N° 300

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 31 janvier 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire (procédure accélérée) et sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (procédure accélérée),

Par M. Pascal MARTIN,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Didier Mandelli, premier vice-président ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Hervé Gillé, Rémy Pointereau, Mme Nadège Havet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Yves Roux, Cédric Chevalier, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Audrey Bélim, MM. Pascal Martin, Jean-Claude Anglars, secrétaires ; Mme Jocelyne Antoine, MM. Jean Bacci, Pierre Barros, Jean-Pierre Corbisez, Stéphane Demilly, Gilbert-Luc Devinaz, Franck Dhersin, Alain Duffourg, Sébastien Fagnen, Jacques Fernique, Fabien Genet, Éric Gold, Daniel Gueret, Mme Christine Herzog, MM. Joshua Hochart, Olivier Jacquin, Damien Michallet, Georges Naturel, Louis-Jean de Nicolaÿ, Saïd Omar Oili, Alexandre Ouizille, Clément Pernot, Mme Marie-Laure Phinera-Horth, M. Bernard Pillefer, Mme Kristina Pluchet, MM. Hervé Reynaud, Pierre Jean Rochette, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Simon Uzenat, Mme Sylvie Valente Le Hir, M. Michaël Weber.

Voir les numéros :

Sénat :

229, 230, 296, 301 et 302 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a examiné, le 31 janvier 2024, le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire, et le projet de loi organique conjoint, sur le rapport de Pascal Martin.

Pour l'examen de ces textes, la commission s'est fixé une priorité essentielle : maintenir notre sûreté nucléaire au niveau d'exigence le plus élevé possible, en l'adaptant aux enjeux de notre décennie et de celles à venir. Elle a considéré qu'un système de sûreté irréprochable et une transparence préservée, voire accrue, étaient des conditions sine qua non de l'acceptabilité sociale du nucléaire, sans laquelle la relance de la filière ne pourrait pas se faire.

Estimant que le projet du gouvernement de fusion entre l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection de sûreté nucléaire (IRSN) peut permettre de renforcer le système de sûreté français dans un contexte « hors normes » marqué par la relance de la filière nucléaire, la commission a toutefois considéré que le texte qui lui était soumis présentait, en l'état, certains risques appelant à des ajustements de plusieurs ordres. Elle a ainsi adopté, principalement sur la proposition du rapporteur et du rapporteur pour avis, 51 amendements pour :

préserver la distinction entre expertise et décision, tout en renforçant l'expertise tierce et plurielle par la consécration des groupes permanents d'experts ;

garantir un niveau de transparence élevé ;

prévenir les conflits d'intérêts, notamment pour préserver les capacités de recherche ;

mieux associer le Parlement et la société civile.

I. UN TEXTE PRÉSENTANT DES AVANTAGES CERTAINS DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR LA RELANCE DE LA FILIÈRE NUCLÉAIRE

A. UN PROJET DE LOI VISANT À RENFORCER LE SYSTÈME DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE FRANÇAIS POUR ACCOMPAGNER UN CHANTIER D'UNE AMPLEUR INÉDITE

1. Une sûreté nucléaire française duale actuellement structurée autour de l'ASN et de l'IRSN

En France, la sûreté nucléaire1(*), assurée à titre principal par l'exploitant, est contrôlée par deux acteurs distincts :

- l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), une autorité administrative indépendante (AAI) chargée de prendre les décisions individuelles et réglementaires ;

- l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), un établissement public industriel et commercial (EPIC) qui exerce des missions d'expertise et de recherche dans le domaine de la sûreté, mais aussi de la sécurité des installations (prévention et lutte contre la malveillance) et de la radioprotection (prévention contre les effets néfastes que peuvent provoquer les rayonnements ionisants).

Les quatre piliers de la sûreté nucléaire

Il existe une séparation fonctionnelle claire entre les deux entités. L'ASN est chargée de la décision ; pour la plupart des dossiers nécessitant une expertise (environ 300 par an), elle s'appuie sur l'IRSN qui dispose de l'essentiel de l'expertise, soutenue par ses activités de recherche. Cette séparation fonctionnelle n'empêche pas une concertation permanente entre expertise et décision.

Fruit d'une longue histoire, ce système est internationalement reconnu pour sa qualité technique, son indépendance et sa capacité à rendre compte au public de manière transparente.

Processus de décision classique de l'ASN

2. Un projet visant à adapter la gouvernance de la sûreté pour faire face à une charge de travail inédite

À la surprise générale, la fusion entre l'ASN et l'IRSN avait été proposée par le Gouvernement dans le cadre de l'examen du projet de loi « accélération du nucléaire » à l'Assemblée nationale, début 2023. Cette proposition avait été rejetée par les députés. Malmené, le Parlement avait réagi le 25 avril 2023 par une saisine de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst). Les conclusions du rapport de l'Office, publié en juillet dernier, ont alimenté le projet de loi déposé par le Gouvernement en décembre 2023.

Ce projet de loi prévoit le démantèlement de l'IRSN, à compter du 1er janvier 2025. L'essentiel de ses missions et salariés (1 600 environ) serait transféré vers l'ASN, qui deviendrait l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), gardant le statut d'AAI. L'ASNR emploierait des salariés de droit privé issus de l'IRSN et des fonctionnaires et contractuels issus de l'ASN.

Dosimètre à lecture différée

Source : IRSN

Les activités commerciales relatives aux dosimètres passifs seraient transférées au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) (environ 40 salariés) ; quant à l'expertise en matière de sûreté des installations de défense et de sécurité des installations civiles, elles seraient exercées par le ministère des Armées (environ 140 salariés).

L'objectif de la réforme affiché par le Gouvernement est d'adapter le système de sûreté à un contexte « hors normes », inédit dans l'histoire du nucléaire français.

Notre système de sûreté fait face au chantier inédit du programme nucléaire gouvernemental

- poursuite de l'exploitation du parc nucléaire existant au-delà de 50 ans voire de 60 ans ;

- lancement d'un programme de construction de trois paires de réacteurs EPR2 et mise à l'étude de huit réacteurs supplémentaires ;

- soutien à la recherche et à l'innovation dans les technologies nucléaires (notamment les petits réacteurs modulaires (SMR)) ;

- projet Cigéo (stockage des déchets radioactifs en couche géologique profonde) et projet de piscine d'entreposage centralisé d'EDF ;

- prévention des risques liés notamment au changement climatique. 

Prochaines échéances d'expertise et de décision pour l'ASN et l'IRSN

Source : IRSN

Schéma de répartition globale proposée par le projet de loi des activités
de l'ASN et de l'IRSN

B. LES AVANTAGES ATTENDUS DE LA RÉFORME

Dans le cadre des consultations engagées, le rapporteur a souhaité effectuer une instruction, « à charge et à décharge », qui l'a conduit à identifier plusieurs avantages à la refonte proposée.

1. Une efficacité accrue des procédures, dans un environnement caractérisé par une pénurie des compétences et dans un contexte industriel inédit

Les frictions dans les échanges entre l'ASN et l'IRSN et les différences de priorisation entre les deux instances génèrent aujourd'hui des délais supplémentaires dans la prise de décision. L'organisation actuelle pourrait donc limiter la capacité à faire face aux flux de demandes. Sans réforme, le maintien de notre système de sûreté nucléaire au niveau exemplaire qui est actuellement le sien ne serait donc pas garanti.

Dans un contexte de tension sur les ressources humaines, la nouvelle organisation va permettre d'éviter la dispersion des compétences techniques et scientifiques rares, ce que des mesures budgétaires et salariales ne pourront pas faire seules.

2. Une adaptation aux enjeux contemporains de la sûreté nucléaire

Un foisonnement technologique inédit dans l'histoire de la filière : les start-ups françaises devront être accompagnées pour élaborer les référentiels de sûreté des petits réacteurs (SMR) et espérer remporter la course technologique engagée contre les autres puissances nucléaires. La fusion des deux entités contribuera à la rationalisation des compétences critiques et simplifiera la relation avec les start-ups (interlocuteur unique). Enfin, une Autorité unifiée disposera d'un plus grand pouvoir d'influence dans les instances internationales pour défendre une vision française de la sûreté et offrir, par là même, un avantage compétitif à la filière nationale par rapport aux rivales étrangères.

Les menaces induites par le réchauffement climatique : le grand défi du siècle, en matière de sûreté nucléaire, sera l'adaptation des parcs existants et à venir au réchauffement climatique. Regrouper l'ensemble des savoir-faire nécessaires, actuellement dispersés au sein de l'ASN et de l'IRSN, contribuera à armer notre pays face à ce défi.

3. Une amélioration de la lisibilité et de l'opérationnalité de la réponse en cas de crise

Pour assurer leurs missions en cas de crise, l'IRSN et l'ASN disposent chacun d'un centre de crise, d'une organisation spécifique et de moyens propres. Deux principaux bénéfices peuvent être attendus de la fusion à cet égard :

- la mise en place d'un interlocuteur unique, identifié par les services de l'État comme expert dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ;

la fluidification des échanges entre les équipes en charge de l'expertise et celles chargées de proposer des actions de protection de la population aux autorités.

4. Une clarification de la communication

Émanant de deux institutions différentes, la communication a pu donner lieu, par le passé, à des confusions préjudiciables. La réforme permettra à la nouvelle Autorité de parler d'une « voix commune » et partant, facilitera l'identification par le public de l'autorité décisionnaire.

5. Un renforcement potentiel de l'attractivité des instances de sûreté nucléaire

Possibilité d'être recruté sous différents statuts, d'en changer, avec par exemple la mise en place d'un concours réservé ; renforcement des opportunités de mobilité professionnelle, y compris géographique, au sein de l'Autorité : les paramètres retenus par le Gouvernement constitueront des opportunités pour rendre la future Autorité plus attractive.

Toutefois, les incertitudes causées par le projet de loi ont malheureusement d'ores et déjà provoqué des départs. Des réponses doivent donc être rapidement apportées aux salariés, ainsi qu'aux agents de l'ASN, pour leur permettre de se projeter dans la nouvelle organisation.

En tout état de cause, une part de la réaction face au déficit d'attractivité des instances de sûreté réside dans l'augmentation des rémunérations et des moyens humains, sujet à inscrire dans la durée que le Gouvernement n'a pas, à ce jour, voulu prendre suffisamment au sérieux, en dépit des nombreuses alertes parlementaires.

La relance de la filière et la prolongation de la durée de vie du parc actuel conduisent déjà à accroître la charge de travail des instances de sûreté : il serait donc tentant de renoncer à la réforme, pour ne pas déstabiliser le système. Mais la pression continuera de s'amplifier dans les années à venir et il sera alors trop tard pour bénéficier des avantages attendus de la réforme. Comme l'a noté le rapport précité de l'Opecst, au regard du calendrier de travail, une fenêtre d'opportunité s'offre au législateur, mais pourrait rapidement se refermer : s'il faut agir, il faut le faire dès à présent.

II. DISTINCTION EXPERTISE-DÉCISION, TRANSPARENCE, MAINTIEN DES ACTIVITÉS DE RECHERCHE, ASSOCIATION DU PARLEMENT : DES CRAINTES QUI APPELENT DES AJUSTEMENTS

Estimant que le projet de fusion entre l'ASN et l'IRSN pourrait permettre de renforcer le système de sûreté français dans un contexte « hors normes », la commission a toutefois considéré que le projet de loi présentait, en l'état, certains risques appelant à des ajustements de plusieurs ordres.

A. DISTINCTION EXPERTISE-DÉCISION : UN RISQUE DE RECUL NÉCESSITANT UN AJUSTEMENT DU TEXTE

1. Distinction expertise-décision : un recul affaiblissant le système de sûreté

La distinction expertise-décision est au coeur de la qualité et de la crédibilité du système de sûreté :

- d'une part, car une séparation insuffisante risque de placer l'expertise sous l'influence de la décision - les conclusions de l'expertise seraient orientées dans le sens de la décision - ou inversement - la décision, censée tenir compte de l'expertise mais également d'enjeux extrinsèques comme l'approvisionnement en électricité du pays, pourrait ne pas s'autonomiser suffisamment des avis scientifiques qui lui sont présentés ;

- d'autre part, car démontrer la sûreté, c'est confronter le doute : ce n'est pas l'affirmation de certitudes qui rassure le public sur l'état de la sûreté nucléaire, mais la transparence sur les débats internes au système de sécurité nucléaire.

À cet égard, le projet de loi présente le risque, en l'état d'un recul, d'abord sur la méthode, en renvoyant le sujet au règlement intérieur de la future Autorité, et surtout sur le fond, en prévoyant une distinction des « processus » d'expertise et de décision uniquement dans le cas d'une prise de décision par le collège (soit 30 dossiers par an, contre 300 dossiers aujourd'hui).

2. Une distinction préservée, ainsi qu'une expertise tierce et plurielle renforcée par la consécration des groupes permanents d'experts

La commission a donc adopté un amendement COM-11 rééquilibrant le projet, tout en préservant la fluidité permise par la fusion des deux entités. Cet amendement :

étend le champ de la distinction à l'ensemble des dossiers faisant l'objet d'une expertise, soit environ 300 dossiers par an (y compris le redémarrage des centrales nucléaires, qui auraient été exclues du champ d'application dans le texte initial) ;

- propose une distinction des « responsabilités », plutôt que des « processus » : la personne responsable de l'expertise devra être distincte de la personne ou des personnes responsables de l'élaboration de la décision et de la prise de décision. Les modalités organisationnelles de distinction et d'interaction des personnels en charge de l'expertise et de la décision seront fixées par le règlement intérieur.

La commission a également souhaité donner aux groupes permanents d'experts (GPE) une assise juridique forte (amendements COM-5 et COM-85), afin de renforcer leur rôle dans la future ASNR. Ces groupes sont constitués de spécialistes nommés en raison de leurs compétences et de leur expérience professionnelle. Ils contribuent au processus d'expertise en apportant un regard critique et des compétences spécialisées : ce croisement d'expertises garantit une évaluation impartiale ainsi qu'une prise de décision fondée sur les meilleures pratiques et les connaissances les plus récentes. Le développement d'une expertise tierce et plurielle par la constitution de comités consultatifs constitue au demeurant une tendance partagée par d'autres modèles étrangers (États-Unis, Finlande et Royaume-Uni) examinés par l'étude de législation comparée du Sénat, réalisée à la demande du rapporteur.

B. TRANSPARENCE DE LA NOUVELLE AUTORITÉ : UNE EXIGENCE À MAINTENIR

1. Transparence de la nouvelle autorité : un manque de garanties qui interpelle

Depuis l'accident nucléaire de Tchernobyl, les crises sanitaires des années 1990 et, plus récemment, la pandémie de Covid-19, la reddition des comptes concernant l'expertise scientifique mise à disposition des autorités politiques et administratives est essentielle ; elle conditionne la confiance du public envers les institutions chargées d'assurer leur protection et celle de leur environnement. La crédibilité du système de sûreté nucléaire repose également sur cette exigence de transparence, qui apparaît indispensable pour assurer l'acceptabilité de la relance de l'atome dans notre pays.

En renvoyant au règlement intérieur les modalités de publication des résultats des activités d'expertise de la nouvelle ASNR, le projet de loi présente pourtant des risques de recul en la matière, puisqu'il n'est pas certain que le degré d'exigence publication sera conservé, et encore moins qu'il sera renforcé.

2. Un niveau exigeant de transparence garanti

La commission a adopté un amendement COM-4 intégrant à la loi le principe de publication des résultats d'expertise de l'ASNR. Cette publication concernera également les avis des GPE, comme le veut la pratique actuelle. La consécration législative du principe de publication de l'expertise conduira à maintenir un niveau de transparence équivalent à celui atteint par le système actuel.

C. ACTIVITÉS DE RECHERCHE : DES RISQUES DE CONFLITS D'INTÉRÊTS À PRÉVENIR POUR MAINTENIR LES CAPACITÉS DE LA FUTURE AUTORITÉ

1. Activités de recherche : un risque d'affaiblissement de la future autorité ?

Le projet de loi comporte des risques pour la conduite des activités de recherche de la future ASNR, activités qui sont le socle de l'expertise en matière de sûreté et de radioprotection. Les acquis de l'IRSN - sa notoriété et sa visibilité dans le monde de la recherche - devront être préservés. En particulier, l'ASNR devra poursuivre la collaboration engagée par l'IRSN avec les industriels du secteur nucléaire, indispensable à la recherche en sûreté nucléaire. Ce n'est pas chose évidente car l'Autorité sera également en charge de contrôler ces exploitants...

2. Prévenir les conflits d'intérêts pour préserver les capacités de recherche

Pour prévenir ces conflits d'intérêts, et préserver la capacité de la future Autorité à conclure les partenariats indispensables à la bonne conduite des activités de recherche, la commission a adopté un amendement COM-13 permettant à son président, membre du collège décisionnaire, de donner délégation de pouvoirs aux services de l'Autorité pour la signature de conventions, afin de faciliter son déport sur les conventions signées avec les industriels.

Des amendements COM-25, COM-32 rect., et COM-78 prévoient par ailleurs la création d'une commission de déontologie : elle sera chargée de prévenir ces conflits d'intérêts, ainsi que ceux pouvant découler du rapatriement d'activités commerciales au sein de l'ASNR. La commission de déontologie veillera également au respect du principe de distinction expertise/décision et à la transparence des publications (voir supra).

D. ASSOCIER LE PARLEMENT ET LA SOCIÉTÉ CIVILE

De nombreux sujets majeurs seraient renvoyés au règlement intérieur de la future Autorité. Ce choix du gouvernement est justifié par la nécessité d'assurer une plus grande souplesse dans le fonctionnement de l'Autorité, qui doit disposer d'une autonomie dans l'organisation de ses services. Une reddition des comptes sera cependant nécessaire, pour assurer que la lettre du règlement soit conforme à l'intention du législateur.

C'est l'objectif des amendements COM-17 et COM-83 qui prévoient que le projet de règlement intérieur sera présenté et que les projets de modification seront transmis à l'Opecst, qui dispose d'une expertise reconnue dans le domaine de la sûreté nucléaire, au Haut Comité pour la transparence et la sécurité nucléaire (HCTISN), qui rassemble l'ensemble des parties prenantes du nucléaire, et à l'Anccli, l'association nationale des comités et commissions locales d'information, qui a pour mission d'assurer l'information du public et la concertation en matière nucléaire.

EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI

TITRE IER
L'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection
CHAPITRE IER
Missions et fonctionnement
de l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection
Section 1
Dispositions modifiant le code de l'environnement
Article 1er
Création de la future autorité de contrôle en sûreté nucléaire et en radioprotection fusionnant les compétences de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

Cet article vise à instituer une nouvelle autorité, l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), qui fusionnerait les deux organisations actuelles de la sûreté nucléaire, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

La commission a adopté cinq amendements qui visent à conforter la sécurité juridique du texte.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

I. L'organisation duale de la sûreté nucléaire structurée autour de l'ASN et de l'IRSN est remise en question dans un contexte de relance du nucléaire

A. Définitions

L'article L. 591-1 du code de l'environnement définit la sûreté nucléaire comme « l'ensemble des dispositions techniques et des mesures d'organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l'arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base ainsi qu'au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d'en limiter les effets ».

La radioprotection renvoie à « la protection contre les rayonnements ionisants », tandis que la sécurité des installations nucléaires désigne la prévention et la lutte contre les actes de malveillance.

Enfin, le même article L. 591-1 définit la sécurité nucléaire comme englobant la sûreté nucléaire, la radioprotection, la prévention et la lutte contre les actes de malveillance ainsi que les actions de sécurité civile en cas d'accident.

B. L'évolution de la sûreté nucléaire en France : une longue marche vers l'indépendance et la transparence2(*)

a) Depuis le plan Messmer, l'organisation de la sûreté nucléaire en France est duale

L'émergence de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France coïncide avec les débuts expérimentaux du nucléaire en France. Le Commissariat à l'énergie atomique (CEA)3(*), initialement seul exploitant, dispose d'un service de protection contre les radiations (SPR) à partir de 1951, puis à partir de 1960, d'une commission de sûreté des installations atomiques (CSIA), chargée de prendre toutes les décisions relatives à la sûreté.

L'ouverture des premières centrales nucléaires, exploitées par Électricité de France (EDF), remet en cause cette organisation. Les tensions entre le CEA et EDF conduisent au remplacement en 1967 de la CSIA par un groupe ad hoc, dont les membres sont nommés conjointement par le ministre de l'industrie et le ministre délégué chargé de la recherche scientifique.

En 1974, le Premier ministre Pierre Messmer annonce faire le choix du « tout nucléaire » pour la France dans un contexte de choc pétrolier. Entre 1971 et 1986, un parc de 58 réacteurs nucléaires est construit.

La sûreté nucléaire s'adapte à l'industrialisation du nucléaire : le Service central de sûreté des installations nucléaires (SCSIN), rattaché au ministère de l'industrie, est chargé à partir de 1973 de l'élaboration de la réglementation technique et du contrôle en s'appuyant sur le CEA, qui joue un rôle d'expert technique et dispose, depuis 1970, d'un département de sûreté nucléaire (DSN).

Le CEA assume ainsi simultanément un rôle d'expert en sûreté et d'exploitant d'installations nucléaires. Afin d'assurer l'indépendance de l'expertise, le DSN devient en 1976 l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN), un institut distinct mais toujours rattaché au CEA.

Les catastrophes de Three Mile Island en 1979 et de Tchernobyl en 1986 ont renforcé la nécessité d'un contrôle plus indépendant. En 1991, le SCSIN est transformé en une direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN), placée sous l'autorité conjointe des ministres chargés de l'énergie et de l'environnement.

b) La création de l'ASN et de l'IRSN vise à renforcer l'indépendance de la sûreté nucléaire

Le système de contrôle actuel, fondé sur une autorité indépendante et un expert distinct du CEA, émerge au début des années 2000.

D'une part, la loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale prévoit la fusion, effective en 2002, de l'IPSN et de l'Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) au sein de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), expert technique distinct du CEA.

D'autre part, la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire transforme la DSIN en une Autorité de sûreté nucléaire (ASN), organisme de contrôle ayant le statut d'autorité administrative indépendante.

Évolution de la gouvernance de la sûreté nucléaire en France depuis le plan Messmer

En juin 2014, la Cour de comptes a pointé des « relations difficiles » durant les premières années d'existence de l'ASN et l'IRSN, en raison de priorités divergentes et d'une absence de coordination quant à la communication des deux organisations4(*).

Ces difficultés initiales de coordination paraissent aujourd'hui résorbées, de l'avis des principales parties prenantes, en raison d'une concertation permanente entre l'autorité et l'expert5(*).

L'épisode de crise de la sûreté liée à la corrosion sous contrainte dans les circuits d'injection de sécurité (RIS) et les circuits de refroidissement à l'arrêt révélé en octobre 2021 illustre le bon fonctionnement du système dual de sûreté. De l'avis des principales parties prenantes, les échanges techniques sur le sujet entre ASN et IRSN ont été quotidiens tandis que l'instruction du dossier a été réalisée en binôme par l'ASN et par l'IRSN, ce qui a permis à l'exploitant, EDF, d'avoir un interlocuteur unique.

C. La sécurité nucléaire aujourd'hui : un système dual, tripartite ou quadripartite ?

L'organisation de la sécurité nucléaire en France est tour à tour qualifiée de duale, tripartite ou quadripartite : duale en raison de la coexistence d'une autorité de contrôle (ASN) et d'un institut d'expertise et de recherche (IRSN), tripartite en raison du rôle prépondérant de l'exploitant dans la sûreté, voire quadripartite en raison de l'émergence d'un quatrième acteur/d'une quatrième partie prenante du secteur, la société civile.

a) L'exploitant : le premier responsable de la sûreté nucléaire

Le premier principe de la sûreté nucléaire défini par l'Agence international de l'énergie atomique est que « la responsabilité première en matière de sûreté incombe à l'individu ou à l'organisme responsable de toute installation ou activité entraînant des risques radiologiques »6(*).

En France, ce principe de responsabilité première de l'exploitant se traduit par la primauté accordée au dialogue technique : l'exploitant assure la sûreté de ses activités, dans un dialogue avec l'autorité qui contrôle la bonne adéquation des mesures prises en s'appuyant notamment sur l'expertise de l'IRSN.

Liste des principaux exploitants d'installations nucléaires de base (INB)

Exploitant

Nombre d'INB en exploitation

Part du total des INB

EDF

57

46 %

CEA

36

29 %

Orano7(*)

18

15 %

Autres

13

10 %

TOTAL

124

100 %

Source : IRSN

b) L'ASN est l'autorité de contrôle de la sûreté nucléaire en France

L'article L. 592-1 du code de l'environnement définit l'ASN comme une « autorité administrative indépendante qui participe au contrôle de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et des activités nucléaires mentionnées à l'article L. 1333-1 du code de la santé publique. »

L'article L. 592-2 du même code prévoit la constitution d'un collège de cinq membres, chargé de prendre au nom de l'autorité les décisions réglementaires et individuelles relatives à la sûreté nucléaire.

Le collège est assisté par des services dirigés par un directeur général, chargés de préparer les décisions du collège en instruisant les décisions et en rédigeant les projets de décisions.

L'article L. 592-13 permet au collège des membres de donner délégation de pouvoirs pour certaines décisions au président de l'ASN ou à un autre membre du collège et permet au président de déléguer sa signature à des agents des services de l'autorité.

L'ASN rend annuellement 2300 décisions. Parmi ces décisions, environ une trentaine seulement sont rendues directement par le collège de l'ASN. Les autres sont déléguées aux services.

Les décisions les plus importantes de l'ASN s'appuient sur une expertise technique.

L'article L. 592-46 du code de l'environnement permet à l'ASN d'avoir recours à l'appui technique de l'IRSN, sous la forme d'activités d'expertise soutenues par des activités de recherche. L''IRSN transmet alors à l'ASN un avis d'expertise, qui est versé à l'instruction du dossier.

La majorité des décisions prises par l'ASN ne donnent pas lieu à une demande d'appui technique de l'IRSN, en raison soit d'une absence de besoin d'expertise, pour les décisions à faibles enjeux, soit en raison d'un recours à une expertise interne. L'ASN dispose en effet de services d'expertises dans certains domaines, comme dans le domaine des équipements sous pression.

Processus de décision classique de l'ASN

c) L'IRSN appuie l'ASN par ses activités d'expertise et de recherche

L'article L. 592-45 du code de l'environnement définit l'IRSN comme « un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial qui exerce, à l'exclusion de toute responsabilité d'exploitant nucléaire, des missions d'expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire ».

L'article R. 592-40 du même code prévoit une tutelle conjointe sur l'IRSN de cinq ministres : le ministre chargé de l'environnement, le ministre des armées, les ministres chargés de l'énergie, de la recherche et de la santé.

L'institut est dirigé par un conseil d'administration composé de vingt-trois membres8(*). Le directeur général de l'IRSN est nommé par décret pris sur le rapport des ministres de tutelle, sur la proposition du président du conseil d'administration9(*).

La mission d'expertise de l'IRSN s'effectue à titre principal au bénéfice de l'ASN. L'appui technique à l'ASN par des activités d'expertise, qui conduit à la publication d'environ 300 avis rédigés chaque année, représente 30 % du budget et 25 % des activités de l'Institut10(*). La mission de recherche de l'IRSN11(*) soutient quant à elle l'activité d'expertise.

L'IRSN exerce également des missions de service public, telles que la surveillance radiologique ou l'inventaire des sources radioactives.

La surveillance de l'environnement se concrétise notamment par l'activité de dosimétrie, exercée sous deux formes complémentaires :

- la dosimétrie passive mesure l'exposition externe des personnes. L'IRSN fabrique des dosimètres (1,5 million par an), les distribue à 25 000 clients puis en lit les résultats dans des appareils spécialisés ;

- la dosimétrie interne (anthroporadiométrie, radiotoxicologie) mesure elle l'exposition interne des personnes.

Ces activités sont nécessaires pour faire face à une éventuelle crise : elles permettent à la fois de disposer d'outils ou de matériels pour ces situations (un stock stratégique de dosimètres est maintenu) et de maintenir les compétences nécessaires à la mise en oeuvre de ces outils et matériels. En effet, en cas d'accident nucléaire ou radiologique, la dosimétrie passive et interne doivent être simultanément mises en oeuvre sur un grand nombre de personnes.

L'organisation duale de la sûreté nucléaire
en situation d'urgence radiologique

En cas de situation d'urgence radiologique civile, l'ASN exerce des missions de contrôle du bien-fondé des dispositions par l'exploitant et de conseil au préfet ou au Centre interministériel de crise (CIC).

L'IRSN quant à elle propose à l'ASN des mesures d'ordre technique, sanitaire et médical propres à assurer la protection de la population, des travailleurs et de l'environnement et à rétablir la sûreté des installations en étant en lien direct avec l'exploitant.

Pour assurer ces missions, les deux organisations disposent chacune d'un centre de crise (centre technique de crise pour l'IRSN et centre d'urgence pour l'ASN), d'une organisation de crise spécifique et de moyens propres.

Cette dualité de centres de crises rend les fonctions d'experts et de conseils aux pouvoirs publics peu lisibles vis-à-vis d'acteurs nombreux et peu familiers de l'organisation du système de contrôle et peut limiter la fluidité et la réactivité du partage d'information en période d'urgence.

Schéma des intervenants en situation d'incident ou d'accident nucléaire

Source : commission des finances du Sénat, 2023

d) La société civile : le quatrième pilier de la sûreté nucléaire ?

L'article 7 de la Charte de l'environnement de 2004, intégrée au bloc de constitutionnalité par la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005, prévoit que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».

Dans le domaine de la sûreté nucléaire, ces principes d'information et de participation du public sont concrétisés par des structures d'informations particulières, les commissions locales d'information (CLI) et le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)12(*).

Les quatre piliers de la sûreté nucléaire

D. L'organisation spécifique des activités à enjeux sécuritaires

La sûreté et la sécurité des installations nucléaires de défense et la sécurité des installations nucléaires civiles font l'objet d'une organisation spécifique, retracée dans le tableau ci-après, en raison d'enjeux sécuritaires particuliers, qui justifient un rattachement plus ou moins direct au ministère des armées.

La loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire a réformé l'organisation relative au nucléaire militaire. L'expertise en matière de sécurité des installations nucléaires de défense est rapprochée du nucléaire civil en étant intégrée à l'IRSN, afin de mettre fin au « ghetto du nucléaire militaire »13(*). Cette expertise est intégrée à la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) de l'IRSN sous tutelle du ministre des armées, également compétente pour les questions de sécurité des installations civiles.

L'autorité de contrôle reste cependant dérogatoire :

- pour la sécurité des installations civiles, il s'agit du haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère de la transition écologique ;

- pour la sûreté des installations militaires, le contrôle est effectué par l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND), placée auprès du ministre des armées mais indépendante ;

- enfin, pour la sécurité des installations militaires, le contrôle est assuré par la direction de la protection des installations, moyens et activités de la défense (DPID) qui relève du ministère des armées.

 

Nucléaire militaire

Nucléaire civil

Sûreté

Expertise : direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) de l'IRSN

Expertise : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

Contrôle : Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND)

Contrôle : Autorité de sûreté nucléaire (ASN)

Sécurité

Direction de la protection des installations, moyens et activités de la défense (DPID)

Expertise : direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) de l'IRSN

Contrôle : Haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère de la transition écologique

E. Un nouveau contexte, auquel la gouvernance de la sûreté doit s'adapter : la relance du nucléaire

Le 10 février 2022 à Belfort, le Président de la République a annoncé une relance sans précédent de la filière nucléaire, pour lutter contre le dérèglement climatique et garantir la souveraineté énergétique nationale.

Cette relance s'est traduite par le lancement de projets industriels d'ampleur :

- lancement d'un programme de construction de trois paires de réacteurs EPR214(*) ;

- mise à l'étude de huit réacteurs EPR2 supplémentaires ;

poursuite de l'exploitation du parc nucléaire existant au-delà de 50 ans voire de 60 ans ;

soutien à la recherche et à l'innovation dans les technologies nucléaires (petits réacteurs modulaires, projet de fusion nucléaire ITER...).

La mise en oeuvre de ces projets crée une charge de travail sans précédent pour les acteurs de la sûreté nucléaire qui, depuis les dernières décennies, ont principalement accompagné la maintenance du parc existant. Une adaptation de la sûreté nucléaire à cette relance est nécessaire.

Prochaines échéances d'expertises et d'actes réglementaires
pour l'IRSN et pour l'ASN

Source : IRSN, 2024.

Le développement de petits réacteurs innovants, ou small modular reactors (SMR) et de petits réacteurs avancés, ou advanced modular reactors (AMR) nécessite également une adaptation du système de sûreté.

Tout d'abord, le profil des exploitants avec lesquels les organisations de sûreté dialoguent évolue : jusqu'à maintenant, les installations nucléaires de base contrôlées étaient exploitées par un nombre limité d'organisations de grande taille.

À l'exception du projet Nuward15(*), les projets de SMR sont tous développés par de nouvelles entreprises, des start-ups qui disposent de ressources humaines moins développées et d'une culture d'entreprise différente. Les modalités du dialogue technique doivent être adaptées à cette nouvelle organisation du nucléaire.

Ces réacteurs mobilisent également un grand nombre de technologies innovantes (réacteurs rapides refroidis au sodium, réacteurs à sels fondus...) qui nécessitent le recrutement rapide de spécialistes aux compétences rares dans chaque entité.

Au-delà des centrales nucléaires, la relance du nucléaire nécessite également la création de nouvelles installations en amont du cycle du combustible (extension de l'usine d'enrichissement de l'uranium Georges-Besse II) comme en aval (renouvellement de l'usine de retraitement de la Hague et de l'usine de recyclage Melox).

II. Un article instituant la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

A. La définition de la sûreté nucléaire est complétée

Le complète la définition de la sûreté nucléaire à l'article L. 591-1 du code de l'environnement, afin de préciser qu'elle a également pour objectif de protéger la santé humaine ainsi que l'environnement.

B. L'ASNR, continuité de l'ASN, absorbe la majorité des missions de l'IRSN

Les à créent l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) substituée à l'ASN. La nouvelle autorité aurait une mission générale qui intégrerait, en plus des missions de l'ASN, l'essentiel des missions d'expertise et de recherche de l'IRSN.

La nouvelle autorité serait ainsi chargée :

-  d'une mission générale d'expertise, de recherche et de formation dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ;

- de contribuer au maintien d'un haut niveau de compétences en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection et d'améliorer constamment les connaissances dans ces domaines ;

- d'assurer une veille permanente en matière de radioprotection ;

- de contribuer aux travaux et à l'information du Parlement en ces domaines ;

- de participer à l'information du public et à la mise en oeuvre de la transparence.

C. Les activités de la direction de l'expertise nucléaire de défense et de dosimétrie passive ne seraient pas transférées à l'ASNR

Deux activités spécifiques de l'IRSN ne seraient pas intégrées à la future ASNR, en raison de leurs spécificités.

D'une part, les activités de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) seraient transférées à l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND), sous l'autorité du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense (DSND). La DEND, dirigée par un militaire sous l'autorité du ministre des armées, est chargée à titre principal de la sûreté des installations militaires et de la sécurité des installations civiles.

En raison du caractère régalien de ces activités, liées à la Défense nationale, leur intégration à une autorité administrative indépendante, qui ne dépend pas du ministre des armées, n'a pas été privilégiée par le Gouvernement.

Ces activités seraient donc intégrées à l'ASND, autorité chargée du contrôle de sûreté des installations militaires, rattachée au ministère des Armées mais hiérarchiquement indépendante. Les contrats du personnel de la DEND seraient transférés au CEA, qui mettra le personnel à disposition de l'ASND.

Une convention entre l'ASNR et l'ASND apparaîtrait nécessaire, notamment concernant l'articulation entre contrôle au titre de la sûreté nucléaire et contrôle au titre de la sécurité des installations civiles.

D'autre part, la dosimétrie passive serait transférée soit au CEA soit à une filiale du CEA. En effet, la fourniture de dosimètres constitue une activité commerciale ouverte à la concurrence, qui nécessite de la part du producteur un démarchage, ce d'autant plus que l'IRSN fait face dans ce domaine à un acteur dominant le marché mondial qui détient, en France, une part de marché équivalente à la sienne16(*).

En cas d'intégration de la dosimétrie passive à l'ASNR, l'autorité administrative indépendante se retrouverait en conflit d'intérêts car elle devrait démarcher les exploitants également placés sous son contrôle.

Une convention entre l'ASNR et le CAE apparaîtrait nécessaire, notamment concernant la fourniture massive de dosimètres en situation d'urgence radiologique.

Schéma de répartition globale des activités de l'ASN et de l'IRSN

III. Une évolution nécessaire de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

La commission partage l'ambition du Gouvernement qui est d'adapter la gouvernance aux enjeux contemporains de la sûreté nucléaire, tout en considérant que le texte soumis présente, en l'état, des risques significatifs appelant à de nécessaires ajustements.

Dans un contexte « hors norme » marqué par la relance de la filière nucléaire, la fusion améliorerait l'efficacité des procédures, en limitant les frictions entre expertise et décision.

Elle renforcerait également la lisibilité et l'opérationnalité de la réponse en cas de crise nucléaire, en permettant aux services de l'État de disposer d'un expert unique.

La communication serait également améliorée, en assurant une coordination et une meilleure fluidité entre la parole de l'expert et celle du décideur.

Enfin, dans un contexte de pénurie des compétences, la création d'une grande organisation, marquée par une diversité de statuts et de métiers, pourrait renforcer l'attractivité de la sûreté nucléaire.

Les apports de la commission visent à conforter la sécurité juridique du texte : la commission a ainsi adopté un amendement COM-63 du rapporteur pour avis, sous-amendé par le rapporteur ( COM-93) pour préciser la définition de la sécurité nucléaire, deux amendements identiques pour clarifier la rédaction de l'article (amendement COM-8 du rapporteur et amendement COM-66 du rapporteur pour avis) et deux amendements identiques pour lever toute ambiguïté sur le champ de la mission d'information du public et de transparence de l'ASNR, qui concernerait l'ensemble des domaines de compétence de la nouvelle autorité (amendements COM-9 du rapporteur et COM-72 du rapporteur pour avis).

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 2
Déontologie, indépendance et transparence

Cet article vise à définir les principes d'organisation de la future ASNR concernant la déontologie, la transparence et la distinction entre le processus d'expertise et le processus de décision.

La commission considère que le dispositif proposé présente des risques pour la transparence et la crédibilité de la future autorité.

Elle a donc adopté quatorze amendements pour renforcer la distinction entre expertise et décision, garantir un niveau de transparence au moins équivalent à celui atteint par le système actuel, améliorer la prévention des conflits et apporter des clarifications rédactionnelles.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

I. La crédibilité du système dual de sûreté nucléaire est assurée à la fois par l'indépendance de l'ASN et par l'information du public

A. L'indépendance de l'ASN est garantie par son statut ainsi que par des obligations déontologiques

L'indépendance de l'ASN est d'abord garantie par son statut d'autorité administrative indépendante (AAI).

D'inspiration américaine17(*), le statut d'AAI est introduit en France par la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière, qui a créé l'Autorité des marchés financiers (AMF).

La loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes et la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ont ensuite créé un statut général des AAI, afin :

- d'une part de garantir un niveau équivalent d'indépendance ;

- d'autre part, d'assurer un contrôle démocratique par le Parlement, en réponse aux inquiétudes du Sénat18(*).

La loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 fixe ainsi les règles du jeu. D'une part, toutes les AAI sont instituées par la loi. D'autre part, le législateur « fixe les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes »19(*).

La loi n° 2107-55 du 20 janvier 2017 assure également l'indépendance des AAI en prévoyant un ensemble de règles déontologiques communes à l'ensemble des autorités.

L'article 12 de la loi détaille ainsi les règles de déport s'appliquant aux membres d'une AAI.

L'article 13 prévoit la définition dans le règlement intérieur des règles déontologiques applicables aux personnels de l'AAI.

L'ASN a appliqué ces dispositions en adoptant la charte de la déontologie des commissaires et des agents de l'ASN, annexée à son règlement intérieur20(*), applicable à l'ensemble des agents de l'ASN.

Enfin, l'article 14 de la même loi prévoit qu'un règlement intérieur, adopté par le collège sur proposition de son président et publié au Journal officiel, précise les règles d'organisation, de fonctionnement et de déontologie au sein de l'AAI.

L'IRSN n'est pas dans la même situation d'indépendance. En tant qu'établissement public industriel et commercial, l'IRSN est sous la tutelle de cinq ministères.

Sous tutelle gouvernementale, l'IRSN est cependant indépendant des exploitants.

L'article R. 592-48 du code de l'environnement prescrit l'adoption par l'IRSN d'une charte d'éthique et de déontologie, visant à prévenir les conflits d'intérêts. En particulier, dans le domaine de la sûreté des installations nucléaires de base (INB), les activités d'expertise et de recherche ne sont pas menées par les mêmes équipes.

L'article R. 592-56 du même code prévoit l'existence d'une commission d'éthique et de déontologie au sein de l'IRSN qui surveille l'application de ces chartes. Il convient de prévoir une instance similaire au sein de la nouvelle autorité.

B. « Démontrer la sûreté, c'est confronter des doutes »21(*) : la transparence, enjeu majeur de crédibilité

L'article 7 de la Charte de l'environnement de 2004 institue un droit d'accès aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques dans les conditions et limites définies par la loi.

La fixation des conditions et des limites de ce principe d'information relève ainsi de la compétence exclusive du législateur22(*), à charge pour le pouvoir réglementaire d'en définir les mesures d'application23(*).

Les attentes du public en matière d'information sont particulièrement fortes dans le domaine du nucléaire : 74,4 % des Français considèrent en effet prioritaire pour un organisme d'expertise de rendre publics ses rapports d'expertise24(*).

Au sein de l'IRSN, cette transparence se traduit par des obligations de publication.

L'article L. 592-47 du code de l'environnement prévoit ainsi depuis la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte la publication par l'IRSN des avis d'expertise rendus sur saisine d'une autorité publique ou de l'ASN et la publicité des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont il a l'initiative.

Les modalités de publication des avis d'expertise sont ensuite définies dans la convention pluriannuelle d'appui technique entre l'ASN et l'IRSN.

Ces publications permettent à la société civile de connaître les bases scientifiques et techniques sur lesquelles sont opérés les choix en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Au sein de l'ASN, la transparence est assurée notamment par la publication des avis des groupes permanents d'experts (GPE). Créés en 1973, les GPE renforcent la crédibilité des avis de l'ASN, en assurant une contre-expertise par des personnalités extérieures à l'autorité.

L'article 20 du règlement intérieur de l'ASN25(*) prévoit la création des groupes permanents d'experts.

Nommés par le directeur général de l'ASN pour quatre ans à la suite d'un appel à candidatures, ces experts sont issus des exploitants, des autorités de sûreté étrangères, de la société civile (monde universitaire ou associatif) et de l'IRSN. Ils exercent leur activité à titre bénévole.

Les experts sont ensuite répartis dans sept groupes permanents, composés de 26 à 36 experts, en fonction de leur domaine de compétence.

À la suite d'une demande de l'ASN, les GPE émettent des avis à destination du directeur général de l'ASN sur la base des expertises techniques de l'IRSN ou des services de l'ASN.

Ces avis, qui peuvent être assortis de recommandations, sont ensuite publiés. La publication de ces avis depuis 2009, qui ne constitue pas une obligation juridique, permet d'assurer une transparence.

II. Le présent article fixe le cadre de déontologie, d'indépendance et de transparence de la future autorité, en renvoyant au règlement intérieur

Le détaille la répartition des responsabilités entre le collège, le président et les services de la future ASNR, en reprenant et clarifiant la répartition existante au sein de l'ASN.

Le précise les dispositions nécessaires à l'indépendance de la future de la future autorité.

D'une part, le règlement intérieur devra prévoir les dispositions nécessaires à l'application des règles de déport et de déontologie de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017, y compris en ce qui concerne la prévention des conflits d'intérêts.

D'autre part, le règlement intérieur définit les modalités et les règles propres à distinguer le processus d'expertise et d'instruction conduit par ses services et le processus d'élaboration des avis et décisions délibérés par son collège.

Le concerne les publications qui seront effectuées par l'ASNR.

Premièrement, le règlement intérieur définit les modalités de publication des résultats de ses activités d'expertise et d'instruction.

Deuxièmement, les avis rendus à la demande d'une autorité de saisine sont rendus publics dans des conditions définies par leur destinataire.

Troisièmement, l'ASNR organise la publicité des données scientifiques résultant de ses programmes de recherche.

III. La commission a renforcé la distinction entre expertise et décision, les obligations de transparence et les règles déontologiques, pour assurer la crédibilité et l'acceptabilité du nucléaire

La commission considère que l'indépendance et la transparence du système de sûreté sont des conditions sine qua non de la crédibilité et de l'acceptabilité du nucléaire.

Le dispositif proposé par le Gouvernement à cet article présente en l'état des risques significatifs, qui nécessitent des ajustements de plusieurs ordres.

A. Une distinction renforcée entre expertise et décision permettra d'assurer une confrontation des doutes au sein de la nouvelle autorité

Il convient tout d'abord de renforcer la distinction entre expertise et décision qui est au coeur de la qualité et de la crédibilité du système de sûreté.

D'une part, une séparation insuffisante risque de placer l'expertise sous l'influence de la décision, les conclusions de l'expertise seraient orientées dans le sens de la décision. Inversement, la décision, censée tenir compte de l'expertise, mais également d'enjeux extrinsèques comme l'approvisionnement en électricité du pays, pourrait ne pas s'autonomiser suffisamment des avis scientifiques qui lui sont présentés.

D'autre part, démontrer la sûreté, c'est confronter le doute : ce n'est pas l'affirmation de certitudes qui rassure le public sur l'état de la sûreté nucléaire, mais la transparence sur les débats internes au système de sécurité nucléaire.

À ce sujet, le projet de loi présente le risque, en l'état, d'un recul majeur : d'abord sur la méthode, en renvoyant le sujet au règlement intérieur de la future autorité, et surtout sur le fond, en prévoyant une distinction des « processus » d'expertise et de décision uniquement dans le cas d'une prise de décision par le collège (soit 30 dossiers par an, contre 300 dossiers aujourd'hui).

La commission a adopté un amendement du rapporteur  COM-11 rééquilibrant le dispositif proposé, tout en préservant la fluidité permise par la fusion des deux entités.

Cet amendement étend le champ de la distinction à l'ensemble des dossiers faisant l'objet d'une expertise, soit environ 300 dossiers par an (y compris le redémarrage des centrales nucléaires, qui auraient été exclues du champ d'application par le texte initial).

Il propose une distinction des « responsabilités », plutôt que des « processus » : la personne responsable de l'expertise devra être distincte de la personne ou des personnes responsables de l'élaboration de la décision et de la prise de décision. Les modalités organisationnelles de distinction et d'interaction des personnels en charge de l'expertise et de la décision seront fixées par le règlement intérieur.

B. Au sein de la nouvelle autorité, les apports de la commission assurent un niveau de transparence au moins équivalent

En matière de transparence, le dispositif présente un manque de garanties alarmant.

En renvoyant au règlement intérieur les modalités de publication des résultats des activités d'expertise de la nouvelle ASNR, le projet de loi comporte des risques de recul, puisqu'il n'est pas certain que les mêmes exigences de publication seraient conservées, et encore moins qu'elles seraient renforcées.

La commission a adopté un amendement du rapporteur ( COM-4) consacrant dans la loi le principe de publication des résultats d'expertise de l'ASNR, ce qui permettrait de maintenir un niveau de transparence équivalent à celui atteint par le système actuel.

Par ailleurs, la commission a donné une assise législative aux GPE par l'adoption de l'amendement du rapporteur COM-5 et de l'amendement identique du rapporteur pour avis COM-85 et à la publication de leurs avis, en précisant notamment que leur composition garantit la diversité de l'expertise, tout en renvoyant au règlement intérieur pour leur organisation, afin de conserver la souplesse actuelle de ces groupes.

C. Prévention des conflits d'intérêts : des relations avec l'exploitant à clarifier

La prévention des conflits d'intérêts, relatifs notamment à l'exercice dans la même autorité d'activités de recherche, qui nécessitent une coopération avec l'exploitant, et d'activités de contrôles de ces mêmes exploitants, doit également être renforcée.

La commission a ainsi créé une possibilité de délégations de pouvoirs du président de l'ASNR à ses services en matière de passation de convention (amendement du rapporteur COM-13), afin de faciliter son déport des sujets relatifs à la collaboration entre exploitants et ASNR en matière de recherche.

Les amendements identiques  COM-25 du rapporteur, COM-78 du rapporteur pour avis et COM-32 rect. prévoient la création d'une commission d'éthique et de déontologie. Elle serait chargée de garantir le respect des règles déontologiques, relatives notamment au conflit d'intérêts, et des principes de distinction et de publication fixés par la loi.

D. Des améliorations rédactionnelles et légistiques qui confortent la sécurité juridique du texte

La commission a enfin adopté des amendements visant à effectuer des coordinations (amendement du rapporteur COM-10), à permettre à l'ensemble des personnels de bénéficier de délégations de signature du président de l'ASNR (amendement du rapporteur COM-24 et amendements COM-46 rect. et COM-45 rect.) et à clarifier les règles de publication en cas de saisine de l'ASNR par un organisme extérieur (amendements identiques du rapporteur COM-12 et du rapporteur pour avis COM-76).

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis (nouveau)
Clarification des règles de parité au sein du collège de la nouvelle autorité

Cet article additionnel, inséré par la commission à l'initiative du rapporteur pour avis, clarifie les règles de parité au sein du collège de l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

La commission a adopté l'article 2 bis ainsi rédigé.

Le troisième alinéa de l'article L. 592-2 du code de l'environnement détermine les règles de parité applicables au collège de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Il dispose ainsi que :

- s'agissant des deux membres désignés par les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, le membre succédant à une femme est un homme et celui succédant à un homme est une femme ;

- parmi les trois membres désignés par le Président de la République, l'écart entre le nombre d'hommes et le nombre de femmes ne doit pas être supérieur à un.

Ces règles n'assurent pas, pour l'heure, une parité effective dans la composition du collège de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui comprend cinq membres.

L'article 2 bis, introduit par un amendement du rapporteur pour avis ( COM-90), clarifie l'application de ces règles au sein de la nouvelle autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). Il prévoit ainsi que le Président de la République soit contraint de procéder à la désignation de ses trois candidats en tenant compte du genre des membres nommés par les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, de façon à ce que l'écart entre les hommes et les femmes au sein du collège ne soit pas supérieur à un.

Cette disposition avait été adoptée dans le cadre de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (article 25), mais avait été censurée par le Conseil constitutionnel26(*) sur le fondement de l'article 45 de la Constitution, en tant que « cavalier » législatif.

La commission a adopté l'article 2 bis ainsi rédigé.

Article 2 ter (nouveau)
Compte rendu de l'activité de la commission des sanctions

Cet article additionnel, introduit sur proposition du rapporteur pour avis, prévoit que le rapport d'activité de l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) rend compte de l'activité de la commission des sanctions.

La commission a adopté l'article 2 ter ainsi modifié.

