Rapport n° 71 (2021-2022) de M. Olivier RIETMANN , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 20 octobre 2021

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N° 71

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 octobre 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures d' urgence pour assurer la régulation de l' accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires ,

Par M. Olivier RIETMANN,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas , présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé , vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault , secrétaires ; MM. Serge Babary, Jean-Pierre Bansard, Mmes Martine Berthet, Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Marie Evrard, Françoise Férat, Catherine Fournier, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Mme Guylène Pantel, MM. Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-Claude Tissot .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

3853 , 4151 et T.A. 615

Sénat :

641 (2020-2021) et 72 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

Le mercredi 20 octobre, la commission des affaires économiques du Sénat a examiné, sur le rapport de M. Olivier Rietmann (LR - Haute-Saône), la proposition de loi portant mesures d'urgence pour assurer la régulation de l'accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires du député M. Jean-Bernard Sempastous (LREM). La commission a salué l'initiative de cette proposition de loi tout en regrettant que le Gouvernement n'ait pas tenu l'engagement de déposer une grande loi foncière promise depuis le début du quinquennat.

I. LES OUTILS ACTUELS DE RÉGULATION DU MARCHÉ FONCIER AGRICOLE PERMETTENT UN CONTRÔLE LIMITÉ DES TRANSACTIONS SOCIÉTAIRES

A. UNE TENDANCE À LA HAUSSE DU RECOURS AUX STRUCTURES SOCIÉTAIRES QUI DEMEURE TOUTEFOIS DIFFICILE À ÉVALUER

La prévalence du recours à des formes sociétaires en France explique à la fois le dynamisme des transactions de titres sociaux sur le marché foncier agricole et la volonté d'accentuer la régulation des structures sociétaires .

En France, on dénombre aujourd'hui 64 % d'exploitations individuelles et 36 % d'exploitations sociétaires, contre en moyenne 95 % d'exploitations individuelles et 5 % d'exploitations sociétaires dans les autres États membres de l'Union européenne (UE).

Si l'étude du marché sociétaire agricole demeure récente en France, la Fédération nationale des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) estime que le nombre de transactions sociétaires a crû de 6 900 à 7 400 entre 2017 et 2019. Elles représentent désormais environ 7 % des transactions et près de 20 % de la valeur du marché foncier , avec des échanges de lots généralement compris entre 30 et 90 hectares, soit des surfaces environ dix fois supérieures à celles échangées directement entre personnes physiques sur le marché foncier.

B. DES OUTILS DE RÉGULATION QUI APPRÉHENDENT DE MANIÈRE IMPARFAITE LES TRANSACTIONS SOCIÉTAIRES

Le contrôle des structures constitue aujourd'hui le principal outil de régulation de l'accès au foncier agricole . S'il s'est constitué autour des exploitations individuelles, il s'est ensuite développé pour appréhender des formes sociétaires d'exploitation agricole.

Toutefois, ce contrôle ne permet pas d'appréhender la prise de participation financière d'un associé ou actionnaire non exploitant au capital d'une société d'exploitation .

Les SAFER jouent également un rôle de transparence et de régulation du marché foncier agricole . En l'état actuel du droit, elles sont notifiées de toute cession conclue à titre onéreux ou gratuit portant sur des biens ou droits immobiliers, y compris en cas de cession de parts ou d'actions de sociétés.

Toutefois, leur droit de préemption ne s'applique qu'en cas de cession à titre onéreux de la totalité des parts ou actions d'une société détenant ou exploitant du foncier agricole et uniquement si l'acquisition a pour objectif d'installer un agriculteur.

Par conséquent, le dispositif actuellement en vigueur est aisément contourné dans la mesure où les cessions de parts ou d'actions de sociétés jusqu'à 99 % ne permettent pas aux SAFER d'user de leur droit de préemption .

C. DES INITIATIVES LÉGISLATIVES RÉCENTES POUR AMÉLIORER LA RÉGULATION DU MARCHÉ SOCIÉTAIRE ONT ÉTÉ CENSURÉES PERMETTANT SEULEMENT UN CONTRÔLE PARTIEL DU MARCHÉ

Plusieurs tentatives récentes visant à combler les failles de la régulation du marché des transactions sociétaires agricoles n'ont pas abouti en raison de difficultés d'ordre constitutionnel.

L a loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « loi Sapin II » , avait proposé d'étendre le droit de préemption des SAFER aux cessions partielles de parts sociales et d'actions. Ces dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel en tant que « cavalier législatif ».

Quelques mois après, la loi du 20 mars 2017 relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle avait également prévu un dispositif donnant la possibilité aux SAFER d'utiliser leur droit de préemption en cas de cessions partielles de parts sociales ou d'actions d'une société dont l'objet principal est la propriété agricole. Toutefois, le mécanisme proposé a également été censuré par le Conseil constitutionnel, celui-ci ayant estimé qu'il constituait une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre .

II. UN DISPOSITIF DE CONTRÔLE NÉCESSAIRE MAIS DONT LES PARAMÈTRES ET LA MISE EN oeUVRE DOIVENT ÊTRE PRÉCISÉS

Le texte proposé par le député Sempastous entend instaurer une nouvelle procédure de contrôle des cessions de parts et actions de sociétés sur le marché du foncier agricole . Il a été transmis pour avis au Conseil d'État , dont les remarques ont été largement prises en compte lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale.

A. UN NOUVEAU DISPOSITIF D'AUTORISATION PRÉALABLE DES CESSIONS DE TITRES SOCIAUX DE SOCIÉTÉS DÉTENANT OU EXPLOITANT DU FONCIER

Dans les grandes lignes, le dispositif de contrôle se décline de la manière suivante :

- le déclenchement du dispositif est soumis au franchissement d'un double seuil cumulatif . D'une part, il faut que la cession de parts conduise à la prise de contrôle d'une société, pour un seuil de détention fixé à 40 % des droits de vote . D'autre part, il faut aussi que la surface totale détenue après l'acquisition de la société dépasse un seuil d'agrandissement significatif , fixé par le préfet de région, par rapport à la surface agricole utile moyenne régionale (SAURM) ;

- les opérations menées par les SAFER, les donations, les cessions intrafamiliales jusqu'au troisième degré inclus et les foncières agricoles solidaires sont exemptées du dispositif ;

- une demande d'autorisation doit être déposée auprès du comité technique de la SAFER , qui instruit la demande pour le compte de l'autorité administrative . L'instruction permet d'évaluer si l'opération porte atteinte aux objectifs de politique publique, et à l'inverse, si elle entraîne des effets bénéfiques pour le territoire en matière économique, sociale et environnementale ;

- le préfet est compétent pour se prononcer sur la demande d'autorisation , mais dans la pratique, il se basera sur l'avis formulé par les comités techniques des SAFER, qui auront donc une grande importance ;

- le préfet peut en outre soumettre une autorisation à des « mesures compensatoires » , pour en atténuer les effets négatifs : cela peut être une cession d'une partie des terres de la société, ou une mise à bail des terres, au profit de jeunes agriculteurs ou de consolidations d'exploitation ;

- des garanties procédurales et des voies de recours sont prévues et permettent de contester la décision administrative.

B. UNE RÉDACTION QUI N'ASSURE PAS TOUJOURS L'ADÉQUATION DU DISPOTIF PROPOSÉ AVEC LES OBJECTIFS ANNONCÉS

D'abord, les paramètres du dispositif ne semblent pas toujours cohérents avec les objectifs annoncés de lutte contre la concentration excessive et l'accaparement des terres agricoles. En effet, la fixation d'un seuil plancher égal à une fois la surface agricole utile moyenne régionale ne vise pas les exploitations agricoles de taille disproportionnée, mais aussi une grande partie des exploitations existantes qui se situent dans la norme.

En outre, le texte de la proposition de loi, tel que transmis par l'Assemblée nationale, suscite plusieurs interrogations quant aux rôles attribués au préfet et à la SAFER . Les pouvoirs de la SAFER sont significativement étendus par le texte. Ainsi, il est explicitement mentionné que les ventes et les mises à bail décidées dans le cadre des mesures compensatoires ne peuvent s'effectuer qu'au bénéfice et par le seul intermédiaire des SAFER, alors que ces dernières instruisent les demandes d'autorisation, peuvent recommander de telles mesures et sont exemptées du dispositif de contrôle. De tels éléments sont de nature à exposer les SAFER à des critiques sur la neutralité de l'instruction de leurs comités techniques et posent question aux acteurs du monde agricole auditionnés par le rapporteur.

Par ailleurs, la rédaction ne permet pas toujours d'identifier clairement le rôle que chaque acteur concerné doit jouer dans le cadre des procédures d'autorisation préalable et d'instruction des dossiers, conduisant parfois à une certaine confusion des rôles entre préfet et SAFER.

C. UNE VOLONTÉ PARTAGÉE DE RÉÉQUILIBRER LE TEXTE AFIN D'ASSURER LA COHÉRENCE, LA JUSTESSE ET L'ACCEPTABILITÉ DU DISPOSITIF

Dans cette perspective, la commission a choisi de maintenir le dispositif proposé dans ses grandes lignes , car elle reconnaît l'important travail préalable qui a été mené et partage la nécessité de mieux réguler les transactions sociétaires.

Il ne s'agit pas de dénoncer le recours à des structures sociétaires , qui présente des avantages certains, ni d'entraver la dynamique de concentration des exploitations agricoles , nécessaire à l'amélioration de la productivité et de la compétitivité de ce secteur, ni de nuire à la fluidité des transactions sociétaires sur le marché foncier agricole .

Au contraire, les modifications adoptées par la commission poursuivent une même volonté de recentrer le dispositif sur la lutte contre la concentration excessive et l'accaparement des terres .

La commission a donc rééquilibré le texte , en délimitant plus nettement le rôle joué par chaque acteur, en ajustant certains paramètres du contrôle, en clarifiant la procédure applicable, et en recherchant un compromis entre la préservation des libertés constitutionnelles et la nécessité de mieux réguler le marché .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION : TERRITORIALISER, ENCADRER, RECENTRER ET ÉVALUER LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. TERRITORIALISER LE DISPOSITIF POUR RAPPROCHER LES DÉCISIONS DE L'ÉCHELON LOCAL

La commission a estimé que le dispositif proposé serait plus efficace et mieux accepté s'il était davantage territorialisé . En effet, au regard de l'importance des décisions prises qui touchent au coeur des exploitations agricoles, il est indispensable de rapprocher la prise de décision du terrain. Pour cela, la commission propose de :

- confier au préfet de département plutôt qu'au préfet de région la décision sur les dossiers instruits ;

- maintenir la compétence du préfet de région pour fixer le seuil d'agrandissement significatif au sein du schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) ;

- rendre obligatoire la prise en compte des équivalences en fonction des cultures de différente nature dans le calcul du seuil d'agrandissement significatif.

B. RECENTRER LE DISPOSITIF SUR LES OBJECTIFS ANNONCÉS DE LUTTE CONTRE LA CONCENTRATION EXCESSIVE ET L'ACCAPAREMENT FONCIER

La commission considère que le dispositif doit être ajusté afin de mieux cibler les objectifs annoncés de lutte contre la concentration excessive et l'accaparement des terres agricoles . En effet, il ne s'agit pas de contrôler l'ensemble du marché sociétaire, mais seulement les transactions les plus significatives, car il est indispensable de préserver la fluidité des transactions sur ce marché. Pour cela, la commission propose de :

- Élever le seuil d'agrandissement significatif entre 2 et 4 fois la surface agricole utile moyenne régionale (SAURM). En effet, une exploitation agricole dont la surface est égale à la surface moyenne ne peut pas être considérée comme excessive ;

- Garantir la fluidité des transactions intervenant dans un cadre familial ou conjugal et étendre l'exonération des cessions intrafamiliales jusqu'au 4 e degré inclus pour ne pas empêcher le renouvellement des générations ;

- Préserver les transactions entre associés de longue date ou au profit de salariés ou d'apprentis pour faciliter l'installation prioritairement pour ceux qui ont déjà participé à la mise en valeur de l'exploitation agricole.

C. ENCADRER LE DISPOSITIF POUR ASSEOIR SA LÉGITIMITÉ

La commission est convaincue de la nécessité de prévoir des garde-fous supplémentaires afin de protéger les SAFER d'éventuels conflits d'intérêt et de garantir la transparence de la procédure , sans remettre en cause leur capacité et leur compétence pour instruire les dossiers de demandes d'autorisation. Pour cela, la commission propose de supprimer la possibilité aux SAFER :

- d'intervenir par acquisition, rétrocession ou substitution sur les dossiers qu'elles instruisent ;

- d'utiliser leur pouvoir de substitution sur les cessions de parts et d'actions qu'elles peuvent acquérir, en raison des risques constitutionnels liés à cette disposition et des atteintes potentielles à la liberté d'association des exploitants ;

La commission propose également :

- d'améliorer la transparence des procédures et des décisions des comités techniques des SAFER en prévoyant la publicité des comptes rendus, l'élévation au niveau législatif de la composition des comités techniques et un accès sur demande aux données administratives ;

- de permettre au préfet du département de réunir la commission départementale d'orientation agricole (CDOA) sur les dossiers les plus problématiques.

D. ÉVALUER LE DISPOSITIF AFIN D'AMÉLIORER SON EFFICACITÉ

La commission a enfin considéré que le dispositif devait être évalué de manière précise et rigoureuse afin de mieux analyser ses conséquences sur le marché foncier agricole et la pertinence des différents paramètres retenus . Pour cela, la commission propose de :

- mener une évaluation nationale obligatoire du dispositif à un horizon de trois ans, portant sur l'ensemble des paramètres dans une perspective d'amélioration du fonctionnement du dispositif ;

- maintenir une évaluation spécifique du marché foncier agricole de Corse et des territoires ultramarins.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER

Contrôle du marché sociétaire
Article 1er

Contrôle des sociétés possédant ou exploitant du foncier agricole

Cet article vise à créer un dispositif d'autorisation préalable pour les cessions de titres sociaux qui conduisent à la prise de contrôle de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole au-delà d'un seuil d'agrandissement significatif, afin de lutter contre la concentration excessive, l'accaparement des terres agricoles et de favoriser l'installation des agriculteurs.

La commission a adopté l'article 1 er modifié par 38 amendements.

I. La situation actuelle - Des outils de régulation du marché foncier agricole inadaptés au développement de transactions sociétaires, dont le contrôle demeure limité et l'évaluation incertaine

A. L'action des SAFER contribue à la régulation du marché du foncier agricole et à en limiter le coût d'accès

Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ont été créées par la loi n° 60-808 du 5 août 1960 d'orientation agricole dans le but de réguler l'accès au foncier agricole et de réorganiser les exploitations agricoles afin de bâtir une agriculture plus productive.

Les SAFER sont des sociétés anonymes chargées de la gestion d'un service public et placées sous la double tutelle administrative des ministères chargés de l'agriculture et des finances.

Les évolutions législatives successives ont confié des missions supplémentaires aux SAFER qui sont définies à l'article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) :

• la protection des espaces agricoles, naturels et forestiers ;

• l'installation, le maintien et la consolidation d'exploitations agricoles ou forestières afin que celles-ci atteignent une dimension économique viable ;

• l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations ;

• la diversité des systèmes de production, notamment ceux permettant de combiner les performances économique, sociale et environnementale ;

• la diversité des paysages, à la protection des ressources naturelles et au maintien de la diversité biologique ;

• le développement durable des territoires ruraux ;

• la transparence du marché foncier rural.

Les SAFER interviennent principalement sur le marché foncier agricole par acquisition puis rétrocession de biens ruraux, terres, exploitations agricoles ou forestières.

En 2020, selon la Fédération nationale des SAFER 1 ( * ) , ces dernières ont acquis 98 200 hectares et en ont rétrocédé 98 700 hectares. Parmi les rétrocessions, 34 % des biens revendus ont été consacrés à l'installation d'agriculteurs, 30 % ont contribué à la consolidation des structures existantes, tandis que les rétrocessions restantes ont concerné d'autres types d'opérations telles que les remaniements parcellaires ou le développement des espaces forestiers.

Les acquisitions des SAFER se font principalement par voie amiable, qui demeure la voie de droit commun. L'exercice du droit de préemption demeurant exceptionnel. En 2020, selon la Fédération nationale 2 ( * ) , environ 1 240 préemptions ont été exercées pour une surface de 5 400 hectares, dont 1 000 préemptions simples, 142 préemptions avec révision de prix acceptée et 99 préemptions partielles. La loi n° 62-933 du 8 août 1962 complémentaire à la loi d'orientation agricole reconnaît aux SAFER un droit de préemption ayant un caractère d'ordre public, ce qui leur donne une priorité dans l'acquisition de biens ruraux, terres, exploitations agricoles ou forestières, dans les conditions notamment fixées par l'article L. 143-1 du CRPM. Les évolutions législatives successives ont progressivement élargi le périmètre d'intervention des SAFER au titre de leur droit de préemption.

Conformément à l'article L. 141-1 du CRPM, les SAFER peuvent acquérir des actions ou parts de sociétés ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole notamment, par dérogation, la totalité ou une partie des parts de groupements fonciers agricoles (GFA) ou de groupements fonciers ruraux (GFR) (se référer au commentaire de l'article 2).

Par ailleurs, les SAFER sont notifiées par le notaire ou le cédant de toute cession conclue à titre onéreux ou gratuit portant sur des biens ou droits immobiliers, y compris en cas de cession de parts ou d'actions de sociétés (se référer au commentaire de l'article 3) .

Toutefois, les SAFER disposent d'un droit de préemption limité concernant l'acquisition des actions ou parts de sociétés exploitant ou détenant du foncier agricole .

En effet, depuis la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, dite « loi AAAF », leur droit de préemption ne s'applique qu'en cas de cession à titre onéreux de la totalité des parts ou actions d'une société détenant ou exploitant du foncier agricole et uniquement si l'acquisition a pour objectif d'installer un agriculteur .

Par conséquent, le dispositif actuellement en vigueur est aisément contourné dans la mesure où les cessions de parts ou d'actions de sociétés jusqu'à 99 % ne permettent pas aux SAFER d'user de leur droit de préemption, ce qui limite leur régulation du marché sociétaire .

B. Le contrôle des structures contribue à la régulation du marché du foncier agricole mais appréhende de manière imparfaite les transactions sociétaires

Le contrôle des structures constitue le principal outil de régulation de l'accès au foncier agricole. Sauf exception, le contrôle des structures soumet des opérations de mise en valeur des terres agricoles, telles que les installations, les agrandissements et les réunions d'exploitation agricoles, à une autorisation administrative préalable d'exploiter lorsque ces opérations conduisent au dépassement d'un seuil de surface (se référer au commentaire de l'article 5).

Depuis la loi AAAF du 13 octobre 2014, le contrôle des structures a été régionalisé , par cohérence avec les compétences attribuées aux régions en matière de gestion des aides agricoles. Par conséquent, le contrôle des structures s'appuie désormais sur des outils définis à l'échelon régional, en particulier sur le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) qui fixe les conditions de mise en oeuvre de ce contrôle.

Si le contrôle des structures s'est développé autour de la notion d'exploitation individuelle, il appréhende également le développement des formes sociétaires d'exploitation agricole . En effet, l'article L. 331-1 du CRPM précise bien que ce contrôle s'applique aux exploitations agricoles indépendamment de leur forme ou de leur mode d'organisation juridique.

Toutefois, les critiques d'inefficacité formulées à l'encontre du contrôle des structures ainsi que les voies de contournement inhérentes (telles que l'entrée d'associés non exploitants au capital des exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL), des sociétés anonymes à responsabilité limitée (SARL) et des sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA), ou la détention indirecte de sociétés par le biais de holdings ) ne permettent pas d'inclure la totalité des transactions sociétaires dans ce contrôle. La jurisprudence récente considère par exemple que la prise de participation d'un associé ne peut être considérée comme un agrandissement ou une réunion d'exploitations que s'il y a une participation effective et permanente à la mise en valeur des biens de l'exploitation 3 ( * ) .

C. Le développement du marché sociétaire demeure difficile à évaluer mais concerne des transactions significatives

L'étude du marché sociétaire agricole demeure récente en France, la Fédération nationale des SAFER n'observant le marché des parts sociales d'exploitations sociétaires que depuis 2016. Toutefois, les premières études sur le sujet, notamment menées par l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), permettent de mieux comprendre ce phénomène.

En France, toutes exploitations confondues, il y a aujourd'hui 64 % d'exploitations individuelles et 36 % d'exploitations sociétaires . Si les exploitations individuelles demeurent majoritaires, elles représentent désormais environ un tiers de la surface agricole utile (SAU) totale du territoire métropolitain et environ 40 % de la main d'oeuvre totale contre deux tiers de la SAU et près de 70 % de la main d'oeuvre totale pour les exploitations sociétaires. Par ailleurs, la surface moyenne des exploitations sociétaires est d'environ 109 hectares, contre 36 hectares pour les exploitations individuelles.

Si la progression des formes sociétaires s'observe dans l'ensemble de l'Union européenne (UE), la part des exploitations sociétaires en France est la plus élevée de l'Union européenne, les autres États membres comptant en moyenne 95 % d'exploitations individuelles et 5 % d'exploitations sociétaires.

Toutes formes juridiques confondues, le recours à des sociétés permet notamment de faciliter la réunion d'exploitations individuelles, de séparer le patrimoine personnel de l'exploitant de celui de l'exploitation ainsi que de faciliter les prises de participation au capital pour se financer.

Les spécificités françaises en matière de recours à des formes sociétaires expliquent à la fois le dynamisme des transactions de parts sociales et d'actions sur le marché foncier agricole et les volontés successives d'accroître le niveau de régulation sur ce segment de marché .

Selon la Fédération nationale des SAFER, le nombre de transactions sociétaires est passé de 6 900 transactions à 7 400 entre 2017 et 2019, ce qui représente environ 7 % des transactions et près de 20% de la valeur du marché foncier , avec des échanges de lots généralement compris entre 30 et 90 hectares, soit environ des surfaces dix fois supérieures à celles échangées par des personnes physiques sur le marché foncier.

Selon la Fédération nationale des SAFER, en 2019, les 7 160 cessions de parts, partielles ou totales, concernent des sociétés qui exploitent et ou sont propriétaires d'un total de 616 000 hectares, avec en moyenne 86 hectares concernés en moyenne pour chaque cession . Par comparaison, le marché foncier agricole régulé par les Safer représentait 443 000 hectares, pour un lot moyen échangé de 4,3 hectares.

Enfin, s'il n'existe pas de statistiques précises sur ce sujet, il semble que la part des transactions sociétaires et d'acquisition de foncier agricole financée par des capitaux étrangers demeure très limitée en France. Ainsi, la Fédération nationale des SAFER estime à moins de 3 % la part du foncier agricole détenu par des sociétés étrangères et à moins de 1 % du volume annuel de transactions impliquant des acteurs étrangers .

D. Les initiatives législatives récentes ont été partiellement censurées et ne permettent qu'un contrôle limité des cessions de parts de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole

Face aux contournements du dispositif prévu par la loi AAAF du 13 octobre 2014 qui ne concerne que les cessions totales à titres onéreux de parts sociales ou d'actions dans un but d'installation, le législateur a tenté à plusieurs reprises de davantage réguler le marché foncier agricole.

D'une part, la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « loi Sapin II » , proposait :

• d'étendre le droit de préemption des SAFER aux cessions partielles de parts sociales et d'actions ;

• de donner aux SAFER possibilité de conserver pendant cinq ans leurs participations dans le capital des exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL), des groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) et des groupements fonciers agricoles (GFA) dans le but de les rétrocéder ;

• d'obliger toute personne morale de droit privé, qui acquiert ou reçoit par apport en société des biens ou droits susceptibles de donner lieu à préemption par SAFER, à les rétrocéder par voie d'apport au sein d'une autre société dont l'objet principal est la propriété agricole.

Toutefois, une partie de ces dispositions ont été censurées par le Conseil constitutionnel 4 ( * ) car ne présentant pas de lien, même indirect, avec le texte du projet de loi initial , et ont été considérées comme cavaliers législatifs.

D'autre part, la loi n° 2017-348 du 20 mars 2017 relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle prévoyait également un dispositif donnant la possibilité aux SAFER d'utiliser son droit de préemption en cas de cessions partielles de parts sociales ou d'actions d'une société dont l'objet principal est la propriété agricole , lorsque l'acquisition a pour effet de conférer au cessionnaire la majorité des parts ou actions ou une minorité de blocage au sein de la société.

Toutefois, le mécanisme proposé a également été censuré, le Conseil constitutionnel ayant cette fois-ci conclu, après l'examen des griefs soulevés, à une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre 5 ( * ) .

Enfin, la loi n° 2019-846 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite « loi PACTE » et le décret n° 2019-1590 du 31 décembre 2019 ont mis en place un dispositif spécifique de contrôle des investissements étrangers en France qui inclut les investissements dans la production, la transformation ou la distribution de produits agricoles qui contribuent à la souveraineté alimentaire nationale et qui sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité et à l'ordre national.

Si les investissements étrangers dans une société française détenant ou exploitant du foncier agricole conduisent à la prise de contrôle de cette société, c'est-à-dire que les investisseurs disposeraient d'au moins 25 % des droits de vote, et sont susceptibles de mettre en jeu l'ordre public ou la sécurité publique, dans ce cas le dispositif de contrôle des investissements étrangers en France (IEF) piloté par le bureau MULTICOM4 de la Direction générale du Trésor s'appliquerait. Toutefois, ce bureau n'est pas en mesure de préciser si ce dispositif a déjà été utilisé pour des opérations sociétaires agricoles.

Par ailleurs, le champ d'application de ce dispositif est particulièrement restreint et ne permet pas d'appréhender les spécificités du marché foncier agricole français au sein duquel les transactions sont très majoritairement réalisées par des sociétés françaises.

II. Le dispositif envisagé - Un dispositif d'autorisation préalable pour les cessions de titres sociaux qui conduisent à la prise de contrôle de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole au-delà d'un seuil d'agrandissement significatif

A. Les objectifs du dispositif de contrôle sont multiples

La proposition de loi est présentée comme une réponse d'urgence à la concentration excessive et à l'accaparement des terres . La concentration excessive fait référence à la détention de foncier agricole par un faible nombre de propriétaires tandis que l'accaparement fait référence à l'utilisation exclusive d'outils de production par un faible nombre d'exploitants et au détriment de l'installation d'agriculteurs ou de la consolidation d'exploitations existantes de taille inférieure.

Dans cette perspective, le dispositif de contrôle prévu par la présente proposition de loi concerne à la fois les sociétés de détention et les sociétés d'exploitation de foncier agricole .

La lutte contre la concentration excessive et l'accaparement des terres est considérée comme un moyen d'atteindre les objectifs plus larges que constituent l'installation d'agriculteurs, la consolidation d'exploitations existantes et le renouvellement des générations .

B. Le dispositif est déclenché par le franchissement d'un double seuil de prise de contrôle de la société et d'agrandissement significatif

Le dispositif de contrôle n'a pas vocation à concerner l'ensemble des transactions sociétaires sur le marché foncier agricole, c'est pourquoi son déclenchement est soumis au franchissement d'un double seuil.

Premièrement, le seuil de prise de contrôle correspond aux dispositions des articles L. 233-3 et L. 233-4 du Code de commerce selon lesquelles la prise de contrôle est présumée lorsqu'une personne physique ou morale dispose, directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40 % et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne.

