M. Alexandre Ouizille. Il s’agit d’entreprises cotées !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. C’est très important : la valorisation est une extrapolation à partir du dernier point de connaissance du prix.
Je pense notamment à nos start-up. Imaginez qu’Arthur Mensch quitte Mistral, dont il est le co-fondateur. Qui rachèterait ses parts, disons 25 % de l’entreprise ? Or le jour où le fondateur d’une entreprise la quitte, celle-ci n’a plus la même valeur. En effet, c’est lui qui a créé l’entreprise, qui lui a consacré son intelligence, qui a su agréger des compétences et une équipe.
M. Thomas Dossus. Vous citez le même exemple depuis six mois ! Vous ne parlez jamais de Bernard Arnault…
Mme Amélie de Montchalin, ministre. C’est un exemple parlant ! Je connais de nombreux autres exemples, mais je ne vais pas citer tous les start-upers et tous les chefs d’entreprise.
Prenons le cas d’une entreprise familiale possédée par deux frères et une sœur. Le benjamin souhaite vendre ses parts : l’entreprise est alors valorisée. Mais cela ne signifie pas que, en cas de vente de leurs parts par l’autre frère et la sœur, l’entreprise trouvera un acheteur à ce prix-là.
Vous faites donc des extrapolations de valeurs : qu’une entreprise ait une certaine valeur ne signifie pas qu’il y aura un acheteur à ce prix et que cette valeur soit créditée sur un compte en banque.
Ensuite, et je conclurai par ce point ce débat très intéressant, qui montre que nous avons, calmement, beaucoup de choses à nous dire, la concentration de richesses que vous avez évoquée est à l’œuvre dans tout l’Occident, qui vieillit (M. Guy Benarroche ironise.), du fait de l’accumulation générationnelle. En effet, et nous pouvons nous en réjouir, nous n’avons connu depuis quatre-vingts ans – c’est inédit dans l’histoire de l’Occident ! – ni guerre ni crise inflationniste.
M. Pascal Savoldelli. C’est la rente !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Exactement ! En Occident, ce que vous appelez la rente a été remise à zéro cycliquement tous les trente ou quarante ans, soit par une grande crise inflationniste, soit par une guerre, soit par une crise inflationniste consécutive à une guerre.
Aujourd’hui, et c’est inédit, du fait du vieillissement, le patrimoine – tous les chiffres le prouvent – augmente avec l’âge, y compris après 70 ans, parce que l’on vit plus longtemps et que des transmissions sont opérées. Il faut être précis lorsque l’on dresse des constats ! (M. Roger Karoutchi manifeste son impatience.)
Les jeunes, en France et dans tout l’Occident, considèrent qu’il est très difficile d’acquérir un logement, de se lancer dans la vie et de construire leur propre patrimoine. Nous devons avoir un raisonnement clair ; à défaut, on essaiera de résoudre l’anxiété générationnelle de la jeunesse au travers d’une fausse solution, fondée sur une soi-disant augmentation de la valeur latente de certaines entreprises, calculée par extrapolation.
M. Yannick Jadot. Nous avons tout de même 12 millions de pauvres !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Le débat est intéressant, mais le problème que vous soulevez ne sera pas résolu avec les outils que vous proposez. Je le redis, je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Nous sommes au cœur du débat ! Je partage les propos de Mme la ministre sur le vieillissement de la société ; j’ai dit la même chose, hier, lors de la discussion générale.
Le problème, dans notre pays, c’est qu’il y a une accumulation de stock qui ne bouge plus. C’est la raison pour laquelle j’ai un désaccord avec notre collègue Canévet. Il faut, au contraire, favoriser les flux, faire bouger l’épargne, orienter l’argent vers une économie plus productive. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Si l’on refuse de taxer les stocks, il y aura, à un moment donné, un problème sur la taxe foncière.
J’espère que l’on pourra être plus ambitieux, mais, si tel n’était pas le cas, nous voterions – pour ma part, je le ferai – la proposition de Michel Canévet relative à l’impôt sur la fortune improductive. Mais cet impôt sur la fortune improductive, c’est bien une imposition sur les stocks, et non pas sur les flux !
Nous devons réfléchir à la lumière de la réalité que nous connaissons depuis six ans, en nous fondant sur l’évolution des patrimoines entre 2019 et aujourd’hui. La BCE a conduit une politique de facilité de crédit. Des politiques budgétaires ont été adoptées ici même, qui ont conduit à l’accélération de l’accumulation des richesses d’un certain nombre de détenteurs de hauts patrimoines. D’où l’écart significatif que l’on constate aujourd’hui entre les plus hauts et les plus faibles revenus.