L'article L. 592-41 du code de l'environnement prévoit l'existence au sein de l'ASN d'une commission des sanctions indépendante, chargée de prononcer des amendes administratives à l'encontre des exploitants d'activités nucléaires.

Dans le cadre de l'examen en première lecture du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement prévoyant que la commission des sanctions rend compte chaque année de son activité auprès des commissions permanentes compétentes et de l'OPECST27(*), afin de permettre un meilleur contrôle du Parlement sur l'action de cette commission.

La commission mixte paritaire réunie sur ce même projet de loi a fait évoluer cette disposition, en prévoyant que le rapport annuel de l'ASN rend compte de l'activité de la commission des sanctions. Le Conseil constitutionnel a cependant déclaré cet article contraire à la Constitution28(*), au titre de l'article 45 de la Constitution29(*).

La commission a adopté l'amendement  COM-91 du rapporteur pour avis, qui permet d'intégrer cette même disposition au projet de loi actuel.

La commission a adopté l'article 2 ter ainsi rédigé.

Article 3
Précision des activités pouvant être exercées par l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Cet article vise à procéder aux ajustements nécessaires à l'intégration de la recherche au sein de l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

La commission considère qu'en raison des synergies entre expertise et recherche, il est indispensable de conserver ces deux activités au sein de la même organisation.

Elle a adopté cinq amendements pour permettre à l'ensemble des personnels de la nouvelle autorité d'exercer les missions de l'autorité relatives aux rayonnements ionisants, pour effectuer une correction rédactionnelle et apporter d'utiles clarifications.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

I. La double activité de l'IRSN permet une synergie entre recherche et expertise

A. L'IRSN contribue à la recherche, dans les domaines de la sûreté nucléaire comme de la radioprotection

La double activité d'expertise et de recherche de l'IRSN, partagée par les autres organismes d'évaluation du risque30(*) facilite la gestion des compétences en renforçant l'attractivité de l'institut, garantit une expertise prenant en compte les derniers enseignements de la recherche et permet le financement de programmes de recherche qui tiennent compte des besoins de l'expertise.

Dans le domaine de la protection de l'homme et de l'environnement vis-à-vis des rayonnements ionisants, la recherche de l'IRSN participe aux politiques de santé publique : les résultats de ces travaux de recherche contribuent ainsi au 4e Plan national santé-environnement (PNSE4) ou encore à la stratégie décennale contre le cancer.

La recherche amène l'institut à exercer des activités nucléaires. En effet, l'IRSN utilise, pour certains travaux de recherche ou d'analyse, des sources émettrices de rayonnements ionisants, comme des accélérateurs de particules par exemple.

Le contexte actuel plaide pour un renforcement du lien entre expertise et recherche : face au développement de petits réacteurs modulaires faisant appel à des technologies avancées et aux incertitudes associées au changement climatique, l'expert doit de plus en plus s'appuyer sur la recherche.

B. Le statut d'établissement public de l'IRSN facilite son intégration dans l'écosystème de la recherche

Le statut d'établissement public industriel et commercial (EPIC) favorise les activités de recherche de l'IRSN.

Doté de la personnalité morale, l'IRSN peut conclure des partenariats avec d'autres établissements de recherche, avec des industriels du secteur nucléaire et, dans le domaine de la santé, avec des établissements hospitaliers.

Le partenariat avec les industriels du secteur nucléaire est nécessaire à l'activité de recherche : il permet aux chercheurs de l'IRSN d'accéder aux matériaux mis en oeuvre dans les installations nucléaires, d'adapter les programmes de recherche aux perspectives industrielles, de disposer d'un regard critique sur les programmes de recherche définis par l'institut et, enfin, de faciliter le dialogue technique d'expertise en assurant un niveau de connaissances similaire entre industriels et IRSN.

La personnalité morale permet également de bénéficier de financements nationaux de l'Agence nationale de recherche (ANR) et des financements internationaux, notamment de l'Union européenne.

Le statut d'établissement public facilite enfin le recrutement de doctorants et de chercheurs, indispensables aux travaux de recherche, en offrant un cadre juridique similaire aux autres organismes publics de recherche.

II. La nouvelle ASNR conservera les deux activités au sein d'une même structure

Le présent article procède aux adaptations nécessaires à l'activité de recherche de l'ASNR et à la reprise des missions de service public de l'IRSN, relatives notamment aux rayonnements ionisants.

Le I autorise l'ASNR, comme l'IRSN dans l'état du droit actuel, à :

exercer des activités nucléaires, à l'exception de celles soumises au régime des installations nucléaires de base (INB) ;

dispenser des formations, délivrer des attestations, des habilitations, des qualifications ou des certifications professionnelles ;

- exercer les missions dévolues aux organismes certificateurs ;

- délivrer des agréments, attestations, habilitations ou certificats ;

- mettre en oeuvre des procédures d'évaluation de conformité ou réaliser des opérations de contrôle de conformité des équipements de travail et de protection individuelle ;

- assurer la gestion de données d'intérêt public pouvant comprendre des données à caractère personnel et de santé.

Il permet également à l'ASNR de bénéficier, pour la réalisation de ses expertises, de l'appui technique des services de l'État ou d'établissements publics, comme l'IRSN dans le droit actuel.

Le II prévoit que l'ASNR est assimilée à un établissement public de recherche, ce qui facilitera la conclusion de partenariats de recherche, la participation à des programmes de recherche, voire la coordination de ces derniers, ainsi que la contribution et la participation à des éléments de propriété intellectuelle.

Par ailleurs, cette assimilation assurera l'application à l'ASNR du cadre général déontologique en matière d'éthique et d'intégrité scientifique, constituants indispensables d'une recherche de qualité.

Le III transfère à l'ASNR les missions de service public de l'IRSN relatives aux rayonnements ionisants31(*) et prévoit une mission d'appui technique de l'ASNR au Gouvernement dans ses domaines de compétences.

Il attribue à l'ASNR une mission de suivi de la recherche, de proposition sur les besoins de recherche et de définition des programmes de recherche, à l'échelle nationale et internationale.

III. La commission considère que les bénéfices apportés par l'activité de recherche à l'activité d'expertise justifient le maintien de ces deux missions au sein de la future ASNR

La commission partage l'objectif de cet article, qui est d'assurer le maintien de la recherche et de l'expertise au sein de la même structure.

Pour assurer l'attractivité et l'excellence de l'expertise, il apparaît en effet indispensable de préserver la synergie existante entre les deux activités.

Afin de permettre à l'ensemble des personnels d'accéder aux données dosimétriques individuelles et aux données nécessaires à l'exercice d'une mission d'expertise d'une situation d'exposition aux rayonnements ionisants, la commission a remplacé le terme trop restrictif d'« agents » par le terme plus conforme à la réalité de « personnels » (amendement du rapporteur COM-16) : en effet, l'autorité sera à la fois composée d'agents publics (fonctionnaires et contractuels) mais aussi de salariés de droit privé.

Par ailleurs, la commission a clarifié la référence au régime des INB (amendements identiques du rapporteur COM-14 et du rapporteur pour avis COM-79) et effectué une coordination rédactionnelle ( COM-15).

Enfin, la commission a remplacé la notion de « secret en matière industrielle et commerciale » par celle plus adaptée de « secret des affaires », en adoptant l'amendement COM-81 du rapporteur pour avis.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4
Dispositions relatives à la transparence, l'information et l'association du public

Cet article vise à renforcer l'information du Parlement et de la société civile en prévoyant que l'ASNR présente à l'OPECST32(*) et au HCTISN33(*) les sujets sur lesquels une association du public est organisée.

La commission se félicite de cette meilleure association du Parlement et de la société civile à l'action de l'ASNR, tout en soulignant les insuffisances du dispositif.

Elle a adopté quatre amendements pour renforcer l'association à la sûreté nucléaire de l'OPECST, des commissions parlementaires permanentes compétentes, du HCTISN et de l'ANCCLI34(*).

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

I. Les deux organisations de la sûreté nucléaire assurent une reddition au compte auprès du Parlement comme de la société civile

A. L'OPECST contrôle l'activité de l'ASN et de l'IRSN

L'article 20 de la Constitution confie au Parlement une mission de contrôle et d'évaluation de l'action gouvernementale.

Dans le domaine de la sûreté nucléaire, ce contrôle est exercé par les commissions permanentes de chaque assemblée35(*) et par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).

L'OPECST, créée en 198336(*), est une délégation parlementaire, commune à l'Assemblée nationale et au Sénat, composée de dix-huit députés et de dix-huit sénateurs.

L'article 6 ter de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires définit la mission de l'OPECST, qui est « d'informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique afin, notamment, d'éclairer ses décisions ».

L'OPECST s'est saisie du sujet du nucléaire, en raison des fortes implications technologiques et scientifiques des décisions dans ce domaine. L'OPECST a ainsi adopté durant la dernière décennie de nombreux rapports sur le sujet, portant sur la gestion des déchets radioactifs37(*), sur la recherche dans le domaine de l'énergie nucléaire38(*), sur le projet « Astrid »39(*) ou encore sur l'avenir de la filière nucléaire40(*).

Plus spécifiquement, plusieurs rapports ont été adoptés sur la sécurité nucléaire, portant sur le contrôle41(*) et la sûreté42(*) des équipements sous pression ou sur l'impact des drones sur la sécurité des installations nucléaires43(*) et, plus récemment, à la demande de la présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, sur les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection44(*).

La compétence et l'expertise de l'OPECST dans le domaine du nucléaire sont reconnues par plusieurs dispositions législatives, qui donnent à l'office un pouvoir de contrôle particulier sur l'ASN comme sur l'IRSN.

Concernant l'ASN, l'article L. 592-29 du code de l'environnement permet ainsi à l'OPECST de demander à l'autorité la formulation d'avis ou la réalisation d'études.

L'article L. 592-30 du même code permet à l'OPECST de demander au président de l'ASN de rendre compte des activités de celle-ci.

L'article L. 592-31 prévoit la transmission du rapport annuel d'activité de l'ASN à l'OPECST.

Enfin, l'article L. 542-10-1 prévoit une association renforcée de l'OPECST au projet de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde Cigéo : les avis de l'ASN sur la demande d'autorisation de création et sur les résultats de la phase industrielle pilote sont transmis à l'OPECST qui les évaluent.

Concernant l'IRSN, l'article R. 592-41 du code susmentionné prévoit également la communication de la nature et des principaux résultats des programmes de l'IRSN à l'OPECST.

B. Une reddition des comptes devant le HCTISN et les CLI permet d'associer la société civile à la sûreté nucléaire

L'article 7 de la Charte de l'environnement de 2004, intégrée au bloc de constitutionnalité par la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005, prévoit que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».

Dans le domaine de la sûreté nucléaire, ces principes d'information et de participation du public sont concrétisés par des structures d'informations particulières, les commissions locales d'information (CLI) et le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)

a) Les CLI garantissent, au niveau local, la bonne information du public et son association aux décisions

Créées par une circulaire du Premier ministre du 15 décembre 1981, les CLI sont instituées par les présidents des conseils départementaux auprès de chaque installation nucléaire de base (INB).

Indépendantes des organisations de contrôle, de l'État et de l'exploitant, ces CLI, chargées de missions d'information et de concertation locales, ont su devenir « des lieux essentiels du débat et de la transparence autour des activités nucléaires »45(*).

Au niveau national, les CLI se sont constituées en 2000 en Association nationale des comités et commissions locales d'information (ANCCLI), structure assurant une réflexion d'ensemble sur la transparence, l'information et la concertation en matière nucléaire.

La loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire a renforcé la place de la société civile dans la sûreté nucléaire, en conférant aux citoyens un droit d'accès aux informations détenues par les exploitants, en donnant une base législative aux commissions locales d'informations46(*) et en consacrant la constitution d'une fédération des CLI prenant la forme d'une fédération d'association, l'ANCCLI47(*).

Le décret n° 2008-251 du 12 mars 2008 relatif aux commissions locales d'information auprès des installations nucléaires de base a ensuite précisé le régime juridique de l'ANCCLI : l'association a pour objet social la représentation des CLI auprès des autorités48(*), elle accepte comme membre toute CLI qui en ferait la demande49(*) et elle doit avoir un caractère représentatif50(*). L'ASN et les autres services de l'État doivent communiquer à l'ANCCLI les documents et informations nécessaires à l'accomplissement de ses missions51(*).

b) Le HCTISN : un lieu de débat associant l'ensemble des parties prenantes

La loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 a également institué un Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HTICSN).

L'article L. 125-34 du code de l'environnement définit le HCTISN comme une instance d'information, de concertation et de débat sur les risques liés aux activités nucléaires et l'impact de ces activités sur la santé des personnes, sur l'environnement et sur la sécurité nucléaire.

Le HCTISN peut émettre un avis sur toute question dans ces domaines et sur toute question relative à l'accessibilité de l'information en matière de sécurité nucléaire. Il peut par ailleurs proposer toute mesure de nature à garantir ou à améliorer la transparence.

Composé de quarante membres, ce Haut Comité représente l'ensemble des parties prenantes de la sécurité nucléaire, réparties en sept collèges, listés à l'article L. 125-37 du même code :

- les parlementaires (deux députés et deux sénateurs) ;

- les représentants des CLI ;

- les représentants d'associations ;

- les représentants des exploitants ;

- les représentants d'organisations syndicales ;

- les personnalités qualifiées, désignées par l'OPECST, par l'Académie des sciences et par l'Académie des sciences morales et politiques ;

- les représentants de l'ASN, des autres services de l'État concernés et de l'IRSN.

Concernant l'IRSN, l'article R. 592-41 du code de l'environnement prévoit, comme pour l'OPECST, la communication de la nature et des principaux résultats des programmes de l'IRSN au HCTISN.

II. Le présent article renforce l'association du Parlement et du HCTISN à la sûreté nucléaire

Le présent article prévoit, d'une part, que l'ASNR présente à l'OPECST et au HCTISN, qui peut émettre un avis, les principaux sujets sur lesquels une association du public est organisée ainsi que les modalités de sa mise en oeuvre et leur en rend compte.

D'autre part, l'article transfère à l'ASNR les obligations imposées à l'IRSN par l'article R. 592-41 du code de l'environnement : l'ASNR devra communiquer la nature et les principaux résultats de ses programmes de recherche à l'OPECST, au HCTISN, au Haut Conseil de la santé publique et au Conseil d'orientation des conditions de travail, selon leurs domaines de compétences respectifs.

III. Un article incomplet, qui oublie un acteur majeur, l'ANCCLI, et un sujet central, le règlement intérieur de l'ASNR

La commission se félicite du renforcement de l'association de l'OPECST et du HCTISN à l'action de la future ANSR.

Elle déplore deux lacunes majeures : l'ANCCLI, représentant de la société civile, qui n'est pas associée et le sujet de l'association du Parlement à l'adoption du règlement intérieur est occulté.

De nombreux sujets essentiels pour assurer la transparence et l'indépendance de la sûreté nucléaire sont renvoyés au règlement intérieur de la future autorité : c'est le cas notamment des modalités de distinction entre expertise et décisions, des modalités de publication des résultats d'expertise ou des règles déontologiques applicables aux membres de l'ASNR.

Ce renvoi permet d'assurer une plus grande souplesse dans le fonctionnement de l'autorité, qui doit disposer d'une autonomie dans l'organisation de ses services.

Une reddition des comptes est cependant nécessaire, pour assurer la conformité de la lettre du règlement à l'intention du législateur.

C'est l'objet des amendements identiques du rapporteur COM-17 et du rapporteur pour avis COM-83, qui prévoient que le projet de règlement intérieur est présenté pour observations à l'OPECST, au HCTISN et à l'ANCCLI ; de l'amendement COM-84 du rapporteur pour avis relatif à l'élaboration des observations de l'OPECST sur le règlement intérieur en lien avec les commissions permanentes compétentes et de l'amendement COM-82 du rapporteur pour avis, sous-amendé par le rapporteur au fond ( COM-92), qui ajoute les commission permanentes compétentes aux bénéficiaires des obligations de transparence.

L'amendement prévoit également la transmission des éventuels projets de modifications de ce règlement aux mêmes organisations, qui peuvent formuler des observations.

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

Section 2
Dispositions transitoires
Article 5
Dispositions transitoires concernant les biens, droits et obligations et la continuité du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

Cet article vise à prévoir des dispositions transitoires concernant les biens, droits et obligations de l'IRSN et la continuité du mandat des membres du collège de l'ASN.

La commission a adopté un amendement, qui vise à améliorer les modalités de transfert des biens, droits et obligations de l'IRSN.

La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.

Le I du présent article prévoit que les biens, droits et obligations de l'IRSN sont transférés à titre gratuit en tenant compte de la répartition des attributions prévues par la présente loi :

- à l'État, qui englobe l'ASNR et l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND), qui ne disposent pas de la personnalité morale ;

- au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Un décret en Conseil d'État précise les modalités de ce transfert.

Le II vise à assurer la continuité du contrôle de la sûreté nucléaire en prévoyant explicitement l'absence d'interruption de mandat des membres du collège de l'ASN, qui deviendront, jusqu'au terme de leur mandat, membres du collège de la future ASNR.

La commission a adopté l'amendement COM-67 du rapporteur pour avis, qui vise à améliorer les modalités de transfert des biens, droits et obligations de l'IRSN dans le cadre de la création de l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.

CHAPITRE II
Ressources humaines
Section 1
Dispositions modifiant le code de l'environnement
Article 6
Statut des personnels de la future autorité, instances et règles du dialogue social et harmonisation des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature

Cet article rassemble les dispositions concernant le statut des personnels de la future autorité, les instances et les règles du dialogue social. Il est ainsi prévu une cohabitation des statuts de droit public et de droit privé des personnels au sein de la nouvelle autorité, la mise en place d'une instance de dialogue social singulière - le comité social d'administration - compétente pour l'ensemble des personnels, l'instauration de règles d'élections professionnelles et de négociations collectives tenant compte du caractère mixte de l'autorité, et l'harmonisation des indemnités accessoires et des remboursements de frais de toute nature.

La cohabitation des statuts de droit public et de droit privé et l'instauration de règles de dialogue social s'adaptant à cette diversité pourraient contribuer à renforcer l'attractivité de la future autorité, tout en donnant des garanties aux salariés de l'IRSN et aux agents de l'ASN quant au maintien de leurs droits existants.

La commission a donc adopté l'article 6, en ne le modifiant qu'à la marge par un amendement de clarification.

I. Des statuts, des règles de dialogue social et des modalités de remboursements des frais de service différents, reflétant le caractère public ou privé des deux entités

A. Une autorité de droit public, employant des fonctionnaires et des contractuels, et un institut de droit privé, employant des salariés

L'Autorité de sûreté nucléaire est une autorité administrative indépendante (AAI) qui emploie, conformément au statut général des AAI et des autorités publiques indépendantes (API)52(*), des fonctionnaires (près de 400) et des contractuels de droit public de l'ASN (moins de 80 personnes). L'ASN peut, en outre, bénéficier de la mise à disposition, avec leur accord, d'agents d'établissements publics (article L. 592-12 du code de l'environnement). Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, ces agents représentent 11 % de l'effectif total de l'ASN ; ils proviennent majoritairement de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

L'IRSN est, quant à lui, un établissement public industriel et commercial (EPIC), qui emploie des salariés de droit privé, pour un effectif total de 1744 personnes en 2022.

B. Des instances de dialogue social reflétant le caractère public ou privé des deux entités

Un comité social d'administration (CSA) constitue l'instance de dialogue social de l'ASN, comme la loi le prévoit pour les administrations de l'État, y compris pour les AAI (article L. 251-2 du code général de la fonction publique). Ce CSA est chargé de l'examen des questions collectives de travail ainsi que des conditions de travail ; en son sein, une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail est mise en place.

Comme dans toutes les structures de droit privé de plus de onze salariés, l'instance de dialogue social de l'IRSN est un comité social et économique (CSE). Ce CSE est compétent sur les questions individuelles et collectives de travail, ainsi qu'en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (articles L. 2312-8 à L. 2312-10 du code du travail). Sa composition et son fonctionnement sont fixés par le code du travail (articles L. 2314-1 à L. 2314-37).

C. Indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature : un cadre fixé par le droit public, pour l'ASN, et par le droit privé, pour l'IRSN

Le cadre général des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature est actuellement défini, pour l'ASN, par le code général de la fonction publique53(*), ainsi que par des décrets d'application54(*).

La fixation des conditions applicables au versement des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature est définie, au sein de l'IRSN, par un accord d'entreprise après négociation collective.

II. Une cohabitation de différents statuts, impliquant la mise en place d'une instance de dialogue social singulière

A. La cohabitation des statuts de droit public et de droit privé

Le Gouvernement prévoit de faire cohabiter les différents statuts, publics et privés, au sein de la nouvelle autorité (ASNR).

Tel est l'objet de la nouvelle rédaction de l'article L. 592-12 du code de l'environnement, prévue à l'article 6 du projet de loi. Cet article dispose que le personnel de l'ASNR comprend des fonctionnaires, des agents contractuels de droit public, ainsi que des salariés de droit privé, dont les conditions d'emploi sont régies par le code du travail, sous réserve des dispositions de la section 3 du chapitre II du titre IX du livre V du code de l'environnement, consacrée au fonctionnement de l'ASNR, et des adaptations prévues par décret en Conseil d'État55(*).

L'étude d'impact annexée au projet de loi met en avant deux raisons principales pour justifier ce choix :

- la volonté de contribuer à l'attractivité de la future autorité en conservant la diversité des viviers de recrutement ;

- le souhait de garantir les droits des salariés et des agents publics.

Au regard de ces objectifs, les deux alternatives ont été écartées par le Gouvernement :

- le recrutement de fonctionnaires et de contractuels de droit public uniquement ne répondait pas à plusieurs besoins essentiels, notamment à la continuité des conditions d'emploi des salariés de l'IRSN et à l'attractivité de la future autorité, en particulier pour les activités de recherche ;

- le recrutement de fonctionnaires détachés sur contrat de droit privé, ainsi que de salariés de droit privé uniquement, car cette option aurait méconnue la nature publique d'une autorité administrative indépendante, tout en étant peu attractive pour les fonctionnaires de l'ASN.

B. La mise en place d'une instance de dialogue social singulière : un comité social d'administration, compétent pour l'ensemble des personnels de l'autorité, qu'ils relèvent du droit public ou du droit privé

1. Un comité social d'administration unique

Afin d'assurer la représentation de l'ensemble des personnels de tous statuts au sein des instances de la future autorité, l'article 6 prévoit par ailleurs la mise en place d'un comité social d'administration (CSA) unique (article L. 592-12-1 (nouveau)).

Ce CSA unique, compétent pour l'ensemble du personnel de l'ASNR, exercerait les compétences des comités sociaux d'administration ainsi que les compétences des comités sociaux et économiques, sous réserve des adaptations prévues par décret en Conseil d'État.

Ce comité serait composé du président de l'ASNR ou de son représentant, qui le présiderait, de représentants de l'administration et de représentants du personnel. Seuls les représentants du personnel seraient appelés à prendre part aux votes lorsque le comité est consulté.

2. Au sein du CSA, deux commissions instituées pour représenter les agents publics et les salariés

Au sein du CSA, deux commissions seraient instituées pour garantir la représentation de chaque catégorie de personnels.

La commission des agents publics exercerait des attributions des comités sociaux d'administration mentionnées aux 3°, 4° et 5° de l'article L. 253-1 du code général de la fonction publique - soit, respectivement, les orientations stratégiques sur les politiques de ressources humaines ; les lignes directrices de gestion en matière de mobilité, de promotion et valorisation des parcours professionnels ; les enjeux et les politiques d'égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations - lorsque ces attributions concernent, de manière exclusive, les fonctionnaires et agents contractuels de droit public. Les autres attributions prévues à l'article L. 253-1 du code général de la fonction publique seraient donc abordées par la formation plénière (voir infra) - pour les attributions mentionnées au 1°, 2°, 6° et 8° - ou par la formation chargée des questions de santé, de sécurité et de conditions de travail (voir infra) - pour l'attribution mentionnée au 7°.

La commission des salariés exercerait des attributions des comités sociaux économiques, lorsqu'elles concernent, de manière exclusive, les personnels de droit privé, soit les attributions suivantes :

- présentation à l'employeur des réclamations individuelles ou collectives ; promotion de la santé, de la sécurité et de l'amélioration des conditions de travail dans l'entreprise et réalisation des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel ; possibilité de saisir l'inspection du travail de toutes les plaintes et observations relatives à l'application des dispositions légales (attributions mentionnées à l'article L. 2312-5 du code du travail). Les troisième - exercice du droit d'alerte - et avant-dernier alinéas - réclamations dans une entreprise en société anonyme - de cet article ne seraient pas applicables ;

- attributions de la commission de la formation, chargée notamment d'étudier les moyens permettant de favoriser l'expression des salariés en matière de formation et de participer à leur information dans ce domaine et d'étudier les problèmes spécifiques concernant l'emploi et le travail des jeunes et des travailleurs handicapés (article L. 2315-49 du code du travail) ;

- attributions de la commission de l'égalité professionnelle (article L. 2315-56 du code du travail).

Conformément aux dispositions de l'article L. 2312-6 du code du travail, ces attributions s'exerceraient au profit des salariés, ainsi qu'aux :

- travailleurs au sens de l'article L. 4111-5 du code du travail56(*), en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail ;

- salariés d'entreprises extérieures qui, dans l'exercice de leur activité, ne se trouvent pas placés sous la subordination directe de l'entreprise utilisatrice, pour leurs réclamations individuelles et collectives, intéressant les conditions d'exécution du travail qui relèvent du chef d'établissement utilisateur ;

- salariés temporaires pour leurs réclamations intéressant l'application des dispositions des articles L. 1251-18 du code du travail en matière de rémunération, L. 1251-21 à L. 1251-23 en matière de conditions de travail et L. 1251-24 en matière d'accès aux moyens de transport collectifs et aux installations collectives.

Les représentants du personnel siégeant au comité social d'administration seraient élus par les collèges des agents publics et des salariés, au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.

Les candidatures seraient présentées par les organisations syndicales qui remplissent les conditions de droit commun prévues par le code général de la fonction publique (articles L. 211-157(*) et L. 211-258(*)), pour le collège des agents publics, et par le code du travail (article L. 2314-559(*)) pour le collège des salariés. La composition de la représentation du personnel au sein du comité social d'administration doit être fixée par décret en Conseil d'État de façon à permettre la représentation de chaque collège, en tenant compte des effectifs, d'une part, des agents publics et, d'autre part, des salariés. L'idée serait donc de prévoir une composition qui permette une proportionnalité au sein du CSA unique par rapport aux effectifs relevant de chaque catégorie. L'ordre de grandeur serait de trois quarts de salariés et un quart d'agents publics au moment de la constitution de l'ASNR. Il reviendra au décret en Conseil d'État de fixer, dans le détail, le nombre de représentants du personnel à élire pour le collège des agents publics, et le nombre de représentants du personnel à élire au sein du collège des salariés.

À l'exception des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail, une formation plénière exercerait les compétences en principe dévolues aux comités sociaux d'administration et aux comités sociaux et économiques ; elle examinerait également les questions relatives aux attributions de la commission des agents publics et de la commission des salariés qui intéressent la situation de l'ensemble des personnels.

La composition des commissions et de la formation plénière, les modalités de désignation des représentants du personnel qui y siègent, leur fonctionnement et les moyens qui leur sont attribués doivent être définis par décret en Conseil d'État.

3. La mise en place d'une formation spécialisée chargée des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail

Au sein du comité social d'administration, une formation spécialisée chargée des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail exercerait, pour l'ensemble des personnels, les attributions habituellement exercées par ces formations aux seins des comités sociaux d'administration (en application de l'article L. 253-2 du code général de la fonction publique) ainsi qu'aux articles L. 2312-59 - alerte en cas d'atteinte aux droits des personnes - et L. 2312-60 du code du travail - alerte en situation de danger grave et imminent ainsi qu'en matière de santé publique et d'environnement - et aux livres Ier à V de la quatrième partie de ce code (relatifs à la santé et à la sécurité au travail).

Les représentants du personnel y seraient désignés dans les conditions de droit commun prévues à l'article L. 252-5 du code général de la fonction publique60(*). Son fonctionnement et les moyens qui lui seraient attribués doivent être fixés par décret en Conseil d'État.

Des formations locales santé, sécurité et conditions de travail compétentes pour l'ensemble des personnels pourraient également être instituées lorsque des risques professionnels particuliers le justifient. Les représentants du personnel y seraient désignés par les organisations syndicales représentées au sein du comité social d'administration. Un décret en Conseil d'État doit fixer les conditions d'application de cette disposition.

4. Un comité social d'administration doté de la personnalité civile

Par référence au premier alinéa de l'article L. 2315-23 du code du travail, il est précisé que le comité social d'administration serait doté de la personnalité civile et gèrerait son patrimoine (cette disposition est en principe applicable aux comités sociaux et économiques). Il gèrerait son budget de fonctionnement et le budget des activités sociales et culturelles de l'ensemble du personnel. Le fonctionnement et les moyens du comité, ainsi que les ressources destinées à financer ces activités doivent être fixés par décret en Conseil d'État.

Ce dispositif d'activités sociales et culturelles a vocation à se substituer, pour les agents publics, à l'action sociale interministérielle prévue par le code général de la fonction publique (titre III du livre VII).

Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, le transfert du CSE de l'IRSN justifie la dotation de la personnalité morale du futur CSA, pour sécuriser le transfert des biens, droits et obligations et assurer une même politique sociale pour l'ensemble des personnels.

C. Les règles des élections professionnelles et de négociations collectives tenant compte du caractère mixte de l'Autorité

L'article L. 592-12-2 (nouveau) du code de l'environnement fixe les règles des élections professionnelles et de négociations collectives, tenant compte du caractère mixte de l'Autorité. Le projet de loi prévoit, à cet égard, de transposer les règles de droit commun respectives s'attachant aux deux statuts, privé et public.

1. Les dispositions applicables aux salariés

Les délégués syndicaux seraient désignés, au niveau central, par les organisations syndicales représentatives du collège des salariés qui y constituent une section syndicale. Chaque syndicat qui constitue une section syndicale, pourrait, s'il n'est pas représentatif, désigner un représentant de la section.

Seraient représentatives au sein du collège des salariés les organisations syndicales qui satisfont aux critères mentionnés à l'article L. 2121-1 du code du travail61(*), à l'exception de celui mentionné au 5° du même article62(*), et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés aux dernières élections du comité social d'administration dans ce collège.

La validité des accords collectifs serait subordonnée à leur signature par, d'une part, le président de l'ASNR ou son représentant et, d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales représentatives selon les conditions définies à l'article L. 2232-12 du code du travail (voir encadré). Les taux de 30 % et de 50 % mentionnés à cet article seraient appréciés au sein du collège des salariés.

Conditions de validité d'un accord collectif (article L. 2232-12 du code du travail)

« La validité d'un accord d'entreprise ou d'établissement est subordonnée à sa signature par, d'une part, l'employeur ou son représentant et, d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants.

« Si cette condition n'est pas remplie et si l'accord a été signé à la fois par l'employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des élections mentionnées au premier alinéa, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages disposent d'un délai d'un mois à compter de la signature de l'accord pour indiquer qu'elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l'accord. Au terme de ce délai, l'employeur peut demander l'organisation de cette consultation, en l'absence d'opposition de l'ensemble de ces organisations.

« Si, à l'issue d'un délai de huit jours à compter de cette demande ou de l'initiative de l'employeur, les éventuelles signatures d'autres organisations syndicales représentatives n'ont pas permis d'atteindre le taux de 50 % mentionné au premier alinéa et si les conditions mentionnées au deuxième alinéa sont toujours remplies, cette consultation est organisée dans un délai de deux mois.

« La consultation des salariés, qui peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des élections mentionnées au premier alinéa, quel que soit le nombre de votants (...). 

« L'accord est valide s'il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

« Faute d'approbation, l'accord est réputé non écrit (...) ».

Par ailleurs, il est prévu que les salariés qui sont membres du comité social d'administration ou des formations « santé, sécurité et conditions de travail » et les délégués syndicaux ou représentants des sections syndicales bénéficient de la protection prévue au livre IV de la deuxième partie du code du travail (relatif aux salariés protégés).

Plus largement, les dispositions du code du travail (dispositions du chapitre III du titre IV du livre Ier de la deuxième partie) relatives aux délégués syndicaux auraient vocation à s'appliquer.

2. Les dispositions applicables aux agents publics

Pour les agents publics de l'ASNR, les organisations représentatives habilitées à négocier seraient celles qui disposent d'au moins un siège au sein du comité social d'administration, au titre du collège des agents publics.

En application des dispositions de l'article L. 223-1 du code général de la fonction publique, un accord conclu sur le fondement des articles L. 221-2 ou L. 222-2 du même code serait valide, pour les agents publics, s'il est signé par une ou plusieurs des organisations habilitées à négocier pour le collège de ces personnels.

Par la référence aux articles L. 221-2 ou L. 222-2 du code de la fonction publique, trois types d'accords sont visés :

accords au fond dans les domaines énumérés à l'article L. 222-3 du code général de la fonction publique, et pouvant comporter des clauses réglementaires, ou accords au fond qui interviendraient dans d'autres domaines mais sans possibilité d'y introduire des clauses réglementaires, en application de l'article L. 222-4 du code général de la fonction publique ;

accords-cadres, ouvrant la perspective d'accords au fond à un niveau inférieur ;

accord de méthode dont le but est de fixer le cadre applicable (nombre de réunions, durée prévisionnelle...) aux négociations au fond à venir.

3. Les dispositions communes aux salariés et aux agents publics

Il est enfin prévu que, dans les domaines mentionnés à l'article L. 222-3 du code général de la fonction publique (domaines sur lesquels des accords collectifs peuvent porter), l'ASNR puisse inviter les représentants des salariés et des agents publics à participer à des négociations conjointes. Il a été fait référence à un article du code général de la fonction publique (L. 222-3) - dont le champ est plus restreint que celui existant dans le privé - pour définir les domaines dans lesquels les représentants des agents publics et des salariés seraient habilités à participer à des négociations conjointes, afin de permettre d'ouvrir au plus grand nombre de matières possibles le champ des négociations propres à chaque catégorie de personnels.

Ces négociations donneraient lieu, le cas échéant, à la conclusion d'accords distincts et applicables spécifiquement aux salariés de droit privé, selon les modalités précédemment évoquées.

D. Une harmonisation des indemnités accessoires et des remboursements de frais de toute nature

Enfin, un nouvel article L. 592-12-3 du code de l'environnement autorise le collège de l'ASNR, dans le respect des dispositions légales applicables aux différentes catégories de personnels et en complément des dispositions réglementaires ainsi que des conventions, accords collectifs et engagements unilatéraux qui leur sont applicables, à harmoniser entre ces catégories les montants et conditions de versement des indemnités accessoires liées à des sujétions communes et les modalités de remboursements des frais de toute nature.

Seront par exemple concernés :

- les montants maximum de remboursement des nuitées ou des repas en déplacement, ou encore les conditions de prise en charge des billets de train ;

- les indemnités du personnel d'astreinte, par exemple dans le cadre du futur centre de crise unifié.

L'étude d'impact annexée au projet de loi justifie cette disposition par le fait que, faute de dispositions législatives spécifiques, la cohabitation, au sein de la future autorité, d'agents de statuts publics et privés pourrait conduire à des disparités de traitement en la matière.

III. Une diversité statutaire préservée, qui pourrait contribuer à renforcer l'attractivité de la future autorité, tout en donnant des garanties aux salariés de l'IRSN et aux agents de l'ASN

La commission a considéré que la cohabitation des statuts de droit public et de droit privé et l'instauration de règles de dialogue social s'adaptant à cette diversité pourraient contribuer à renforcer l'attractivité de la future autorité, tout en donnant des garanties aux salariés de l'IRSN et aux agents de l'ASN quant au maintien de leurs droits existants.

Hormis un amendement de clarification COM-1 du rapporteur, la commission n'a donc pas souhaité modifier l'équilibre de cet article, fruit d'un travail de dialogue entre l'ensemble des parties prenantes.

La commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Section 2
Dispositions transitoires
Article 7
Transfert des salariés de l'IRSN à l'ASNR
et au CEA

Cet article définit les modalités de transfert des salariés de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) à l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) et au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). D'une part, pour maintenir le statut des salariés de l'IRSN au sein de l'ASNR, le projet de loi prévoit une dérogation aux dispositions de droit commun du code du travail. L'article prévoit, d'autre part, le transfert au CEA des 140 salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) et des 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée.

Les dispositions transitoires retenues sont cohérentes avec le choix opéré par le Gouvernement à l'article 6 de faire cohabiter les salariés et les agents publics au sein de la nouvelle autorité.

La commission a donc adopté l'article 7 sans modification.

I. Un transfert des salariés de l'IRSN posant des difficultés de plusieurs ordres

A. Un droit existant qui conduirait à ce que les salariés de l'IRSN soient contraints d'accepter un contrat de droit public au sein de l'ASNR, à rebours de l'intention affichée par le projet de loi

L'IRSN est un établissement public industriel et commercial (EPIC), qui emploie des salariés de droit privé, pour un effectif total de 1 744 personnes en 2022.

Dans le cadre du projet de fusion proposé par le Gouvernement, l'essentiel de ces salariés (1 600 environ) a vocation à intégrer la nouvelle autorité administrative indépendante - l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

Faute de dispositions dérogatoires, l'article L. 1224-3 du code du travail aurait vocation à s'appliquer dans ce cas de figure. En ce que cet article conduirait à ce que les salariés de l'IRSN soient contraints d'accepter un contrat de droit public s'ils souhaitent poursuivre leur activité au sein de l'ASNR (voir encadré), son application serait contradictoire avec l'intention affichée par le projet de loi, visant à maintenir le statut de droit privé des salariés de l'IRSN au sein de la nouvelle entité.

Article L. 1224-3 du code du travail

« Lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires.

« Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique contraires, le contrat qu'elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération.

« Les services accomplis au sein de l'entité économique d'origine sont assimilés à des services accomplis au sein de la personne publique d'accueil.

« En cas de refus des salariés d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne publique applique les dispositions relatives aux agents licenciés prévues par le droit du travail et par leur contrat. »

B. Deux cas particuliers : les salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense et les salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation des dosimètres

1. Les salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) de l'IRSN

La direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) de l'IRSN est chargée d'expertiser les dossiers dans des domaines relevant de prérogatives du Gouvernement, en matière notamment de sécurité des installations civiles et des transports de matière nucléaire, de sûreté et de radioprotection pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense, de non-prolifération et de contrôle des matières dangereuses (chimique, biologique et nucléaire).

Cette DEND fournit, d'une part, un appui technique au haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère de la transition écologique, lequel définit et met en oeuvre les politiques de sécurité des installations civiles.

Elle fournit, d'autre part, un appui technique au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection (DSND) placé auprès du ministre de la défense et du ministre chargé de l'industrie, autorité de sûreté compétente concernant les installations et les activités intéressant la défense.

La DEND compte environ 140 salariés.

Faute de dispositions dérogatoires, ces personnels auraient vocation à être transférés dans l'autorité administrative indépendante, l'ANSR, que le projet de loi propose de créer.

2. Les salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée

Par ailleurs, environ 40 salariés de l'IRSN sont actuellement en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée (ou dosimètres passifs).

Dosimétrie passive et dosimétrie interne

L'IRSN exerce aujourd'hui des activités de dosimétrie sous deux formes complémentaires.

La dosimétrie passive permet de mesurer l'exposition externe des personnes. L'IRSN détient environ la moitié du marché national de dosimètres passifs. L'activité de dosimétrie passive consiste en la fabrication dans des chaînes de fabrication de 1,5 million de dosimètres par an pour 25 000 clients, en leur commercialisation puis en la lecture de ces dosimètres dans des machines spécialisées. Les dosimètres sont en effet envoyés à leurs destinataires pour usage puis retournés à l'IRSN pour être lus.

La dosimétrie interne (anthroporadiométrie, radiotoxicologie) permet de mesurer l'exposition interne des personnes.

Faute de dispositions dérogatoires, ces personnels auraient vocation à être transférés au sein de l'ANSR, ce qui pourrait poser des difficultés potentielles au regard du droit de la concurrence. En effet, ces activités nécessitent un démarchage commercial actif de l'entité qui les opère, auprès de clients qui seront soumis au contrôle de l'ASNR.

II. Des dispositions transitoires ayant vocation à répondre aux problématiques soulevées par la fusion en matière de transfert des personnels

L'article 7 du projet de loi prévoit des dispositions transitoires ayant vocation à répondre aux problématiques précédemment évoquées.

A. Pour maintenir le statut des salariés de l'IRSN au sein de l'ASNR, une dérogation à l'article L. 1224-3 du code du travail

Le Gouvernement prévoit de faire cohabiter les différents statuts, publics et privés, au sein de la nouvelle autorité. L'étude d'impact annexée au projet de loi met en avant deux raisons principales pour justifier ce choix :

- la volonté de contribuer à l'attractivité de la future autorité en conservant la diversité des viviers de recrutement ;

- le souhait de garantir les droits des salariés de l'IRSN, comme des agents de droit public de l'ASN.

Au regard de ces objectifs, les deux alternatives ont été écartées par le Gouvernement :

- le recrutement de fonctionnaires et de contractuels de droit public uniquement ne répondait pas à plusieurs besoins essentiels, notamment à la continuité des conditions d'emploi des salariés de l'IRSN et à l'attractivité de la future autorité, en particulier pour les activités de recherche ;

- le recrutement de fonctionnaires détachés sur contrat de droit privé, ainsi que de salariés de droit privé uniquement, car cette option aurait méconnu la nature publique d'une autorité administrative indépendante, tout en étant peu attractive pour les fonctionnaires de l'ASN.

Pour traduire cette intention, l'article 7 prévoit que l'ASNR sera substituée à l'IRSN en qualité d'employeur des salariés de l'Institut, à l'exception des salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) et des salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée. Les contrats de travail des intéressés lui sont transférés sans autre modification. Afin de maintenir le statut des salariés de l'IRSN au sein de l'ASNR, il est prévu de ne pas appliquer l'article L. 1224-3 du code du travail à ces transferts.

B. Un transfert de 180 salariés au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

L'article 7 prévoit le transfert des 140 salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) et des 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

D'une part, il est ainsi précisé que le CEA, ou une de ses filiales désignée par décret, sera substitué à l'IRSN en qualité d'employeur des salariés de l'institut qui exercent des missions relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée. Les contrats de travail des intéressés lui seraient transférés sans autre modification. Ce transfert permettrait de maintenir des activités nécessitant un démarchage commercial actif, sans poser de difficultés au regard du droit de la concurrence.

D'autre part, il est précisé que le CEA sera substitué à l'IRSN en qualité d'employeur des salariés de l'Institut qui apportent un appui technique aux autorités de l'État dans les matières suivantes :

sûreté nucléaire et radioprotection, pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense, y compris en cas d'incident ou d'accident ;

sécurité des installations et des transports des matières nucléaires ou des sources de rayonnements ionisants ;

non-prolifération, contrôle et comptabilité centralisée des matières nucléaires ;

interdiction des armes chimiques, au titre de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques.

Les contrats de travail de ces salariés seraient transférés au CEA sans autre modification. Les intéressés seraient, d'office, mis à disposition du ministre de la défense - en pratique auprès du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection (DSND) - pour y exercer leur mission pendant une durée de trois ans, renouvelable de plein droit à leur demande. Ces mises à disposition seraient régies par les dispositions de l'article L. 334-1 du code général de la fonction publique63(*). À l'issue de sa mise à disposition, le salarié serait affecté au sein du CEA sur un poste correspondant à ses qualifications, sans perte de rémunération. Les modalités des transferts et mises à disposition ainsi que de l'appui technique apporté aux autorités de l'État compétentes prévues par le présent article doivent être précisées par décret en Conseil d'État.

Plusieurs options alternatives ont été écartées par le Gouvernement. Le transfert des contrats vers l'ASNR, puis leur mise à disposition du ministère de la défense, aurait conduit à placer des personnels en charge d'activités en lien avec des compétences régaliennes au sein d'une autorité administrative indépendante. Le transfert direct des salariés au ministère de la défense, en maintenant leur statut de droit privé, ne constituait pas, non plus, une solution satisfaisante : des contractuels de droit privé ne peuvent pas être recrutés par les administrations d'État. Enfin, le rattachement des salariés au ministère de la défense en leur proposant un nouveau contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur contrat n'était pas plus approprié : cette option aurait été particulièrement non attractive pour les salariés de l'IRSN qui auraient perdu l'ensemble des avantages qui s'attachent à leur statut.

III. Un article adopté sans modification

Les dispositions transitoires retenues sont cohérentes avec le choix opéré par le Gouvernement à l'article 6 de faire cohabiter les salariés et les agents publics au sein de la nouvelle autorité. Elles n'appellent pas, à cet égard, d'observations particulières.

La commission a adopté l'article 7 sans modification.

Article 8
Dispositions transitoires en matière de conventions et d'accords collectifs

Cet article détermine les dispositions transitoires en matière de conventions et d'accords collectifs. Il prévoit ainsi que les salariés transférés à l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) conserveront les effets des conventions et accords ainsi que des engagements unilatéraux applicables au sein de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au 1er janvier 2025 jusqu'à l'entrée en vigueur des nouveaux accords et conventions qui leur seront substitués, ou à défaut jusqu'au 30 juin 2027. Le projet de loi prévoit ainsi une durée transitoire maximale de 30 mois pour les salariés transférés à l'ASNR. Les salariés transférés au CEA se verraient, quant à eux, appliquer le régime de droit commun, caractérisé par un maintien de l'effet des conventions et accords collectifs - mais pas des engagements unilatéraux - pour une durée maximale de 15 mois.

La commission a adopté l'article 8, en ne le modifiant qu'à la marge par deux amendements.

I. Les dispositions du code du travail relatives au transfert des accords et conventions collectifs en cas de modification de la situation juridique de l'employeur

La section 6 du chapitre Ier du titre VI du livre II de la deuxième partie du code du travail (articles L. 2261-14 à L. 2261-14-4) comporte les dispositions relatives au transfert des accords et conventions collectifs en cas de modification de la situation juridique de l'employeur (fusion, cession, scission ou changement d'activité de l'entreprise).

L'article L. 2261-14 prévoit ainsi que lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause en cas de modification de la situation juridique de l'employeur, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration d'un délai de préavis de trois mois (prévu à l'article L. 2261-9 du code du travail), sauf clause prévoyant une durée supérieure. Les salariés transférés peuvent donc, pendant cette durée, se prévaloir du dispositif le plus favorable entre celui de l'entité absorbante et celui de l'entité absorbée.

Lorsque la convention ou l'accord qui a été mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans ce délai de 15 mois, les salariés concernés bénéficient d'une garantie de rémunération. Le montant annuel de cette garantie de rémunération, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par le contrat de travail, ne peut être inférieur à la rémunération versée, en application de la convention ou de l'accord mis en cause, lors des douze derniers mois.

Une négociation postérieure au transfert des salariés doit s'engager, à la demande d'une des parties intéressées, dans les 3 mois qui suivent la mise en cause des accords.

Le code du travail prévoit deux autres dispositifs permettant d'anticiper le sort du statut collectif des salariés transférés avant l'opération :

- la négociation d'un accord d'adaptation (article L. 2261-14-3 du code du travail), négocié en amont et destiné à anticiper l'harmonisation des statuts collectifs applicables en se substituant aux accords collectifs mis en cause dans l'entité absorbée et en révisant ceux en vigueur au sein de l'entité absorbante ;

- la négociation d'un accord de transition (article L. 2261-14-2 du code du travail) permettant d'assurer la transition avec le statut collectif du nouvel employeur pendant une durée maximale de trois ans, applicable aux seuls salariés transférés.

II. Une adaptation des règles transitoires en matière de conventions et d'accords collectifs

A. Une dérogation aux dispositions de droit commun du code du travail pour les salariés transférés à l'ASNR

Selon les dispositions de l'article 8, tel que proposé par le Gouvernement, les salariés transférés à l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) conserveraient les effets des conventions et accords, mais aussi des engagements unilatéraux, applicables au sein de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au 1er janvier 2025 jusqu'à l'entrée en vigueur des nouveaux accords et conventions qui leur seront substitués, ou à défaut jusqu'au 30 juin 2027 (soit une durée transitoire maximale de 30 mois).

À compter de la date d'entrée en vigueur du projet de loi - soit le 1er janvier 2025 - et jusqu'à la désignation des représentants du personnel de l'ASNR - au plus tard le 31 mars 2026 (cf. article 10), l'autorité et les délégués syndicaux de l'IRSN devraient engager, à la demande de l'une des parties intéressées, les négociations destinées soit à adapter les stipulations actuelles des conventions et accords, soit à élaborer de nouvelles stipulations. Ces négociations ont vocation à continuer avec les délégués syndicaux des salariés de la nouvelle autorité à compter de leur désignation.

À compter du 1er juillet 2027, en l'absence de conventions et d'accords de substitution, les salariés pourraient bénéficier d'une garantie de rémunération selon les modalités fixées par l'article L. 2261-14 du code du travail.

Pour les salariés transférés à l'ASNR, le projet de loi prévoit ainsi une durée transitoire maximale de 30 mois, en l'étendant aux engagements unilatéraux, par dérogation aux dispositions de droit commun du code du travail (15 mois de période transitoire maximale). Selon le Gouvernement, ce délai se justifie par l'absence, au sein de l'ASN, d'accords et conventions applicables à des salariés. Le cadre dérogatoire prévu par le projet de loi vise donc à répondre à un cas spécifique et inédit - celui de l'intégration de salariés au sein d'une autorité administrative indépendante (AAI) - nécessitant un vaste travail de négociations.

B. Une application des règles de droit commun pour les salariés transférés au CEA

L'article 8 prévoit, en revanche, une application des règles de droit commun, inscrites à la section 6 du chapitre Ier du titre VI du livre II de la deuxième partie du code du travail, pour les 140 salariés de la direction de l'expertise nucléaire de défense (DEND) et les 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l'exploitation de dosimètres à lecture différée, qui seraient transférés au commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) en application de l'article 7 du projet de loi.

Cette différence de traitement avec les salariés de l'IRSN transférés à l'ASNR s'explique par la différence de situation : s'agissant du CEA, il existe déjà un corpus d'accords dont les travaux préliminaires montrent qu'il est globalement assez proche de celui de l'IRSN. Les dispositions de droit commun semblent donc suffisantes pour engager la transition en matière de conventions et d'accords collectifs.

III. Un article ajusté à la marge par la commission

La commission a adopté un amendement COM-42 qui permettra à l'ensemble des salariés de droit privé de bénéficier des conventions, accords et engagements unilatéraux qui étaient applicables au 31 décembre 2024 à l'IRSN jusqu'à l'entrée en vigueur des conventions, accords ou engagements qui leur sont substitués au sein de la nouvelle autorité.

Elle a également adopté un amendement rédactionnel COM-2 du rapporteur.

La commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.

Article 9
Possibilité pour les agents contractuels et les salariés privés de la future autorité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d'accéder à un corps de fonctionnaire

Cet article donne aux agents contractuels et aux salariés privés de la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) l'opportunité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d'accéder à des corps de fonctionnaire qui seront identifiés comme pertinents pour les missions de l'autorité.