Afin de prendre en compte les complexités inhérentes aux montages sociétaires et d'adopter une vision dynamique de la prise de contrôle, le dispositif prend en compte les mutations de titres sociaux qui conduisent à la modification de la répartition du capital social, aux prises de participation complémentaires réalisées par les personnes physiques et morales ainsi que les cas spécifiques des holdings où la prise de contrôle s'effectue par participations croisées entre personnes morales.

Deuxièmement, le seuil d'agrandissement significatif, fixé par le préfet de région dans le cadre du schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) est calculé en fonction de la surface agricole utile régionale moyenne (SAURM). Ce seuil est compris entre une et trois fois la SAURM et peut être fixé en hectares, mais également par région naturelle ou par territoire présentant une cohérence en matière agricole , ce qui garantit une certaine souplesse afin d'appréhender la diversité infrarégionale des territoires et de leurs exploitations agricoles.

La détermination du franchissement du seuil d'agrandissement significatif s'apprécie au regard de la superficie de la totalité des biens immobiliers détenus par les personnes physiques ou morales .

Sont toutefois exemptées du calcul de cette superficie les parcelles classées en nature de bois et forêts au cadastre, sous réserve de quelques exceptions.

C. Le périmètre d'application du dispositif de contrôle comprend plusieurs exemptions

Premièrement, les opérations d'acquisition et de rétrocession réalisées par les SAFER, par cession ou par substitution, à l'amiable ou par usage de leur droit de préemption . La logique justifiant cette exemption repose sur l'accord exprès des commissaires du Gouvernement devant autoriser de telles opérations, les SAFER étant chargées d'une mission d'intérêt public, et sur les voies de recours existantes permettant de contester les décisions prises.

Deuxièmement, les opérations de cession de titres sociaux réalisées à titre gratuit , la logique du dispositif de contrôle étant de cibler les opérations susceptibles d'alimenter la hausse des prix du foncier agricole et la spéculation.

Troisièmement, les cessions de titres sociaux entre parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus , ce qui correspond aux nièces et neveux, aux tantes et oncles ainsi qu'aux arrière-petits-enfants. Cette exemption s'inscrit dans une volonté de préserver les transactions intervenant dans un cadre familial, la plupart des transactions sociétaires sur le marché du foncier agricole ayant lieu hors cadre familial, notamment pour les opérations les plus importantes.

Enfin, les opérations d'acquisition et de rétrocession des sociétés foncières agricoles relevant de l'économie sociale et solidaire car disposant d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS) et oeuvrant au profit des plus démunis sont exemptées du dispositif, ce qui correspond exclusivement à l'activité de la société foncière solidaire Terre de liens.

D. La méconnaissance du dispositif peut conduire à des actions en nullité et à des sanctions administratives

Dans l'éventualité où une prise de participation remplirait les conditions de déclenchement du dispositif mais ne serait pas assortie d'une demande d'autorisation préalable et notifiée à la SAFER concernée, l'autorité administrative peut engager une action en nullité qui se prescrit à un an à compter du jour où l'opération est connue de ladite autorité.

L'autorité administrative peut également, selon une procédure présentant les garanties procédurales habituelles, prononcer une amende administrative qui ne peut excéder 2 % du montant de la transaction visée.

E. Les demandes d'autorisation sont instruites par les comités techniques des SAFER et validées par l'autorité administrative selon une procédure dédiée

Après avoir été notifiés de la demande d'autorisation préalable, les comités techniques des SAFER instruisent les demandes au nom et pour le compte de l'autorité administrative . L'instruction consiste en une évaluation de son adéquation avec les objectifs du dispositif de contrôle et de son intérêt pour le développement du territoire en matière de performances économiques, sociales et environnementales.

Les organisations interprofessionnelles peuvent présenter leur avis aux comités techniques des SAFER afin de contribuer au processus d'instruction.

Après transmission des éléments à l'autorité administrative, qui demeure la seule instance habilitée à prendre une décision, cette dernière peut autoriser l'opération sans condition, la rejeter en justifiant les motifs de refus, ou l'autoriser sous réserve d'engagements qui peuvent être proposés par la société faisant l'objet de la prise de contrôle ou son bénéficiaire.

Ces engagements s'apparentent à des mesures compensatoires qui s'inscrivent dans un objectif de régulation des transactions sociétaires afin de réduire la concentration et l'accaparement des terres agricoles.

Si le demandeur est propriétaire, ces mesures peuvent être la vente ou la conclusion d'un bail rural à long terme prioritairement pour les agriculteurs bénéficiant des aides à l'installation des jeunes agriculteurs ou au bénéfice d'une exploitation devant atteindre le seuil de viabilité économique.

Si le demandeur dispose d'un bail rural, ces mesures peuvent être la libération d'une partie des surfaces agricoles au bénéfice prioritairement d'agriculteurs bénéficiant des aides à l'installation des jeunes agriculteurs ou d'une exploitation devant atteindre le seuil de viabilité économique. La libération des surfaces agricoles se traduit par la résiliation du bail à condition que le propriétaire s'engage à vendre ou à donner à bail rural à long terme à l'agriculteur qui sera choisi.

La rédaction actuelle de la proposition de loi mentionne explicitement que ces mesures compensatoires ne peuvent être réalisées qu'au bénéfice des SAFER, sans possibilité pour le demandeur de recourir à un autre intermédiaire .

Si l'autorisation accordée par l'autorisation administrative comprend des mesures compensatoires, les engagements pris par les parties doivent être réalisés dans un délai de six mois à compter de la prise de décision.

Si l'autorité administrative constate, à l'expiration de ce délai, que les engagements pris n'ont pas été réalisés, une procédure de contradictoire s'engage à l'issue de laquelle la décision d'autoriser l'opération peut être retirée et des sanctions pécuniaires peuvent être prononcées . En cas de retrait de l'autorisation administrative, l'opération réalisée devient nulle de plein droit.

F. Le dispositif peut conduire à une dispense d'autorisation d'exploiter

Dans la mesure où une opération serait autorisée dans le cadre de ce dispositif de contrôle et où cette même opération nécessiterait également une autorisation d'exploiter au titre du contrôle des structures, une équivalence d'autorisation est prévue.

Cette disposition s'inscrit dans une volonté de simplification des démarches administratives pour les demandeurs.

Schéma du dispositif de contrôle proposé

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale - Tirer les conséquences de l'avis rendu par le Conseil d'État tout en précisant la procédure et les exemptions applicables au dispositif

A. Les modifications adoptées par la commission permettent principalement de tirer les conséquences de l'avis du Conseil d'État

La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a adopté 47 amendements dont 35 amendements du rapporteur, ce qui a notamment permis de tirer les conséquences de l'avis du Conseil d'État.

En effet, la proposition de loi avait été soumise pour avis au Conseil d'État qui a rendu son avis le 6 mai 2021 . Parmi les amendements du rapporteur et au-delà des amendements rédactionnels et de coordination juridique, les principaux amendements adoptés faisant suite à cet avis ont concerné :

• la modification du seuil de prise de contrôle d'une société avec un alignement sur la définition de la prise de contrôle telle que prévue à l'article L. 233-3 du Code de commerce qui fixe notamment le seuil à 40 % des droits de vote sous réserve qu'aucun autre associé ou actionnaire ne dispose de davantage de droits de vote ;

• la modification de la terminologie du seuil d'agrandissement qui n'est plus qualifié « d'excessif » mais de « significatif » ;

• la précision que l'autorisation de prise de participation peut être refusée par l'autorité administrative, notamment si l'opération est estimée contraire à l'objectif principal de favoriser l'installation d'agriculteurs défini dans les SDREA ;

• la clarification des critères pris en compte par l'autorité administrative pour délivrer son autorisation ;

• la clarification de la procédure de l'action en nullité qui peut être engagée par l'autorité administrative ;

• le remplacement du recours de pleine juridiction par le recours pour excès de pouvoir ;

• la soumission du projet de décret d'application des dispositions de l'article premier de la proposition de loi au Conseil d'État.

Les autres amendements adoptés par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale ont apporté les changements suivants :

• la prise en compte des équivalences prévues par les schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles (SDREA) lors du calcul du seuil d'agrandissement significatif afin de prendre en compte la diversité des cultures et des productions ;

• la soumission des opérations d'acquisition et de rétrocession réalisées par les SAFER, par cession ou substitution, à l'amiable ou par l'exercice de leur droit de préemption, à un accord préalable exprès des commissaires du Gouvernement ;

• la publication des notifications des demandes d'autorisation lorsqu'elles sont transmises à l'autorité administrative.

B. Les amendements adoptés en séance ont notamment permis de préciser la procédure de contrôle et les exemptions applicables au dispositif

À la suite de l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale, 34 amendements ont été adoptés dont 14 amendements du rapporteur, les autres amendements ayant été presque tous co-signés par le rapporteur .

Parmi les principales dispositions adoptées précisant la procédure d'autorisation préalable, il y a notamment :

• la réduction du délai de prescription de cinq ans à un an ;

• le renforcement des sanctions en cas de violation du dispositif de contrôle et de non-respect des engagements pris au titre des mesures compensatoires ;

• la possibilité pour les interprofessions régionales de donner un avis consultatif auprès des comités techniques des SAFER ;

• la possibilité pour les SAFER d'informer le demandeur de la décision prise par l'autorité administrative ;

• la possibilité donnée d'exempter de l'autorisation d'exploiter les opérations recevant un avis favorable de l'autorité administrative, sous réserve du respect des critères définis pour l'instruction par les SAFER.

Parmi les principales dispositions adoptées précisant le périmètre des exemptions applicables, il y a notamment :

• l'exemption des parcelles classées en nature de bois et forêts, assortie toutefois de plusieurs réserves ;

• l'exemption des cessions de parts sociales ou actions entre parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus, qui a été sous-amendée par le rapporteur pour préciser que le cessionnaire doit conserver les titres sociaux acquis pendant au moins neuf ans et participer effectivement à l'exploitation ;

• l'exemption des sociétés foncières agricoles dotées d'un statut d'entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS), notamment Terre de liens.

Enfin, les autres modifications significatives concernent les articles additionnels et les suppressions d'articles :

• la suppression de l'article 4 élargissant la liste des agents ayant accès aux informations relatives aux bénéficiaires effectifs des sociétés et entités ;

• l'introduction de l'article 5 bis demandant au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur les spécificités du marché foncier agricole en Corse et dans les territoires ultramarins ;

• la suppression de l'article 6 prévoyant un gage financier.

IV. La position de la commission - Une volonté de territorialiser, de recentrer et d'encadrer le dispositif de contrôle proposé

La commission des affaires économiques a adopté l'article ainsi modifié par 38 amendements, dont 29 amendements du rapporteur, M. Olivier Rietmann, sept amendements déposés par des membres du groupe Les Républicains (LR) et deux amendements du groupe socialiste, écologiste et républicain (SER).

A. La territorialisation du dispositif de contrôle afin de rapprocher les décisions de l'échelon local

L' amendement COM-69 du rapporteur s'inscrit dans une volonté de territorialiser le dispositif de contrôle prévu, en confiant au préfet de département plutôt qu'au préfet de région la décision d'autoriser ou de refuser une prise de participation sociétaire. En effet, la réalité et la diversité des exploitations agricoles sont mieux connues et seront plus facilement appréhendées au niveau du département.

L' amendement COM-29 de M. Redon-Sarrazy précise que les équivalences prévues dans le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) doivent obligatoirement être prises en compte pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif, ce qui rend la rédaction de la proposition de loi plus contraignante, et répond à un objectif de territorialisation au niveau infrarégional du dispositif proposé.

B. Le recentrage du dispositif de contrôle sur les objectifs annoncés de lutte contre l'accaparement des terres et la concentration excessive

Premièrement, la commission a constaté que les modalités de fixation du seuil d'agrandissement significatif n'étaient pas en adéquation avec les objectifs annoncés de lutte contre l'accaparement des terres et de leur concentration excessive .

Ainsi, l' amendement COM-71 du rapporteur, identique à l'amendement COM-44 de M. Cuypers, modifie l'intervalle de seuil d'agrandissement significatif fixé par le préfet de région, désormais compris entre deux et quatre fois la surface agricole utile régionale moyenne (SAURM), alors que cet intervalle était fixé entre une et trois fois la SAURM dans le texte initial.

Il s'agit de mettre en cohérence le dispositif de contrôle avec les objectifs annoncés, c'est-à-dire la lutte contre l'accaparement et la concentration excessive des terres. Or, un seuil équivalent à une fois la SAURM permettrait de contrôler des exploitations dont la surface se situe justement dans la moyenne régionale, ces exploitations ne pouvant donc pas être considérées comme excessives. C'est pourquoi il est nécessaire d'au moins fixer un « seuil plancher » supérieur à la SAURM.

L' amendement COM-74 du rapporteur, ainsi que le sous-amendement n° 106 à visée rédactionnelle, prévoient que le calcul du seuil d'agrandissement significatif soit pondéré à la hausse, selon une formule fixée par décret, pour tenir compte du fait que plusieurs exploitants sont actifs sur la surface soumise au calcul de ce seuil. En effet, en l'état actuel de la rédaction, le seuil d'agrandissement significatif est calculé de manière identique s'il y a un ou plusieurs exploitants sur une même surface agricole.

Or, au regard des objectifs du texte de lutte contre l'accaparement et la concentration excessive des terres agricoles, une pondération est nécessaire. Autrement dit, si une exploitation de 400 hectares peut être regardée comme excessive pour un seul exploitant, elle ne l'est pas pour six exploitants.

De manière complémentaire, d'autres dispositions relatives aux modalités de fixation du seuil d'agrandissement significatif ont été adoptées par la commission :

• l' amendement COM-70 du rapporteur précise que le préfet de région fixera le seuil après avoir mené des consultations préalables, par exemple auprès des élus locaux, des organisations professionnelles agricoles (OPA) ou des représentants des chambres d'agriculture ;

• l' amendement COM-72 du rapporteur précise le seuil d'agrandissement significatif de référence qui sera rendu applicable aux sociétés étrangères détenant ou exploitant du foncier agricole en France, ainsi qu'aux sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole dans plusieurs régions de France ;

• l' amendement COM-73 du rapporteur précise la rédaction juridique du texte en remplaçant la notion de « parcelles » par celle de « biens immobiliers ».

Enfin, l' amendement COM-75 du rapporteur précise le champ de l'exemption applicable aux surfaces de bois et de forêts pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif.

Deuxièmement, la commission a adopté plusieurs amendements visant à garantir une meilleure fluidité des transactions sociétaires sur le marché foncier agricole au regard du dispositif de contrôle proposé, rappelant que l'objectif n'est pas de contrôler toutes les opérations de concentration et d'agrandissement, mais seulement les plus significatives .

Concernant les transactions intrafamiliales , l' amendement COM-77 du rapporteur élargit l'exemption des cessions jusqu'au quatrième degré inclus, ce qui permet d'inclure les cousins germains en plus des arrière-petits-enfants, des oncles et tantes et des neveux et nièces.

La commission a souhaité maintenir le principe selon lequel cette exemption doit être encadrée et limitée. D'une part, la commission a souhaité conserver la première condition relative à la détention par le cessionnaire, pendant au moins neuf ans, des titres sociaux acquis. Cette condition permet d'éviter les reventes rapides de parts sociales et d'actions.

D'autre part, la commission a modifié la seconde condition, qui est celle de la participation effective du cessionnaire à l'exploitation. L' amendement COM-78 du rapporteur remplace ce critère par un critère de maintien de l'usage ou de la vocation agricoles de l'exploitation, ce qui permet de poursuivre un même objectif de maintien dans la durée des exploitations familiales.

Concernant les transactions intraconjugales , l' amendement COM-79 du rapporteur exempte du dispositif de contrôle les cessions de parts sociales et d'actions entre personnes mariées ou pacsées, afin de ne pas entraver les transactions intervenant dans un cadre familial au sens large et permettant la transmission de patrimoine.

Concernant les autres transactions, l' amendement COM-80 du rapporteur exempte du dispositif de contrôle les cessions d'actions et de parts sociales entre associés ou actionnaires d'une même société, à condition que ceux-ci fassent partie de la société depuis au moins neuf ans. Il s'agit de garantir une certaine souplesse de gestion, notamment pour les associés des exploitations agricoles qui souhaitent racheter les parts d'autres associés, par exemple dans le cas d'un départ à la retraite de l'un des associés, tout en évitant des stratégies de contournement qui seraient permises par une absence de durée minimale d'association ou d'actionnariat.

L' amendement COM-91 du rapporteur, ainsi que le sous-amendement n° 107 de M. Duplomb, exemptent du dispositif de contrôle les cessions d'actions et de parts sociales de salariés qui travaillent pour une même exploitation depuis au moins neuf ans, à condition qu'ils s'inscrivent dans un parcours d'installation. Il s'agit de favoriser l'achat de parts sociales et d'actions par celles et ceux qui ont déjà contribué à la mise en valeur de l'exploitation agricole au sein de laquelle ils souhaitent s'investir davantage.

Enfin, concernant les activités des foncières agricoles solidaires , l' amendement COM-82 du rapporteur, ainsi que les amendements identiques COM-13 de M. Gremillet, COM-34 de M. Duplomb, COM-42 de M. Menonville et COM-43 de M. Cuypers suppriment cette exemption. Aujourd'hui, seule une société foncière en France était concernée par ce dispositif et correspondait à l'ensemble des critères fixés, alors que la plupart des acquisitions qu'elle réalise le sont auprès des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER), dont les opérations d'acquisition et de rétrocession sont déjà exemptées du dispositif de contrôle.

C. Un encadrement du dispositif qui permet d'asseoir sa légitimité et d'éviter de placer les acteurs dans des situations d'éventuels conflits d'intérêt

Premièrement, la commission a adopté des amendements visant à clarifier les rôles joués par chaque acteur dans le cadre du dispositif de contrôle proposé afin d'asseoir la légitimité de l'instruction des comités techniques des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) et d'éviter de les placer dans des situations délicates de conflits d'intérêts .

L' amendement COM-99 du rapporteur interdit temporairement d'intervention commerciale les SAFER sur les biens des sociétés dont elles ont instruit la procédure d'autorisation. En effet, la rédaction du texte tel que transmis au Sénat permettait aux SAFER d'être à la fois instructrices, opératrices de marché et exemptées du dispositif de contrôle. Autrement dit, la même entité pouvait recommander au préfet des mesures compensatoires consistant en la cession à son profit de terres ou d'exploitations, qui seront ensuite rétrocédées commercialement.

Sans remettre en cause les missions d'intérêt général des SAFER en matière de régulation du marché du foncier agricole et sans contester leur expertise en la matière, la commission a souhaité bien encadrer le dispositif de contrôle proposé qui apporte un élargissement conséquent aux pouvoirs dérogatoires des SAFER afin de les protéger contre d'éventuelles critiques sur l'impartialité de leur instruction.

Par conséquent, ces dernières ne pourront pas intervenir directement, par acquisition de terres, de parts sociétaires, par rétrocession ou par substitution, sur les biens de sociétés dont elles ont instruit les demandes d'autorisation.

Afin de ne pas bloquer leur capacité de régulation et de prendre en compte les évolutions du marché, cette interdiction est limitée à une durée de neuf ans, ce qui correspond à la durée minimale d'un bail rural. Dans l'intervalle, ce seront les mesures compensatoires décidées par le préfet qui serviront d'outil de régulation des activités de ces sociétés en matière de foncier agricole.

De manière complémentaire à cet amendement, l'amendement COM-88 du rapporteur encadre le coût de la procédure d'autorisation. En effet, le dispositif proposé implique un coût supplémentaire pour les SAFER, lié à la mobilisation de moyens humains et techniques d'analyse. Selon les estimations de la Fédération nationale, près de 1 500 dossiers d'instruction pourraient être concernés chaque année.

Toutefois, la commission a souhaité s'assurer que le coût de la demande d'autorisation ne sera pas prohibitif pour les opérateurs, afin de ne pas geler les transactions sur le marché foncier agricole et d'éviter qu'une éventuelle tarification de la demande d'autorisation soit mise en oeuvre de manière uniforme sur le territoire. En outre, au regard de l'exigence d'égalité devant la loi, un montant forfaitaire unique est préférable à une commission ou à des frais proportionnels au montant de la transaction. Pour l'ensemble de ces raisons, l'amendement COM-88 prévoit que les seuls frais qui pourront être mis à la charge du demandeur dans le cadre de la procédure d'autorisation seront des frais de dossiers, d'un montant unique qui sera fixé par décret.

Par ailleurs, l' amendement COM-100 du rapporteur s'inscrit également dans une volonté d'encadrer le dispositif de contrôle et d'en asseoir la légitimité et élève au niveau législatif la composition des comités techniques des SAFER. Aujourd'hui, cette composition est en partie fixée au niveau réglementaire et en partie fixée par le règlement intérieur de chaque comité départemental, c'est pourquoi il existe des différences territoriales marquées. Pour une sécurité juridique et une transparence plus grandes, cet amendement fixe le socle commun de leur composition dans la loi.

Deuxièmement, la commission a adopté plusieurs amendements visant à encadrer la détermination des mesures compensatoires proposées aux parties prenantes d'une opération de prise de participation en vue de son autorisation par le préfet de département .

L' amendement COM-93 du rapporteur réécrit les dispositions relatives aux mesures compensatoires qui peuvent être prises en vue d'obtenir l'autorisation administrative, car il s'agit d'un véritable point sensible, voire de faiblesse du dispositif proposé. Cet amendement apporte trois garde-fous au dispositif des mesures compensatoires, sans en bousculer l'équilibre général :

• la garantie qu'il ne pourra pas être exigé qu'un propriétaire mette fin à un bail ou à un contrat en cours avant son terme ;

• la suppression de l'intervention obligatoire des SAFER dans la mise en oeuvre de toutes les mesures compensatoires ;

• la prise en compte de l'impact des mesures compensatoires sur la viabilité économique des exploitations concernées.

De manière complémentaire à l'encadrement proposé, l' amendement COM-94 du rapporteur a pour but que le préfet s'assure que les mesures compensatoires contribuent aux objectifs de régulation édictés par le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA), pour une plus grande cohérence entre instruments de politique publique.

Enfin, deux amendements renforcent les pouvoirs du préfet en matière de mesures compensatoires. D'une part, l' amendement COM-95 du rapporteur permet au préfet de département de consulter la commission départementale d'orientation agricole (CDOA) sur les dossiers d'autorisation prévoyant des mesures compensatoires. La commission a souhaité laisser la possibilité au préfet de réunir cette instance consultative afin de pouvoir bénéficier d'un avis contradictoire sur les dossiers les plus problématiques. D'autre part, l' amendement COM-96 du rapporteur permet au préfet de fixer le délai de réalisation des engagements pris dans le cadre des mesures compensatoires.

Troisièmement, la commission a adopté plusieurs amendements permettant de préciser la procédure de demande d'autorisation et d'instruction.

Concernant la procédure de demande d'autorisation préalable, l' amendement COM-84 du rapporteur renvoie au décret l'encadrement du format et du contenu de la demande d'autorisation afin d'articuler cette demande avec les informations qui doivent déjà être notifiées aux SAFER et d'éviter de transmettre les mêmes informations deux fois. D'autre part, il précise bien que la demande d'autorisation est présentée par le demandeur à la SAFER compétente au nom et pour le compte de l'autorité administrative.

Concernant la procédure d'instruction auprès des comités techniques des SAFER, les amendements suivants complètent et précisent cette procédure :

• l' amendement COM-83 du rapporteur réduit à six mois le délai de prescription de l'action qui peut être engagée par l'administration au terme de toute la procédure de contrôle prévue ;

• l' amendement COM-85 du rapporteur permet aux interprofessions concernées de rendre leur avis sur les projets de prise de participation sociétaire intervenant dans les filières qu'elles représentent afin de rendre plus complets les dossiers transmis au préfet de département ;

• l' amendement COM-86 du rapporteur complète l'évaluation réalisée par les comités techniques des SAFER pour le compte du préfet en précisant que l'opération ne doit pas porter atteinte aux dispositions du SDREA ;

• l' amendement COM-87 du rapporteur permet aux comités techniques des SAFER de demander ponctuellement à l'autorité administrative l'accès à des données administratives nécessaires à l'instruction des dossiers ;

• l' amendement COM-89 du rapporteur oblige d'entendre les parties à l'opération dans le cadre de l'instruction dès lors qu'elles en font la demande ;

• l' amendement COM-90 du rapporteur prévoit une procédure de renvoi pour instruction complémentaire, par laquelle le préfet peut renvoyer le dossier aux SAFER lorsqu'il estime l'analyse insuffisante, ce qui permet également de réaffirmer que c'est bien le préfet qui prend la décision ;

• l' amendement COM-91 du rapporteur supprime la possibilité qui était donnée aux SAFER d'informer les parties des décisions administratives prises par le préfet ;

• l' amendement COM-92 du rapporteur est rédactionnel.

Enfin, la commission a adopté l'amendement COM-31 de M. Redon-Sarrazy, qui supprime la dispense automatique d'autorisation d'exploiter pour les projets ayant été autorisés au titre de la procédure créée par la proposition de loi. En effet, l'autorisation d'exploiter délivrée dans le cadre du contrôle des structures et l'autorisation délivrée dans le cadre de cette nouvelle procédure de contrôle poursuivent des objectifs différents, avec des critères distincts. Afin de ne pas affaiblir le niveau de régulation sur le marché foncier agricole, la commission a préféré ne pas fusionner ces deux procédures distinctes.

L'adoption de cet amendement s'inscrit dans la volonté de la commission de soutenir cette proposition de loi et d'en circonscrire l'examen au seul dispositif de contrôle proposé, même si la commission regrette que la promesse du Gouvernement de déposer une grande loi foncière ne soit pas tenue.

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

TITRE II

Dispositions diverses d'adaptation
Article 2 (supprimé)

Extension des pouvoirs d'acquisition et de substitution des SAFER
vis-à-vis des parts et actions de sociétés

Cet article vise à étendre le champ du pouvoir de substitution des SAFER au profit d'attributaires. Aujourd'hui limité aux acquisitions et rétrocessions de biens agricoles et forestiers, il est proposé de l'étendre aux parts et actions de sociétés. Un décret en Conseil d'État encadrera le cahier des charges qui contiendra des engagements spécifiques dans le cas d'une telle substitution.

Il vise en outre à étendre le champ des sociétés dont les parts et actions peuvent être acquises par les SAFER, au-delà des seules sociétés à objet principal agricole.

La commission a adopté un amendement visant à supprimer cet article, estimant que les mesures proposées sont disproportionnées et inadaptées à l'objectif poursuivi.

I. La situation actuelle - Les SAFER peuvent acquérir des parts ou actions de sociétés à objet d'exploitation ou de propriété agricole, mais ne peuvent user de leur pouvoir de substitution à leur égard

Les lois successives ont confié aux SAFER, dans l'exercice de leurs missions de soutien à l'installation et au maintien des agriculteurs, plusieurs leviers d'action , prévus à l'article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime :

- l'acquisition de biens, d'exploitations ou de terres , en vue de les rétrocéder à des personnes exerçant des activités agricoles ou forestières ;

- l'acquisition de parts ou actions de sociétés , soit parce qu'elles détiennent du foncier agricole, soit parce qu'elles ont pour objet l'exploitation agricole ;

- l'accompagnement d'opérations immobilières portant sur des biens concernés par des baux ruraux ;

- la possibilité de se voir substituer par un attributaire dans le cadre d'une acquisition-rétrocession de biens, d'exploitations ou de terres : dans ce cas, ce n'est pas la SAFER elle-même qui acquiert le bien, mais ce dernier est directement cédé au destinataire final, sans qu'il entre dans le patrimoine de la SAFER ni ne soit rétrocédé.

