SÉANCE

du mardi 8 juillet 2025

4e séance de la session extraordinaire 2024-2025

Présidence de M. Alain Marc, vice-président

Secrétaires : Mme Catherine Conconne, Mme Sonia de La Provôté.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Réutilisation de matériel médical

Mme Audrey Linkenheld .  - Un tiers des aides techniques médicales telles que béquilles et déambulateurs est abandonné après une courte utilisation. Résultat : 60 000 tonnes de déchets, alors que ces matériels pourraient être réutilisés.

Des expérimentations pour développer un marché de la seconde main ont été menées, à l'instar de la recyclerie Libel'Up dans les Hauts-de-France.

Après une longue attente, un décret a enfin été pris le 17 mars 2025, en application de l'article 39 de la LFSS pour 2020 ; c'est là une avancée majeure, que je salue.

Toutefois, ce décret est incomplet : il ne réserve le remboursement qu'à une liste limitée de matériels médicaux. Ensuite, cette liste n'est pas encore publiée et le remboursement prévu ne serait que progressif. Or, pour tendre vers un modèle de santé plus inclusif et plus responsable, il est essentiel d'élargir la prise en charge à l'ensemble des dispositifs médicaux réemployables.

Quand le remboursement intégral du matériel médical reconditionné sera-t-il mis en oeuvre ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Avant tout, je souhaiterais évoquer le souvenir d'Olivier Marleix, député d'Eure-et-Loir et président du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale de 2022 à 2024 ; nous partageons la peine de sa famille.

Cinq ans ont été nécessaires pour publier le décret, car il a fallu saisir la Commission européenne, mettre en place une norme spécifique et échanger avec la Cnil sur la traçabilité des dispositifs médicaux.

À la suite de la publication, l'adoption de textes complémentaires est nécessaire. Les travaux sont bien avancés ; les concertations ont montré des positions parfois divergentes entre les professionnels du secteur. Nous indiquerons prochainement aux acteurs concernés la liste des produits retenus. Un arrêté devra rendre d'application obligatoire la norme NF S97-414. La liste des produits et prestations remboursables doit être modifiée ; la Haute Autorité de santé (HAS) doit émettre un avis et le Comité économique des produits de santé (CEPS) doit élaborer une tarification.

Des réflexions ont déjà été menées : une prise en charge des premiers produits issus de cette filière est prévue en 2025 ; des travaux complémentaires devront être menés en 2026 pour d'autres catégories.

Mme Audrey Linkenheld.  - Merci pour ces explications. Mais nous attendons le remboursement total de ces produits : c'est bon pour nos concitoyens, notamment les plus défavorisés d'entre eux, mais aussi pour la planète.

M. le président.  - Madame la ministre, merci pour vos paroles à l'égard d'Olivier Marleix, que je connaissais très bien. Nous partageons nous aussi cette émotion.

Gestion des Dasri

M. Pascal Martin .  - L'ensemble de la réglementation et des recommandations de bonnes pratiques applicables au tri des déchets d'activités de soins à risques infectieux (Dasri) sont répertoriées dans le guide Dasri, que la direction générale de la santé (DGS) est en train d'actualiser.

Les Dasri, qui bénéficient du statut de déchets dangereux, relèvent également de la réglementation européenne au titre du principe de précaution.

Avant même tout changement de réglementation, de nombreux professionnels constatent le déclassement d'un grand nombre de ces déchets et leur réorientation vers la filière des déchets non dangereux. D'où une complexification du geste de tri pour les professionnels de santé déjà particulièrement sous pression, et un risque important pour les opérateurs chargés de la collecte et du tri.

Des accidents ont déjà été recensés ; le déclassement en cours pourrait multiplier leur nombre à l'avenir.

La responsabilité des professionnels de santé pourrait-elle être engagée ? Quelles mesures compte prendre le Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Il s'agit d'un enjeu crucial de santé publique, tant pour la sécurité des professionnels de santé que pour celle des opérateurs de collecte, mais aussi pour la population et l'environnement.

En 2022, la DGS a engagé une révision complète du guide national, qui datait de 2009. Ce nouveau guide, fruit d'un travail collaboratif, se veut à la fois pédagogique et rigoureux ; il sera publié très prochainement.

Conformément au code de la santé publique et au code de l'environnement, l'évaluation du risque infectieux repose sur le producteur du déchet. Ce principe, ancien, ne sera pas remis en cause, car celui-ci est le plus apte à apprécier sa dangerosité, en fonction du contexte.

Les professionnels de santé ne sont pas pour autant isolés. Le guide fournit des critères objectifs et des exemples. En cas de doute, la règle est claire : le déchet doit être orienté vers la filière Dasri. Des formations de terrain seront organisées avec l'appui des ARS. La sécurité des professionnels et de l'ensemble de la chaîne de gestion des déchets reste notre priorité.

M. Pascal Martin.  - Merci pour votre réponse. Les professionnels de santé attendent avec impatience la publication du guide.

Fermeture des urgences de nuit de l'hôpital de Magny-en-Vexin

M. Rachid Temal .  - Au nom du groupe SER, je souhaite rendre hommage à Olivier Marleix ; j'adresse toutes nos condoléances à ses proches et à sa famille politique.