La commission approuve la portée de cet article, qui contribuera à renforcer l'attractivité de la future ASNR. Toutefois, étant adapté à peu de salariés, son impact devrait être restreint.

La commission a donc adopté l'article 9 sans modification.

I. Concours externe, concours interne ou troisième concours : les modalités de recrutement des fonctionnaires

L'article L. 320-1 du code général de la fonction publique dispose que les fonctionnaires sont, en principe, recrutés par concours. L'article L. 325-1 du même code prévoit trois types de concours :

- le concours externe, ouvert à tous les candidats justifiant de certains diplômes ou de certaines études ;

- le concours interne, réservé aux agents ayant accompli une certaine durée de service ;

- le troisième concours, réservé à des candidats justifiant d'une expérience professionnelle dans le secteur privé ou associatif, ou de l'exercice d'un mandat électif local.

II. Par dérogation au droit commun, la création d'un concours réservé

Par dérogation à l'article L. 325-1 du code général de la fonction publique, l'article 9 donne aux agents contractuels et aux salariés privés de la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) l'opportunité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d'accéder à des corps de fonctionnaire qui seront identifiés par décret comme pertinents pour les missions de l'autorité.

Pendant une durée de six ans à compter de l'entrée en vigueur de la réforme, soit au 1er janvier 2025, un accès aux corps de fonctionnaires de l'État, dont la liste serait fixée par décret en Conseil d'État, pourrait ainsi être organisé par la voie de recrutements réservés exceptionnels valorisant les acquis de l'expérience professionnelle.

L'accès aux corps de fonctionnaires concernés serait réservé aux agents contractuels de droit public et aux salariés de droit privé de l'ASNR qui, à la date du 31 décembre de l'année précédant celle au titre de laquelle est ouvert le recrutement réservé exceptionnel, sont en fonctions ou bénéficient d'un des congés assimilables à du travail effectif, et qui justifient à cette date d'une durée d'ancienneté de quatre années en équivalent temps plein au sein de l'Institut de radioprotection de sûreté nucléaire (IRSN), de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ou de l'ASNR.

Ce concours est présenté par le Gouvernement comme un facteur d'attractivité pour la nouvelle autorité, en ce qu'il offrirait la possibilité aux agents contractuels publics ou salariés privés rejoignant la future entité de s'inscrire dans une carrière publique étatique en rejoignant un corps de la fonction publique.

La durée de six ans retenue par l'article 9 est estimée nécessaire pour que le recrutement exceptionnel puisse être organisé dans une situation où les candidats auront connaissance des avantages et inconvénients de leur intégration dans un corps de fonctionnaires par rapport à leur situation initiale. L'article 8 du projet de loi prévoit en effet une période maximale de 30 mois pendant laquelle les conditions des conventions et accords qui sont applicables aux salariés seront renégociées. La période de six ans permettrait un délai « utile » d'un peu plus de trois ans après la fin de cette situation transitoire.

Le Gouvernement souligne, de plus, qu'un dispositif du même type a déjà été prévu par le passé. Une ordonnance du 16 mai 201864(*) a ainsi prévu que l'accès aux corps de fonctionnaires du ministère de la justice, dont la liste était fixée par décret en Conseil d'État, pouvait être organisé par la voie de recrutements réservés exceptionnels valorisant les acquis de l'expérience professionnelle. Il s'agissait d'instituer des recrutements réservés exceptionnels au seul profit des salariés de droit privé et des agents contractuels de l'État exerçant leurs fonctions au sein des juridictions sociales pour leur permettre d'intégrer des corps de fonctionnaires du ministère de la justice.

III. Un dispositif approprié, dont l'impact devrait toutefois être limité

La commission porte un regard favorable sur cet article, qui contribuera à renforcer l'attractivité de la future ASNR.

Le dispositif proposé offre, de plus, une solution partielle aux craintes d'une érosion de l'effectif des personnels fonctionnaires d'État dans la future autorité, formulée par les représentants syndicaux de l'ASN lors de leur audition par le rapporteur.

Toutefois, étant adapté à peu de salariés, son impact devrait être restreint ; en effet, le passage au statut de fonctionnaire pour des salariés de droit privé ayant déjà une carrière avancée pourrait ne pas constituer une option intéressante, notamment en matière de droit à la retraite.

La commission a adopté l'article 9 sans modification.

Article 10
Dispositions transitoires tendant à garantir la continuité de la représentation sociale de la future autorité

Cet article prévoit les dispositions transitoires tendant à garantir la continuité de la représentation sociale de la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), qui devrait être créée le 1er janvier 2025. La constitution du comité social d'administration (CSA) de l'ASNR devrait intervenir au plus tard le 31 mars 2026 ; jusqu'à cette constitution, le CSA de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le comité social et économique (CSE) de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) seraient maintenus en fonction et exerceraient les missions relatives respectivement aux agents publics et aux salariés.

Les dispositions transitoires retenues sont cohérentes avec les choix opérés par le Gouvernement de faire cohabiter les salariés et les agents publics au sein de la nouvelle autorité et d'y créer une instance de dialogue social singulière - le comité social d'administration - compétent pour l'ensemble des personnels (article 6). La commission salue par ailleurs l'ajustement fait par le Gouvernement à la demande des syndicats de l'ASN et de l'IRSN : initialement fixé à 12 mois, le délai imparti pour mettre en place le nouveau CSA a été étendu à 15 mois.

La commission a adopté deux amendements identiques de clarification, visant à préciser que la formation conjointe du CSA de l'ASN et du CSE de l'IRSN pourra siéger à la demande de ces comités et à la demande du président de la nouvelle autorité.

Elle a donc adopté l'article 10 ainsi modifié.

I. Un projet de loi prévoyant la mise en place d'une instance de dialogue social singulière : un comité social d'administration, compétent pour l'ensemble des personnels de l'Autorité, qu'ils relèvent du droit public ou du droit privé

Un comité social d'administration (CSA) constitue aujourd'hui l'instance de dialogue social de l'Autorité de sûreté nucléaire, comme la loi le prévoit pour les administrations de l'État, y compris pour les autorités administratives indépendantes (AAI) (article L. 251-2 du code général de la fonction publique).

Comme dans toutes les structures de droit privé de plus de onze salariés, l'instance de dialogue social de l'IRSN est un comité social et économique (CSE).

Afin d'assurer la représentation de l'ensemble des personnels de tous statuts au sein des instances de la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), issu de la fusion entre l'ASN et l'IRSN, l'article 6 prévoit la mise en place d'un comité social d'administration (CSA) unique (article L. 592-12-1 (nouveau)).

Ce CSA unique, compétent pour l'ensemble du personnel de l'ASNR, exercerait les compétences des comités sociaux d'administration ainsi que les compétences des comités sociaux et économiques, sous réserve des adaptations prévues par décret en Conseil d'État. Au sein du CSA, deux commissions seraient instituées, la commission des agents publics et la commission des agents privés : elles seraient compétentes sur les problématiques qui concerneraient, de manière exclusive, les personnels de droit public et les personnels de droit privé, respectivement.

À l'exception des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail, une formation plénière exercerait les compétences en principe dévolues aux comités sociaux d'administration et aux comités sociaux et économiques ; elle examinerait également les questions relatives aux attributions de la commission des agents publics et de la commission des salariés qui intéressent la situation de l'ensemble des personnels.

Au sein du comité social d'administration, une formation spécialisée serait chargée, pour l'ensemble des personnels, des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail.

Ce CSA serait doté de la personnalité civile et gérerait son patrimoine - comme l'actuel comité social et économique de l'IRSN.

L'article 6 fixe enfin les règles des élections professionnelles, en prévoyant la représentation des salariés par des délégués syndicaux et celle des agents publics.

II. Jusqu'à la constitution du nouveau CSA, au plus tard le 31 mars 2026, le comité social d'administration de l'ASN et le comité social et économique de l'IRSN maintenus en fonction

L'article 10 prévoit que jusqu'à la constitution du comité social d'administration de l'ASNR, qui interviendrait au plus tard le 31 mars 2026, le CSA de l'ASN et le CSE de l'IRSN seraient maintenus en fonction et exerceraient les missions relatives respectivement aux agents publics et aux salariés, sous la présidence du représentant de l'ASNR.

Les membres de ces instances représentatives du personnel poursuivraient leur mandat jusqu'à la désignation des représentants du personnel issus des élections permettant la constitution du CSA de l'ASNR.

Les comités pourraient siéger en formation conjointe, dans le respect de leurs attributions respectives, pour connaître des sujets communs à l'ensemble du personnel. Dans ce cas, les conditions de vote s'apprécieraient au regard de l'ensemble des membres présents de la formation conjointe. L'avis de la formation conjointe se substituerait aux avis de chacune des instances.

Le patrimoine du CSE de l'IRSN serait dévolu au CSA de l'ASNR à la date de la désignation des membres de celui-ci.

Par dérogation aux dispositions de l'article L. 2143-10 du code du travail, les mandats des délégués syndicaux désignés au sein de l'IRSN subsisteraient au sein de l'ASNR. Leur mandat prendrait fin au plus tard à la date de la désignation des membres du CSA de l'ASNR.

Un décret en Conseil d'État doit préciser les modalités d'application de cet article 10.

III. Un article cohérent avec les choix opérés par le Gouvernement et un délai transitoire opportunément adapté

Les dispositions transitoires retenues sont cohérentes avec les choix opérés par le Gouvernement de faire cohabiter les salariés et les agents publics au sein de la nouvelle autorité et d'y créer d'une instance de dialogue social singulière - le comité social d'administration - compétent pour l'ensemble des personnels (article 6).

La commission salue par ailleurs l'ajustement fait par le Gouvernement à la demande des syndicats de l'ASN et de l'IRSN : initialement fixé à 12 mois, le délai imparti pour mettre en place le nouveau CSA a été étendu à 15 mois.

Elle a adopté deux amendements identiques de clarification COM-7 du rapporteur et COM-89 du rapporteur pour avis, visant à préciser que la formation conjointe du CSA de l'ASN et du CSE de l'IRSN pourra siéger à la demande de ces comités ou à la demande du président de la nouvelle autorité. Un amendement COM-43, rédactionnel, a également été adopté.

La commission a adopté l'article 10 ainsi modifié.

Article 11
Augmentation des rémunérations versées à l'IRSN et à l'ASN ; élaboration d'un rapport du Gouvernement et d'évaluations par l'ASNR sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à la nouvelle autorité

Cet article prévoit que l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) consacrent respectivement 15 millions d'euros et 0,7 million d'euros à l'augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024. L'article vise par ailleurs à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er janvier 2024, un rapport sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à la nouvelle autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) en 2025 pour exercer ses missions dans le nouveau contexte nucléaire, ainsi que les mesures indispensables pour assurer l'attractivité des conditions d'emploi de ses personnels par rapport au marché du travail dans le domaine du nucléaire. L'ASNR devrait également évaluer ces besoins et ces mesures dans les cinq années suivant la promulgation de la présente loi et présenter ses propositions au Gouvernement et au Parlement.

Prenant acte de l'avis défavorable du Conseil d'État sur cet article, la commission n'a toutefois pas souhaité modifier substantiellement son équilibre, considérant que le signal envoyé aux salariés de l'IRSN et aux contractuels de droit public de l'ASN devait être préservé. Un message similaire devra être envoyé aux fonctionnaires de l'ASN.

La commission a modifié cet article, afin d'intégrer le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans le rapport d'évaluation sur les moyens de la sûreté nucléaire. Un amendement a également été adopté pour que soient évaluées la faisabilité et l'opportunité d'instituer un préfigurateur chargé de la mise en oeuvre de la création de l'ASNR.

La commission a adopté l'article 11 ainsi modifié.

I. Un écart de rémunération entre le secteur public et le secteur privé, qui grève l'attractivité des instances publiques en charge de la sûreté nucléaire

Dans le contexte de relance du nucléaire, une forte concurrence est à l'oeuvre entre les acteurs de la filière pour le recrutement de compétences rares.

La rémunération est l'un des facteurs d'attractivité que peut déployer une entité pour attirer à elle les ressources humaines disponibles. À cet égard, l'écart de rémunération entre le secteur public et le secteur privé - qui varie en moyenne de 20 % à 30 % en fonction des profils considérés - constitue un handicap pour les instances publiques en charge de la sûreté nucléaire.

Cette problématique figure parmi les priorités identifiées par l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opesct) dans son rapport de juillet 2023 consacré à l'opportunité d'une fusion entre l'ASN et l'IRSN65(*) : « l'augmentation des effectifs doit aller de pair avec un renforcement de l'attractivité des métiers concernés, y compris sur le plan des rémunérations. Leur fixation doit tenir compte non seulement des conditions offertes dans d'autres établissements publics, tel le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), mais aussi de celles qui sont proposées dans les entreprises du secteur privé recrutant dans le même secteur ».

II. Une augmentation des rémunérations versées à l'IRSN et à l'ASN, et l'élaboration d'un rapport du Gouvernement et d'évaluations par l'ASNR sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à la nouvelle autorité

L'article 11 prévoit que l'IRSN et l'ASN consacrent respectivement 15 millions d'euros et 0,7 million d'euros à l'augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024.

Ces montants, fixés au prorata des effectifs des deux institutions en ne tenant compte que des personnels sous contrat (salariés et contractuels de droit public), correspondent à une moyenne de 730 euros par mois par personne (cotisations sociales, salariales et patronales, incluses). Par ailleurs, la loi laisse latitude aux directions générales des deux institutions pour procéder à une répartition de ces montants de manière à tenir compte des métiers en tension. Une utilisation individualisée de cette enveloppe devrait donc permettre de traiter les situations où ce différentiel est le plus pénalisant.

L'article vise par ailleurs à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er janvier 2024, un rapport sur les besoins prévisionnels humains et financiers qui seront nécessaires à la nouvelle autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) en 2025 pour exercer ses missions dans le nouveau contexte nucléaire, ainsi que les mesures indispensables pour assurer l'attractivité des conditions d'emploi de ses personnels par rapport au marché du travail dans le domaine du nucléaire. L'ASNR devrait également évaluer ces besoins et ces mesures dans les cinq années suivant la promulgation de la présente loi et présenter ses propositions au Gouvernement et au Parlement.

III. Un signal envoyé aux salariés de l'IRSN et aux contractuels de droit public de l'ASN devant être préservé et répliqué pour les fonctionnaires de cette dernière

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a estimé que la première de ces dispositions, inédite et empiétant sur les prérogatives de l'IRSN et de son autorité de tutelle ainsi que de l'ASN, ne relevait pas du domaine de la loi tel qu'il est défini par l'article 34 de la Constitution.

Il a également considéré que les deux dernières dispositions ne pouvaient être regardées, compte tenu de leur objet, comme destinées à assurer l'information du Parlement afin de lui permettre de contrôler l'action du Gouvernement et d'évaluer les politiques publiques et ne relevaient, par suite, pas non plus du domaine de la loi.

Prenant acte de cette analyse, le rapporteur n'a toutefois pas souhaité modifier substantiellement l'équilibre de l'article proposé, considérant que le signal envoyé aux salariés de l'IRSN et aux contractuels de droit public de l'ASN devait être préservé.

Un message similaire devra être envoyé aux fonctionnaires de l'ASN. Dans leurs réponses adressées au questionnaire du rapporteur, les services du ministère de la Transition écologique ont affirmé que des échanges étaient en cours entre départements ministériels pour apporter aux fonctionnaires un supplément de rémunération, pour tirer les conséquences de cette fusion : « le principe en est acquis mais les modalités sont à travailler dans les prochains mois ».

La commission a modifié cet article, afin d'intégrer le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans le rapport d'évaluation sur les moyens de la sûreté nucléaire (amendement COM-68 du rapporteur pour avis). Un amendement COM-69 du rapporteur pour avis a également été adopté pour que soient évaluées la faisabilité et l'opportunité d'instituer un préfigurateur chargé de la mise en oeuvre de la création de l'ASNR.

L'article 11 a également été modifié par un amendement de clarification COM-3 du rapporteur : l'ASNR ne devra évaluer les besoins nécessaires et les mesures indispensables que dans les cinq années suivant l'entrée en vigueur du titre Ier du projet de loi (1er janvier 2025) et non sa promulgation.

La commission a adopté l'article 11 ainsi modifié.

CHAPITRE III
Le haut-commissaire à l'énergie atomique
Article 12
Modification du positionnement du haut-commissaire à l'énergie atomique

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires économiques.

Lors de sa réunion, la commission des affaires économiques a adopté l'amendement COM-52 de son rapporteur M. Patrick Chaize.

La commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.

CHAPITRE IV
Dispositions de coordination et finales
Article 13
Soumission de la recherche de l'ASNR à l'évaluation du HCERES et coordination

Cet article vise à soumettre la recherche de l'ASNR à l'évaluation du HCERES66(*) et à effectuer des coordinations légistiques.

La commission a adopté deux amendements permettant à l'ensemble des personnels de l'ASNR de participer aux missions de contrôle de l'autorité et effectuant une coordination légistique.

La commission a adopté l'article 13 ainsi modifié.

I. Un article de coordination légistique, qui permet au HCERES d'évaluer les activités de recherche de l'ASNR

Les références communes à l'ASN et à l'IRSN sont remplacées par une référence à l'ASNR dans le code de la consommation67(*) et dans le code de l'environnement68(*).

La référence à la mission de suivi de la recherche de l'ASN à l'article L. 592-31-1 du code de l'environnement, intégrée par l'article 3 du présent projet de loi à l'article L. 592-28-2 du même code, est supprimée.

L'article L. 592-34 du code de l'environnement, qui prévoit un décret en Conseil d'État précisant les conditions d'application du chapitre relatif à l'ASN et à l'IRSN est abrogé. Un article L. 592-45 est créé, qui reprend le renvoi à un décret en Conseil d'État d'application en l'adaptant à la création de l'ASNR.

L'article L. 114-3-1 du code de la recherche est modifié pour permettre au Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES) d'évaluer, à la demande de l'ASNR, les activités de recherche de l'autorité.

Le code de la recherche est également modifié69(*), pour rendre l'abrogation par l'article 12 du présent projet de loi de l'article L. 332-4 du même code relatif au haut-commissaire à l'énergie atomique applicable à l'outre-mer.

Enfin les références à l'IRSN du code de la santé publique sont supprimées70(*).

II. La commission a adapté les articles relatifs aux missions d'inspection de l'ASNR aux nouveaux statuts du personnel de l'ASNR

La possibilité offerte par le présent article d'évaluer les activités de recherche de l'ASNR par le HCERES, qui évaluait déjà l'IRSN, est de nature à renforcer les activités de recherche de l'autorité.

La commission a adopté un amendement du rapporteur  COM-18 qui vise à permettre à l'ensemble des personnels de l'ASNR d'être nommés inspecteurs de la sûreté nucléaire, de mener des enquêtes techniques et d'être nommés inspecteurs de la radioprotection en remplaçant le terme « agents » par le terme plus englobant de « personnels ».

Le personnel de la future ASNR serait à la fois composé d'agents publics (fonctionnaires et contractuels) et de salariés de droit privé.

L'avis du Conseil d'État sur le projet de loi initial71(*) relève « qu'aucune exigence constitutionnelle n'impose que tous les emplois participant à l'exercice de “fonctions régaliennes” soient occupés par des fonctionnaires », et que, par conséquent, les salariés de droit privé recrutés par l'ASNR pourraient occuper les fonctions d'inspecteur de la sûreté nucléaire ou de la radioprotection.

L'amendement adopté ne conduit pas à confier aux salariés de droit privé qui seraient inspecteurs de sûreté nucléaire l'exercice de prérogatives de police judiciaire. Les articles L. 172-4 et L. 596-10 du code de l'environnement, qui ne sont pas modifiés, réservent l'exercice de ces prérogatives aux fonctionnaires et aux agents publics.

La commission a par ailleurs adopté un amendement de coordination COM-70 du rapporteur pour avis, qui vise à assurer l'application outre-mer de l'article 12 du présent projet de loi.

La commission a adopté l'article 13 ainsi modifié.

Article 14
Actualisation de références législatives et conditions de nomination du président de l'ASNR

Cet article vise à actualiser les références législatives à l'ASN et à l'IRSN ainsi qu'à préciser la commission compétente pour entendre en audition le président de l'ASNR, au titre de l'article 13 de la Constitution.

La commission a adopté six amendements, qui visent à prévoir l'audition au titre de l'article 13 de la Constitution du président de la future ASNR par la commission compétente en matière de prévention des risques technologiques et naturels et à renforcer la sécurité juridique du dispositif.

La commission a adopté l'article 14 ainsi modifié.

I. Le Parlement contrôle l'action du Gouvernement, y compris dans le domaine de la sûreté nucléaire

L'article 20 de la Constitution confie au Parlement une mission de contrôle et d'évaluation de l'action gouvernementale.

L'article 13 de la Constitution concrétise cette mission de contrôle en prévoyant que le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente de chaque assemblée, pour des emplois et fonctions déterminés par loi organique.

Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.

L'annexe de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de la Constitution détermine les emplois et fonctions concernés. Dans le domaine de la sûreté nucléaire, la présidence de l'ASN et la direction générale de l'IRSN sont ainsi contrôlées par le Parlement.

L'annexe de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution détermine les commissions permanentes de chaque assemblée parlementaire compétentes pour émettre un avis sur les nominations aux emplois et fonctions déterminés par la loi organique.

Pour la présidence de l'ASN, la commission compétente en matière d'énergie, à savoir la commission des affaires économiques au Sénat comme à l'Assemblée nationale, est compétente au sein de chaque assemblée.

Pour la direction générale de l'IRSN, la commission compétente en matière d'environnement, à savoir la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable au Sénat et la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire à l'Assemblée nationale, est compétente au sein de chaque assemblée.

II. Le présent article apporte des coordinations, pour garantir notamment la continuité du contrôle parlementaire au titre de l'article 13 de la Constitution

Le I met à jour la référence à l'ASN par une référence à l'ASNR au sein :

- du code de la défense ;

- du code de l'environnement ;

- du code de la santé publique ;

- du code du travail ;

- de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ;

- et de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

Le II remplace à l'article L. 221-6 du code de l'environnement la référence à l'IRSN, chargée de publier les résultats d'études épidémiologiques et d'études sur l'environnement liées aux rayonnements ionisants, par une référence à l'ASNR.

Le III modifie l'annexe de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution pour supprimer la direction générale de l'IRSN et remplacer l'ASN par l'ASNR.

III. La commission prévoit l'audition au titre de l'article 13 de la Constitution du président de la future ASNR par la commission compétente en matière d'environnement.

La commission a adopté un amendement  COM-22 du rapporteur prévoyant que la commission compétente pour entendre le président de la future ASNR au titre de l'article 13 de la Constitution soit la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques.

La raison d'être de la future ASNR ne sera pas, en effet, de garantir l'approvisionnement énergétique, mais d'assurer la sûreté nucléaire.

Cette priorité accordée à la sûreté doit logiquement prévaloir dans le choix de la commission compétente pour l'audition du président de la nouvelle autorité, en désignant la commission compétente chargée des questions relatives à la prévention des risques technologiques.

A cet égard, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat assure un suivi de la sûreté nucléaire à plusieurs titres.

Pour mémoire, cette commission est compétente pour émettre un avis au titre de l'article 13 de la Constitution sur la nomination du directeur général de l'IRSN.

En outre, la même commission se saisit chaque année pour avis sur les crédits relatifs à la prévention des risques du projet de loi de finances, et se prononce à ce titre sur les subventions accordées à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et à l'Institut de sûreté nucléaire et de radioprotection (IRSN). Dans le cadre de l'avis au projet de loi de finances pour 2024, le rapporteur Pascal Martin a ainsi insisté sur la « nécessité de doter les deux opérateurs de la sûreté nucléaire, l'ASN et l'IRSN, de moyens adaptés au contexte de relance du nucléaire »72(*) et la commission a adopté un amendement augmentant la subvention accordée à l'ASN73(*).

Une coordination a également été adoptée par la commission pour expurger cette même annexe à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution d'une disposition obsolète, à savoir la référence au Haut Conseil des biotechnologies (amendement COM-6 du rapporteur), instance supprimée au 1er janvier 202274(*), qui était chargée d'éclairer la décision publique en matière de biotechnologies.

Enfin, la commission a adopté des amendements qui visent à corriger une erreur de référence (amendements identiques COM-19 du rapporteur et COM-71 du rapporteur pour avis), à corriger des erreurs et omissions de références dans les coordinations effectuées (amendement COM-20 du rapporteur) et à rajouter une coordination dans un intitulé du code de l'environnement (amendement COM-21 du rapporteur).

La commission a adopté l'article 14 ainsi modifié.

Article 15
Entrée en vigueur

Cet article est relatif à l'entrée en vigueur du présent titre.

La commission a adopté un amendement qui vise à modifier la date d'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'article 13 de la Constitution.

La commission a adopté l'article 15 ainsi modifié.

I. L'article 15 prévoit la création de l'ASNR au 1er janvier 2025

Le présent article prévoit une entrée en vigueur du titre Ier du projet de loi, relatif à l'ASNR, au 1er janvier 2025.

Plusieurs exceptions sont néanmoins prévues :

- les I et II de l'article 11 du présent projet de loi, relatifs à l'augmentation des salariés et des contractuels de droit public de l'ASN et de l'IRSN et à la remise d'un rapport au Parlement sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à l'ASNR en 2025 entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel ;

- l'article 12 du présent projet de loi qui abroge l'article L. 332-4 du code de la recherche relatif au haut-commissaire à l'énergie atomique entre en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel ;

- le troisième alinéa du IV de l'article L. 592-12-1 du code de l'environnement, qui exclut les agents publics de l'ASNR du champ de l'action sociale interministérielle, entre en vigueur à compter de la date à laquelle les agents publics bénéficient de plein droit du dispositif d'activités sociales et culturelles géré par le comité social d'administration de l'ASNR et au plus tard le 1er juillet 2027.

II. La commission modifie la date d'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'article 13 de la Constitution

La commission a adopté un amendement  COM-23 du rapporteur qui propose, d'une part, une entrée en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la disposition visant à prévoir que la commission compétente pour entendre le président de la future ASNR au titre de l'article 13 de la Constitution soit la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques dans les deux assemblées.

Le mandat du président actuel expire en novembre 2024. En toute perspective, le Président de la République devrait nommer le premier président de l'ASNR avant le 1er janvier 2025, date d'entrée en vigueur de la loi.

Il apparaît logique que la commission chargée de l'examen au fond du projet de loi au Sénat soit aussi compétente pour suivre l'application du texte qu'elle a examiné, qui sera, sans aucun doute, au coeur du mandat du prochain président.

D'autre part, l'amendement prévoit également une entrée en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la suppression du Haut Conseil des biotechnologies, dont la dissolution est effective depuis le 1er janvier 2022, du tableau définissant la répartition entre commissions permanentes des emplois et fonctions faisant l'objet d'une audition par le Parlement au titre de l'article 13 de la Constitution.

La commission a adopté l'article 15 ainsi modifié.

TITRE II
Adaptation des règles de la commande publique aux projets nucléaires
CHAPITRE IER

Sécurisation des procédures relatives à la commande publique pour les porteurs de projets nucléaires
Article 16
Autorisation des acheteurs publics de déroger à l'obligation d'allotir pour certains projets dans le domaine nucléaire

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires économiques.

Lors de sa réunion, la commission des affaires économiques a adopté l'amendement COM-55 de son rapporteur M. Patrick Chaize.

La commission a adopté l'article 16 ainsi modifié.

Article 17
Possibilité de recourir à la dérogation relative à la durée des accords-cadres pour certains projets dans le domaine nucléaire

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires économiques.

Lors de sa réunion, la commission des affaires économiques a adopté l'amendement COM-56 de son rapporteur M. Patrick Chaize.

La commission a adopté l'article 17 ainsi modifié.

Article 17 bis (nouveau)
Ajout d'un critère de crédibilité des offres pour les projets liés à la relance du nucléaire

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires économiques.

Lors de sa réunion, la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption de l'amendement COM-57 de son rapporteur M. Patrick Chaize, créant cet article.

En conséquence, la commission a adopté cet amendement et inséré l'article 17 bis ainsi rédigé.

Article 17 ter (nouveau)
Ajout d'une possibilité d'avenants pour les projets liés à la relance du nucléaire

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires économiques.

Lors de sa réunion, la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption de l'amendement COM-58 de son rapporteur M. Patrick Chaize, créant cet article.

En conséquence, la commission a adopté cet amendement et inséré l'article 17 ter ainsi rédigé.

CHAPITRE II
Mesures destinées à renforcer la protection des intérêts fondamentaux de la Nation en matière de nucléaire
Article 18
Exclusion du champ d'application du droit de la commande publique des contrats portant sur certaines parties des installations nucléaires

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des affaires économiques.

Lors de sa réunion, la commission des affaires économiques a adopté l'amendement COM-59 de son rapporteur M. Patrick Chaize.

La commission a adopté l'article 18 ainsi modifié.

EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI ORGANIQUE

Article 1er
Actualisation de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

Cet article de coordination vise à mettre à jour le tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution à la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire.

La commission a adopté un amendement qui vise à supprimer la référence au Haut Conseil des biotechnologies du même tableau annexé. Elle a aussi prévu une désignation du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) selon la procédure de l'article 13 de la Constitution.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

I. La loi organique détermine les emplois et fonctions concernés par l'avis public de la commission permanente de chaque assemblée sur les nominations du Président de la République

L'article 20 de la Constitution confie au Parlement une mission de contrôle et d'évaluation de l'action gouvernementale.

L'article 13 de la Constitution concrétise cette mission de contrôle en prévoyant que le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente de chaque assemblée, pour des emplois et fonctions déterminés par loi organique.

Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.

L'annexe de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet relative à l'application du cinquième alinéa de la Constitution détermine les emplois et fonctions concernés. Dans le domaine de la sûreté nucléaire, la présidence de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et la direction générale de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sont ainsi contrôlées par le Parlement.

II. Le présent article modifie la loi organique pour l'adapter à la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire

Le présent article modifie le tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet relative à l'application du cinquième alinéa de la Constitution qui liste les emplois et fonctions concernés par l'article 13 de la Constitution, afin de l'adapter à la réforme de la sûreté nucléaire prévue par le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire.

D'une part, la mention de l'ASN est remplacée par une référence à l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

D'autre part, la mention de l'IRSN est supprimée du tableau.

III. La commission a supprimé la référence au Haut Conseil des biotechnologies (HCB) et a prévu une désignation du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) selon la procédure de l'article 13 de la Constitution

Le Haut Conseil des biotechnologies (HCB) était une instance chargée d'éclairer la décision publique en matière de biotechnologies, notamment en matière d'organismes génétiquement modifiés (OGM). Cette instance a été supprimée en 2022.

La commission a adopté un amendement  COM-1 du rapporteur qui tire les conséquences de cette suppression en retirant la référence au HCB de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

À l'initiative du rapporteur pour avis, un amendement COM-3 a également été adopté afin que le haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) soit désigné selon la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 2
Entrée en vigueur de la mise à jour de la loi organique

Cet article fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi organique au 1er janvier 2025.

La commission a adopté un amendement qui vise à prévoir l'entrée en vigueur de la suppression du Haut Conseil des biotechnologies de la loi organique n° 2010-837 dès le lendemain de la publication de la présente loi organique.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

I. Une entrée en vigueur au 1er janvier 2025

Le présent article fixe l'entrée en vigueur de la loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution au 1er janvier 2025.

II. La commission fixe l'entrée en vigueur de la suppression du Haut Conseil des biotechnologiques de la loi organique n° 2010-837 au lendemain de la publication de la loi

Le Haut Conseil des biotechnologies (HCB) a été supprimé le 1er janvier 2022.

La commission a donc adopté un amendement COM-2 du rapporteur pour fixer l'entrée en vigueur de la suppression du HCB de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution dès le lendemain de la publication de la présente loi organique au Journal officiel.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 3 (nouveau)
Entrée en vigueur de l'intégration du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) parmi les désignations relevant de la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

Cet article additionnel, ajouté par la commission à l'initiative du rapporteur pour avis ( amendement COM-4), prévoit une entrée en vigueur, dès le lendemain de la publication de la loi organique, de l'intégration du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) parmi les désignations relevant de la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

La commission a adopté l'article 3 ainsi rédigé.

TRAVAUX EN COMMISSION

Désignation d'un rapporteur
(Mercredi 20 décembre 2023)

M. Jean-François Longeot, président. - Nous devons procéder à la désignation d'un rapporteur sur le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire et sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Le projet de loi, qui devrait être déposé aujourd'hui, vise à titre principal à réformer la sûreté nucléaire, en créant une nouvelle organisation, l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), issue de la fusion de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Il comprend également des mesures relatives à l'énergie nucléaire, qui seront légitimement en application de l'acte de partage déléguées au fond à la commission des affaires économiques, laquelle devrait par ailleurs se saisir pour avis de l'ensemble du projet de loi.

La proposition de loi organique, qui devrait également être déposée aujourd'hui, effectue simplement une coordination, en remplaçant l'ASN et l'IRSN par l'ASNR dans la liste des emplois dont la nomination fait l'objet d'un contrôle par le Parlement au titre de l'article 13 de la Constitution.

Les sujets abordés dans ces textes sont suivis attentivement depuis de longs mois par notre commission. Nous avons ainsi entendu en audition, au format rapporteur, en février 2023, les dirigeants de l'ASN et de l'IRSN sur ce projet de fusion, qui était à l'origine intégré au projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

La commission entendra de nouveau le président de l'ASN, Bernard Doroszczuck, et le directeur général de l'IRSN, Jean-Christophe Niel, le 17 janvier 2024, ainsi que la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, le 24 janvier 2024, en audition plénière conjointe avec la commission des affaires économiques.

Les présents textes devraient ensuite être examinés conjointement en commission le mercredi 31 janvier, puis en séance publique à partir du mercredi 6 février. Un vote solennel sur l'ensemble est prévu le mardi 13 février.

Compte tenu de ce calendrier très resserré, il m'a semblé opportun de désigner un rapporteur dès à présent.

La commission désigne M. Pascal Martin rapporteur sur le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire et sur le projet de loi organique modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Audition de M. Bernard Doroszczuk,
président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN)
(Mercredi 17 janvier 2024)

M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et la commission des affaires économiques sont réunies conjointement ce matin pour deux auditions consacrées au projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire et au projet de loi organique associé.

Nous commençons par l'audition de M. Bernard Doroszczuk, président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Je vous rappelle que la commission des affaires économiques, saisie pour avis, se réunira pour examiner le texte le 30 janvier. Le projet de loi et le projet de loi organique seront ensuite examinés ensemble en commission de l'aménagement du territoire et du développement durable le mercredi 31 janvier puis en séance publique, le mercredi 7 et le jeudi 8 février. Un vote solennel sur l'ensemble des deux textes est prévu le mardi 13 février.

Pascal Martin a été désigné rapporteur par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et Patrick Chaize, rapporteur pour avis, par la commission des affaires économiques. Les auditions des rapporteurs ont commencé dès le début du mois de janvier.

Vous avez déjà eu l'opportunité de vous exprimer dans ce format, M. Doroszczuk, mais il nous a semblé essentiel que vous puissiez également nous présenter votre point de vue en plénière, devant les commissaires des deux commissions et l'ensemble des groupes représentés.

Il y a près d'un an, la fusion entre l'ASN et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) avait été proposée par le Gouvernement dans le cadre de l'examen du projet de loi « accélération du nucléaire » à l'Assemblée nationale. Nous avions été nombreux, au Sénat, à déplorer la méthode employée par le Gouvernement, que la présidente Primas avait alors qualifiée « d'insupportable » : cette proposition n'avait fait l'objet d'aucune concertation ni d'aucune évaluation et n'avait pas été soumise à la première assemblée saisie, le Sénat ! Il est heureux que la proposition du Gouvernement ait finalement été rejetée par les députés.

Malmené, le Parlement a réagi par le biais d'une saisine de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst) par la commission des affaires économiques du Sénat, initiative que je souhaite à nouveau saluer. Le rapport de l'Opecst de Stéphane Piednoir et Jean-Luc Fugit est paru en juillet dernier. Ses conclusions ont alimenté le projet de fusion proposé par le Gouvernement, dont nous sommes aujourd'hui saisis.

Avant de céder la parole à la présidente Estrosi Sassone, j'aimerais partager l'état d'esprit qui est le mien à l'amorce de ce chantier législatif, sans entrer à ce stade dans les considérations de fond concernant l'opportunité de la réforme.

Notre priorité - je le dis en tant que président de la commission en charge des politiques de prévention des risques - est claire : nous souhaitons maintenir notre sûreté nucléaire à un niveau d'exigence le plus élevé possible, en l'adaptant aux enjeux de notre décennie et de celles à venir. L'opportunité de la relance du nucléaire dans notre pays, qui constitue un débat majeur pour notre Nation et qui nous mobilisera dans le cadre du projet de loi « souveraineté énergétique », est une problématique d'un autre ordre. Ne nous y trompons pas : le texte qui va nous mobiliser dans les prochaines semaines ne nous amène pas à nous positionner pour ou contre l'énergie nucléaire. Il nous est demandé de réfléchir au cadre le plus adapté pour nos concitoyens pour assurer leur sécurité, protéger la santé, la salubrité publiques, la protection de la nature et de l'environnement, tout en garantissant un niveau de transparence satisfaisant.

Il me semble donc nécessaire de dissocier les deux sujets, même s'ils sont liés : un système de sûreté irréprochable et une transparence préservée, voire accrue, sont des conditions sine qua non de l'acceptabilité sociale du nucléaire, sans laquelle la relance de la filière ne pourra pas se faire.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. - Dans le contexte de la relance de la filière française du nucléaire, la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, proposée par le Gouvernement, peut constituer une opportunité pour consolider les processus d'expertise, d'instruction, d'autorisation et de contrôle.

Pour autant, cette réforme ne peut réussir que si elle ne déstabilise pas les règles de sûreté et de sécurité, la disponibilité des compétences et, in fine, la confiance du public.

C'est pourquoi l'examen du projet de loi soumis au Sénat doit être approfondi et exigeant, en pesant les avantages mais aussi les inconvénients de la réforme.

La commission des affaires économiques du Sénat a expurgé la loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, dite « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, de toute référence au premier projet de réforme, pour lui préférer une saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst). En rejetant les amendements présentés à la hâte par le Gouvernement, après le vote massif du Sénat sur ce texte, nous nous sommes opposés à une réforme mal anticipée et mal évaluée. En saisissant l'Opecst, nous avons remis les parlementaires au coeur des enjeux.

Je constate que le nouveau projet de loi est plus abouti ; il est le fruit des travaux préalables de l'Opecst, d'une dizaine de saisines d'organismes consultatifs et d'un an de concertation sociale. Il arrive à un moment crucial, où la France s'apprête à se fixer de nouveaux objectifs de construction de réacteurs nucléaires, dans le projet de loi relatif à la souveraineté énergétique, qui définira notre prochain cap énergétique, et la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui déclinera ce cap réglementairement.

Aussi, je vous poserai quatre questions.

En premier lieu, au regard des exemples étrangers, quels sont les bénéfices attendus d'un modèle de sûreté nucléaire et de radioprotection intégré, tel que pratiqué aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Espagne ? Ce modèle a-t-il un impact positif avéré sur la fluidité des processus, le partage des informations et l'attractivité des métiers ?

En second lieu, que pensez-vous du calendrier proposé par le Gouvernement pour réaliser la réforme ? Cette réforme, source inévitable de désorganisation, met-elle en risque la relance de la filière française du nucléaire ? À l'inverse, est-elle une nécessité pour faire face à l'afflux des dossiers de création des réacteurs nucléaires ou de prolongation ?

Autre point, que pensez-vous des suites données dans le nouveau projet de loi au rapport de l'Opecst ? S'agissant des recommandations sur la séparation entre l'expertise et la décision ou sur la publication des rapports et des avis, le renvoi au règlement intérieur de la future autorité de sûreté est-il adapté ? Certaines recommandations ne sont-elles pas omises ? Je pense à la nécessité, selon l'Opecst, du rappel du caractère indépendant de l'autorité dans son intitulé, du renforcement des groupes permanents d'experts, de l'amélioration de la gestion de crise, de l'institution d'un département de recherche ou encore de la coordination entre sûreté et sécurité nucléaires.

Enfin, au-delà de cette réforme, quelle est votre vision de la sûreté nucléaire et de la radioprotection de demain ? Car nous nous apprêtons à légiférer pour les prochaines décennies, la mise en service des premiers nouveaux réacteurs nucléaires n'étant pas attendue avant 2036-2037 ? Dans ce contexte, ne faut-il pas mieux intégrer les nouveaux risques, tels que la résilience des réacteurs nucléaires au changement climatique et leur cyberrésilience ? Ne faut-il pas mieux tenir compte des nouveaux acteurs du nucléaire, dont les opérateurs des petits réacteurs modulaires ? C'est un point d'attention pour notre commission, qui a complété en ce sens notre arsenal législatif, dans la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023.

M. Bernard Doroszczuk, président de l'Autorité de sûreté nucléaire. - Le 20 décembre dernier, un projet de loi visant à créer une nouvelle autorité indépendante chargée du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection a été présenté en Conseil des ministres. Ce projet s'appuie sur les recommandations formulées en juillet dernier par l'Opecst, vous l'avez rappelé. La création de cette autorité est motivée, selon le Gouvernement, par les perspectives de développement du nucléaire, inégalées depuis le « plan Mesmer » il y a 50 ans, pour faire face aux enjeux majeurs de souveraineté énergétique et pour lutter contre le dérèglement climatique.

Une réflexion sur l'organisation du système de contrôle actuel dans un tel contexte n'est pas illégitime. C'est la responsabilité du Gouvernement de proposer une réforme, s'il l'estime nécessaire, et c'est bien entendu la responsabilité du Parlement de décider de son opportunité. Le système actuel de contrôle a 20 ans, il est le résultat d'évolutions successives intervenues à l'occasion de choix de politiques nucléaires et de retours d'expériences d'événements marquants concernant la sûreté nucléaire et la radioprotection tant en France qu'à l'étranger. Ce système a fait ses preuves « en temps de paix », c'est-à-dire avec un parc d'installation à contrôler stable, voire en décroissance. Cependant, si les nouvelles perspectives très ambitieuses de développement du nucléaire dans notre pays sont confirmées, dans les 20 ans qui viennent, le système en place devra affronter un contexte sans précédent depuis le début de l'épopée nucléaire en France, pour lequel il n'a pas été conçu. Ce sera un contexte hors normes en termes de charge de travail et d'autorisations à délivrer, tant sur les installations existantes que pour le nouveau nucléaire, dans un environnement en pleine mutation, avec de nouveaux acteurs, de nouvelles technologies, - vous avez évoqué les Small Modular Reactors, les SMR, ou petits réacteurs modulaires -, et de nouveaux usages du nucléaire. Le système de contrôle devra aussi anticiper les enjeux liés au dérèglement climatique mais aussi l'innovation et le développement des usages numériques, dont l'intelligence artificielle, tant dans les domaines de la sûreté que de la radioprotection, dans le secteur médical mais aussi dans le secteur industriel.

Dans un tel contexte, l'organisation actuelle ne pourra pas assurer ses missions avec efficacité sans un renforcement substantiel de ses moyens et de ses compétences et sans une évolution de son organisation et de ses modes de fonctionnement. Ce point est central et se posera quelle que soit l'option retenue. Le système de contrôle devra changer d'échelle, gagner en efficacité et éviter la dispersion des compétences techniques et scientifiques rares dans un contexte de tension sur les ressources. Il lui faudra développer de nouveaux modes de dialogue techniques moins séquencés qu'actuellement et plus adaptés aux phases de maturation et de mode de gestion des projets qui lui sont présentés.

Pour rendre ces évolutions réalisables, il n'est pas hors de propos d'envisager un système dans lequel une seule et même entité maîtrise l'ensemble des activités nécessaires au contrôle. Le choix d'un système intégré est celui qu'ont fait la plupart des pays occidentaux ayant des ambitions nucléaires. Si cette réforme est décidée, elle devra s'opérer sans amoindrir le niveau actuel de transparence ni les compétences techniques et scientifiques de l'ASN et de l'IRSN, qui sont indispensables à la confiance du public dans le contrôle. Cela est tout à fait possible dans une organisation resserrée dont l'indépendance, véritable clé de voûte de notre système, devra être renforcée.

Ces évolutions et le succès de leur mise en oeuvre supposeront l'engagement de chacun, tant de l'ASN que de l'IRSN et de leur personnel, ainsi qu'une ambition porteuse de sens. Les personnels des deux entités sont fortement engagés dans leur mission et je tiens à leur rendre hommage. Une bonne partie d'entre eux se connaissent, s'apprécient, travaillent ensemble. Des parcours croisés existent entre les deux entités, au bénéfice de tous. Tous les personnels techniques de l'ASN et de l'IRSN disposent d'une formation de haut niveau, nos deux établissements font beaucoup pour impliquer les parties prenantes dans les processus d'instruction, de dialogue technique et de concertation et pour développer une culture de sécurité et de radioprotection au sein de la population. Il est tout à fait possible de créer un système intégré au moins aussi sûr et transparent que le système actuel.

S'il est créé, ce système bénéficiera, comme aujourd'hui, de l'appui de groupes permanents d'experts pluralistes et externes à l'autorité, qui permettent un débat riche et une prise de recul par rapport aux conclusions des expertises et aux arguments des industriels. Face à cela, il ne me paraît guère rationnel de prétendre, comme certains le font, que le système de contrôle risque de s'effondrer d'ici 10 à 15 ans si la fusion était décidée. Un tel système intégré existe depuis longtemps à l'étranger, dans des pays qui ont un niveau d'expertise scientifique et d'exigences comparables aux nôtres. L'ASN et l'IRSN sont deux entités dont l'excellence est reconnue, tant en France qu'à l'étranger, et qui partagent la même raison d'être, celle de la protection de la population et de l'environnement. Il n'y a pas de raison objective de penser que cette excellence et cette raison d'être commune disparaîtraient au seul motif que les deux entités seraient fusionnées au sein d'une nouvelle autorité indépendante. C'est au contraire cette excellence dans tous les domaines, de la recherche à l'inspection en passant par l'expertise et la décision, et c'est la reconnaissance comme référence internationale dans tous ces domaines d'activité qui doivent être au coeur des ambitions de la nouvelle autorité si sa création était décidée.

Voilà ce que je souhaitais dire en introduction et je reviendrai, au cours du débat, sur toutes les questions que vous venez de me poser.

M. Pascal Martin, rapporteur de la commission l'aménagement du territoire et du développement durable. - Le Président Jean-François Longeot a rappelé la priorité qui guide mon travail en tant que rapporteur pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur ce projet de loi : maintenir notre sûreté nucléaire à un niveau d'exigence le plus élevé possible, en l'adaptant aux enjeux de notre décennie et de celles à venir.

J'ai organisé, durant les premières semaines de janvier, une vingtaine d'auditions, afin d'entendre l'ensemble des parties prenantes sur ce texte. J'ai également souhaité travailler en bonne intelligence avec la commission des affaires économiques, saisie pour avis : certaines de ces auditions ont ainsi été organisées conjointement avec Patrick Chaize, je m'en félicite.

Monsieur le Président, nous vous avons déjà entendu au tout début du cycle d'auditions. Au terme de ces auditions, j'ai identifié cinq enjeux centraux, sur lesquels je souhaiterais vous entendre.

Premier enjeu : l'humain. La sûreté nucléaire repose d'abord sur des compétences, sur des experts et des chercheurs, qui doivent être au coeur de notre réflexion. Je l'avais déjà rappelé, en tant que rapporteur budgétaire sur les crédits relatifs à la prévention des risques : la relance du nucléaire nécessitera la création de 100 000 postes durant les 10 prochaines années... Dans ce contexte fortement concurrentiel, nous devons être particulièrement attentifs à assurer l'attractivité de la sûreté nucléaire.

Comment une nouvelle autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection pourrait-elle être suffisamment attractive, notamment pour les jeunes chercheurs et experts ? Comment éviter que la période de transition indispensable entre l'ancienne et la nouvelle organisation ne se traduise par une fuite de compétences ?

Deuxième enjeu, non moins important : la transparence. Les Français ont aujourd'hui très largement confiance en la robustesse de notre système de sûreté nucléaire. Cette confiance est le fruit d'un travail de plusieurs décennies de tous les acteurs, qui s'est notamment traduit par un effort accru d'information du public. Pour assurer l'acceptabilité de la relance du nucléaire, il est souhaitable de continuer à renforcer cette transparence.

L'exposé des motifs du projet de loi évoque une « transparence renforcée vis-à-vis du public ». Comment une nouvelle agence renforcerait-elle selon vous la transparence de la sûreté nucléaire ? Alors que l'IRSN publie aujourd'hui l'ensemble de ses avis d'expertise, comment la nouvelle agence pourrait-elle assurer un niveau au moins équivalent de publication ?

Troisième enjeu : la distinction entre expertise et décision. C'est un principe fondamental de notre système de sûreté nucléaire. Dans l'organisation actuelle, les décisions en matière de sûreté nucléaire sont prises par l'ASN, tandis que l'expertise est généralement déléguée à l'IRSN pour les décisions les plus importantes. La réforme propose d'intégrer expertise et décision au sein d'une même autorité. Quelle forme pourrait prendre la distinction entre expertise et décision au sein de l'organisation unique proposée par le Gouvernement ?

Quatrième enjeu : la recherche. L'IRSN exerce une activité de recherche en matière de sûreté nucléaire, qui nourrit son activité d'expertise. Cette recherche appliquée, dont l'excellence est reconnue internationalement, serait conservée dans le cadre de la future autorité. Le transfert d'activités de recherche à une autorité administrative indépendante (AAI) n'est pas sans poser de difficultés. La recherche nécessite de nombreux partenariats, avec d'autres établissements de recherche, mais aussi avec les principaux industriels du nucléaire, qui seront également contrôlés par la future autorité. La nouvelle agence pourrait-elle poursuivre les partenariats engagés entre l'IRSN et les principaux industriels du nucléaire sans risque déontologique de conflit d'intérêts ?

Enfin, le dernier enjeu que j'identifie est juridique. Il s'agit des conditions d'élaboration du règlement intérieur de la future autorité. J'ai pu constater au cours de mes auditions que la plupart des sujets les plus sensibles, relatifs notamment à la déontologie, à la publication des travaux d'expertise et à la distinction entre expertise et décision, sont renvoyés au règlement intérieur de la future autorité.

Cette option a l'avantage de la souplesse. Il ne faut pas tout figer dans la loi. Si le législateur fait le choix de la fusion, les grandes orientations devront être décidées par le législateur, puis la nouvelle agence devra les appliquer dans son règlement intérieur, c'est le principe d'une autorité administrative ou publique indépendante. Cette solution plus souple a cependant un inconvénient : elle ne garantit pas que les formulations adoptées par la nouvelle soient totalement conformes à l'esprit du législateur. Comment garantir que sur des enjeux aussi cruciaux que la déontologie, la transparence et la distinction entre expertise et décision, la volonté du Parlement soit respectée ? Vous semble-t-il envisageable de prévoir la saisine pour avis de l'Opecst sur le projet de règlement intérieur de la future autorité ?