Moyens d'action des SAFER - Représentation schématique

Source : Commission des affaires économiques du Sénat

A. Des acquisitions de titres limitées aux sociétés dont l'objet principal est agricole

Les acquisitions des SAFER, qu'il s'agisse de biens ou de titres sociaux, peuvent être conservées par elles pour une durée maximale de cinq ans , au titre de l'article L. 142-4 du code rural et de la pêche maritime : elles doivent être rétrocédées directement ou par substitution avant cette échéance.

En ce qui concerne l'acquisition de parts et actions de sociétés, le droit actuel ne différencie pas entre les différentes formes juridiques de sociétés, mais entre leur objet.

Peuvent aujourd'hui uniquement être acquis les titres de sociétés « ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole » . L'article L. 141-1 cite notamment les groupements fonciers agricoles (GFA) ou ruraux (GFR), mais l'ensemble des sociétés civiles - comme les sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA), les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC), et les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) - ou commerciales - comme les sociétés par action à responsabilité limitée (SARL), les sociétés par actions simplifiées (SAS), les sociétés en nom collectif (SNC) ou sociétés civiles immobilières (SCI) - peuvent aussi être visées. Le critère principal est bien l'objet agricole de ces sociétés.

B. Une possibilité de rétrocession par substitution qui ne s'applique pas aux titres sociaux

Comme évoqué plus haut, la SAFER peut avoir recours à la substitution pour rétrocéder un bien . Dans ce cas, elle bénéficie d'une promesse de vente du cédant, puis rétrocède le bien à l'acquéreur sans que ce bien ne transite par le patrimoine de la SAFER .

La substitution d'un bien, comme la rétrocession, est soumise à une procédure en plusieurs étapes :

- d'abord, la rétrocession fait l'objet d'un avis d'appel à candidatures public, dans les conditions prévues à l'article R. 142-3 du code rural et de la pêche maritime ;

- ensuite, l'opération est présentée au comité technique départementale de la SAFER qui émet un avis sur les candidats au titre de l'article R. 141-5 du même code ;

- une demande d'autorisation de l'opération est formulée auprès des commissaires du Gouvernement (article R. 141-11) ;

- enfin, la décision de rétrocession est rendue publique dans les conditions prévues à l'article R. 142-4 ;

- l'opération de rétrocession par substitution peut ensuite être réalisée, la SAFER percevant une commission.

Au titre du droit existant, la substitution des SAFER par un attributaire n'est toutefois possible que dans le cas d'une acquisition de biens ruraux, de terres ou d'exploitations agricoles ou forestières ; mais pas en cas d'acquisition de parts ou actions de sociétés .

En cas de rétrocession et de substitution d'un bien acquis par les SAFER (1 et 4) , l'attributaire peut être soumis au respect d'un cahier des charges . Lorsqu'il s'agit d'une substitution plus particulièrement, un engagement à maintenir pendant dix ans au moins l'usage agricole ou forestier des biens est obligatoire (III de l'article L. 141-1 précité). Toute cession ultérieure du bien par l'attributaire est aussi soumise à l'accord de la SAFER pendant une même durée de dix ans. Si ces deux conditions ne sont pas respectées, la SAFER peut solliciter la reprise du bien à un prix fixé par le cahier des charges ou le juge de l'expropriation.

II. Le dispositif envisagé - Des possibilités d'acquisition de parts et actions de société étendues, et un nouveau pouvoir de substitution des SAFER visant ces mêmes acquisitions

L'article 2 de la proposition de loi initiale prévoit d'étendre la possibilité de substitution de la SAFER aux opérations portant sur des parts ou actions de sociétés, alors qu'elle ne concerne aujourd'hui que les rétrocessions de biens. Il modifie à cette fin le 2° du II de l'article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime.

Il précise en conséquence au 1° du III du même article qu' un cahier des charges devra également être prévu en cas de substitution concernant des parts ou actions de société. Les engagements qu'il contient seront définis par décret en Conseil d'État, et constituent « la contrepartie de l'avantage fiscal » consistant en l'exonération de droits d'enregistrement pour les opérations immobilières réalisées par les SAFER et en l'absence de perception au profit du Trésor.

Il modifie en outre au 3° du même II la nature des sociétés dont les parts et actions peuvent faire l'objet d'acquisitions par les SAFER : pourront être acquises les parts ou actions des sociétés « détenant en propriété ou en jouissance des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole ou détenant des droits sur de telles sociétés », plutôt que les sociétés « ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole ».

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Lors de l'examen du texte en commission, un amendement du rapporteur a remplacé le terme « d'avantage fiscal » par le terme « d'exonération fiscale » .

L'article n'a pas été modifié lors de l'examen en séance publique.

IV. La position de la commission - Une mesure insuffisamment encadrée et disproportionnée par rapport aux objectifs poursuivis

L'extension de la possibilité, pour les SAFER, d'acquérir des titres de société dont l'objet principal n'est pas agricole représenterait une rupture réelle avec la logique qui préside aujourd'hui à leur intervention sur les marchés à titre de régulation .

En effet, l'article 2, dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale, permettrait aux SAFER d'acheter et de conserver pendant une période pouvant aller jusqu'à cinq ans des parts et actions de SCI ou de SAS détenant une surface même minime de foncier agricole . En effet, la simple détention de biens à usage « ou à vocation agricole », y compris donc de biens n'étant plus en exploitation , justifierait l'acquisition par la SAFER de titres d'une société.

Philosophiquement, cette mesure marquerait une extension significative de l'action des SAFER sur les marchés fonciers en général, et non seulement dans le secteur agricole . Le rapporteur imagine que, dans de rares cas, des situations ont pu émerger dans lesquels une telle participation se justifiait, mais il n'apparaît pas souhaitable de légiférer sur la base d'exceptions .

Une société n'ayant aucun intérêt particulier à la détention de foncier agricole, comme une société industrielle ou immobilière qui détiendrait incidemment une petite surface d'anciennes pâtures, pourrait ainsi voir la SAFER devenir temporairement actionnaire ou associée , si l'un des actionnaires ou associés décidait de lui céder ses parts.

L'élargissement proposé apparaît donc disproportionné au vu des objectifs et du ciblage affiché par la proposition de loi . L'intérêt de l'achat de titres sociaux par la SAFER réside en la capacité à prendre le contrôle de sociétés à objet agricole, afin d'installer de nouveaux associés ou de transférer le contrôle de ces sociétés à des repreneurs d'exploitation. L'achat de titres de SCI détenant une petite surface à vocation agricole, par exemple, ne remplit aucun de ces objectifs, en ce qu'il ne permettra pas l'installation d'agriculteurs.

Le rapporteur est donc défavorable à cette première mesure .

En ce qui concerne la possibilité de substitution , il est vrai que cette faculté est utile et efficace dans le cas de ventes directes de terres agricoles. Il permet à la SAFER d'installer un exploitant, ou de céder l'emprise à une exploitation existante en besoin de consolidation, sans grever son patrimoine ni allonger inutilement l'opération.

Toutefois, une telle substitution n'apparaît pas appropriée dans le cas des parts de société : il n'est pas souhaitable que les associés existants se voient imposer un nouvel associé choisi par la SAFER , sans qu'ils ne puissent participer à ce processus. Une cession en bloc d'un terrain n'est pas équivalente à l'entrée d'un nouvel associé dans une société déjà constituée. Pour le bon fonctionnement de l'exploitation, les associés doivent choisir volontairement de travailler ensemble . Cette mesure apparaît encore plus disproportionnée dans le cas des sociétés dont l'objet principal n'est pas agricole, qui entreraient, au titre de cet article 2, dans le champ d'intervention des SAFER.

D'ailleurs, il faut rappeler que le Conseil constitutionnel a fait droit, dans sa décision sur la loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles 6 ( * ) , aux arguments des parlementaires qui avaient mis en avant ce même motif : le fait que les associés préexistants se voient imposer la présence de l'attributaire choisi par la SAFER dans le cadre de la rétrocession. La loi prévoyait l'extension du droit de préemption des SAFER aux parts de sociétés : le Conseil a censuré cette disposition, la jugeant disproportionnée au regard du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre.

Pour l'ensemble de ces raisons, la commission a adopté un amendement COM-101 du rapporteur, visant à supprimer l'article 2 de la proposition de loi.

La commission a supprimé l'article.

Article 3

Extension du champ de l'obligation de notification aux SAFER concernant les prises de contrôle de sociétés d'exploitation ou de propriété agricole
- Renforcement de la transmission électronique des notifications

Cet article vise à étendre l'obligation de notification aux SAFER, en incluant dans son champ l'ensemble des opérations capitalistiques aboutissant à une prise de contrôle des sociétés à objet d'exploitation ou de propriété agricole. Il renforce aussi la transmission par voie électronique des notifications, en l'imposant sous un an, tant pour les notaires que pour les cédants ou cessionnaires de parts et actions de sociétés.

La commission a adopté sept amendements visant à approfondir la mise en oeuvre de la télédéclaration des opérations et à adapter les modalités de notification à tous les types de société. Elle a aussi autorisé, dans le cadre de leur rôle d'instructeur des opérations sociétaires, un accès encadré des SAFER à certaines informations relatives aux exploitations agricoles.

I. La situation actuelle - Une obligation de notification aux SAFER de toute opération de cession de terrains ou de parts et actions de sociétés pouvant être concernée par leur intervention

Afin que les SAFER puissent mobiliser leurs différents outils d'intervention, tels que la préemption ou l'acquisition de biens immobiliers, ou l'achat de parts et actions de sociétés, la loi a prévu qu'elles soient systématiquement notifiées des opérations de cession envisagées dans leur champ d'action géographique.

Au titre de l'article L. 141-1-1 du code rural et de la pêche maritime, sont inclus dans le champ de l'obligation de notification les biens mobiliers ou immobiliers sur lesquels les SAFER sont habilitées à intervenir. Pour rappel (se référer au commentaire de l'article 2) , ces biens recouvrent d'une part les biens ruraux, les terres, les exploitations agricoles ou forestières ; de l'autre les parts ou actions de sociétés ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole. Tant les cessions entre vifs conclues à titre onéreux ou gratuit que les cessions d'usufruit ou de nue-propriété sont concernées.

L'article L. 141-1-1 charge ainsi le notaire, ou, dans le cas des cessions de sociétés réalisées sans intervention des notaires, le cédant, de notifier la SAFER par le biais d'une transmission postale (recommandé avec avis de réception) ou électronique de diverses informations relatives à l'opération projetée. Au titre de l'article R. 141-2-1 du même code, la cession ne peut intervenir avant l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification à la SAFER.

En sus des éléments obligatoires prévus par l'article R. 141-2-1 du code rural et de la pêche maritime, la SAFER peut solliciter auprès du notaire ou du cédant des éléments d'information complémentaires , afin d'apprécier les conditions de transmission des parts ou actions.

LES INFORMATIONS CONTENUES DANS LA NOTIFICATION AUX SAFER

Au titre de l'article R. 141-2-1 du code rural et de la pêche maritime, sont obligatoirement transmises aux SAFER dans le cadre de l'obligation de notification des cessions les informations relatives à :

• la nature et la consistance du bien ou du droit mobilier ou immobilier cédé ;

• la désignation cadastrale des parcelles cédées ou de celles dont la société dont les parts sont cédées est propriétaire ou qu'elle exploite, leur localisation, le cas échéant la mention de leur classification dans un document d'urbanisme ou l'existence d'un mode de production biologique ;

• le prix ou la valeur et les conditions demandées ainsi que les modalités de l'aliénation projetée ;

• les noms, prénoms, dates de naissance, domiciles et professions des parties à l'acte de cession (sauf dans le cas des sociétés cotées) ;

• l'existence éventuelle d'un obstacle à la préemption par les SAFER, dans les cas limitatifs prévus par la loi ;

• en cas de cession de la totalité des parts ou actions de la société, les statuts à jour, le bilan et le compte de résultats des trois derniers exercices, l'avant contrat de cession, les contrats en cours, les conventions de garantie d'actif et de passif et tout engagement faisant peser sur la société dont les parts ou actions sont cédées une incidence financière ainsi que tout élément relatif à sa situation contentieuse ;

• en cas de démembrement du droit de propriété, la consistance et la valeur des droits démembrés, la durée de l'usufruit et son mode d'exploitation et les pouvoirs des titulaires des droits ;

• le cas échéant, les éléments nécessaires à l'identification des droits à paiement cédés (article R. 141-2-2).

Le ministère de l'agriculture a précisé au rapporteur qu'un projet de décret visant à compléter les informations obligatoires dans le cadre de la notification est en cours d'élaboration . Il est envisagé d'améliorer l'information sur les obligations réelles environnementales (ORE), sur les autorisations en matière de contrôle des structures, et sur les modes d'exploitation et de jouissance des biens cédés (notamment l'existence d'un bail rural).

Les informations prévues par le règlement sont communiquées aux SAFER par le biais de quatre formulaires standardisés , élaborés conjointement en 2015 par le conseil supérieur du notariat (CSN), la Fédération nationale des SAFER (FNSAFER) et le ministère de l'agriculture.

En 2015, une forme de dématérialisation a été mise en oeuvre pour la transmission d'informations entre les offices notariaux et les SAFER, par le biais d'une convention établie après conduite d'une expérimentation. Près de 5000 offices notariaux sur 6736 utilisent aujourd'hui ce service de dématérialisation, ayant conduit depuis ses débuts à la télétransmission de près de 624 000 notifications pour un taux de dématérialisation qui atteint désormais 63 % .

À l'inverse, les opérations réalisées sans l'intervention d'un notaire ne sont aujourd'hui pas obligatoirement notifiées de manière électronique .

Les informations reçues par les SAFER au titre de l'obligation de notification sont transmises par ces dernières à l'autorité administrative chargée du contrôle des structures, à fins de suivi des sociétés ayant obtenu une autorisation d'exploiter, et à fins d'analyse du marché foncier agricole et de l'usage de ces terres (article L. 141-1-2 du code rural et de la pêche maritime).

En cas de non-respect de l'obligation de notification de la SAFER avant cession d'un bien, l'article L. 141-1-1 prévoit des sanctions spécifiques. Lorsque le bien aurait pu faire l'objet d'une préemption par la SAFER, celle-ci peut demander sous six mois l'annulation de la cession ou la substitution de l'acquéreur par la SAFER (dans ce dernier cas, uniquement pour les ventes). Lorsque le bien n'était pas soumis à droit de préemption, le préfet de région peut, d'office ou à la demande de la SAFER, exiger sous un an le paiement d'une amende administrative de 1 500 euros au moins, plafonnée à 2 % du montant de la transaction.

En 2020, les SAFER ont reçu 325 000 notifications de cession de biens ruraux, terres et exploitations ; chiffre qui a connu une augmentation constante à compter de 2014 et de l'élargissement du champ des biens soumis à notification. Entre 2010 et 2014, il était en moyenne de 209 000 opérations. Une grande partie de cette augmentation est liée au marché des maisons de campagne, selon les chiffres fournis au rapporteur par le ministère de l'agriculture.

La notification des opérations de parts sociales n'a débuté qu'en 2016 , en application de la loi dite « LAAAF » n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Après une période de montée en puissance, le volume total d'opérations déclarées annuellement varie désormais entre 5 500 et 7 500 environ .

En termes de sociétés concernées, selon la même source, les notifications se répartissent comme suivent :

EARL

32 %

GAEC

30 %

SCEA

24 %

GFA, SCI

13 %

SA, SAS

2 %

Les transactions sociétaires se seraient toutefois significativement accrues en valeur , passant de 132 millions d'euros à 1 milliard d'euros environ entre 2014 et 2020, bien que le ministère indique lui-même que « cette évolution doit être nuancée dans la mesure où, antérieurement à l'obligation d'information concernant ces transactions, la majorité d'entre elles restaient invisibles » et que la montée en puissance de la notification obligatoire a été progressive.

La représentativité de ces chiffres est en effet débattue par les personnes auditionnées par le rapporteur . Interrogé par le rapporteur, le ministère de l'agriculture indique que « les notifications ont progressivement augmenté, témoignant de l'assimilation de l'obligation d'information de la SAFER » , mais que « l'exhaustivité n'est selon toute vraisemblance pas atteinte » en raison du caractère insuffisamment dissuasif des sanctions pour non-respect de l'obligation déclarative . À date, aucune sanction administrative n'a été prononcée pour défaut de notification, un seul dossier étant en cours d'instruction en vue de sanctions. Le ministère précise également que la part des SAS et SA est probablement sous-estimée en raison de l'existence de holdings ne détenant ni n'exploitant pas directement du foncier agricole, mais détenant d'autres sociétés dont c'est le cas.

II. Le dispositif envisagé - Un élargissement de l'obligation de notification des cessions relative aux parts et actions de sociétés, et un renforcement de la notification par voie électronique

L'article 3 de la proposition de loi initiale apporte plusieurs modifications au régime de notification préalable aux SAFER des cessions projetées.

Tout d'abord, il propose de faire peser sur le cessionnaire, alternativement au cédant qui en est responsable aujourd'hui, l'obligation de notification de cession de parts ou d'actions de sociétés , en modifiant en ce sens l'article L. 141-1-1 précité (a du 1° du I). La démarche devra donc être accomplie par l'un ou l'autre , les deux s'exposant sinon à une sanction.

Il étend ensuite l'obligation de notification à toute opération modifiant le capital d'une société d'exploitation ou de propriété agricole, soit à la hausse, soit à la baisse .

Seraient concernés par cette nouvelle rédaction les opérations :

• d'augmentation du capital : arrivée d'un nouvel associé par apport , qui modifie le nombre de parts et leur répartition et conduit à un changement de contrôle ; ou augmentation de capital sans que celle-ci ne se fasse à due concurrence des associés, modifiant la répartition des parts et le contrôle ;

• de réduction du capital : annulation d'une partie des parts sociales rachetées au bénéfice de la société en cas de retrait d'un associé sans cessions des parts et avec retrait de capital , lorsque cette annulation a pour effet de confier le contrôle de la société à l'un des associés qui ne l'avait pas auparavant.

Cette obligation de notification, pour les sociétés, portera sur le gérant . La rédaction proposée précise dans ce cas la SAFER à laquelle sera transmise la notification : celle dont ressort le siège social de la société, ou, dans le cas de sociétés étrangères, celle dont ressort le siège d'exploitation ou dont ressort la plus grande partie de la surface foncière détenue ou exploitée (b du 1° du I).

Enfin, l'article prévoit la transmission électronique de l'ensemble des notifications aux SAFER (2°) :

• lorsqu'un notaire est chargé de la notification, il la transmettra sous forme électronique (conformément aux conditions fixées par le code civil garantissant son authenticité). Les modalités précises de transmission seront fixées par convention entre le Conseil supérieur du notariat (CSN) et la fédération nationale des SAFER ;

• lorsque le cédant ou le cessionnaire des parts ou actions d'une société est chargé de la notification, il réalisera une télédéclaration sur le site internet de la SAFER concernée.

Il est prévu que ces obligations de transmission électronique entrent en vigueur à une date fixée par décret , ne pouvant dépasser un an après la publication de la loi (II).

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Lors de l'examen du texte en commission, les députés ont adopté un amendement du rapporteur visant à modifier la disposition étendant l'obligation de notification aux évolutions du capital des sociétés. Plutôt que les augmentations ou réduction de capital seront visées les opérations modifiant la répartition du capital de la société ou celle des droits de vote, lorsqu'elles aboutissent à en transférer le contrôle. Une simple augmentation de capital à due proportion des actionnaires ne sera donc pas concernée, seules les opérations constituant une prise de contrôle étant ciblées.

D'autre part, à l'initiative du rapporteur, le décret devant prévoir la date d'entrée en vigueur de l'obligation de transmission électronique a été transformé en décret en Conseil d'État.

L'article n'a pas été modifié lors de l'examen en séance publique.

IV. La position de la commission - Préciser les modalités de notification électronique et assurer un accès encadré des SAFER à certaines données nécessaires à l'instruction

Comme son rapporteur, la commission souscrit aux améliorations apportées par l'article 3 de la proposition de loi à la procédure de notifications aux SAFER.

L'obligation de notifier tous types de prises de contrôle de société, et non seulement celles résultant de cessions, est une avancée qui permettra une mise en oeuvre plus efficace du dispositif de contrôle proposé à l'article 1 er . Elle facilitera la détection des opérations indirectes de concentration excessive.

Le rapporteur note toutefois que l'extension de l'obligation déclarative est plus large que ne le nécessite la création du dispositif de contrôle opérée à l'article 1 er. En effet, l'article 1 er ne vise que les cessions de titres sociaux, tandis que l'opération de notification vise toute modification de la répartition du capital.

De même, l'obligation de télédéclaration est une avancée et une simplification notable . La mise en oeuvre d'une plateforme unique sous l'égide des SAFER sera gage de clarté et de simplicité pour les demandeurs. Elle permettra aussi d'assurer un traitement des notifications dans les meilleurs délais et d'avancer vers un meilleur taux de dématérialisation des demandes, en particulier pour les opérations réalisées sans le concours des notaires.

Un point d'attention soulevé par le rapporteur est celui du délai de mise en oeuvre d`un an, qui apparaît relativement court au regard des échéances prévues de promulgation de la loi, puis de prise des mesures d'application réglementaires.

Soutenant l'adoption de l'article 3, la commission a néanmoins adopté sept amendements visant trois objectifs principaux :

• Adapter les modalités de déclaration à l'ensemble des formes juridiques de société . La rédaction transmise par l'Assemblée prévoyait la notification par le gérant de la société, mais cette mesure est trop restrictive en ce que l'ensemble des sociétés ne dispose pas d'un gérant (cela concerne principalement les sociétés à responsabilité limitée). La commission a donc adopté quatre amendements identiques COM-2 , COM-22 , COM-51 et COM-102 , respectivement présentés par MM. Laurent, Menonville, Gremillet et par le rapporteur, visant à compléter la rédaction en y ajoutant la possibilité que la notification soit opérée par les représentants légaux des sociétés (ce qui inclut notamment les présidents de SAS) ou par leurs délégataires ;

• Généraliser le recours à la télédéclaration auprès des SAFER . Les amendements COM-3 et COM-23 , de MM. Laurent et Menonville, précisent que les notaires utiliseront également la plateforme de télédéclaration mise en oeuvre par les SAFER , lorsqu'ils seront chargés de déclarer des transactions de titres sociaux. Cette mesure permet d'harmoniser les modalités de collecte des notifications et poursuit les efforts de simplification amorcés par le présent article 3.

• Assurer un accès encadré des SAFER à certaines données nécessaires à l'instruction . Sur proposition de M. Gremillet, la commission a adopté un amendement COM-68 visant à permettre aux SAFER de consulter les données du casier viticole informatisé et du registre parcellaire de la politique agricole commune aux fins de la mission d'instruction qui leur est confiée par l'article 1 er de la proposition de loi. Ces données concernent notamment la taille des exploitations et leur nature, ainsi que des informations concernant les acquéreurs et les cédants : elles peuvent être utiles à l'examen de l'opportunité d'autoriser ou non une transaction sociétaire. Sur proposition de son rapporteur, la commission a privilégié un accès encadré à un nombre de bases de données limitées, aux strictes fins de l'instruction, et soumis à l'accord des exploitants ; à un accès général et illimité à un nombre très important de données administratives, professionnelles et personnelles , comme le proposaient certains amendements. Le rapporteur a notamment souligné le caractère sensible de certaines des informations figurant dans les bases de données dont l'accès est sollicité par les SAFER, notamment celles relatives à la sécurité sociale et à la retraite des exploitants (par ailleurs éloignées de l'objet de l'instruction). À défaut d'étanchéité satisfaisante, ces informations pourraient, en théorie, être abusivement utilisées dans le cadre des missions commerciales de la SAFER. Certaines organisations professionnelles auditionnées par le rapporteur, dans la filière viticole notamment, s'inquiètent de ces demandes qui apparaissent très larges. La commission a donc privilégié une solution cadrée et prudente .

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

Article 5 (supprimé)

Possibilité de refuser une autorisation d'exploiter
en cas d'absence de candidat alternatif

Cet article vise à permettre au préfet de région de refuser d'octroyer une autorisation d'exploiter en raison d'un agrandissement excessif, y compris dans les cas où aucun autre candidat ne s'est présenté pour reprendre l'exploitation.

La commission a supprimé l'article, qui introduit une mesure disproportionnée au vu de l'objectif proposé et pourrait compromettre le maintien de l'activité agricole dans les territoires en déprise.

I. La situation actuelle - L'autorisation d'exploiter, un outil de contrôle de la pertinence de l'exploitation au regard des objectifs de politique publique

Le contrôle des structures des exploitations agricoles est aujourd'hui l'un des piliers de la politique d'installation et de transmission agricole, régie par le code rural et de la pêche maritime .

Au titre de l'article L. 331-1 du code précité, cette procédure de contrôle, pilotée par l'État, vise plusieurs objectifs d'intérêt général :

• l'objectif défini comme principal est l'installation d'agriculteurs dans des exploitations (y compris ceux engagés dans une démarche d'installation progressive) ;

• la consolidation et le maintien des exploitations existantes , dans un objectif de viabilité économique des exploitations au regard des critères déterminés par le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) ;

• la promotion d'un système de production combinant performance économique et performance environnementale, incluant l'agriculture biologique ;

• le maintien d'une agriculture diversifiée, riche en emplois et génératrice de valeur ajoutée. Il est précisé que ce dernier objectif passe notamment par la lutte contre les agrandissements et concentrations excessifs d'exploitations au bénéfice d'une même personne , là aussi, selon les critères fixés par le SDREA.

Afin d'atteindre ces objectifs, l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime soumet à autorisation d'exploiter préalable les installations, agrandissements ou réunions d'exploitations agricoles . Pour l'application de ce dispositif, une exploitation est définie comme l'ensemble des unités de production mises en valeur, directement ou indirectement, par le même exploitant, c'est-à-dire la même personne participant aux travaux agricoles de façon effective et permanente.

Sont concernés par l'autorisation d'exploiter :

• les installations, agrandissements ou réunions d'exploitations dont la superficie totale est supérieure à un seuil fixé par le SDREA (sauf transformation d'une exploitation individuelle en société ou société créée par apport d'exploitations individuelles d'exploitants mariés ou pacsés) ;

• les installations, agrandissements, ou réunions d'exploitations qui suppriment une exploitation dont la superficie est supérieure à ce même seuil, ramènent la superficie d'une exploitation en-deçà de ce seuil, ou privent une exploitation agricole d'un bâtiment essentiel ;

• les opérations proposées par des exploitants ne remplissant pas des conditions de capacité professionnelle, les opérations sans exploitants, ou les opérations dont les exploitants sont pluriactifs à haut revenu ;

• les agrandissements et réunions d'exploitations distantes (c'est-à-dire plus éloignées qu'un seuil fixé par le SDREA) ;

• les productions hors sol, au-dessus d'un seuil fixé par le SDREA.