La fermeture des urgences de l'hôpital de Magny-en-Vexin, à compter du 1er janvier 2026, est une décision inique. Les élus et la population ont découvert cette décision dans la presse : il n'y a eu ni information du conseil de surveillance ni échange avec la communauté médicale et les habitants.

L'annonce de cette fermeture, qui suscite l'opposition des élus, toutes tendances politiques confondues, est source d'inquiétude : pour les habitants de ce secteur rural ; pour l'avenir même de l'hôpital -  le Gouvernement a d'ailleurs abandonné le projet de reconstruction ; pour les médecins, alors que cette partie du département est, plus qu'ailleurs, un désert médical.

L'hôpital est malade, mais cette décision renforce le sentiment d'abandon ressenti par la population : une fois encore, un service public va fermer. Or je m'étais battu pour obtenir la construction d'un nouveau lycée, en vue de relancer ce secteur du Val-d'Oise.

Nous souhaitons le maintien de ce service d'urgences de nuit au-delà du 1er janvier 2026 ! Désormais, il revient à l'État d'intervenir.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Aucun projet de fermeture des urgences de nuit de Magny-en-Vexin n'a été validé. L'ARS d'Île-de-France n'a reçu aucune demande officielle de la part de l'hôpital Novo, qui envisage, il est vrai, une évolution du service ; il s'agit toutefois d'une réflexion interne.

Toute évolution de l'activité d'urgence doit faire l'objet d'une autorisation formelle de l'ARS, conformément au décret du 29 décembre 2023. Cette instruction ne saurait se faire sans une concertation complète avec les élus du territoire. Il est absolument essentiel de maintenir ce lien de confiance et de ne jamais confondre le calendrier interne d'un établissement avec la décision et l'autorisation publiques.

L'hôpital Novo, avec ses cinq sites, est un maillon indispensable pour le Val-d'Oise. Le ministre Neuder veillera personnellement à ce que chaque projet d'évolution respecte les règles, mais aussi les habitants et les élus. À sa demande, le directeur de l'ARS Île-de-France recevra prochainement le maire de Magny-en-Vexin.

Nous devons construire ensemble des réponses adaptées, pérennes et respectueuses des réalités locales.

Déploiement de traitements innovants contre les opioïdes

Mme Marion Canalès .  - La France est le sixième pays le plus menacé par le risque de crise des opioïdes.

Les buprénorphines d'action prolongée (BAP), comme le Buvidal, sont un traitement de nouvelle génération de substitution aux opiacés ; la commission des affaires sociales mène actuellement une mission flash à ce sujet.

La fréquence d'injection des BAP par un médecin est mensuelle, et non plus quotidienne. Ainsi, 300 décès et plus de 5 000 hospitalisations seraient évitées chaque année. Les études sont très encourageantes, mais les échantillons de patients beaucoup trop faibles : 700 personnes uniquement sur les 180 000 qui prennent aujourd'hui des traitements de substitution aux opiacés.

Les financements manquent : seule une enveloppe de 8 millions d'euros a été ouverte et répartie entre huit régions. Certaines parties du territoire ne bénéficient donc pas de ce traitement avant-gardiste.

Le Gouvernement compte-t-il instaurer un financement pérenne et équitable sur l'ensemble du territoire national ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Vous mettez le doigt sur une vérité dérangeante : la dépendance aux opioïdes progresse en France et, avec elle, l'incapacité de notre système à offrir des réponses à la hauteur de la crise.

Il ne s'agit pas simplement d'un problème de médicaments, mais d'une problématique complexe et multifactorielle. D'où le lancement en mars 2023 d'une stratégie interministérielle sur les conduites addictives fondée sur trois piliers : prévention, prise en charge et réduction des risques et dommages.

Vous avez raison de souligner le potentiel du Buvidal. Dès l'an dernier, les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) volontaires ont reçu une première enveloppe d'un million d'euros.

Nous sommes toutefois lucides : cette première étape ne permet pas de répondre à l'ensemble des besoins. Des réflexions sont en cours dans le cadre des arbitrages budgétaires.

Ce traitement et, plus largement, la lutte contre les addictions, ne doivent pas rester les angles morts de notre politique de santé. L'équité d'accès aux soins n'est pas négociable.

Mme Marion Canalès.  - Merci d'avoir reconnu l'inéquité d'accès aux soins pour les personnes dépendantes aux opioïdes. Il faut que tous les usagers bénéficient d'un traitement égal, quelle que soit leur région.

Signature de la COG 2025-2028

Mme Brigitte Devésa .  - La dernière convention d'objectifs et de gestion (COG) liant l'État à la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) est arrivée à échéance le 31 décembre dernier. D'où un climat d'incertitude particulièrement préoccupant dans les anciens bassins miniers, où la CANSSM assure une mission de service public de santé irremplaçable.

Cette vacance compromet les relations avec la Cnam, bloque les investissements, freine les actions de prévention et accentue les difficultés de recrutement dans des territoires déjà fragilisés. Je relaie donc les inquiétudes du syndicat CGT des mineurs, qui rappelle le rôle historique de ce régime, héritier d'un modèle fondé sur la solidarité ouvrière et qui ne saurait être abandonné par manque d'initiative.

Le Gouvernement compte-t-il autoriser la signature d'une nouvelle COG dans les meilleurs délais, afin de garantir la continuité et la qualité des soins rendus aux assurés ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Fin 2024, les services du ministère ont indiqué au conseil d'administration de la CANSSM qu'une nouvelle convention serait négociée. Les échanges entre services se poursuivent. Il n'est pas inhabituel que les négociations se prolongent ; cette situation s'est déjà produite pour la caisse en 2021.