M. Patrick Chaize, rapporteur de la commission des affaires économiques. - La commission des affaires économiques est saisie de l'examen au fond de quatre articles, sur les réformes du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) et des règles de la commande publique applicables aux projets de réacteurs nucléaires ; elle est saisie de l'examen pour avis des autres articles du texte, ayant trait à la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Dans le cadre de mes travaux préalables, toujours en cours, j'ai entendu une quarantaine de personnalités, à l'occasion d'une vingtaine d'auditions. Je remercie le rapporteur Pascal Martin de la qualité de nos échanges.

Ma première question concerne l'application de cette réforme. D'une part, compte tenu de la nécessité, pour la nouvelle autorité, d'élaborer un règlement intérieur étoffé et de négocier des conventions collectives, l'échéance du 1er janvier 2025 est-elle tenable ? D'autre part, votre mandat devant prendre fin en 2024, sans possibilité de renouvellement, ne faudrait-il pas prévoir la désignation d'un préfigurateur ?

Ma deuxième question porte sur le statut de la future autorité. Si le statut d'AAI est de nature à garantir l'indépendance de cette nouvelle instance, celui d'autorité publique indépendante (API) lui aurait conféré une autonomie budgétaire et une souplesse de gestion. Regrettez-vous le choix opéré par le Gouvernement ?

Ma troisième question concerne les missions de la future autorité. Le 8 mars 2023, lors de votre audition par notre commission sur le projet de loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, vous aviez regretté que la sécurité des installations nucléaires civiles ne figure pas parmi les missions de la nouvelle autorité. Est-ce toujours votre position ?

Ma quatrième question porte sur l'organisation de la future autorité. Le projet de loi renvoie à son règlement intérieur la séparation entre les processus d'expertise et d'instruction conduits par les services, d'une part, et les processus d'élaboration des avis et des décisions prises par le collège, d'autre part. Ne faut-il pas viser d'autres actes ? Les cas où les décisions sont prises par le collège sont peu nombreux. Ne faudrait-il pas étendre ce champ de compétence ? Le projet de texte renvoie également au règlement intérieur le soin de définir les activités d'expertise et d'instruction qui devront faire l'objet de publication : est-ce que cela offre des garanties suffisantes ? Certains rapports, avis ou décisions ne devraient-ils pas être d'emblée rendus publics, sous réserve des secrets protégés par la loi ?

Ma cinquième série de questions porte sur le personnel de la future autorité. Tout d'abord, la réforme garantira-t-elle l'accueil des salariés de l'IRSN dans des conditions équivalentes à leur situation actuelle ? Plus encore, la complexité des instances de représentation des personnels et des modalités de négociation des conventions collectives ne fait-elle pas courir le risque d'une autorité déséquilibrée, à deux vitesses, entre les agents publics et ceux privés ? Enfin, la jurisprudence constitutionnelle prohibe la délégation de fonctions inséparables de la souveraineté nationale à des agents étrangers, de même que la recherche d'infraction pénale par des agents privés : ne faudrait-il pas inscrire ces garde-fous s'agissant des personnels habilités ?

M. Bernard Doroszczuk. - Quel est l'enjeu de la réforme ? Il est d'abord, dans les deux décennies prochaines, celui du défi que représente un volume de travail que nous n'avons jamais rencontré y compris lors de l'épopée nucléaire des années 1980 et 1990 - où nous avions eu à construire tout un parc, mais sans avoir la charge que nous aurons dans les deux décennies à venir, de gérer le parc du passé. Aujourd'hui nous avons à nous interroger sur l'avenir de nos 56 réacteurs actuels, sur leur démantèlement, et sur les nouveaux projets de gros et petits réacteurs. Cette charge de travail est inédite, il nous faut rechercher une organisation efficace qui préserve les acquis de transparence et de culture comme d'exigence de sûreté. C'est possible, d'autres le font par exemple aux États-Unis, au Canada, en Grande-Bretagne, au Japon, en Finlande, des pays qui ont des projets de développement du nucléaire et qui ont intégré en une même autorité les phases d'expertise et de décision, avec pour certaines autorités l'intégration de capacités de recherche. Ce système intégré que vise le projet de loi existe donc à l'étranger, il a montré sa robustesse, et le niveau d'exigence et d'expertise scientifique de ces autorités ne fait pas débat. On peut donc penser que l'objectif de la réforme est l'efficacité, en réduisant les délais d'instruction qui sont nécessairement plus longs et les procédures plus complexes dans une gouvernance à deux autorités - l'intégration dans une seule autorité effacera les doublons et les frictions qui se produisent nécessairement quand il y a deux autorités. Parmi les doublons, je peux citer les organisations de crise : il y a d'un côté celle de l'IRSN, qui, intervenant comme expert, projette les risques de crise et les mesures à prendre pour protéger les populations, avec par exemple des évacuations, des confinements, puis c'est l'ASN qui porte ces recommandations auprès du Gouvernement pour les traduire en mesures concrètes. Ce chaînage entraîne des frictions qui disparaîtraient avec un centre de crise unique. Autre exemple, nos deux établissements entretiennent des relations internationales et je suis conduit à rencontrer certains de mes homologues qui ont la compétence en matière d'expertise et qui doivent faire la distinction entre les deux instances, ou me disent avoir eu tel ou tel échange avec l'IRSN ; ce n'est guère efficace dans les instances internationales - c'est particulièrement vrai pour les nouveaux réacteurs, où il vaudrait mieux parler d'une seule voix. Et il faut aussi considérer l'ensemble du processus décisionnel, avec la phase d'expertise, la phase d'analyse avant proposition de décision, pour les décisions les plus importantes. Ce processus comporte des interfaces puisqu'il relève de deux entités différentes qui peuvent avoir des priorités différentes, en fonction de leurs propres enjeux. Pour l'ensemble du processus, il vaut mieux qu'une seule autorité décide, ce sera plus efficace. Tous ces avantages méritent donc d'être soulignés, ils sont intéressants pour faire face aux défis des prochaines décennies.

Quels sont les risques ? Vous les avez évoqués. Il y a, d'abord, un sujet humain. Nos missions reposent sur les hommes et les femmes qui constituent nos deux entités : il faudra renforcer substantiellement ces moyens humains, ou bien nous ne tiendrons pas. Ils travaillent déjà ensemble, ils ont la même raison d'être, il n'y pas entre eux de concurrence des visions et ils ont la même mission de protection des personnes et de l'environnement. Il n'y a pas, comme on l'entend parfois, d'un côté les capacités d'analyse et de l'autre une entité qui prendrait des décisions sans considérer la sûreté et la radioprotection : nous avons la même raison d'être. L'ASN est d'ailleurs composée à 70 % d'ingénieurs, d'experts, d'universitaires, de médecins, de pharmaciens, nous n'ignorons pas la science : il n'y a pas d'un côté l'administratif et de l'autre le scientifique. Or, nous allons avoir à recruter 100 000 personnes en dix ans, quand le contexte est déjà tendu sur les ressources humaines : certains de nos experts et chercheurs sont déjà sollicités par des entreprises qui leur offrent de belles carrières - il y a donc un risque de perte de compétences. Il faut s'en occuper immédiatement en prenant des décisions fortes. Je crois que la constitution d'une entité unique de 2 200 agents, avec des métiers plus divers, offre des parcours de carrières plus intéressants ; c'est un facteur d'attractivité.

Vous m'interrogez, ensuite, sur le calendrier de la réforme. Nous sommes dans une phase de montée en charge importante de l'activité et nous allons vers un pic qui devrait se produire vers 2027-28. Pour tirer le meilleur bénéfice d'une réforme, il faut la faire maintenant, avant ce pic. Il faut aussi limiter l'incertitude, les personnels doivent savoir le plus tôt possible si la réforme va se faire. L'échéance du 1er janvier 2025 me paraît donc ambitieuse mais nécessaire, ou bien on risque d'inciter au départ de personnels.

Des questions portent sur la distinction entre expertise et décision : elles sont bien légitimes. Il me semble que deux questions se posent en la matière : d'abord, sur le fait de savoir si une autorité de décision peut disposer en son sein d'une capacité d'expertise. La réponse est oui, aucune règle ne l'interdit et rien n'oblige à devoir recourir à une expertise extérieure - l'expertise est intégrée dans plusieurs pays, ce modèle est tout à fait compatible avec les évaluations internationales conduites par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), rien ne s'oppose de ce point de vue à une fusion. D'ailleurs, pour être en mesure d'exercer sa mission de contrôle, une AAI dispose en général de compétences internes de haut niveau, c'est un atout pour l'exercice indépendant de ses missions. Deuxième question : comment distinguer la phase d'expertise interne de la décision ? C'est très important. Or, aujourd'hui, contrairement à ce qu'on en dit, il n'y a pas de barrière étanche entre les équipes de l'IRSN et l'ASN : elles sont associées, il y a des échanges, le dialogue technique est continu, de la préparation à la décision. Pour autant, il faut des règles, pour distinguer la responsabilité de l'expert de celle du décideur : c'est un principe à faire figurer dans la loi, sur le plan des responsabilités, quelle que soit la modalité du recours à une expertise. Et c'est bien au règlement intérieur d'en fixer les modalités, conformément à l'architecture fixée par la loi organique de 2017 sur les AAI et les API : la loi pose les principes, le règlement intérieur définit les modalités d'application. La loi doit-elle prévoir des consultations pour l'élaboration du règlement intérieur ? C'est au législateur d'en décider, de même que c'est au Parlement de dire quels seront les interlocuteurs réguliers de l'AAI.

Pour répondre à vos questions sur la transparence, je commencerai par souligner que nous disposons d'un modèle très développé de partage de l'information, de dialogue technique, d'association de la société civile, un modèle que je présente régulièrement à l'étranger, et que c'est bien ce niveau élevé de transparence qu'il nous faut préserver. Or, je ne vois pas en quoi la fusion le compromettrait, les deux instances actuelles ont un niveau élevé de transparence, leur regroupement ne devrait pas changer les choses et je n'y vois pas un sujet d'inquiétude. Il me semble, même, que le projet de loi comporte des avancées en la matière, en prévoyant une publicité particulière pour les sujets à fort enjeu, avec une association particulière du public à différentes étapes. C'est le cas par exemple pour la poursuite d'exploitation des centrales au-delà de 50 ou 60 ans, c'est un véritable sujet pour lequel nous avons déjà organisé des rendez-vous avec la population tout au long du processus décisionnel. C'est aussi le cas pour la mise en service du centre industriel de stockage géologique (Cigéo) : il faut une décision pour 2027-28 et nous avons déjà bien engagé, avec le Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), un processus par étapes pour en décider. Le projet de loi précise également que chaque année, la future autorité présentera à l'Opecst les sujets sur lesquels elle propose un tel dialogue technique tout au long du processus d'instruction avec, bien sûr, publication des résultats : c'est encore une avancée.

Ensuite, il ne faut pas restreindre la question de la transparence aux seuls avis de l'IRSN. Nous effectuons par exemple 1 800 inspections par an, leurs résultats sont publiés au fur et à mesure, c'est une source d'information qui est largement exploitée par les associations pour interpeller les exploitants. Nous avons aussi des groupes permanents d'experts, placés hors de l'IRSN et qui subsisteraient d'ailleurs après une fusion. Ils associent des universitaires, des experts étrangers, et ses avis sont publics. Nous réalisons aussi tout un travail dans le cadre d'un comité directeur des situations post-accidentelles, avec des ateliers sur la culture de la sécurité et de la radioprotection, qui associent des riverains ; le tout est public. Notre système d'information sur le nucléaire est reconnu, il est en avance, je ne vois pas de raison qu'un regroupement de nos deux entités lui porte atteinte.

J'ai dit que la date du 1er janvier 2025 me paraissait nécessaire pour ne pas prolonger l'incertitude, et nous avons déjà lancé en interne une réflexion sur la préfiguration de la future autorité, le travail est en cours, avec l'IRSN. Nous avons installé 12 groupes de travail, un comité de concertation avec les représentants du personnel, pour préparer l'hypothèse où la loi serait votée et qu'on démarre alors aussitôt de manière opérationnelle.

Mon mandat se termine en novembre prochain, je ne serai donc pas présent au moment où le regroupement aurait été décidé. Faut-il un préfigurateur ? Je suis mal placé pour le dire, la décision revient à ceux qui vont désigner mon successeur, mais il me semblerait effectivement de bonne méthode d'initier les démarches de sélection de mon remplaçant avant le 12 novembre, d'autant plus que la loi aurait été votée l'été prochain.

Je vous confirme que je n'ai pas changé d'avis sur les liens entre sécurité et sûreté nucléaire : l'ASN estime que les deux sujets de la sécurité et de la sûreté des installations nucléaires civiles sont intimement liés. Pourquoi ? Parce que les actes de malveillance, qui sont du ressort de la sécurité, ont nécessairement un impact en termes de sûreté, il faut une approche globale. J'ai proposé que les responsabilités de sécurité et de sûreté des installations civiles soient placées entre les mains de la nouvelle autorité, comme cela se passe à l'étranger ; aussi, je regrette que le projet de loi retire à la prochaine autorité l'expertise en matière de sécurité des installations nucléaires civiles, pour la confier à l'autorité nucléaire de défense, qui n'a pas de compétence actuellement en la matière sur les installations civiles. Je crois que le Parlement doit se positionner sur ce sujet qui prendra plus d'importance à l'avenir avec le développement des SMR. Aujourd'hui, la sécurité des installations est assurée par une série de barrières physiques et la mobilisation de moyens importants en cas d'intrusion sur des sites nucléaires ; dès lors qu'on aura des micro-installations nucléaires installées dans le tissu industriel, sans ces barrières, il faudra que la protection soit intégrée dans la conception même des sites, c'est pourquoi je continue de croire qu'il vaut mieux confier aussi l'expertise de sécurité à la nouvelle autorité : vous le constatez, je n'ai pas changé d'avis, je maintiens ma position.

M. Sébastien Fagnen. - Je m'interroge sur les risques que la réforme désorganise notre système alors que la nouvelle autorité devra faire face à un pic d'activité. Nous savons que bien des agents et salariés s'opposent à la fusion, ce qui fait prendre en particulier le risque d'une fuite de compétences au moment où on en aura le plus besoin. Nous regrettons que l'Opecst ait fait primer dans les débats le scénario de la fusion, sans faire de place véritable à la piste consistant à renforcer le modèle actuel, ce que les deux instances ont proposé il y a plusieurs années déjà. Qu'en pensez-vous ?

Je m'interroge, ensuite, sur l'acceptation de cette réforme par la population - et je le fais en tant qu'élu du département le plus nucléarisé de France, trois sites nucléaires étant installés dans la Manche. L'Association nationale des comités et commissions locales d'information (Anccli) a mis en garde contre les risques que cette fusion fait porter à notre système au moment où le nucléaire est relancé et qu'il est appelé à se transformer avec les SMR. Des questions d'aménagement du territoire se poseront, l'inquiétude ne manquera pas de primer si l'on sent que l'expertise, le contrôle sont affaiblis. D'où cette question : quels sont donc les avantages de la fusion par rapport à un approfondissement des liens entre les deux entités ? A-t-on bien examiné les deux voies - et la fusion est-elle à ce point préférable qu'elle vaille les risques qui lui sont inhérents ?

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. - Le Gouvernement souhaite une fusion dès 2025, mais tout le monde sait qu'un rapprochement provoque des contraintes de réorganisation sur de très nombreux plans, informatique, social, commercial, sur la communication, avec une augmentation des coûts et un allongement des délais. Combien de temps vous paraît nécessaire pour réaliser cette fusion ? Les bénéfices attendus sont-ils bien supérieurs aux dépenses qui ne manqueront pas, elles, d'être beaucoup plus importantes qu'on ne le prévoie ?

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Vous soulignez que les deux instances sont reconnues sur le plan international. La Cour des comptes estime aussi que le système dual est efficace, nous sommes en droit de nous interroger sur la concomitance de cette réforme avec la relance du nucléaire. Dans sa conférence de presse d'hier, le Président de la République a appelé à « faire plus vite, moins cher et mieux » : ce projet de loi souscrit-il à ce triptyque et est-il bien le meilleur moyen de renforcer la sûreté et la sécurité de nos installations nucléaires ?

Mme Amel Gacquerre. - La relance de la filière nucléaire pose la question de la sûreté des installations, sujet très sensible pour la population - et condition indispensable à l'acceptation des EPR et EPR2. L'annonce d'un projet de fusion, l'an dernier, a créé le trouble : en avez-vous constaté un effet sur les départs de l'ASN ? Vous nous dites avoir besoin de plus de moyens pour la relance : avez-vous des garanties que les moyens seront renforcés s'il y a la fusion ? Que dit l'étude d'impact de ce projet de loi ? Enfin, comment avez-vous été associé à la préparation de ce texte ?

M. Ronan Dantec. - Quand on s'occupe de risques, il faut pouvoir penser « en dehors de la boîte », garder une faculté de poser des questions que personne ne pose. Or, l'ASN va devoir faire face à beaucoup de demandes d'expertise, au risque de saturer ses capacités. Comment garantir que toutes les questions pourront continuer à être posées ? Vous donnez l'exemple « intégré » des États-Unis, mais il faut bien voir qu'outre-Atlantique, les laboratoires des grandes universités jouent un rôle décisif justement par cette faculté de poser des questions, ils maintiennent l'autorité nucléaire en alerte. Comment maintenir cette capacité de penser à des choses hors agenda, en interne et en externe : mobiliserez-vous par exemple des laboratoires externes ?

M. Daniel Salmon. - Ce projet de loi est censé simplifier et fluidifier, mais ne va-t-il pas, au contraire, gripper notre système en forçant le regroupement de deux cultures qui sont très différentes ? On voit déjà qu'il y a des tensions, ne risque-t-on pas des conflits, qui seraient source de perturbations ? On parle d'un système dual, mais il y a en fait trois acteurs puisqu'il faut compter avec EDF, et ce fonctionnement à trois permet justement qu'il y ait toujours un tiers qui peut observer les autres, c'est très important pour notre sûreté.

Mme Marta de Cidrac. - Vous vantez les très bonnes relations de travail entre les deux entités, et vous dites qu'il faudra inscrire dans la loi le principe de la séparation entre la décision et l'expertise, et l'organiser dans le règlement intérieur : quel est donc l'intérêt de la fusion ? Vous dites aussi que pour faire face à la charge de travail qui arrive, vous devrez recourir davantage à de l'expertise externe : laquelle - d'où viendra-t-elle ? Comment passer cette étape cruciale pour notre pays, aussi bien pour le parc existant que pour celui que nous allons créer ?

Mme Sophie Primas. - J'aimerais prendre un exemple précis : sur le phénomène de corrosion sous contrainte (CSC), qu'est-ce qui aurait été différent si la fusion avait été faite ? Aurait-on détecté et réglé le problème plus vite, plus tôt ? Quels auraient été les avantages par rapport à l'organisation actuelle, pour vous et pour EDF ? On voit aussi que, dans l'aérospatial, il y a des compétences croisées entre le civil et le militaire : est-ce le cas aussi chez vous ?

Mme Nadège Havet. - Vous évaluez les besoins d'embauches à 100 000 postes dans les dix ans : avez-vous identifié des compétences rares ? L'offre de formation vous paraît-elle suffisante ?

M. Fabien Gay. - Vous présentez le projet de fusion sous un beau jour, mais on sait bien pourquoi il est forcé : la réalité, c'est qu'il y a une volonté politique forte de relancer très rapidement le nucléaire, c'est bien pourquoi nous avons déjà voté un texte d'accélération, où nous avons déjà posé des questions sur la transparence des décisions qui seront prises. Nous, communistes, notre position est claire sur le nucléaire : nous sommes pour, à condition de garantir un haut statut pour les salariés et la transparence pour les populations. Et nous avons toujours considéré que l'IRSN était un peu le caillou de l'expertise dans la chaussure des industriels et il faut donc faire attention quand on accélère au nom de l'efficacité, ce qui est le pourquoi de ce texte.

Vous dites que ce texte apporte un progrès de transparence pour l'ASN, nous y reviendrons dans le débat, mais on voit déjà que la situation n'est pas la même pour l'IRSN, dont les avis sont rendus publics depuis 2015 et qui risque d'y perdre avec ce texte.

Enfin, les salariés expriment leurs craintes face à ce que cette réforme peut signifier pour leurs statuts, certains relèvent du droit public, d'autres du droit privé, les uns et les autres ne veulent apparemment pas changer de statut mais ils craignent que, comme cela s'est passé ailleurs, des décisions leur soient imposées et que, par exemple, le privé prenne le pas sur le public.

Et pour finir, êtes-vous bien certain d'être prêt pour l'an prochain ? L'ASN utilise une cinquantaine de logiciels, l'IRSN en utilise près de 400 : des salariés qui connaissent la situation de près, nous disent que la fusion technique est impossible à réaliser dans un délai si court : qu'en dites-vous ? Et dans la négociation sociale en cours, chacun sait bien qu'avec le changement de direction, ceux qui prennent des engagements aujourd'hui n'auront pas eux-mêmes à les tenir. Tout ne pourra donc pas se faire par la négociation, le législateur devra intervenir.

M. Daniel Gremillet. - L'an dernier, le Sénat avait alerté sur les questions de sécurité et de sûreté nucléaires, surtout qu'avec les nouvelles générations de réacteurs, dont les SMR et les réacteurs de quatrième génération, le paysage va devenir bien plus complexe, puisqu'il y aura bien plus d'exploitants, bien au-delà d'EDF. Comment garantir la sûreté et la sécurité nucléaires dans ce contexte ? Comment faire, ensuite, pour disposer des ressources humaines suffisantes à la relance qu'on prétend faire, quand tout le monde relance le nucléaire à l'échelle internationale ?

On sait aussi que la recherche en matière de nucléaire concerne des domaines très divers comme l'énergie, le militaire, la santé : ce texte n'appauvrit-il pas notre capacité d'agir dans cette pluralité de domaines ?

Enfin, ce texte doit s'adapter aux évolutions à venir, je crois qu'il doit être vivant : certains articles ne peuvent-ils pas faire l'objet d'avenants, pour les adapter demain au contexte qui aura très probablement changé ?

M. Franck Montaugé. - Il semblerait que ce projet de réforme ait entraîné des départs en nombre : le confirmez-vous ? Sur les moyens, ensuite : la loi de finances initiale pour 2024 a-t-elle apporté un mieux, qui soit en lien avec cette réforme ?

M. Bernard Buis. - Une récente tribune dans le journal Le Monde estime que ce projet de fusion serait contraire aux objectifs de sûreté et de maintien de la confiance, car il conduirait à mettre fin à l'indépendance de l'expertise par rapport à la prise de décision en matière de sûreté nucléaire, indépendance actuellement assurée, outre l'existence de deux structures distinctes, par une disposition légale prescrivant la publicité des avis de l'IRSN. Les avis resteront-ils publics ?

M. Bernard Doroszczuk. - En tant que président de l'ASN, je ne suis pas l'auteur de ce projet de loi et bien des questions que vous me posez s'adressent en réalité au Gouvernement : c'est lui qui est à l'initiative de ce texte et qui a fait élaborer l'étude d'impact. Je ne peux donc guère vous répondre sur tout.

La réforme créerait-elle un risque de désorganisation ? Oui, c'est inhérent à la réforme. Est-ce un motif pour ne pas réformer ? C'est à vous d'en décider. Mais je pense qu'il faut y réfléchir, d'abord parce que l'enjeu devant nous est inédit. L'organisation actuelle permettrait-elle d'y faire face, en la renforçant ? C'est au Gouvernement de le dire, je crois que l'étude d'impact apporte des éléments sur cette alternative. En tout cas, je sais qu'on ne pourra pas faire face aux enjeux si l'on ne change pas notre organisation. Le contexte va changer en profondeur : alors qu'il n'y a aujourd'hui que quelques exploitants, une technologie et un seul usage du nucléaire civil - produire de l'électricité -, il y aura demain divers exploitants utilisant plusieurs technologies, pour des usages variés, par exemple la production de chaleur dans l'industrie. Un petit réacteur qui produira 1 mégawatt (MW), cela n'a guère à voir avec un EPR2 de 1 650 MW. Les questions de sécurité, de sûreté, d'acceptabilité n'ont certainement pas les mêmes réponses, d'autant que d'autres acteurs interviennent. Ces nouveaux acteurs sont très agiles, ils développent des concepts qui n'existent pas encore, sur lesquels nous n'avons pas d'expériences, avec des technologies nouvelles : nous devons investir dans de nouvelles compétences pour les expertiser. C'est évidemment plus difficile de le faire simultanément pour l'ASN et pour l'IRSN, plutôt qu'une fois pour une seule autorité. Il est donc plus efficace, pour ces ressources rares, d'avoir une seule autorité.

On dit qu'il y a des départs de l'IRSN, c'est exact. Pourquoi ? Si davantage de gens partent, c'est aussi parce que des start-up leur proposent de très bonnes conditions - ça peut aller jusqu'au doublement du salaire et on m'a parlé d'une reprise d'emprunt immobilier de 200 000 euros... On demande aux start-up des compétences pour entrer sur le marché : elles viennent les chercher en partie chez nous. L'expertise est une ressource rare et les propositions faites à nos experts continueront à l'avenir, qu'il y ait fusion ou pas.

La recherche est indispensable : je suis convaincu qu'une agence unifiée continuera à avoir de l'ambition pour la recherche, c'est nécessaire pour avoir une vision sur les enjeux en matière de sûreté, et cela passe aussi par des contrats avec des chercheurs étrangers, avec des industriels. Le projet de loi le prévoit en reconnaissant la nouvelle agence comme un organisme de recherche. Il y a eu un examen précis des outils nécessaires à prévoir dans la loi pour qu'elle ne perde pas de capacité de recherches. Elle sera en mesure d'éclairer l'expertise. Le fait d'avoir dans une même autorité des capacités de recherche, d'expertise, des outils de mesure et d'évaluation, sera par exemple un atout face aux enjeux du réchauffement climatique. Aujourd'hui, nous avons, à l'ASN, la responsabilité de la prescription des conditions de prélèvement d'eau et de rejet, par exemple ; nous avons des moyens de mesure dans l'environnement de ce que provoquent les rejets ; et l'IRSN a une capacité d'expertise interne, elle a des moyens de recherche dans le domaine du réchauffement climatique. Tout cet ensemble-là, sur la totalité de la chaîne de l'analyse prospective des enjeux et des impacts du réchauffement climatique, jusqu'à sa traduction dans les dispositions réglementaires qui s'imposeront aux exploitants, sera dans une même chaîne de commandement et de décision : c'est important, cela peut être une force pour la future autorité.

Le projet de loi prévoit le maintien de tous les statuts : nous l'avons spécifiquement demandé lors des consultations. C'est une richesse pour la future autorité. Chacun des statuts présente des avantages : il faut préserver notre capacité d'y recourir. Le texte le prévoit et c'est une force. Est-ce que cela va rendre la gestion complexe ? Oui, mais c'est déjà le cas et ce n'est certainement pas une raison d'y renoncer. Nous avons déjà des statuts divers, mais il n'y a pas de cultures différentes, nous avons des fonctionnements croisés et un même type d'approche sur les sujets.

Beaucoup d'arguments qui sont mis en avant contre la réforme proposée ont vocation à vous effrayer, il faut être réaliste. Il faut écouter, intégrer les craintes, mais par rapport à ce dont nous avons besoin, c'est-à-dire un système efficace, qui ne brade pas la sûreté ni les exigences de recherche, une entité plus resserrée, qui évite des doublons et bien des frictions, sera plus efficace. J'ai lu les tribunes - mais qui croit sérieusement qu'avec le regroupement, notre système va s'effondrer ? C'est une peur, cela n'a pas de sens.

M. Jean-François Longeot, président. - Merci pour toutes ces précisions.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. - Effectivement, merci d'avoir répondu à bien de nos questions.

Audition de M. Jean-Christophe Niel,
directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
(Mercredi 17 janvier 2024)

M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Après avoir entendu le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), nous avons le plaisir d'accueillir le directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), Jean-Christophe Niel.

Monsieur le directeur général, vous avez déjà eu l'opportunité de vous exprimer auprès du rapporteur et du rapporteur pour avis, mais il nous a semblé essentiel que vous puissiez également présenter votre point de vue devant l'ensemble des membres des deux commissions.

Comme je l'ai fait avec M. Doroszczuk, je souhaite vous présenter mon état d'esprit à l'amorce de ce chantier législatif, sans entrer à ce stade dans les considérations de fond concernant l'opportunité de la réforme.

Notre priorité - je le dis en tant que président de la commission chargée des politiques de prévention des risques - est claire : nous souhaitons maintenir notre sûreté nucléaire à un niveau d'exigence le plus élevé possible, en l'adaptant aux enjeux de notre décennie et des suivantes. L'opportunité de la relance du nucléaire dans notre pays, qui constitue un débat majeur pour notre nation et qui nous mobilisera dans le cadre du projet de loi sur la souveraineté énergétique, est une problématique d'un autre ordre. Ne nous y trompons pas : le texte qui nous mobilisera au cours des prochaines semaines ne nous amène pas à nous positionner pour ou contre l'énergie nucléaire. Il nous est demandé de réfléchir au cadre le plus adapté pour nos concitoyens afin d'assurer leur sécurité, de protéger la santé et la salubrité publiques, de garantir la protection de la nature et de l'environnement, avec un niveau de transparence satisfaisant.

Vous l'aurez compris, il me semble nécessaire de dissocier les deux sujets, même s'ils sont liés : un système de sûreté irréprochable et une transparence préservée, voire accrue, sont des conditions sine qua non de l'acceptabilité sociale du nucléaire, sans laquelle la relance de la filière ne pourra pas se faire.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. - Comme je l'ai indiqué lors de la précédente audition, à l'heure de la relance de la filière française du nucléaire, la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection proposée par le Gouvernement peut constituer une opportunité pour consolider les processus d'expertise, d'instruction, d'autorisation et de contrôle. Pour autant, cette réforme ne peut réussir que si elle ne déstabilise pas les règles de sûreté et de sécurité, la disponibilité des compétences et, in fine, la confiance du public. C'est pourquoi l'examen du projet de loi soumis au Sénat doit être approfondi et exigeant, en soupesant les avantages, mais aussi les inconvénients de la réforme.

Je souhaite appeler votre attention sur quatre points.

En premier lieu, au regard des exemples étrangers, quels sont les bénéfices attendus d'un modèle intégré de sûreté nucléaire et de radioprotection, tel qu'il est pratiqué aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Espagne ? Quels en sont les risques ?

En deuxième lieu, que pensez-vous du calendrier proposé par le Gouvernement pour réaliser la réforme ?

En troisième lieu, pensez-vous que les conclusions du rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), rendu en application de la loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, dite loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, ont été toutes prises en considération lors de la rédaction du présent projet de loi ? Je pense, en particulier, aux recommandations sur la séparation entre l'expertise et la décision. Certaines d'entre elles n'ont-elles pas été omises ? Si oui, faudrait-il les intégrer au texte ?

En quatrième lieu, enfin, au-delà de cette réforme, quelle est votre vision de la sûreté nucléaire et de la radioprotection de demain ? Car nous nous apprêtons à légiférer pour les prochaines décennies, la mise en service des nouveaux réacteurs nucléaires n'étant pas attendue avant 2036-2037. Dans ce contexte, ne faudrait-il pas intégrer davantage les nouveaux risques, tels que la résilience des réacteurs nucléaires face au changement climatique et leur cyberrésilience ? Ne faut-il pas mieux tenir compte des nouveaux acteurs du nucléaire, dont les opérateurs des petits réacteurs modulaires (SMR) ?

M. Pascal Martin, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire. - Monsieur le directeur général, je vous ai déjà entendu au tout début du cycle d'auditions. Au terme de ce cycle, j'ai identifié cinq enjeux centraux de ce projet de loi, qui doivent être approfondis. J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer ces enjeux tout à l'heure avec le président de l'ASN, mais il me semble important d'avoir également votre point de vue.

Premier enjeu : l'humain. La sûreté nucléaire repose d'abord sur des compétences, sur des experts et des chercheurs, qui doivent être au coeur de notre réflexion. Je l'avais déjà rappelé en tant que rapporteur budgétaire pour avis sur les crédits relatifs à la prévention des risques, la relance du nucléaire nécessitera la création de 100 000 postes au cours des dix prochaines années. Dans un contexte fortement concurrentiel, nous devons être particulièrement attentifs à assurer l'attractivité de la sûreté nucléaire.

Dans l'hypothèse de la création d'une nouvelle autorité de sûreté nucléaire, comment la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) pourrait-elle être suffisamment attractive, notamment pour les jeunes chercheurs experts ? L'éventualité d'une réorganisation prochaine de la sûreté nucléaire entraîne-t-elle déjà des conséquences sur l'attractivité de l'IRSN ? Comment éviter que la période de transition indispensable entre l'ancienne et la nouvelle organisation ne se traduise par une perte ou une fuite de compétences ?

Deuxième enjeu, non moins important : la transparence. Les Français ont aujourd'hui très largement confiance en la robustesse de notre système de sûreté nucléaire. Cette confiance est le fruit d'un travail de plusieurs décennies de tous les acteurs, qui s'est notamment traduit par un effort accru d'information du public. Pour assurer l'acceptabilité de la relance du nucléaire, il est à mon sens souhaitable de continuer à renforcer cette transparence. L'exposé des motifs du projet de loi évoque une « transparence renforcée vis-à-vis du public ». Comment la future ASNR renforcerait-elle, selon vous, la transparence de la sûreté nucléaire ? Alors que l'IRSN publie aujourd'hui l'ensemble de ses avis d'expertise, comment la future autorité pourrait-elle assurer un niveau au moins équivalent d'information du public ?

Troisième enjeu : la distinction entre expertise et décision. C'est un principe fondamental de notre système de sûreté nucléaire. Dans l'organisation actuelle, les décisions en matière de sûreté nucléaire sont prises par l'Autorité de sûreté nucléaire, tandis que l'expertise est généralement déléguée à l'IRSN pour les décisions les plus importantes. La réforme prévoit d'intégrer expertise et décision au sein d'une même autorité, dans un souci de simplification administrative, renforçant la lisibilité et le caractère opérationnel des services. Quelle forme pourrait prendre la distinction entre expertise et décision au sein de l'organisation unique proposée par le Gouvernement ?

Quatrième enjeu : la recherche. L'IRSN exerce aujourd'hui une activité de recherche en matière de sûreté nucléaire, qui nourrit son activité d'expertise. Cette recherche appliquée, dont l'excellence est reconnue internationalement, serait conservée dans le cadre de la future ASNR. Le transfert à une autorité administrative indépendante d'activités de recherche peut susciter quelques interrogations. La recherche nécessite de nombreux partenariats, avec d'autres établissements de recherche, mais aussi avec les principaux industriels du nucléaire, qui seront également contrôlés par la future autorité. L'ASNR pourrait-elle poursuivre les partenariats engagés entre l'IRSN et les principaux industriels du nucléaire sans risque déontologique de conflit d'intérêts ?

Enfin, le dernier enjeu que j'identifie est juridique : il s'agit des conditions d'élaboration du règlement intérieur de la future autorité. J'ai pu constater au cours de mes auditions que la plupart des sujets les plus sensibles, relatifs notamment à la déontologie, à la publication des travaux d'expertise et à la distinction entre expertise et décision, sont renvoyés, on peut tout à fait le comprendre, au règlement intérieur de la future autorité. Cette option a l'avantage de la souplesse ; il ne faut pas tout figer dans la loi. Si le législateur fait le choix de la fusion, les grandes orientations devront être décidées par lui, puis l'ASNR devra les appliquer dans son règlement intérieur. Cette solution plus souple peut cependant présenter un inconvénient : il n'est pas garanti - je ne formule aucune accusation a priori - que les solutions adoptées par l'ASNR soient totalement conformes à l'esprit du législateur. Comment garantir que, sur des enjeux aussi cruciaux que la déontologie, la transparence et la distinction entre expertise et décision, la volonté du Parlement soit respectée ? Vous semblerait-il pertinent et envisageable de prévoir la saisine pour avis simple de l'Opecst, par exemple, sur le projet de règlement intérieur de la future autorité ?

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Je l'ai indiqué précédemment, je suis chargé, en tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'examen au fond de quatre articles du projet de loi, sur les réformes du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) et des règles de la commande publique applicables aux projets de réacteurs nucléaires, et de l'examen pour avis des autres articles du texte, ayant trait à la réforme de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Je souhaite vous poser les questions que j'ai déjà indiquées au président de l'ASN.

Ma première question concerne l'application de cette réforme. D'une part, compte tenu de la nécessité, pour la nouvelle autorité, d'élaborer un règlement intérieur étoffé et de négocier des conventions collectives, l'échéance du 1er janvier 2025 est-elle tenable ? D'autre part, le mandat du président de l'ASN devant prendre fin en 2024 sans possibilité de renouvellement, ne faudrait-il pas prévoir la désignation d'un préfigurateur ?

Ma deuxième question porte sur le statut de la future autorité. Si le statut d'autorité administrative indépendante (AAI) est de nature à garantir l'indépendance de cette nouvelle instance, celui d'autorité publique indépendante (API) lui aurait conféré une autonomie budgétaire et une souplesse de gestion. Regrettez-vous le choix opéré par le Gouvernement ?

Ma troisième question concerne les missions de la future autorité. Lors de l'audition du président de l'ASN par notre commission, le 8 mars 2023, sur le premier projet de réforme proposé par le Gouvernement, dans le cadre de la loi dite « Nouveau Nucléaire », celui-ci avait regretté que la sécurité des installations nucléaires civiles ne figure pas parmi les missions de la nouvelle autorité. Partagez-vous cette position ?

Ma quatrième question porte sur l'organisation de la future autorité. Le projet de texte renvoie à son règlement intérieur la séparation entre, d'une part, les processus d'expertise et d'instruction conduits par les services et, d'autre part, les processus d'élaboration des avis et des décisions prises par le collège. Ne faut-il pas viser d'autres actes ? Les cas où les décisions sont prises par le collège sont peu nombreux, on en compte une quarantaine. Ne faudrait-il pas étendre ce champ de compétence ? Le projet de texte renvoie également au règlement intérieur le soin de définir les activités d'expertise et d'instruction qui devront faire l'objet d'une publication. Est-ce que cela offre des garanties suffisantes ? Certains rapports, avis ou décisions ne devraient-ils pas être d'emblée rendus publics, sous réserve des secrets protégés par la loi ?

Ma cinquième série de questions porte sur le personnel de la future autorité. Tout d'abord, la réforme garantira-t-elle l'accueil des salariés de l'IRSN dans des conditions équivalentes à leur situation actuelle ? Plus sensible encore, la complexité des instances de représentation des personnels et des modalités de négociation des conventions collectives ne fait-elle pas peser le risque d'une autorité déséquilibrée, à deux vitesses, entre les agents publics et les agents privés ? Enfin, la jurisprudence constitutionnelle prohibe la délégation à des agents étrangers de fonctions inséparables de la souveraineté nationale, de même que la recherche d'infractions pénales par des agents privés : ne faudrait-il pas inscrire ces garde-fous dans la loi pour les personnels habilités ?

M. Jean-Christophe Niel, directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). - Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est un honneur pour moi de répondre à vos questions. Je serai aidé pour cela, en tant que de besoin, par Karine Herviou, directrice générale adjointe de l'IRSN chargée de la sûreté nucléaire, et Patrice Bueso, directeur de la stratégie ; ils sont accompagnés d'Emmanuelle Mur, responsable des affaires institutionnelles.

Commençons par un rappel. L'IRSN est l'expert public du risque radiologique et nucléaire ; sa mission consiste à évaluer les risques liés à l'utilisation des rayonnements ionisants. Cette mission se décline en deux métiers : l'expertise à destination d'un grand nombre d'institutions, dont l'ASN, et la recherche. L'IRSN est donc un organisme scientifique et technique. Concrètement, 25 % à 30 % de notre activité sont actuellement consacrés à l'appui à l'Autorité de sûreté nucléaire, sous la forme de 400 livrables, dont 200 avis, par an. Le reste de notre activité réside dans la recherche ou dans l'expertise pour d'autres institutions : ministères chargés de la défense, de la santé, du travail, de l'environnement, des affaires étrangères, etc.

Ensuite, je veux dire un mot sur le projet de réorganisation du contrôle, qui fait suite aux deux conseils de politique nucléaire des 3 février et 19 juillet 2023. L'enjeu est en réalité de prévenir les accidents nucléaires ou radiologiques ; il ne s'agit pas seulement d'un processus de fusion administrative et budgétaire. En outre, quel que soit le risque considéré - sûreté nucléaire ou sécurité dans le domaine industriel -, le système de contrôle est un élément essentiel de la maîtrise des accidents ; les accidents de Tchernobyl ou de Fukushima, mais également d'AZF, de Lubrizol ou du Boeing 737-MAX en témoignent. Or, j'insiste, la réforme voulue par le Gouvernement n'est pas la conséquence d'une défaillance du système actuel de contrôle, ni à l'IRSN ni à l'ASN. Cela est souligné dans le rapport de l'Opecst, mais également dans le rapport d'audit de la Cour des comptes et du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres).

Le présent projet du Gouvernement vise à fluidifier les processus afin de faire face à la forte augmentation de la demande. Il comporte des évolutions par rapport au premier amendement sur le sujet, déposé alors dans le cadre de l'examen l'année dernière du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, qui n'avait d'ailleurs pas été examiné par le Sénat, et il prévoit trois chantiers. Le premier réside dans la mise en place de l'ASNR. Le deuxième consiste à transférer la dosimétrie passive au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ; je vous présente ici un dosimètre, ce dispositif est utilisé par des professionnels - du dentiste à l'opérateur de centrale nucléaire -, que l'IRSN fabrique à 1 500 000 exemplaires par an. Troisième chantier : le transfert de l'expertise de défense au ministère des armées.

On retrouve dans le présent projet de loi les recommandations de l'Opecst. Je pense, notamment, au fait d'associer la recherche et l'expertise, d'afficher au plus haut niveau la séparation entre expertise et décision, de garantir la transparence de l'expertise, de préserver la capacité de réponse de l'État en cas de crise, d'assurer l'attractivité et la fidélisation des salariés, de fournir un appui technique aux autres autorités dans le domaine de la défense et de la sécurité ou dans le domaine de la radioprotection.

J'en viens à la future autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection. Ses missions seraient celles qui incombent aujourd'hui à l'ASN et à l'IRSN, à l'exception, donc, de la dosimétrie passive et de l'expertise de défense. Cette nouvelle structure serait unique à plusieurs titres. D'abord, il s'agirait du seul organisme de recherche ayant le statut d'une autorité administrative indépendante. Ensuite, à l'échelle internationale, elle serait la seule autorité de sûreté faisant de la recherche ; même si certaines autorités de sûreté étrangères financent de la recherche.

La deuxième originalité de la nouvelle organisation est de rassembler 500 agents publics et 1 600 salariés de droit privé. Le Conseil d'État, au travers de son avis sur ce projet de loi, et le Conseil national de la transition écologique (CNTE) indiquent que ce dispositif présente une complexité certaine.

Ces constats amènent l'IRSN à se montrer vigilant sur cinq points.

Le premier point a trait aux activités de recherche. Il est essentiel que ces dernières s'intègrent dans l'écosystème afférent. Il faut être capable de mener des travaux avec les industriels afin de concevoir, de construire et d'exploiter des installations.

Le deuxième point est la gestion de crise. L'organisation prévue dans la loi améliorera la visibilité en la matière. Un certain nombre de sujets devront néanmoins être traités. Ainsi, il faudra s'assurer que les dosimètres passifs soient mis à la disposition des travailleurs ou du personnel intervenant, ce dont l'IRSN se charge actuellement. De plus, la gestion de crise pour ce qui est de la défense devra être éclaircie. Pour l'instant, l'expertise à ce sujet est faite au centre de crise de l'IRSN, qui sera intégré à l'autorité de sûreté civile.

Le troisième point est la séparation entre l'expertise et la décision. Ce principe résulte des grandes catastrophes technologiques des années quatre-vingt, comme Bhopal et Tchernobyl, et des crises sanitaires des années quatre-vingt-dix, comme le sang contaminé et la vache folle. Il me semble que la distinction retenue dans la loi entre le collège, chargé des décisions les plus importantes, et les services n'est pas suffisante.

Le quatrième point est l'attractivité. L'enjeu sera de maintenir dans la durée, conformément à l'objectif actuel, un nombre important de salariés de statut privé et le dialogue social, qui est 'une qualité reconnue à l'IRSN.

Le cinquième point est l'enjeu de la transparence et de l'interaction avec la société civile qui conditionnent la confiance dans le système de contrôle. Il faudra continuer à publier les expertises techniques et les recherches qui fondent les décisions.

Au-delà de ces points, il est nécessaire d'assurer la continuité de service pour garantir la réussite du plan de relance du nucléaire. J'ai remis à votre rapporteur un schéma élaboré par l'IRSN qui montre une concentration de notre travail d'expertise, avant les prises de décision, dès 2024 et 2025. Des travaux sont déjà menés sur les réacteurs EPR 2 ou sur les SMR.

En outre, pour reprendre les termes du Conseil supérieur de l'énergie (CSE), j'attire votre attention sur le risque d'instabilité qui pourrait accompagner la réforme. La complexité de cette dernière est mentionnée par la Cour des comptes, par le Conseil d'État ou par l'Opecst et par vos commissions.

Pour conclure, j'indique qu'une des conditions de la réussite de cette réforme est celle des moyens, en matière tant de relance du nucléaire que de réorganisation. Le constat figure notamment dans le rapport de M. Rapin au nom de la commission des finances du 24 mai 2023 Relance du nucléaire : adapter les moyens de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.

Une autre condition est que le dialogue social soit de qualité afin que l'adaptation soit à la hauteur de l'évolution.

M. Sébastien Fagnen. - À écouter précédemment le président de l'ASN, nous avons eu le sentiment que le plaidoyer en faveur du projet de fusion s'agissait en fait d'un réquisitoire ! D'après vous, la filière électronucléaire française peut-elle relever les défis des années à venir en conservant le système dual actuel et en le renforçant à l'aide de garanties financières et humaines ?

M. Yannick Jadot. - Le nucléaire sera encore présent pour des décennies : l'enjeu est celui de la sûreté et de la sécurité. Un président de l'ASN avait déclaré que le risque zéro n'existait pas. En outre, les risques sont de plus en plus nombreux. Il est nécessaire de les expertiser correctement. Les besoins explosent également en matière de décisions et potentiellement d'autorisations. L'accroissement des responsabilités est considérable. Nous avons l'impression que le Président de la République veut passer outre toutes les procédures de décision, notamment parlementaires, et que l'expertise sur le fond devient une forme de contre-pouvoir qu'il faudrait réduire, car source d'emmerdements en matière d'autorisations ! Or l'organisation en deux institutions nous paraît efficace et de plus en plus nécessaire. Un doublon en matière de sécurité nucléaire représente une sécurité.

Avec ce projet de loi, la séparation entre expertise et autorisation ne relèverait pas d'un encadrement décidé en responsabilité par le législateur. Elle se ferait au travers d'un règlement intérieur, ce qui, pour des décisions aussi importantes, me paraîtrait lunaire ! Ce rattachement à un tel document vous paraît-il suffisant pour assurer la sécurité de nos concitoyens ?

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Votre organisme comme l'ASN sont reconnus à l'échelle internationale pour leurs compétences. En quoi cette réforme ira-t-elle dans le sens d'un renforcement de la sûreté et de la sécurité nucléaires ?

Par ailleurs, l'ex-ministre de la transition énergétique indiquait que votre établissement public industriel et commercial (Épic) serait plus indépendant à l'avenir en étant intégré dans une agence. En quoi manquez-vous actuellement d'indépendance ? En auriez-vous davantage à l'avenir ?

M. Serge Mérillou. - Le Gouvernement justifie entre autres cette fusion par le besoin d'augmenter l'efficience du travail, notamment pour améliorer le partage d'informations. Or, dans le même temps, le projet de loi prévoit une séparation entre la sûreté des installations civiles et celle des installations militaires. Vous évoquiez la complémentarité des deux domaines lors de votre audition à l'Assemblée nationale en octobre dernier. Cette mesure peut-elle représenter un frein au partage des données ? N'existe-t-il pas un risque de perte d'efficacité ?

En matière de recherche, vos partenaires, par exemple EDF et le CEA, sont soumis au contrôle de l'ASN. En créant une unité qui rassemble l'IRSN et cette dernière, de tels acteurs ne seront-ils pas réticents à mener des recherches en partenariat avec l'autorité qui les contrôle ? Le cas échéant, comment faire face à cette perte de compétitivité de votre organisme ?

M. Ronan Dantec. - Dans son audition édifiante, le président de l'ASN nous indiquait clairement que son organisme n'avait pas les moyens d'accomplir ses missions : nouveau programme nucléaire, carénage, SMR, etc. Les moyens humains de l'IRSN permettraient de répondre à la charge de travail.

Si l'IRSN doit répondre à davantage de demandes d'expertise sur l'ensemble des champs liés à la relance du nucléaire, aurez-vous encore les moyens de remplir vos autres missions, la radioprotection ne se limitant pas au nucléaire ? Certaines devront-elles être réduites, voire abandonnées ? Votre rôle out of the box, à savoir poser des questions que personne ne pose et non pas répondre seulement à des commandes d'études venant de l'ASN, pourra-t-il être rempli ?

M. Daniel Gremillet. - En matière de personnel, tout le monde reconnaît les besoins énormes qui sont impliqués par les nouvelles missions et par la nouvelle génération d'installations nucléaires. À ce titre, les moyens de l'IRSN ont été renforcés par le Sénat en 2023. Jusqu'à présent, EDF est votre principal interlocuteur. À l'avenir, il faudra compter sur les start-up. Le contexte changera complètement ! La future structure sera-t-elle un atout pour attirer plus de femmes et d'hommes malgré le déclin national du nucléaire ?

En outre, les installations nucléaires nécessiteront de nouveaux sites. La question de la transparence et des moyens afférents n'est-elle pas sous-estimée dans ce texte ?

Enfin, la France a été pionnière dans le nucléaire : énergie, santé, défense... Dans la nouvelle structure, la recherche ne serait-elle pas affaiblie ?

Mme Marie-Claude Varaillas. - Pour justifier la fusion, la ministre de la transition énergétique a mis en avant le manque de réactivité dans les situations de crise, évoquant la centrale de Civaux dont la reconnexion au réseau, après la résolution des problèmes de corrosion, aurait pris trop de temps. La fusion des deux entités permettrait-elle véritablement d'améliorer les délais ? La convention pluriannuelle avec l'ASN fixe des échéances qui semblent avoir toujours été respectées par l'IRSN. Il serait intéressant d'évaluer le gain de temps réellement induit par la création de cette nouvelle autorité administrative indépendante, et de vérifier que la fusion ne se fera pas au détriment de la transparence et de la sécurité.

M. Bernard Buis. - Compte tenu du niveau relativement faible des rémunérations existantes au sein de votre organisme pour certains métiers en tension de la filière du nucléaire, l'article 11 du projet de loi prévoit que l'IRSN et l'ASN consacreront respectivement 15 millions d'euros et 700 000 euros à l'augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024. En parallèle, le Gouvernement réfléchit aux moyens d'accroître l'attractivité de la future autorité pour les fonctionnaires en veillant à maintenir un équilibre entre les différentes affectations. Y aurait-il d'autres pistes à envisager ?