Le contrôle des structures par le biais de l'autorisation d'exploiter s'applique tant aux personnes physiques qu'aux personnes morales, dès lors que celles-ci sont exploitantes . Une société d'exploitation agricole y sera donc soumise, lorsqu'elle s'installe ou qu'elle incorpore un nouvel associé exploitant qui y acquiert des parts. En revanche, une société de propriété agricole qui se contente de mettre à bail à un agriculteur les terres qu'elle détient, ou qui incorpore un nouvel associé non exploitant, ne devra pas solliciter d'autorisation d'exploiter.

L'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime prévoit une série d'exemptions du contrôle des structures .

La transmission d'une exploitation au sein d'une même famille, jusqu'au troisième degré inclus, n'est pas soumise à autorisation mais à simple déclaration préalable, sous certaines conditions fixées par l'article L. 331-2 (capacité professionnelle du preneur, pas de bail en cours, exploitation familiale depuis neuf ans au moins, consolidation de l'exploitation ou installation d'un nouvel agriculteur).

De même, la rétrocession par une SAFER de terres agricoles au profit d'un exploitant agricole est dispensée d'autorisation d'exploiter, dès lors que le commissaire du Gouvernement a donné un avis favorable à la rétrocession et ne s'est pas opposé au candidat envisagé (article L. 331-2).

Lorsqu'une opération est soumise au contrôle des structures, l'exploitant est tenu de solliciter l'autorisation d'exploiter auprès du préfet de région qui rend cette demande publique afin d'assurer l'information d'éventuels tiers intéressés. Le préfet se prononce par décision motivée : l 'autorisation d'exploiter ne peut être refusée par le préfet que dans certains cas limitativement énumérés par l'article L. 331-3-1 :

1) lorsqu'un autre candidat à l'exploitation bénéficie d'une priorité au regard du SDREA ;

2) lorsque l'opération envisagée compromet la viabilité de l'exploitation ;

3) en cas de réduction du nombre d'employés sur les exploitations concernées, lorsque les terres sont mises à disposition d'une société ;

4) dans les départements d'outre-mer, en cas d'incompatibilité avec le SDREA en matière de viabilité économique et de capacité professionnelle, et ce même à défaut d'autres concurrents ;

5) en cas d'agrandissement ou de concentration excessifs au bénéfice d'une même personne. Les critères à l'aune desquels est estimé le caractère « excessif » de l'opération peuvent inclure, entre autres, le contexte local, la taille moyenne des exploitations alentour, les types de production prévus, l'emploi sur l'exploitation... Ils ne sont pas identiques aux critères utilisés pour déterminer la dimension économique viable ou l'intérêt économique et environnemental de l'opération. Ce motif de refus ne peut toutefois être opposé que s'il existe d'autres candidats déclarés pour la même exploitation .

Le code rural et de la pêche maritime prévoit enfin un régime de sanctions en cas d'exploitation irrégulière, c'est-à-dire en l'absence d'autorisation d'exploiter pourtant requise. Si l'exploitant bénéficie d'un bail, celui-ci peut être annulé devant le tribunal paritaire des baux ruraux (article L. 331-6). Dans les autres cas, le contrevenant peut être soumis à sanction pécuniaire comprise entre 304,90 et 914,70 euros par hectare de l'exploitation illégale (L. 333-7). Si l'illégalité persiste au-delà d'un an, tout tiers peut en outre demander au tribunal de se substituer à l'exploitant (L. 333-10). Enfin, l'exploitation ne peut bénéficier d'aucune aide publique agricole (L. 333-9).

Entre 20 000 et 25 000 demandes d'autorisation d'exploiter seraient instruites chaque année par les préfets de région, selon les chiffres fournis par le ministère de l'agriculture au rapporteur. 7 à 8 % des demandes seraient rejetées sur la base de l'un des motifs de refus cités plus haut.

II. Le dispositif envisagé - Permettre le refus d'autorisation pour concentration excessive, même à défaut d'autre candidat

L'article initial de la proposition de loi propose de compléter l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime, relatif aux motifs de refus de l'autorisation d'exploiter.

Il facilite le recours au motif de refus fondé sur un agrandissement ou une concentration excessifs de l'exploitation, en étendant la possibilité de refus au cas où aucun candidat alternatif ne s'est déclaré pour l'exploitation.

La rédaction proposée précise toutefois que le préfet ne pourra refuser l'octroi d'une autorisation que si l'agrandissement ou concentration excessifs est par ailleurs contraire aux objectifs du contrôle des structures ou au SDREA.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Tirant les conséquences de l'avis du Conseil d'État sur la proposition de loi, les députés ont adopté, lors de l'examen du texte en commission, un amendement du rapporteur qui précise les cas dans lesquels le préfet pourra refuser d'octroyer l'autorisation.

L'amendement souligne ainsi que pourront être refusées les opérations contraires, « notamment », à l'objectif de soutien à l'installation d'agriculteurs.

IV. La position de la commission - Une mesure disproportionnée, qui pourrait compromettre l'activité agricole dans certains territoires

Le rapporteur souligne tout d'abord que l'article 5 aborde un sujet distinct de celui traité par le reste de la proposition de loi (le contrôle des cessions de parts et actions de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole). Il concerne en effet le contrôle des structures, qui est bien plus large puisqu'il vise l'ensemble des exploitants agricoles, quelle que soit la forme juridique de l'exploitation.

Il est en outre étonnant de voir figurer, dans ce texte, une mesure « paramétrique », relativement anecdotique, portant sur le contrôle des structures, alors que de nombreux acteurs appellent à une modernisation globale de la procédure dans le cadre d'une grande loi foncière . En 2017, le Gouvernement lui-même avait proposé, dans le cadre du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, une expérimentation visant à alléger voire supprimer le contrôle des structures dans certaines régions. L'ensemble des acteurs du monde agricole avait alors défendu une amélioration plutôt qu'une suppression de la procédure, appelant à une réflexion systémique. À l'évidence, cet appel à une réflexion globale n'a pas été entendu par le Gouvernement .

À l'examen de fond de l'article 5, le rapporteur a atteint la conviction, comme sur d'autres points du texte, que la mesure proposée est disproportionnée au vu de l'objectif visé .

Bien entendu, mobiliser l'ensemble des outils de régulation disponibles pour mieux lutter contre l'accaparement des terres et la concentration excessive est une excellente intention. Toutefois, il faut rappeler que le contrôle des structures permet aujourd'hui déjà au préfet de région de s'opposer à la constitution d'exploitations de taille excessive , au regard du contexte local et du projet soumis. C'est donc là une composante à part entière de l'autorisation d'exploiter.

À quelle carence l'article 5 de la proposition de loi vise-t-il donc à remédier ? Selon l'exposé des motifs et les personnes auditionnées par le rapporteur, l'article viserait un nombre très réduit de situations dans lesquelles seul un exploitant déjà actif sur des surfaces disproportionnées serait candidat à la reprise d'une exploitation. Il est proposé que le préfet puisse alors refuser cette autorisation, même sans autre projet concurrent.

Le rapporteur rappelle que le contrôle des structures respecte une procédure stricte, qui assure l'information du public sur le projet proposé et une forme de mise en concurrence . Tout autre exploitant, qui proposerait une exploitation de taille considérée plus raisonnable, est tout à fait en mesure de se porter lui aussi candidat avant que le préfet ne prenne sa décision.

La mesure proposée traduit une inversion de logique qui semble dangereuse : alors que le droit répond aujourd'hui à un principe constructif d'autorisation, sauf meilleur projet ; il est proposé de renverser ce principe pour permettre une interdiction, même sans meilleur projet .

La régulation du foncier et des exploitations agricoles doit servir, avant tout, un objectif de soutien à l'activité agricole . Cet objectif passe certes par la lutte contre la concentration et l'aide à l'installation des agriculteurs ; mais aussi par la préservation de l'usage agricole des terres.

En ce sens, il n'est pas souhaitable de préférer l'abandon d'une terre agricole à défaut de repreneur à sa reprise par une exploitation existante, même déjà de taille conséquente . Or, c'est précisément ce que prévoit l'article 5 de la proposition de loi. Un agriculteur souhaitant partir à la retraite, par exemple, qui aurait trouvé un acquéreur pour ses terres, pourrait voir l'opération être refusée par le préfet, et comme aucun autre candidat ne se serait présenté, être contraint de poursuivre encore son exploitation. Pis, la mesure pourrait entraîner la fin de certaines exploitations et accélérer la déprise agricole, en réduisant l'ancrage de l'activité agricole en France.

Il ne faut pas oublier que, dans certains territoires français, le nombre de départs à la retraite d'exploitants excède le nombre de repreneurs intéressés : les exploitations ne sont pas toujours attractives . Le rapporteur rappelle, incidemment, qu'on ne saurait blâmer la seule concentration pour ce constat : le défaut d'attractivité des exploitations françaises tient aussi au problème de la rémunération insuffisante des producteurs. Faire échec à des opérations de reprise d'exploitations mutuellement bénéfiques, sans apporter de solution constructive, n'est pas satisfaisant .

Pour l'ensemble de ces raisons, sur proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-104 , visant à supprimer l'article 5, qui propose une mesure disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi.

La commission a supprimé l'article.

Article 5 bis

Rapport relatif aux dynamiques foncières en Corse et en outre-mer -
Évaluation du dispositif de contrôle des transactions sociétaires

Cet article demande la remise d'un rapport au Gouvernement relatif à l'accaparement des terres et à la concentration excessive des exploitations dans les collectivités de Corse et d'outre-mer.

La commission a adopté, sur proposition de son rapporteur, un amendement prévoyant une évaluation à trois ans de la procédure de contrôle des transactions de titres sociaux créée par l'article 1 er . Cette évaluation permettra d'organiser une remontée structurée d'informations et le cas échéant, d'apporter des améliorations à la procédure de contrôle. Elle constituera une clause de revoyure pour amorcer une réflexion sur la pertinence des outils de régulation du foncier agricole.

I. Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale - Une demande d'information sur les dynamiques du marché foncier agricole en Corse et dans les collectivités d'outre-mer

Adopté lors de l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale , le présent article est issu d'un amendement du député Paul-André Colombani, précisé par un sous-amendement du rapporteur Jean-Bernard Sempastous.

Il prévoit la remise au Parlement, sous un an, d'un rapport du Gouvernement évaluant l'ampleur du phénomène d'accaparement excessif du foncier agricole et de la concentration des exploitations agricoles en Corse et dans les territoires d'outre-mer . Le rapport devra faire spécifiquement mention de la méthode retenue pour opérer cette évaluation.

Dans l'exposé des motifs, les auteurs de l'amendement justifient cette demande par les spécificités des territoires insulaires français , notant que « l'accaparement et la concentration excessive de terres se [rencontrent] dans ces territoires, mais ils ne semblent pas emprunter le chemin sociétaire » . La demande d'évaluation traduite au présent article vise pour eux à « adopter un outil spécifique répondant aux mêmes préoccupations » que celui instauré à l'article 1 er de la proposition de loi, dans un objectif de renouvellement des générations agricoles.

II. La position de la commission - Assurer l'évaluation du dispositif et, le cas échéant, son amélioration dans un délai de cinq ans

A. Une connaissance lacunaire des dynamiques foncières agricoles dans les territoires d'outre-mer et une applicabilité limitée de la présente proposition de loi

Tout d'abord, le rapporteur a sollicité le Gouvernement afin d'étudier si des travaux relatifs aux dynamiques foncières agricoles ultramarines ou corses sont actuellement menés par l'administration.

En réponse, le ministère de l'agriculture a rappelé l'existence d'un suivi par recensement des terres incultes ou sous-exploitées par les communes et les SAFER en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à la Réunion (articles L. 181-4 à L. 181-14 du code rural et de la pêche maritime). Le préfet peut ensuite contraindre les exploitants à les remettre en état ou à renoncer à l'exploitation. Le ministère a également fait mention du rôle accru de la commission départementale de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) au sein de ces collectivités. Le rapporteur note toutefois qu'il s'agit là de sujets distincts de celui de l'accaparement, qui relèvent de l'insuffisance de la mise en valeur dans le cadre de l'exploitation ou des conflits d'usage pour les terres agricoles .

Interrogé par le rapporteur sur les spécificités du paysage foncier en Corse et en outre-mer, le ministère de l'agriculture a indiqué que « ces territoires sont marqués par le morcellement foncier et une forte prégnance de l'indivision » , sur l'ensemble du marché foncier. Il précise toutefois que des concentrations excessives peuvent tout de même intervenir par le biais d'un découplage entre détention et exploitation du foncier agricole, par exemple via des groupements fonciers agricoles (GFA) et des sociétés civiles d'exploitation agricoles (SCEA) détenues par les mêmes propriétaires. Contrairement aux éléments avancés par les auteurs du présent article, le ministère indique donc que le « le développement du fait sociétaire est donc réel dans ce cadre, notamment à la Martinique » .

En sus de ces spécificités ayant trait à la détention des terres, la surface agricole utile (SAU) des territoires ultramarins est bien inférieure à celle du territoire métropolitain (30 % contre 50 % environ), d'après les chiffres cités dans un récent rapport de la délégation sénatoriale aux outre-mer 7 ( * ) . Ces chiffres traduisent la rareté du foncier agricole, une prévalence d'espaces boisés et naturels, ainsi que de landes ou sols enfrichés. L'avenir des terres agricoles au sein des territoires d'outre-mer est donc un enjeu de taille.

Guadeloupe

Martinique

La Réunion

Hexagone

Sols cultivés

18 %

16 %

18 %

36 %

Surface toujours en herbe

13 %

13 %

4 %

15 %

SAU TOTALE

31 %

29 %

22 %

51 %

Landes, friches

8 %

12 %

20 %

5 %

Sols artificialisés

11 %

17 %

10 %

9 %

Sols naturels

6 %

7 %

6 %

4 %

Sols boisés

44 %

35 %

42 %

31 %

Source : Agreste GraphAgri 2015, MAAF, 2016

Au vu de ces enjeux, la commission a souhaité maintenir la demande de rapport relative à la concentration et à l'accaparement excessif dans les collectivités de Corse et ultramarines. Il apparaît nécessaire d'affiner la grille de lecture, afin d'adapter le cas échéant le dispositif instauré par l'article 1 er de la proposition de loi aux spécificités constatées .

Le rapporteur note à ce titre que le dispositif de contrôle des cessions de titres sociaux, central à cette proposition de loi, s'applique en l'état de la rédaction à la Corse, à la Réunion, à la Guadeloupe, à la Martinique, à la Guyane, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte . Il ne s'applique en revanche pas à Saint Barthélémy, à la Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

Ce champ d'application semble imparfait, car certains de ces territoires ne disposent pas des acteurs ou des outils juridiques nécessaires à la bonne mise du dispositif de contrôle . Aucune SAFER n'est ainsi implantée à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon ou en Guyane : il sera impossible de leur confier l'instruction des dossiers ou la réception des notifications. En Guyane et à Mayotte, il n'existe pas non plus de schéma directeur régional de l'exploitation agricole (SDREA), qui fixe les différents seuils de contrôle applicable.

Il apparaît donc au rapporteur nécessaire de modifier le champ d'application de la proposition de loi au stade de la séance publique, pour en exclure notamment la Guyane, Mayotte et Saint-Pierre et Miquelon. À moyen terme, il conviendra de réfléchir, le cas échéant, à mettre en place un dispositif alternatif dans ces territoires.

B. Un principe à affirmer : l'évaluation à trois ans du dispositif de contrôle des cessions de titres sociaux

De manière générale, le rapporteur a souhaité affirmer un principe d'évaluation de la procédure introduite par la présente proposition de loi .

Sans nier l'important travail de consultation qui a présidé à la rédaction de la présente proposition de loi, et saluant d'ailleurs que celui-ci ait été soumis au Conseil d'État, le rapporteur note toutefois qu'il est regrettable qu'il n'ait pas fait l'objet d'étude d'impact .

Les auditions menées ont mis en évidence les carences informationnelles relatives au phénomène sociétaire sur les marchés agricoles : l'INRAE a ainsi relevé qu'il existait pour l'instant très peu d'études précises et chiffrées à ce sujet, et peu de comparaisons internationales. À ce titre, il apparaît donc nécessaire d'organiser une remontée structurée, analytique et consolidée des informations d'intérêt public collectées dans le cadre du contrôle instruit par les SAFER, jusqu'à l'administration centrale et jusqu'aux parlementaires. Cela servira l'objectif d'amélioration des politiques publiques relatives au marché du foncier agricole.

Pour cette même raison - le défaut d'information fiable - les nombreux paramètres qui encadrent ce dispositif devront faire l'objet d'un retour d'expérience, et peut-être, si nécessaire, être affinés ou ajustés afin de garantir le ciblage le plus adapté et la plus grande efficacité du contrôle. L'évaluation devra donc porter sur le niveau des seuils surfaciques fixés par les préfets, les exemptions instaurées, la nature et l'exécution des mesures compensatoires...

Enfin, il est utile de disposer de retours sur la mise en oeuvre concrète de la procédure décrite à l'article 1 er . Il faudra évaluer si les délais prévus par décret sont tenus ou engendrent des accords tacites ; si les moyens des SAFER et de l'administration sont suffisants ; ou encore si la procédure d'instruction et ses différentes étapes sont adaptées.

La question des moyens est particulièrement centrale : les capacités insuffisantes de l'administration déconcentrée sont évoquées comme le principal argument justifiant de confier aux SAFER l'instruction des demandes d'autorisation. Si les résultats de l'évaluation s'avéraient insuffisants, un report de l'instruction vers l'administration centrale (le préfet de département, ses équipes déconcentrées et la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA)) pourrait être envisagé.

Une évaluation du dispositif à une échéance de trois ans est donc indispensable . Elle permettra, au vu de ce retour d'expérience, de faire évoluer la loi si nécessaire, pour améliorer le fonctionnement de la procédure de contrôle qu'il est proposé de créer.

La commission a donc adopté, sur proposition du rapporteur, l'amendement COM-105 visant à intégrer cette évaluation à l'article 5 bis de la proposition de loi . Elle comprendra des éléments relatifs :

• à la pertinence des seuils effectivement fiés par les préfets ;

• au nombre et aux caractéristiques des opérations sociétaires notifiées et instruites ;

• aux décisions rendues (accord, rejet, mesures compensatoires) et leur mise en oeuvre effective ;

• aux délais et coûts moyens pour les demandeurs et les instructeurs ;

• aux moyens mobilisés par l'État et les SAFER ;

• aux contentieux dirigés contre la procédure et les décisions ;

• à l'impact général de la procédure de contrôle sur le marché du foncier agricole en France ;

• aux pistes d'évolution ou d'amélioration du dispositif.

Cette clause de revoyure offrira en outre l'opportunité d'élargir le débat à l'ensemble des mécanismes de régulation de l'accès au foncier agricole, pour lesquels une réforme est promise de longue date mais à peine amorcée dans le présent texte.

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

Article 7 (nouveau)

Entrée en vigueur des dispositions de la proposition de loi

La commission a adopté un amendement portant article additionnel prévoyant une entrée en vigueur séquencée des dispositions de la proposition de loi.

La présente proposition de loi prévoit, en ses articles 1 er et 3 notamment, une série de nouvelles obligations dans un objectif de meilleur contrôle des transactions de titres des sociétés agricoles. Sont ainsi prévues :

• la soumission à autorisation des opérations, qui nécessite à la fois de définir la date à compter de laquelle une autorisation est requise, mais aussi la date de réalisation des opérations prises en compte ;

• la fixation d'un seuil d'agrandissement significatif par le préfet de région, sur le fondement des dispositions du schéma directeur régional de l'exploitation agricole (SDREA), qui constitue l'un des facteurs de déclenchement du contrôle ;

• l'extension des obligations déclaratives des acteurs, par le biais de la notification à la SAFER des opérations envisagées ;

• la mise en oeuvre étendue de la télédéclaration de ces notifications aux SAFER, par le biais d'une plateforme unique.

Les délais d'entrée en vigueur de ces différentes obligations ne sont, en l'état de la rédaction, pas précisés, à l'exclusion d'une mention à l'article 3. Cela semble impliquer qu'elles entrent toutes en vigueur, par défaut, dès la promulgation de la loi, et le cas échant à la publication des mesures réglementaires d'application nécessaires.

Or, il apparaît nécessaire de prévoir un séquençage de l'entrée en vigueur de ces obligations. L'obligation de notification d'une opération doit entrer en vigueur avant l'obligation de disposer d'une autorisation de celle-ci. L'obligation de télédéclaration doit se faire dans des délais réalistes pour les SAFER et les notaires. Enfin, les délais de fixation du seuil d'agrandissement significatif doivent être encadrés pour ne pas faire obstacle au déploiement rapide du dispositif.

Sur proposition du rapporteur, la commission a donc adopté un amendement COM-103 portant article additionnel, qui propose de réunir dans un nouvel article l'ensemble des mesures relatives à l'entrée en vigueur des articles de la proposition de loi . Il renvoie ainsi au décret le soin de fixer les délais d'entrée en vigueur des différentes obligations susmentionnées, prévues à l'article 1 er et à l'article 3.

Il précise notamment que le seuil d'agrandissement significatif devra intervenir avant une date prévue par décret, et avant l'entrée en vigueur générale du dispositif . Cette mesure répond à un sujet soulevé par plusieurs amendements lors de l'examen en commission : celui des mesures transitoires. Plutôt qu'un seuil « par défaut » en l'attente de la décision des préfets, le rapporteur privilégie une date d'entrée en vigueur unifiée sur l'ensemble du territoire français, avec une « date butoir » pour que les préfets fixent les seuils régionaux . En effet, un seuil transitoire « par défaut » entraînerait une forte instabilité juridique qui n'est pas souhaitable : la même opération, à quelques mois d'écart, pourrait être successivement non soumise à autorisation, puis soumise à autorisation, puis à nouveau non soumise . Il faut préserver une relative égalité de traitement et éviter les effets d'aubaine.

La commission a adopté cet article ainsi rédigé.

(N.B. : Pour des raisons légistiques, cet article additionnel initialement placé après l'article 3 a été déplacé après l'article 6 et est devenu article 7)

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 20 octobre 2021, la commission a examiné le rapport de M. Olivier Rietmann sur la proposition de loi n° 641 (2020-2021) portant mesures d'urgence pour assurer la régulation de l'accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires.

Mme Sophie Primas , présidente. - Nous accueillons ce matin notre nouveau collègue, Jean-Pierre Bansard, sénateur représentant les Français établis hors de France, en remplacement de M. Thierry Meignen, qui a rejoint la commission des finances. Je veux lui souhaiter en votre nom la bienvenue parmi nous, dans cette commission qu'il connaît déjà pour y avoir siégé par le passé. Je salue aussi Daniel Laurent, que nous sommes heureux de retrouver.

Nous allons examiner ce matin le rapport de M. Olivier Rietmann sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures d'urgence pour assurer la régulation de l'accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires, plus connue sous le nom de « PPL Sempastous », dont l'examen en séance publique est prévu le mercredi 3 novembre de 16 h 30 à 20 h 30 dans l'ordre du jour réservé au groupe RDPI - j'espère que nous pourrons achever l'examen dans ces délais serrés, sans quoi elle serait repoussée au-delà du quinquennat.

M. Olivier Rietmann , rapporteur. - Le sujet de la régulation de l'accès au foncier agricole, notamment de l'acquisition de terres agricoles par des sociétés, revient régulièrement sur nos bureaux de parlementaires. En 2017, le Sénat avait étudié le texte du député Dominique Potier, qui visait à lutter contre l'accaparement des terres agricoles et avait été rapporté par notre collègue Daniel Gremillet. Ce texte avait toutefois subi une censure du Conseil constitutionnel pour ce qui concerne son principal dispositif. Depuis lors, des missions parlementaires se sont régulièrement penchées sur cette thématique.

La proposition de loi du député Jean-Bernard Sempastous, déposée en février dernier, nous arrive en cette fin de quinquennat. Je ne doute pas que ce calendrier ait à voir avec la promesse du Président de la République d'engager une « grande loi foncière », toujours pas tenue à quelques mois de l'élection présidentielle...

À défaut d'une grande loi foncière, cette proposition de loi choisit un champ circonscrit : celui des sociétés qui détiennent ou exploitent du foncier agricole, et de leur régulation, alors qu'elles passent aujourd'hui à travers les mailles de la plupart des outils de contrôle. C'est bien peu par rapport à l'ambition initiale, mais je ne nie pas l'importance du sujet.

Nous anticipons, dans les prochaines années, le départ en retraite de près d'un tiers des agriculteurs français. Le renouvellement des générations est un enjeu central, dès demain. Pourtant, la principale ressource agricole, le sol, est très convoitée, et la situation ne va pas s'améliorer avec, entre autres, le « zéro artificialisation nette » et le changement climatique.

Ce texte part du constat suivant : alors que l'acquisition directe de terres agricoles par des exploitants ou des sociétés est très encadrée, et soumise au droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), les cessions de parts ou d'actions de sociétés agricoles ne sont, elles, pas soumises au même degré de régulation. En d'autres termes, loger son foncier agricole dans une société avant cession, c'est en quelque sorte « faire écran » aux modes de régulation actuels : or, le nombre de sociétés agricoles s'accroît d'année en année.

L'autre constat a trait à la dynamique de concentration des exploitations agricoles françaises, dont la taille moyenne a augmenté au cours des dernières décennies, et dont le nombre se réduit.

Je tiens à le dire ici clairement : économiquement, la concentration n'est pas toujours une mauvaise chose, ni le recours à des formes sociétaires. Il faut permettre à nos agriculteurs de s'associer, d'agrandir les plus petites exploitations pour atteindre une taille critique qui soit viable économiquement - c'est l'enjeu de la consolidation. C'est un facteur de compétitivité pour l'agriculture française, d'autres pays l'ont bien compris...

Ce qui n'est pas souhaitable, en revanche, c'est la constitution d'exploitations de taille énorme, disproportionnée ou la constitution d'empires fonciers sous l'égide de sociétés qui n'ont parfois plus grand-chose à voir avec l'exploitation agricole. C'est dans ce cas que l'on parle d'accaparement des terres, accaparement qui entretient une forme de spéculation foncière, déforme les prix du marché et empêche l'installation de jeunes.

Ce sujet n'est pas nouveau. En 2017, l'achat de milliers d'hectares de terres agricoles par un consortium chinois dans l'Indre et l'Allier avait fait les gros titres - les acquisitions étrangères ne représentent toutefois qu'une part infime des 7 500 transactions sociétaires dont on parle ici. La loi visant à lutter contre l'accaparement des terres agricoles avait donc tenté une première piste de régulation, en donnant aux Safer un pouvoir de préemption sur les cessions partielles de parts de société, tentative que le Conseil constitutionnel avait censurée.

J'ai tenu compte de cet historique législatif dans mes travaux, car il montre bien que l'équilibre entre libertés constitutionnelles et régulation du marché foncier n'est pas toujours facile à trouver. D'autant que notre pays figure déjà parmi les plus régulés d'Europe en matière de transactions foncières agricoles, grâce notamment à l'action des Safer.