Un projet de convention pour la période 2025-2027 devrait être soumis au conseil d'administration de la caisse à la fin de l'année. Il prendra en compte les travaux de rapprochement entre l'offre de santé et médico-sociale de Filieris et celle de l'Union de gestion des établissements de caisse de l'assurance maladie (Ugecam).

Je tiens à vous rassurer : cette situation est temporaire. La continuité de service de la CANSSM est assurée grâce à des budgets provisoires pour 2025, approuvés par le conseil d'administration fin 2024.

Mme Brigitte Devésa.  - Merci pour vos propos rassurants, que je transmettrai. J'espère que les revendications des syndicats seront respectées dans la nouvelle COG, que nous attendons avec impatience.

Réforme des SAD et difficultés des Ssiad

Mme Corinne Imbert .  - Je remercie M. Rachid Temal, ainsi que son groupe, de l'hommage à Olivier Marleix.

La réforme des services autonomie à domicile (SAD) pose des difficultés juridiques et techniques. Ainsi, le centre communal d'action sociale (CCAS) de La Rochelle dispose d'une autorisation de services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) - le seul du groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS) de l'agglomération rochelaise - et de services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad), mise en commun dans le cadre du GCSMS.

Or ce dernier ne peut pas constituer l'entité juridique unique prévue dans la réforme. Le gestionnaire porteur du Ssiad doit donc se retirer pour conserver l'autorisation aide et soins. L'Ehpad de Saint-Savinien-sur-Charente et l'association Tremä connaissent également des difficultés.

Est-il envisagé de repousser le délai fixé au 31 décembre prochain ou de rendre cette réforme facultative ? J'avais défendu un amendement en ce sens lors de l'examen de la proposition de loi Bien vieillir.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - La grande réforme du service à domicile, lancée en 2022, impose aux services de l'aide et du soin de se rapprocher pour former les SAD mixtes, notamment au sein d'un GCSMS, si les territoires d'intervention sont identiques. Dans le cas évoqué, la préexistence du GCSMS ne semble pas aller à l'encontre du principe d'entité juridique unique.

Le ministère est sensible aux remarques venant des territoires. Des assouplissements ont donc été prévus dans la loi Bien vieillir et un plan d'accompagnement est mis en place depuis 2023. Ainsi, selon la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), 85 % des Ssiad sont en cours de rapprochement.

Reste que des difficultés subsistent. Ma collègue Charlotte Parmentier-Lecoq a donc mis en place une task force nationale réunissant le ministère, la CNSA et l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, pour trouver des solutions ; son cabinet a également reçu les fédérations du domicile, le 24 juin.

Mme Corinne Imbert.  - Je suis favorable à la simplification, mais ces rapprochements sont parfois problématiques et coûteux ; c'est pourquoi j'ai proposé l'abandon du caractère obligatoire de cette réforme.

Arrêtés relatifs à l'exposition au radon dans les grottes touristiques

Mme Maryse Carrère .  - Dans les Hautes-Pyrénées, les grottes, gouffres et autres lieux souterrains sont un levier du tourisme local, alors que le tourisme souterrain français est le troisième mondial avec plus de 6 millions de visiteurs annuels. Or les arrêtés ministériels des 16 novembre 2023 et 15 mai 2024 triplent voire quadruplent le coefficient de dose appliqué aux guides, réduisant drastiquement leur temps de travail autorisé en cavité. À terme, près de la moitié des 120 grottes touristiques du pays pourraient fermer.

La Fédération du tourisme et du patrimoine souterrain (FFTS) déplore ces mesures prises avant la fin des études scientifiques en cours. En outre, aucun autre État membre de l'Union européenne n'a encore transposé ces recommandations.

Quel est l'état d'avancement de l'étude sur le comportement du radon dans les grottes touristiques lancée en 2022 avec la direction générale du travail ? Quelles mesures comptez-vous mettre en place ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Le radon, gaz naturel radioactif, se dilue rapidement dans l'air extérieur, mais s'accumule dans l'air intérieur - jusqu'à plusieurs milliers de becquerels par mètre cube dans les grottes. Au-delà d'une dose d'exposition de 6 millisieverts par an, l'employeur doit mettre en oeuvre une démarche de prévention renforcée. L'arrêté du 16 novembre 2023 prévoit deux coefficients de doses, trois et six, établis en fonction de l'activité physique par la Commission internationale de protection radiologique, l'autorité scientifique de référence citée par la directive Euratom, et qui valent pour tout lieu de travail.

Selon le code du travail, les employeurs dans les grottes touristiques apprécient librement de recourir au coefficient de six et l'arrêté du 30 juin 2021 les autorise à ne pas recourir à ces coefficients théoriques au profit de méthodes alternatives, notamment le mesurage de l'énergie dégagée par le radon.

La FFTS est régulièrement informée de l'avancée des travaux, en voie de finalisation, et le rapport lui sera présenté comme le Gouvernement s'y est engagé. La priorité reste la protection de la santé des travailleurs. Je vous propose d'évoquer cette question lors d'un rendez-vous.

