M. Pierre-Antoine Levi. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° II-675 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-1727, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco, Ollivier, M. Vogel et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

3 000 000

 

 

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

3 000 000

 

3 000 000

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement n° II-1727 vise à mieux faire vivre la mémoire des guerres récentes impliquant la France, c'est-à-dire les deux guerres mondiales, la guerre d'Indochine et la guerre d'Algérie.

Il nous semble urgent de renforcer la transmission de la mémoire de ces conflits aux jeunes générations, notamment par l'organisation de projets mémoriels et culturels dans le cadre scolaire.

Cet amendement tend donc à doubler la dotation de la sous-action « Mémoire et patrimoine mémoriel » du programme 169, ce qui représente une augmentation de 3 millions d'euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Les actions de mémoire, de transmission et de pédagogie sont importantes. Leur lien avec l'éducation nationale a d'ailleurs été largement rappelé.

Toutefois, la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. J'ai bien entendu la grande attention portée par cette assemblée à la mémoire.

Nous devons approfondir le travail avec le monde combattant et le ministère de l'éducation nationale sur le développement de ces actions mémorielles. J'en ai d'ailleurs discuté avec mon collègue Edouard Geffray, qui est très engagé sur ce sujet.

Les budgets des musées, qui ne relèvent pas de ce programme, contribuent beaucoup à l'action mémorielle et nous allons poursuivre en ce sens.

Évidemment, la fin des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire ne se résume pas à une baisse de budget. Elle aussi l'occasion de dresser le bilan d'une opération qui s'est très bien déroulée.

Je rencontrerai bientôt M. Philippe Étienne pour tirer les conclusions de la mission Libération qui lui a été confiée et mettre en œuvre des actions concrètes, qui ne sont pas nécessairement programmées budgétairement dans cette mission.

C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de l'amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1727.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-411 rectifié ter, présenté par Mme Lermytte, MM. Wattebled, A. Marc, Pellevat, Grand et Laménie, Mme L. Darcos, M. Chasseing, Mme Bessin-Guérin, MM. Chevalier et Rochette, Mmes Saint-Pé, Nadille et Bellamy, M. Haye et Mme de Cidrac, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

1

 

1

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

1

 

1

TOTAL

1

1

1

1

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.

Mme Marie-Claude Lermytte. Cet amendement d'appel tend à ce que les militaires décédés accidentellement lors d'entraînements ou d'exercices à haute intensité puissent recevoir la mention « Mort pour le service de la Nation ».

Créée par la loi du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, cette mention rend hommage aux militaires tombés en service et ouvre des droits importants à leurs proches. Depuis le décret du 18 mars 2016, son attribution est toutefois restreinte au décès causé par l'acte volontaire d'un tiers.

Ainsi, de nombreux militaires morts en préparation opérationnelle ou en mission intérieure ne peuvent plus en bénéficier, alors qu'ils servaient dans des conditions comparables à celles du combat. Plusieurs estimations font état de près de 130 cas depuis cette évolution.

Afin d'ouvrir la réflexion sur un réexamen de ce périmètre, nous avons décidé d'inscrire symboliquement 1 euro sur l'action n° 03 « Reconnaissance envers le monde combattant » du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».

Ce montant est prélevé, pour des raisons de recevabilité, sur l'action n° 02 du programme 158, sans intention de réduire ses crédits pour autant.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Comme l'a rappelé Mme Lermytte, il s'agit d'un amendement d'appel. La commission en demande le retrait.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Comme vous le savez, trois mentions coexistent depuis 2021. J'en rappelle le cadre.

La mention « Mort pour la France » est dédiée aux décès survenus au feu, en temps de guerre ou au cours d'une opération extérieure.

La mention « Mort pour le service de la Nation » est attribuée lorsque le décès résulte de l'acte volontaire d'un tiers.

La mention « Mort pour le service de la République » peut être décernée en cas de décès survenu lors de missions présentant une dangerosité ou un risque particulier, notamment à l'occasion d'exercices militaires.

La nécessité de prendre en compte les décès survenus en préparation opérationnelle a d'ailleurs largement justifié la création de cette dernière mention.

Nous sommes très attachés à ce cadre et à la reconnaissance de la singularité de chacune de ces mentions.

Aussi, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. La mesure qui est ici proposée semble aller de soi.

Comme vous le savez, il existe pour les sapeurs-pompiers une distinction entre la mention « Mort au feu » et celle de « Mort en service commandé », qui s'applique aux décès accidentels survenus lors du trajet vers le lieu d'intervention.