Le texte du député Jean-Bernard Sempastous a été soumis au Conseil d'État, chose assez rare pour une proposition de loi. Elle a été, en conséquence, largement réécrite par M. Sempastous lui-même, en tant que rapporteur, lors de son examen à l'Assemblée nationale. C'est donc un texte déjà bien différent du texte initial qui nous est aujourd'hui soumis.

Dans le temps limité qui était imparti à notre commission, j'ai mené de nombreuses auditions, auprès du monde agricole au sens large - syndicats, chambres d'agriculture, Safer, ministère -, des services préfectoraux, mais aussi auprès de personnalités qualifiées, afin de comprendre le mieux possible les dynamiques du marché foncier et les tenants juridiques du texte. J'ai, par exemple, entendu l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) ou encore des avocats spécialistes du droit rural.

Qu'est-il ressorti de mes auditions ? Principalement, il y a une forte polarisation autour de ce texte. Pour certains, ce dernier est indispensable et ne doit pas être modifié d'une virgule, répondant parfaitement à leurs attentes. Pour d'autres, il s'agit d'un mécanisme de régulation presque « communiste », comme j'ai pu l'entendre, au champ trop large et qui confie trop de pouvoirs aux Safer. Sur ce sujet sensible qui touche au coeur de nos exploitations, aux transmissions familiales, aux libertés constitutionnelles, les convictions sont fortes et liées à nos expériences personnelles.

J'ai donc souhaité aborder ce texte dans un esprit de mesure et d'équilibre, en regardant de manière pragmatique ce qui est bien calibré, et ce qui ne l'est pas ; ce qui est trop ambitieux, ou trop timide ; ce qui est bien encadré, ou pourrait présenter des risques de dérive. C'est dans cette logique que j'ai inscrit mes amendements.

Le coeur de cette proposition de loi est son article 1 er , qui instaure un dispositif de contrôle des cessions de titres de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole. Le reste du texte est composé de mesures annexes, liées de près ou de loin au contrôle des sociétés ou à d'autres outils de régulation.

Je souhaiterais rappeler brièvement les grandes lignes du mécanisme de contrôle proposé.

Premièrement, cette proposition de loi est présentée comme une réponse d'urgence à l'accaparement et à la concentration excessive des terres, facilitées par le recours aux formes sociétaires. Il ne vise donc pas la cession directe de terrains, comme dans le cas du droit de préemption des Safer, mais la cession de parts ou actions de sociétés qui détiennent ou exploitent des terres agricoles.

Deuxièmement, le dispositif de contrôle n'a pas vocation à concerner toutes les transactions sociétaires. Le déclenchement du dispositif est soumis au franchissement d'un double seuil cumulatif. Pour faire l'objet d'un contrôle, il faut que la cession de parts conduise à la prise de contrôle d'une société, pour un seuil de détention fixé à 40 % des droits de vote. Il faut aussi que la surface totale détenue après l'acquisition de la société dépasse un seuil d'agrandissement significatif, fixé par le préfet de région par rapport à la surface agricole utile régionale moyenne (Saurm).

Troisièmement, le dispositif de contrôle ne s'applique pas, dans la rédaction actuelle du texte, aux opérations des Safer, aux donations, aux cessions intrafamiliales jusqu'au troisième degré inclus et aux sociétés foncières agricoles solidaires.

Quatrièmement, pour les transactions concernées, une demande d'autorisation doit être déposée auprès de la Safer, qui instruit la demande pour le compte de l'autorité administrative. Elle évalue si l'opération porte atteinte aux objectifs de politique publique, et, à l'inverse, si elle entraîne des effets bénéfiques pour le territoire en matière économique, sociale et environnementale. Dans le texte, le préfet est compétent pour se prononcer sur la demande d'autorisation mais, dans la pratique, il se fondera sur l'avis formulé par les Safer qui aura donc une grande importance. Le préfet peut soumettre une autorisation à des « mesures compensatoires », pour en atténuer les effets négatifs : cela peut être une cession d'une partie des terres de la société, ou une mise à bail des terres, au profit de jeunes agriculteurs ou de consolidations d'exploitations. Dans la rédaction qui nous est soumise, toutes ces opérations au titre de mesures compensatoires se feront obligatoirement par l'intermédiaire des Safer.

Quelles sont donc les grandes lignes du rapport que je vous soumets aujourd'hui et des amendements que nous examinerons dans un instant ?

Je vise une position constructive et équilibrée. Je n'ai pas modifié les grands principes du texte ni son architecture, mais j'ai cherché à territorialiser son application, à améliorer son ciblage, à assurer une évaluation adéquate de ce dispositif après quelques années et à placer les garde-fous nécessaires pour garantir la transparence et les libertés constitutionnelles.

Concernant l'échelle de mise en oeuvre, j'ai souhaité territorialiser davantage le dispositif, c'est-à-dire rapprocher la décision des territoires, en privilégiant une décision du préfet de département plutôt que du préfet de région. Les seuils d'agrandissement excessif seront toujours fixés par le préfet de région, mais les dossiers seront examinés à un niveau de proximité. Cette proposition a été largement soutenue lors de mes auditions.

Concernant le ciblage, il est indispensable de recentrer le dispositif sur les objectifs annoncés. J'ai souhaité m'assurer que le calibrage du dispositif et ses paramètres correspondent bien aux objectifs de lutte contre l'accaparement foncier et la concentration excessive. J'ai préféré recentrer la fourchette dans laquelle sera fixé le seuil de surface, pour ne pas inclure les exploitations qui se situent parfaitement dans la moyenne de la taille des exploitations. J'ai aussi fait en sorte de ne pas mettre des bâtons dans les roues des transmissions familiales, conjugales, entre associés exploitants ou envers un salarié ou un apprenti.

À l'inverse, j'ai supprimé des exemptions qui me paraissaient ouvrir des brèches dans le dispositif de contrôle, comme celles au profit des foncières agricoles. J'ai aussi supprimé la possibilité donnée au préfet de refuser la candidature d'un exploitant, même si aucun autre exploitant ne s'est déclaré candidat : mieux vaut une exploitation un peu plus grande que la moyenne, que pas d'exploitation du tout.

J'ai souhaité ajouter de manière obligatoire une évaluation complète et précise à trois ans du dispositif de contrôle, dont les résultats constitueront une clause de revoyure afin d'envisager d'éventuels ajustements à ce dispositif de contrôle.

Ensuite, j'ai été guidé par le souci d'éviter de placer les acteurs dans des situations délicates, voire risquées. En effet, le texte étend significativement les pouvoirs du préfet et des Safer. C'est souvent pertinent : ainsi, je suis favorable au principe général du contrôle des cessions, ainsi qu'à l'extension des notifications aux Safer. Dans d'autres cas, j'étais plus partagé. Même si j'aurais initialement préféré une instruction par les services de l'État et la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA), comme plusieurs d'entre vous, le rôle des Safer dans l'instruction des dossiers me semble finalement incontournable, car tous les auditionnés s'accordent à dire que les services préfectoraux n'en ont pas les moyens. J'ai néanmoins voulu réintégrer la CDOA dans le dispositif de la proposition de loi, mais sur saisine du préfet sur les dossiers les plus problématiques, et non systématiquement. Il s'agit d'une position d'équilibre qui répond aux points soulevés par plusieurs d'entre vous, sans toutefois alourdir la procédure de contrôle.

Une même entité ne doit pas être à la fois instructeur d'une demande d'autorisation, intéressée financièrement à la mise en oeuvre d'opérations commerciales sur ces mêmes dossiers, et exemptée elle-même de tout contrôle... Il faut prévenir ce risque de conflit d'intérêts, qui m'a été largement signalé lors des auditions. Il faut éviter de placer les acteurs dans des situations délicates, tant les demandeurs que les Safer elles-mêmes, dont la crédibilité pourrait être mise en doute. Je propose donc plusieurs mesures visant à améliorer la transparence des travaux des comités techniques des Safer, et à assurer le respect du principe contradictoire et l'information des parties dans le cadre de la procédure d'autorisation.

Je propose également d'encadrer davantage la mise en oeuvre de « mesures compensatoires », c'est-à-dire d'engagements demandés en contrepartie de l'autorisation, qui devront aujourd'hui impérativement passer par les Safer - avec perception d'une commission. Là aussi, cela me semble comporter un risque. Je souhaite donc que les Safer ne puissent pas intervenir commercialement, pour une durée de neuf ans, sur les biens des dossiers qu'elles ont instruits pour le compte du préfet, pour limiter les problèmes liés à leur « double casquette ». Il ne s'agit en aucun cas d'affaiblir le dispositif : il n'y aura pas de défaut de régulation de ces acteurs, car les mesures compensatoires seront strictement contrôlées par le préfet et pourront aboutir à la nullité de l'opération.

Le texte donne aussi la possibilité au préfet d'exiger la rupture d'un bail en cours au profit d'un exploitant, pour que la Safer y installe un autre exploitant de son choix. J'ai souhaité réaffirmer avec force qu'aucun bail ou contrat en cours ne pourra être remis en cause avant son terme.

Enfin, dernière situation à risque : le texte permettrait aux Safer de faire usage de leur pouvoir de substitution sur des cessions de parts de sociétés. Cela pourrait conduire à ce que les Safer imposent à des exploitants l'arrivée d'un nouvel associé qu'ils n'ont pas choisi... Je ne le souhaite pas, et cela ressemble fortement à la mesure censurée il y a quatre ans par le Conseil constitutionnel. Je propose la suppression de la mesure.

Voici donc mes positions sur ce texte et les amendements que je vais vous présenter et que je résumerai en quatre principes : territorialiser, recentrer, encadrer et évaluer.

M. Franck Menonville . - Ce texte est nécessaire. Les Safer ont été créées par Edgar Pisani dans les années 1960, alors que le contexte nécessitait une professionnalisation de l'agriculture et qu'il n'existait pas de forme sociétaire pour porter le foncier. Les Safer ont permis une régulation depuis trente ans, qui a plutôt bien fonctionné puisque nous avons aujourd'hui une agriculture diversifiée et puissante sur l'ensemble de notre territoire. Mais le contexte a changé, une évolution est nécessaire en particulier pour exploiter en commun, pour faciliter la transmission.

Le groupe Les Indépendants a déjà plaidé pour un nouvel outil de régulation foncière, sur la base des constats que vous faites aussi, en particulier celui de la concentration du foncier dans certaines régions, et des difficultés d'installation et de transmission que cette concentration occasionne.

Ce texte instaure un contrôle a priori sur les sociétés. L'équilibre est difficile puisqu'il faut concilier ce contrôle avec le principe de la liberté d'entreprendre. Ce texte y parvient. Il organise en particulier une séparation de l'instruction et de la délivrance des mesures compensatoires, c'est une bonne chose. Cependant, il faut veiller à la qualité même des mesures compensatoires, à leur articulation avec le territoire et ses enjeux : attention à ce qu'un retrait des Safer ne se traduise pas par une libération du foncier à des prix trop élevés, ni par des projets agricoles moins ambitieux. La solution passe par un contrôle étroit, qui soit bien connecté au territoire et à ses enjeux agricoles.

Mme Françoise Férat . - Avec ce texte, les Safer vont devoir examiner un nombre croissant de demandes préalables : en auront-elles les moyens ? Sinon, comment les renforcer ?

M. Daniel Gremillet . - Le problème du foncier agricole est ancien et complexe, et j'avoue être agacé quand j'entends qu'il faudrait intervenir en urgence avec un texte de si faible envergure, car celui-ci ne vise en fait qu'une petite partie du problème.

Pour avoir rapporté en 2017 la proposition de loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle, je sais que le véritable débat est celui du statut de l'agriculteur, en particulier quand les terres agricoles sont rognées de partout, que ce soit au profit de la forêt ou de l'urbanisation.

Notre rapporteur s'inquiète des difficultés à instruire les dossiers parce que les directions départementales des territoires (DDT) manquent de moyens, ce n'est pas acceptable ! Il faut le dire nettement : sans les services extérieurs de l'État, sans les écoles, sans EDF, il n'y aurait pas eu d'aménagement du territoire. Aujourd'hui encore, l'État ne doit pas se contenter de contrôler : il faut aussi qu'il investisse, qu'il mobilise des moyens pour construire.

Ce sujet est difficile, passionné, je le sais d'expérience. Je préviens le rapporteur pour qu'il s'y prépare - d'ailleurs, je ne suis pas sûr du tout que les quatre heures prévues en séance suffiront au débat.

M. Laurent Duplomb . - Merci pour ce travail minutieux et pour votre écoute, monsieur le rapporteur. Je partage le propos de Daniel Grémillet. Il faudrait effectivement un texte d'une tout autre envergure pour résoudre le problème du foncier agricole, mais je me réjouis que cette loi n'ouvre pas la boite de Pandore. Une loi sur le foncier agricole pourrait faire tomber le fermage au profit des propriétaires, et ce serait torturer encore l'agriculteur - il faut se rappeler que le fermage est devenu une protection parce que, auparavant, avec le métayage, planait chaque 31 mars une menace. À l'inverse, une loi sur le foncier agricole pourrait en faire un bien ordinaire, en ne laissant plus le choix à l'agriculteur de son modèle, ni de sa production, et ce au nom de tel ou tel principe écologique. Je me réjouis donc que ce texte évite ces deux écueils.

Cependant, reste à savoir pourquoi on légifère : y a-t-il réellement urgence, étant donné l'ancienneté du problème, ou bien ne fait-on que répondre à une demande médiatique ? Faisons-nous réellement face à un accaparement des terres par des intérêts chinois ? Je ne le crois pas ; la réalité est plus électoraliste : cette loi participe d'une communication gouvernementale, pour montrer que le Gouvernement agit sur le foncier agricole. Mais, dans la réalité, le nombre de cas se comptera sur les doigts de la main pour chaque département. En revanche, les effets collatéraux peuvent être importants. C'est pourquoi il faut conserver le principe d'une transmission, dans le cadre d'une association familiale, à des agriculteurs en activité, il faut s'assurer que la Safer ne soit pas juge et partie, c'est la moindre des choses - cela vaut du reste pour toutes les transactions de la Safer. Reste la question du financement des Safer, qui est effectivement importante. Quant au rôle de proximité confié au préfet du département, je ne peux qu'y souscrire.

M. Bernard Buis . - Je remercie notre rapporteur pour son travail de fond, d'écoute et de sagesse, laissant penser que nous pourrions continuer à avancer dans les semaines à venir, quelle que soit notre appartenance politique. C'est dans cet esprit d'ouverture que ce texte a été élaboré, un cas d'école de co-construction entre le monde agricole, les élus et en particulier les parlementaires, et les juristes.

Il part de ce constat partagé par tous : le foncier agricole se raréfie, une évolution qui va de pair avec le phénomène sociétaire, considéré aujourd'hui comme l'angle mort de la régulation. De fait, le regroupement en société s'est progressivement, mais durablement développé. Il a des avantages : la société peut être un outil pertinent pour la modernisation de notre agriculture via des dépenses d'investissement conséquentes ; la constitution d'une société peut être bénéfique pour accompagner les agriculteurs dans leurs projets d'exploitation, pour créer de la valeur ajoutée en complément de la production, ou encore pour transformer les filières dans nos territoires. Cependant, dans certaines situations, le montage en société donne lieu à des dérives, car les conditions de détention du foncier agricole deviennent opaques et les sociétés échappent à la plupart des outils de régulation de la puissance publique.

Sans régulation, le foncier agricole devient une ressource rare et convoitée : la taille des surfaces exploitées a augmenté, passant de 28 hectares en moyenne en 1988 à 62 hectares en moyenne en 2016.

C'est bien cet angle mort qui est dans le viseur de cette proposition de loi. Le coeur du dispositif prévoit ainsi que toute cession de titres sociaux, réalisée au profit d'un acquéreur détenant des terres agricoles au-delà d'un certain seuil, sera contrôlée. L'instruction des dossiers sera confiée aux Safer, mais seul le préfet aura le pouvoir d'autoriser ou non l'opération. Nous proposerons un amendement pour renforcer le pouvoir des organisations interprofessionnelles qui pourront rendre un avis dédié qu'elles adresseront directement au préfet.

Ce texte est salué par la quasi-totalité des syndicats agricoles, dont certains saluent la prise de conscience collective du Parlement. Dans l'attente d'une grande loi foncière, il permettra de mettre en oeuvre un système de contrôle qui se veut flexible et adapté aux réalités du terrain.

M. Joël Labbé . - Je salue aussi l'écoute du rapporteur, mais cela n'efface pas le fait que cette loi est loin de répondre aux enjeux et qu'elle ne vient pas au bon moment. Le foncier est si difficile d'accès que les agriculteurs ont de plus en plus de mal à s'installer, alors que nous avons besoin non seulement de maintenir, mais d'augmenter le nombre d'installations pour permettre une agriculture paysanne sur le territoire, dont l'objectif sera de nous nourrir de façon résiliente. La rédaction actuelle présente aussi des reculs, par exemple la suppression de l'exemption pour Terre de lien, à laquelle nous tenions, nous y reviendrons en séance plénière. Il faut reconnaître le bien-fondé historique de la Safer qui a régulé le prix du foncier, et il faut dire aussi que la liberté, c'est aussi celle de s'installer : donnons-lui les moyens d'être effective, cela passe par de la régulation, là où chacun voit que les formes sociétaires ont contourné les Safer et dévoyé la loi. Nous sommes donc réservés sur ce texte, tout en comptant lui apporter des améliorations.

Mme Anne-Catherine Loisier . - Je ne saurais dire à quel point le foncier agricole est rare à l'échelle de notre pays, mais dans le département de la Côte-d'Or, la question se pose surtout de la valeur vénale des terrains : depuis que des grands groupes ont racheté des terrains à prix d'or, des propriétés familiales n'ont pas pu suivre. Or, ce texte ne dit rien sur la valeur vénale. La loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi Égalim, a séparé le conseiller de l'opérateur, mais ici la Safer continuera de jouer les deux rôles : pourquoi ? Pour quelle transparence ? Cela n'imposera-t-il pas qu'on renforce le rôle des commissaires du Gouvernement, comme on l'a fait dans la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ? Qu'en est-il, enfin, de l'élargissement de l'exemption aux parents du quatrième degré, dont on dit qu'elle est à l'étude ?

Mme Évelyne Renaud-Garabedian . - Comment est actionné le seuil de déclenchement du contrôle lorsque la cession est étalée dans le temps : est-il cumulatif ?

M. Henri Cabanel . - Je remercie le rapporteur pour son écoute et, comme mes collègues aussi, je sais que cette loi ne remplace pas la loi foncière annoncée et que nous attendons tous. On se félicite bien entendu que la Safer ait été mise en place dans les années 1960, mais on doit noter que notre système n'a pas su s'adapter aux évolutions, puisque 60 % des exploitations sont désormais sous forme sociétaire.

Je partage totalement ce qu'a dit Daniel Gremillet : il aurait fallu un texte de loi beaucoup plus large. Certes, la proposition de loi constitue une avancée, mais les mailles du filet ne sont pas assez serrées. Les hypothèses de déclenchement, qui s'opère dès lors que le seuil d'une à trois fois la SAURM est dépassé, me paraissent relativement importantes.

Si nous n'y prenons pas garde, demain, les agriculteurs deviendront des salariés de sociétés qui posséderont le foncier. Il ne faut pas oublier que la Safer joue un rôle prépondérant de régulation des prix. Aujourd'hui, il y a de moins en moins de régulation et les prix explosent, ce qui pose d'énormes problèmes à ceux qui ne s'installent pas dans un cadre familial.

M. Christian Redon-Sarrazy . - Nous attendions autre chose que cette proposition de loi. Notre groupe n'est pas favorable à la création de systèmes parallèles pour régler les cas particuliers. C'est un mal bien français.

Cependant, je partage l'avis d'Henri Cabanel : l'acquisition du foncier par un certain nombre de structures aux intérêts très éloignés de ceux des agriculteurs et peut-être même de la société tout entière suscite de réelles préoccupations sur les territoires.

Selon nous, les principales dispositions de ce texte vont trop dans le sens de la libéralisation du marché du foncier. J'espère que nous débattrons du traitement à réserver aux foncières solidaires, quand on sait l'apport qui est le leur sur certains territoires.

Pour le reste, je m'interroge sur les activités agricoles, les activités des agriculteurs et les activités à vocation agricole. Ce n'est pas tout à fait la même chose et cela peut cacher un certain nombre de biais, sur lesquels il conviendra d'être vigilant. Nous devrons aborder un certain nombre de sujets essentiels compte tenu des objectifs annoncés au départ.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Monsieur Menonville, nous sommes sur une ligne de crête entre le droit constitutionnel et la liberté d'entreprendre. Il faut trouver un juste équilibre.

On ne peut que reconnaître et saluer le rôle de régulateur des Safer depuis le début des années 1960 : le prix du foncier agricole, malgré une tendance à l'augmentation, reste le plus bas des pays d'Europe de l'Ouest. Chez nos voisins, le prix de l'hectare peut être jusqu'à six fois supérieur !

Je suis d'accord : le préfet ne pourra prendre seul les décisions en matière de compensation. À aucun moment nous n'empêchons une consultation des Safer par le préfet : elles pourront lui donner leur avis et lui apporter leur expertise.

Le comité technique des Safer et la commission départementale d'orientation agricole (CDOA) ne sont pas mis en place de la même manière. Disons que la composition des comités techniques des Safer est plus libre.

Madame Férat, le but n'est pas d'épuiser financièrement les Safer et de leur donner des charges qu'elles n'ont pas les moyens d'accomplir. Le nombre de dossiers est limité : une centaine. Au reste, un amendement prévoit la mise en place par décret d'une rémunération forfaitaire des Safer pour chaque dossier, payée par les pétitionnaires.

Monsieur Gremillet, je rejoins votre vision sur l'urgence et sur le caractère très limité du texte. Nous attendions une réforme du foncier beaucoup plus large.

On ne peut que déplorer que le texte ne traite pas du manque de moyens des directions départementales des territoires (DDT). Les DDT n'ont pas, aujourd'hui, les moyens d'instruire et d'accompagner les dossiers, raison pour laquelle nous nous tournerons vers les Safer - au demeurant, nous nous heurterions sinon à l'article 40 de la Constitution...

Monsieur Duplomb, je suis complètement d'accord sur la protection du statut des fermages. J'ai déposé un amendement visant à ce que les mesures de compensation ne puissent pas mettre un terme à un contrat de fermage ou à des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) en cours.

De même, on ne peut pas, d'un côté, encourager la mise en constitution de sociétés et, de l'autre, dire que celles-ci sont dangereuses. Il faut de l'équilibre.

Il faut bien évidemment maintenir l'exploitation familiale au coeur du processus, car c'est le modèle de l'exploitation agricole française.

Le rôle du préfet de département me semblait une évidence depuis le départ.

Monsieur Buis, nous sommes d'accord sur la pertinence de la mise en société qui, très souvent, répond à une volonté de protection, à une volonté patrimoniale. Il ne faut pas verser dans le procès d'intention. N'oublions pas que l'objectif de la loi est de contrôler les abus.

Monsieur Labbé, nous n'avons pas la même position, notamment sur les foncières solidaires, qui nous semblent poser un vrai problème, notamment quand elles sont à sens unique. Nous aurions évidemment souhaité aller plus loin, mais je rappelle que nous sommes sur une ligne de crête ; il ne faudrait pas qu'il y ait une censure du Conseil constitutionnel.

Madame Loisier, il est vrai que l'objet du texte ne porte pas sur la régulation de la valeur vénale des terres agricoles. Toutefois, il y aura forcément un effet cascade. Il faut aller plus loin pour lutter contre l'explosion des prix dans certains secteurs.

Le démembrement de la clause de propriété constitue une échappatoire. Il permet aujourd'hui de contourner le droit de régulation et de préemption des Safer. C'est un vrai sujet.

Madame Renaud-Garabedian, dès qu'une personne acquiert 40 % des parts de propriété, cela modifie la prise de contrôle de la société. Les deux critères sont cumulatifs.

Monsieur Cabanel, je suis d'accord : on prend le problème par le petit bout. Il y avait d'autres choses à faire...

L'objectif du texte est véritablement d'empêcher l'accaparement, l'exagération et les dossiers énormes, qui jettent l'opprobre sur le monde agricole et sur les sociétés. Il ne s'agit pas de mettre tous les systèmes et toutes les volontés de transmission dans un carcan. C'est une question d'équilibre.

Je ne voudrais pas, comme on a pu le voir dans le domaine de la pêche, que de grandes sociétés commerciales aient la possibilité de monter leur propre groupe agricole et de commercialiser leurs propres produits, mettant complètement de côté une profession qui a besoin de cette commercialité. C'est à cela que doit servir ce texte.

Monsieur Redon-Sarrazy, il est vrai que nous attendions autre chose. Je ne pense pas que l'on aille trop loin dans la libéralisation de la loi : nous avons assorti chaque exemption de garde-fous. Le but n'est pas non plus de scléroser la commercialité des parts de société. Il faut tout de même respecter une certaine liberté. Nous reviendrons sur les foncières solidaires, mais créer une exemption pour une seule association me paraît tiré par les cheveux.

EXAMEN DES ARTICLES

Mme Sophie Primas , présidente . - Nous allons entamer l'examen des quelque 100 amendements déposés en commission sur la proposition de loi. Je vous signale d'ores et déjà que les amendements COM-55, COM-27 et COM-20 ont été déclarés irrecevables par la commission des finances au titre de l'article 40 de la Constitution.

Je rappelle que nous disposerons de quatre heures pour examiner les amendements en séance. Je suggère que les groupes s'organisent pour que nous puissions aller au bout de l'examen du texte, compte tenu du nombre d'amendements identiques.

Article 1 er

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-69 vise à territorialiser le dispositif de contrôle en confiant au préfet de département plutôt qu'au préfet de région la décision d'accepter ou de refuser la demande d'autorisation préalable à une prise de participation dans une société détenant ou exploitant du foncier agricole. Il permet les ajustements rédactionnels nécessaires à l'article 1 er .

La réalité et la diversité des exploitations agricoles dans nos territoires sont mieux connues et seront plus facilement appréhendées par le préfet de département. Le besoin de proximité pour prendre une telle décision justifie de lui confier cette mission. Cette suggestion a été largement soutenue lors des différentes auditions.

L'amendement COM-69 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements COM-25 , COM-53 rectifié bis , COM-70 , les amendements identiques COM-44 rectifié, COM-71 , COM-21, le sous-amendement COM-109 , et l'amendement COM-28 proposent de modifier les paramètres du seuil d'agrandissement significatif.

Premier paramètre : les objectifs poursuivis. Je partage les objectifs annoncés par les auteurs de la proposition de loi de lutte contre les transactions sociétaires les plus significatives, qui contribuent à une concentration trop importante, et je suis soucieux de ne pas nuire à la fluidité des transactions sociétaires sur le marché du foncier agricole. En conséquence, je suis défavorable aux propositions d'abaissement du seuil d'agrandissement, donc à l'amendement COM-25, qui vise à préciser que la lutte contre la concentration excessive des terres agricoles s'apprécie dès le premier hectare.

Deuxième paramètre : la fixation du seuil d'agrandissement. Dans le texte, ce seuil est fixé par le préfet de région au sein du schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA). Par conséquent, je suis défavorable à l'amendement COM-53 rectifié bis , qui vise à confier cette compétence au préfet de département. Si je partage la volonté de territorialiser le dispositif, l'échelon régional semble pertinent, car il n'existe pas de document équivalent au niveau départemental. En outre, la rédaction actuelle du texte permet une territorialisation, car le seuil peut être calculé par région naturelle ou par territoire présentant une certaine cohérence en matière agricole, ce qui permet une adaptation infrarégionale.