Modernisation du groupement hospitalier Novo

M. Daniel Fargeot .  - Le 27 mai 2021, le Premier ministre Jean Castex annonçait une enveloppe de 500 millions d'euros pour la modernisation du groupement hospitalier Novo implanté sur trois sites, Pontoise, Beaumont-sur-Oise, Magny-en-Vexin.

Ce programme, très attendu, prévoit la construction d'un plateau médico-technique à Pontoise et la réhabilitation complète des hôpitaux de Beaumont-sur-Oise et de Magny-en-Vexin, alors que le Val-d'Oise est le seul département francilien ne disposant pas de CHU. Il garantirait une offre de soins de qualité, renforcerait l'attractivité des établissements et amorcerait l'universitarisation de l'hôpital de Pontoise.

Mais quatre ans après, rien de concret. Les inquiétudes sont vives en raison de la succession des ministres de la santé, des incertitudes budgétaires et de l'annonce de la fermeture des urgences de nuit de Magny-en-Vexin, nouveau signal de déclin d'un service public en territoire rural.

Quel est l'état d'avancement du projet ? Les crédits nécessaires sont-ils bien sécurisés ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - Ce projet bénéficie d'un soutien renforcé et a fait l'objet de plusieurs phasages pour en assurer la soutenabilité financière.

En décembre 2023, la transmission d'un dossier aux experts du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) a permis de prioriser un scénario cible ; les experts ont aussi émis un avis favorable sur ses volets médical, capacitaire et immobilier.

Le nouveau phasage a réduit le montant des opérations prioritaires pour la période 2024-2031 à 449 millions d'euros. L'hôpital Novo a travaillé avec l'ARS sur une trajectoire financière pluriannuelle et trois opérations ont été priorisées : la problématique logistique et technique du site de Pontoise ; le regroupement des capacités de service médical rendu spécialisées sur le site de Pontoise ; enfin, le renforcement du confort hôtelier.

Les moyens mobilisés par l'ARS sont suffisants pour le volet investissement. L'établissement est engagé dans un plan d'efficience pour sa trajectoire d'exploitation.

M. Daniel Fargeot.  - Toute évolution, notamment concernant les urgences de nuit de Magny-en-Vexin, ne peut se faire sans justification ni concertation loyale avec les élus et professionnels de santé. Le lien de confiance en dépend.

Avenir de l'Institut mutualiste Montsouris

M. Ian Brossat .  - Le droit à la santé est un droit fondamental. Depuis vingt-cinq ans, l'Institut mutualiste Montsouris (IMM), hôpital privé à but non lucratif du 14e arrondissement de Paris, qui rayonne sur les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne, soigne des dizaines de milliers de patientes et patients par an, en secteur 1, sans dépassement d'honoraires, notamment en chirurgie cardiaque, en cancérologie ou en santé mentale des adolescents.

Mais, en janvier dernier, l'IMM s'est déclaré en cessation de paiement. Or l'aide financière exceptionnelle prévue dans la loi de finances pour 2024 n'a toujours pas été versée, mettant en péril les 485 lits, les 1 700 emplois et l'accès aux soins des Parisiennes et des Parisiens. D'autres centres de santé, comme celui de Réaumur, ont des difficultés. La Ville de Paris soutient les centres de santé municipaux, facilite l'installation des médecins avec Paris Med', mais ne peut, à elle seule, enrayer la dégradation de l'offre de soins.

Que compte faire le Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi .  - L'IMM rayonne depuis plus de vingt-cinq ans ; j'y suis née !

En janvier dernier, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à la suite d'un défaut de paiement lié à l'absence de transformation structurelle durable. Depuis 2015, l'État soutient l'établissement : 16 millions d'euros d'aides en trésorerie, 2,2 millions d'euros de crédits exceptionnels, 41 millions d'euros de garanties de financement, près de 38 millions d'euros via les crédits régionaux pour accompagner différents projets.

Cinq offres de reprises ont été déposées avant le 16 mai dernier et sont en cours d'analyse par l'administrateur judiciaire. La procédure est suivie de très près par l'ARS d'Île-de-France. Le calendrier de désignation d'un repreneur est en cours de montage et l'État reste pleinement mobilisé. Je souhaite préserver des soins de très haut niveau, accessibles à tous, dans un cadre où les professionnels de santé de l'IMM exerceraient dans des conditions pérennes et sécurisées. Le ministre Yannick Neuder suit personnellement cette procédure.

M. Ian Brossat.  - Que vous y soyez née est un signe positif ! Vous connaissez donc son importance. Nous nous mobiliserons et j'espère que l'État sera au rendez-vous.

Maillage territorial des Inspé

M. Michel Masset .  - L'université de Bordeaux est en discussion avec le rectorat pour appliquer la réforme de la formation des enseignants à la rentrée 2025. Le Gouvernement voulait mettre en place de nouvelles licences sur tout le territoire et, monsieur le ministre, vous faisiez de l'ancrage territorial des universités, un élément clé de nos réussites collectives.

J'ai donc été ému d'apprendre que les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé) d'Agen et de Périgueux risquaient de perdre une partie de leur offre de formation au profit de Bordeaux et de Pau ; nos sites ruraux ne conserveraient que les formations en master. Or les étudiants en licence restent souvent sur le même site d'enseignement pour leur master.