Tout à l’heure, nous avons supprimé un dispositif anti-évitement fiscal. Si nous ne sommes pas capables de mettre en place un autre dispositif anti-évitement, nous connaîtrons demain une situation pire que celle que nous avons connue lors du mouvement des gilets jaunes.
M. le président. Veuillez conclure !
M. Grégory Blanc. On ne peut pas, à la fois, dérembourser les médicaments et rejeter la taxe Zucman !
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.
M. Simon Uzenat. J’ai été quelque peu interpellé par votre prise de parole, madame la ministre. Vous me corrigerez sans doute, mais, en vous écoutant, je suis arrivée à la conclusion que, pour rétablir de la fluidité sociale et lutter contre les inégalités, il faudrait une bonne guerre. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Simon Uzenat. Honnêtement, c’est l’explication que vous nous avez donnée ! Dans ce pays dont la devise est « Liberté, Égalité, Fraternité » – je le dis en me tournant vers nos collègues de la droite sénatoriale –, nous parlons de choix politiques.
M. Roger Karoutchi. La guerre, un choix politique ?
M. Simon Uzenat. Et nous espérons, les uns et les autres que nous n’aurons pas à connaître les extrémités douloureuses que nos prédécesseurs ont pu vivre.
Certains parlent d’un « sentiment d’inégalité »… Or c’est non pas un sentiment, mais une réalité, comme le montrent, dramatiquement, les chiffres de l’Insee. Aujourd’hui, l’écart entre les 20 % les plus aisés et les 20 % les plus modestes est quasiment identique à celui que nous connaissions dans les années 1970.
M. Olivier Rietmann. Non, c’est avant la redistribution !
M. Simon Uzenat. Notre collègue Yannick Jadot nous a rappelé quelles mesures avaient été prises à cette époque…. Comment, aujourd’hui, peut-on accepter cela ?
Nos concitoyens les plus modestes et les nouvelles générations commencent dans la vie avec des boulets aux pieds, quand d’autres, parce qu’ils sont nés au bon endroit et au bon moment – tant mieux pour eux ! – disposent d’un turbo dont la puissance évoque celle de la nitroglycérine et qui lui permettra d’aller très vite…
Chers collègues de la droite, vous qui êtes attachés au mérite, je vous le demande : où peut être le mérite lorsque l’on part avec de tels handicaps dans la vie ?
L’enjeu ici n’est pas d’être contre celles et ceux qui ont réussi ; au contraire, nous les encourageons et les reconnaissons. Mais les écarts doivent être régulés d’une manière ou d’une autre, dans l’intérêt même de notre pays.
M. Olivier Rietmann. Ils le sont !
M. Simon Uzenat. Madame la ministre, mes chers collègues, nous avons bien entendu votre fin de non-recevoir ! Pour notre part, nous continuerons sur notre chemin.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. J’interviens à peu près trois minutes toutes les demi-heures, et je crois, lors de ma dernière intervention, m’être exprimée avec nuance.
Je n’ai évidemment pas dit qu’il nous fallait une guerre pour résoudre nos problèmes ! J’ai simplement indiqué que nous étions dans une situation nouvelle, où se cumulent deux faits nouveaux : une espérance de vie très longue, de plus de 80 ans en moyenne, et un cycle inédit que nous connaissons depuis quatre-vingts ans et lors duquel il n’y a eu ni guerre ni crise inflationniste.
La France n’est pas seule à connaître cette situation, dans laquelle la concentration du patrimoine est beaucoup plus générationnelle qu’on ne le dit parfois. Je me suis bornée à décrire cette réalité.
Les solutions que vous proposez pour que les patrimoines circulent passent par l’impôt. D’autres idées ont été exprimées dans le débat, avec des solutions différentes. On peut en discuter, mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !
Encore une fois, tout l’Occident vieillissant connaît les deux phénomènes cumulatifs que j’ai évoqués, et ce débat a lieu également dans beaucoup d’autres pays. Son enjeu est le système économique, et non pas uniquement le système fiscal.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Madame la ministre, certains éléments de votre explication m’échappent quelque peu.
Non, la concentration du capital que l’on connaît et qui est sans précédent dans nombre de pays d’Occident n’est pas liée uniquement au vieillissement naturel de la population et au régime de paix qui aurait envahi cette partie du monde !