Le parallélisme des formes pourrait parfaitement s'appliquer. C'est pourquoi je vous invite à voter cet amendement, mes chers collègues.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-411 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Engagements financiers de l'État

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

Remboursements et dégrèvements

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements » du projet de loi de finances pour 2026.

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le constat que je m'apprête à dresser devant vous n'est guère réjouissant : les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » sont appelés à devenir dans quelques années le premier poste du budget de l'État.

Pour 2026, ils représenteront encore le deuxième poste en crédits de paiement, après la mission « Enseignement scolaire », soit 60,4 milliards d'euros, et le troisième en autorisations d'engagement.

Si l'on déplore parfois l'insuffisance de crédits sur certaines missions, l'approche est ici malheureusement tout autre : ces crédits affichent une augmentation de plus de 4,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), sous l'effet de l'alourdissement de la charge de la dette de l'État dans un contexte d'endettement public historique et de remontée des taux d'intérêt souverains.

À la fin octobre 2025, l'encours de la dette négociable de l'État s'établissait à 2 760 milliards d'euros. Quant à la dette publique, elle s'élève à plus de 3 400 milliards d'euros à la fin du deuxième trimestre 2025, soit 115,6 % du PIB, en augmentation de plus de 110 milliards d'euros sur les seuls six premiers mois de l'année.

Je rappelle qu'avant la crise de 2008 – j'étais déjà membre de la commission des finances ! – nous étions au même niveau que l'Allemagne, c'est-à-dire à 60 % du PIB.

Je consacrerai l'essentiel de mon intervention à l'accroissement continu de la charge de la dette, avant d'aborder la question des appels en garantie de l'État, notamment des prêts garantis par l'État (PGE), avant de conclure mon propos en évoquant la situation des comptes spéciaux rattachés à la mission.

Comme je l'indiquais, la charge de la dette de l'État devrait atteindre en 2026 des niveaux records. Alors que le taux d'emprunt à court terme a évolué à la baisse dans la période récente, emportant peut-être un effet anesthésiant suivant l'assouplissement monétaire conduit par la Banque centrale européenne (BCE), les taux sont en effet repartis à la hausse depuis le début de l'année 2025.

Cette pentification des primes de terme s'explique notamment par les effets de relance budgétaire annoncée en Allemagne et par les besoins rehaussés des politiques publiques dans le monde, concernant notamment la défense dans la zone euro.

Les investisseurs anticipent désormais une hausse des besoins budgétaires des pays européens, qui se répercute sur les taux souverains à dix ans aussi bien des pays cœurs que des pays périphériques.

Le Gouvernement en tient compte puisque, selon ses prévisions, les taux à dix ans continueraient à augmenter pour s'élever à 3,7 % en 2025 et  ,8 % fin 2026. Nous sommes donc loin des taux zéro, voire des taux négatifs, qui ont agi comme l'anesthésiant des précédents gouvernements, monsieur le ministre.

Il convient de souligner la sensibilité de la charge de la dette au niveau des taux d'intérêt : d'après les estimations de l'Agence France Trésor, un choc de taux de 100 points de base – ce n'est pas grand-chose : 0,1 % – …

M. Michel Canévet. On y est !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. En effet !

… représenterait une hausse de ladite charge de plus de 3,2 milliards d'euros en un an, et de 33,5 milliards d'euros à neuf ans.

Nous venons d'examiner la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » où il était question de quelques dizaines de millions d'euros et les économies que nous pouvions réaliser de-ci de-là. Retenez simplement ce chiffre, mes chers collègues : 100 points de base, par exemple une augmentation de 3,6 % à 3,7 %, représentent à eux seuls 3,2 milliards d'euros en un an et plus de 33 milliards d'euros à l'horizon de neuf ans.

De fait, l'instabilité politique que nous subissons joue malheureusement un rôle déterminant dans l'appréciation de la qualité de la signature française. En particulier, les risques concernant la stabilité budgétaire ou la pérennité des politiques de réforme sont évidemment très suivis par nos investisseurs et par les agences de notation. J'ai à ce titre à l'esprit la question des retraites.

Au regard de ces éléments, l'Agence France Trésor prévoit que nous devrons emprunter cette année une somme record. En 2026, nous prévoyons 310 milliards d'euros d'emprunt au minimum, non seulement pour les émissions de nouvelle dette, mais aussi pour le rachat des dettes arrivant à échéance. La charge de la dette devrait donc s'affirmer très rapidement comme le premier poste du budget de l'État.

