prétend calquer des dispositifs sur nos territoires, au mépris de nos réalités. Ce n’est pas un caprice, nous vous demandons simplement un réel engagement : faites-le ici, en légiférant. C’est ce que l’on attend des sénateurs ; c’est ce que nos concitoyens attendent du Sénat : un peu de lucidité et, surtout, des promesses enfin tenues.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 916 et 1471.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 8 ter (nouveau)
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le a bis du 3° du III de l’article L. 136-1-1 est ainsi rédigé :
« a bis) Le gain net mentionné au premier alinéa du II de l’article 163 bis H du code général des impôts ainsi que la fraction de ce gain qui excède la limite déterminée dans les conditions définies au même premier alinéa ; »
2° À la fin du premier alinéa de l’article L. 137-42, les mots : « des avantages mentionnés au a bis du 3° du III de l’article L. 136-1-1 qui sont imposés à l’impôt sur le revenu suivant les règles de droit commun des traitements et salaires » sont remplacés par les mots : « de la fraction du gain net mentionné au premier alinéa du II de l’article 163 bis H du code général des impôts qui excède la limite déterminée dans les conditions définies au même premier alinéa ».
II. – À la fin du C du IV de l’article 93 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025, les mots : « entre le lendemain de la promulgation de la présente loi et le 31 décembre 2027 » sont remplacés par les mots : « à compter du lendemain de la promulgation de la présente loi ».
III. – Le I s’applique aux dispositions, aux cessions, aux conversions ou aux mises en location réalisées à compter du 15 février 2025.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1055 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 1764 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 1055.