M. Daniel Salmon. - Le président de l'ASN parlait de contexte hors norme. Est-ce compatible avec le nucléaire ? Il parlait de défis extrêmes devant nous, comme la sécurité du parc nucléaire vieillissant ou les nouveaux EPR2 et SMR. Des évolutions pourraient-elles être apportées au modèle actuel ou la fusion des deux organismes est-elle un passage obligé ? Quelles seraient vos propositions pour améliorer ce système dual qui donne satisfaction ?

Mme Anne-Catherine Loisier. - Dans quels pays y a-t-il, comme en France, des autorités et organismes distincts ? Est-il envisagé de les regrouper ?

M. Jean-Christophe Niel. - Tous les pays ayant un parc nucléaire ont besoin d'une expertise technique de sûreté nucléaire et disposent donc d'une autorité de sûreté nucléaire, conformément à la convention internationale. Pour autant, les modèles peuvent différer en termes d'interactions entre l'autorité de sûreté et les organismes techniques de sûreté, les TSO (Technical Safety Organizations), dont l'IRSN fait partie.

Il faut distinguer deux systèmes, reconnus au niveau international : le système américain, qui est intégré, et le système français, qui comprend une autorité et un expert techniques.

Sur les douze pays qui comptent le plus grand nombre de réacteurs, dix ont un TSO séparé. Les deux pays ayant un TSO unique sont des acteurs majeurs : les États-Unis et le Canada. Il convient de considérer les caractéristiques des TSO en examinant l'équilibre global du système. Ainsi peut-on noter que les autorités de sûreté américaine, canadienne et japonaise organisent leurs réunions de façon publique, télévisée. Par ailleurs, le système américain est très normatif : il ne prévoit pas de dialogues techniques laissant la place à l'innovation.

Pour ce qui concerne le calendrier, un regroupement de l'actuelle ASN et de l'IRSN au 1er janvier 2025 est un objectif très ambitieux. Par ailleurs, l'organisation de la nouvelle structure sera liée aux choix prévus dans la loi. Si cette date devait être retenue, le système devrait fonctionner à cette échéance, même s'il n'est pas définitif. Aussi travaillons-nous avec l'ASN pour définir les « incontournables », c'est-à-dire les sujets qui devront être absolument traités, faute de quoi le système ne fonctionnera pas. Je citerai un exemple trivial, les rémunérations, mais aussi l'organisation hiérarchique des postes, ainsi que le partage et les délégations de responsabilités et de pouvoirs.

Le président de l'ASN quittera ses fonctions en novembre 2024. Lorsque la nouvelle structure verra le jour, il serait bon que le nouveau dirigeant ait en main les options possibles et qu'il soit dépositaire du travail qui a été précédemment engagé. La notion de préfiguration n'est pas simple à mettre en oeuvre ; en effet, les nominations du président de l'ASN et du directeur général de l'IRSN doivent être approuvées par les commissions parlementaires. Il est difficile d'imaginer un préfigurateur qui ne serait pas passé par cette étape...

Nous travaillons donc avec les équipes de l'ASN, du CEA et du ministère des armées sur les points qui devront absolument être en place au 1er janvier 2025.

Le projet de loi fait référence à la vingtaine de recommandations du rapport l'Opecst, lesquelles pourraient être appliquées dans le système dual actuel.

J'en viens à la sûreté nucléaire et la radioprotection de demain. Parmi les installations nouvelles - EPR, EPR 2, SMR -, le réacteur EPR 2 n'est pas très différent de l'actuel EPR : la chaudière est la même ; EDF a pris la décision de garder le même récupérateur de corium ; seuls les bâtiments périphériques évoluent. Pour l'expertise de l'EPR 2, qui a déjà commencé - une vingtaine d'avis ont été produits de manière anticipée -, il faudra se concentrer sur les différences avec l'actuel EPR.

Nous échangeons avec les concepteurs des SMR. Avec l'ASN, nous avons travaillé sur la mise en place de nouveaux processus d'instruction, en prévoyant une étape qui permettra de gagner du temps : il s'agit d'évaluer la maturité du projet déposé par le concepteur de SMR afin d'examiner s'il est expertisable.

L'IRSN a engagé une réflexion sur les sujets majeurs de la cybersécurité et de la cyberrésilience, de même que sur le changement climatique, sur lesquels nous menons des activités de recherche et d'expertise. Il conviendra d'approfondir ce travail.

Parmi les cinq enjeux centraux rappelés par M. le rapporteur Pascal Martin, j'insisterai sur l'attractivité, l'aspect humain. La force de l'IRSN, c'est la qualité de ses personnels - ingénieurs, titulaires de doctorats, médecins, pharmaciens, experts. Le maintien de l'attractivité est un objectif essentiel. La période actuelle se caractérise par l'incertitude. Nos salariés sont inquiets et la question de l'évolution des effectifs se pose. Nous constatons une augmentation du nombre des démissions, qui demeure néanmoins limité. Mais lorsqu'un personnel part, il faut le remplacer. Il faut dix ans pour former un expert ; il convient donc, à cet égard, d'investir dans la durée.

Pour ce qui concerne les conditions salariales, on constate un écart de salaires de 23 % entre les experts de l'IRSN et ceux de l'industrie ou du secteur de la santé. Cet écart s'élève à 40 % s'agissant des experts de bon niveau et des managers. Par ailleurs, les nouveaux acteurs du secteur proposent des rémunérations que nous ne pouvons pas offrir.

La transparence est un enjeu essentiel pour la crédibilité et la confiance dans le système de contrôle. L'IRSN mène une politique volontaire et dynamique - et, je crois, reconnue - d'ouverture sur la société. Il convient de renforcer cette démarche. Notre comité d'orientation des recherches (COR) associe les parties prenantes à la définition des programmes de recherche. Les commissions locales d'information (CLI) et leur association nationale, ainsi que le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) sont des acteurs essentiels de ce dispositif. Ainsi, le Haut Comité tiendra demain une conférence de presse, à laquelle l'IRSN participera, relative au lancement de la concertation sur la prolongation des réacteurs de 1 300 mégawatts.

La séparation entre l'expertise, relevant des services, et la décision, relevant du collège, n'est, selon moi, pas satisfaisante. Aujourd'hui, le collège rend 40 décisions par an, et l'IRSN transmet à l'ASN 200 avis ; la plupart de ceux-ci sont repris non par le collège, mais par les services. On pourrait imaginer, par exemple, une direction de l'instruction et de la réglementation, d'une part, et une direction de l'évaluation, d'autre part, avec des processus de prise de décision qui seraient placés à la bonne place hiérarchique.

Il y a certes un continuum entre expertise et décision, qui se présente comme suit : dépôt d'un dossier par l'opérateur ; discussion entre l'opérateur, l'IRSN et l'ASN pour définir le cadre de l'expertise ; expertise comprenant des interactions avec l'opérateur ; information de l'ASN ; avis ; décision. Pour autant, ce continuum n'exclut ni l'existence d'étapes ni une claire attribution des responsabilités, laquelle sera d'ailleurs prévue dans la nouvelle organisation dans le cadre de la démarche qualité. Plus fondamentalement, les experts qui signent un avis sur le nucléaire sont conscients de la responsabilité qu'ils portent.

La recherche est un enjeu très important de la création de la nouvelle structure. L'Autorité de sûreté nucléaire, dont j'ai été directeur général pendant dix ans, a un fonctionnement en surplomb. Quant au travail des organismes de recherche, il relève de la collaboration et de la compétition, notamment pour répondre à des appels à projets ou pour construire des partenariats - tous les partenaires de l'IRSN nous interrogent sur ce sujet.

Le lien avec les industriels est fondamental, car la recherche doit être non pas hors-sol, théorique, mais opérationnelle afin de répondre à un besoin d'expertise. L'IRSN a été créé dans les années 2000 pour faire naître une interaction entre la recherche et l'expertise, afin que celles-ci soient au plus haut niveau. La flexibilité, la souplesse et le pragmatisme du système sont dus à ce dialogue technique fondé sur la connaissance scientifique. Une bonne manière de faire de la recherche concrète est de discuter avec les industriels, et de confronter les points de vue et les approches.

La déontologie est un autre sujet majeur. L'IRSN dispose d'une commission d'éthique et de déontologie ; je pense que la nouvelle autorité devrait se doter d'une telle instance. Tous les ans, nous présentons à cette commission un état de ce que nous faisons en termes de déontologie.

Les programmes de recherche que l'IRSN conduit, par exemple avec EDF, ne sont jamais des tête-à-tête, mais toujours des partenariats qui associent de nombreux acteurs - TSO étrangers, organismes académiques, industriels. La nouvelle structure devra continuer à concevoir et exploiter ces programmes.

Au niveau juridique, le projet de loi contient de nombreuses références au règlement intérieur sur les points suivants : déontologie, transparence, expertise et décision. Une implication de la représentation nationale à cet égard serait bénéfique sur le fond, mais aussi en termes de perception par le public. Une intervention du HCTISN serait également positive.

L'IRSN a peu à dire sur les articles relatifs à la commande publique et au haut-commissaire à l'énergie atomique. Dès que ce dernier prendra ses fonctions, nous le contacterons, ainsi que les responsables de la nouvelle structure, pour évoquer les enjeux de la recherche dans le domaine de la sûreté nucléaire.

Compte tenu du statut de l'IRSN, le statut d'API présenterait beaucoup plus de facilité de mise en oeuvre. Il nous permettrait, par exemple, de conserver notre système d'information et de gestion (SIG), alors que le statut d'AAI nous contraindrait à nous rattacher au SIG de l'État. Contrairement à une AAI, une API a une personnalité morale, ce qui serait de nature à simplifier la mise en oeuvre du processus.

J'ai été interrogé sur la sécurité des installations nucléaires civiles. Dans la plupart des pays, la sécurité est intégrée à l'autorité de sûreté. La prévention contre le terrorisme recouvre à la fois une dimension technique et organisationnelle - l'installation de détecteurs, de portes épaisses, etc -, qui peut être du ressort d'une autorité de sûreté ou de sécurité, et la mobilisation d'agents de police, de gendarme et d'agents des services secrets. Dans aucun pays cette seconde dimension ne relève de l'autorité de sûreté.

Chaque année, l'IRSN remet à l'ASN 400 livrables, dont 200 avis. J'estime, et c'est aussi l'avis de nombreuses instances, qu'il faut tendre à rendre publics l'ensemble des avis, au même titre que les recherches.

J'en viens aux personnels. L'organisation envisagée est complexe - cela a d'ailleurs été relevé par le Conseil d'État -, car elle suppose d'intégrer 1 600 personnels de droit privé à une AAI, c'est-à-dire à un morceau d'État dépourvu de personnalité morale, ce qui pose trois difficultés : le statut de ces personnels, notamment leur salaire, le dispositif conventionnel - astreintes, sujétions, mutuelle, etc - et la structuration de l'autorité pour permettre le dialogue social avec les partenaires sociaux. Un tiers des articles du projet de loi sont consacrés à ce sujet.

N'étant pas compétent en la matière, je ne puis répondre à la question de la délégation aux agents étrangers et privés.

J'ai également été interrogé sur la capacité du système actuel à faire face aux évolutions qui sont envisagées. J'estime que l'atteinte des objectifs du plan de relance nucléaire dépendra des moyens qui lui seront alloués. L'IRSN et l'ASN ont fait la preuve de leur capacité à s'adapter à une nouvelle situation. Après Fukushima, nous avons dû plancher sur de nouveaux risques pendant de longs mois tout en continuant à travailler en parallèle sur d'autres sujets. Le système actuel pourrait évoluer pour devenir encore plus performant.

Du reste, 12 groupes de travail ont été constitués avec l'ASN pour réfléchir à l'élaboration de la future autorité.

Mme Karine Herviou, directrice générale adjointe de l'IRSN. - Nous avons travaillé récemment à une meilleure articulation entre les processus de l'IRSN et de l'ASN. Nous avons, par exemple, revu le séquencement afin de remédier aux lourdeurs identifiées dans le processus d'expertise, notamment dans la phase d'échange avec les exploitants. Certaines des évolutions proposées pourront d'ailleurs être testées avant le 1er janvier 2025.

M. Jean-Christophe Niel. - Le fait de travailler à ces évolutions dans le système actuel permet de nous prémunir contre le risque d'une rupture de la continuité du service.

Il n'y a pas de doublons avec l'ASN dans les champs métiers - à la différence des champs fonctionnels et support. En la matière, l'IRSN et l'ASN sont même complémentaires et pourront l'être encore davantage à l'avenir.

La création d'une entité unique renforcerait le positionnement international de l'ASN et de l'IRSN, qui sont d'ores et déjà deux instances reconnues.

Le projet de loi prévoit le transfert de deux missions au ministère de la défense : la sûreté des installations de défense, telles que le porte-avions Charles de Gaulle ou les installations où sont fabriquées des armes nucléaires, et la sécurité des installations civiles. L'un des enjeux du chantier « expertise défense » est la gestion des interfaces. En effet, pour l'expertise de sûreté défense, la future ASNR devra faire appel à des experts de l'autorité civile pour des aspects spécialisés - incendie, neutronique, thermohydraulique, etc. Il faudra mettre en place des conventions et des modalités de consultation.

Aujourd'hui, les exercices de crise relatifs aux installations de défense sont effectués dans notre centre de crise, qui a vocation à rejoindre l'ASNR. Les modalités d'exercices relatifs aux crises défense restent toutefois à déterminer.

En ce qui concerne les travaux avec les partenaires industriels, je ne reviens pas sur les enjeux de déontologie, que j'ai évoqués. S'il est essentiel de les traiter, on ne peut pas, pour l'heure, préjuger des éventuelles réticences des industriels à travailler avec l'ASNR.

J'en viens à la gestion des flux de demandes. La pression de l'expertise a conduit l'IRSN à réduire le volume de la recherche, mais aussi, conformément à la préconisation de la Cour des comptes, à augmenter ses moyens humains. Parallèlement, nous avons mis en place des dispositifs qui nous permettent de mieux gérer les flux, tels que l'organisation de séminaires communs.

Il convient également de ménager notre capacité à travailler hors commande. C'est essentiel pour la gestion du risque.

Je n'ai pas d'information quant aux sites retenus pour accueillir les futures installations nucléaires. Il est clair que la nouvelle structure, ou à défaut l'ASN et l'IRSN, devront être impliqués dans l'explication du système de contrôle et des enjeux de sûreté nucléaire et de radioprotection. Il conviendrait également de créer des commissions locales d'information.

En ce qui concerne la centrale de Civaux, l'Opecst a constaté, dans son rapport Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, que les difficultés avaient été correctement et diligemment traitées. Ce dossier ne nécessitant pas d'expertise à proprement parler, il a été géré dans un délai relativement court, et sans l'IRSN.

Mme Karine Herviou. - L'autorisation pour le redémarrage de la centrale de Civaux, déposée par EDF le 13 janvier 2023, a été gérée directement par l'ASN, qui a délivré cette autorisation pour le 17 janvier. Lorsque les phénomènes de corrosion sous contrainte sont apparus, la visite décennale de la centrale était en cours. Il a donc fallu terminer celle-ci avant de redémarrer la centrale.

M. Jean-Christophe Niel. - Vous m'avez demandé si la fusion de l'ASN et de l'IRSN améliorerait les temps de réponse. Dans le système actuel, le fait que l'IRSN travaille au service de donneurs d'ordre est un facteur puissant du respect des échéances. Nos groupes de travail s'efforcent toutefois de dégager des pistes pour améliorer encore les choses.

Les 15 millions d'euros que le projet de loi entend consacrer à des augmentations de salaire correspondent à une augmentation de l'ordre de 10 % du budget de l'IRSN. Des augmentations de salaire contribueraient en effet à fidéliser les experts actuellement en poste et à en attirer de nouveaux.

Je vous transmettrai enfin un document indiquant le calendrier de l'application des nouvelles normes. Il y a de nombreuses échéances en 2024-2025, puis de nouveau en 2026-2027. C'est une question de moyens autant que d'organisation, et nous y travaillons.

M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Je vous remercie d'avoir répondu aux questions de mes collègues, monsieur le directeur général.

Examen en commission
(Mercredi 31 janvier 2024)

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, nous examinons ce matin le rapport de Pascal Martin sur le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire et sur le projet de loi organique associé.

La commission des affaires économiques s'est réunie hier. Elle a adopté des amendements du rapporteur pour avis Patrick Chaize - que je salue - sur les articles et sujets sur lesquels elle s'est saisie pour avis. Elle a également adopté des amendements sur les quatre articles et thématiques associées sur lesquels elle bénéfice de délégations au fond.

Les deux textes seront examinés en séance publique le mercredi 7 et le jeudi 8 février. Un vote solennel est prévu le mardi 13 février.

Avant de laisser la parole au rapporteur, j'aimerais vous rappeler quelques éléments de contexte.

Voilà près d'un an, dans le cadre de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, dit « accélération du nucléaire », le Gouvernement avait proposé la fusion entre l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) - autorité administrative indépendante en charge de prendre les décisions individuelles et réglementaires - et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) - établissement public industriel et commercial (EPIC) exerçant des missions d'expertise et de recherche dans le domaine de la sûreté, mais aussi de la sécurité des installations et de la radioprotection.

Nous avions été nombreux, au Sénat, à déplorer la méthode employée par le Gouvernement : cette proposition n'avait fait l'objet d'aucune concertation ni d'aucune évaluation, et n'avait pas été soumise à la première assemblée saisie, le Sénat ! La proposition du Gouvernement avait finalement été rejetée par les députés.

Malmené, le Parlement a réagi par le biais d'une saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) par la commission des affaires économiques du Sénat. Le rapport de l'Opecst de Stéphane Piednoir et Jean-Luc Fugit est paru en juillet dernier. Ses conclusions ont alimenté le projet de fusion proposé par le Gouvernement, dont nous sommes aujourd'hui saisis.

Ce projet de loi prévoit le démantèlement de l'IRSN, à compter du 1er janvier 2025. L'essentiel de ses missions et de ses 1 600 salariés - environ - serait transféré vers l'ASN, qui deviendrait l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). L'ASNR emploierait des salariés de droit privé issus de l'IRSN et des fonctionnaires et contractuels issus de l'ASN.

Les activités commerciales relatives aux dosimètres passifs seraient transférées au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ; quant à l'expertise en matière de sûreté des installations de défense et de sécurité des installations civiles, elle serait exercée par le ministère des armées - environ 140 salariés.

L'objectif de la réforme affiché par le Gouvernement est d'adapter le système de sûreté à un contexte « hors normes », inédit dans l'histoire du nucléaire français.

Avant de laisser la parole au rapporteur, j'aimerais vous partager mon état d'esprit à l'entame de ce débat, comme je l'avais fait voilà quelques jours lors de l'audition du président de l'ASN et du directeur général de l'IRSN.

Notre priorité est claire : nous souhaitons maintenir notre sûreté nucléaire à un niveau d'exigence le plus élevé possible, en l'adaptant aux enjeux de notre décennie et de celles à venir. L'opportunité de la relance du nucléaire dans notre pays, qui constitue un débat majeur pour notre Nation et nous mobilisera dans le cadre du futur projet de loi sur la souveraineté énergétique, est une problématique d'un autre ordre.

Il me semble nécessaire de dissocier les deux sujets, même s'ils sont liés : un système de sûreté irréprochable et une transparence préservée, voire accrue, sont des conditions sine qua non de l'acceptabilité sociale du nucléaire, sans laquelle la relance de la filière ne pourra pas se faire.

Je terminerai en précisant que pour mener à bien sa mission, le rapporteur s'est appuyé sur le rapport de l'Opecst, mais aussi sur une étude de législation comparée réalisée à notre demande par les services du Sénat. Cette étude sera annexée au rapport de la commission et mise à la disposition de tous les parlementaires - sénateurs ou députés - qui voudraient s'en saisir pour alimenter le débat.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Avant d'entamer mon propos, je salue la présence de Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. J'ai eu l'occasion hier soir, dans le cadre de cette commission, d'exprimer mon avis sur le présent texte et je tiens à le remercier pour la qualité de nos échanges.

Après plusieurs semaines de travaux, menés dans un délai extrêmement contraint, le moment est donc venu de vous présenter mon rapport sur le projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire et sur le projet de loi organique modifiant la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Je souhaite tout d'abord vous remercier pour la confiance que vous m'avez accordée en me nommant rapporteur. C'était un beau cadeau de Noël !

J'ai organisé durant les premières semaines de janvier une vingtaine d'auditions, afin d'entendre l'ensemble des parties prenantes sur ce texte. J'ai également souhaité - je viens d'y faire référence - travailler en bonne intelligence avec la commission des affaires économiques, saisie pour avis et au fond sur quatre articles : certaines auditions ont ainsi été organisées conjointement avec Patrick Chaize, et je m'en félicite.

J'ai souhaité effectuer, au cours de mes auditions, une instruction « à charge et à décharge », laquelle m'a conduit à identifier des avantages et des inconvénients à ce projet de refonte.

Je commencerai par les avantages, qui sont au nombre de cinq.

Premier avantage : une efficacité accrue.

J'ai pu constater, au cours de mes auditions, l'excellence du système français de sûreté nucléaire, reconnue par l'ensemble des parties prenantes, à l'échelle nationale comme internationale.

Toutefois, ce système doit aujourd'hui s'adapter à l'évolution du flux de demandes : vous le savez, la relance du nucléaire est un chantier d'une ampleur inédite - en rien comparable avec le « plan Messmer » des années 1970.

La nouvelle organisation permettra de mettre fin aux frictions existantes dans les échanges entre l'ASN et l'IRSN et aux différences de priorisation, qui engendrent aujourd'hui des délais supplémentaires dans la prise de décision.

Dans un contexte de tension sur les ressources humaines - la filière nucléaire aura besoin de 100 000 emplois dans les dix années à venir -, la nouvelle gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection est amenée également à éviter la dispersion des compétences techniques et scientifiques rares, ce que des mesures budgétaires et salariales ne pourront pas faire seules.

Deuxième avantage : une meilleure adaptation aux enjeux contemporains de la sûreté nucléaire.

Le premier enjeu contemporain est celui des petits réacteurs modulaires, ou SMR, développés par des start-ups. Le nucléaire est marqué par un foisonnement technologique inédit dans l'histoire de la filière. J'ai pu entendre, dans le cadre de mes auditions, les start-ups françaises engagées dans une course technologique contre les autres puissances nucléaires. La demande de simplification et de meilleur accompagnement par les pouvoirs publics est forte. La fusion de l'IRSN et de l'ASN, en offrant aux start-ups un interlocuteur unique, contribuerait à cette simplification.

Le deuxième enjeu contemporain est, nous en sommes bien conscients dans cette commission, le dérèglement climatique. Le grand défi du siècle en matière de sûreté nucléaire sera l'adaptation des parcs existants et à venir au réchauffement climatique. Regrouper l'ensemble des savoir-faire nécessaires, actuellement dispersés au sein de l'ASN et de l'IRSN, contribuera à armer notre pays face à ce défi immense.

Troisième avantage : une amélioration de la gestion de crise.

Pour assurer leurs missions en cas de crise, l'IRSN et l'ASN disposent chacun d'un centre de crise, d'une organisation spécifique et de moyens propres. Deux principaux bénéfices peuvent être attendus de la fusion en la matière : d'une part, la mise en place d'un interlocuteur unique, identifié par les services de l'État comme expert dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ; d'autre part, la fluidification des échanges entre les équipes en charge de l'expertise et celles qui auront à proposer des actions de protection de la population aux autorités.

Quatrième avantage : une clarification de la communication.

On parle souvent - et à juste titre - de transparence, mais combien de nos concitoyens sont aujourd'hui capables de distinguer les missions de l'ASN de celles de l'IRSN ?

Émanant de deux institutions différentes, la communication a pu donner lieu, par le passé, à des cafouillages préjudiciables. La réforme permettra à la nouvelle autorité de parler d'une « voix commune » et partant, facilitera l'identification par le public de l'autorité décisionnaire.

Enfin, cinquième avantage : un renforcement de l'attractivité.

Possibilité d'être recruté sous différents statuts, d'en changer, avec par exemple la mise en place d'un concours réservé ; renforcement des opportunités de mobilité professionnelle, y compris géographique, au sein de l'autorité : les paramètres retenus par le Gouvernement constitueront des opportunités pour rendre la future autorité plus attractive.

Toutefois, les incertitudes causées par le projet de loi ont d'ores et déjà provoqué des départs. Des réponses doivent donc être rapidement apportées aux salariés, ainsi qu'aux agents de l'ASN, pour leur permettre légitimement de se projeter dans la nouvelle organisation.

En tout état de cause, une part de la réaction face au déficit d'attractivité des instances de sûreté réside dans l'augmentation des rémunérations et des moyens humains, un sujet qui doit être inscrit dans la durée, que la réforme se fasse ou non. Or, à ce jour, le Gouvernement n'a pas voulu le prendre suffisamment au sérieux, en dépit des nombreuses alertes parlementaires.

Vous l'aurez compris, la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire permettra de renforcer le système de sûreté français dans un contexte totalement « hors norme ».

Ce projet présente cependant en l'état certains risques. Je les ai identifiés durant mes auditions et vous y avez été sensibles également, mes chers collègues, puisque j'ai retrouvé dans vos amendements plusieurs de mes réflexions.

Premier risque : la distinction entre expertise et décision.

Cette distinction est au coeur de la qualité et de la crédibilité du système de sûreté. En effet, une séparation insuffisante risque de placer l'expertise sous l'influence de la décision - les conclusions de l'expertise seraient orientées dans le sens de la décision - ou inversement - la décision, censée tenir compte de l'expertise, mais également d'enjeux comme l'approvisionnement en électricité du pays, pourrait ne pas s'autonomiser suffisamment des avis scientifiques qui lui sont présentés. Par ailleurs, démontrer la sûreté, c'est confronter le doute : le public est rassuré, non par l'affirmation de certitudes quant à l'état de la sûreté nucléaire, mais par la transparence sur les débats internes au système de sûreté nucléaire.

À ce sujet, le projet de loi constitue en l'état un recul, d'abord sur la méthode, en renvoyant le sujet au règlement intérieur de la future autorité, et surtout sur le fond, en prévoyant une distinction des « processus » d'expertise et de décision uniquement dans le cas d'une prise de décision par le collège, soit environ 30 dossiers par an, contre 300 dossiers aujourd'hui. Un redémarrage de centrale nucléaire ne ferait ainsi plus l'objet d'une expertise distincte du reste de l'instruction !

Je vous proposerai d'adopter un amendement qui vise à rééquilibrer le projet de texte, tout en préservant la fluidité permise par la fusion des deux entités, et ce à travers l'extension du champ de la distinction à l'ensemble des dossiers faisant l'objet d'une indispensable indépendance de l'expertise et une distinction des responsabilités, plutôt que des processus. Plus largement, les modalités organisationnelles de distinction et d'interaction des personnels en charge de l'expertise et de la décision seraient fixées par le règlement intérieur.

J'ai également souhaité renforcer l'expertise tierce, en donnant une assise juridique forte aux groupes permanents d'experts, les GPE, comme le proposait le rapport de l'Opecst de juillet dernier du député Jean-Luc Fugit et de notre collègue Stéphane Piednoir, qui nous a rejoints et dont je salue la présence.

Ces groupes sont constitués de spécialistes nommés en raison de leurs compétences et de leur expérience professionnelle. Ils contribuent au processus d'expertise en apportant un regard critique et des compétences spécialisées : ce croisement d'expertises garantit une évaluation impartiale, ainsi qu'une prise de décision fondée sur les meilleures pratiques et les connaissances les plus récentes. Le développement d'une expertise tierce et plurielle par la constitution de comités consultatifs constitue au demeurant une tendance dans d'autres modèles étrangers examinés par l'étude de législation comparée réalisée par le Sénat - je citerai pour exemple les États-Unis, la Finlande et le Royaume-Uni.

Deuxième risque : la transparence, pour laquelle le manque de garantie peut interpeller.

Depuis l'accident nucléaire de Tchernobyl, les crises sanitaires des années 1990 et, plus récemment, la pandémie de covid-19, la reddition des comptes concernant l'expertise scientifique mise à disposition des autorités politiques et administratives est essentielle ; elle conditionne la confiance du public envers les institutions chargées d'assurer leur protection et celle de leur environnement. La crédibilité du système de sûreté nucléaire repose également sur cette exigence impérieuse de transparence, qui apparaît indispensable pour assurer l'acceptabilité de la relance de l'atome dans notre pays.

En renvoyant au règlement intérieur les modalités de publication des résultats des activités d'expertise de la nouvelle ASNR, le projet de loi comporte pourtant des risques de recul en la matière. Ainsi, il n'est pas certain que l'exigence de publication sera conservée, et encore moins qu'elle sera renforcée.

Je vous proposerai un amendement intégrant à la loi le principe de publication des résultats d'expertise, ainsi que des avis des GPE, pour maintenir un niveau de transparence au moins équivalent à celui qu'offre le système actuel.

Troisième risque : le maintien des activités de recherche.

Le projet de loi comporte des risques pour la conduite des activités de recherche de la future ASNR, activités qui sont le socle de l'expertise en matière de sûreté et de radioprotection. Les acquis de l'IRSN - sa notoriété et sa visibilité dans le monde de la recherche - doivent être préservés. En particulier, l'ASNR devra poursuivre la collaboration engagée par l'IRSN avec les industriels du secteur nucléaire, indispensable à la recherche en sûreté nucléaire.

Pour prévenir les conflits d'intérêts qui pourraient apparaître, je vous proposerai deux amendements, visant à faciliter le déport du futur président de l'ASNR et à prévoir la création d'une commission d'éthique et de déontologie.

Enfin, quatrième risque : l'association du Parlement et de la société civile.

De nombreux sujets majeurs seront renvoyés au règlement intérieur de la future autorité. Ce choix peut s'entendre : il est justifié par la nécessité d'assurer une plus grande souplesse de fonctionnement - étant rappelé que nous parlons ici d'une autorité administrative indépendante, qui doit disposer d'une autonomie dans l'organisation de ses services. Une reddition des comptes sera cependant nécessaire pour garantir que la lettre du règlement soit conforme à l'intention du législateur.

Je vous proposerai un amendement en ce sens, prévoyant que le projet de règlement intérieur sera présenté et que les projets de modification seront transmis à l'Opecst, qui dispose d'une expertise reconnue dans le domaine de la sûreté nucléaire, au Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), qui rassemble l'ensemble des parties prenantes du nucléaire, et à l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (Anccli), qui a pour mission d'assurer l'information du public et la concertation en matière nucléaire.

Tels sont, mes chers collègues, les nombreux ajouts que je vous présenterai plus en détail au moment de l'examen des amendements.

Je suis convaincu qu'avec ces apports de bon sens, qui s'appuient sur un travail d'écoute et de concertation avec l'ensemble des parties prenantes, le texte sortira grandement amélioré après son passage devant notre commission.

Je me permets d'insister sur le caractère objectif de la démarche que j'ai choisie, une instruction « à charge et à décharge » et, en conclusion, vous remercie par avance de vos contributions sur ce texte, certes complexe, mais essentiel à la sûreté et la protection des populations.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Je vous remercie, mes chers collègues, de cette invitation à intervenir devant votre commission, ce qui me rappelle quelques souvenirs... M'associant aux propos du rapporteur sur la philosophie de ce texte, je vais essayer de ne pas faire de redites.

La commission des affaires économiques soutient, dans son principe, le nouveau projet de réforme, plus abouti que le précédent et indispensable à la relance de la filière nucléaire. Certes, des défis sont à relever en termes de continuité des procédures, de valorisation des compétences et de maintien des standards. Pour autant, le projet de loi est de nature à inspirer la confiance, du fait du statut d'autorité administrative indépendante conféré à la nouvelle instance.

Dans le cadre de mes travaux préparatoires, j'ai entendu une quarantaine de personnalités au cours d'une vingtaine d'auditions, dont trois en commun avec le rapporteur Pascal Martin. Je tiens à remercier celui-ci pour la qualité de nos échanges - dans un contexte particulier, puisqu'il n'y avait pas de ministre pour défendre le texte.

J'ai proposé 37 amendements, dont neuf identiques à des amendements du rapporteur. Ces propositions s'articulent autour de quatre axes.

Le premier axe vise à consolider la gouvernance de la filière française du nucléaire, en renforçant les attributions et le fonctionnement du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA), et en prévoyant que le Parlement puisse le saisir pour avis et se prononcer sur sa désignation.

Le deuxième axe tend à simplifier les règles de la commande publique des projets nucléaires, en confortant les dérogations prévues en matière d'allotissement, de durée des accords-cadres, de règles de publicité et de concurrence, et en ajoutant un critère de crédibilité et une possibilité d'avenant.

Le troisième axe consiste à faire suite à la loi « accélération du nucléaire », en proposant l'application des recommandations du rapport de l'Opecst, dont je salue le président, et en réintroduisant les dispositions de règle de parité dans le collège de l'autorité et de règle de publicité dans sa commission des sanctions.

Le quatrième axe est de conforter l'organisation de l'autorité de sûreté, notamment en matière de garanties d'indépendance et de déontologie, de séparation entre les processus d'expertise et de contrôle, de publication des rapports et des décisions, ou encore d'association de l'Opecst et des différentes commissions permanentes.

Telles sont, en quelques mots, les grandes lignes des travaux de la commission des affaires économiques.

M. Stéphane Piednoir, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. - Merci de votre invitation, mes chers collègues ; j'ai plaisir à apporter ma contribution à cette réunion de commission, aux côtés du rapporteur et du rapporteur pour avis avec qui, évidemment, j'ai eu des échanges en amont.

Cela a été souligné à plusieurs reprises, l'Opecst s'est saisi du sujet dès l'an dernier, dans des conditions que tout le monde a en tête : la méthodologie était, pour le dire en termes diplomatiques « perfectible » ; constatons qu'elle s'est depuis grandement améliorée.

Nous avons remis notre rapport l'été dernier, juste avant la suspension des travaux parlementaires. En guise d'hypothèse de départ, nous nous étions posé la question de savoir ce qui, dans le contexte actuel, rendait une telle évolution pertinente, nécessaire, voire indispensable. La conclusion à laquelle Jean-Luc Fugit et moi-même sommes parvenus est que le regroupement des moyens humains, financiers et matériels s'imposait du fait des enjeux extraordinaires auquel notre pays devait faire face. Effectivement, alors que le « plan Messmer » des années 1970 portait sur la construction d'un parc, nous devons aujourd'hui envisager la construction d'un nouveau parc, mais aussi la mise en place de nouveaux procédés, technologies ou réacteurs. L'idée d'un regroupement en vue de se structurer, mais aussi d'attirer les compétences, paraît donc bonne.

Dans notre rapport, nous avons également cherché à dédramatiser la question tournant autour de l'expertise et de la décision. En réalité, l'organisation actuelle ne date pas de la nuit des temps et, à l'époque, la construction d'un dispositif dual, autour de l'IRSN et de l'ASN, avait suscité remous et objections très fortes. Nous sommes aujourd'hui à front renversé, avec, pour différence, le fait que presque aucun projet nucléaire n'était en cours dans les années 2000, alors que les enjeux autour du nucléaire sont actuellement massifs.

Évidemment, le point essentiel est de garantir la sûreté, et ce ne sera pas possible sans une transparence maximale. C'est pourquoi nous avons insisté dans notre rapport sur la publication des avis. Pour autant, il nous semble important que l'expertise n'emporte pas la décision.

J'aurai plaisir à m'exprimer au nom de l'Opecst lors de la discussion générale sur le texte - ce sera une première. Je rappellerai à cette occasion l'ensemble de ces points. Nous serons bien évidemment présents lors des débats en séance, et suivrons tout particulièrement les discussions autour des amendements des rapporteurs.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Il paraît qu'il faut revenir à des logiques de bon sens... Nous savons ce que nous avons aujourd'hui en matière de sûreté nucléaire, mais qu'aurons-nous demain avec cette réforme ?

Je rappelle que l'ASN et l'IRSN sont reconnus sur les plans national et international. Effectivement, cette construction remonte aux années 2000. Son objectif était de parvenir à créer un climat de confiance autour du nucléaire. On peut considérer, notamment au regard des sondages, que la démarche a porté ses fruits. Je comprends que l'on réfléchisse à des réformes, que l'on veuille à un moment aller plus vite et faire moins cher, mais ce type de logiques industrielles ne doit pas remettre en cause la sécurité et la sûreté, encore plus dans le domaine du nucléaire.

Le rapporteur a évoqué des cafouillages et on peut reconnaître que tous les Français ne font pas la distinction entre l'ASN et l'IRSN. Cela étant, nous avons choisi de fonder notre dispositif sur deux formes de sûreté : celle de l'ASN est une « sûreté réglée » - on regarde si les règles sont respectées - ; celle de l'IRSN est une « sûreté gérée » - on considère la capacité à assurer la sûreté en toutes circonstances. C'est cette confrontation de deux logiques, au travers de deux organismes différents, qui a permis d'accroître la confiance dans le système.

L'organisation mise en place voilà vingt-cinq ans ne me paraît donc ni si dépassée ni si cafouilleuse qu'on veut bien le dire.

Dernier point, je ne comprends pas l'urgence de cette réforme : tout doit être en place au 1er janvier 2025 ! Certes, la relance de la filière nucléaire est une nécessité. Mais, une fois cela dit, les futurs réacteurs pressurisés européens (EPR), les futurs SMR ne seront pas opérationnels avant les années 2030 ou 2035. Pourquoi engager une réforme aussi rapide, dont la conséquence est de déstabiliser deux services et de perturber les personnels, en prenant le risque de semer le trouble dans l'esprit de nos concitoyens au sujet de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et ce alors même qu'il faut les convaincre de relancer ce secteur ?

Jugeant cette façon de faire maladroite et estimant que nous avons le temps, je soutiendrai la motion tendant à opposer la question préalable engagée par trois groupes politiques du Sénat.

M. Ronan Dantec. - Je ne m'exprimerai pas ici sur la motion tendant à opposer la question préalable ; j'y reviendrai au moment de son examen.

Sur un plan plus général, je rejoins les propos de mon collègue : de toute évidence, il n'y avait pas urgence !

Mais surtout, il ne s'agit pas d'un jeu à deux, comme l'ont présenté les rapporteurs - dont je salue le travail dans un temps particulièrement contraint. Cette fusion entre l'ASN et l'IRSN réintroduit dans le jeu le CEA, EDF et le ministère des armées, et implique un changement de rapports entre des acteurs beaucoup plus nombreux. En réalité, nous n'examinons que la partie émergée de l'iceberg : cette fusion menée à marche forcée va modifier en profondeur l'ensemble de la sûreté nucléaire en France - certains opposants au nucléaire considèrent même que c'est ce qui grippera la relance de la filière.

Le groupe écologiste se retrouve ainsi dans une situation assez paradoxale : évidemment opposés à cette réforme, nous allons néanmoins soutenir de nombreux amendements des rapporteurs qui visent, en fait, à revenir au point initial. Ce que nous sommes en train de faire, c'est effectivement de modifier le projet de loi pour essayer de revenir à deux acteurs dans une entité unique. Cela prouve le caractère aberrant de la situation...

Pour faire à nouveau écho à mon collègue Gilbert-Luc Devinaz, c'est une sorte de retour aux années Messmer et à la très forte méfiance de la société française à l'encontre du nucléaire à la fin des années 1970. C'est la direction que l'on prend : on va remettre en marche la boîte à fantasmes !

Cette fusion est donc une aberration. Nous n'avons pas eu le temps d'en analyser les raisons profondes et les justifications avancées, par exemple par le président de l'ASN, me semblent très insuffisantes - si l'autorité manque de personnels, il suffit d'accroître ses dotations ! Je pense que nous prenons des risques énormes et fragilisons le dispositif de sécurité nationale. Le Gouvernement fait fausse route : mélanger sûreté et relance du nucléaire n'est pas une bonne politique !

Mme Marta de Cidrac. - Je remercie le président de l'Opecst pour sa présence et les deux rapporteurs pour leur travail approfondi. Je soutiens leur démarche, mais souhaite leur poser une question à tous les trois : comment imaginez-vous qu'un responsable de cette nouvelle entité ayant à prendre des décisions puisse choisir Y si l'expertise dit X ? Quelle responsabilité faisons-nous porter à ces décideurs ? Seront-ils en capacité de faire les arbitrages importants qu'ils auront à faire ?

M. Sébastien Fagnen. - Je rejoins les questionnements qui viennent d'être soulevés sur l'expertise et la décision. Lors de son audition, le président de l'ASN, notamment à propos des compétences rares, a clairement indiqué que la fin programmée du système dual amènerait à ce qu'il y ait un recrutement là où il y aurait dû en avoir deux dans le système actuel. On peut donc imaginer que, sur les compétences rares, par nature les plus sensibles, les personnes conduites à expertiser pourraient être parties prenantes de la décision, avec un mélange des genres préjudiciable à l'impartialité, l'éthique, la déontologie ou la transparence.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Mes réponses seront partielles, puisque nous allons débattre des différents sujets à l'occasion de l'examen de la motion et des amendements.

S'agissant du rapport entre décision et expertise, je présenterai plusieurs amendements dont l'objet est précisément de bien clarifier la question.

Pour le reste, comment peut-on affirmer de manière péremptoire que le passage d'un système dual à un système unique remettrait gravement en cause notre système de sûreté nucléaire ? Cette affirmation n'a rien d'une évidence. D'autres pays disposent d'un système unique et leur niveau de sûreté est peut-être identique au nôtre...

En matière d'acceptabilité des populations, je constate que, dans le département de Seine-Maritime, qui abrite déjà deux centrales nucléaires, l'arrivée de l'EPR2 à Penly fait l'unanimité des élus et des habitants. Je suis membre de la commission locale d'information et je peux vous assurer que la subtilité de la séparation entre IRSN et ASN n'est pas la préoccupation majeure des habitants de ces territoires.

Par ailleurs, il n'est évidemment pas question d'un aboutissement de la réforme au 1er janvier 2025. De premières dispositions seront prises à cette date, ce ne sera qu'un point de départ, et j'ai tout de même le sentiment que, compte tenu de l'immensité des chantiers qui nous attendent dans un avenir proche, il faut y aller maintenant.

Bien sûr, tout changement organisationnel amène des questionnements légitimes. Mais le projet de loi apporte une partie des réponses et nous essayons encore de l'améliorer avec nos amendements.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - En définitive, mes chers collègues, vos questions sont rassurantes ! Ce sont celles que nous nous sommes posées au début de nos travaux et je pense sincèrement que nous y répondons en grande partie, voire en totalité, avec nos amendements.

Je voudrais revenir sur la séparation entre expertise et décision. Il y a là un fonctionnement logique et normal de toute autorité administrative indépendante. Qu'elles interviennent sur la sûreté nucléaire ou dans d'autres domaines, ces entités sont composées d'un collège, celui-ci prenant des décisions sur le fondement d'expertises menées par des tiers.

M. Stéphane Piednoir, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. - Puisque Marta de Cidrac nous a invités à répondre collectivement, je vais moi aussi reprendre la parole.

S'agissant du calendrier, il me semble que le moment est le bon. Je reconnais d'ailleurs la malice de Ronan Dantec : dire que ce n'est pas le bon moment pour le faire, pour pouvoir dire, un peu plus tard, que ce n'est plus possible de le faire... On a déjà vu cette stratégie à l'oeuvre ; je crains qu'elle ne fonctionne pas aujourd'hui !

S'agissant de l'acceptabilité, je suis d'un territoire sans centrale nucléaire, mais il y en a une non loin, à Chinon, près de Saumur. Figurez-vous, monsieur Dantec, que le maire de cette ville, dont la sensibilité est plutôt proche de la vôtre, réclame l'installation de nouveaux équipements !

S'agissant des décideurs, rappelons qu'à l'heure actuelle les décisions au sein de l'ASN sont prises par un collège de 5 membres ayant un mandat unique. Il est proposé de maintenir ce dispositif. L'expertise, elle, est partout, notamment au sein de l'ISRN, mais aussi chez les exploitants - c'est EDF, par exemple, qui a détecté la corrosion sous contrainte de ses réacteurs.

S'agissant des gains de temps, enfin, l'idée n'est pas d'aller plus vite, en prenant des décisions à la légère. Mais il y a eu parfois des transmissions d'informations assez longues entre les deux structures, avec une forme de rivalité que l'on pouvait voir poindre.

M. Jean-François Longeot, président. - En l'absence d'autres prises de parole, je vous propose de passer à la définition du périmètre retenu au regard de l'article 45 de la Constitution.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je vous propose, mes chers collègues, de retenir dans le périmètre des deux textes en discussion les dispositions relatives aux missions, aux statuts, aux attributions, à la composition, et aux principes fondamentaux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des établissements et des autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ; aux statuts et à la rémunération des personnels des établissements et des autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ; à l'organisation du dialogue social des établissements et des autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaire, et de la radioprotection ; aux transferts de personnels entre les établissements et les autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ; aux moyens financiers et humains des établissements et des autorités chargées de la sécurité et la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ; à la transparence et à l'information du public et du Parlement en matière de sécurité et de sûreté nucléaires, et de radioprotection ; à l'adaptation de l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution relatif aux emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée  ; aux attributions, au positionnement, à la désignation et au fonctionnement du haut-commissaire à l'énergie atomique ; aux règles de la commande publique applicables aux projets nucléaires, dont la dérogation au principe d'allotissement et la dérogation à la durée maximale des accords-cadres, le critère de crédibilité et le recours aux avenants ; à la protection des intérêts fondamentaux de la Nation en matière nucléaire, dont les dérogations des projets nucléaires aux règles de la commande publique.

Il en est ainsi décidé.

PROJET DE LOI

EXAMEN DES ARTICLES

Motion

M. Jean-François Longeot, président. -Nous examinons tout d'abord la motion COM-26.

M. Ronan Dantec. - Je ne suis pas un fanatique des motions : le rôle du Parlement étant d'étudier les lois, il faut se montrer très parcimonieux quant à ces procédures. Pourtant cette motion tendant à opposer la question préalable - la première, je crois, que je défends en treize ans - est parfaitement justifiée.

Je ne m'attarde pas sur le fond, sur lequel nous venons de nous exprimer.

Mais voyons la forme : alors que nous nous accordons tous à considérer ce sujet comme d'une extrême importance, nous le traitons sans même une audition du ministre. Ce n'est pas possible !

Comme je l'ai dit, en rester à l'articulation entre l'IRSN et l'ASN dans le cadre de ce projet, c'est ne traiter que la partie émergée de l'iceberg. Qu'en est-il des relations entre l'IRSN et EDF ? Pourquoi le CEA souhaite-t-il revenir autant sur le sujet de la dosimétrie ? Quel sera le rôle du haut-commissaire ? Celui du ministère des armées ? Toutes ces questions n'ont pas été étudiées.

Effectivement, les rapporteurs ont cherché à renforcer les garanties apportées par le texte et je salue à nouveau le travail qu'ils ont mené dans un temps extrêmement court, au point que nous n'avons connaissance des amendements de Patrick Chaize que depuis quelques heures. On ne peut pas travailler sur un tel sujet de cette manière !

Je pourrais passer des heures à relayer des avis d'acteurs estimant que tout cela est d'une complexité extrême, va trop vite ou n'a pas été étudié au fond. Même pas d'audition ministérielle ! Vraiment ! Voilà ce qui justifie le dépôt de cette motion tendant à opposer la question préalable.

M. Sébastien Fagnen. - Nous avons eu connaissance du rapport, de grande qualité, de l'Opecst. Nous apprécions également le caractère contradictoire de la démarche de notre rapporteur Pascal Martin, même si nous aurions préféré que les auditions soient ouvertes.

Néanmoins, sur le fond, c'est bien la temporalité dans laquelle s'inscrit cette réforme qui pose problème, son inscription dans un contexte de relance majeure de la filière électronucléaire.

Je suis certainement le parlementaire qui représente le territoire le plus nucléarisé de France et d'Europe occidentale : sur un petit périmètre, nous concentrons une centrale de production nucléaire, une usine de retraitement et un site de production de sous-marins nucléaires.

Notre système de sécurité et de sûreté nucléaires est une architecture sensible et fragile, correspondant peu ou prou à une pyramide inversée : à la base, un système dual, reconnu internationalement et ayant fait toutes ses preuves ; puis, une triangulation entre expertise, décision et opérations ; enfin, une relation quadripartite entre l'IRSN, l'ASN, les opérateurs et la population. Mon territoire abrite ainsi trois commissions locales d'information auxquelles participent aussi bien des industriels locaux que des associations opposées au nucléaire, et tous parviennent à dialoguer.

À nos yeux, dans le cadre d'une relance de la filière électronucléaire, c'est ce système qu'il faut conforter, plutôt que d'engager une fusion qui entraînera une désorganisation majeure. Nous ne menons aucune politique de procrastination, nous ne prétendons pas qu'il faut reporter pour pouvoir dire opportunément après que ce n'est plus le moment. Nous disons : il ne faut pas le faire ! Il faut conforter, développer et renforcer sur le plan budgétaire le système dual actuel.

Sur la forme, effectivement, l'absence d'audition ministérielle nuit gravement au bon déroulé du travail parlementaire, a fortiori sur une question de cette nature.

Tels sont les motifs qui nous conduisent à déposer cette motion.

M. Pascal Martin, rapporteur. - J'ai déjà eu l'occasion de le souligner, je ne vois pas en quoi le passage d'un système dual à un système unique remettrait gravement en cause notre dispositif de sûreté nucléaire et de radioprotection. Il y a là, entre nous, une différence d'appréciation.

Je ne nie pas les risques associés à cette fusion, mais je pense apporter des réponses fortes à travers mes amendements, en défendant des principes intangibles en matière d'efficacité des procédures, d'amélioration de la gestion de crise, de publicité des décisions, d'expertise, de fluidité, d'attractivité des métiers, de transparence, de maintien des activités de recherche, etc.

Les auteurs de la motion prétendent que l'étude d'impact et l'exposé des motifs ne permettent pas d'apprécier les réels progrès de la réforme. Je suis partiellement d'accord, estimant que le Gouvernement ne fait pas preuve d'assez de pédagogie. Mais, encore une fois, le projet présente un certain nombre d'avantages.

La relance de la filière et la prolongation de la durée de vie du parc actuel conduisent déjà en effet à accroître la charge de travail des instances de sûreté. On pourrait alors penser qu'il serait nécessaire de renoncer à la réforme pour ne pas déstabiliser le système. Il me semble au contraire que la pression va aller en augmentant dans les années à venir et qu'il faut donc agir sans attendre.

Ce qu'il manque aujourd'hui, toujours d'après les auteurs de la motion, ce sont les vocations, les ressources humaines et les moyens alloués à l'expertise et au contrôle. Je l'ai également dit : réforme ou pas, il faudra améliorer les conditions de travail, renforcer les rémunérations et les moyens, notamment humains, de la filière nucléaire. Mais, d'une part, cela ne relève pas d'une loi ordinaire et, d'autre part, la nouvelle organisation permettra justement d'éviter la dispersion des compétences rares.

Enfin, je regrette moi aussi que nous n'ayons pas pu entendre un ministre sur ce texte. Cela nuit-il totalement à la qualité de l'examen parlementaire et à la bonne compréhension du projet de loi ? Au vu de vos amendements, mes chers collègues, je pense que vous avez bien compris les enjeux de la réforme et que cette absence - que je déplore - n'a pas nui à votre travail.