En 2026, en comptabilité budgétaire, la charge de la dette devrait atteindre 58 milliards d'euros, en croissance de plus de 4,5 milliards d'euros par rapport à la loi de finances pour 2025. En comptabilité générale, son montant devrait s'élever à 60,4 milliards d'euros, soit une augmentation de 8 milliards d'euros par rapport à 2025.

Si l'on continue ainsi, la charge de la dette pourrait augmenter de 70 milliards d'euros en 2027, de 90 milliards d'euros en 2029. Nous devrions très rapidement, autour des années 2030, atteindre la barre des 100 milliards d'euros.

J'en viens maintenant aux crédits consacrés aux appels en garantie de l'État, dont le programme 114 retrace l'ensemble des dépenses budgétaires découlant de la mise en jeu des garanties octroyées par l'état des tiers. Ces crédits sont en baisse par rapport à la loi de finances pour 2025, ce qui constitue plutôt une bonne nouvelle.

Concernant les PGE, les crédits sont également presque stables, avec 5,7 milliards d'euros cumulés depuis 2020, et une prévision de 471 millions d'euros pour 2026.

J'en viens à la situation des comptes spéciaux rattachés à la mission.

Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » n'est pas doté de crédits pour 2026. Le compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » devrait quant à lui de nouveau dégager un excédent.

En conclusion, la commission des finances propose – j'allais dire avec regret, car il s'agit malheureusement d'une mission de constat – d'adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

Il n'existe guère d'amendements pour baisser ces crédits. Nous nous en réjouirions tous qu'il y en ait, car cela signifierait que nous serions enfin parvenus à une bonne situation budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, je concentrerai mon propos sur l'appréciation de la commission des finances concernant les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Participations financières de l'État ».

Ce CAS constitue un instrument dérogatoire du droit budgétaire classique, dont la fonction est de retracer, en recettes et en dépenses, les sommes liées aux opérations que l'État réalise en sa qualité d'actionnaire.

Je commencerai par présenter une opération récente et majeure de l'État actionnaire, qui illustre son rôle non seulement pour entrer au capital d'entreprises stratégiques, mais également pour les accompagner dans leur développement et leur croissance.

Il s'agit de l'augmentation de capital annoncée en juin 2025 par l'opérateur satellitaire européen Eutelsat. En effet, cet opérateur de taille mondiale a procédé, en 2023, au rachat d'une entreprise pionnière dans les constellations de satellites en orbite basse, l'entreprise britannique OneWeb.

Depuis ce rachat, Eutelsat se trouve dans une situation caractérisée par une perspective de croissance importante grâce à sa double présence sur l'orbite géostationnaire, avec une flotte de trente-quatre satellites, et sur l'orbite basse grâce aux plus de 600 satellites de la constellation OneWeb.

Cependant, Eutelsat se trouvait, jusqu'à cet été, dans une situation financière complexe, étant donné son niveau d'endettement élevé et le besoin d'investissements substantiels, à hauteur de 4 milliards d'euros à échéance de 2029, auxquels l'entreprise fait face pour assurer le renouvellement des satellites de la constellation OneWeb.

Pour répondre à cette situation, l'État est intervenu pour accompagner, en tant qu'actionnaire, le plan stratégique d'Eutelsat, en participant à hauteur de 750 millions d'euros à une augmentation de capital atteignant un montant total de 1,5 milliard d'euros.

Pour en venir aux crédits qui vous sont proposés dans l'exercice 2026, j'organiserai mon propos autour des recettes prévisionnelles du compte, puis des prévisions de dépenses.

En premier lieu, s'agissant du volet des recettes, ma principale remarque concerne les importantes recettes de cessions prévues dans le texte déposé par le Gouvernement.

Le projet de loi de finances pour 2026 marque une rupture avec les dernières années, en prévoyant des recettes de cessions pour le compte d'affectation spéciale à hauteur de 3,2 milliards d'euros en 2026, soit quatre fois plus que les recettes prévues pour cette année, par exemple.

Nous serons évidemment attentifs aux décisions qui seront prises dans le courant de l'exercice 2026, non seulement pour vérifier que le quantum de recettes atteint la cible de 3,2 milliards d'euros, mais également pour déterminer si cette inflexion est conjoncturelle ou si elle s'inscrit dans un nouveau cycle pluriannuel de cessions d'actifs publics.

En second lieu, je formulerai une remarque sur l'une des rares opérations structurantes en dépenses qui ne soit pas, à ce stade, confidentielle pour l'Agence des participations de l'État (APE) : le rachat par l'État du département Advanced Computing du groupe Atos.