Depuis les années 1980, un certain nombre de politiques fiscales ont été menées, que l’on regroupe sous les termes d’ultralibéralisme ou de néolibéralisme – appelons-les comme on veut – et qui se sont concrétisées par une baisse de la fiscalité sur le capital et sur les grands patrimoines. Elles ont eu pour résultat de mettre en place une logique économique et politique : l’hyperconcentration du capital dans un très petit nombre de foyers fiscaux.
La taxe Zucman, en s’appliquant à ce petit nombre de foyers, aurait un rendement très efficace.
Le phénomène de concentration des richesses n’est pas « naturel » : il est le résultat d’une politique fiscale que nous vous appelons aujourd’hui à corriger. (Mme Ghislaine Senée applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-258 rectifié, I-1012 et I-1498.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1734 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-185 rectifié et I-2640 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Demande de réserve
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande la réserve des amendements nos I-381 et I-159 rectifié bis tendant à insérer un article additionnel après l’article 3.
M. le président. Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la réserve est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Ayant décidé de laisser les sénateurs organiser les débats comme ils le souhaitent, le Gouvernement ne saurait s’opposer à cette demande de réserve.
Mon avis est donc favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée, entraînant la réserve de l’ensemble des amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Après l’article 3 (suite)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-2451 rectifié ter, présenté par MM. Kanner, Cozic, Raynal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est émis un emprunt obligatoire d’une durée de cinq ans, au taux actuariel brut de 0 % l’an.
II. – La souscription à l’emprunt s’imposent de manière cumulative pour les contribuables redevables de :
de l’impôt sur la fortune immobilière prévu à l’article 964 du code général des impôts au titre de l’année 2026, à hauteur de 30 % de l’impôt dû ;
de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue à l’article 223 sexies du même code au titre de l’année 2025, à hauteur de 30 % de l’impôt dû ;
de la contribution différentielle sur les hauts revenus prévue à l’article 224 du même code au titre de l’année 2025, à hauteur de 30 % de l’impôt dû ;
de l’impôt sur le revenu mentionné à l’article 197 du même code au titre des taux de 41 % et de 45 % au titre de l’année 2025, à hauteur de 20 % de l’impôt dû.
III. – Les ayants droit d’un contribuable décédé au cours de la même période et remplissant la même condition de revenu sont dispensés de la souscription pour la somme que celui-ci aurait dû souscrire.
IV. – La contribution est recouvrée par voie de titre de perception selon des modalités précisées par arrêté du ministre chargé du budget. Elle doit intervenir le 1er juillet 2026 au plus tard. Un avis est adressé au contribuable indiquant le montant de la somme à souscrire. Un décret en conseil d’État détaille avant le 1er février 2026 les modalités pratiques qui s’imposent aux contribuables concernés.
V. – Le défaut de souscription à l’échéance entraîne, sans préjudice du recouvrement forcé du principal de l’emprunt, la déchéance du droit à remboursement du capital. Le recouvrement forcé de l’emprunt est effectué comme en matière d’impôt sur le revenu. La majoration prévue à l’article 1761 du code général des impôts n’est appliquée aux sommes non réglées qu’un mois après la date limite de souscription.
La parole est à M. Patrick Kanner.
M. Patrick Kanner. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps que celui-ci les deux amendements suivants faisant l’objet d’une discussion commune.
Je ne trahirai aucun secret en disant que, depuis huit ans, les gouvernements successifs que nous avons connus ont pratiqué une injustice fiscale manifeste. Les discussions à l’Assemblée nationale visant à faire entendre le besoin d’une plus grande justice fiscale et sociale ont souvent échoué. Nous allons donc, durant ce débat, défendre cette voie, qui nous semble juste pour les Français.
Avec les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, notamment Thierry Cozic et le président Claude Raynal, nous avons déposé plusieurs amendements visant, à la fois, à dégager des recettes nouvelles et à rééquilibrer la fiscalité dans son ensemble.
Nous avons également souhaité, vous le savez, proposer des hypothèses de travail complémentaires et ouvrir d’autres perspectives pour renforcer, même temporairement, les ressources publiques. Parmi ces solutions, nous avons émis l’idée d’un emprunt obligatoire auprès de quelques milliers de foyers fiscaux – environ 20 000 –, les plus riches du pays.
Afin de nourrir un véritable dialogue parlementaire, trois versions de cette proposition ont été déposées.
La troisième version est fondée non pas sur l’impôt dû, mais sur les valeurs nettes du patrimoine du contribuable. Son assiette, plus restreinte, exclut automatiquement le prélèvement sur les tranches hautes redevables de l’impôt sur le revenu.