Je reconnais toutefois l'importance de la fixation de ce seuil. C'est pourquoi mon amendement COM-70 vise à préciser que le préfet de région le fixera après avoir mené des consultations préalables, par exemple auprès des élus locaux, des organisations professionnelles agricoles (OPA) ou des représentants des chambres d'agriculture.

Troisième paramètre : l'intervalle au sein duquel le seuil peut être fixé. Dans le texte, cet intervalle est fixé de 1 à 3 fois la surface agricole utile régionale moyenne (SAURM). Mon amendement COM-71 et l'amendement identique COM-44 rectifié proposent de faire passer cet intervalle de 2 à 4 fois la SAURM. Il s'agit de mettre en cohérence le dispositif de contrôle avec l'objectif annoncé de lutte contre l'accaparement et la concentration excessive des terres. Or un seuil équivalent à 1 fois la SAURM permettrait de contrôler des exploitations dont la surface se situe justement dans la moyenne régionale et ne peut donc pas être considérée comme excessive. La modification de la fourchette du seuil d'agrandissement significatif permet également de prendre en compte les risques de surcharge de travail des services préfectoraux et des comités techniques des SAFER.

En conséquence, je suis défavorable à l'amendement COM-21, qui propose de fixer l'intervalle de seuil de 1 à 4 fois la SAURM, ainsi qu'au sous-amendement COM-109, qui vise le même objet, et à l'amendement COM-28, qui propose de fixer l'intervalle de seuil de 1 à 2 fois la SAURM.

M. Joël Labbé . - Nous vous rejoignons sur la question des consultations : les représentants de la société civile et l'ensemble de la représentation syndicale agricole doivent pouvoir être consultés.

L'argument de la surcharge de travail pour les services de l'État ne doit pas entrer en ligne de compte : c'est une question de moyens. Les directions départementales territoriales devraient pouvoir jouer pleinement leur rôle.

M. Laurent Duplomb . - Je m'interroge sur la pertinence de l'intervalle de 2 à 4 fois la SAURM. Personnellement, je serais plutôt favorable à un intervalle de 1,5 à 3.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - La fixation du seuil appartient au préfet de région ; l'instruction des dossiers et la décision relèvent du préfet de département.

Je ne suis pas fermé sur la question du plafond. En revanche, il est très important d'en rester à un seuil minimum de 2. En effet, on ne peut pas considérer qu'une exploitation ayant la surface moyenne des exploitations de la région, avec un principe d'équivalence en fonction du type de culture, connaisse un agrandissement excessif.

M. Christian Redon-Sarrazy . - Un seuil à 1 permet aussi de se donner la possibilité d'étudier de nouveaux projets, peut-être plus pertinents en termes de production de proximité. La lutte contre l'accaparement ne doit pas être le seul objectif.

M. Henri Cabanel . - Je suis tout à fait d'accord. Un intervalle de 1 à 3 ne signifie pas que l'on déclenchera automatiquement la procédure à 1. Je ne voterai pas cet amendement.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Si le préfet de région décide de fixer le seuil à 1, tous les dossiers qui dépassent ce seuil passeront automatiquement à l'instruction.

L'objectif de la loi n'est pas de statuer sur le caractère judicieux des dossiers : il s'agit bien de lutter contre l'accaparement et la concentration excessive des terres. Pour le reste, on pourra toujours se tourner vers le contrôle des structures.

M. Laurent Duplomb . - Pourquoi retenir un seuil qui conduira à vérifier toutes les exploitations moyennes du département ? Il me semble qu'un consensus peut s'établir sur un intervalle de 1,5 à 3. Un plafond à 4 me semble un peu excessif dans certains départements.

M. Daniel Gremillet . - Je partage l'avis de mon collègue : 4, c'est trop. Un plafond à 3 me semble un équilibre judicieux. Je ne serais pas choqué que l'on retienne un seuil à 1,5 ou 2, mais pas plus. Je suivrai la position de M. le rapporteur.

Cependant, dans les départements d'une même grande région, la surface minimum d'installation (SMI) peut être très variable. La moyenne régionale que le texte nous propose de retenir n'est pas conforme à la réalité économique et témoigne d'une déconnexion.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Compte tenu des arguments qui ont été avancés, je m'engage à modifier mon amendement en séance, pour cranter le fait que le seuil doit s'établir au-dessus de la moyenne d'exploitation agricole. Quant au plafond, je comprends qu'il peut avoir des conséquences importantes, par exemple en termes de pondération en fonction du nombre d'associés.

L'amendement COM-25 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-53 rectifié bis .

L'amendement COM-70 est adopté.

Le sous-amendement COM-109 n'est pas adopté.

Les amendements COM-44 rectifié et COM-71 sont adoptés.

Les amendements COM-21 et COM-28 deviennent sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-72 vise à préciser le seuil d'agrandissement significatif applicable aux sociétés étrangères ou aux sociétés détenant ou exploitant des terres situées dans plusieurs régions. La rédaction actuelle ne mentionne pas explicitement ces cas de figure, alors que le seuil d'agrandissement significatif est fixé par chaque préfet de région.

Plus précisément, cet amendement prévoit que le seuil applicable est celui du siège social de la société cible ou, à défaut de siège social en France, celui du siège d'exploitation ou du lieu où se trouve la plus grande surface détenue ou exploitée, en cohérence avec les dispositions déjà prévues dans le texte.

L'amendement COM-72 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-73 vise à remplacer la notion de « parcelles » par celle de « biens immobiliers » et à en tirer les conséquences rédactionnelles à l'article 1 er , dans un objectif de précision juridique.

L'amendement COM-1 rectifié vise le même objectif et propose la même modification, mais pour seulement une partie du texte : retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement COM-29 vise à modifier la rédaction actuelle pour mentionner explicitement que les équivalences prévues par le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) sont obligatoirement respectées. Avis favorable.

L'amendement COM-73 est adopté.

L'amendement COM-1 rectifié est retiré.

L'amendement COM-29 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-74 prévoit que le seuil d'agrandissement significatif soit pondéré à la hausse, selon une formule fixée par décret, pour tenir compte du fait que plusieurs exploitants sont actifs sur la surface soumise au calcul de ce seuil.

En effet, en l'état actuel de la rédaction, le seuil d'agrandissement significatif est calculé de manière identique s'il y a un ou plusieurs exploitants sur une même surface agricole. Or, au regard des objectifs du texte de lutte contre l'accaparement et la concentration excessive des terres agricoles, une pondération est nécessaire : si une exploitation de 400 hectares peut être regardée comme excessive pour un seul exploitant, elle ne l'est pas forcément pour six exploitants.

Le sous-amendement COM-108 vise à préciser la rédaction en remplaçant la notion d'« exploitants actifs » par celle d'« associés exploitants à titre principal ». Cette précision rédactionnelle est bienvenue. Avis favorable.

M. Daniel Gremillet . - Sur le terrain, aujourd'hui, la pondération en fonction du nombre d'associés est absolument essentielle, mais certains schémas ont intégré la prise en compte du premier salarié. Ces schémas seront-ils remis en cause sur le terrain ?

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Cela fait partie des interrogations. Parler uniquement de salariés serait la porte ouverte au fait d'embaucher du monde juste pour pouvoir dépasser un seuil. Nous en discuterons en séance.

Quoi qu'il en soit, cela montre l'importance d'un amendement consacrant la possibilité de transmettre des parts à un associé.

M. Christian Redon-Sarrazy . - Il est important de bien caractériser qui est concerné. Nous voulons favoriser l'activité des exploitants à titre principal engagés sur les territoires. Il ne faudrait pas ouvrir la porte à des dérives préjudiciables aux territoires.

Le sous-amendement COM-108 est adopté. L'amendement COM-74, ainsi sous-amendé, est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-75 vise à préciser et à réajuster les modalités d'exclusion des surfaces de bois et de forêts pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif.

D'une part, il est précisé que seules les surfaces de bois et de forêts défrichées dans un objectif d'usage agricole sont incluses dans le périmètre de calcul du seuil d'agrandissement significatif. Les défrichements intervenant dans un autre objectif, tel que la construction, ne doivent pas être comptabilisés dans ce périmètre.

D'autre part, cet amendement supprime l'exclusion relative aux anciens terrains de culture. En effet, la seule circonstance qu'une terre ait autrefois servie de pâturage n'en fait pas une surface agricole utile si elle est aujourd'hui à l'état de friche ou de lande.

L'amendement COM-75 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-76 vise à exclure les surfaces de pelouses sèches dans le périmètre de calcul du seuil d'agrandissement significatif.

Ces surfaces sont moins propices à l'exploitation agricole et sont de plus en plus soumises à des réglementations environnementales protectrices. C'est pourquoi il n'est pas opportun de les comptabiliser parmi la surface agricole utile.

Mme Marie-Christine Chauvin . - Les contraintes sont les mêmes pour les zones humides.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Du fait des contrats MAEC qui les concernent, les zones humides ont une vraie valeur économique - je pense notamment à la fenaison. Je ne vois donc pas pourquoi on les écarterait du seuil d'agrandissement. Elles conduisent aussi à un versement à l'hectare non négligeable - entre 300 et 380 euros par hectare - dès lors que les critères de la politique agricole commune (PAC) sont respectés.

M. Daniel Gremillet . - La réponse égalitaire de traitement est la notion d'éligibilité économique à la PAC que vient d'évoquer M. le rapporteur. Toutes les pelouses sèches ne sont pas exclues de l'accompagnement par la PAC. Il faudrait peut-être un sous-amendement pour bien clarifier les choses.

M. Laurent Duplomb . - Je ne suis pas spécialement favorable à cet amendement. N'ouvrons pas la boîte de Pandore en créant des distorsions. Le bon sens consiste à dire que ce qui n'est pas agricole est exempté, comme les forêts, les parcelles de bois.

M. Joël Labbé . - Je suis tout à fait d'accord avec Laurent Duplomb.

Mme Martine Berthet . - Je rejoins également mes collègues. Il ne faudrait pas que des zones complètes d'alpage soient prises en compte.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Je propose de retirer cet amendement et de le retravailler d'ici à la séance, en tenant notamment compte de la remarque de Daniel Gremillet : la notion de bénéfice économique pour l'exploitation agricole est déterminante.

L'amendement COM-76 est retiré.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements COM-58 rectifié et COM-30 proposent de remplacer le seuil de prise de contrôle d'une société, actuellement fixé à 40 % des droits de vote sous réserve qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détienne une fraction de droits de vote supérieure à ce seuil et conformément aux dispositions du code de commerce, par la définition du code monétaire et financier, qui fixe ce seuil à 25 % de la détention du capital.

Le seuil proposé par ces deux amendements figurait dans la proposition de loi initiale et était applicable aux seules personnes physiques. À la suite de l'avis du Conseil d'État, le rapporteur de l'Assemblée nationale a décidé de le supprimer du dispositif, conformément aux recommandations formulées de ne retenir que la définition de la prise de contrôle prévue par le code de commerce.

Par ailleurs, un tel abaissement du seuil de contrôle augmenterait de manière significative le périmètre des transactions sociétaires concernées par le dispositif. Or je suis convaincu que l'intérêt d'un tel dispositif de contrôle est de se concentrer sur les transactions les plus significatives, et non de réguler l'ensemble du marché foncier agricole.

Par conséquent, je suis défavorable à ces deux amendements.

M. Joël Labbé . - C'est toute la différence d'approche que nous avons sur ce sujet.

L'amendement COM-58 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-30.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-56 vise à limiter l'exemption accordée aux donations de titres sociaux en deçà du quatrième degré de parenté.

Or la plupart des transactions intervenant dans un cadre familial se font à titre onéreux, et non gratuitement. Par ailleurs, je réitère ma volonté de ne pas faire obstacle à la fluidité des transactions familiales et aux transmissions de patrimoine. Avis défavorable.

L'amendement COM-56 n'est pas adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements COM-57 , COM-14 rectifié, COM-77 , COM-11 rectifié, COM-16 , COM-37 rectifié bis , COM-78 , COM-45 et les amendements identiques COM-9 rectifié bis , COM-38 rectifié bis et COM-40 sont relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de parts sociales ou d'actions.

Premièrement, je considère qu'il est très important de maintenir la fluidité des transactions intervenant dans un cadre familial et visant la transmission du patrimoine. En conséquence, je suis défavorable à l'amendement COM-57, qui vise à supprimer cette exemption.

Deuxièmement, le texte inclut l'exemption jusqu'au troisième degré, ce qui correspond aux arrière-petits-enfants, aux oncles et tantes ainsi qu'aux neveux et nièces. Mon amendement COM-77 vise à étendre l'exemption applicable aux opérations intrafamiliales jusqu'au quatrième degré inclus, afin d'y intégrer les cousins germains. Vous êtes plusieurs à proposer une telle modification et vos amendements sont, en ce sens, partiellement satisfaits.

Troisièmement, je souhaite maintenir l'idée que cette exemption doit être assortie de garde-fous. C'est pourquoi je souhaite conserver les conditions applicables à cette exemption. La première est relative à la détention par le cessionnaire, pendant au moins neuf ans, des titres sociaux acquis, afin d'éviter les reventes rapides de parts sociales et d'actions. La seconde est la participation effective du cessionnaire à l'exploitation. Cette condition me paraît trop restrictive : elle ne serait pas remplie si le repreneur assume seulement la direction de l'exploitation et obligerait le repreneur, par exemple, à détenir le cheptel et le matériel ou encore à habiter sur l'exploitation. Mon amendement COM-78 vise à l'assouplir et propose de remplacer le critère de participation effective à l'exploitation par un critère de maintien de l'usage ou de la vocation agricole de l'exploitation, ce qui permet tout de même de poursuivre l'objectif de maintien dans la durée des exploitations familiales.

Par conséquent, je donne un avis défavorable aux amendements COM-11 rectifié, COM-16 et COM-37 rectifié bis , qui sont satisfaits sur le degré de parenté, mais qui suppriment ou modifient au moins l'une des deux conditions applicables à l'exemption familiale. Pour les mêmes raisons, j'émets également un avis défavorable à l'amendement COM-45 et aux trois amendements identiques COM-9 rectifié bis , COM-38 rectifié bis et COM-40.

Enfin, l'amendement COM-14 rectifié est satisfait sur le degré de parenté. Cet amendement ajoute également des exemptions, sous conditions, pour les opérations réalisées par les salariés agricoles, les aides familiaux, les associés d'exploitation, les fermiers et les métayers. Je partage ces objectifs, à l'exception de l'exemption relative aux fermiers et aux métayers, que je trouve trop large, et je propose à ce titre deux autres amendements accordant, sous conditions, des exemptions pour les associés, les salariés et les apprentis. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Daniel Gremillet . - Je me réjouis que l'on reconnaisse enfin la notion de famille jusqu'au quatrième degré.

Pour les salariés, la question se pose aussi de la durée pendant laquelle ils auront été présents dans l'exploitation. Il ne serait pas choquant que l'on prévoie une durée minimale d'une dizaine d'années.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Gardons en tête la préservation du modèle de l'exploitation familiale, que nous partageons tous.

Je le dis sans ambages : l'agriculture, même dans le cadre familial, a besoin d'apporteurs de capitaux. Le maintien de l'obligation selon laquelle les terres gardent un usage exclusivement agricole constitue un garde-fou, mais permet aussi à des membres de la famille du quatrième degré de pouvoir apporter des capitaux et de maintenir les biens dans la famille, sans être eux-mêmes exploitants agricoles à titre principal.

M. Daniel Gremillet . - N'oublions pas que, souvent, cela prend la forme d'un groupement foncier agricole (GFA). Il n'y a donc pas de difficulté.

L'amendement COM-57 n'est pas adopté.

L'amendement COM-14 rectifié est retiré.

L'amendement COM-77 est adopté ; les amendements COM-11 rectifié, COM-16 et COM-37 rectifié bis deviennent sans objet.

L'amendement COM-78 est adopté ; les amendements COM-45, COM-9 rectifié bis , COM-38 rectifié bis et COM-40 deviennent sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-79 vise à permettre aux cessions de parts sociales entre personnes mariées ou pacsées de ne pas tomber sous le coup du dispositif de contrôle instauré par la proposition de loi. Il s'agit de ne pas entraver les transactions intervenant dans un cadre familial et permettant la transmission de patrimoine.

L'amendement COM-47 vise à supprimer l'alinéa 10, qui permet de calculer le seuil d'agrandissement significatif sans tenir compte du régime matrimonial du bénéficiaire. Cette suppression est motivée par la volonté de préserver la liberté d'entreprise familiale et de préserver les biens familiaux. Mon amendement COM-79 répond à ces mêmes objectifs. Retrait sinon défavorable.

L'amendement COM-79 est adopté.

L'amendement COM-47 est retiré.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-80 vise à ajouter une exemption pour les cessions de titres sociaux entre associés ou actionnaires d'une même société, à condition que le cédant et le cessionnaire soient associés ou actionnaires de cette société depuis au moins neuf ans.

Cette disposition s'inscrit dans une volonté de garantir une certaine souplesse de gestion, notamment pour les associés des exploitations agricoles qui souhaitent racheter les parts d'autres associés, par exemple dans le cas d'un départ à la retraite. Elle est toutefois assortie d'une garantie : la condition que les associés ou actionnaires le soient depuis plus de neuf ans, afin d'éviter un contournement du dispositif par l'association de nouveaux exploitants qui seraient en mesure de racheter rapidement des titres sociaux sans avoir participé au développement de l'exploitation au préalable.

M. Daniel Gremillet . - Je suis d'accord avec la proposition, mais la vie n'est pas toujours un long fleuve tranquille : il peut y avoir des accidents, des décès, des maladies... Il faut aussi prendre en considération l'imprévisibilité de la vie.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - On reste dans le cadre familial. Au demeurant, l'exemption du système de contrôle et de régulation ne veut pas dire qu'il y aura forcément refus : je suis convaincu que, pour des accidents de la vie, la décision du préfet n'ira pas forcément à l'encontre de la volonté familiale. Il y aura, à mon sens, une analyse bienveillante du dossier.

L'amendement COM-80 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-81 vise à ajouter une exemption pour les cessions de titres sociaux au bénéfice de salariés ou d'apprentis qui participent à l'exploitation depuis au moins trois ans.

Cette disposition s'inscrit dans une volonté de favoriser le rachat de titres sociaux de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole par ceux qui ont déjà participé activement à l'exploitation agricole et à son développement.

Le sous-amendement COM-107 vise à allonger la durée de participation à l'exploitation de trois à neuf ans, ce qui exclut de fait l'intégration des apprentis dans le champ de cette exemption. Par ailleurs, il ajoute un critère d'inscription sur un parcours d'installation ou dans le répertoire départemental d'installation. Les modifications proposées ont pour objectif d'harmoniser la condition d'ancienneté avec l'exemption applicable aux associés et aux actionnaires d'une même société, ce qui me paraît juste et cohérent. Avis favorable.

Le sous-amendement COM-107 est adopté. L'amendement COM-81, ainsi sous-amendé, est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements identiques COM-13 rectifié, COM-34 rectifié, COM-42 rectifié bis et COM-43 ainsi que mon amendement COM-82 visent à supprimer l'exemption relative aux sociétés foncières agricoles qui disposent d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale. Aujourd'hui, seule une société foncière en France exerce de telles activités et correspond à l'ensemble des critères fixés.

Selon les informations que j'ai recueillies, cette exemption paraît injustifiée dans la mesure où la plupart des acquisitions réalisées par cette société foncière le sont auprès des Safer, dont les opérations d'acquisition et de rétrocession sont déjà exemptées du dispositif de contrôle proposé.

Par ailleurs, le risque de maintenir cette exemption est d'ouvrir une brèche importante dans le dispositif. Toutes les sociétés foncières privées qui agissent sur le marché foncier agricole doivent être soumises au contrôle de l'agrandissement significatif.

Enfin, les sociétés foncières agricoles visées par cette exemption n'ont pas les mêmes objectifs de politique publique que les Safer. Elles peuvent, par exemple, décider de mettre à bail les terres acquises aux seuls agriculteurs actifs en exploitation biologique.

Pour toutes ces raisons, je vous propose de supprimer cette exemption. J'émets donc un avis favorable aux amendements.

M. Christian Redon-Sarrazy . - S'il est vrai que cette disposition vise une seule structure, l'intervention de celle-ci a permis un certain nombre d'installations et le développement d'un certain nombre de projets. Supprimer cette mesure reviendrait à envoyer un bien mauvais signal, alors que l'on souhaite favoriser l'installation des jeunes.

En outre, le soutien à certaines activités apporté par cette foncière répond à des attentes sociétales et à l'attente de certains territoires.

M. Joël Labbé . - Je suis complètement d'accord avec mon collègue. Terre de liens travaille de plus en plus avec les collectivités locales, qui souhaitent justement qu'il y ait des productions agricoles particulières, notamment biologiques, pour répondre à la loi - je pense à la restauration scolaire collective.

Terre de liens permet un lien extraordinaire avec les territoires. Ce serait un bien mauvais signe que de supprimer ce dispositif. Nous le défendrons avec force !

M. Bernard Buis . - Comme mon collègue, je suis favorable au maintien de cette structure telle qu'elle existe aujourd'hui. Sur les territoires ruraux, notamment dans la Drôme, le travail de Terre de liens porte ses fruits. Les collectivités territoriales et Terre de liens travaillent ensemble, main dans la main.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Ces amendements ne mettent aucunement en cause le bien-fondé de l'existence de Terre de liens. On ne l'empêche pas de travailler avec les collectivités ni de louer des terres uniquement à des agriculteurs bio. Terre de liens est aujourd'hui propriétaire de plus de 6 000 hectares, mis à disposition par bail, car cette structure a une aversion totale pour la propriété des terres agricoles. Bien lui en prenne ! Cela ne pose pas de difficulté.

Toutefois, créer un dispositif d'exemption au profit de cette seule foncière ne me paraît pas très judicieux. Nous ne devons pas opposer les systèmes agricoles ni marquer une préférence pour l'un d'entre eux. L'agriculture ne vaut que dans sa globalité et son universalité. Il n'y a pas de raison de seulement favoriser les productions biologiques. Je rappelle que de nombreux jeunes agriculteurs doivent trouver des terres et une société et seront soumis au système Sempastous.

Mme Sophie Primas , présidente . - Ce dispositif d'exemption est en effet extrêmement curieux et constitutionnellement douteux.

Les amendements COM-13 rectifié, COM-34 rectifié, COM-42 rectifié bis , COM-43 et COM-82 sont adoptés.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements COM-59 , COM-84 , COM-85 , COM-86 , COM-17 visent à modifier la procédure de demande d'autorisation préalable.

Premièrement, je partage la volonté de clarifier la procédure proposée et de mieux délimiter les rôles et fonctions des représentants de l'autorité administrative compétente, d'une part, et des comités techniques des Safer, d'autre part.

Mon amendement COM-84 renvoie au décret l'encadrement du format et du contenu de la demande d'autorisation, afin d'articuler cette demande avec les informations qui doivent déjà être notifiées aux Safer, afin d'éviter de transmettre les mêmes informations deux fois. Par ailleurs, il précise bien que la demande d'autorisation est présentée par le demandeur à la Safer compétente au nom et pour le compte de l'autorité administrative.

Par conséquent, je suis défavorable à la nouvelle rédaction de la procédure proposée par l'amendement COM-59, qui ne me paraît pas satisfaisante. En effet, la demande d'autorisation préalable doit être déposée auprès de la Safer, qui est notifiée des transactions sociétaires dans tous les cas, cette disposition étant cohérente avec les autres dispositions du texte prévoyant la mise en place d'une plateforme de télédéclaration unique, laquelle sera gérée par les Safer, les services préfectoraux n'étant pas en mesure de le faire. En outre, la décision devrait être prise par le préfet de département, et non par le préfet de région. Enfin, le silence gardé par l'autorité administrative pendant deux mois vaut bien acceptation, et le recours approprié est le recours pour excès de pouvoir, et non le recours de pleine juridiction.

Deuxièmement, je partage la volonté de mieux prendre en compte les avis des interprofessions. Mon amendement COM-85 vise à rendre obligatoire la transmission des avis des organisations interprofessionnelles concernées par l'opération de prise de participation soumise au contrôle de l'agrandissement excessif. Il s'agit de rendre plus complets les dossiers d'instruction transmis par les Safer aux services préfectoraux.

L'amendement COM-17 prévoit lui aussi un avis obligatoire des interprofessions, mais uniquement pour les produits bénéficiant d'une appellation, au premier chef les vins. Avis défavorable : je lui préfère mon amendement COM-85, plus large et qui vise toutes les filières.

Enfin, toujours dans une volonté d'encadrer et de territorialiser le dispositif, mon amendement COM-86 vise à préciser que l'instruction des comités techniques des Safer est cohérente avec les dispositions des SDREA.

L'amendement COM-59 n'est pas adopté.

Les amendements COM-84, COM-85 et COM-86 sont adoptés.

L'amendement COM-17 n'est pas adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-52 rectifié bis vise à préciser que les comités techniques des Safer, lors de l'instruction des demandes d'autorisation, doivent également apprécier l'adéquation du projet au regard de ses conséquences en matière de biodiversité.

Il me semble toutefois que l'appréciation des performances environnementales du projet, déjà prévue par le texte, ainsi que l'ajout, par un amendement de votre rapporteur, d'un critère de respect des dispositions des SDREA, qui peuvent inclure des dispositions spécifiques en matière de biodiversité, sont suffisants. Avis défavorable.

L'amendement COM-52 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-87 aborde le sujet des données nécessaires à l'instruction des dossiers par les Safer. Ces dernières ne faisant pas partie de l'administration, elles n'auront pas le même accès à l'information que les préfets.

Nous examinerons tout à l'heure plusieurs amendements qui visent à donner aux Safer un très large accès à des bases de données diverses - la Mutualité sociale agricole (MSA), le registre parcellaire de la PAC, le casier viticole informatisé... À un accès illimité et peu cadré, je préfère un dispositif plus ciblé.

Mon amendement prévoit que, lorsque les informations contenues dans la notification ou la demande d'autorisation ne seront pas suffisantes, la Safer pourra demander au préfet, ponctuellement et sous forme motivée, la transmission de données ciblées nécessaires à l'instruction des dossiers de la procédure Sempastous. Les parties à l'opération en seront informées.

Je ne souhaite pas que cette proposition de loi ouvre une brèche dans la protection des données sensibles des agriculteurs, comme leur sécurité sociale ou leur retraite, et privilégie une approche prudente. Je veux m'assurer que les données demandées seront spécifiques et qu'elles ne seront utilisées que pour la procédure Sempastous - et non pour les activités commerciales des Safer, par exemple.

L'amendement COM-87 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-88 vise à encadrer le coût de la demande d'autorisation qui sera déposée.

Il n'est pas anormal qu'une partie du coût de traitement administratif du dossier, notamment son instruction, soit mis à la charge du demandeur, comme c'est le cas dans beaucoup d'autres procédures administratives.