Pour toutes ces raisons, l'avis est défavorable.

La motion COM-26 n'est pas adoptée.

Article 1er

M. Pascal Martin, rapporteur. - Mon avis est favorable à l'amendement COM-63, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement COM-93. Ce dernier retient l'ajustement rédactionnel proposé, afin de privilégier la notion de « santé publique » à celle de « santé humaine ». La suppression des mots « et, plus généralement, » ne semble en revanche pas appropriée ; l'objectif de la sûreté nucléaire est effectivement de protéger la santé et l'environnement en général, dans un cadre qui peut excéder la seule prévention des accidents nucléaires.

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Je souhaite préciser que les membres de mon groupe ne participeront pas au vote sur les amendements.

M. Ronan Dantec. - Pour notre part, nous y participerons. Il nous semble effectivement intéressant de voir si l'ensemble du bloc d'amendements réintroduisant une réelle différence entre l'expertise et la décision survit à la navette parlementaire.

Le sous-amendement COM-93 est adopté. L'amendement COM-63, ainsi sous-amendé, est adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je comprends la logique de l'amendement COM-64, mais je suis dubitatif. Je note en effet qu'aucune autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante ne fait aujourd'hui figurer la notion « indépendante » dans son nom. En ajoutant cette notion dans le nom de la future ASNR, ne laisserait-on pas imaginer que les autres structures ne sont pas indépendantes ? Il me semble important de ne pas envoyer ce genre de message, même si je sais que ce n'est pas l'intention du rapporteur pour avis. L'avis est défavorable.

L'amendement COM-64 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - La rédaction de l'amendement COM-65 me semble imprécise et, donc, source d'insécurité juridique : on comprend mal ce que signifie « tenir compte, sur un plan procédural, des projets de production ou de recherche nucléaires innovants ». L'intention est partagée, mais il ne me semble pas nécessaire de nous montrer trop bavards dans cet article relatif aux missions générales de la nouvelle autorité. L'avis est en conséquence défavorable.

L'amendement COM-65 n'est pas adopté.

L'amendement rédactionnel COM-8 est adopté.

L'amendement COM-66 est adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je suis favorable à l'amendement COM-72, qui est identique à mon amendement COM-9. En revanche, l'information du public constituera une mission majeure pour la future ASNR, mais je ne crois pas que l'on puisse parler de « formation de public », comme le propose l'amendement COM-27. En effet, la formation désigne la transmission des connaissances ; on parle alors de formation initiale ou continue. Je ne crois pas que cette terminologie puisse s'appliquer aux modules de sensibilisation réalisés auprès du public.

M. Ronan Dantec. - Nous sommes au coeur du sujet. Cela a été dit lors de l'audition de l'IRSN et nous avons eu l'occasion d'en parler avec ses salariés : aujourd'hui, l'institut joue un rôle très important en matière de formation, notamment des membres des commissions locales d'information. Ce rôle-clé figure justement parmi les missions spécifiques qui vont disparaître. C'est un exemple type des difficultés soulevées par ce projet de loi.

Les amendements identiques COM-9 et COM-72 sont adoptés. En conséquence, l'amendement COM-27 devient sans objet.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je partage l'objectif des auteurs de l'amendement COM-28, qui est de doter la future ASNR en moyens humains et financiers suffisants. Je le martèle chaque année en tant que rapporteur budgétaire pour avis sur les crédits relatifs à la prévention des risques : la sûreté nucléaire doit disposer de moyens adéquats. Néanmoins, le vecteur législatif ne me semble pas le bon : plutôt que d'exprimer un voeu pieu dans le code de l'environnement, nous devons continuer à veiller chaque année à ce que la loi de finances dote l'ASNR de moyens suffisants. L'avis est défavorable.

L'amendement COM-28 n'est pas adopté.

L'amendement COM-51 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'objectif des auteurs de l'amendement COM-29 est d'éviter que les membres du collège désignés par le Président de la République, qui sont majoritaires, puissent décider seuls. C'est actuellement loin d'être le cas : le collège de l'ASN a jusqu'à maintenant pris l'ensemble de sa décision à l'unanimité, malgré un mode de désignation pluriel. Cet esprit de consensus perdurera sans aucun doute dans le collège de la future ASNR. Il ne paraît donc pas nécessaire de faire évoluer le mode de désignation. L'avis est défavorable.

M. Ronan Dantec. - Cette évolution aurait été un symbole fort pour renforcer la confiance.

L'amendement COM-29 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Le collège de l'ASN est une instance regroupant des experts de la sûreté nucléaire, qui prennent à l'unanimité des décisions se fondant sur un avis d'expertise public. Dans la future ASNR, le collège devra également prendre ses décisions en se basant sur un rapport d'instruction public. La confidentialité des débats apparaît indispensable pour permettre à ses membres d'exprimer librement leur position et leurs réflexions, sans pression extérieure. L'avis est donc défavorable à l'amendement COM-30, qui prévoit la publication du compte rendu des délibérations du collège de l'ASNR.

L'amendement COM-30 n'est pas adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je reconnais volontiers que l'article 2 est perfectible : sur des questions aussi centrales que la distinction entre expertise et décision, la publication des avis ou encore la déontologie, le renvoi au règlement intérieur n'est pas satisfaisant. Plutôt que de supprimer un article fixant les règles de fonctionnement de la nouvelle autorité, je vous propose de l'améliorer en adoptant un certain nombre d'amendements. D'où un avis défavorable à l'amendement COM-31, visant à supprimer l'article 2.

L'amendement COM-31 n'est pas adopté.

L'amendement de coordination COM-10 est adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je suis favorable à l'amendement COM-46 rectifié, identique à mon amendement COM-24. Je serais également favorable à l'amendement COM-45, si ses auteurs acceptaient de le rectifier pour le rendre identique.

M. Ronan Dantec. - Nous pouvons effectivement rectifier l'amendement dans le sens souhaité. Je rappelle que notre logique est d'améliorer ce texte, et de voir comment Gouvernement et Assemblée nationale réagissent à ces améliorations.

Les amendements identiques COM-24 et COM-46 rectifié, tout comme l'amendement COM-45, ainsi modifié, sont adoptés.

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'adoption de l'amendement COM-77 conduirait à interdire à la nouvelle autorité de mener ses activités d'expertise et de recherche dans des domaines sur lesquels l'IRSN intervient aujourd'hui. Il me semble donc problématique.

Je suis toutefois sensible aux questions de déontologie, comme nous y a invités le rapport de l'Opecst. Nous y apportons des réponses avec deux amendements : le premier prévoit la création d'une commission d'éthique et de déontologie ; le deuxième permet au président de l'autorité de donner délégation de pouvoirs aux services pour la signature de conventions, afin de faciliter son déport. Ce sont des réponses concrètes et proportionnées à la problématique soulevée par cet amendement, sur lequel j'émets un avis défavorable.

L'amendement COM-77 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Comme précédemment, l'avis est favorable à l'amendement COM-78, identique à mon amendement COM-25. Je serai également favorable à l'amendement COM-32 si ses auteurs acceptent de le rectifier pour le rendre identique.

M. Ronan Dantec. - Nous l'acceptons.

Les amendements identiques COM-25 et COM-78, tout comme l'amendement COM-32, ainsi modifié, sont adoptés.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Il s'agit ici d'opérer une distinction entre les personnes responsables de l'expertise et les personnes responsables de la prise de décision. Nous sommes donc au coeur de la réforme.

L'amendement COM-11 tend à étendre le champ de la distinction entre expertise et décision à l'ensemble des dossiers faisant l'objet d'une expertise, soit environ 300 dossiers par an. Dans la rédaction actuelle, des décisions majeures comme le redémarrage de centrales nucléaires ne seraient pas concernées par ce principe.

De plus, l'amendement remplace la distinction de processus par une distinction de responsabilités : il est ainsi précisé que la personne responsable de l'expertise devra être distincte de la personne ou des personnes responsables de l'élaboration de la décision et de la prise de décision.

Enfin, l'amendement prévoit que les modalités organisationnelles de distinction et d'interaction entre les personnels chargés des activités d'expertise et les personnels chargés des activités d'élaboration de la décision et de prise de décision sont fixées par le règlement intérieur.

L'avis est favorable à cet amendement et, par conséquent, défavorable aux amendements COM-33, COM-47 et COM-73.

M. Ronan Dantec. - Je voudrais une nouvelle fois saluer le travail de Pascal Martin, qui cherche à répondre à cette question essentielle de la séparation entre expertise et décision, et avance des propositions en ce sens, toujours dans un temps contraint. Je me demande simplement jusqu'à quel point le fonctionnement de la nouvelle entité ne sera pas plus complexe qu'un système à deux entités distinctes !

L'amendement COM-11 est adopté. En conséquence, les amendements COM-33, COM-47 et COM-73 deviennent sans objet.

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'amendement COM-34 concerne l'intégration dans le processus d'évaluation des risques des phases de dialogue technique avec la société civile.

Ce dialogue est indispensable pour assurer l'acceptabilité de la sûreté nucléaire. Sont évoquées les expériences menées par l'IRSN, mais aussi par l'ASN, pour mieux associer le public. Il est déjà possible à cadre constant d'intégrer des phases de dialogue avec la société civile pendant la procédure d'instruction ; il n'est donc pas nécessaire de prévoir l'inscription au règlement intérieur de cette possibilité.

L'avis est défavorable.

M. Ronan Dantec. - Nous examinons ici un point très important et assez obscur, avec renvoi au règlement intérieur. Il y a d'autres acteurs que ceux du territoire dans l'échange avec la société civile. L'IRSN, par exemple, travaille aujourd'hui directement avec EDF, dans une fluidité d'échange. Celle-ci perdurera-t-elle une fois l'ASNR créée ?... Il y a là une véritable question, qui méritait un approfondissement.

L'amendement COM-34 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Les amendements identiques COM-5 et COM-85 visent à consacrer sur un plan législatif les groupes permanents d'experts.

Les amendements identiques COM-5 et COM-85 sont adoptés.

M. Pascal Martin, rapporteur - L'amendement COM-4 traite de la publication des résultats des expertises et des avis des groupes permanents d'experts. La consécration législative du principe de publication de l'expertise conduira à maintenir un niveau de transparence équivalent au niveau atteint dans le système actuel. Il reviendra, par la suite, au règlement intérieur de définir les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions.

L'avis est favorable à cet amendement et, par conséquent, défavorable aux amendements COM-35, COM-48 et COM-50.

L'amendement COM-4 est adopté. En conséquence, les amendements COM-35, COM-48 et COM-50 deviennent sans objet.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Il n'est pas souhaitable de déterminer dans la loi la forme que prendra la publication des résultats d'expertise, pour permettre à la future autorité de disposer d'une flexibilité. L'avis est en conséquence défavorable à l'amendement COM-36.

L'amendement COM-36 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - J'ai prévu d'inscrire dans la loi le principe d'une publication des résultats d'expertise. Faut-il, maintenant, inscrire dans la loi la forme précise que prendra cette publication ? Je ne le pense pas. Ce niveau de détail relèvera du règlement intérieur.

Il ne me semble pas non plus nécessaire de préciser que les résultats d'instruction peuvent prendre la forme de « décisions » : la loi le prévoit déjà à l'article L. 592-20 du code de l'environnement. D'où un avis défavorable à l'amendement COM-74.

L'amendement COM-74 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - À travers l'amendement COM-75, il s'agit de prévoir que les résultats des activités d'expertise se rapportant à des résultats d'activités d'instruction sont publiés de manière concomitante prioritairement. Ces deux notions me semblent soulever des difficultés. La rédaction retenue présente effectivement l'avantage de la souplesse, mais elle est floue et, donc, source d'insécurité juridique. En définitive, bien que partageant les principes, je juge préférable de passer par le règlement intérieur de la future autorité.

M. Ronan Dantec. - Si l'on partage les principes, autant adopter la mesure ! Il m'apparaît vraiment dangereux de tout renvoyer au règlement intérieur et cette exigence de concomitance est positive. Cet amendement mériterait de passer le stade de la commission.

L'amendement COM-75 n'est pas adopté.

Les amendements identiques rédactionnels COM-12 et COM-76 sont adoptés, de même que l'amendement COM-13.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 2

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'avis est favorable à l'amendement COM-90, visant à appliquer une règle de parité au sein du collègue de l'ASNR.

L'amendement COM-90 est adopté et devient article additionnel.

L'amendement COM-91 est adopté et devient article additionnel.

Article 3

Les amendements identiques rédactionnels COM-14 et COM-79 sont adoptés.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Les règles de déontologie prévues par l'amendement COM-80 me semblent, d'une part, entrer dans un niveau de détail trop important et, d'autre part, être trop floues pour être adoptées en l'état.

Comme je l'ai déjà dit, je suis très sensible aux questions de déontologie, comme nous y invite le rapport de l'Opecst. Nous y apportons des réponses avec des amendements proportionnés et, me semble-t-il, mieux « bordés » juridiquement.

L'avis est défavorable.

L'amendement COM-80 n'est pas adopté.

L'amendement de coordination COM-15 est adopté, de même que l'amendement COM-16.

L'amendement rédactionnel COM-81 est adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - Il est souhaitable de ne pas trop rigidifier la future ASNR et de laisser les groupes de travail chargés de la préfiguration décider s'ils souhaitent ou non créer un comité d'orientation des recherches, ainsi qu'un conseil scientifique au sein de la future autorité. L'ASNR pourra les intégrer à son règlement intérieur si elle le souhaite. Pour ces raisons, l'avis est défavorable aux amendements COM-37 et COM-49.

Les amendements COM-37 et COM-49 ne sont pas adoptés.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 4

M. Pascal Martin, rapporteur. - Je suis favorable à l'amendement COM-82, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement COM-92, apportant un ajustement technique. Ce sous-amendement vise à éviter que l'ASNR ne présente à chaque commission permanente compétente les sujets sur lesquels une association du public est organisée, en plus de la présentation déjà prévue par l'Opecst. Rendre des auditions systématiques devant plusieurs structures du Parlement pourrait être particulièrement lourd, tant pour l'ASNR que pour les commissions concernées. Le sous-amendement privilégie donc une association des commissions aux auditions qui seront organisées par l'Opecst.

Le sous-amendement COM-92 est adopté. L'amendement COM-82, ainsi sous-amendé, est adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'avis est défavorable à l'amendement COM-38. La Commission nationale du débat public (CNDP) peut déjà émettre tous avis et recommandations de nature à favoriser et développer la participation du public, comme prévu à l'article L. 121-1 du code de l'environnement. Elle s'est particulièrement attachée, au cours des dernières années, à garantir la participation du public dans le domaine du nucléaire. Il n'est pas nécessaire d'ajouter une saisine obligatoire annuelle de plus pour la CNDP, qui fait déjà face à un certain engorgement.

L'amendement COM-38 n'est pas adopté.

Les amendements identiques COM-17 et COM-83 sont adoptés, de même que l'amendement COM-84.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5

L'amendement COM-67 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 6

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'amendement COM-86 concerne le personnel de la future autorité de nationalité étrangère ou apatride ne pouvant être recruté pour pourvoir des emplois dont les attributions, soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique.

Il est de jurisprudence constitutionnelle constante que les personnels de nationalité étrangère ne puissent exercer des fonctions inséparables de la souveraineté nationale. Il n'est pas nécessaire de le préciser au niveau législatif, comme l'a d'ailleurs indiqué le Conseil d'État dans son avis sur le projet de loi.

L'avis est défavorable.

L'amendement COM-86 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, président. - Je ne suis pas favorable à l'amendement COM-87 pour deux raisons.

Premièrement, afin de renforcer les effectifs consacrés à l'inspection de la nouvelle autorité, je vous proposerai un amendement à l'article 13 visant à ce que tous les personnels de la nouvelle autorité puissent être nommés inspecteurs de la sûreté nucléaire, mener des enquêtes techniques et être nommés inspecteurs de la radioprotection. C'est une demande forte de l'ASN, à laquelle aucune exigence constitutionnelle ne fait obstacle, comme le rappelle très clairement l'avis du Conseil d'État. Le présent amendement est clairement contradictoire avec celui que je proposerai à cet article 13.

Deuxièmement, l'amendement prévoit une habilitation des seuls fonctionnaires pour exercer les missions de police judiciaire. Cela va au-delà de ce que prévoit la jurisprudence, qui offre également cette possibilité aux contractuels de droit public.

L'amendement COM-87 n'est pas adopté.

L'amendement de clarification COM-1 est adopté.

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 7

M. Pascal Martin, rapporteur. - Le code du travail prévoit qu'en cas de refus des salariés de droit privé d'accepter le contrat de droit public qui leur est proposé dans une structure publique d'accueil, leur contrat prend fin de plein droit. La personne publique doit alors appliquer les dispositions relatives aux agents licenciés prévues par le droit du travail et par leur contrat.

Il ne me semble pas pertinent d'appliquer cet alinéa aux transferts des contrats de l'IRSN à l'ASNR car les salariés de l'IRSN pourront garder leur contrat de droit privé et les avantages associés. Contrairement au cas de figure visé par le code du travail, il ne leur sera pas demandé d'accepter un contrat de droit public. C'est une garantie forte apportée par le projet de loi.

Pour ces raisons, l'avis est défavorable à l'amendement COM-39.

M. Ronan Dantec. - Je ne suis pas certain que cette réponse technique soit adaptée à un amendement de nature politique. Les personnes travaillant au sein de l'IRSN, monsieur le rapporteur, ont une certaine vision de l'expertise et de l'organisation globale de la sécurité et de la sûreté nucléaires ; une modification profonde de l'organisation générale est opérée : il est évident que la clause de conscience s'applique ! Nous sommes bien ici dans une fusion à marche forcée, dont l'origine tient dans la crainte de ne pas disposer d'assez de ressources humaines pour répondre aux missions, et c'est pourquoi on ne permet pas aux salariés d'exercer une clause de conscience dont la légitimité est évidente. Nous sommes assez loin d'une société démocratique ; cela ressemble plus au « pompidolisme » forcené des années 1970, ce qui me donne le sentiment d'un retour en arrière...

M. Jean-François Longeot, président. - Les années Pompidou n'étaient pas si mauvaises que cela !

L'amendement COM-39 n'est pas adopté.

M. Pascal Martin, rapporteur. - L'avis est par ailleurs défavorable à l'amendement COM-40.

M. Ronan Dantec. - Voilà à nouveau une question d'importance ! Le débat sur la dosimétrie est consubstantiel de cette fusion ; je ne comprends pas pourquoi on ne maintient pas la totalité des activités de dosimétrie dans la nouvelle entité.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - C'est impossible !

M. Ronan Dantec. - Je le sais, mais c'est un nouvel exemple de la désorganisation et des difficultés provoquées par cette fusion. L'existence de deux entités répondait à un certain nombre d'enjeux, notamment sur le plan commercial ; là, on va priver l'IRSN d'une partie de sa capacité d'action.

L'amendement COM-40 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-41.

L'article 7 est adopté sans modification.

Article 8

M. Pascal Martin, rapporteur. - Dans la discussion commune sur cet article, je suis favorable à l'amendement COM-42, qui fait tomber l'amendement COM-88. L'amendement COM-2 est, par ailleurs, rédactionnel.

L'amendement COM-42 est adopté, de même que l'amendement COM-2. En conséquence, l'amendement COM-88 devient sans objet.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 9

L'article 9 est adopté sans modification.

Article 10

Les amendements identiques de clarification COM-7 et COM-89 sont adoptés, de même que l'amendement rédactionnel COM-43.

L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 11

Les amendements COM-68, COM-69 et COM-3 sont adoptés.

L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 12

M. Jean-François Longeot, président. - L'article 12 ayant été délégué à la commission des affaires économiques, je vous propose de prendre acte du résultat des travaux de nos collègues.

L'amendement de suppression COM-44 n'est pas adopté.

L'amendement COM-52 est adopté.

L'article 12 est ainsi rédigé.

Article 13

L'amendement COM-18 est adopté, de même que l'amendement de coordination COM-70.

L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 14

Les amendements identiques COM-19 et COM-71 sont adoptés, de même que les amendements COM-20, COM-21, COM-6 et COM-22.

L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 15

L'amendement COM-23 est adopté.

L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 16

M. Jean-François Longeot, président. - Les articles 16 et suivants ayant été délégués à la commission des affaires économiques, je vous propose de prendre acte du résultat des travaux de nos collègues.

L'amendement COM-55 est adopté.

L'article 16 est ainsi rédigé.

Article 17

L'amendement COM-56 est adopté.

L'article 17 est ainsi rédigé.

Après l'article 17

L'amendement COM-57 est adopté et devient article additionnel.

L'amendement COM-58 est adopté et devient article additionnel.

Article 18

L'amendement COM-59 est adopté.

L'article 18 est ainsi rédigé.

M. Jean-François Longeot, président. - Avant de passer au vote sur l'ensemble du texte, y a-t-il des explications de vote ?

M. Ronan Dantec. - Une fois de plus, mes chers collègues, mes remerciements sincères vont aux deux rapporteurs. Le travail de la commission montre quel équilibre a pu être trouvé au regard d'un projet de loi qui, je le redis, soulève un grand nombre de questions. Cette tentative de rééquilibrage, même si celui-ci est d'une absolue nécessité, alourdit nettement le fonctionnement du futur organe et, en ce sens, va à l'encontre de l'objectif de départ. Cette évolution survivra-t-elle à la navette ? Il faudra en séance que nous ayons une discussion politique, afin de savoir si le Sénat est prêt à accepter que le Gouvernement et l'Assemblée nationale reviennent vers l'idée initiale.

Cela étant dit, nous voterons évidemment contre ce texte.

J'indique, enfin, que le maire de Saumur a fait toute sa carrière dans le secteur du nucléaire. Je ne suis pas certain qu'il soit tout à fait écologiste...

M. Gilbert-Luc Devinaz. - Nous associant à la précédente intervention, nous souhaitons saluer l'excellent travail des rapporteurs. Mais nous restons sur notre position : nous ne participerons pas au vote et ferons notre travail de parlementaires en séance publique.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Les sorts de la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :

TITRE Ier : L'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Chapitre Ier : Missions et fonctionnement de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Section 1 : Dispositions modifiant le code de l'environnement

Article 1er

Auteur

N° 

Objet

Sort de l'amendement

M. CHAIZE

63

Modifications rédactionnelles de la définition de la sûreté nucléaire

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

93

Sous-amendement à l'amendement 63

Adopté

M. CHAIZE

64

Changement du nom de la nouvelle autorité (« Autorité indépendante de sûreté nucléaire et de radioprotection »)

Rejeté

M. CHAIZE

65

ASNR veille à tenir compte, sur un plan procédural, des projets de production ou de recherche nucléaires innovants, tels que les petits réacteurs modulaires ou les réacteurs de quatrième génération

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

8

Rédactionnel 

Adopté

M. CHAIZE

66

Contribution de la nouvelle autorité à l'information du Parlement, dont l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et les différentes commissions parlementaires compétentes

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

9

Rédactionnel

Adopté

M. CHAIZE

72

Rédactionnel

Adopté

M. DANTEC

27

Ajout de la formation du public aux missions de l'ASNR

Rejeté

M. DANTEC

28

Dotation de l'ASNR en moyens humains et financiers suffisants

Rejeté

M. FARGEOT

51

Dissociation de la responsabilité du décideur de celle de l'expert

Rejeté

M. DANTEC

29

Désignation d'un membre du collège de l'ASNR par le président du Conseil économique, social et environnemental 

Rejeté

M. DANTEC

30

Publication du compte rendu des délibérations du collège de l'ASNR

Rejeté

Article 2

M. DANTEC

31

Suppression de l'article

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

10

Coordination légistique

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

24

Extension à l'ensemble des personnels de l'ASNR de la possibilité d'être délégataires de la signature du président

Adopté

M. FARGEOT

46 rect.

Extension à l'ensemble des personnels de l'ASNR de la possibilité d'être délégataires de la signature du président

Adopté

M. DANTEC

45 rect.

Extension à l'ensemble des personnels de l'ASNR de la possibilité d'être délégataires de la signature du président

Adopté

M. CHAIZE

77

règlement intérieur veille à ce que les activités d'expertise et de recherche soient en lien avec les missions de l'ASNR et respectent les règles de concurrence et prohibe celles susceptibles de résulter de prescriptions imposées par cette autorité ou de faire l'objet d'un contrôle dans le cadre de ses attributions

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

25

Création d'une commission d'éthique et de déontologie

Adopté

M. CHAIZE

78

Création d'une commission d'éthique et de déontologie

Adopté

M. DANTEC

32 rect.

Création d'une commission d'éthique et de déontologie

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

11

Distinction entre la personne responsable de l'expertise et la personne ou les personnes responsables de l'élaboration de la décision et de la prise de décision

Adopté

M. DANTEC

33

Indépendance des travaux d'évaluation des risques formulés sous forme de position scientifique et technique

Rejeté

M. FARGEOT

47

Indépendance des travaux d'évaluation des risques et formulation sous forme de position scientifique et technique

Rejeté

M. CHAIZE

73

Séparation des processus d'expertise et de décision, pour l'ensemble des décisions rendues par l'ASNR

Rejeté

M. DANTEC

34

Intégration dans le processus d'évaluation des risques des phases de dialogue technique avec la société civile

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

5

Consécration législative des groupes permanents d'experts

Adopté

M. CHAIZE

85

Consécration législative des groupes permanents d'experts

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

4

Publication des résultats des expertises et des avis des groupes permanents d'experts

Adopté

M. DANTEC

35

Publication des avis d'expertise en amont du processus d'élaboration d'avis et de décision

Rejeté

M. FARGEOT

48

Publication des avis d'expertise en amont du processus d'élaboration d'avis et de décision

Rejeté

M. FARGEOT

50

Publication des activités d'expertise sous la forme de positions scientifiques et techniques

Rejeté

M. DANTEC

36

Publication des activités d'expertise sous la forme de positions scientifiques et techniques

Rejeté

M. CHAIZE

74

Résultats publiés au titre des activités d'expertise peuvent comprendre des rapports et ceux publiés au titre des activités d'instruction des décisions

Rejeté

M. CHAIZE

75

Résultats des activités d'expertise se rapportant à des résultats d'activités d'instruction publiés de manière concomitante prioritairement

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

12

Rédactionnel

Adopté

M. CHAIZE

76

Rédactionnel

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

13

Possibilité de délégation de pouvoirs du président de l'ASNR en matière de passation de conventions

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 2

M. CHAIZE

90

Parité du collège de l'ASNR

Adopté

M. CHAIZE

91

Intégration au rapport annuel du compte rendu de l'activité de la commission des sanctions

Adopté

Article 3

M. Pascal MARTIN, rapporteur

14

Rédactionnel

Adopté

M. CHAIZE

79

Rédactionnel

Adopté

M. CHAIZE

80

Règlement intérieur veille à l'absence de démarchage, à la séparation entre les services chargés de la mise en paiement et ceux chargés de la décision ou de l'inspection

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

15

Coordination légistique

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

16

Remplacement du terme « agents » remplacé par le terme plus englobant de « personnels »

Adopté

M. CHAIZE

81

Amendement rédactionnel

Adopté

M. DANTEC

37

Création au sein de l'ASNR d'un comité d'orientation des recherches

Rejeté

M. FARGEOT

49

Création au sein de l'ASNR d'un conseil scientifique et d'un conseil d'orientation des recherches

Rejeté

Article 4

M. CHAIZE

82

Ajout des commissions permanentes compétentes aux bénéficiaires des obligations de transparence prévue à l'article 4

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

92

Sous-amendement à l'amendement n° 82.

Adopté

M. DANTEC

38

Avis annuel de la CNDP sur la participation des citoyens aux décisions dans le domaine nucléaire

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

17

Présentation pour observations du projet de règlement intérieur à l'Opecst et transmission pour observation au HCTISN et à l'Anccli

Adopté

M. CHAIZE

83

Présentation pour observations du projet de règlement intérieur à l'Opecst et transmission pour observation au HCTISN et à l'Anccli

Adopté

M. CHAIZE

84

Observations formulées par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur un projet de décision d'adoption ou de modification du règlement intérieur de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection élaborées en lien avec les différentes commissions permanentes compétentes

Adopté

Section 2 : Dispositions transitoires

Article 5

M. CHAIZE

67

Ajustement des modalités de transfert des biens, droits et obligations de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire à l'État et au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives

Adopté

Chapitre II : Ressources humaines

Section 1 : Dispositions modifiant le code de l'environnement

Article 6

M. CHAIZE

86

Personnel de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection de nationalité étrangère ou apatride ne pouvant être recruté pour pourvoir des emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique

Rejeté

M. CHAIZE

87

Habilitation et assermentation des seuls fonctionnaires et contractuels de droit public pour exercer les fonctions d'inspecteurs de la sûreté nucléaire ; habilitation des seuls fonctionnaires pour exercer les missions de police judiciaire.

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

1

Amendement de clarification

Adopté

Section 2 : Dispositions transitoires

Article 7

M. DANTEC

39

Application du dernier alinéa de l'article L. 1224-3 du code du travail aux transferts des contrats de l'IRSN à l'ASNR

Rejeté

M. DANTEC

40

Maintien des activités de dosimétrie passive au sein de l'ASNR

Rejeté

M. DANTEC

41

Maintien, au sein de l'ASNR, de l'expertise en matière de sécurité des installations civiles, de sûreté et de radioprotection pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense, de non-prolifération et de contrôle des matières dangereuses

Rejeté

Article 8

M. DANTEC

42

Possibilité pour l'ensemble des salariés de droit privé de bénéficier des conventions, accords et engagements unilatéraux qui étaient applicables au 31 décembre 2024 à l'IRSN jusqu'à l'entrée en vigueur des conventions, accords ou engagements qui leur sont substitués au sein de la nouvelle autorité.

Adopté

M. CHAIZE

88

Rédactionnel

Rejeté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

2 rect.

Amendement rédactionnel

Adopté

Article 10

M. Pascal MARTIN, rapporteur

7

Amendement de clarification, visant à préciser que la formation conjointe du comité social d'administration de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et du comité social et économique de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) pourra siéger à la demande de ces comités ou à la demande du président de la nouvelle Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Adopté

M. CHAIZE

89

Amendement de clarification, visant à préciser que la formation conjointe du comité social d'administration de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et du comité social et économique de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) pourra siéger à la demande de ces comités ou à la demande du président de la nouvelle Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Adopté

M. DANTEC

43

Amendement rédactionnel

Adopté

Article 11

M. CHAIZE

68

Intégration du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans le rapport d'évaluation sur les moyens de la sûreté nucléaire

Adopté

M. CHAIZE

69

Évaluation de la faisabilité et de l'opportunité d'instituer un préfigurateur chargé de la mise en oeuvre de la création de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

3

Amendement de clarification

Adopté

Chapitre III : Le haut-commissaire à l'énergie atomique

Article 12

M. SALMON

44

Suppression de l'article abrogeant la base légale du Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA)

Rejeté

M. CHAIZE, rapporteur pour avis

52

Réécriture de la base légale du Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA)

Adopté

Chapitre IV : Dispositions de coordination et finales

Article 13

M. Pascal MARTIN, rapporteur

18

Extension à l'ensemble des personnels de l'ASNR d'être nommé inspecteur de la sûreté nucléaire, de mener des enquêtes techniques et d'être nommé inspecteur de la radioprotection

Adopté

M. CHAIZE

70

Coordination légistique

Adopté

Article 14

M. Pascal MARTIN, rapporteur

19

Correction d'une erreur de référence

Adopté

M. CHAIZE

71

Correction d'une erreur de référence

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

20

Correction d'erreurs et d'omissions de références

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

21

Coordination légistique

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

6

Suppression d'une référence obsolète au Haut-Conseil des biotechnologies

Adopté

M. Pascal MARTIN, rapporteur

22

Compétence de la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques pour l'audition du président de l'ASNR au titre de l'article 13 de la Constitution

Adopté

Article 15

M. Pascal MARTIN, rapporteur

23

Entrée en vigueur des dispositions relatives à l'application de l'article 13 de la Constitution

Adopté

TITRE II : Adaptation des règles de la commande publique aux projets nucléaires

Chapitre Ier : Sécurisation des procédures relatives à la commande publique pour les porteurs de projets nucléaires

Article 16

M. CHAIZE, rapporteur pour avis

55

Consolidation de la possibilité, pour les marchés publics de certains projets nucléaires, de déroger à l'obligation d'allotissement

Adopté

Article 17

M. CHAIZE, rapporteur pour avis

56

Consolidation de la possibilité de dérogation à la durée maximale des accords-cadres pour certains projets nucléaires

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 17

M. CHAIZE, rapporteur pour avis

57

Ajout d'un critère de crédibilité des offres pour les projets liés à la relance du nucléaire

Adopté

M. CHAIZE, rapporteur pour avis

58

Ajout d'une possibilité d'avenants pour les projets liés à la relance du nucléaire

Adopté

Chapitre II : Mesures destinées à renforcer la protection des intérêts fondamentaux de la Nation en matière de nucléaire

Article 18

M. CHAIZE, rapporteur pour avis

59

Consolidation de la dérogation aux règles de publicité et de mise en concurrence pour les marchés publics de certains projets nucléaires

Adopté

PROJET DE LOI ORGANIQUE

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Les amendements COM-1 et COM-3 sont adoptés.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

L'amendement COM-2 est adopté.

L'article 2 est ainsi rédigé.

Après l'article 2

L'amendement COM-4 est adopté et devient article additionnel.

Le projet de loi organique est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Les sorts de la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :

Article 1er

Auteur

N° 

Objet

Sort de l'amendement

M. Pascal MARTIN, rapporteur

1

Suppression d'une référence obsolète au Haut Conseil des biotechnologies 

Adopté

M. CHAIZE

3

Désignation du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) selon la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution

Adopté

Article 2

M. Pascal MARTIN, rapporteur

2

Entrée en vigueur de la suppression de la référence au Haut Conseil des biotechnologies

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 2

M. CHAIZE

4

Entrée en vigueur de l'ajout du haut-commissaire à l'énergie atomique

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

PROJET DE LOI RELATIF À L'ORGANISATION DE LA GOUVERNANCE

DE LA SÛRETÉ NUCLÉAIRE ET DE LA RADIOPROTECTION

POUR RÉPONDRE AU DÉFI DE LA RELANCE DE LA FILIÈRE NUCLÉAIRE ET PROJET DE LOI ORGANIQUE MODIFIANT LA LOI ORGANIQUE N° 2010-837 DU 23 JUILLET 2010 RELATIVE À L'APPLICATION DU CINQUIÈME ALINÉA DE L'ARTICLE 13 DE LA CONSTITUTION

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie75(*) ».

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie76(*).

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte77(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial78(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a arrêté, lors de sa réunion du 31 janvier 2024, le périmètre indicatif du projet de loi n° 229 (2023-2024) relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire et du projet de loi organique n° 230 (2023-2024) modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, sur la proposition du rapporteur.

Elle a considéré que ce périmètre incluait les dispositions relatives :

- aux missions, aux statuts, aux attributions, à la composition, et aux principes fondamentaux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des établissements et des autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ;

- aux statuts et à la rémunération des personnels des établissements et des autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ;

- à l'organisation du dialogue social des établissements et des autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ;

- aux transferts de personnels entre les établissements et les autorités chargées de la sécurité et de la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ;

- aux moyens financiers et humains des établissements et des autorités chargées de la sécurité et la sûreté nucléaires, et de la radioprotection ;

- à la transparence et à l'information du public et du Parlement en matière de sécurité et de sûreté nucléaires, et de radioprotection ;

- à l'adaptation juridique de l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, relatif aux emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée ;

- aux attributions, au positionnement, à la désignation et au fonctionnement du haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) ;

- aux règles de la commande publique applicables aux projets nucléaires, dont la dérogation au principe d'allotissement, la dérogation à la durée maximale des accords-cadres, le critère de crédibilité et le recours aux avenants ;

- à la protection des intérêts fondamentaux de la Nation en matière nucléaire, dont les dérogations des projets nucléaires aux règles de la commande publique.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 9 janvier 2024

- Autorité de sûreté nucléaire (ASN) : MM. Bernard DOROSZCZUK, président et Olivier GUPTA, directeur général.

- Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) : M. Jean-Christophe NIEL, directeur général, Mme Karine HERVIOU, directrice générale adjointe chargée du pôle sûreté des installations et des systèmes nucléaires, MM. Patrice BUESO, directeur de la stratégie, Patrice DESCHAMPS, directeur adjoint de la stratégie et Mme Emmanuelle MUR, responsable des relations institutionnelles - direction de la stratégie.

- Ministère de la transition énergétique : Mme Mélanie MEGRAUD, directrice de cabinet, M. Thomas TARDIVEAU, conseiller réforme des marchés de l'électricité et filière nucléaire et Mme Célia AGOSTINI, conseillère politique chargée des relations avec le Parlement.

- Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : M. Stéphane Piednoir, sénateur de Maine-et-Loire et co-président de l'OPECST, M. Jean-Luc FUGIT, député du Rhône et co-président de l'OPECST.

Mercredi 10 janvier 2024

- Ministère de la transition écologique et solidaire - Direction générale de la prévention des risques (DGPR) : M. Cédric BOURILLET, directeur général de la Direction générale de la prévention des risques et Mme Anne-Cécile RIGAIL, cheffe du service des risques technologiques.

- Représentants du personnel de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) : M. François JEFFROY, délégué syndical central CFDT, Mme Névéna LATIL QUERREC, déléguée syndicale CGT, MM. Luc CODRON, délégué syndical central CFE-CGC, Pascal CUENDET, délégué syndical CFE-CGC et Cédric GOMEZ, secrétaire du Comité social et économique (CSE), délégué syndical CGT.

- Représentants du personnel de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) : Mme Charlotte GUENAULT, MM. Thomas LOMENEDE, Jonathan RUILLE, et Nicolas PIC-BONNAL, représentants UNSP-FO du personnel au Comité social d'administration de proximité (CSAP).

- Électricité de France (EDF) : MM. Bertrand LE THIEC, directeur des affaires publiques et Michael VARESCON, chef des pôles nucléaire, thermique et hydraulique à la direction juridique Énergies.

Jeudi 11 janvier 2024

- Table ronde d'industriels :

Orano : Mme Laurence GAZAGNES, directrice et M. Alexandre NEVEU, directeur des affaires publiques France.

Framatome : M. Thierry GILLOT, responsable sûreté, sécurité, santé et environnement et Mme Françoise DE BOIS, Autorité règlementaire Framatome.

Table ronde d'association anti-nucléaire :

Nuclear Transparency Watch (NTW) : M. Julien DEWOGHÉLAËRE, expert qualifié.

France Nature Environnement (FNE) : M. Guillaume BLAVETTE, membre du réseau énergie.

Réseau « Sortir du nucléaire » (RSN) : Mme Marion RIVET, porte-parole et responsable du plaidoyer du Réseau Sortir du Nucléaire".

- Association Nationale des Comités et Commissions Locales d'Information (ANCCLI) : MM. Jean-Claude DELALONDE, président, Yves LHEUREUX, directeur et Mme Coralie PINEAU, directrice technique.

- Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) : Mme Lydie EVRARD, directrice générale adjointe - cheffe du département de la sûreté et de la sécurité nucléaires.

- Personnalité qualifiée : M. Jean-Yves LE DÉAUT, député honoraire, ancien président de l'OPECST.

Mardi 16 janvier 2024

- Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) : M. Benoît BETTINELLI, chef de la mission pour la sûreté nucléaire et la radioprotection.

- Autorité à la sûreté nucléaire (ASND) - Délégation à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et les installations intéressant la défense (DSND) : M. François BUGAUT, délégué.

Personnalité qualifiées - Scientifiques (auditions menées en commun avec M. Patrick Chaize, rapporteur pour la commission des affaires économiques) : MM. Michaël MANGEON, chercheur en sciences de gestion, Mathias ROGER, sociologue et Benoît JOURNÉ, chercheur en sciences de gestion.

Table ronde des acteurs SMR (Small Modular Reactor) (auditions en commun avec M. Patrick Chaize, rapporteur pour la commission des affaires économiques) :

Jimmy : Mme Jessica TEPPER, directrice de la sûreté.

Hexana : M. Paul GAUTHÉ, directeur technique et associé co-fondateur.

Stellaria : M. Nicolas BREYTON, président directeur général et co-fondateur.

- Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) : M. François JACQ, administrateur général.

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- Cercle d'étude réalités écologiques et mix énergétique (Cérémé)

- Négawatt

- Société française d'énergie nucléaire (SFEN)

- Thierry Charles, ancien directeur général adjoint de l'IRSN chargé de la sûreté nucléaire 

- Philippe Vesseron, président d'honneur du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)

- Cédric Villani, ancien président de l'OPECST

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl23-229.html

ANNEXE - ÉTUDE DE LÉGISLATION COMPARÉE

À la demande de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, la division de la Législation comparée a réalisé une étude sur la sûreté nucléaire, dans la perspective de l'examen du projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire.

Cette étude porte sur quatre pays - les États-Unis, le Japon, la Finlande et le Royaume-Uni - et analyse l'organisation institutionnelle en matière de sûreté nucléaire, les interactions entre recherche, expertise et décision ainsi que les principales évolutions intervenues après l'accident de Fukushima de 2011 et pour faire face aux nouveaux défis nucléaires que sont le changement climatique et le développement de nouvelles technologies.

SYNTHÈSE

La présente étude fait apparaître deux modèles d'organismes de réglementation de la sûreté nucléaire :

- un modèle extra-européen, représenté par les États-Unis et plus récemment, le Japon, dans lequel l'autorité chargée de la sûreté nucléaire dispose d'une expertise et d'un service de recherche internes et où les décisions d'autorisation les plus importantes sont prises par la commission de l'autorité, composée de membres nommés par le pouvoir exécutif et confirmés par au moins l'une des chambres du Parlement ;

- un modèle européen (Finlande et Royaume-Uni) dans lequel l'autorité de réglementation de la sûreté nucléaire est indépendante mais où, dans certains pays comme la Finlande, les décisions d'autorisation d'un nouveau réacteur sont prises par le gouvernement sur avis de l'autorité, et qui s'appuie sur un ou plusieurs organismes d'appui technique externes, publics ou privés, en complément de son expertise interne.

L'étude détaillée de chaque pays montre toutefois qu'aucune autorité de sûreté nucléaire n'a une expertise totalement internalisée ou externalisée : elles présentent en réalité divers degrés d'externalisation de l'expertise et de la recherche.

Parmi les quatre pays étudiés, les États-Unis sont le pays dont l'organisation institutionnelle en matière de sûreté nucléaire est la plus intégrée. La Commission de réglementation nucléaire (NRC) dispose à la fois d'une capacité d'expertise interne, au sein de ses bureaux chargés de l'instruction des autorisations et des inspections, et d'un bureau chargé de la recherche. Elle ne fait que ponctuellement appel à des laboratoires de recherche nationaux ou à des universités, sur des sujets de pointe.

Le modèle japonais est mixte puisque l'Autorité de réglementation nucléaire (NRA), créée pour tirer les enseignements de la catastrophe de Fukushima, a intégré en son sein un ancien organisme d'appui technique externe afin de renforcer ses capacités d'expertise et de recherche, tout en continuant à faire appel à deux instituts de recherche publics externes (la Japan Atomic Energy Agency, JAEA, et le National Institue for Quantum and radiological Science and Technology, QST).

En Finlande, l'Autorité de radioprotection et de sûreté nucléaire, créée en 1958, fait de longue date appel à un organisme d'appui externe principal - le Centre de recherche technique de Finlande (VTT) qui est le principal organisme public de recherche du pays - tout en passant également des contrats de recherche avec des universités ou d'autres instituts de recherche publics.

Au Royaume-Uni, l'Office pour la réglementation nucléaire (ONR) a été créé en 2013 afin de renforcer l'indépendance de l'autorité de réglementation et regrouper les compétences de plusieurs administrations en matière nucléaire. Cet organisme relativement jeune complète son expertise interne par un accord-cadre, conclu tous les quatre ans, avec plusieurs organismes d'appui techniques, qui sont depuis 2022 principalement des bureaux d'études et d'ingénierie privés.

Tableau de synthèse

Pays

Réacteurs en exploitation (2024)

Autorité de régulation

Budget et personnel

Organisme(s) d'appui technique (TSO)

Statut du/des TSO externe(s)

Interne

Externe(s)

États-Unis

93

Commission de réglementation nucléaire (NRC)

866 M€
2 900

Oui

Non

-

Japon

12

(+ 21 en arrêt temporaire)

Autorité de réglementation nucléaire (NRA)

373 M€
1 100

Oui
Intégration en 2014 d'un TSO

Oui
JAEA et QST

Instituts de recherche publics

Finlande

5

Autorité de radioprotection et de sûreté nucléaire (STUK)

40 M€
300

Non

Oui

VTT, LUT, univ. d'Aalto...

Société détenue par l'État, universités publiques

Royaume-Uni

9

Office de réglementation nucléaire (ONR)

109 M€
700

Non

Oui
Jacobs, Frazer Nash...

Entreprises privées, à but lucratif ou non

* Source : AIEA, Power Reactor Information system

1. États-Unis

· La Commission de réglementation nucléaire (NRC), agence fédérale indépendante créée en 1974, est compétente en matière de sûreté, de radioprotection et de sécurité des installations nucléaires civiles.

· Ses décisions reposent principalement sur une expertise interne, intégrée aux bureaux opérationnels de l'agence. La NRC dispose également en son sein d'un service dédié à la recherche (bureau de la recherche sur la réglementation nucléaire comptant environ 200 personnes). Si nécessaire, l'agence peut faire appel à des organismes de recherche externes dans le cadre d'appels d'offres.

· Face aux nouveaux défis du nucléaire que sont le changement climatique et le développement de nouvelles technologies, la NRC a entrepris divers travaux de mise à jour de sa réglementation et de ses processus de décision.

a) L'organisation institutionnelle de la sûreté nucléaire

(1) Un modèle intégré reposant sur la Commission de réglementation nucléaire (NRC)

Aux États-Unis, la réglementation des matières et des installations nucléaires civiles relève de la responsabilité de la Commission de réglementation nucléaire (Nuclear Regulatory Commission, NRC)79(*). La NRC est une agence fédérale indépendante créée en 1974 par la loi sur la réorganisation de l'énergie (Energy Reorganization Act)80(*).

Auparavant, en vertu de la loi sur l'énergie atomique de 1954 (Atomic Energy Act)81(*), une seule agence, la Commission de l'énergie atomique, était responsable du développement et de la production du nucléaire militaire et civil. La loi de 1974 a scindé ces fonctions en confiant, d'une part, à une agence (dénommée aujourd'hui la National Nuclear Security Administration, NNSA), relevant du ministère de l'énergie (Department of Energy), la responsabilité du développement et de la production d'armes nucléaires, la promotion de l'énergie nucléaire et d'autres activités liées à l'énergie et, d'autre part, à la NRC les activités de réglementation, qui ne comprennent pas la réglementation des installations nucléaires de défense.

L'appui technique et scientifique (Technical and Scientific Support Organizations, TSO) est largement intégré au sein de la NRC. Les États-Unis relèvent donc du modèle des « TSO internes » à l'autorité de réglementation82(*).

En janvier 2024, les États-Unis disposaient de 93 réacteurs nucléaires en exploitation, 41 réacteurs étaient définitivement fermés et un réacteur en cours de construction. La part du nucléaire dans la production d'électricité du pays s'élevait à 18 %83(*).

(2) Les missions de la NRC

Conformément à l'Atomic Energy Act de 1954 tel qu'amendé, la NRC a pour missions « d'autoriser et de réglementer l'utilisation civile des matières radioactives dans le pays, de fournir une garantie raisonnable de protection adéquate de la santé et de la sécurité publiques, de promouvoir la défense et la sécurité communes et de protéger l'environnement »84(*).

Ses principales fonctions réglementaires sont les suivantes85(*) :

- établir des normes et des règlements en matière de sûreté nucléaire. Ces règles visent à protéger les travailleurs qui utilisent des matières radioactives et le grand public des dangers potentiels de la radioactivité ;

- délivrer des autorisations pour les installations nucléaires civiles et les utilisateurs de matières nucléaires (à l'exception des installations fédérales relevant du Department of Energy) ;

inspecter les installations et les utilisateurs de matières nucléaires pour s'assurer qu'ils respectent les exigences. Ces inspections sont conduites de façon régulière par les employés de la NRC, dont certains sont stationnés à temps plein sur les sites des centrales nucléaires (resident inspectors). Si des infractions aux exigences de sûreté sont constatées, la NRC dispose de pouvoirs de mise à exécution, voire de sanction, allant de l'avis d'infraction à une amende ou un arrêté de suspension ou de révocation de permis86(*).

Ces fonctions réglementaires concernent les centrales nucléaires et d'autres utilisations telles que les programmes de médecine nucléaire dans les hôpitaux, les activités de recherche dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche et les applications industrielles. La NRC est également compétente en matière de transport, stockage et d'élimination des déchets nucléaires87(*).

(3) La gouvernance et la structure de la NRC

La NRC est une agence fédérale, placée sous la tutelle du gouvernement fédéral. L'article 201 de l'Energy Reorganization Act prévoit que la NRC est dirigée par une commission de cinq membres, nommés par le Président des États-Unis et confirmés par le Sénat, pour des mandats échelonnés de cinq ans. Au maximum trois commissaires peuvent être membres d'un même parti politique88(*).

En tant qu'organe collégial, la Commission formule des politiques et des réglementations régissant la sûreté des installations nucléaires, émet des arrêtés à l'attention des titulaires de permis et statue sur les questions juridiques qui lui sont soumises. Chaque commissaire a le même droit de vote. Le président de la Commission est le dirigeant principal de l'agence et agit en tant que porte-parole officiel. Il est tenu de déléguer certaines fonctions quotidiennes au directeur exécutif des opérations89(*).

Le directeur exécutif chargé des opérations met en oeuvre les politiques et les décisions de la Commission et dirige les activités des différents bureaux (offices) thématiques et régionaux de l'agence (cf. organigramme infra).

Au sein de la direction des opérations de la NRC, les bureaux suivants jouent un rôle important en matière de sûreté90(*) :

- le bureau de la réglementation des réacteurs nucléaires (Office of Nuclear Reactor Regulation, NRR) est responsable du coeur de la mission de sûreté des réacteurs nucléaires de la NRC. Ses activités comprennent l'élaboration des règles de sûreté, l'octroi de permis, la surveillance, le choix des sites et l'intervention en cas d'incident pour les réacteurs nucléaires commerciaux en exploitation, les nouveaux réacteurs nucléaires commerciaux, les technologies de réacteurs avancés et les installations de production et d'utilisation d'énergie autre que l'électricité ;

- le bureau de la sûreté des matières nucléaires et des garanties (Office of Nuclear Material Safety and Safeguards, NMSS) est responsable de l'autorisation et de la réglementation des installations et des matières associées au traitement, au transport et à la manipulation des matières nucléaires ;

- le bureau de recherche sur la réglementation nucléaire (Office of Nuclear Regulatory Research, RES) fournit des conseils techniques indépendants, des outils et des informations permettant de prendre des décisions réglementaires opportunes, d'anticiper et de résoudre les problèmes de sûreté potentiellement importants. Il dispose de ses propres chercheurs et collabore avec de nombreux acteurs externes (cf. infra) ;

- le bureau de la sécurité et de la réponse aux incidents (Office of Nuclear Security and Incident Response, NSIR) est chargé d'élaborer la politique générale de l'agence et de fournir des orientations en matière de sécurité des installations nucléaires. Il élabore des programmes de préparation aux situations d'urgence et, en cas d'incident, joue le rôle d'interface avec les autres agences et administrations fédérales compétentes ;

- les quatre bureaux régionaux effectuent des inspections et mettent en oeuvre les politiques en matière d'autorisation et d'intervention en cas d'urgence et d'incident. Ils comptent plusieurs centaines d'employés, dont des inspecteurs présents de façon permanente sur les sites des centrales nucléaires.