Il faut mettre en cohérence les offres de formation et les besoins du territoire comme le Sénat l'a fait en supprimant le numerus clausus pour les études de médecine. Alors que les effectifs des Inspé baissent, l'éloignement des formations est un facteur aggravant dans nos territoires ruraux.

Soutenez-vous l'ouverture de nouvelles licences sur l'ensemble du territoire, notamment en garantissant aux universités les moyens nécessaires ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Vous soulignez l'intérêt de la présence des Inspé dans les territoires pour favoriser l'attractivité du métier d'enseignant, j'y souscris.

Avec la ministre d'État, nous souhaitons que les jeunes puissent passer les concours et exercer au plus près de leur lieu de formation. Les 32 Inspé nationaux assurent une maille assez fine que nous voulons conserver pour que les lauréats bénéficient de lieux de formation adaptés aux lieux de stage, plus nombreux à l'avenir. Les Inspé dépendent de leur université de rattachement, leurs bâtiments sont souvent mis à disposition par des collectivités et la gestion des sites s'inscrit dans la politique immobilière de l'université que l'État expertise dans le cadre d'un schéma pluriannuel de stratégie immobilière.

Mon ministère n'est aucunement engagé dans l'étude d'un regroupement des sites d'Inspé d'Agen et de Périgueux ; cela ne relève pas de notre compétence directe.

Je suis très attentif à cette question. Il est fondamental de proposer des formations en licence dans les territoires, nous avons besoin de la mobilisation des élus et des collectivités.

M. Michel Masset.  - Merci de votre soutien, plein et entier.

Logiciels de vie scolaire

Mme Laurence Rossignol .  - Le consensus scientifique atteste des risques de l'exposition aux écrans pour la santé physique et mentale des enfants et des adolescents.

Or nous leur imposons des outils numériques - Pronote, Educartable, ou encore Papillon. Utilisés pour communiquer les notes en direct, ils sont source de stress pour les élèves qui reçoivent la note brute, sans commentaire, et n'en discutent plus avec leurs parents. Utilisés comme cahier de textes, ils dispensent de noter les devoirs en classe - ce qui, soit dit sans être une « boomeuse », aide à assimiler, et permet d'interroger le professeur sur la consigne.

Ces outils sont également intrusifs pour les enseignants : outre la charge de travail supplémentaire, cela les expose à être sollicités par les parents.

Bref, ils ne sont bons pour personne. Ils servent même de prétexte pour les enfants : « Que fais-tu sur ton téléphone ? - Maman, je suis sur Pronote. » Que dire ? (Sourires)

Le Gouvernement a-t-il l'intention de garantir le droit à la déconnexion des enfants, des parents et des enseignants ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Le rapport commandé en 2024 par le Président de la République met en garde sur les répercussions d'un usage incontrôlé des écrans.

La ministre d'État Elisabeth Borne a saisi l'inspection générale de l'enseignement supérieur et de la recherche début 2025, et envisage de revoir la circulaire de 2010 imposant le déploiement d'un cahier de textes numérique.

Le numérique à l'école doit être encadré afin de prévenir les usages inappropriés, protéger les élèves et contribuer à un climat scolaire serein. Pour éviter le stress causé par ces logiciels, voici la chronologie attendue des professeurs : d'abord, remise de sa copie à l'élève pour qu'il comprenne sa note, puis affichage des notes dans les outils et, en dernier lieu, communication de la note aux parents, après un délai.

Vous évoquez le droit à la déconnexion : c'est le sens de la suspension des mises à jour des logiciels scolaires de 20 heures à 7 heures, et de l'interdiction du téléphone portable au collège dès la rentrée prochaine. Le ministère promeut un cadre d'usage équilibré, prenant en compte les déterminants sanitaires et pédagogiques.

Mme Laurence Rossignol.  - Nous partageons les mêmes constats. Mais vous, vous pouvez mettre fin à ces systèmes intrusifs. Moi, pas.

Prise en charge des AESH sur le temps méridien

Mme Marie-Claude Lermytte .  - Selon les retours de terrain, l'État refuse ou tarde à prendre en charge la rémunération des accompagnants des élèves en situation de handicap, les AESH, sur le temps de pause méridienne, comme l'a pourtant prévu le législateur. Les collectivités se retrouvent contraintes de pallier ces manquements, alors que leurs finances sont déjà fragilisées.

Pour ajouter à la confusion, une note de service du 4 juin 2025 est venue contredire l'esprit de la loi en abrogeant la note du 24 juillet 2024, qui encadrait sa mise en oeuvre. C'est un retour en arrière.

À l'approche de la rentrée scolaire, cette situation inquiète les familles, les AESH, les équipes éducatives, mais aussi les collectivités. Pourquoi le ministère a-t-il abrogé cette note de service ? Comment rétablir la confiance et sécuriser juridiquement et financièrement la présence des AESH sur le temps méridien, afin de permettre à chaque enfant en situation de handicap d'être accueilli et accompagné ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - L'école inclusive représente la promesse tenue de la loi de 2005. À la rentrée dernière, 520 000 élèves en situation de handicap étaient scolarisés ; 340 000 d'entre eux sont accompagnés par une aide humaine, 8 % de plus qu'en 2024 et 90 % de plus qu'en 2013.

La loi Vial de 2024 prévoit désormais la prise en charge par l'État de la rémunération des AESH sur la pause méridienne. Au 31 décembre 2024, 7 700 élèves étaient accompagnés ; trois mois plus tard, ils étaient 8 600.