Nous acceptons de faire évoluer ce travail avec vous, mes chers collègues, au travers d’éventuels sous-amendements. Le Sénat pourrait alors s’enorgueillir, alors que notre démocratie parlementaire est trop souvent aujourd’hui mise à mal, d’avoir trouvé une forme d’accord sur cette proposition complémentaire qui pourrait nous réunir.
Je précise que, pour des questions de recevabilité financière des amendements, et alors que le Gouvernement a refusé de lever le gage pour permettre le débat, nous n’avons pu régler complètement la question du remboursement de cet emprunt. Celle-ci pourrait être réglée par les sous-amendements déposés.
Je vous le dis en responsabilité, notre détermination est totale. Nous voulons un État juste en matière de fiscalité.
M. le président. Les amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° I-2452 rectifié ter est présenté par MM. Kanner, Cozic, Raynal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-2466 rectifié bis est présenté par M. G. Blanc.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est émis un emprunt obligatoire d’une durée de cinq ans, au taux actuariel brut de 0 % l’an.
II. – La souscription à l’emprunt s’imposent de manière cumulative pour les contribuables redevables de :
de l’impôt sur la fortune immobilière prévu à l’article 964 du code général des impôts au titre de l’année 2026, à hauteur de 25 % de l’impôt dû ;
de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue à l’article 223 sexies du même code au titre de l’année 2025, à hauteur de 25 % de l’impôt dû ;
de la contribution différentielle sur les hauts revenus prévue à l’article 224 du même code au titre de l’année 2025, à hauteur de 25 % de l’impôt dû ;
de l’impôt sur le revenu mentionné à l’article 197 du même code au titre des taux de 41 % et de 45 % au titre de l’année 2025, à hauteur de 10 % de l’impôt dû.
III. – Les ayants droit d’un contribuable décédé au cours de la même période et remplissant la même condition de revenu sont dispensés de la souscription pour la somme que celui-ci aurait dû souscrire.
IV. – La contribution est recouvrée par voie de titre de perception selon des modalités précisées par arrêté du ministre chargé du budget. Elle doit intervenir le 1er juillet 2026 au plus tard. Un avis est adressé au contribuable indiquant le montant de la somme à souscrire. Un décret en conseil d’État détaille avant le 1er février 2026 les modalités pratiques qui s’imposent aux contribuables concernés.
V. – Le défaut de souscription à l’échéance entraîne, sans préjudice du recouvrement forcé du principal de l’emprunt, la déchéance du droit à remboursement du capital. Le recouvrement forcé de l’emprunt est effectué comme en matière d’impôt sur le revenu. La majoration prévue à l’article 1761 du code général des impôts n’est appliquée aux sommes non réglées qu’un mois après la date limite de souscription.
L’amendement n° I-2452 rectifié ter a déjà été défendu.
La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° I-2466 rectifié bis.
M. Grégory Blanc. Comme je le disais hier, peu importe que le chat soit blanc ou gris, l’important est qu’il attrape la souris.
Il faut que les plus hauts revenus de ce pays soient mis à contribution et qu’ils accompagnent le redressement de notre pays. Il y a plusieurs façons d’y arriver. Le groupe socialiste propose ainsi de mettre en place, pour les plus hauts déciles, un emprunt obligatoire.
Je considère que ces hauts revenus doivent être mis à contribution, afin que notre pays ne soit pas obligé d’emprunter aux taux qui sont ceux du marché aujourd’hui.
Lorsque l’on emprunte au taux de 3,50 % sur dix ans, ou de 2,50 % sur cinq ans, cela pose des difficultés. Je propose donc que la rémunération proposée soit inférieure de moitié à celle du livret A, mais aussi que les contribuables visés, ceux des plus hauts déciles, aient la possibilité de récupérer des liquidités s’ils connaissent des difficultés, ce qui peut aussi arriver.
M. le président. L’amendement n° I-2626 rectifié bis, présenté par MM. Kanner, Cozic, Raynal et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est institué une contribution restituable due par les redevables :
1° de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue à l’article 223 sexies du code général des impôts au titre de l’imposition des revenus de l’année 2025 domiciliés fiscalement en France au sens de l’article 4 B du même code au titre de la même année ;
2° de l’impôt sur la fortune immobilière prévu à l’article 964 du code général des impôts au titre de l’année 2026 domiciliés fiscalement en France au sens de l’article 4 B du même code au titre de la même année.