Tout en reconnaissant donc la possibilité de payer un montant forfaitaire - par exemple, de l'ordre d'une ou plusieurs centaines d'euros -, j'ai souhaité m'assurer que le coût de la procédure Sempastous ne sera pas prohibitif pour les acteurs du marché foncier. Je privilégie d'ailleurs un prix unique, forfaitaire, plutôt qu'une commission ou un pourcentage prélevé sur la vente, ce qui me paraît contraire à l'égalité de traitement.

Enfin, je précise qu'un prix unique devra être pratiqué sur l'ensemble du territoire national, là aussi dans un souci d'égalité.

L'amendement COM-88 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-89 vise à garantir la prise en compte du principe du contradictoire dans la procédure d'instruction par les Safer.

Afin que les parties à l'opération puissent faire valoir leurs positions et répondre aux questions de l'administration, je prévois qu'elles soient obligatoirement entendues par la Safer dans le cadre de l'instruction dès lors qu'elles en font la demande. Ces audiences se tiendront dans le délai d'instruction fixé par décret.

L'amendement COM-89 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-90 propose une réécriture des dispositions relatives à l'instruction des dossiers d'autorisation par les Safer. Il clarifie notamment que c'est bien le préfet qui prend la décision d'autorisation, sur la base du dossier d'instruction préparé par celles-ci.

Afin de garantir une instruction approfondie, il prévoit également une procédure de renvoi pour instruction complémentaire, par laquelle le préfet peut renvoyer le dossier aux Safer lorsqu'il estime l'analyse insuffisante, afin de compléter certains aspects.

L'amendement COM-60 prévoit d'inverser le principe selon lequel le silence de l'administration vaut autorisation : si le préfet ne s'est pas prononcé dans le délai de deux mois envisagé, les demandes seraient automatiquement rejetées.

Je préfère maintenir la rédaction actuelle, conformément au principe général consacré par le code des relations entre le public et l'administration et à ce qui est pratiqué dans d'autres procédures d'autorisation. Il appartient à l'administration de s'assurer qu'elle mobilise les moyens suffisants pour ne pas autoriser tacitement des opérations problématiques.

La procédure de renvoi pour examen complémentaire que je propose de créer contribue, en outre, à réduire les autorisations tacites erronées. J'émets donc un avis défavorable à l'amendement COM-60.

M. Pierre Cuypers . - On précise bien que c'est le préfet du département : il faut faire attention, car les Safer peuvent être régionales.

M. Joël Labbé . - Par cet amendement, nous tenons à mettre l'accent sur la nécessité de disposer de moyens pour pouvoir respecter les délais.

L'amendement COM-90 est adopté ; l'amendement COM-60 devient sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-91 clarifie que c'est bien l'administration préfectorale qui est chargée d'apporter une réponse à la demande d'autorisation formulée et qui communique avec le demandeur à ce sujet.

Mon amendement COM-92 est rédactionnel.

L'amendement COM-48 rectifié bis prévoit que l'avis d'instruction des Safer est annexé à la réponse du préfet sur l'autorisation. Je suis favorable à cette mesure de transparence, mais elle sera satisfaite par la rédaction que je vous proposerai par mon amendement COM-100. Celui-ci va même plus loin, en préconisant que les comptes rendus des réunions des comités techniques des Safer soient transmis aux parties à l'opération, avant la décision finale du préfet, ce qui permet aux parties de réagir, selon un principe du contradictoire. De surcroît, l'amendement COM-48 rectifié bis supprime la référence aux motifs d'opposition à la demande. Je le regrette, car il s'agit d'un élément important pour apprécier la proportionnalité des mesures compensatoires proposées. Cet amendement étant en partie satisfait, j'émets un avis défavorable.

L'amendement COM-91 est adopté, de même que l'amendement COM-92 ; l'amendement COM-48 rectifié bis devient sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-93 opère une réécriture globale des dispositions relatives aux mesures compensatoires qui peuvent conditionner la délivrance d'une autorisation de cession de parts. Ces mesures compensatoires sont, pour moi, le réel point sensible de ce texte : c'est celui qui présente le plus de risques, tant pour la confusion des rôles entre Safer et préfet et pour l'égalité de traitement des agriculteurs que pour la viabilité économique de certaines exploitations.

Mon amendement apporte trois garde-fous au dispositif, sans en bousculer l'équilibre. Il édicte très explicitement qu'il ne pourra pas être exigé qu'un propriétaire mette fin à un bail ou à un contrat en cours avant son terme. Si l'installation de jeunes agriculteurs est un objectif que nous partageons tous, il ne faut pas évincer un exploitant en activité pour ce faire. De même, le préfet ne pourra pas obliger à résilier un bail en cours. C'est pour moi un principe cardinal. Seule exception : les sociétés qui se louent en réalité à elles-mêmes.

Ensuite, mon amendement supprime l'intervention obligatoire des Safer dans la mise en oeuvre de toutes les mesures compensatoires. Si le préfet peut légitimement juger qu'une prise de contrôle peut nécessiter la cession d'une partie des terres, pourquoi cela devrait-il nécessairement passer par les Safer, au prix d'une commission, et ne pourrait pas se faire à l'amiable si les critères fixés par le préfet sont remplis ? Je pense qu'il faut garder une forme de proportionnalité.

Enfin, je souhaite également que, au moment d'inscrire dans le marbre des mesures compensatoires, l'autorité administrative soit tenue de prendre en compte la viabilité économique des exploitations. Il ne faudrait pas que le remède soit pire que le mal, c'est-à-dire, par exemple, que l'on oblige une exploitation jugée trop grosse à vendre tant de terrain qu'elle passerait en dessous du seuil de viabilité économique. Il faut équilibrer l'objectif de lutte contre l'accaparement et celui de consolidation des exploitations.

L'amendement COM-61 souhaite, à l'inverse, supprimer en bloc le dispositif des mesures compensatoires. J'y suis opposé, car on augmenterait drastiquement le nombre de refus et le dispositif deviendrait très intransigeant. Lorsqu'un acquéreur peut revendre ou mettre à bail des terres, c'est dans l'intérêt de tout le monde : cela limite la concentration et favorise l'installation de jeunes agriculteurs. Conservons cette souplesse et ce donnant-donnant. Avis défavorable.

M. Daniel Laurent . - Est-il opportun d'exclure les Safer, quoi ont une certaine expérience, sur les mesures compensatoires ?

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Nous n'excluons aucunement l'expérience des Safer : nous excluons leur intervention financière. Libre au préfet de se tourner vers les Safer pour avoir une expertise sur les compensations, ce qu'il fera probablement dans la majorité des cas. Ce sont même certainement les Safer qui proposeront la compensation au préfet.

L'amendement COM-93 est adopté ; l'amendement COM-61 devient sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-94 , les amendements identiques COM-12 rectifié, COM-35 rectifié et COM-41 , les amendements COM-46 et COM-15 rectifié concernent les mesures compensatoires. La plupart d'entre eux prévoient une consultation de la CDOA.

Mon amendement COM-94 prévoit simplement que le préfet s'assure que les mesures compensatoires contribuent aux objectifs de régulation édictés par le SDREA, pour une plus grande cohérence entre instruments de politique publique.

Les amendements identiques COM-12 rectifié, COM-35 rectifié et COM-41 et l'amendement COM-46 prévoient la consultation obligatoire de la CDOA avant toute décision du préfet.

Comme vous, mes chers collègues, j'ai débuté l'examen de ce texte en souhaitant retirer à la Safer l'instruction des dossiers, au profit de la CDOA. Toutefois, au fur et à mesure de mes auditions, j'ai cheminé sur ce point. La quasi-totalité des personnes auditionnées ont admis qu'il n'y avait pas d'alternative à l'instruction par la Safer, car le préfet et la CDOA n'ont pas les moyens de gérer cette charge additionnelle.

Une intervention systématique de la CDOA me semble donc impossible à mettre en pratique : la fréquence à laquelle elle se réunit - en général, une fois par trimestre - ne permettra pas qu'elle se prononce sans allonger très significativement les délais de décision. On risque des autorisations tacites.

De plus, sa composition est en réalité assez proche de celle des comités techniques des Safer, que je suis d'ailleurs ouvert à compléter en séance.

Je demande donc le retrait de ces quatre amendements, qui prévoient une consultation obligatoire et systématique de la CDOA. À défaut, j'émettrai un avis défavorable. Pour la même raison, je sollicite le retrait de l'amendement COM-15 rectifié, bien qu'il aille dans le même sens que mon amendement relatif aux mesures compensatoires.

Cependant, j'ai pris en compte vos nombreuses demandes visant à inclure un peu mieux la CDOA dans le dispositif. Je proposerai donc, par mon amendement COM-95 que nous examinerons dans un instant, que le préfet puisse réunir la CDOA sur tout dossier qui lui paraît problématique en termes de mesures compensatoires. Je privilégie ce dispositif souple, qui n'allonge pas les délais pour les dossiers peu problématiques, mais permet une seconde opinion en cas de difficultés. Là aussi, nous pourrons éventuellement étendre le champ de cette saisine facultative dans le cadre du débat en séance publique.

M. Daniel Gremillet . - Je partage l'avis de notre rapporteur, mais, j'insiste, le fonctionnement d'une CDOA est très différent de celui d'une Safer. D'une Safer à l'autre, les membres ne sont pas les mêmes, mais les deux commissaires du Gouvernement emportent souvent l'autorité décisionnelle finale, enlevant une grande partie de la substance décisionnelle des autres membres du comité technique.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Par amendement, je demande que l'on inscrive dans la loi la désignation des membres du comité technique des Safer. À titre d'exemple, les chambres d'agriculture font obligatoirement partie du comité CDOA, mais pas du comité Safer.

M. Daniel Gremillet . - J'insiste sur la nécessité que l'État consacre les moyens suffisants à l'instruction des dossiers par les DDT.

M. Pierre Cuypers . - Un membre de la CDOA peut-il demander au préfet de recueillir l'avis de celle-ci ?

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - C'est le préfet qui saisit la CDOA s'il a besoin d'être éclairé.

L'une des parties peut attirer son attention, mais cela ne l'oblige pas. Nous pourrons éventuellement prendre en compte ce point en séance publique.

M. Laurent Duplomb . - Si je comprends bien, la CDOA n'est jamais consultée, sauf en cas de demande de compensation, et au cas où le préfet estime avoir besoin d'un avis complémentaire sur cette demande.

Par conséquent, tous les amendements que nous avons déposés pour prévoir que la consultation de la CDOA est un passage obligé reçoivent un avis défavorable, alors même que j'aurais voulu aller plus loin, en prévoyant un avis conforme de la CDOA.

Mme Sophie Primas , présidente . - Réunir de façon systématique la CDOA sur chaque dossier me paraît trop rigide. Les délais risquent de ne pas être tenus. De toute façon, c'est le comité technique de la Safer qui va éclairer la CDOA.

Je pense donc qu'il faut garder un peu de souplesse.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Je suis d'accord sur la question des moyens, mais il est très risqué de l'inscrire dans la loi, car nous nous mettrions sous le coup de l'article 40, en créant une charge supplémentaire pour l'État.

Mme Sophie Primas , présidente . - Nous pourrons, en séance publique, ouvrir les raisons pour lesquelles on peut saisir la CDOA. C'est peut-être une piste à creuser.

L'amendement COM-94 est adopté.

Les amendements COM-12 rectifié, COM-35 rectifié, COM-41, COM-46 et COM-15 rectifié ne sont pas adoptés.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Comme évoqué à l'instant, je privilégie l'adoption de mon amendement COM-95 pour une intervention plus souple de la CDOA.

J'ai entendu les demandes visant à inclure un peu mieux la CDOA dans le dispositif. Je propose donc, par cet amendement COM-95, que le préfet puisse réunir la CDOA sur tout dossier qui lui paraît problématique au regard des mesures compensatoires.

L'amendement COM-95 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-96 précise que les délais sous lesquels les engagements des parties à l'opération devront être réalisés seront fixés par le préfet : un délai uniforme de six mois n'est pas pertinent. Certains pourront être réalisés plus rapidement - par exemple, si une échéance de bail intervient avant six mois -, d'autres plus tardivement, comme des cessions importantes de terres qui font l'objet de délais incompressibles.

L'amendement réaffirme en outre la compétence du préfet pour fixer et contrôler la mise en oeuvre de ces engagements.

Enfin, par coordination avec mon amendement relatif au rôle des Safer dans les mesures compensatoires, il supprime la référence à l'intervention obligatoire des Safer.

L'amendement COM-96 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-83 vise à raccourcir de douze à six mois le délai de prescription de l'action en nullité par l'administration en cas de cession illégale et de retrait de l'autorisation administrative pour non-respect des engagements pris au titre des mesures compensatoires. Il s'agit de favoriser une action rapide et d'inciter l'administration à réagir en cas de manque aux engagements, afin de permettre une meilleure régulation du marché du foncier agricole par ce dispositif.

L'amendement COM-62 vise au contraire à allonger le délai de prescription de douze mois à cinq ans. Cela me semble excessif.

Je rappelle que l'action en nullité intervient au terme de toute une procédure de contrôle : expiration du délai de mise en oeuvre des mesures, mise en demeure de l'administration, amende, retrait de l'autorisation et, enfin, action en nullité. Le délai pour agir en nullité ne court qu'à partir de la fin de cette procédure, et non de l'autorisation elle-même. L'administration ne sera donc pas prise de court. Au contraire, allonger le délai de prescription sera moins incitatif à agir en justice pour l'autorité administrative. J'émets donc un avis défavorable.

L'amendement COM-83 est adopté ; l'amendement COM-62 devient sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-31 propose de supprimer la dispense automatique d'autorisation d'exploiter pour les projets ayant été autorisés au titre de la procédure créée par la proposition de loi.

L'amendement COM-63 vise le même objet, dans une rédaction différente : il interdit toute dispense d'autorisation d'exploiter au titre de l'autorisation du contrôle des cessions sociétaires.

Je partage les réserves exprimées. En effet, je n'ai pas obtenu, lors de mes auditions, de réponse satisfaisante sur la justification et l'intérêt de cette dispense.

L'autorisation d'exploiter et la procédure Sempastous poursuivent deux objectifs différents, avec des critères distincts. Je ne souhaite pas les fusionner ni que l'une vaille l'autre, pour ne pas affaiblir la régulation. S'il peut être légitime de souhaiter une évolution du contrôle des structures, il n'a pas vocation à être tout bonnement remplacé par le dispositif Sempastous.

Avis favorable à l'amendement COM-31, dont la rédaction me paraît plus appropriée, et demande de retrait de l'amendement COM-63, qui sera satisfait dans l'esprit, sinon avis défavorable.

L'amendement COM-31 est adopté ; l'amendement COM-63 devient sans objet.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-99 vise à limiter le risque de conflit d'intérêts dans la mise en oeuvre du dispositif proposé par le texte.

Au titre de la rédaction adoptée à l'Assemblée nationale, la Safer pourra intervenir à la fois en tant qu'instructeur des dossiers de demandes d'autorisation, en tant que force de proposition pour les mesures compensatoires et en tant qu'opérateur commercial sur le marché du foncier agricole.

La même entité pourrait donc recommander au préfet, même de manière informelle, des mesures compensatoires consistant en la cession à son profit de terres ou d'exploitations, qu'elle rétrocédera ensuite commercialement.

Sans remettre en cause les missions d'intérêt général des Safer en matière de régulation du marché du foncier agricole, qui font de la France une bonne élève en Europe, il apparaît nécessaire de bien encadrer le dispositif proposé, qui apporte un élargissement important des pouvoirs dérogatoires des Safer. Pour assurer une meilleure séparation entre les activités de régulation des Safer et leurs activités commerciales, l'amendement prévoit qu'elles ne pourront pas intervenir directement sur les biens de sociétés dont elles ont instruit les demandes d'autorisation.

Afin de ne pas bloquer leur capacité de régulation et de prendre en compte les évolutions du marché, cette interdiction est limitée à une durée de neuf ans, qui correspond à la durée minimale d'un bail rural. Dans l'intervalle, ce seront les mesures compensatoires ordonnées par le préfet qui serviront d'outil de régulation des activités de ces sociétés en matière de foncier agricole.

L'amendement COM-99 est adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-100 vise à consacrer et encadrer le rôle des comités techniques départementaux des Safer.

La proposition de loi leur donne une grande importance, puisqu'ils seront chargés de l'instruction des demandes d'autorisation. Pourtant, la loi n'en fait aujourd'hui quasi aucune mention, pas plus qu'elle ne mentionne leur composition ni leur organisation : tout relève du règlement.

Pour une plus grande sécurité juridique et transparence, mon amendement fixe le socle commun de leur composition dans la loi. En outre, il précise leur rôle dans la procédure Sempastous et prévoit notamment la publication de comptes rendus, à divers degrés de détail, de leurs travaux d'instruction. Un compte rendu détaillé sera notamment transmis au préfet, au cédant et au cessionnaire. Cela garantit le respect du contradictoire dans la procédure et une bonne information tant des parties que de l'autorité administrative.

L'amendement COM-100 est adopté.

L'article 1 er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1 er

Mme Sophie Primas , présidente . - L'amendement COM-50 rectifié concerne la liquidation judiciaire. C'est un vrai sujet, mais celui-ci se situe hors du champ de la proposition de loi.

L'article COM-50 rectifié est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-7 rectifié bis propose de soumettre les cessions de biens détenus en nue-propriété, lorsqu'ils ne sont pas déjà soumis au droit de préemption des Safer, au dispositif de contrôle Sempastous.

J'identifie deux cas de figure : si ces biens sont détenus et cédés par le biais d'une société, ils sont déjà couverts par le texte qui nous est soumis. Sont incluses en effet les sociétés qui détiennent, même sans exploiter, des biens immobiliers qu'elles détiennent en propriété, mais non en jouissance. L'amendement est donc satisfait dans ce cas.

Dans l'autre cas, c'est-à-dire les terrains qui font l'objet de cessions directes, on sort du champ du texte qui nous est proposé. Il ne me semble pas souhaitable de les faire entrer dans la procédure Sempastous, qui est un outil dédié aux parts sociétaires. Cela renvoie en réalité au débat sur le champ du droit de préemption des Safer. Retrait, sinon avis défavorable, même si le sujet est très important.

L'amendement COM-7 rectifié bis est retiré.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-19 vise à étendre le champ du droit de préemption des Safer aux cessions en nue-propriété des sociétés dépassant le seuil d'agrandissement significatif prévu par la procédure Sempastous.

Comme je l'ai évoqué à l'instant, on parle ici de terrains qui font l'objet de cessions directes par leur propriétaire. Or les cessions directes ne sont pas évoquées par la proposition de loi ; seules les cessions de parts sociétaires sont visées. On sort donc du champ du texte qui nous est proposé. Il ne me semble pas souhaitable d'en traiter ni de modifier le champ du droit de préemption des Safer dans un texte qui n'y est pas dédié, car les implications sont nombreuses.

En outre, sur le fond, les limitations posées aujourd'hui par le droit à la préemption des cessions en nue-propriété existent pour une bonne raison : si la Safer préempte uniquement la nue-propriété, sans pouvoir installer un agriculteur car elle n'a pas la jouissance du terrain, elle ne peut pas remplir son objectif d'intérêt général. Elle se transformerait uniquement en sorte de foncière agricole, sans améliorer l'exploitation des terres, ce que je ne souhaite pas. Avis défavorable.

L'amendement COM-19 n'est pas adopté.

L'amendement COM-49 rectifié est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 2

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Mon amendement COM-101 vise à supprimer l'article 2, qui étend les pouvoirs d'acquisition et de substitution des Safer vis-à-vis des parts et actions de sociétés.

Au titre du texte, il serait possible pour une Safer de devenir actionnaire ou associé minoritaire ou majoritaire de toute société détenant des terres agricoles.

Aujourd'hui, les Safer peuvent acquérir des parts d'une société, mais seulement lorsque son objet principal est agricole. L'article 2 étend cette possibilité à toute société détenant du foncier « à vocation agricole », y compris, par exemple, des terres qui ne sont plus exploitées depuis longtemps ou dès lors qu'une SCI ayant acquis un terrain avec une habitation détiendrait incidemment un bout de champ. Cet élargissement est pour moi disproportionné au vu de l'objectif et du ciblage affiché par la proposition de loi : la lutte contre l'agrandissement excessif et la concentration excessive des exploitations.

De plus, la substitution n'est pas appropriée pour les parts de société : elle permettrait aux Safer de choisir l'attributaire des parts, donc d'imposer aux exploitants déjà associés dans la société un nouvel exploitant associé qu'ils n'ont pas choisi. Pour le bon fonctionnement de l'exploitation, les associés doivent choisir volontairement de travailler ensemble.

D'ailleurs, je rappelle que le Conseil constitutionnel a déjà censuré, en 2017, des dispositions similaires qui permettaient la préemption de parts de sociétés par les Safer : le Conseil avait estimé que la Safer n'avait pas à devenir actionnaire minoritaire de sociétés agricoles ni à imposer aux exploitants de nouveaux entrants dans leur propre société.

Je propose donc la suppression de cette disposition, qui ne me semble pas apporter de solution en vue de lutter contre la concentration, mais pose, en revanche, tant un problème de principe qu'un problème constitutionnel.

L'amendement COM-101 est adopté.

L'article 2 est supprimé.

Article 3

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-18 prévoit que l'obligation de notification à la SAFER soit réalisée par parcelle visée, plutôt que par opération de cession envisagée. Je n'y suis pas favorable, pour deux raisons.

Tout d'abord, la déclaration comporte déjà des éléments relatifs à chaque parcelle de l'opération, leur délimitation, leur usage, leur classement au plan local d'urbanisme (PLU). Il n'y aurait pas de réelle plus-value à dissocier et démultiplier les déclarations. Ensuite, pour lutter contre l'accaparement et la concentration des terres, mieux vaut appréhender les opérations dans leur globalité : si l'on déclare les cessions parcelle par parcelle, il sera plus difficile pour les SAFER d'identifier les opérations qui concentrent les terres auprès d'un même propriétaire ou exploitant. En conséquence, mon avis est défavorable.

M. Christian Redon-Sarrazy . - Cet amendement ouvre la porte à la spéculation, notamment dans les zones tendues ou limitrophes des zones urbaines.

L'amendement COM-18 n'est pas adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Avis favorable aux amendements identiques COM-2 rectifié bis , COM-22 rectifié ter , COM-51 rectifié bis et COM-102 visant à clarifier que l'obligation de notification des opérations sociétaires pèse, selon les cas, sur le gérant, le représentant légal ou le délégataire de la société.

Les amendements COM-2 rectifié bis , COM-22 rectifié ter , COM-51 rectifié bis et COM-102 sont adoptés.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-6 rectifié vise à modifier les critères permettant de déterminer quelle SAFER recevra la notification des opérations. Je ne suis pas favorable à cette modification.

En effet, si une société exploitant de nombreuses terres en Bretagne achète une exploitation en Normandie, il serait dommage que la SAFER Bretagne instruise le dossier, alors que la cible de l'achat est située dans une autre région. Mieux vaut un critère objectif, tel le siège social ou d'exploitation, qu'un critère compliqué à établir, comme une plus grande surface détenue ou exploitée.

La rédaction prévue est plus pertinente avec le droit commun des sociétés. Pour cette raison, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j'y serai défavorable.

L'amendement COM-6 rectifié est retiré.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements identiques COM-3 rectifié et COM-23 rectifié bis tendent à étendre le champ de la procédure de télédéclaration obligatoire, à la SAFER, des notifications d'opérations de cession, en y soumettant également les informations notifiées par les notaires.

Je me suis assuré auprès du Conseil supérieur du notariat que cette disposition ne leur posait pas de problème de principe ou de faisabilité technique : les notaires ont indiqué ne pas s'y opposer et être déjà en discussion avec les SAFER pour la mise en oeuvre de cette disposition. J'émets donc un avis favorable à cette mesure d'harmonisation des modalités de télédéclaration.

Les amendements COM-3 rectifié et COM-23 rectifié bis sont adoptés.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements identiques COM-5 rectifié bis , avec le sous-amendement COM-106 , COM-36 rectifié bis et COM-66 rectifié fixent des dates d'entrée en vigueur pour la présente loi, et des dispositions transitoires pour mettre en place progressivement le régime d'autorisation.

Comme les auteurs le soulèvent à juste titre, il est nécessaire de prévoir un séquençage des obligations créées par la loi : obligations déclaratives, puis procédures d'autorisation, opérations concernées... J'ai moi-même déposé un amendement quasi identique, après l'article 3.

Toutefois, ces amendements précisent qu'un autre seuil « par défaut » s'appliquera dans la période transitoire, ce qui complexifie la procédure et est source d'insécurité juridique : en quelques mois, trois seuils différents s'appliqueront aux acteurs.

Qui plus est, serait posé, aux termes de la Constitution, le principe d'égalité de traitement : à deux mois d'écart, une opération identique pourra être acceptée et l'autre refusée. Enfin, cela créera des effets d'aubaine.

C'est pourquoi je préfère que l'on retienne l'amendement COM-103 , dont la rédaction est proche de ces amendements, mais ne prévoit pas de seuil temporaire.

En conséquence, je demande le retrait des amendements COM-5 rectifié bis , COM-36 rectifié bis et COM-66 rectifié ; à défaut, j'y serai défavorable ; et je suis défavorable au sous-amendement COM-106.

Le sous-amendement COM-106 n'est pas adopté.

Les amendements COM-5 rectifié bis et COM-66 rectifié sont retirés.

L'amendement COM-36 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Les amendements identiques COM-4 rectifié, COM-26 rectifié bis et COM-32 , l'amendement COM-67 rectifié, les amendements identiques COM-8 rectifié et COM-33 rectifié bis ainsi que les amendements COM-68 rectifié et COM-65 visent à donner aux SAFER un plein accès à plusieurs bases de données des pouvoirs publics ou de sécurité sociale.

Si les SAFER doivent instruire les dossiers, il faut effectivement qu'elles disposent de l'information nécessaire - j'ai eu la même préoccupation d'assurer l'efficacité de l'instruction. Toutefois, si l'administration délègue la compétence d'instruction des dossiers, elle ne doit pas pour autant donner aux SAFER les clefs de toutes ses bases de données, qui contiennent des informations sensibles et personnelles des agriculteurs. Par exemple, je ne suis pas favorable à ce que les SAFER aient accès aux données de sécurité sociale et de retraite des agriculteurs, via l'accès aux informations de la Mutualité sociale agricole (MSA). Le lien avec le contrôle des transactions sociétaires est pour le moins très distant...

Les interprofessions viticoles s'inquiètent de la demande d'accès illimité au casier viticole informatisé, qui est sans précédent et non justifiée de la part des SAFER.

Dans la logique que je vous ai exposée précédemment, je préfère prévoir des garde-fous et avoir une approche prudente.

Rappelons d'abord que la notification à la SAFER comporte de nombreuses données obligatoires sur la société, son bénéficiaire, les activités menées ; et ces informations seront encore étoffées par décret.

En outre, l'un des amendements que nous avons adoptés permet aux SAFER de requérir auprès du préfet toute information nécessaire à son instruction, celui-ci contrôlant la finalité de la demande motivée de la SAFER et le lien avec le dossier instruit. Cette solution me parait satisfaisante et plus protectrice des données sensibles.