Le décret d'application précise les conditions de recrutement et d'emploi des AESH. L'État, pleinement employeur, assume toutes ses obligations. Toutefois, une coordination avec les collectivités est nécessaire à la bonne intervention des AESH. Chaque situation est donc traitée au cas par cas, en intelligence avec les collectivités et les services déconcentrés du ministère. Une foire aux questions a été mise en place. Enfin, des dispositifs de suivi et d'évaluation sont envisagés à l'échelon académique, en lien avec les services de l'école inclusive du ministère.

Mme Marie-Claude Lermytte.  - Les petites communes rurales ont besoin de savoir dès maintenant comment elles s'organiseront à la rentrée...

Fermetures de classes en zone rurale

Mme Monique de Marco .  - En Gironde, à la rentrée 2025, 105 classes de maternelle et de primaire fermeront. À l'échelle nationale, on prévoit 470 suppressions de postes dans le premier degré, soit près de 5 000 fermetures de classes.

Nos territoires ruraux sont les premières victimes. Malgré la baisse démographique, ce choix est incompréhensible, alors que la France compte en moyenne 18 élèves par enseignant, contre 13 à l'échelle européenne dans le premier degré.

Ces suppressions ont des répercussions sur les élèves - temps de trajet allongé, impact sur la réussite scolaire - et sur la vie locale, car l'école est aussi un lieu de cohésion sociale.

Il faut adapter les politiques éducatives aux réalités des zones rurales pour assurer l'égalité des chances. L'école de la République doit être un outil d'émancipation, quels que soient l'origine sociale ou le territoire de l'élève. Or les jeunes ruraux n'ont même pas les mêmes chances de réussite : leur taux de non-poursuite d'études est de 23,6 %, contre 15 % en moyenne nationale.

Comment stopper cette hémorragie qui transforme nos campagnes en déserts scolaires ? Que répondez-vous aux élus locaux qui demandent un moratoire sur les fermetures de classes ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Les moyens en emplois pour la rentrée 2025 ont été améliorés par rapport à la copie initiale du projet de loi de finances. Nous avons maintenu des postes menacés et recruté 2 000 AESH supplémentaires.

Mais on ne peut ignorer la démographie : moins 93 000 élèves pour le primaire à la rentrée prochaine. La fermeture de certaines classes se traduit par une amélioration du taux d'encadrement, à 21 élèves par classe.

La Gironde perd 1 700 élèves dans le premier degré. Si une centaine de classes ferment, cinquante ouvriront, en plus des trente postes supplémentaires affectés aux brigades de remplacement. Le nombre moyen d'élèves par classe restera donc stable, grâce au dialogue entre les collectivités et les services déconcentrés du ministère, permis par les observatoires des dynamiques rurales lancés par Élisabeth Borne, alors Première ministre. La récente tenue du comité interministériel aux ruralités témoigne de l'attention portée aux territoires ruraux.

Outre les territoires éducatifs ruraux, la Gironde compte trois cités éducatives et cinq internats d'excellence ruraux. Ces dispositifs favorisent un accès équitable à l'éducation partout sur le territoire.

Enseignants contractuels et droit à la mobilité pour les titulaires

Mme Evelyne Corbière Naminzo .  - Le recours croissant aux contractuels dans l'éducation nationale depuis les années 2000 traduit la volonté politique de les faire coexister avec les titulaires, sur les mêmes missions. C'est l'objet de la loi de transformation de la fonction publique d'août 2019.

Or cette flexibilisation n'a pas réussi à endiguer la crise de recrutement, ni à assurer le remplacement des absents. Si la formation initiale et le concours sont gage de liberté pédagogique, la contractualisation vise à réduire les coûts et à casser le cadre statutaire des enseignants. L'emploi statutaire permet pourtant une meilleure adaptation aux besoins, les lauréats aux concours nationaux étant tenus d'exercer, parfois très longtemps, loin du lieu de vie auquel ils aspirent. La précarisation ne répond donc en rien à l'intérêt général - tout en remettant en cause le droit à la mobilité des titulaires.

Je souhaiterais connaître la part de contractuels enseignants, par type de contrat - CDD ou CDI, par degré, par académie et par discipline.

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - La fonction publique d'État est confrontée, selon un rapport de France Stratégie de 2024, à un réel « défi d'attractivité ». L'éducation nationale n'est pas en reste - c'est pourquoi la ministre a lancé une refonte du recrutement et de la formation des professeurs. Toutefois, le recours aux contractuels n'y est que de 2 % dans le premier degré et 10 % dans le second, contre 20 % en moyenne dans d'autres pans de la fonction publique. Les titulaires garantissent la continuité des enseignements dans certains territoires ou certaines disciplines.

Des progrès notables ont été réalisés afin d'accompagner les contractuels vers la réussite au concours. Une attention particulière est portée à leur formation pour garantir leur liberté pédagogique.

Nous devons trouver un équilibre entre fidélisation des contractuels et respect des droits des fonctionnaires. La direction générale des ressources humaines du ministère a demandé aux recteurs de veiller à ce que les modalités d'affectation ne conduisent pas à privilégier les choix des contractuels par rapport à ceux des titulaires - qui doivent avoir priorité lorsqu'ils font valoir leur droit à la mobilité.