Alors qu'un contrat de cession a été finalisé en juillet 2025, la mise en œuvre de l'opération devrait intervenir au premier semestre de 2026 et mobilisera 400 millions d'euros de crédits du compte d'affectation spéciale.

Cet investissement permettra à l'État de préserver un actionnariat souverain pour une activité hautement stratégique : la division rachetée est en charge de la conception et de la fabrication de supercalculateurs dans l'usine du groupe Atos ; or cette usine d'Angers est aujourd'hui la seule en mesure de fabriquer de tels équipements qui soit détenue par un groupe européen.

Au regard de la mobilisation de ces supercalculateurs notamment pour assurer la crédibilité de notre dissuasion nucléaire, il n'est nul besoin d'insister sur le caractère stratégique de cette opération.

Telles sont les principales remarques formulées par la commission des finances sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». Je vous indique, sans surprise, que la commission des finances a rendu un avis favorable à leur adoption, afin de donner à l'État actionnaire les moyens de sa politique. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE et INDEP. – M. Antoine Lefèvre applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » occupe une place singulière dans notre budget, puisqu'elle est la plus importante en volume, s'élevant à plus de 145 milliards d'euros pour 2026. Ce montant s'inscrit en légère baisse, de 0,4 %, par rapport à la dernière estimation à date pour 2025.

Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, qui concentrent l'essentiel des crédits de la mission, sont estimés à 141 milliards d'euros pour 2026, soit une diminution de 0,4 % par rapport à l'estimation révisée pour 2025.

Cette baisse apparente masque toutefois deux évolutions contradictoires : une réduction substantielle des remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État, tout juste atténuée par une hausse des autres remboursements, liés à la mécanique de l'impôt et à des politiques publiques.

La première évolution notable concerne donc les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État, qui passent de 17,2 milliards d'euros en 2025 à 14,2 milliards d'euros en 2026. En pratique, il s'agit principalement du remboursement de sommes indûment perçues, dont le reflux en 2026 s'explique par la disparition de certaines dépenses importantes supportées en 2025.

Je signalerai ici la principale d'entre elles, qui porte sur des remboursements d'exit tax.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, un membre du présent Gouvernement, encore député à la fin de l'année 2023, a déposé un amendement d'apparence technique, lequel visait à permettre aux contribuables, qui ne pouvaient jusqu'alors obtenir le remboursement de l'exit tax qu'à concurrence de l'impôt sur le revenu, d'en bénéficier plus largement, y compris pour les titres cédés avant 2014.

Cet amendement, repris – par hasard ! – par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité – pas par hasard, cette fois ! –, a provoqué des remboursements cumulés de 2 milliards d'euros sur les années 2024 et 2025.

Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, j'estime que le Gouvernement avait la responsabilité de mieux informer le Parlement quant au coût anticipé d'une mesure aussi technique qu'onéreuse. Ce déficit d'information est d'autant plus dommageable qu'il fut ensuite aisé pour l'exécutif de dissimuler ces 2 milliards d'euros en exécution budgétaire, noyés dans les masses financières de la mission.

Les remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques devraient quant à eux progresser de 18,5 milliards d'euros en 2025 à 19,4 milliards d'euros en 2026, sous l'effet d'un recours croissant aux crédits d'impôt que nous avons questionnés ici et que nous continuerons d'interroger.

Les acomptes et avances sur restitutions d'impôt sur le revenu devraient connaître une progression dynamique en 2026, de l'ordre de 10 % par rapport aux dernières estimations pour 2025, après une hausse déjà soutenue de 8 % l'année précédente. Ils progressent notamment sous l'effet de la montée en charge du crédit d'impôt contemporain pour l'emploi d'un salarié à domicile, dont les crédits passent de 1,8 milliard d'euros en 2025 à 2,3 milliards d'euros en 2026.

M'appuyant sur les derniers travaux de la Cour des comptes et du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), je m'interroge sur le périmètre d'un outil fiscal peu contrôlable, portant sur des dépenses non contraintes pour certains contribuables. Il convient de mettre en débat la nature des dépenses éligibles, le taux de prise en charge et le profil socioéconomique des bénéficiaires.

L'autre dispositif important, auquel vous savez que je prête une grande attention, est le crédit d'impôt recherche (CIR), qui continue de croître et qui est désormais projeté à plus de 8 milliards d'euros pour la période 2025-2026.