En conséquence, je suis défavorable aux amendements COM-4 rectifié, COM-26 rectifié bis , COM-32, COM-67 rectifié, COM-8 rectifié, COM-33 rectifié bis et COM-65, qui me paraissent trop peu cadrés en termes de protection des données des exploitants, même si je partage l'objectif poursuivi. En revanche, je suis favorable à l'amendement COM-68 rectifié, qui prévoit uniquement la transmission des informations du casier viticole informatisé et du registre parcellaire avec l'accord de l'exploitant.

Les amendements COM-4 rectifié et COM-8 rectifié sont retirés.

Les amendements COM-26 rectifié bis , COM-32, COM-67 rectifié, COM-33 rectifié bis et COM-65 ne sont pas adoptés.

L'amendement COM-68 rectifié est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 3

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - Comme je l'ai indiqué précédemment, l'amendement COM-103 prévoit des dates d'entrée séquencées pour les dispositions prévues à l'article 1 er et à l'article 3.

À l'article 1 er , le décret encadrera le délai de fixation des seuils de contrôle, puis l'entrée en vigueur de la procédure d'autorisation et la date des opérations ciblées. À l'article 3, la télédéclaration ne s'appliquera que pour les opérations postérieures à une date fixée par décret.

L'amendement COM-103 est adopté et devient article additionnel.

(N.B. : Pour des raisons légistiques, l'article additionnel ainsi créé a été déplacé après l'article 6 et est devenu article 7)

Article 4 (supprimé)

L'article 4 est supprimé .

Article 5

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-104 supprime l'article 5, qui élargit les motifs de refus d'autorisation d'exploiter.

D'abord, la question du contrôle des structures d'exploitation n'est pas directement liée au sujet principal de la proposition de loi. L'avenir du contrôle des structures et des autorisations d'exploiter devrait faire l'objet d'un travail de fond dédié, qui prendrait en compte l'ensemble des paramètres.

Ensuite, je suis opposé sur le fond à la mesure proposée.

La régulation du foncier agricole doit servir in fine un objectif de soutien à l'exploitation agricole, qui passe par la lutte contre la concentration et l'aide à l'installation des agriculteurs. Mais elle doit aussi passer avant tout par la préservation de la vocation et de l'usage agricole des terres. Je ne souhaite pas que nous préférions l'abandon d'une terre agricole à défaut de repreneur à sa reprise par une exploitation existante. Or, le préfet serait en mesure de refuser d'accorder une autorisation d'exploiter à un demandeur si la surface était jugée excessive, alors même qu'aucun autre repreneur ne se serait manifesté à l'issue de la publicité prévue par la loi.

S'il est justifié de préférer l'installation d'un agriculteur à l'agrandissement excessif d'une exploitation existante, la situation n'est pas identique lorsque l'exploitation n'a pas attiré de candidatures et qu'il s'agit de choisir entre une reprise ou un abandon de l'exploitation. Dans certains territoires français, il n'est pas toujours facile de trouver un repreneur lorsque l'agriculteur part en retraite. Ne rendons pas les choses plus difficiles.

Je propose donc la suppression de cet article, qui pourrait accélérer la déprise agricole.

L'amendement COM-104 est adopté.

L'article 5 est supprimé.

Après l'article 5

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-64 vise à modifier la définition de l'exploitant agricole, afin d'en exclure les personnes ayant recours au travail délégué. Sans doute aurait-il mérité sa place dans une loi dédiée, car il s'agit là d'un véritable débat dans le monde agricole. Ce texte ne vise pas à modifier qui est ou n'est pas un exploitant agricole et selon quels critères. Il est donc sans lien, direct ou indirect, avec les dispositions de ce texte.

Je vous propose donc le déclarer irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

L'amendement COM-64 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 5 bis (nouveau)

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-105 prévoit une évaluation du dispositif de contrôle des cessions de titres sociaux à l'expiration d'un délai de trois ans. Aucune étude d'impact satisfaisante du dispositif n'a été réalisée et nous manquons de chiffres sur le marché sociétaire en France.

Il me paraît donc utile, d'une part, d'évaluer prochainement la pertinence des différents seuils et critères retenus ; et de l'autre, d'organiser une remontée d'informations aux pouvoirs publics pour améliorer nos politiques publiques agricoles. Au terme de ce retour d'expérience, nous pourrons faire évoluer la loi, si nécessaire, pour apporter les ajustements pertinents. Cette clause de revoyure pourra aussi offrir l'opportunité d'aborder d'autres sujets de régulation foncière, pour lesquels une réforme est promise de longue date.

Je précise que cet amendement maintient la demande de rapport relatif au foncier agricole en Corse et en outre-mer introduite par l'Assemblée nationale.

L'amendement COM-105 est adopté.

L'article 5 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 5 bis (nouveau)

M. Olivier Rietmann , rapporteur . - L'amendement COM-24 n'a pas de lien direct ou indirect avec le texte. Il est irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

L'amendement COM-24 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 6 (supprimé)

L'article 6 est supprimé.

(N.B. : Pour des raisons légistiques, un amendement portant article additionnel initialement placé après l'article 3 a été déplacé après l'article 6 où il est devenu article 7)

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Mme Sophie Primas , président e. - Permettez-moi de vous indiquer le périmètre retenu au titre de l'article 45 de la Constitution.

En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, la commission des affaires économiques a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 20 octobre 2021, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 641 portant mesures d'urgence pour assurer la régulation de l'accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires.

Elle a considéré que sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé les dispositions relatives aux procédures de contrôle administratif applicables à la cession de parts ou d'action de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole ; aux seuils, critères et exemptions qui définissent le champ de ces procédures de contrôle ; à la procédure d'instruction et d'autorisation des demandes déposées dans le cadre de ces procédures de contrôle, ainsi qu'aux autorités chargées de conduire l'instruction des demandes et de prendre une décision sur celles-ci ; aux conditions pouvant être fixées à la délivrance d'une autorisation dans le cadre de ces procédures de contrôle, aux modalités d'exécution de ces conditions ainsi qu'aux modalités de contrôle de leur respect ; aux sanctions et aux recours applicables en cas de non-respect des obligations édictées dans le cadre de ces procédures de contrôle ; à l'articulation de ces procédures de contrôle avec les procédures d'autorisation existantes relevant du code rural et de la pêche maritime et poursuivant les mêmes objectifs ; aux données et informations accessibles aux autorités intervenant dans le cadre de ces procédures de contrôle ; à l'entrée en vigueur de ces procédures de contrôle ; à la faculté d'acquisition et de substitution des SAFER en ce qu'elles s'appliquent aux parts et actions de sociétés ; aux obligations déclaratives à l'égard des SAFER dans le cadre d'opérations de cession, en ce qui concerne tant la personne chargée de les réaliser que les modalités de déclaration et aux conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut refuser une demande d'autorisation d'exploiter délivrée dans le cadre du contrôle des structures.

Ne sont pas considérées comme susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions relatives à la définition de l'exploitant agricole et aux critères délimitant ce statut, ainsi qu'au travail délégué ; au champ du droit de préemption des SAFER dès lors qu'il ne concerne pas des cessions de parts et actions de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole ; aux procédures de contrôle applicables à la cession directe de foncier agricole ; aux procédures applicables dans le cadre d'une liquidation judiciaire et aux principes généraux de la politique agricole et du code rural et de la pêche maritime.

Les sorts des amendements examinés par la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :

TITRE I er : Contrôle du marché sociétaire

Article 1 er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RIETMANN, rapporteur

69

Décision du préfet de département pour accepter ou de refuser la demande d'autorisation préalable à une prise de participation sociétaire.

Adopté

M. REDON-SARRAZY

25

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - Dès le premier hectare.

Rejeté

M. de NICOLAY

53 rect. bis

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - Déterminé par le préfet de département.

Rejeté

M. RIETMANN, rapporteur

70

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - Consultations préalables.

Adopté

M. CUYPERS

44 rect.

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - 2 à 4 fois SAURM.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

71

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - 2 à 4 fois SAURM.

Adopté

Mme ESPAGNAC

109

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - 1 à 4 fois SAURM.

Rejeté

Mme ESPAGNAC

21

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - 1 à 4 fois SAURM.

Satisfait ou sans objet

M. REDON-SARRAZY

28

Modification des paramètres du seuil d'agrandissement significatif - 1 à 2 fois SAURM.

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

72

Seuil d'agrandissement significatif applicable aux sociétés étrangères ou aux sociétés détenant ou exploitant des terres situées dans plusieurs régions.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

73

Modifications rédactionnelles pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif - Remplacer plusieurs fois parcelles par biens immobiliers.

Adopté

M. Daniel LAURENT

1 rect.

Modifications rédactionnelles pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif - Remplacer une fois parcelles par biens immobiliers.

Retiré

M. REDON-SARRAZY

29

Modifications rédactionnelles pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif - Obligation de respecter les équivalences du SDREA.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

74

Pondérer le calcul du seuil d'agrandissement significatif en fonction du nombre d'associés exploitants.

Adopté

M. DUPLOMB

108

Pondérer le calcul du seuil d'agrandissement significatif en fonction du nombre d'associés exploitants.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

75

Modification des modalités de prise en compte des surfaces de bois et de forêts pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

76

Exclusion des surfaces de pelouses sèches dans le périmètre de calcul du seuil d'agrandissement significatif.

Retiré

M. LABBÉ

58 rect.

Abaissement du seuil de prise de contrôle d'une société à 25 % de la détention du capital.

Rejeté

M. REDON-SARRAZY

30

Abaissement du seuil de prise de contrôle d'une société à 25 % de la détention du capital.

Rejeté

M. LABBÉ

56

Exemption des donations de titres sociaux en deçà du quatrième degré de parenté.

Rejeté

M. LABBÉ

57

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - Suppression de l'exemption.

Rejeté

Mme ESTROSI SASSONE

14 rect.

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - 4e degré et exemptions supplémentaires.

Retiré

M. RIETMANN, rapporteur

77

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - 4e degré.

Adopté

M. GREMILLET

11 rect.

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions- 4e degré et suppression de la condition de participation.

Satisfait ou sans objet

M. PATRIAT

16

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - 4e degré, rachats intrafamiliaux et suppression de la condition de participation.

Satisfait ou sans objet

M. MENONVILLE

37 rect. bis

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - 4e degré et suppression des conditions.

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

78

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - Assouplissement de la condition de participation.

Adopté

M. CUYPERS

45

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - Suppression des conditions.

Satisfait ou sans objet

Mme FÉRAT

9 rect. bis

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - Suppression de la condition de participation.

Satisfait ou sans objet

M. MENONVILLE

38 rect. bis

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - Suppression de la condition de participation.

Satisfait ou sans objet

M. CUYPERS

40

Modification des paramètres relatifs à l'exemption des cessions intrafamiliales de part sociales ou d'actions - Suppression de la condition de participation.

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

79

Régime matrimonial du bénéficiaire de l'opération de prise de participation - Exemption des cessions entre personnes mariées et pacsées.

Adopté

M. CUYPERS

47

Régime matrimonial du bénéficiaire de l'opération de prise de participation - Suppression de la référence au régime matrimonial.

Retiré

M. RIETMANN, rapporteur

80

Exemption supplémentaire pour les cessions de titres sociaux entre associés ou actionnaires d'une même société.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

81

Exemption supplémentaire pour les cessions de titres sociaux de sociétés à destination de salariés ou d'apprentis.

Adopté

M. DUPLOMB

107

Exemption supplémentaire pour les cessions de titres sociaux de sociétés à destination de salariés ou d'apprentis - Délai de 9 ans et conditions supplémentaires.

Adopté

M. GREMILLET

13 rect.

Suppression de l'exemption des sociétés foncières agricoles disposant d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale.

Adopté

M. DUPLOMB

34 rect.

Suppression de l'exemption des sociétés foncières agricoles disposant d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale.

Adopté

M. MENONVILLE

42 rect. bis

Suppression de l'exemption des sociétés foncières agricoles disposant d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale.

Adopté

M. CUYPERS

43

Suppression de l'exemption des sociétés foncières agricoles disposant d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

82

Suppression de l'exemption des sociétés foncières agricoles disposant d'un agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale.

Adopté

M. LABBÉ

59

Modifications de la procédure de demande d'autorisation préalable - Réécriture globale.

Rejeté

M. RIETMANN, rapporteur

84

Modifications de la procédure de demande d'autorisation préalable - Encadrement du format de demande d'autorisation.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

85

Modifications de la procédure de demande d'autorisation préalable - Avis obligatoire consultations interprofessionnelles concernées.

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

86

Modifications de la procédure de demande d'autorisation préalable - Respect du SDREA comme critère d'instruction.

Adopté

M. PATRIAT

17

Modifications de la procédure de demande d'autorisation préalable - Avis obligatoire de certaines interprofessions concernées.

Rejeté

M. de NICOLAY

52 rect. bis

Ajout d'un critère de respect de la biodiversité lors de l'instruction de la demande d'autorisation.

Rejeté

M. RIETMANN, rapporteur

87

Possibilité pour la SAFER de demander ponctuellement au préfet l'accès à des données administratives nécessaires à l'instruction des dossiers

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

88

Encadrement du coût de la procédure d'autorisation pour le demandeur

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

89

Obligation d'entendre les parties à l'opération dans le cadre de l'instruction dès lors qu'elles en font la demande

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

90

Réécriture des dispositions relatives à l'instruction réalisée par les SAFER et création d'une procédure de renvoi pour instruction complémentaire

Adopté

M. LABBÉ

60

Inversion du principe de "silence vaut accord"

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

91

Suppression de l'intervention de la SAFER dans la notification aux parties des décisions administratives

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

92

Amendement rédactionnel

Adopté

Mme PLUCHET

48 rect. bis

Suppression de la mention des motifs d'opposition à la demande et transmission de l'avis de la SAFER avec la décision du préfet

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

93

Réécriture des dispositions relatives aux mesures compensatoires (Suppression de l'intervention obligatoire de la SAFER dans leur mise en oeuvre - Garantie de maintien des baux et contrats en cours - Prise en compte de l'impact de démembrements sur la viabilité économique de l'exploitation)

Adopté

M. LABBÉ

61

Suppression de la possibilité d'obtenir une autorisation subordonnée à des mesures compensatoires

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

94

Contribution des mesures compensatoires aux objectifs du SDREA

Adopté

M. GREMILLET

12 rect.

Consultation obligatoire de la CDOA avant décision du préfet sur les demandes d'autorisation

Rejeté

M. DUPLOMB

35 rect.

Consultation obligatoire de la CDOA avant décision du préfet sur les demandes d'autorisation

Rejeté

M. CUYPERS

41

Consultation obligatoire de la CDOA avant décision du préfet sur les demandes d'autorisation

Rejeté

M. CUYPERS

46

Consultation obligatoire de la CDOA avant décision du préfet sur les demandes d'autorisation

Rejeté

Mme ESTROSI SASSONE

15 rect.

Suppression de l'intervention obligatoire de la SAFER dans la mise en oeuvre des mesures compensatoires - Consultation obligatoire de la CDOA avant décision du préfet sur les demandes d'autorisation - Modifications relatives aux sanctions

Rejeté

M. RIETMANN, rapporteur

95

Faculté pour le préfet de saisir la CDOA sur tout dossier d'autorisation

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

96

Fixation par le préfet du délai de réalisation des engagements des parties à l'opération

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

83

Réduction  à six mois du délai de prescription de l'action en nullité qui peut être engagée par l'administration

Adopté

M. LABBÉ

62

Allongement à cinq ans du délai de prescription de l'action en nullité qui peut être engagée par l'administration

Satisfait ou sans objet

M. REDON-SARRAZY

31

Suppression de la possibilité de dispense d'autorisation d'exploiter au titre d'une autorisation du contrôle des cessions sociétaires

Adopté

M. LABBÉ

63

Suppression de la possibilité de dispense d'autorisation d'exploiter au titre d'une autorisation du contrôle des cessions sociétaires

Satisfait ou sans objet

M. RIETMANN, rapporteur

99

Interdiction temporaire d'intervention commerciale des SAFER sur les biens des sociétés dont elles ont instruit la procédure d'autorisation

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

100

Rôle des comités techniques des SAFER dans la procédure de contrôle des cessions de titres sociaux - Mesures de transparence de leurs travaux

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 1 er

M. GROSPERRIN

50 rect.

Saisine obligatoire de la SAFER par le juge judiciaire lors d'une liquidation judiciaire en vue de l'évaluation des biens

Irrecevable (48-3)

Mme FÉRAT

7 rect. bis

Extension du champ de la procédure de contrôle aux cessions de biens détenus en nue-propriété

Retiré

Mme ESPAGNAC

19

Extension du champ du droit de préemption des SAFER sur les parts et actions de sociétés

Rejeté

M. GROSPERRIN

49 rect.

Extension du droit de préemption des SAFER aux biens visés par une liquidation judiciaire

Irrecevable (48-3)

TITRE II : DISPOSITIONS DIVERSES D'ADAPTATION

Article 2

M. RIETMANN, rapporteur

101

Suppression de l'article

Adopté

Article 3

Mme ESPAGNAC

18

Notification à la SAFER par parcelle plutôt que par opération

Rejeté

M. Daniel LAURENT

2 rect. bis

Clarification de la personne chargée de réaliser l'obligation déclarative à la SAFER dans le cas d'opérations sociétaires

Adopté

M. MENONVILLE

22 rect. ter

Clarification de la personne chargée de réaliser l'obligation déclarative à la SAFER dans le cas d'opérations sociétaires

Adopté

M. GREMILLET

51 rect. bis

Clarification de la personne chargée de réaliser l'obligation déclarative à la SAFER dans le cas d'opérations sociétaires

Adopté

M. RIETMANN, rapporteur

102

Clarification de la personne chargée de réaliser l'obligation déclarative à la SAFER dans le cas d'opérations sociétaires

Adopté

Mme FÉRAT

6 rect.

Prise en compte de la plus grande superficie détenue ou exploitée pour déterminer la SAFER à qui doit être notifiée l'opération

Retiré

M. Daniel LAURENT

3 rect.

Soumission des opérations notifiées par les notaires à l'obligation de télédéclaration via les SAFER

Adopté

M. MENONVILLE

23 rect. bis

Soumission des opérations notifiées par les notaires à l'obligation de télédéclaration via les SAFER

Adopté

M. Daniel LAURENT

5 rect. bis

Entrées en vigueur et dispositions transitoires

Retiré

Mme ESPAGNAC

106

Abaissement du seuil par défaut prévu par l'amendement 5 rect.

Rejeté

M. MENONVILLE

36 rect. bis

Entrées en vigueur et dispositions transitoires

Rejeté

M. GREMILLET

66 rect.

Entrées en vigueur et dispositions transitoires

Retiré

M. Daniel LAURENT

4 rect.

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Retiré

M. MENONVILLE

26 rect. bis

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Rejeté

M. REDON-SARRAZY

32

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Rejeté

M. GREMILLET

67 rect.

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Rejeté

M. Daniel LAURENT

8 rect.

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Retiré

M. MENONVILLE

33 rect. bis

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Rejeté

M. GREMILLET

68 rect.

Accès des SAFER au casier viticole informatisé et au registre parcellaire par convention et après accord des exploitants

Adopté

M. LABBÉ

65

Accès des SAFER aux bases de données administratives ou de sécurité sociale

Rejeté

Article(s) additionnel(s) après Article 3

M. RIETMANN, rapporteur

103

Entrée en vigueur des différentes dispositions de la proposition de loi

Adopté

Article 5

M. RIETMANN, rapporteur

104

Suppression de l'article

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 5

M. LABBÉ

64

Modification de la définition de l'exploitant agricole pour en exclure les personnes ayant recours au travail délégué

Irrecevable (48-3)

Article 5 bis (nouveau)

M. RIETMANN, rapporteur

105

Évaluation à trois ans du contrôle des cessions de parts sociétaires

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 5 bis (nouveau)

Mme ESPAGNAC

24

Objectifs et caractère d'intérêt général de l'agriculture

Irrecevable (48-3)

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 8 ( * ) .

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 9 ( * ) .
Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 10 ( * ) . Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 11 ( * ) .

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires économiques a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 20 octobre 2021, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 641 (2020-2021) portant mesures d'urgence pour assurer la régulation de l'accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires.

Elle a considéré que sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé les dispositions relatives :

- aux procédures de contrôle administratif applicables à la cession de parts ou d'action de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole ;

- aux seuils, critères et exemptions qui définissent le champ de ces procédures de contrôle ;

- à la procédure d'instruction et d'autorisation des demandes déposées dans le cadre de ces procédures de contrôle, ainsi qu'aux autorités chargées de conduire l'instruction des demandes et de prendre une décision sur celles-ci ;

- aux conditions pouvant être fixées à la délivrance d'une autorisation dans le cadre de ces procédures de contrôle, aux modalités d'exécution de ces conditions ainsi qu'aux modalités de contrôle de leur respect ;

- aux sanctions et aux recours applicables en cas de non-respect des obligations édictées dans le cadre de ces procédures de contrôle ;

- à l'articulation de ces procédures de contrôle avec les procédures d'autorisation existantes relevant du code rural et de la pêche maritime et poursuivant les mêmes objectifs ;

- aux données et informations accessibles aux autorités intervenant dans le cadre de ces procédures de contrôle ;

- à l'entrée en vigueur de ces procédures de contrôle ;

- à la faculté d'acquisition et de substitution des SAFER en ce qu'elles s'appliquent aux parts et actions de sociétés ;

- aux obligations déclaratives à l'égard des SAFER dans le cadre d'opérations de cession, tant en ce qui concerne la personne chargée de les réaliser qu'en ce qui concerne les modalités de déclaration ;

- aux conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut refuser une demande d'autorisation d'exploiter délivrée dans le cadre du contrôle des structures.

Ne sont pas considérées comme susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions relatives, entre autres :

- à la définition de l'exploitant agricole et aux critères délimitant ce statut, ainsi qu'au travail délégué ;

- au champ du droit de préemption des SAFER dès lors qu'il ne concerne pas des cessions de parts et actions de sociétés détenant ou exploitant du foncier agricole ;

- aux procédures de contrôle applicables à la cession directe de foncier agricole ;

- aux procédures applicables dans le cadre d'une liquidation judiciaire ;

- aux principes généraux de la politique agricole et du code rural et de la pêche maritime.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 5 octobre 2021

- Fédération nationale des SAFER : M. Emmanuel HYEST , président, M. Michaël RIVIER , directeur juridique, Mme Sabine AGOFROY , responsable relations publiques, affaires européennes et internationales.

- Association nationale des établissements publics fonciers locaux : M. Arnaud PORTIER , secrétaire général, Mme Charlotte BOEX , chargée de mission.

- Terre de liens : M. Tanguy MARTIN , chargé de mission débat public.

- Assemblée permanente des chambres d'agriculture : M. François BEAUPÈRE , second vice-président - président de la Chambre d'agriculture des Pays-de-la-Loire, M. Enzo REULET , chargé de missions - Affaires publiques, France, Europe, International - Direction Communication et Relations publiques.

- Sous-préfecture de Beaune : Mme Myriel PORTEOUS , sous-préfète.

- Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) de Bourgogne-Franche-Comté : Mme Anne BRONNER , directrice adjointe.

- Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement : M. Romain MELOT , directeur de recherche, directeur d'unité adjoint de l'Unité mixte de recherche (UMR) « Sciences pour l'action et le développement : activités, produits, territoires » (SADAPT), M. Laurent PIET , ingénieur de recherche à l'UMR « Laboratoire d'études et de recherches en économie sur les structures et marchés agricoles, ressources et territoires » (SMART-LERECO), M. Marc GAUCHÉE , conseiller du P-DG pour les relations parlementaires et institutionnelles.

Mercredi 6 octobre 2021

- Table ronde

Conseil supérieur du notariat : M. François DEVOS , directeur des affaires juridiques.

Fédération nationale de l'Immobilier : M. Jean-Marc TORROLLION , président, M. Olivier RAFFIN , président de la commission « Affaires rurales et forestières », Mme Bénédicte ROUAULT , chef de cabinet du président.

Conseil national de l'expertise foncière agricole et forestière : M. Jean-Luc BARTMANN , président, M. Thierry POPOT , vice-président,

- Table ronde

Coordination rurale : M. Christian CONVERS , membre, en charge des questions du foncier.

Fédération nationale de la propriété privée rurale : M. Olivier DE SCHONEN , administrateur.

Jeunes Agriculteurs : M. Maxime BUIZARD-BLONDEAU , membre du conseil d'administration, M. Thomas DEBRIX , responsable du service communication et affaires publiques, Mme Mathilde ROBY , juriste.

Confédération paysanne : Mme Cécile MURET , responsable de la commission « Foncier ».

Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles : M. Michel THOMAS , chef de service « Territoires », M. Guillaume LIDON , responsable des affaires publiques, M. Bertrand LAPALUS , agriculteur, élu en charge du dossier « foncier ».

Mouvement rural de la jeunesse chrétienne : M. Cédric LETOURNEUR , secrétaire national - Agriculture et écologie, Mme Lucie BOZONNET , secrétaire générale.

Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef) : M. Pierre THOMAS , président, Mme Sophie BEZEAU , directrice Modef Nouvelle-Aquitaine.

- Ministère de l'agriculture et de l'alimentation : M. Benjamin BALIQUE , conseiller forêt, agroécologie, biodiversité, M. Nicolas MAZIERES , conseiller politique, chargé des relations avec le Parlement, M. Baptiste MEUNIER , chef du bureau foncier - service Compétitivité et performance environnementale - sous-direction Performance environnementale et valorisation des territoires.

- Direction départementale des territoires de la Haute-Saône : M. Simon DEVISME , chef du service économie et politique agricoles.

- Table ronde

Drouot avocats : M. Bernard MANDEVILLE , avocat, Mme Marie MANDEVILLE , avocat à la Cour, Mme Marie SOYER , avocat à la Cour.

Association française de droit rural : M. François ROBBE , président.

Anavor : M. Jean-Livier CABOCEL , avocat au barreau de Mâcon, vice-président de l'Anavor, Mme Corinne JALADE , avocat au barreau d'Albi, administrateur de l'Anavor en charge de sa commission foncière, Mme Blandine DUMONTET , avocat au Barreau de Villefranche-sur-Saône, membre de l'Anavor en charge de la commission foncière.

Jeudi 7 octobre 2021

- Direction générale du Trésor : Mme Marie-Anne LAVERGNE , cheffe du bureau « Contrôle des investissements étrangers en France », Mme Jennifer EL-BAZ , adjointe au chef de bureau Multicom 4, Mme Catherine MANSOUX , adjointe au chef de bureau BancFin 4.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-641.html


* 1 Contribution écrite à la suite de l'audition du rapporteur du 5 octobre 2021.

* 2 Ibid.

* 3 Conseil d'État, 5 e - 4 e chambres réunies, 31 mars 2017, 392875, Inédit au recueil Lebon.

* 4 Décision DC n° 2016-741 du 8 décembre 2016.

* 5 Décision DC n° 2017-748 du 16 mars 2017

* 6 Décision du Conseil constitutionnel n° 2017-748 DC du 16 mars 2017 relative à la loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle.

* 7 Rapport d'information n° 616 (2016-2017) de MM. Thani Mohamed Soilihi, Daniel Gremillet et Antoine Karam, fait au nom de la Délégation sénatoriale aux outre-mer, déposé le 6 juillet 2017, Conflits d'usage en outre-mer - un foncier disponible rare et sous tension .

* 8 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 9 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 10 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 11 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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