Mme Evelyne Corbière Naminzo.  - À La Réunion, les lauréats des concours nationaux renoncent au bénéfice de leur réussite pour postuler en tant que contractuels ! C'est scandaleux ! Il faut garantir aux titulaires le bénéfice du droit à la mobilité.

Régime de décharge des directrices et directeurs d'école

M. Jean-Marc Delia .  - Malgré les signalements de la Cour des comptes et les attentes du terrain, une disparité territoriale persiste en matière de décharge des directrices et directeurs d'école.

Si des efforts sont consentis depuis plusieurs années pour alléger leur charge, notamment dans les petites structures, un régime dérogatoire, plus favorable, est mis en oeuvre à Paris, ce qui contrevient au principe d'égalité de traitement des agents publics, comme la Cour des comptes l'a souligné dans son référé du 16 septembre dernier. Le 18 mars, un moratoire a été annoncé sur les suppressions de décharges pour la prochaine rentrée : le ministère a donc gelé la réforme, mais sans poser les bases d'une harmonisation équitable.

Surcharge administrative, manque de reconnaissance, isolement : telle est la réalité du métier de directrice et directeur d'école. Or les inspections montrent que les personnels de direction parisiens, mieux déchargés, sont davantage disponibles pour le pilotage pédagogique, les relations avec les familles et la coordination de l'équipe.

La Cour des comptes recommande la création d'une fonction de directeur d'école à temps plein, comme dans plusieurs pays européens. Allez-vous engager une réforme structurelle pour garantir à tous les élèves, où qu'ils vivent, un encadrement de qualité ?

M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Les directrices et directeurs d'école ont une fonction cruciale, à la fois pédagogique, administrative et humaine.

Le ministère a entrepris d'améliorer leur régime de décharge. Les dernières évolutions ont eu lieu en 2021 et au début de cette année : les décharges de direction sont passées de plus de 11 000 à près de 14 000.

S'agissant du référé de la Cour des comptes, la ministre d'État a demandé à la rectrice de Paris et au secrétaire général du ministère de lancer une concertation avec la Ville de Paris pour établir un régime conforme à la réglementation.

La Cour des comptes invite également à ouvrir une réflexion globale sur le réseau scolaire, afin de mieux accompagner tous les personnels. Des groupes de travail seront mis en place pour étudier les modalités d'organisation des décharges, en tenant compte des besoins du terrain et des spécificités locales.

Trois réunions associant le ministère et la Ville de Paris se sont déjà tenues, et c'est pour permettre à cette concertation d'aboutir que la ministre d'État a décidé le moratoire dont vous avez parlé.

M. Jean-Marc Delia.  - Les directrices et directeurs d'école jouent un rôle primordial, notamment dans les territoires ruraux : il faut aboutir rapidement pour les accompagner au mieux.

Éligibilité à la DGD des projets de médiathèque intercommunale

M. Stéphane Demilly .  - Ma question porte sur un problème très concret, mais stratégique pour les territoires ruraux : les critères d'éligibilité à la dotation générale de décentralisation (DGD) pour la construction de médiathèques intercommunales.

Cette dotation est le principal levier de soutien à l'investissement culturel dans les territoires, mais sa mise en oeuvre se heurte à des blocages. Ainsi, la circulaire du 26 mars 2019 impose un critère, très rigide, de 0,07 m2 de surface par habitant desservi. Résultat : une intercommunalité rurale de ma région se retrouve dans une impasse - pour être éligible, elle devrait construire deux médiathèques de 500 m2, ce qui lui coûterait 5 millions d'euros...

Censé garantir la qualité des équipements, ce critère de surface est un frein au développement du maillage culturel ; il ne tient compte ni de la capacité financière des collectivités ni des besoins des territoires. Il n'est pas acceptable qu'un projet cohérent et soutenu par les élus de terrain soit abandonné faute de souplesse administrative !

La conformité réglementaire ne doit pas entraver l'accès de tous à la culture. Le Gouvernement va-t-il assouplir les critères d'attribution de la DGD pour qu'un plus grand nombre de projets utiles et réalistes voient le jour dans la ruralité ?

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - Le concours relatif aux bibliothèques au sein de la DGD est un outil d'aménagement du territoire très efficace. Depuis quarante ans, il permet à l'État d'accompagner de très nombreuses collectivités dans la construction, la rénovation et l'équipement de médiathèques.

C'est sur la proposition du Gouvernement que le législateur a renforcé le soutien de l'État à l'investissement dans la lecture. À cette fin, ce concours a été abondé de 6,5 millions d'euros en loi de finances pour 2024, en visant notamment les territoires ultramarins et les quartiers prioritaires de la politique de la ville, dont je m'occupe.

En effet, les règles d'attribution de cette dotation, fondées sur des critères de population et de surface, peuvent, dans certains cas, créer des difficultés pour des communes ou intercommunalités rurales. Le Gouvernement a donc entrepris une révision d'ensemble des dispositions réglementaires applicables. Celle-ci s'est traduite par une simplification d'ampleur des règles d'instruction, de gestion et de répartition. Une circulaire interministérielle parachèvera prochainement cette simplification : elle accordera des marges de manoeuvre accrues aux services déconcentrés de l'État.

Cette évolution devrait permettre à l'intercommunalité qui vous a sollicité de mener à bien son projet avec le soutien actif de l'État.