Par ailleurs, la NRC dispose de deux comités consultatifs indépendants, composés d'experts extérieurs à l'agence : le comité consultatif sur les garanties des réacteurs (Advisory Committee on Reactor Safeguards, ACRS) qui conseille la Commission notamment sur des questions concernant l'autorisation et l'exploitation des installations de production ou l'adéquation des normes de sûreté proposées, et le comité consultatif sur les utilisations médicales des isotopes (Advisory Committee on Medical Uses of Isotopes)91(*).

En 2023, le budget de la NRC s'élevait à 943 millions de dollars (866 millions d'euros) et l'agence comptait près de 2 900 employés92(*) (en tenant compte des quatre bureaux régionaux répartis dans le pays). Le financement de la NRC provient en grande partie des redevances versées par les exploitants, qui constituent 85 % de son budget93(*).

Structure organisationnelle de la NRC

Source : NRC, Strategic plan fiscal years 2022-2026

(4) Les relations avec les exploitants

Les programmes de la NRC sont fondés sur le principe selon lequel la sûreté de l'exploitation des réacteurs nucléaires commerciaux relève de la responsabilité première des titulaires de permis, c'est-à-dire des exploitants94(*). L'article 103 de l'Atomic Energy Act accorde à la NRC le pouvoir de délivrer des permis pour la construction et l'exploitation de réacteurs nucléaires à des fins commerciales. Chaque permis prévoit explicitement la responsabilité de son titulaire de se conformer aux termes et conditions du permis ainsi qu'aux règles en matière de sûreté et de protection95(*). Si la Commission détermine que le titulaire ne respecte pas les conditions de son permis, la NRC prend les mesures appropriées pour s'assurer de la mise en conformité de l'installation.

Selon un document de l'agence, « la NRC entretient de bonnes relations avec ses titulaires de permis, à la fois formelles et franches. La NRC publie officiellement ses documents réglementaires (règles, orientations, modifications, permis, exemptions, rapports d'inspection), mais son personnel entretient des contacts fréquents avec celui des titulaires de permis, ce qui permet des discussions plus franches. Cela est particulièrement vrai pour les gestionnaires de projet qui sont en poste au siège de la NRC et pour les inspecteurs résidents qui sont affectés à diverses installations nucléaires. Ces personnes sont en mesure d'exercer leur fonction en toute objectivité, à titre officiel, tout en maintenant des interactions quotidiennes, ouvertes et fréquentes, avec le personnel des titulaires de permis sur une base moins formelle. La politique de la NRC prévoit la rotation des inspecteurs résidents après qu'ils ont passé sept ans dans une installation. Les raisons invoquées sont le fait de bénéficier périodiquement d'une “nouvelle perspective” ou d'un “regard neuf” de la part du représentant de la NRC sur le site, d'avoir la possibilité d'utiliser l'expérience des inspecteurs résidents sortants ailleurs au sein de la NRC, et de veiller à ce que l'objectivité des inspecteurs résidents soit maintenue. »96(*).

b) Les interactions entre recherche, expertise et décision

(1) La procédure d'autorisation de nouveaux réacteurs

La NRC est compétente pour délivrer les permis de construction et d'exploitation des centrales nucléaires. Les centrales nucléaires actuellement en activité ont été autorisées selon une procédure en deux étapes97(*), nécessitant d'abord un permis de construire, puis un permis d'exploitation (Two-Step Licensing Process).

Afin d'améliorer la prévisibilité, une procédure d'autorisation alternative, dite de « permis combiné », a été introduite en 1989, associant un permis de construction et un permis d'exploitation, assorti de conditions (Combined License)98(*) 99(*). Comme pour la procédure en deux étapes, la demande de permis doit faire l'objet d'un examen de sûreté par la NRC, d'une évaluation environnementale et d'un examen antitrust.

Le demandeur doit soumettre un rapport d'analyse de sûreté, contenant les informations et les critères de conception du réacteur, des données complètes sur le site proposé et examinant diverses situations d'accident hypothétiques et les caractéristiques de sécurité de la centrale qui permettraient de prévenir les accidents ou d'en atténuer les effets. Si la NRC accepte la demande, elle organise une réunion publique à proximité du site proposé afin de familiariser le voisinage avec les aspects sécuritaires et environnementaux du projet. Plusieurs réunions publiques de ce type sont organisées au cours de l'examen des demandes de permis de réacteurs. La NRC examine ensuite le contenu de la demande100(*). Sur cette base, elle établit un rapport d'évaluation de la sûreté (Safety Evaluation Report). Le comité consultatif sur les garanties des réacteurs (ACRS) examine également chaque demande dès le début de la procédure et remet un avis indépendant à la Commission de la NRC. La NRC prépare également un projet de déclaration d'impact sur l'environnement, soumis pour avis aux agences fédérales, étatiques et locales et publie ensuite une déclaration finale tenant compte des commentaires reçus. Comme dans le cadre de la procédure en deux étapes, la tenue d'une audition publique est obligatoire avant la délivrance du permis. Cette audition est menée par un jury (Atomic Safety and Licensing Board) composé de trois membres (un juriste faisant office de président et deux personnes techniquement qualifiées). Les membres du public peuvent soumettre des déclarations écrites ou orales ou demander à intervenir en tant que parties à part entière101(*).

Après avoir délivré un permis combiné, la Commission n'autorise l'exploitation de l'installation qu'après avoir vérifié que l'opérateur a effectué les inspections, tests et analyses requis et que les conditions d'acceptation ont été respectées.

Les décisions les plus importantes concernant les permis de construction et d'exploitation sont prises par la Commission de la NRC.

Procédure d'autorisation d'un nouveau réacteur

Source : NRC

Afin d'anticiper certaines difficultés et de les résoudre en amont de la procédure d'autorisation de construction et d'exploitation, un opérateur peut également faire :

- une demande de permis d'implantation anticipée (Early Site Permit) lui permettant d'obtenir l'autorisation d'implanter une installation nucléaire sur un site, sans spécifier les détails de conception du ou des réacteurs ;

- une demande de certification de la conception d'une centrale nucléaire standard, indépendamment d'un site d'implantation spécifique. Cette certification est valable pendant 15 ans102(*).

(2) L'expertise interne de la NRC

Chaque bureau de la NRC dispose de sa propre capacité d'expertise interne.

À titre d'exemple, le bureau de la réglementation des réacteurs nucléaires (NRR) comprend dix divisions et plusieurs centaines d'employés103(*). Les divisions de la NRR sont notamment responsables du processus d'examen des demandes de permis pour un nouveau réacteur, des demandes de renouvellement de permis, des évaluations techniques dans divers domaines (ingénierie, numérique, systèmes de sûreté, évaluation des risques) ou encore de la gestion du vieillissement des installations. Selon les informations transmises par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) au rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, la plupart du temps, « le processus d'examen de la NRR s'appuie sur un rapport d'expertise interne comparable à un avis de l'IRSN en France »104(*).

Les experts des différentes divisions de la NRR compilent leurs contributions afin qu'un projet sur les conclusions de sûreté puisse être présenté soit au directeur de la NRR, au directeur exécutif des opérations de la NRC ou à la Commission de la NRC, en fonction du niveau de prise de décision défini. Cette méthode de travail s'applique également aux autres bureaux de l'Agence (NMSS et NSIR notamment) qui disposent de leur propre capacité d'expertise interne105(*).

Les rapports d'expertise internes ne sont pas tous publiés mais, par exemple, dans le cadre des demandes de renouvellement de permis d'exploitation de centrale nucléaire, le rapport final d'évaluation de la sûreté et la déclaration concernant l'évaluation de l'impact environnemental établis par les services compétents de la NRC sont publiés sur le site internet de l'agence106(*).

Les processus décisionnels de la NRC concernant l'autorisation de nouveaux réacteurs et le renouvellement de permis d'exploitation de réacteurs existants ne font pas état d'une séparation entre l'instruction du dossier et la phase d'expertise. Toutefois, le comité consultatif sur les garanties des réacteurs (ACRS) examine les études de sûreté et les demandes d'autorisation de réacteurs nucléaires. « L'ACRS est indépendant du personnel de la NRC et rend compte directement à la Commission, qui nomme ses membres. [...] Les comités consultatifs sont structurés de manière à offrir un forum où des experts représentant de nombreux points de vue techniques peuvent fournir des avis indépendants qui sont pris en compte dans le processus décisionnel de la Commission. La plupart des réunions des comités sont ouvertes au public et toute personne peut demander à faire une déclaration orale au cours de la réunion du comité »107(*). L'ordre du jour des réunions de l'ACRS et ses avis sont publiés sur le site internet de la NRC108(*).

(3) Les activités de recherche de la NRC

La NRC dispose d'un service dédié à la recherche scientifique, cité précédemment : le bureau de la recherche sur la réglementation nucléaire (RES). En 2022, ce bureau disposait d'un budget de 85 millions de dollars (78 millions d'euros), soit environ 9 % du budget total de l'agence, et d'environ 200 équivalents temps plein109(*). Il dispose de ses propres chercheurs et collabore largement avec les bureaux opérationnels de la NRC, les laboratoires nationaux, le Department of Energy, d'autres agences fédérales, des universités américaines et des organisations et partenaires internationaux110(*).

Le RES met en oeuvre des programmes de recherche et fournit une expertise technique spécialisée pour répondre à des besoins particuliers auxquels les experts des bureaux opérationnels ne pourraient pas répondre. Il peut notamment fournir des études dans le cadre de demandes d'autorisation, d'inspection et de rédaction de règles techniques111(*). De plus, le RES évalue l'efficacité de certaines activités et programmes, collecte et analyse les données opérationnelles de l'agence et développe et gère des bases de données informatiques. Il peut proposer de manière indépendante des évolutions du programme de recherche de l'agence112(*).

Le RES effectue également des travaux de recherche préparatoires dans des domaines où la NRC anticipe des applications réglementaires futures. Par exemple, la NRC fait appel au RES pour l'aider à rédiger des réglementations concernant les combustibles avancés ou les aspects numériques113(*). De même, après le 11 septembre 2001, la NRC a fait appel au RES pour étudier les effets de crashs d'avions sur les enceintes de réacteurs et les piscines de combustible usé114(*).

Grâce à son budget propre, le RES peut faire appel à des laboratoires de recherche nationaux, aux universités ou à d'autres organismes de recherche dans le cadre d'appels d'offres115(*). Ainsi, le programme Future Focused Research a permis d'allouer, entre 2021 et 2023, 1,8 million d'euros à des organismes de recherche externes afin de positionner la NRC sur de nouveaux domaines de connaissances fondamentales et lui permettre de faire face aux futures technologies de pointe116(*).

c) Les évolutions en matière de sûreté nucléaire

(1) Après l'accident de Fukushima de 2011

À la suite de l'accident survenu à Fukushima en mars 2011, la NRC a principalement publié, en 2012, trois arrêtés exigeant de la part des exploitants des améliorations concernant i) les stratégies d'atténuation pour les événements externes non prévus dans la base de conception, ii) les piscines de combustible usé et iii) les enceintes de confinement. Elle a également lancé une demande d'information concernant la protection des installations contre les risques sismiques et d'inondations117(*).

En 2021, la NRC indiquait que tous les titulaires de permis de réacteurs en exploitation aux États-Unis avaient terminé la mise en oeuvre des améliorations de la sûreté exigées par les stratégies d'atténuation, par l'arrêté sur l'instrumentation des piscines de combustible usé et par l'arrêté sur les enceintes de confinement. Le personnel de la NRC avait également effectué des inspections de vérification sur place118(*).

De plus, tous les exploitants avaient effectué les inspections et les réévaluations des risques liés aux séismes et aux inondations. Certaines évaluations complémentaires ont été exigées de la part de la NRC et leur examen par la NRC est aujourd'hui achevé119(*) 120(*).

(2) Les nouveaux défis du nucléaire

· L'adaptation au changement climatique

Le plan stratégique de la NRC pour les années 2022 à 2026 prévoit, dans le cadre de l'objectif d'amélioration de la qualité de l'autorisation et de la surveillance des installations nucléaires et des matières radioactives, la stratégie 1.5 consistant à « veiller à ce que les titulaires de permis prennent des mesures pour faire face à l'augmentation potentielle des risques due au changement climatique »121(*). Le plan stratégique identifie également l'atténuation du changement climatique comme l'un des facteurs externes clés pouvant affecter l'agence dans l'atteinte de ses objectifs : « les effets du changement climatique peuvent avoir une incidence sur les infrastructures énergétiques existantes. Les efforts visant à réduire les émissions de carbone et à développer la production d'électricité à faible teneur en carbone peuvent également encourager le développement et l'utilisation de nouvelles technologies et installations. Ces facteurs peuvent à leur tour affecter les budgets de fonctionnement et les priorités de la NRC. La NRC doit être prête à mettre en place l'infrastructure réglementaire nécessaire pour soutenir des domaines tels que le démantèlement des installations les plus anciennes ou non rentables, l'évolution des exportations et des importations dans une économie de plus en plus mondialisée et l'octroi de permis pour de nouvelles technologies et installations »122(*).

De plus, la NRC a présenté en mars 2023 un projet d'amendement à la réglementation en matière de protection de l'environnement, mettant à jour ses conclusions de 2013 sur les effets environnementaux du renouvellement de permis d'exploitation d'une centrale nucléaire. Il est proposé de redéfinir le nombre et la portée des questions environnementales qui doivent être abordées par la NRC et les exploitants lors des évaluations environnementales de renouvellement de permis, notamment afin de tenir compte des impacts du changement climatique sur les ressources environnementales, de l'impact sur les ressources des sanctuaires marins, de l'impact sur les espèces inscrites sur la liste fédérale des espèces en danger et de l'impact sur l'habitat essentiel du poisson123(*). Cette nouvelle réglementation devrait être adoptée par la commission de la NRC en mars 2024124(*).

· Le développement de nouvelles technologies

Au cours des dernières années, la NRC a commencé à mettre à jour ses réglementations et ses processus de décision afin de tenir compte de l'émergence de nouvelles technologies nucléaires.

Concernant les petits réacteurs modulaires (small modular reactors, SMR), la NRC a mis à jour certaines réglementations (par exemple, en adoptant un arrêté spécifique à cette nouvelle technologie en matière de préparation aux situations d'urgence125(*)) et est engagée dans l'examen de pré-demandes avec plusieurs concepteurs de SMR. En août 2020, la NRC a approuvé la conception d'un SMR de l'entreprise NuScale Power126(*).

S'agissant des réacteurs avancés tels que les réacteurs de fission nucléaire, l'organisme d'audit et d'évaluation du Congrès des États-Unis, le Government Accountability Office (GAO), a publié en juillet 2023 un rapport recommandant à la NRC de prendre des mesures supplémentaires pour se préparer à autoriser des réacteurs avancés127(*).

Selon le GAO, la NRC a pris plusieurs mesures pour modifier sa procédure d'autorisation afin d'inclure les réacteurs nucléaires avancés. Par exemple, l'agence a réorganisé ses bureaux responsables de l'autorisation des réacteurs avancés et a mis en place des équipes spécialisées dans l'examen de ces demandes afin d'assurer la continuité du personnel tout au long de l'instruction. Elle a également publié une feuille de route réglementaire pour aider les développeurs de réacteurs avancés. En outre, la NRC s'est engagée avec l'industrie nucléaire à développer une approche fondée sur la technologie, les risques et les performances pour évaluer les demandes de réacteurs avancés. Enfin, la NRC coopère avec le ministère de l'énergie pour partager son expertise technique et a pris en compte les commentaires de plusieurs agences fédérales et d'autres parties prenantes concernant les modifications apportées à sa procédure d'autorisation128(*).

Le GAO estime cependant que ces modifications ne permettent pas de relever entièrement les défis actuels liés à l'embauche et au maintien en poste du personnel nécessaire à l'octroi de permis pour les réacteurs avancés. Il recommande à la NRC d'évaluer l'efficacité de ses efforts en matière de recrutement et de fidélisation.

2. Japon

· L'Autorité de réglementation nucléaire (NRA) a été créée en 2012 afin de tirer les leçons de la catastrophe de Fukushima. Désormais indépendante, elle est principalement compétente en matière de sûreté et de sécurité nucléaires, de radioprotection et de préparation aux urgences nucléaires.

· La NRA dispose à la fois d'une capacité d'expertise interne renforcée, grâce à l'intégration en 2014 d'un ancien organisme d'appui technique (TSO), et de deux TSO externes : la Japan Atomic Energy Agency (JAEA), spécialisée en matière de sûreté, et le National Institute for Quantum and radiological Science and Technology (QST), compétent sur les questions de radioprotection.

· La législation et l'organisation institutionnelle du Japon en matière de sûreté nucléaire ont été réformées en profondeur à la suite de la catastrophe de Fukushima.

a) L'organisation institutionnelle de la sûreté nucléaire

(1) Une organisation réformée en profondeur à la suite de l'accident de Fukushima

Au Japon, la loi fondamentale sur l'énergie atomique (Atomic Energy Basic Act)129(*) définit les principes de base de l'utilisation de l'énergie nucléaire. À la suite de la catastrophe de Fukushima, la loi portant création de l'Autorité de réglementation nucléaire (Nuclear Regulation Authority, NRA)130(*), la loi sur la réglementation des matières premières nucléaires, des matières combustibles et des réacteurs (dite loi sur la réglementation des réacteurs)131(*) et la loi sur la réglementation des radio-isotopes132(*) ont été adoptées pour garantir la sûreté de l'utilisation de l'énergie nucléaire et prévenir les risques liés aux radiations133(*).

La NRA, autorité de réglementation de la sûreté nucléaire au Japon, a été établie en septembre 2012 en tant qu'organe externe du ministère de l'environnement (MOE). Elle a le statut d'autorité, au sens de l'article 3 de la loi sur l'organisation du gouvernement national, lui garantissant ainsi l'indépendance dans l'exercice de ses compétences134(*). Auparavant, la Commission de sûreté nucléaire était une agence placée sous l'autorité du gouvernement japonais135(*).

La réforme de 2012 a également séparé les fonctions de promotion et de réglementation de l'énergie nucléaire et, afin d'éliminer les effets néfastes de la division verticale des tâches entre administrations, les compétences de la NRA ont été définies de façon large de manière à comprendre la sûreté et la sécurité nucléaires, les garanties fondées sur les engagements internationaux, la surveillance des rayonnements et les règles relatives à l'utilisation des radio-isotopes, auparavant régies par différentes entités136(*).

Le 1er mars 2014, l'Organisation japonaise de sûreté de l'énergie nucléaire (Japan Nuclear Energy Safety Organization, JNES), qui était jusqu'alors le principal service externe d'appui scientifique et technique de l'autorité de réglementation, a été intégrée à la NRA137(*). C'est probablement en raison de cette fusion que l'AIEA classe le Japon parmi les pays relevant du modèle des « TSO internes » à l'autorité de réglementation138(*). Cependant, la NRA continue de s'appuyer sur deux structures externes pour compléter son expertise et mener des activités de recherche : la Commission japonaise de l'énergie atomique (Japan Atomic Energy Agency, JAEA) et l'Institut national des sciences et technologies quantiques et radiologiques (National Institue for Quantum and radiological Science and Technology, QST) (cf. infra). L'organisation japonaise s'apparente donc en réalité à un modèle mixte, mêlant expertises interne et externe.

Les compétences en matière de promotion de l'énergie nucléaire sont désormais assumées par la Commission de l'énergie atomique (Atomic Energy Commission, AEC)139(*) - qui n'exerce plus de compétence en matière de sécurité nucléaire - et par le ministère de l'économie, du commerce et de l'industrie (METI).

Un Bureau de gestion des catastrophes nucléaires a été mis en place au sein des services du gouvernement (Cabinet office) afin de faciliter la planification et la préparation des collectivités locales en cas de situation d'urgence140(*).

En janvier 2024, selon l'AIEA, le Japon comptait 12 réacteurs en exploitation autorisés par la NRA, 21 réacteurs dont l'exploitation était temporairement suspendue, 2 centrales en cours de construction et 3 en projet. 27 réacteurs, dont ceux situés sur le site de Fukushima, sont en arrêt définitif et en cours de démantèlement141(*).

En 2022, la part du nucléaire représentait 6 % de la production totale d'électricité du pays. Le sixième plan stratégique en matière énergétique du Japon fixe l'objectif de 20 % à 22 % du mix énergétique du Japon provenant du nucléaire à l'horizon 2030142(*).

(2) Les missions de la NRA

Selon l'article 3 de la loi portant création de la NRA, l'autorité créée en 2012 a pour mission d'assurer la sûreté de l'utilisation de l'énergie nucléaire dans le but de contribuer à la protection de la vie, de la santé et des biens des citoyens, de la préservation de l'environnement et de la sécurité nationale du Japon. L'article 4 de cette même loi énumère ainsi l'ensemble des domaines de compétence de la NRA :

- les questions relatives à la sûreté nucléaire, dont l'autorisation de la conception et de la construction de centrales nucléaires, leur inspection et leur démantèlement ;

- les questions concernant les activités de raffinage, de fabrication et d'enrichissement, de stockage provisoire de l'énergie, de retraitement et d'élimination des déchets nucléaires et la réglementation relative aux réacteurs ;

- la réglementation relative à l'utilisation des matières premières nucléaires et des matières combustibles nucléaires, ainsi que la garantie de la sûreté dans ce domaine ;

- les règlements relatifs à la mise en oeuvre des garanties fondées sur des engagements internationaux, et d'autres réglementations visant à assurer l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire ;

- les questions relatives à la prévention des risques radiologiques ;

- l'élaboration et la promotion de politiques en matière de surveillance et de mesure des matières radioactives ou des niveaux de rayonnement ainsi que les plans de répartition des dépenses entre les organes administratifs compétents ;

- la surveillance et la mesure des niveaux de rayonnements radioactifs ;

- la culture et la formation des chercheurs et des ingénieurs (à l'exclusion de ce qui a trait à l'enseignement et à la recherche dans les universités) pour assurer la sûreté de l'utilisation de l'énergie nucléaire ;

- l'adaptation des activités des organes administratifs compétents en ce qui concerne la protection physique des matières combustibles nucléaires et autres matières radioactives ;

- les enquêtes sur les causes d'accidents résultant de l'exploitation de réacteurs nucléaires et les causes des dommages survenus à la suite de tels accidents ;

- la coopération internationale dans les matières relevant de sa compétence.

Par ailleurs, la loi précitée indique que, lorsque la NRA l'estime nécessaire pour la conduite des affaires relevant de sa compétence, elle peut fournir aux responsables des services administratifs concernés des recommandations relatives à la sûreté nucléaire et leur demander de faire un rapport sur les mesures prises sur la base de ces recommandations.

Mise en place pour éviter qu'un accident tel que Fukushima ne se reproduise et pour rétablir la confiance dans l'autorité de régulation, au Japon et à l'étranger, la NRA s'est fixée comme principes directeurs l'indépendance, l'efficacité, l'ouverture et la transparence, l'ambition, le sens des responsabilités et la rapidité d'intervention143(*).

(3) La gouvernance et la structure de la NRA

La NRA est administrée par une commission et gérée par un secrétariat général regroupant l'ensemble de ses services.

La commission comporte cinq commissaires (dont le président), nommés par le Premier ministre, après approbation des deux chambres du Parlement, pour un mandat de cinq ans, renouvelable. La loi portant création de la NRA (article 4) énonce que les commissaires doivent exercer leur mandat en toute indépendance et disposer d'excellentes connaissances et d'expérience dans le domaine de la sûreté nucléaire.

Structure administrative de la NRA

Source : NRA

Au sein du secrétariat général de la NRA, les principaux services sont144(*) :

- la direction de la sûreté nucléaire (Nuclear Regulation Department) qui comprend, pour chaque type d'installations (réacteurs de puissance, réacteurs de recherche, installations du cycle du combustible) un service responsable de l'autorisation et un service responsable du contrôle ;

- la direction de la radioprotection, chargée de la mise en place des systèmes de préparation et d'intervention en cas d'urgence nucléaire, de la protection physique des matières nucléaires, de la surveillance des rayonnements, de la réglementation des sources de rayonnements et des garanties sur les matières nucléaires liées aux engagements internationaux ;

- la direction de la réglementation et de la recherche (Regulatory Standard and Research Department) qui est chargée de la recherche sur les systèmes nucléaires, les nouvelles technologies, les accidents graves, le combustible nucléaire et les déchets nucléaires, la radioprotection, les tremblements de terre et les tsunamis. Cette direction, qui résulte de l'intégration de l'organisme d'appui externe JNES, réalise l'expertise technique interne de la NRA.

La NRA dispose également de 22 bureaux régionaux, situés sur des sites nucléaires, où des inspecteurs de la sûreté nucléaire et des responsables de la préparation aux urgences nucléaires sont en poste. Les inspecteurs sont chargés de vérifier les activités de mise en oeuvre des programmes de sûreté opérationnelle par les exploitants sur les sites, tandis que les responsables de la préparation aux urgences nucléaires fournissent aux exploitants nucléaires des instructions et des conseils sur les activités de préparation et d'intervention en cas d'urgences, menées sur la base du plan d'action dans ce domaine145(*).

Par ailleurs, la NRA dispose de quatre groupes d'experts externes : le comité d'examen de la sûreté des réacteurs, le comité d'examen de la sûreté du combustible nucléaire, le comité de la recherche et du développement et le comité sur les radiations146(*).

La NRA bénéficie d'un budget annuel d'environ 60 milliards de yens147(*) (environ 373 millions d'euros) et emploie 1 100 personnes148(*).

(4) Les relations avec les exploitants

La loi sur la réglementation des réacteurs (article 57-9) prévoit que la responsabilité première en matière de sûreté incombe aux exploitants. Chaque détenteur d'autorisation « est responsable de l'installation d'équipements ou d'appareils contribuant à l'amélioration de la sûreté des installations nucléaires, du renforcement de l'éducation à la sûreté opérationnelle ou de la prise de toute autre mesure nécessaire pour prévenir les catastrophes dues aux matières premières nucléaires, aux matières combustibles nucléaires et aux réacteurs, tout en tenant compte des connaissances les plus récentes en matière de sûreté des installations nucléaires »149(*).

Depuis 2011, des mesures ont été prises pour s'assurer que les exploitants remplissent leurs obligations en matière de sûreté. Pour obtenir et conserver leur autorisation, les exploitants doivent tout d'abord se soumettre aux inspections de la NRA. En outre, des mesures ont donc été mises en place pour veiller à ce que les titulaires d'autorisation ne dissimulent pas les cas de non-conformité.

Les titulaires d'autorisation sont passibles de sanctions s'ils ne s'acquittent pas de leur responsabilité légale en matière de sûreté d'exploitation. Si les installations nucléaires ne respectent pas les normes techniques légales ou si leurs opérations contreviennent aux exigences réglementaires, la NRA peut exiger que l'opérateur adopte d'autres méthodes d'exploitation ou lui ordonner de prendre toute autre mesure nécessaire. Si le titulaire ne respecte pas cet ordre, la NRA peut révoquer son autorisation ou lui ordonner de suspendre ses activités pendant une période déterminée ne dépassant pas un an150(*).

L'utilisation d'un réacteur sans autorisation est passible d'une peine d'emprisonnement avec travaux ou d'une amende. Il en va de même si l'exploitant n'obtient pas l'approbation des programmes de sûreté opérationnelle (Operational Safety Programs), les modifie sans autorisation ou ne les respecte pas151(*).

b) Les interactions entre recherche, expertise et décision

(1) La procédure d'autorisation de nouveaux réacteurs

Selon la loi sur la réglementation des réacteurs, telle que révisée en 2012, puis en 2017, afin de tirer les leçons de l'accident de Fukushima, toute personne souhaitant installer un réacteur nucléaire doit obtenir une autorisation de la NRA (article 23). De plus, à la suite de la catastrophe de Fukushima, toutes les centrales nucléaires mises à l'arrêt ont dû faire l'objet d'un examen de conformité aux nouvelles exigences en matière de sûreté et obtenir une autorisation de la NRA pour reprendre leurs opérations.

Si un opérateur souhaite modifier une autorisation déjà obtenue, il doit obtenir un permis modificatif ou, si la modification est considérée comme mineure, soumettre une notification de modification. Aucune date d'expiration n'étant fixée dans le permis d'installation d'un nouveau réacteur au Japon, il n'existe aucune procédure de renouvellement de l'autorisation. Depuis 2017, une limite d'exploitation de 40 ans est prévue par la loi ; elle peut être prolongée une seule fois par la NRA pour au maximum 20 années supplémentaires152(*).

L'obtention de l'autorisation d'installation d'un réacteur est soumise à un examen de conformité effectué par les services de la NRA. Pour accorder l'autorisation, la NRA doit demander l'avis de la Commission de l'énergie atomique (CEA) du Japon, afin de confirmer qu'il n'y a aucun risque que l'installation soit utilisée à des fins autres que pacifiques153(*).

L'opérateur doit soumettre la demande d'approbation du plan de conception et de construction à la NRA avant de commencer la construction d'un réacteur et obtenir l'approbation de la NRA. Une procédure de certification par la NRA de certains équipements spécifiques a été introduite en 2012 afin d'améliorer l'efficacité de la procédure d'autorisation154(*).

Avant de démarrer l'exploitation d'une installation, l'opérateur doit enfin obtenir l'approbation des programmes de sûreté opérationnelle155(*).

Selon les informations transmises par l'ASN, la NRA prend environ 400 décisions par an, dont 15 % sont prises par la commission de la NRA sur la base d'une instruction technique interne, les autres décisions étant déléguées aux services156(*).

Les réunions décisionnelles de la commission de la NRA sont publiques et retransmises en direct sur une chaîne YouTube de la NRA157(*). Les dossiers issus des instructions menées par les services en vue d'une décision de la commission sont rendus publics, conjointement à la décision158(*).

Selon le code de conduite sur la sûreté nucléaire adopté par la NRA en 2015, toute « décision doit être prise de manière indépendante et objective en tenant dûment compte des risques. Toute personne qui prend une décision a la responsabilité d'expliquer les raisons logiques de cette décision, tout en clarifiant ses propres rôles, responsabilités et autorité »159(*).

Ce code de conduite insiste également sur la nécessité de maintenir un haut niveau d'expertise : « Reconnaissant l'importance de l'expertise scientifique et technique pour la sécurité, chaque organisation doit collecter et analyser les informations les plus récentes au Japon et à l'étranger sur les activités réglementaires, l'expérience opérationnelle et les échecs, afin d'intégrer les résultats dans ses activités. Les responsables doivent façonner et améliorer l'environnement de travail afin de promouvoir cet apprentissage organisationnel. »160(*).

(2) L'expertise interne de la NRA

Sur les quelque 1 100 employés de la NRA, 490 réalisent des inspections et des expertises, principalement au sein de la direction de la sûreté nucléaire, et 150 mènent des activités de recherche, au sein de la direction de la réglementation et de la recherche161(*). Les travaux conduits par la direction de la réglementation et de la recherche portent sur la sûreté des systèmes de réacteurs, la radioprotection et la gestion des déchets radioactifs, les accidents graves et les conséquences de catastrophes naturelles telles que les séismes, tsunamis et éruptions volcaniques162(*).

Pour réaliser leur instruction ou leurs missions de contrôle, les agents de la direction de la sûreté nucléaire peuvent solliciter l'expertise des chercheurs au sein de la direction de la réglementation et de la recherche de la NRA ou des deux organismes d'appui technique et scientifique externes.

En 2014, la NRA a intégré l'un de ses organismes d'appui technique externe, le JNES (Japan Nuclear Energy Safety Organisation), qui disposait de 400 personnes, afin de la soutenir dans les missions d'inspection, d'analyse et d'évaluation de la sûreté. Selon la NRA, une plus grande expertise interne était indispensable pour renforcer les fonctions de l'autorité163(*).

La NRA considère qu'elle doit « maintenir un certain niveau de quantité et de qualité des ressources humaines et améliorer continuellement leur capacité technique » afin de pouvoir émettre des avis scientifiques et techniques sans s'appuyer sur les connaissances, ni l'expérience des opérateurs164(*).

Sur la base de ses objectifs à moyen terme, des leçons tirées de l'accident de Fukushima, des expériences issues des inspections et des dernières évolutions technologiques, la commission de la NRA adopte chaque année un document relatif à sa politique en matière de recherche165(*).

(3) Le recours à deux organismes d'appui technique externes

Au-delà de ses moyens propres d'expertise, la NRA s'appuie sur deux organismes d'appui technique et scientifique (TSO) externes :

- l'Agence japonaise de l'énergie atomique (Japan Atomic Energy Agency, JAEA) qui est un institut de recherche et développement public, disposant de plus de 3 000 employés au total et d'un grand nombre d'installations de recherche166(*). Pour le compte de la NRA, l'Agence conduit principalement des travaux de recherche dans les domaines de la sûreté des réacteurs, du cycle combustible, de la gestion des déchets radioactifs et de la préparation aux situations d'urgence nucléaire ;

- l'Institut national des sciences et technologies quantiques (National Institute for Quantum Science and Technology, QST), un organisme de recherche public créé en 2016, à la suite de la fusion entre l'Institut national des sciences radiologiques (National Institute of Radiological Sciences, NIRS) et certaines activités de la JAEA, qui compte environ 1 300 personnes. Le QST apporte à la NRA une expertise en matière de radioprotection, de traitement médical à la suite d'exposition à des radiations et l'évaluation des effets de l'exposition à des radiations de faible intensité à long terme.

Le rôle des TSO externes est de déterminer le programme de recherche à moyen et long terme, de conduire les travaux de recherche définis dans ce programme et de fournir des avis techniques directement à la NRA167(*).

Les relations entre la NRA et ses deux TSO ne sont pas définies ou encadrées par la loi mais sont par voie contractuelle ou prennent la forme de projets collaboratifs (par exemple, en 2021, 58 employés de la NRA ont participé à des projets de recherche conjoints avec la JAEA168(*).).

Structure organisationnelle de l'Agence japonaise de l'énergie atomique (JAEA)

Source : NRA

Structure organisationnelle de l'Institut national des sciences et technologies quantiques (QST)

Source : NRA

Par ailleurs, la NRA mène des activités dites de « recherche conjointe » avec des universités et instituts de recherche japonais, des organisations internationales et des organismes de réglementation étrangers169(*).

Le budget global de recherche interne et externe de la NRA est d'environ 9 milliards de yens (56 millions d'euros) par an, dont 3 milliards pour l'organisme de soutien externe JAEA170(*). La NRA ne dispose pas d'installations de recherche.

c) Les évolutions en matière de sûreté nucléaire

(1) Après l'accident de Fukushima de 2011

Comme indiqué précédemment, la législation et l'organisation institutionnelle du Japon en matière de sûreté nucléaire ont été significativement revues à la suite de la catastrophe de Fukushima.

Un rapport de la commission d'enquête de la Diète japonaise sur l'accident de Fukushima dressait en 2012 ce constat accablant : « Les régulateurs n'ont pas contrôlé ou supervisé la sûreté nucléaire. Le manque d'expertise a entraîné une "capture réglementaire" et le report de la mise en oeuvre des réglementations pertinentes. Ils ont évité leurs responsabilités directes en laissant les opérateurs appliquer les réglementations sur une base volontaire. Leur indépendance par rapport à la sphère politique, aux ministères chargés de la promotion de l'énergie nucléaire et aux exploitants n'était qu'un simulacre »171(*).

Outre la création de la NRA, les exigences en matière de sûreté nucléaire ont été considérablement renforcées à la lumière des enseignements tirés de l'accident de 2011. Des mesures contre les accidents graves ont notamment été ajoutées aux exigences réglementaires, et celles concernant les tremblements de terre et les tsunamis ont été renforcées. L'ensemble des opérateurs a dû se conformer à ses nouvelles exigences pour obtenir l'autorisation de continuer d'exploiter leurs réacteurs172(*).

Le désarmement et la décontamination du site de Fukushima par l'opérateur TEPCO, réalisé sous le contrôle de la NRA et de l'AIEA173(*), est toujours en cours et devrait se poursuivre dans les 30 à 40 prochaines années174(*).

(2) Les nouveaux défis du nucléaire

Ce n'est que récemment, dans le cadre du sixième plan stratégique en matière énergétique adopté en octobre 2021, que le gouvernement japonais a annoncé une relance de la filière nucléaire175(*). Après une décennie de stagnation de l'industrie nucléaire japonaise176(*), le METI a lancé, notamment en collaboration avec les États-Unis, un programme de soutien (NEXIP) au développement de SMR, de réacteurs rapides et de réacteurs refroidis au gaz à haute température.

Les recherches, conduites en anglais, sur les documents officiels de la NRA et sur son site internet n'ont pas permis d'identifier de projet ou de mesure spécifique de la NRA concernant la prise en compte de ces nouvelles technologies.

Le changement climatique et ses conséquences n'est pas non plus cité dans les documents stratégiques ou le rapport annuel de la NRA.

3. Finlande

· L'Autorité de radioprotection et de sûreté nucléaire (STUK), créée en 1958, est une autorité gouvernementale indépendante chargée de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et du contrôle des rayonnements en Finlande.

· L'appui technique et scientifique est généralement externalisé par STUK au moyen de contrats-cadres ou d'appels d'offres ponctuels. Le Centre de recherche technique de Finlande (VTT), société détenue par l'État finlandais, est le principal partenaire de l'autorité de réglementation mais elle fait également appel à des universités ou des instituts de recherche publics finlandais.

· Un projet de refonte du cadre législatif et réglementaire finlandais en matière de sûreté nucléaire est en cours, notamment afin d'adapter la procédure d'octroi de permis aux nouvelles technologies nucléaires.

a) L'organisation institutionnelle de la sûreté nucléaire

(1) Un modèle s'appuyant sur un organisme externe principal

En Finlande, la loi sur l'énergie nucléaire de 1987177(*), modifiée à plusieurs reprises, prévoit que le ministère des affaires économiques et de l'emploi est l'autorité compétente dans le domaine de l'énergie nucléaire. Cette même loi et la loi sur les radiations178(*) confient à l'Autorité de radioprotection et de sûreté nucléaire (Säteilyturvakeskus, STUK) des missions de contrôle réglementaire, en vue de « protéger les personnes, la société, l'environnement et les générations futures des effets nocifs des rayonnements »179(*).

Créée en 1958, la STUK a, selon une loi de 1983 et un décret de 1997, le statut d'autorité gouvernementale indépendante, bien qu'elle soit administrativement sous la tutelle du ministère des affaires sociales et de la santé180(*).

L'appui technique et scientifique (TSO) est généralement externalisé par la STUK, principalement auprès du Centre de recherche technique de Finlande (VTT), mais pas exclusivement (cf. infra). L'organisation institutionnelle retenue en Finlande est donc classée dans la catégorie des « TSO externes » à l'autorité de réglementation181(*).

En janvier 2024, la Finlande comptait cinq réacteurs nucléaires en exploitation (Loviisa 1 et 2 et Olkiluoto 1, 2 et 3)182(*). En 2022, la part du nucléaire dans la production totale d'électricité s'élevait à 35 %.

(2) L'Autorité de radioprotection et de sûreté nucléaire (STUK)

Conformément à un décret de 1997, la STUK a pour missions183(*) :

- la surveillance réglementaire de la sûreté de l'utilisation de l'énergie nucléaire, de la préparation aux situations d'urgence, de la sécurité et des matières nucléaires ;

- le contrôle de l'utilisation des rayonnements et d'autres pratiques liées aux rayonnements ;

- le suivi de la situation radiologique en Finlande et le maintien de la préparation aux situations anormales de rayonnement ;

- le maintien des normes métrologiques nationales dans son domaine d'activité ;

- la conduite de travaux de recherche et de développement visant à améliorer la radioprotection et la sûreté nucléaire ;

- l'information sur les questions de radioprotection et de sûreté nucléaire, et la participation à des activités de formation dans ces domaines ;

- la fourniture de services d'experts dans son domaine d'activité ;

- la formulation de propositions pour développer la législation dans ses domaines d'activité et la publication de guides généraux concernant la radioprotection et la sûreté nucléaire ;

- la participation à la coopération internationale dans son domaine, ainsi qu'aux activités internationales de contrôle.

Les missions de la STUK couvrent l'examen et l'évaluation de la sûreté des demandes d'autorisation de réacteurs nucléaires, ainsi que la surveillance de la construction, de l'exploitation et du démantèlement d'une installation nucléaire. La STUK a, par exemple, le droit d'exiger des modifications aux projets de centrales nucléaires, de limiter la puissance des centrales ou d'exiger l'arrêt d'une centrale lorsque cela est nécessaire pour des raisons de sécurité. La loi sur l'énergie nucléaire a été modifiée en 2015 pour donner à la STUK une compétence en matière de surveillance de l'environnement184(*).

La STUK est sous l'autorité d'un directeur général, nommé par le gouvernement pour une période de cinq ans. L'autorité est organisée en six directions, dont la principale est la direction de la réglementation des réacteurs nucléaires (117 employés sur un total de 336 fin 2021).

Organigramme de la STUK

Source : STUK

En 2022, le budget de la STUK s'élevait à environ 40 millions d'euros et l'agence comptait 303 employés185(*). Selon le modèle de financement mis en oeuvre depuis 2000, les exploitants et autres titulaires d'autorisations versent directement à l'autorité des redevances pour la surveillance réglementaire de leurs activités186(*). En 2022, environ la moitié du budget de la STUK (20 millions d'euros) provenait des redevances, 17 millions d'euros du budget de l'État finlandais et 2 millions d'euros de revenus d'activités de services liés à des projets commerciaux187(*).

Par ailleurs, la STUK dispose de quatre comités consultatifs, composés de membres extérieurs188(*) :

- le comité consultatif de la STUK, créé en 2008, est convoqué à la demande du directeur général de l'autorité et a pour rôle de favoriser la coopération entre la STUK et la société civile. Ses membres sont nommés par l'autorité pour une durée de deux ans ;

- le comité consultatif de la radioprotection (STN), dont les membres sont nommés par le gouvernement pour une durée de trois ans, élabore des propositions et des initiatives et adopte des déclarations en matière de radioprotection ;

- le comité consultatif de la sûreté nucléaire (YTN), dont les membres sont nommés par le gouvernement pour une durée de trois ans, participe à la préparation des décisions relatives à la sûreté de l'énergie nucléaire. Son avis sur les grandes étapes du processus d'autorisation des centrales nucléaires (décision de principe, construction, exploitation et désarmement) est obligatoire ;

- et le comité consultatif de la sécurité nucléaire (TJNK), dont les membres sont nommés par le ministre de l'économie et de l'emploi, évalue les menaces en matière nucléaire et conseille la STUK sur les questions de sécurité.

(3) Le Centre de recherche technique de Finlande (VTT)

VTT est le principal service d'appui technique et scientifique de STUK en matière de sûreté nucléaire189(*). Il s'agit d'un organisme de recherche public, détenu par l'État finlandais et placé sous la tutelle du ministère des affaires économiques et de l'emploi. Créé en 1942, il a été transformé en 2015 en société à responsabilité limitée190(*).

Doté d'un budget d'environ 260 millions d'euros et de 2 200 employés en 2022191(*), VTT mène des activités de recherche scientifique et technologique dans un grand nombre de domaines : les biotechnologies, l'informatique quantique, le numérique, l'énergie, etc192(*). Selon un document publié par l'AIEA en 2018, VTT compte environ 200 experts dans les domaines de la radioprotection et de la sûreté nucléaire, pertinents pour la STUK, dont 150 spécialisés dans les questions de sûreté nucléaire193(*).

Structure organisationnelle de VTT

Source : AIEA

Le rôle de service d'appui technique et scientifique de VTT en matière de sûreté nucléaire n'est pas défini dans les lois sur l'énergie et la radioprotection. Les relations entre la STUK et VTT en tant que service d'appui technique et scientifique sont formalisées par des contrats (cf. infra).

Par ailleurs, VTT a obtenu en juin 2021, de la part du gouvernement finlandais et après avis de la STUK, une autorisation pour mener le démantèlement du premier réacteur de recherche nucléaire finlandais, FiR 1, utilisé entre 1962 et 2015 et dont VTT était responsable de l'exploitation depuis 1971194(*). VTT assurera le démantèlement et la gestion des déchets nucléaires de FiR 1 en collaboration avec le producteur d'énergie Fortum. Il s'agit de la première opération de démantèlement d'une centrale nucléaire en Finlande.

(4) Les relations avec les exploitants

Selon l'article 9 de la loi sur l'énergie, il incombe aux titulaires d'une autorisation d'exploitation d'assurer une utilisation sûre de l'énergie nucléaire. Cette responsabilité ne peut être déléguée ou transférée à une autre partie. Il revient à l'autorité de réglementation, c'est-à-dire à la STUK, de vérifier le respect de la réglementation par les exploitants. Cette vérification s'effectue par le biais d'une surveillance continue, d'un examen et d'une évaluation de la sûreté, ainsi que de programmes d'inspection établis par la STUK. Dans ses activités, la STUK met l'accent sur l'engagement du titulaire d'autorisation en faveur d'une « solide culture de la sûreté »195(*).

La STUK a mis en place des mécanismes formels et informels de communication avec les exploitants. Selon la mission du Service d'examen intégré de la réglementation (IRSS) de l'AIEA menée en Finlande en 2022, « le dialogue et la communication fonctionnent très bien entre la STUK et les parties autorisées [dont les exploitants]»196(*). Les mécanismes formels les plus fréquemment utilisés sont la correspondance et les inspections. Les mécanismes informels d'échange consistent en des réunions, des discussions à différents niveaux de l'organisation ou des séminaires et des ateliers.

Selon la mission de l'IRSS, ces deux types de mécanismes permettent des discussions « franches et ouvertes » afin de favoriser la compréhension mutuelle des questions liées à la sécurité197(*). Les exploitants ont également la possibilité d'être entendus lorsque des décisions réglementaires sont prises avant leur publication et de participer au processus de mise à jour des règlements avant leur entrée en vigueur.

b) Les interactions entre recherche, expertise et décision

(1) La procédure d'autorisation de nouveaux réacteurs

La STUK a pour mission de veiller à ce que les exigences en matière de sûreté nucléaire soient respectées et de fournir des évaluations et des déclarations sur la sûreté du projet au cours des différentes phases de la procédure d'autorisation198(*), c'est-à-dire :

l'évaluation de l'impact environnemental et la planification de l'occupation des sols : la STUK remet au ministère des affaires économiques et de l'emploi un avis concernant les programmes et rapports d'évaluation de l'impact environnemental préparés par l'opérateur responsable du projet. La STUK doit également approuver le plan détaillé de la zone destinée à accueillir à l'installation nucléaire199(*) ;

- la décision de principe du gouvernement concernant l'intérêt général du projet : elle est transmise au Parlement pour ratification. La commune d'implantation doit également soutenir le projet. Même s'il s'agit d'une décision de nature essentiellement politique, à ce stade, la STUK est chargée de préparer une évaluation préliminaire de la sûreté du projet et demande l'avis du comité consultatif de la sûreté nucléaire200(*) ;

- l'avis de la STUK sur la demande de permis de construire et l'évaluation de la sûreté : l'évaluation réalisée par la STUK comprend un avis sur le respect des exigences prévues par la législation en vigueur. Lors de la préparation de l'évaluation, la STUK consulte à nouveau le comité consultatif de la sûreté nucléaire et, si nécessaire, d'autres organisations spécialisées201(*) ;

- l'avis de la STUK sur la demande de permis d'exploitation et l'évaluation de la sûreté : la STUK s'assure à cette étape que les exigences en matière de sûreté d'exploitation sont respectées. Le permis d'exploitation est accordé pour une durée limitée et sa prolongation nécessite une évaluation de la STUK. Si le permis est accordé pour une durée supérieure à 10 ans, l'exploitant doit effectuer un réexamen périodique de la sûreté lors duquel STUK évalue l'état de l'installation, en accordant une attention particulière à la gestion du vieillissement des composants, des systèmes et des structures202(*).

Les avis et évaluations de sûreté de la STUK sont publiés sur le site internet de l'autorité.

La STUK n'accorde pas elle-même d'autorisations de construction ou d'exploitation de centrales nucléaires, cette compétence revenant au gouvernement finlandais (cf. schéma infra). Toutefois, il est indiqué par l'autorité que « dans la pratique, aucune autorisation de ce type ne serait délivrée sans l'avis de la STUK confirmant le respect des règles de sûreté »203(*).

Processus décisionnel d'autorisation des installations nucléaires

Source : https://stuk.fi/en/licensing-of-nuclear-facilities

(2) L'expertise interne de la STUK

La STUK cite l'expertise comme première valeur de l'autorité : « Nos activités reposent sur l'expertise et les connaissances scientifiques de haute qualité des individus et de l'organisation. La capacité à comprendre des entités complexes et le renouvellement continu des compétences sont indispensables à notre travail »204(*). Près de 85 % de son personnel travaille au sein de directions opérationnelles spécialisées. En moyenne, les quelque 300 employés de la STUK y font carrière depuis 14 ans205(*).

Selon l'autorité, « l'expertise de la STUK couvre tous les domaines essentiels à la surveillance de l'utilisation de l'énergie nucléaire. Selon les besoins, la STUK commande des analyses, des examens et des évaluations indépendants à des organismes d'appui technique et scientifique pour compléter ses propres travaux »206(*).

Comme mentionné précédemment, la STUK ne prend pas de décision d'autorisation concernant les installations nucléaires mais transmet au gouvernement une déclaration sur la sûreté207(*). Toutefois, le gouvernement ne peut accorder d'autorisation définitive en cas d'avis défavorable de la STUK208(*).

(3) La coopération entre la STUK, VTT et d'autres organismes de recherche

Le principal organisme de soutien technique et scientifique de la STUK est le VTT mais l'autorité indique que l'université de technologie de Lappeenranta (LUT) et l'université d'Aalto (ancienne université de technologie d'Helsinki) jouent également un rôle important dans l'apport d'expertise externe209(*). Des organisations et des experts internationaux peuvent également être sollicités par la STUK ; ce fut notamment le cas pour les activités d'examen et d'inspection liés au projet d'EPR d'Olkiluoto et au projet de Fennovoima Hanhikivi210(*) 211(*).

Le rapport de la mission de l'IRRS de 2022 indique que les conseils et le soutien apportés à la STUK par des organismes externes n'ont pas de statut formalisé et ne dispensent pas l'agence des responsabilités qui lui sont confiées. L'indépendance et les possibilités de conflits d'intérêts sont abordées dans le cadre de la passation de chaque contrat avec un organisme externe212(*).