II. – A. – Les redevables de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus mentionnés au 1° du I acquittent la contribution à concurrence de 9 % de la fraction de leur revenu fiscal de référence mentionné au 1 du I de l’article 223 sexies du code général des impôts établi au titre de l’année 2025 supérieure à 250 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et supérieure à 500 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
B. – Les redevables de l’impôt sur la fortune immobilière mentionnés au 2° du I dont le patrimoine imposable à cet impôt au titre de l’année 2026 est supérieur ou égal à 10 millions d’euros acquittent la contribution à concurrence de 2 % de la fraction de ce patrimoine qui excède 10 millions d’euros.
C. – Les contribuables à la fois redevables de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus mentionnée au 1° du I au titre de l’année 2025 et de l’impôt sur la fortune immobilière mentionné au 2° du I au titre de l’année 2026 acquittent les contributions prévues aux A et B du présent II.
III. – Sont dispensés du paiement de la contribution mentionnée au A du II les redevables dont le revenu fiscal de référence mentionné au même A est inférieur ou égal à 500 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et inférieur ou égal à 1 000 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
Sont également dispensés du paiement de cette contribution les redevables remplissant les conditions de revenus définies au premier alinéa du présent III dont le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité est décédé entre le 1er janvier 2026 et la date d’exigibilité mentionnée au IV.
IV. – La contribution est recouvrée par voie de titre de perception selon des modalités précisées par arrêté du ministre chargé du budget. Elle est exigible à partir du 31 août 2026.
V. – Il est créé un crédit d’impôt reversé sur demande du contributeur à l’issue d’un délai de quatre ans à compter de la date prévue au IV, d’un montant égal aux sommes acquittées au titre de la contribution mentionnée au I.
Le bénéfice du crédit d’impôt est incessible.
Les conditions d’application du présent V sont prévues par décret.
VI. – Le V ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
VII. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre premier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Cet amendement a déjà été défendu.
Le sous-amendement n° I-2757, présenté par M. G. Blanc, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Les redevables mentionnés au II qui seraient dans l’impossibilité de pouvoir mobiliser le montant de contribution dû avant l’échéance prévue au IV, le versement peut intervenir dans un délai complémentaire maximal de douze mois. La contribution versée est alors majorée d’un montant correspondant à l’écart entre, d’une part, le rapport entre le nombre de mois échus entre l’échéance prévue au IV et la date de versement, et, d’autre part, le taux moyen des émissions de bons du Trésor à taux fixe intervenus durant cette période.
Les redevables qui, au terme du délai complémentaire prévu au précédent alinéa, continueraient d’être dans l’impossibilité de pouvoir mobiliser le montant de contribution dû, doivent verser, au terme du délai prévu au V, un montant égal à 5 % de la contribution qu’ils auraient dû verser en application du II.
Les conditions dans lesquelles l’impossibilité de mobiliser le montant de contribution sont appréciées sont renvoyées à un décret.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État de l’alinéa […] est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je ne comprends pas la logique de ces amendements, dont les dispositions nous tombent dessus tels des météorites.
M. Olivier Rietmann. La logique, c’est : toujours dépenser plus !
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’ai l’impression que l’on cherche à tout prix à avoir des idées, parce que l’on en manque, tout comme manque la réflexion…
Un peu dans le même esprit, la commission des finances avait organisé une table ronde pour réfléchir à la possibilité de mobiliser l’épargne des Français. Nous avions même évoqué, à ma demande, la faculté de mobiliser cette épargne dans un grand élan au travers d’un emprunt d’État. Il fallait pour cela que les conditions politiques soient réunies et, lorsque Michel Barnier est devenu Premier ministre, des possibilités s’ouvraient. Mais la conclusion de nos réflexions fut à l’époque que ce n’était pas le moment pour une telle initiative, laquelle n’était pas utile.
Et voilà qu’arrive ce nouveau dispositif, qui semble « petit bras » et qui, surtout, pose des problèmes. Vous nous expliquez que des gens feraient en quelque sorte un don : de grosses fortunes prêteraient sans intérêt et devraient se signaler au bout de quatre ans auprès des services concernés pour pouvoir récupérer leur argent…
Qu’il s’agisse de la manière d’annoncer ce dispositif ou de l’inscrire économiquement et budgétairement, tout cela est très amateur. (M. Grégory Blanc ironise.)
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.
Enfin, le sous-amendement n° I-2757, dont je prends connaissance à l’instant, tend à s’inscrire dans votre logique, mon cher collègue. Mais, suivant la logique qui est la mienne, j’émets un avis défavorable.