Je peux m'appuyer cette année sur les travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, qui a pointé plusieurs limites de ce dispositif, dont les grandes entreprises captent plus de 42 % des crédits, ainsi que le caractère très perfectible du rapport coût-efficacité du CIR.

Si, l'an passé, grâce à un amendement voté par la commission des finances, nous avons pu commencer à recentrer ce dispositif, il m'apparaît toujours indispensable d'engager une réforme du CIR. Celle-ci viserait a minima à établir une véritable différenciation par type d'entreprise et par secteur d'activité.

Alors que la commission d'enquête estime à 211 milliards d'euros le montant des aides publiques aux entreprises, ces aides devraient être assorties à la fois de conditions pour s'assurer de leur effectivité, en veillant à ce qu'elles stimulent bien la recherche réalisée en France, et de mécanismes de restitution en cas de manquement avéré, conformément aux recommandations formulées à l'unanimité par la commission d'enquête.

J'en viens enfin au programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », le second de cette mission.

Les crédits évalués pour 2026 s'élèvent à 4,6 milliards d'euros et sont stables. Ce programme a toutefois été vidé d'une grande partie de sa substance par la suppression de la taxe d'habitation et par la baisse des impôts de production. Nous le savons tous ici et nous le regrettons, avec sincérité ou non.

Les remboursements de taxe foncière ont presque doublé de 2018 à 2024. Ils se stabilisent autour de 2 milliards d'euros et constituent désormais la moitié des crédits du programme.

Quant aux remboursements de taxe d'habitation, ils auraient dû connaître une trajectoire à la baisse encore plus marquée, mais ils ont dû être largement revus à la hausse pour financer d'importants dégrèvements consécutifs à la mise en place de l'outil Gérer mes biens immobiliers (GMBI).

En guise de conclusion, je vous indique que, lors de l'examen de la mission par la commission, le 6 novembre dernier, celle-ci a proposé l'adoption de ces crédits. Je me vois donc contraint de vous recommander leur adoption.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que les années 2023 et 2024 avaient été marquées par d'importantes acquisitions dans le secteur de l'industrie de la défense, en 2025, l'Agence des participations de l'État (APE) a été particulièrement active dans le secteur du numérique.

Cette activité s'est traduite par la concrétisation de l'acquisition d'Alcatel Submarine Networks, leader de la fabrication, de la pose et de la maintenance de câbles sous-marins, et par l'entrée au capital d'Eutelsat, entreprise historique des télécommunications rendue stratégique par le développement de sa constellation satellitaire en orbite basse.

Je mentionne aussi le financement de l'acquisition par IN Groupe, l'ancienne Imprimerie nationale, d'une entreprise spécialisée dans la biométrie, en vue de créer un champion de rang mondial de l'identité physique et numérique.

L'APE prévoit de continuer, en 2026, à creuser le sillon de la souveraineté numérique en finalisant l'acquisition des activités Advanced Computing d'Atos, que le Sénat avait appelée de ses vœux. Elle poursuivra également son soutien à l'aménagement et à la valorisation du foncier industriel, notamment dans les grands ports maritimes. Ce sont là des priorités en phase avec les secteurs d'intervention stratégiques identifiés par la commission des affaires économiques.

En ce qui concerne le volet des recettes, nous nous satisfaisons que, pour les opérations relevant du périmètre de l'APE, la part prévisionnelle des financements budgétaires ne soit plus que résiduelle. Le compte d'affectation spéciale (CAS) revient ainsi à son principe fondateur, qui est de financer l'ensemble des crédits de la mission par des produits de cession.

Pour ce faire, l'Agence des participations de l'État devra adopter une gestion plus dynamique de son portefeuille. Ainsi, les cessions d'actifs devraient atteindre en 2026 pas moins de 3,2 milliards d'euros, un niveau inédit depuis la période pré-covid.

Dans ce contexte, nous recommandons que l'APE développe une doctrine d'intervention plus robuste, notamment dans le secteur industriel, afin de concentrer ses interventions sur les entreprises présentant des risques systémiques. L'articulation avec Bpifrance devrait également être améliorée.

Il est en effet essentiel de préserver la capacité de l'État à investir avec agilité dans des entreprises de souveraineté, au gré de besoins qui pourraient être appelés à se multiplier dans un environnement économique et géopolitique de plus en plus instable.

Au total, la commission des finances soutient les priorités développées par l'État actionnaire et a donc donné un avis favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Organisation des travaux

Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique que sept amendements ont été déposés sur cette mission.