Les relations entre VTT et la STUK prenaient auparavant principalement la forme d'appels d'offres concernant certaines tâches précises. En 2015, VTT a obtenu un contrat-cadre avec la STUK portant sur la conduite d'analyses déterministes de sûreté des centrales nucléaires finlandaises pour une durée de quatre ans. Dans le domaine de la gestion des déchets, VTT et la STUK ont également conclu en 2012 un contrat-cadre de six ans. Dans certains cas (généralement, lorsqu'il n'existe qu'un seul prestataire de services possible et/ou que la valeur économique est relativement faible), la STUK peut également recourir à la passation directe de marchés sans appel d'offres ou à un appel d'offres limité, fondé sur une demande préalable d'expression d'intérêt213(*).

En outre, la STUK a mis en place un consortium d'universités et d'instituts de recherche finlandais, dénommé « Cores », afin de renforcer et de coordonner la recherche en matière de radioprotection. Parmi les seize membres figurent notamment VTT, l'université d'Aalto, les universités technologiques de Lappeenranta et Tampere et cinq hôpitaux universitaires214(*).

(4) Les programmes nationaux de recherche

En 2003, la loi sur l'énergie nucléaire a été modifiée afin de garantir un financement de long terme de la recherche en matière de sûreté et de gestion des déchets nucléaires en Finlande. Selon l'article 53a215(*) de cette loi, tout détenteur de permis d'exploitation ou de construction d'une installation nucléaire doit acquitter une redevance, versée dans un fonds spécifique destiné à financer des programmes de recherche nationaux (Fonds national de gestion des déchets nucléaires (VYR)). Cette redevance a été augmentée pour la période 2015 à 2025 en raison du vieillissement des infrastructures216(*). Des programmes de recherche multidisciplinaires sur la sûreté et la gestion des déchets, financés en partie par le fonds VYR, sont définis pour une période de six ans.

Les programmes nationaux de recherche en matière de sûreté nucléaire (SAFIR2018 et SAFIR2022) et de gestion des déchets nucléaires (KYT2018 et KYT2022) ont joué un rôle important dans la création et le développement de l'expertise dans ces domaines et ont renforcé la capacité des organismes de recherche finlandais à soutenir l'autorité réglementaire217(*).

Entre 2015 et 2022, les programmes SAFIR2018 et SAFIR 2022 ont ainsi permis de financer un volume total de projets de 54,6 millions d'euros dont 66 % par le fonds de l'État finlandais VYR, représentant plusieurs centaines de chercheurs et plus de 1 800 publications218(*). VTT, l'université d'Aalto et l'université de technologie de Lappeenranta sont les principales organisations retenues dans les appels à projets. Selon le rapport final du programme SAFIR2022, les résultats de ces projets de recherche « sont utilisés par l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (STUK), Teollisuuden Voima Oyj (TVO) et Fortum [deux producteurs d'électricité en Finlande], ainsi que par les organismes de recherche qui réalisent les projets. Toutefois, la plupart des projets font l'objet d'une coopération internationale et les résultats sont donc plus largement utilisés par les organisations internationales »219(*).

En 2023, les autorités finlandaises ont lancé le programme successeur, baptisé SAFER2028, qui poursuit le même objectif de développer et d'améliorer de façon continue les compétences en matière de sûreté et de gestion des déchets nucléaires. Les financements provenant du fonds VYR devraient s'élever à environ 10 millions d'euros par an220(*).

c) Les évolutions en matière de sûreté nucléaire

(1) Après l'accident de Fukushima de 2011

Selon la STUK, toutes les améliorations de la sûreté présentées dans le plan d'action national finlandais, adopté après la catastrophe de Fukushima, ont été mises en oeuvre ; les dernières actions ont été achevées en 2020221(*). La législation nationale et les guides réglementaires établis par la STUK ont été mis à jour et des travaux d'amélioration de la sûreté ont été mis en oeuvre dans les centrales222(*).

(2) Les nouveaux défis du nucléaire

Selon le site internet de l'autorité, « la STUK se prépare à l'éventualité d'une volonté de construire des petites centrales nucléaires (SMR) d'une puissance électrique inférieure à 300 mégawatts en Finlande. La STUK se familiarise avec les différents types de petites centrales nucléaires et leurs caractéristiques spécifiques, et participe à la coopération internationale »223(*). La STUK a notamment engagé des discussions avec Fortum, Rolls Royce SMR, l'université de technologie de Lappeenranta et VTT qui envisagent de futurs projets de SMR224(*).

Dans le cadre de ses travaux de préparation, la STUK a participé en 2023 à une évaluation de certains paramètres du projet de réacteur Nuward, développé par EDF, avec les autorités de sûreté nucléaire française et tchèque.

Cet exercice permettra notamment à la STUK de compléter les travaux de refonte du cadre législatif et réglementaire en matière de sûreté nucléaire, entamés en 2019225(*). En 2021, un groupe de travail mis en place par le ministère des affaires économiques et de l'emploi avait conclu à la nécessiter de réformer l'ensemble du cadre législatif en raison de l'ambiguïté des textes actuels, des changements dans l'environnement d'exploitation des installations nucléaires et des évolutions attendues en matière technologique226(*). Selon la STUK, l'un des objectifs est de rationaliser l'octroi de permis pour les nouveaux types de centrales nucléaires tels que les SMR227(*). La réforme du code de sûreté nucléaire de la STUK devrait notamment réduire le niveau de détail des exigences et les rendre plus ciblées, permettant ainsi de proposer différentes solutions228(*).

4. Royaume-Uni

· L'Office pour la réglementation nucléaire (ONR) a été créé en 2013 afin de renforcer l'indépendance de l'autorité de réglementation et regrouper les compétences de plusieurs administrations en matière nucléaire. L'ONR est compétent en matière de sûreté nucléaire, de santé et de sécurité des sites nucléaire, de sécurité nucléaire, de garanties nucléaires et de sécurité du transport des matières nucléaires et radioactives.

· L'ONR complète son expertise interne par un accord-cadre (Technical Services Framework), conclu tous les quatre ans, avec plusieurs organismes d'appui techniques externes. Le dernier marché conclu en 2022 fait principalement appel à des bureaux d'études et de d'ingénierie privés.

· L'ONR a pris depuis 2017 un certain nombre de mesures pour anticiper le développement des nouvelles technologies nucléaires. Il s'est également doté d'un groupe d'experts sur les risques naturels, comprenant les questions liées au changement climatique.

a) L'organisation institutionnelle de la sûreté nucléaire

(1) Un modèle reposant sur l'expertise de l'Office de réglementation nucléaire (ONR), complétée par des prestataires externes

Au Royaume-Uni, la sûreté nucléaire n'est pas une matière dévolue aux nations constitutives et son encadrement législatif est réservé au Parlement britannique. Toutefois, certains aspects relatifs à la protection de l'environnement et la gestion des déchets radioactifs relèvent de la compétence des gouvernements écossais, gallois et d'Irlande du Nord229(*).

La législation encadrant l'énergie nucléaire est quelque peu éclatée mais repose principalement sur la loi sur les installations nucléaires de 1965230(*), la loi sur la santé et la sûreté au travail de 1974231(*) et la loi sur l'énergie de 2013232(*), telles que modifiées.

La loi sur l'énergie de 2013 a notamment créé l'Office pour la réglementation nucléaire (ONR) qui est l'autorité indépendante de réglementation du nucléaire au Royaume-Uni. Elle est principalement compétente en matière de sûreté nucléaire, de sécurité nucléaire civile et de santé et de sécurité conventionnelles sur les 35 sites nucléaires civils autorisés en Grande-Bretagne233(*).

L'AIEA classe le Royaume-Uni parmi les pays dont le modèle organisationnel repose sur des organismes d'appui technique et scientifique (TSO) externes à l'autorité de réglementation234(*). En effet, l'ONR dispose d'un « cadre de services techniques » (Technical Services Framework, TSF) lui permettant de faire appel à une expertise externe pour mener des travaux techniques ou de recherche scientifique235(*). Dans ce cadre, il s'appuie sur un pool d'organismes qu'il sélectionne par appel d'offres tous les quatre ans (cf. infra).

En janvier 2024, 9 réacteurs nucléaires situés sur quatre sites étaient exploités en Grande-Bretagne236(*) et 36 réacteurs étaient définitivement à l'arrêt237(*). Deux réacteurs EPR étaient en cours de construction sur le site de Hinkley Point et deux autres en projet sur le site de Sizewell. En 2022, l'énergie nucléaire représentait 14 % de la production d'électricité totale du pays.

La stratégie britannique de sécurité énergétique, présentée en avril 2022, fixe l'ambition de porter l'énergie nucléaire civile à 24 GW d'ici 2050, soit trois fois plus qu'actuellement, et à 25 % de la demande d'électricité prévue en 2050238(*). Dans le plan de sécurité énergétique, publié en mars 2023, le gouvernement britannique s'est également engagé à mettre en place une réserve de nouveaux projets nucléaires et a annoncé la transformation de l'entreprise publique British Nuclear Fuels (BNFL) Ltd en Great British Nuclear afin de lancer un processus concurrentiel de sélection des meilleurs SMR239(*).

(2) Les missions de l'ONR

Aux termes de la loi sur l'énergie de 2013240(*), l'ONR a cinq grands objectifs : la sûreté nucléaire, la santé et la sécurité des sites nucléaires, la sécurité nucléaire, les garanties nucléaires et la sécurité du transport des matières nucléaires et radioactives.

Il est compétent sur les 35 sites nucléaires civils autorisés en Grande-Bretagne, ce qui comprend le parc existant de réacteurs en exploitation, les installations du cycle du combustible, les sites de gestion des déchets et de démantèlement, et en partie compétent sur les sites de défense autorisés241(*). L'office établit également la réglementation de la conception et de la construction de nouvelles installations nucléaires, y compris de la chaîne d'approvisionnement242(*).

À la suite de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne le 1er janvier 2021, l'ONR a pris en charge les obligations liées aux garanties nucléaires, tâche auparavant assumée par Euratom243(*).

Contrairement à d'autres autorités de sûreté en Europe, l'ONR n'est pas compétent en matière de radioprotection dans le domaine médical. En dehors des sites des centrales nucléaires, l'information du public et la recherche concernant les risques de radiation relèvent de l'Agence de sécurité sanitaire du Royaume-Uni (UK Health Security Agency, UKHSA)244(*).

(3) La gouvernance et la structure de l'ONR

Opérationnel depuis le 1er avril 2014, l'ONR est issu de la fusion entre différentes entités : la direction nucléaire du Health and Safety Executive (HSE, autorité compétente en matière d'inspection du travail), le bureau pour la sécurité nucléaire civile (Office for Civil Nuclear Security), le bureau britannique des garanties nucléaires (UK Safeguards Office) et l'équipe chargée du transport des matières radioactives du ministère des transports245(*). Avant 2011, le prédécesseur de l'ONR était intégré à l'administration du HSE et entre 2011 et 2013, l'ONR avait été établi temporairement sous la forme d'une agence du HSE246(*).

Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi sur l'énergie, « l'autorité de réglementation du nucléaire du Royaume-Uni doit être efficace, indépendante, dotée de toutes les ressources nécessaires, transparente et responsable. Elle doit également être suffisamment souple pour relever les défis futurs d'un secteur qui travaille sur le long terme. L'autorité de réglementation actuelle (l'ONR en tant qu'agence du HSE) n'est pas en mesure de répondre de manière adéquate à ces exigences en raison de certaines contraintes inhérentes [à son statut]. Par exemple, l'appartenance de son personnel à la fonction publique l'empêche d'attirer et de retenir le personnel sur un marché concurrentiel et de plus en plus international ; de plus, il exerce des fonctions statutaires qui, en droit, relèvent du secrétaire d'État plutôt que de l'autorité de réglementation »247(*).

Afin de renforcer l'indépendance du régulateur, la loi sur l'énergie de 2013 a doté l'ONR du statut d'établissement public créé par la loi (statutory public corporation) et l'a placé sous la responsabilité du secrétaire d'État du ministère du travail et des pensions (DWP). Cette tutelle administrative du DWP (concernant la gouvernance, les finances et la performance de l'ONR) garantit la séparation fonctionnelle de l'ONR du ministère responsable de la politique du gouvernement britannique en matière nucléaire248(*) (auparavant le Department for Business, Energy and Industrial Strategy (BEIS) et depuis janvier 2023, le Department for Energy Security and Net Zero (DESNZ)). L'ONR travaille toutefois en collaboration avec le DESNZ.

La gouvernance de l'ONR repose, d'une part, sur un conseil d'administration non exécutif, et d'autre part, sur une équipe exécutive, responsable de la gestion de l'ONR249(*). Le rôle du conseil d'administration est d'assurer la direction, définir la stratégie, convenir du cadre politique général de l'ONR, définir ses ressources et ses résultats et d'en assurer le suivi. Il est composé d'au maximum sept membres non exécutifs, nommés par le DWP (sauf le membre en charge de la sécurité nommé par le DESNZ), et de tout au plus quatre membres exécutifs dont le directeur général de l'ONR250(*). L'équipe exécutive est formée par le directeur général, occupant également les fonctions d'inspecteur nucléaire en chef (Chief Nuclear Inspector, CNI), d'un directeur général adjoint responsable des services support (Corporate Services) et d'un directeur exécutif de la réglementation et inspecteur nucléaire en chef adjoint, responsable des cinq directions opérationnelles de l'ONR (Regulatory Directorate).

Structure organisationnelle et gouvernance de l'ONR

Source : ONR

Au sein de l'office, la direction en charge de la règlementation (Regulatory Directorate) joue un rôle central puisqu'elle comprend les cinq divisions qui reflètent les secteur nucléaires clés, telles que la division de la sécurité nucléaire civile et des garanties, responsable des inspections, la division des nouveaux réacteurs, en charge de la procédure d'autorisation et des nouvelles technologies nucléaire, et la division technique, qui comprend notamment un service responsable de la recherche (cf. infra).

Structure de la direction en charge de la règlementation

Source : ONR

En 2016, un comité consultatif indépendant, placé auprès de l'inspecteur nucléaire en chef (Chief Nuclear Inspector's Independent Advisory Panel, IAP), a été créé. Ce comité se réunit deux fois par an pour fournir à l'autorité des conseils indépendants sur les questions nucléaires. Le groupe est composé d'experts issus de l'industrie, des ministères, d'autres agences et régulateurs et d'universités. Depuis 2019, il compte également deux représentants d'organisations non gouvernementales (ONG)251(*).

L'ONR compte également trois autres comités consultatifs : le groupe d'experts de l'ONR sur les risques naturels, le comité consultatif sur le graphite et le comité de réglementation de l'intelligence artificielle dans le nucléaire252(*).

L'ONR emploie environ 700 personnes253(*) et disposait, pour l'année budgétaire 2022-2023, d'un budget de 93 millions de livres sterling (109 millions d'euros) presque entièrement financé par les redevances versées par les opérateurs254(*).

(4) Les relations avec les exploitants

En application de la loi sur les installations nucléaires de 1965 (article 7) et de la loi sur la santé et la sûreté au travail de 1974 (article 2), la responsabilité principale en matière de sûreté d'une installation nucléaire et de protection de la santé et de la sûreté des travailleurs incombe à l'exploitant. L'ONR exige que l'opérateur présente de façon détaillée sa politique en matière de sûreté et sa structure organisationnelle dans le cadre de sa demande d'autorisation initiale255(*).

Sur son site internet, l'ONR indique utiliser de multiples canaux pour dialoguer avec l'industrie, qu'il s'agisse d'inspections de routine (plus de 600 en 2020-2021) ou de réunions régulières avec les détenteurs d'autorisation. L'autorité participe également aux groupes de parties prenantes des sites nucléaires et aux comités de liaison locaux256(*).

Actuellement, EDF Energy, filiale du groupe français EDF, est l'unique opérateur de centrales nucléaires en Grande-Bretagne.

b) Les interactions entre recherche, expertise et décision

(1) La procédure d'autorisation de nouveaux réacteurs

La procédure d'autorisation de nouvelles centrales nucléaires applicable en Grande-Bretagne est complexe et ne repose pas uniquement sur l'ONR. En Angleterre, avant qu'une nouvelle centrale nucléaire puisse être construite et exploitée, l'opérateur doit obtenir257(*) :

- un permis de site nucléaire (nuclear site license) délivré par l'ONR. Le permis de site nucléaire est un document juridique, délivré pour toute la durée de vie de l'installation, définissant le nombre et le type d'installations autorisées ainsi que 36 conditions standard à respecter, couvrant la conception, la construction, l'exploitation et le déclassement258(*). Le permis de site nucléaire est accordé pour une durée indéterminée259(*). Formellement, la décision de délivrer le permis de site est prise par l'inspecteur nucléaire en chef, sur la base d'une évaluation des services de l'ONR et après examen par un comité de surveillance260(*) ;

- un permis environnemental de l'Agence de l'environnement ;

- et une autorisation d'urbanisme de l'Inspection de l'urbanisme (Planning Inspectorate).

L'octroi d'un permis de site nucléaire est une étape importante, mais ne constitue pas en soi une autorisation pour commencer la construction d'une centrale nucléaire. Ceci nécessite une autorisation réglementaire distincte de l'ONR261(*).

(2) L'expertise interne de l'ONR

Selon les informations transmises par l'ASN, sur ses 700 employés, l'ONR emploie environ 450 inspecteurs, issus de différents domaines de spécialités262(*), au sein de la direction de la réglementation de l'ONR.

« Les inspecteurs de l'ONR assument diverses fonctions, notamment le travail d'évaluation (expertise intégrée), l'inspection de projets et l'inspection de sites. Il existe une grande fluidité entre les différents rôles. Très souvent, des spécialistes participent et/ou dirigent des inspections d'exploitants, pour apporter leur expertise (parce que l'inspecteur de site désigné ne dispose pas de l'expertise nécessaire dans toutes les disciplines) »263(*).

La plupart des décisions réglementaires de l'ONR relèvent de la responsabilité de la direction de la réglementation. En fonction du type de décision, il existe différents niveaux hiérarchiques d'approbation264(*). Les décisions les plus importantes, telles que l'octroi de permis de site nucléaire, relèvent de l'inspecteur nucléaire en chef (cf. supra).

Les réunions décisionnelles de l'ONR ne sont pas ouvertes au public. En revanche, de nombreux rapports, y compris les rapports d'inspection et les rapports d'évaluation sont publics265(*).

Par ailleurs, l'ONR dispose, au sein de la division technique de la direction de la réglementation, d'une sous-division chargée de la recherche266(*). Ce service n'effectue pas de recherche en propre mais est chargé de gérer les demandes d'études au sein de l'ONR, le budget de recherche de l'agence (d'environ 2,5 millions de livres sterling par an267(*)) et de mandater des organismes externes pour effectuer ces recherches, grâce au Technical Services Framework (TSF). Elle entretient également des relations étroites avec le monde universitaire268(*).

Selon la stratégie de recherche réglementaire adoptée par l'office en 2019, l'objectif principal des activités de recherche de l'ONR est de « s'assurer que les inspecteurs sont en mesure de former leurs jugements réglementaires en toute confiance et de manière efficace, en utilisant des informations scientifiques et techniques solides et actualisées, afin d'étayer des décisions équilibrées et d'éviter l'excès de conservatisme et d'optimisme »269(*). L'ONR a fait le choix de mandater des organismes externes pour mener les activités de recherche.

Les trois raisons principales identifiées par l'ONR pour mandater des organismes externes sont : le besoin de conseil indépendant, en particulier lorsque les décisions qu'ils prennent peuvent être litigieuses, une lacune dans les connaissances et/ou le besoin pour les spécialistes de l'ONR d'avoir une meilleure compréhension et un meilleur contrôle des innovations en cours de développement ou des sujets émergents270(*).

(3) Le recours à un pool externe d'organismes d'appui technique et scientifique

L'expertise externe de l'ONR ne repose pas sur un acteur unique ou dédié, dont la mission serait définie par la loi. L'approche retenue par l'office pour compléter son expertise interne et mettre en oeuvre sa stratégie de recherche est de conclure tous les quatre ans un marché, sorte d'accord-cadre, baptisé Technical Services Framework (TSF) avec différents organismes de recherche ou entreprises publics ou privés, dans un certain nombre de domaines.

Le dernier TSF a été conclu en novembre 2022271(*) : il comprend trois lots dans différents domaines de spécialités (études du coeur de réacteur, ingénierie civile, chimie etc.) avec sept prestataires (Gesellschaft für Anlagen-und Reaktorsicherheit (GRS), Tractebel Engineering, Jacobs, ARUP, Mott MacDonald, TÜV SUD et Frazer-Nash Consultancy Ltd). Certains lots prévoient la possibilité de recourir à des « sous-traitants » de second-rang272(*).

Marché d'appui scientifique et technique de l'ONR pour 2022-20226

Source : ONR

L'entreprise Jacobs273(*), un bureau d'études et de conseils en ingénierie basé aux États-Unis, est le principal prestataire externe de l'ONR : elle fournit une expertise externe à l'office et à son prédécesseur depuis plus de 20 ans. Dans le contrat-cadre 2022-2026, elle a été sélectionnée dans les trois lots. Enfin, elle est membre associée du réseau européen des organismes techniques de sécurité (European Technical Safety Organisations Network, ETSON), qui constitue une plateforme volontaire d'échanges entre organismes de soutien technique et scientifique des autorités de sûreté nucléaire en Europe274(*).

a) Les évolutions en matière de sûreté nucléaire

(1) Après l'accident de Fukushima de 2011

L'ONR a été mise en place après la catastrophe de Fukushima. Même si un projet de réforme préexistait275(*) et que le rapprochement de certaines administrations compétentes dans le domaine nucléaire avait été amorcé, la création de l'ONR en tant qu'établissement public statutaire a été accélérée par l'accident survenu au Japon. Le rapport remis par l'inspecteur nucléaire en chef de l'ONR (à l'époque, agence du HSE) en septembre 2011 concluait que « l'intention du gouvernement de faire avancer les propositions visant à créer l'ONR, avec le poste et les responsabilités de l'inspecteur en chef inscrits dans la loi, devrait renforcer la confiance dans le régime de réglementation nucléaire du Royaume-Uni pour faire face plus efficacement aux défis futurs »276(*).

Ce même rapport rappelait que « Le système de réglementation nucléaire britannique est en grande partie non prescriptif. Cela signifie que l'industrie doit démontrer à l'autorité de réglementation qu'elle comprend parfaitement les dangers associés à ses activités et qu'elle sait comment les contrôler. L'autorité de réglementation examine la sûreté et la sécurité de leurs conceptions et de leurs opérations pour s'assurer que leurs dispositions sont solides et qu'elles minimisent les risques résiduels. Nous attendons donc de l'industrie qu'elle assume la responsabilité première de tirer des leçons, plutôt que de compter sur le régulateur pour lui dire ce qu'elle doit faire. Ce que nous avons fait dans ce rapport, c'est signaler les domaines à examiner où des leçons peuvent être tirées pour améliorer encore la sécurité. Mais c'est à l'industrie qu'incombe la responsabilité ultime de la sûreté de la conception et de l'exploitation de ses installations nucléaires »277(*).

Dans le neuvième rapport de conformité à la Convention sur la sûreté nucléaire remis à l'AIEA en 2022, l'ONR rappelait que les mesures suivantes avaient été prises à la suite de la catastrophe de Fukushima :

- les principes d'évaluation de la sécurité (Security Assessment Principles, SAP) utilisés par les inspecteurs de l'ONR pour guider la prise de décision réglementaire dans le processus d'autorisation ont été révisés en 2014, puis à nouveau en 2020, en particulier ceux concernant la gestion des accidents et la préparation aux situations d'urgence278(*) ;

- EDF Energy a réalisé un certain nombre de travaux pour améliorer la sûreté de ses installations, notamment pour renforcer la robustesse des sites en cas de perte d'alimentation électrique et préserver l'intégrité de l'enceinte de confinement279(*).

(2) Les nouveaux défis du nucléaire

Concernant les technologies nucléaires avancées (dont les petits réacteurs modulaires, SMR), l'ONR a pris depuis 2017 un certain nombre de mesures pour anticiper le développement de ces nouvelles technologies, compte tenu du soutien financier apporté par le gouvernement britannique à certains projets (AMR Feasibility & Development, F&D) projet doté de 44 millions de livres sterling en 2017) et des objectifs fixés par le BEIS280(*). On peut notamment citer281(*) :

- le développement des capacités et de l'expertise technique de l'ONR dans ce domaine grâces à des exercices de familiarisation avec un large éventail de technologies et à la mise en oeuvre de plans de formation. Des équipes dédiées, d'une part aux réacteurs modulaires avancés et, d'autre part, aux SMR ont été créées au sein de la division des nouveaux réacteurs de la direction de la réglementation ;

- dans le cadre du projet AMR Feasibility & Development et en réponse à la demande d'avis du BEIS sur sept réacteurs avancés de fission, l'ONR a développé des critères d'évaluation et rendu un avis en mai 2019 ;

- l'élaboration et la mise en oeuvre d'un plan d'échanges avec l'industrie, par le biais de séminaires et ateliers permettant d'avoir un aperçu des développements de la conception et des propositions des fournisseurs et de communiquer ses attentes réglementaires ;

- l'élaboration et la mise en oeuvre d'un plan de coopération avec les autorités réglementaires d'autres pays (sont notamment cités la commission de sûreté nucléaire du Canada, l'agence de l'énergie atomique du Japon et l'IRSN en France) ;

- l'élaboration et la mise en oeuvre d'un plan visant à garantir que les processus et les orientations de l'ONR sont adaptés aux technologies nucléaires avancées (modernisation du processus d'évaluation de la conception générique des réacteurs pour les SMR en 2019-2020). Il convient de noter qu'en avril 2023, la première étape de l'évaluation de la conception générique d'un SMR de l'entreprise Rolls Royce SMR a été validée par l'ONR et par l'Agence de l'environnement282(*).

S'agissant de la question du changement climatique et de son impact sur les installations nucléaires, l'ONR indique s'être doté d'un groupe d'experts sur les risques naturels, composés d'universitaires indépendants et de consultants spécialisés couvrant un large éventail de domaines (risques sismiques, météorologiques, d'inondations côtières et changement climatique) afin d'être informé des résultats des dernières recherches. « Le panel fournit à l'équipe de l'ONR chargée des risques externes une source précieuse d'expertise technique et indépendante faisant autorité »283(*).

L'ONR collabore également sur ce sujet avec les agences de protection de l'environnement du Royaume-Uni (l'Agence de l'environnement en Angleterre, Ressources naturelles du pays de Galles et l'Agence écossaise de protection de l'environnement), ainsi qu'avec les organismes de recherche et les exploitants de centrales284(*).


* 1 La sûreté nucléaire désigne les mesures prises en vue de prévenir les accidents nucléaires ou d'en limiter les effets.

* 2 Rapport au Premier ministre de M. Jean-Yves Le Déaut, « Le système français de radioprotection, de contrôle et de sécurité nucléaire : la longue marche vers l'indépendance et la transparence », 1998.

* 3 En 2010, le Commissariat à l'énergie atomique a été renommé Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives, tout en conservant le sigle CEA.

* 4 Rapport particulier de la Cour des comptes sur l'IRSN (exercices 2007 à 2012), juin 2014.

* 5 Rapport au nom de l'OPECST sur les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, Jean-Luc Fugit et Stéphane Piednoir, 11 juillet 2023.

* 6 Normes de sûreté de l'AIEA, Principes fondamentaux de sûreté, 2007.

* 7 Orano Recyclage et Orano Chimie-Enrichissement.

* 8 Article R. 592-42 du code de l'environnement.

* 9 Article R. 592-51 du code de l'environnement.

* 10 Rapport d'information n° 629 (2022-2023) de M. Jean-François Rapin au nom de la commission des finances du Sénat, « Relance du nucléaire : adapter les moyens de l'IRSN », 24 mai 2023

* 11 Les activités de recherche de l'IRSN sont développées au commentaire de l'article 3.

* 12 Le rôle de la société civile dans la sûreté nucléaire est développé au commentaire de l'article 4.

* 13 Rapport au Premier ministre de M. Jean-Yves Le Déaut, « Le système français de radioprotection, de contrôle et de sécurité nucléaire : la longue marche vers l'indépendance et la transparence ».

* 14 Evolutionary Power Reactor 2, projet de réacteur nucléaire à eau pressurisée de troisième génération.

* 15 Le projet Nuward est développé par un consortium composé d'EDF, de TechnicAtome, de Naval Group, du CEA, de Framatome et de Tractebel.

* 16 Référé de la Cour des comptes sur l'IRSN, 25 juin 2021.

* 17 Rapport de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation sur les autorités administratives indépendantes du Sénat, Patrice Gélard, 15 juin 2006.

* 18 Rapport n° 126 (2015-2016) de Jacques Mézard fait au nom de la commission d'enquête Autorités administratives indépendantes, « Un État dans l'État : canaliser la prolifération des AAI », 28 octobre 2015.

* 19 Article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.

* 20 Décision n° 2018 -- DC-0644 de l'ASN du 9 octobre 2018.

* 21 Rapport au nom de l'OPECST sur les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, Jean-Luc Fugit et Stéphane Piednoir, 11 juillet 2023.

* 22 Décision n° 297931 du Conseil d'État du 3 octobre 2008, Commune d'Annecy

* 23 Décision n° 2008-564 du Conseil constitutionnel du 19 juin 2008, loi relative aux OGM

* 24 Baromètre 2022, « La perception des risques et de la sécurité par les Français », IRSN.

* 25 Décision n° 2018 -- DC-0644 de l'Autorité de sûreté nucléaire du 9 octobre 2018 portant adoption du règlement intérieur de l'Autorité de sûreté nucléaire.

* 26 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023.

* 27 Amendement n° 632, texte n° 917, 1ère lecture, Assemblée nationale (séance publique).

* 28 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023.

* 29 La disposition ne présentait pas de lien direct ou indirect avec le texte.

* 30 Ineris et BRGM par exemple.

* 31 Gestion et exploitation des données de mesures de l'exploitation des travailleurs aux rayonnements ionisants, gestion de l'inventaire des sources de rayonnements ionisants.

* 32 Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

* 33 Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire.

* 34 Association nationale des comités et commissions locales d'information.

* 35 Le contrôle par les commissions permanentes des deux assemblées est développé au commentaire de l'article 14.

* 36 Loi n° 83-609 du 8 juillet 1983 portant création d'une délégation parlementaire dénommée office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

* 37 Rapport de l'OPECST sur la préparation de la cinquième édition du plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR), Émilie Cariou, Bruno Sidou, 3 mars 2022.

* 38 Rapport de l'OPECST sur les grandes tendances de la recherche dans le domaine de l'énergie nucléaire et des énergies renouvelables, Émilie Cariou, Cédric Villani, Gérard Longuet, 18 octobre 2019.

* 39 Rapport de l'OPECST sur l'énergie nucléaire du futur et les conséquences de l'abandon du projet de réacteur nucléaire de 4e génération « Astrid », Thomas Gassilloud, Stéphane Piednoir, 8 juillet 2021.

* 40 Rapport de l'OPECST sur l'avenir de la filière nucléaire en France, Christian Bataille, Bruno Sido, 15 décembre 2011.

* 41 Rapport de l'OPECST sur le contrôle des équipements sous pression nucléaires : le cas de la cuve du réacteur EPR, Jean-Yves Le Déaut, Bruno Sido, 9 juillet 2015.

* 42 Rapport de l'OPECST sur la sûreté des équipements sous pression nucléaire, Jean-Yves Le Déaut, Bruno Sido, 9 mars 2017.

* 43 Rapport de l'OPECST sur les drones et la sécurité des installations nucléaires, Jean-Yves Le Déaut, Bruno Sido, 29 janvier 2015.

* 44 Rapport au nom de l'OPECST sur les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, Jean-Luc Fugit et Stéphane Piednoir, 11 juillet 2023.

* 45 Rapport n° 231 (2005-2006) fait au nom de la commission des affaires économiques et du plan du Sénat sur le projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire par MM. Henri Revol et Bruno Sido, 1er mars 2006.

* 46 Articles L. 125-17 à L. 125-33 du code de l'environnement.

* 47 Article L. 125-32 du code de l'environnement.

* 48 Article R. 125-73 du code de l'environnement.

* 49 Article R. 125-73-1 du code de l'environnement.

* 50 Article R. 125-74 du code de l'environnement.

* 51 Article R. 125-76 du code de l'environnement.

* 52 « Toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante peut employer des fonctionnaires civils et militaires, des fonctionnaires des assemblées parlementaires et des magistrats placés auprès d'elle dans une position conforme à leur statut et recruter des agents contractuels » (article 16, alinéa 2, de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes).

* 53 Article L. 712-1 du code général de la fonction publique, pour les fonctionnaires.

* 54 Décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, pour les agents contractuels.

* 55 Selon le questionnaire transmis par les services du ministère de la transition écologique au rapporteur, des adaptations par voie réglementaire aux dispositions du code du travail pourraient en effet s'avérer nécessaires, notamment pour favoriser une homogénéité de traitement entre agents de droit public et de droit privé. Les mêmes services estiment qu'il n'est pas identifié à ce stade de cas d'application qui serait déjà mis en lumière.

* 56 Les travailleurs sont les salariés, y compris temporaires, et les stagiaires, ainsi que toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l'autorité de l'employeur.

* 57 « Peuvent se présenter aux élections professionnelles :

« 1° Les organisations syndicales représentant les agents publics qui, dans la fonction publique où est organisée l'élection, sont légalement constituées depuis au moins deux ans à compter de la date de dépôt légal des statuts et satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance ;

« 2° Les organisations syndicales représentant les agents publics affiliées à une union de syndicats de la fonction publique remplissant les conditions mentionnées au 1°. Pour l'application du 2°, ne sont prises en compte en qualité d'unions de syndicats de la fonction publique que les unions de syndicats dont les statuts déterminent le titre et prévoient l'existence d'organes dirigeants propres désignés directement ou indirectement par une instance délibérante et de moyens permanents constitués notamment par le versement de cotisations par les membres ».

* 58 « Toute organisation syndicale ou union de syndicats créée par fusion d'organisations syndicales ou d'unions de syndicats qui remplissent la condition d'ancienneté mentionnée au 1° de l'article L. 211-1 est présumée remplir elle-même cette condition ».

* 59 « (...) les organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l'entreprise ou l'établissement concernés » (premier alinéa).

* 60 Les représentants du personnel titulaires de la formation spécialisée sont désignés parmi les représentants du personnel du comité social d'administration, titulaires ou suppléants. Les suppléants de cette formation spécialisée sont désignés librement par les organisations syndicales siégeant au comité social d'administration.

* 61 Le respect des valeurs républicaines ; l'indépendance ; la transparence financière ; une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation ; l'influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ; les effectifs d'adhérents et les cotisations.

* 62 L'audience établie selon les niveaux de négociation conformément aux articles L. 2122-1, L. 2122-5, L. 2122-6 et L. 2122-9.

* 63 Les administrations et établissements publics administratifs de l'État, les collectivités et leurs établissements publics administratifs ainsi que les établissements publics peuvent, lorsque des fonctions exercées en leur sein nécessitent une qualification technique spécialisée, bénéficier de la mise à disposition de salariés de droit privé.

* 64 Ordonnance n° 2018-359 du 16 mai 2018 fixant les modalités de transfert des personnels administratifs des juridictions mentionnées au 1° du I de l'article 109 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et celles de leur accès aux corps des services judiciaires ou aux corps communs du ministère de la justice.

* 65 Rapport n° 868 (2022-2023) de MM. Jean-Luc Fugit et Stéphane Piednoir, fait au nom de l'OPECST, « Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection », 11 juillet 2023.

* 66 Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur.

* 67 Article L. 512-20 du code de la consommation.

* 68 Article L. 125-37 du code de l'environnement.

* 69 Articles L. 365-1, L. 366-1, L367-1 du code de la recherche.

* 70 Articles L. 1411-5-1 et L. 1451-1 du code de la santé publique.

* 71 Avis du Conseil d'État n° 407671 sur un projet de loi relatif à l'organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire, 14 décembre 2023.

* 72  Avis présenté au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur le projet de loi de finances, Tome III.

* 73  Amendement n°II-635 au projet de loi de finances pour 2024.

* 74 Ordonnance n°2021-1325 du 13 octobre 2021 réformant l'évaluation des biotechnologies.

* 75 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 76 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 77 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 78 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

* 79 https://www.nrc.gov/about-nrc.html

* 80  Energy Reorganization Act 1974.

* 81  Atomic Energy Act 1954.

* 82 Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Organismes d'appui technique et scientifique aux fonctions réglementaires, Collection Documents techniques de l'AIEA, IAEA-TECDOC-1835, 2021, p. 7.

* 83 https://pris.iaea.org/PRIS/CountryStatistics/CountryDetails.aspx?current=US

* 84 https://www.nrc.gov/about-nrc.html

* 85 https://www.nrc.gov/reading-rm/doc-collections/nuregs/brochures/br0164/index.html

* 86 Code of Federal Regulations, Chapter I of Title 10, « Energy », Sections 2. 201 à 2. 206.

* 87 https://www.nrc.gov/about-nrc.html

* 88 NRC, The United States of America Ninth National Report for the Convention on Nuclear Safety, NUREG-1650, 2022, p. 86.

* 89 Ibid.

* 90 Ibid., pp. 89-90.

* 91 Ibid., p. 90.

* 92 https://www.nrc.gov/about-nrc/plans-performance.html

* 93 https://www.nrc.gov/docs/ML2307/ML23072A027.pdf

* 94 Ibid., p. 109.

* 95 Ibid.

* 96 https://www.nrc.gov/docs/ML1125/ML112510375.pdf

* 97  Code of Federal Regulations, Titre 10, partie 50.

* 98  Code of Federal Regulations, Titre 10, partie 52.

* 99 https://www.nrc.gov/reading-rm/doc-collections/fact-sheets/licensing-process-fs.html

* 100 Notamment les caractéristiques du site, telles que la population environnante, la sismologie, la météorologie, la géologie et l'hydrologie, la conception de la centrale nucléaire, la réponse prévue de la centrale à des accidents hypothétiques, les conditions d'exploitation de la centrale, y compris les qualifications techniques du demande, les rejets de la centrale dans l'environnement et les plans d'urgence.

* 101 https://www.nrc.gov/reading-rm/doc-collections/fact-sheets/licensing-process-fs.html

* 102 Ibid.

* 103 https://www.nrc.gov/about-nrc/organization/nrrfuncdesc.html

* 104 ASN, Fiche relative au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection aux États-Unis, mai 2023.

* 105 Ibid.

* 106 Voir l'exemple de la demande renouvellement de permis de la centrale Seabrook : https://www.nrc.gov/reactors/operating/licensing/renewal/applications/seabrook.html

* 107 https://www.nrc.gov/about-nrc/regulatory/advisory/acrs.html

* 108 https://www.nrc.gov/reading-rm/doc-collections/acrs/letters/index.html

* 109 https://www.nrc.gov/docs/ML2223/ML22235A651.pdf

* 110 https://www.nrc.gov/about-nrc/organization/resfuncdesc.html

* 111 ASN, op. cit.

* 112 https://www.nrc.gov/about-nrc/organization/resfuncdesc.html

* 113 ASN, op. cit.

* 114 Ibid.

* 115 https://www.nrc.gov/docs/ML1233/ML12335A261.pdf

* 116 https://www.nrc.gov/docs/ML2223/ML22235A651.pdf, p. 6.

* 117 NRC, The United States of America Ninth National Report for the Convention on Nuclear Safety, p. 51.

* 118 Ibid.

* 119 Ibid.

* 120 Pour plus d'informations sur le détail des mesures mises en oeuvre voir : https://www.nrc.gov/reactors/operating/ops-experience/fukushima.html et

https://www.nrc.gov/docs/ML1835/ML18355A806.pdf.

* 121 NRC, Strategic plan fiscal years 2022-2026, p. 9.

* 122 Ibid., p. 21.

* 123 https://www.federalregister.gov/documents/2023/03/03/2023-04102/renewing-nuclear-power-plant-operating-licenses-environmental-review

* 124 https://www.nrc.gov/docs/ML2329/ML23296A199.pdf

* 125 NRC, The United States of America Ninth National Report for the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 26.

* 126 https://www.nrc.gov/reactors/new-reactors/smr.html

* 127 GAO, Report to Congressional requesters, NRC Needs to Take Additional Actions to Prepare to LicenseAdvanced Reactors, juillet 2023.

* 128 Ibid.

* 129 Atomic Energy Basic Act (Act No. 186 of 1955, last version Act No. 155 of 2004).

* 130  Act for Establishment of the Nuclear Regulation Authority, Act No. 47 of June 27,2012.

* 131  Act on the Regulation of Nuclear Source Material, Nuclear Fuel Material and Reactors

* 132  Act on Prevention of Radiation Hazards due to Radioisotopes, Act No. 68 of 2014.

* 133 NRA, Leaflet, p. 5

* 134 https://cnpp.iaea.org/countryprofiles/Japan/Japan.htm

* 135 Conformément à l'article 5 de la loi fondamentale sur l'énergie atomique.

* 136 https://cnpp.iaea.org/countryprofiles/Japan/Japan.htm

* 137 Ibid.

* 138 AIEA, op. cit., p. 7.

* 139 http://www.aec.go.jp/jicst/NC/eng/index.htm

* 140 https://www.bousai.go.jp/en/about/index.html

* 141 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, 2022, Annexe D, p. 168.

* 142 Ibid., p. 4.

* 143 https://www.nra.go.jp/nra/gaiyou/idea.html

* 144 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, 2022, p. 53.

* 145 https://www.nra.go.jp/english/nuclearfacilities/index.html

* 146 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, 2022, p. 51.

* 147 NRA, Annual report Financial year 2021, p. 106.

* 148 ASN, Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection au Japon, mai 2023. Note transmise au rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 149 https://www.nra.go.jp/data/000067232.pdf

* 150 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 63.

* 151 Ibid.

* 152 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 47.

* 153 Ibid.

* 154 Ibid.

* 155 Ibid.

* 156 ASN, op. cit.

* 157 https://www.nra.go.jp/Selection/view_meeting.html

* 158 https://www.nra.go.jp/disclosure/committee/yuushikisya/tekigousei/power_plants/index.html

* 159 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 69.

* 160 Ibid.

* 161 ASN, Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection au Japon, mai 2023.

* 162 NRA, External Advisors Meeting, Function and Relationships that Regulator Expect for TSOs, 2023, p. 4.

* 163 NRA, 9th report on the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 52.

* 164 Ibid., p. 57.

* 165 https://www.nra.go.jp/activity/anzen/kikaku/index.html

* 166 https://www.jaea.go.jp/english/about/

* 167 NRA, External Advisors Meeting, Function and Relationships that Regulator Expect for TSOs, 2023, p. 5.

* 168 NRA, Annual report 2021, p. 3.

* 169 https://www.nra.go.jp/activity/anzen/bunya/index.html

* 170 ASN, op. cit.

* 171  Report from NAIIC (the National Diet's Fukushima Nuclear Accident Independent Investigation Commission), July 5, 2012.

* 172 NRA, Leaflet, p. 4.

* 173 https://www.iaea.org/newscenter/focus/fukushima/status-update

* 174 https://fukushima-updates.reconstruction.go.jp/en/faq/fk_230.html

* 175 METI, Overview of Strategic Energy Plan including Nuclear Energy, 2021.

* 176 Financial Times, Japan's nuclear restart hit by engineer and manufacturing capacity shortages, janvier 2023.

* 177 Ydinenergialaki, version disponible en anglais sur le site de STUK : Nuclear Energy Act 11.12.1987/990

* 178  Säteilylaki 9.11.2018/859

* 179 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, 2022, p. 48.

* 180 Ibid.

* 181 Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Organismes d'appui technique et scientifique aux fonctions réglementaires, Collection Documents techniques de l'AIEA, IAEA-TECDOC-1835, 2021, p. 7.

* 182 https://www.ensreg.eu/country-profile/Finland

* 183 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 48.

* 184 Ibid.

* 185 https://stuk.fi/en/stuk-s-finances-and-personnel-in-2022

* 186 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 51.

* 187 https://stuk.fi/en/stuk-s-finances-and-personnel-in-2022

* 188 https://stuk.fi/en/advisory-committees

* 189 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 51.

* 190 https://www.vttresearch.com/en/what-vtt

* 191 Ibid.

* 192 https://www.vttresearch.com/en/about-us/our-strategy-lead-path-exponential-hope-science-based-innovation

* 193 AIEA, op. cit., Annexe I.

* 194 https://www.vttresearch.com/en/ourservices/decommissioning-fir-1-nuclear-reactor

* 195 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 56.

* 196 Finland IRRS ARM Summary Report, 2022, p. 35

* 197 Ibid.

* 198 https://stuk.fi/en/licensing-of-nuclear-facilities

* 199 https://stuk.fi/en/before-construction

* 200 https://stuk.fi/en/before-construction

* 201 https://stuk.fi/en/construction

* 202 https://stuk.fi/en/operation

* 203 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 48.

* 204 https://stuk.fi/en/strategy

* 205 https://stuk.fi/en/stuk-s-finances-and-personnel-in-2022

* 206 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 51.

* 207 https://stuk.fi/en/licensing-of-nuclear-facilities

* 208 https://stuk.fi/ennen-ydinlaitoksen-rakentamista

* 209 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 51.

* 210 Ce projet, mené en collaboration avec l'entreprise russe Rosatom, a été interrompu en 2022 à la suite de l'agression russe en Ukraine. L'entreprise finlandais Fennovoima a retiré sa demande de permis. Voir : https://stuk.fi/en/hanhikivi-nuclear-power-plant-project

* 211 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 51.

* 212 Finland IRRS ARM Summary Report, 2022, p. 35

* 213 AIEA, op. cit., Annexe I.

* 214 https://stuk.fi/en/cores-finnish-consortium-of-radiation-safety-research

* 215 https://www.stuklex.fi/en/ls/19870990

* 216 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 51.

* 217 Ibid.

* 218 https://publications.vtt.fi/pdf/technology/2023/T414.pdf

* 219 Ibid., p. 8.

* 220 https://safer2028.fi/

* 221 STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 6.

* 222 Pour plus de détails, voir : STUK, Finnish 9th national report as referred to in Article 5 of the Convention on Nuclear Safety.

* 223 https://stuk.fi/en/small-modular-reactors

* 224 Ibid.

* 225 https://tem.fi/en/nuclear-energy-legislation

* 226 https://tem.fi/-/tyoryhma-ydinenergialainsaadannon-kokonaisuudistus-tarpeen?languageId=en_US

* 227 https://stuk.fi/en/-/stuk-assesses-the-safety-of-small-nuclear-power-plants-together-with-the-french-and-czech-authorities

* 228 https://stuk.fi/en/small-modular-reactors

* 229 ONR, The United Kingdom's Ninth National Report on Compliance with the Convention on Nuclear Safety, 2022, p. 54

* 230  Nuclear Installations Act 1965

* 231  Health and Safety at Work etc. Act 1974

* 232  Energy Act 2013

* 233 https://www.onr.org.uk/about.htm

* 234 Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Organismes d'appui technique et scientifique aux fonctions réglementaires, Collection Documents techniques de l'AIEA, IAEA-TECDOC-1835, 2021, p. 7.

* 235 ASN, Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en Grande-Bretagne, juin 2023. Note transmise au rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 236 Il n'existe aucune centrale nucléaire en Irlande du Nord.

* 237 https://pris.iaea.org/PRIS/CountryStatistics/CountryDetails.aspx?current=GB

* 238 https://www.gov.uk/government/publications/british-energy-security-strategy/british-energy-security-strategy#nuclear

* 239 HM Government, Powering up Britain : Energy security plan, 2023, p. 51

* 240 Articles 67 à 73.

* 241 Sur les sites de défense autorisés, l'ONR est uniquement responsable de l'application de la loi de 1974 sur la santé et la sécurité au travail, y compris les règlements de 2019 sur les radiations (préparation aux situations d'urgence et information du public) et les règlements de 2017 sur les rayonnements ionisants.

* 242 https://www.onr.org.uk/aims-and-objectives.htm

* 243 ONR, The United Kingdom's Ninth National Report on Compliance with the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 75.

* 244 https://www.ukhsa-protectionservices.org.uk/

* 245 Avner Cohen and Brandon Mok, Nuclear Governance and Legislation in Four Nuclear-Armed Democracies: A Comparative Study, 2017, p. 11.

* 246 https://cnpp.iaea.org/countryprofiles/UnitedKingdom/UnitedKingdom.htm

* 247 https://assets.publishing.service.gov.uk/media/5a7b0d1f40f0b66a2fc04cb8/onr_ia.pdf

* 248 HM Government, How we regulate radiological and civil nuclear safety in the UK, 2021, p. 26.

* 249 https://www.onr.org.uk/organisational-structure.htm

* 250 https://www.onr.org.uk/onr-board.htm

* 251 https://news.onr.org.uk/2019/04/chief-nuclear-inspectors-independent-advisory-panel/

* 252 https://www.onr.org.uk/external-panels/index.htm

* 253 https://www.onr.org.uk/organisational-structure.htm

* 254  ONR Annual Report and Accounts 2022/23.

* 255 ONR, The United Kingdom's Ninth National Report on Compliance with the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 92.

* 256 https://www.onr.org.uk/stakeholders/index.htm

* 257 https://www.onr.org.uk/new-reactors/index.htm

* 258 https://www.onr.org.uk/licensing.htm

* 259 ONR, Licensing nuclear installations, 2021, p.48.

* 260 Ibid., p. 38.

* 261 https://www.onr.org.uk/civil-nuclear-reactors/licensing.htm

* 262 Ces domaines sont listés ici : https://www.onr.org.uk/our-specialists.htm (électricité, contrôle et instrumentation, chimie et génie chimique, génie civil et risques externes, risques nucléaires internes et sûreté des sites, génie mécanique, radioprotection et criticité etc.).

* 263 ASN, op. cit.

* 264 Ibid.

* 265 Voir par exemple : https://news.onr.org.uk/inspection-records/

* 266 https://www.onr.org.uk/technical-division.htm

* 267 Soit environ 2,9 millions d'euros. ONR Annual Report and Accounts 2022/23.

* 268 https://www.onr.org.uk/stakeholders/index.htm

* 269 ONR, Regulatory Research Strategy, 2019, p. 3.

* 270 Ibid.

* 271 https://news.onr.org.uk/2022/11/new-technical-services-framework/

* 272 https://www.onr.org.uk/selling-to-onr/contracts.htm

* 273 https://www.jacobs.com/about

* 274 https://www.etson.eu/members

* 275 Il avait été présenté à l'AIEA dès 2009. Voir ONR, HM Chief Inspector of Nuclear Installations, Japanese earthquake and tsunami: Implications for the UK nuclear industry Final Report, 2022, p. 10

* 276 ONR, HM Chief Inspector of Nuclear Installations, op. cit., p. 12

* 277 Ibid., p. 1.

* 278 ONR, The United Kingdom's Ninth National Report on Compliance with the Convention on Nuclear Safety, op. cit., p. 60.

* 279 Ibid., p. 220.

* 280 https://www.onr.org.uk/advanced-nuclear-technologies/index.htm

* 281 Ibid.

* 282 https://www.gov.uk/government/news/small-modular-reactor-design-completes-first-step-of-assessment

* 283 https://www.onr.org.uk/climate-change/index.htm

* 284 Ibid.

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