M. Stéphane Demilly.  - Merci beaucoup pour votre réponse.

Fermeture de guichets et réduction des horaires d'ouverture sur la ligne Sarlat-Bergerac-Libourne

Mme Marie-Claude Varaillas .  - L'année prochaine, la SNCF prévoit de fermer les gares de Condat - Le Lardin, La Coquille, Les Eyzies et Terrasson-Lavilledieu et de réduire drastiquement les horaires d'ouverture des guichets à Bergerac et à Saint-Astier. Les agents seraient remplacés par des automates, y compris dans gares de Sarlat, Le Buisson et Lalinde.

Les élus dénoncent ces décisions, alors que 84 millions d'euros ont été investis sur la ligne Bergerac-Libourne, ce qui a entraîné une forte augmentation de la fréquentation. Pas moins de seize collectivités, dont le département de la Dordogne, ont contribué à ces travaux.

Les guichets dans nos gares sont plus que des points de vente : ils matérialisent dans la ruralité le lien humain du service public ferroviaire, assurant la sécurité, l'information et l'accompagnement des usagers. Les lignes dites de desserte fine du territoire sont les premières victimes du désengagement de l'État, avec pour conséquences vécues des installations vétustes, un trafic ralenti, la suppression de dessertes et des remplacements de trains par des autocars.

Le président de la SNCF lui-même met en garde : 4,5 milliards d'euros annuels sont nécessaires pendant vingt ans pour régénérer et moderniser notre réseau. Alors que le ferroviaire est au coeur de la transition écologique, de nouvelles sources de financement doivent être trouvées, comme la renationalisation des autoroutes.

Le ferroviaire doit rester le socle du service de transport assurant l'égalité territoriale. Élus et usagers demandent que la SNCF cesse sans délai la politique mortifère consistant à fermer des guichets, voire des gares, alors que la population ressent déjà un profond sentiment de relégation et d'abandon. Ils revendiquent à juste titre un service public de qualité, complet et accessible à toutes et tous sur le territoire.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - La liaison Bordeaux-Sarlat fait partie des lignes de desserte fine du territoire. Elle a, en effet, fait l'objet de travaux de régénération cofinancés par la région, l'État et SNCF Réseau, ce qui montre l'engagement de l'État auprès des régions pour la desserte des territoires ruraux.

Les gares de Bergerac, Sarlat, Le Buisson et Lalinde sont des gares régionales, desservies par les services TER opérés par SNCF Voyageurs dans le cadre de son contrat avec la région Nouvelle-Aquitaine. C'est cette dernière, en qualité d'autorité organisatrice des mobilités (AOM), qui définit la consistance du service TER. L'État n'a pas vocation à se substituer au conseil régional pour déterminer l'offre et les objectifs de qualité, en particulier pour décider d'éventuelles fermetures de guichets ou réductions de leur ouverture au public.

De nombreuses modalités permettent aux voyageurs d'accéder de manière équitable aux informations et d'acheter leurs titres de transport. En tout état de cause, ces décisions relèvent de l'AOM, dans le cadre de son schéma régional de distribution des titres TER. Nous comprenons les attentes légitimes des usagers et je vous invite à solliciter la région Nouvelle-Aquitaine, qui vous exposera les mesures qu'elle entend prendre pour offrir aux voyageurs un service répondant à leurs besoins.

Conséquences de la crise énergétique dans le parc social

M. Adel Ziane .  - Les locataires du parc social voient leurs charges exploser du fait de la flambée des prix de l'énergie. Quant aux bailleurs sociaux, déjà en difficulté, ils n'ont pas les moyens d'absorber ces hausses. Pendant ce temps, les principaux groupes énergétiques réalisent des bénéfices records - 30 milliards d'euros, selon la Cour des comptes - tout en bénéficiant d'aides publiques. Cette situation est intolérable.

La Semiso, qui gère de nombreux logements en Seine-Saint-Denis, notamment à Saint-Ouen, a vu ses dépenses énergétiques bondir de 4,5 à 7 millions d'euros entre 2022 et 2023. Cette hausse s'est répercutée sur de nombreux foyers précaires, malgré le fonds de solidarité mis en place par les amicales de locataires.

Le Gouvernement est responsable : affaiblir le bouclier tarifaire et se désengager du soutien aux collectivités sont des choix politiques qui organisent de fait la précarité énergétique. Il a aussi des leviers d'action. C'est pourquoi la majorité municipale de Saint-Ouen et des responsables associatifs locaux ont lancé une pétition pour l'alerter sur l'urgence d'agir.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour compenser sans délai ces hausses de charges ? Rétablirez-vous les tarifs réglementés pour les bailleurs sociaux et encadrer plus strictement les pratiques des fournisseurs ? À quand un véritable plan de rénovation énergétique du parc social ?

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - Pour faire face à l'augmentation sans précédent du prix de l'énergie, le Gouvernement a mis en place un bouclier individuel limitant les hausses de prix du gaz et de l'électricité pour tous les contrats individuels, ainsi qu'un bouclier collectif apportant aux ménages en habitat collectif une aide équivalente lorsque l'électricité ou le gaz sont payés par leur bailleur social ou privé ou la copropriété. Ce double dispositif a permis d'éviter un doublement des factures.

Le chèque énergie a été mobilisé rapidement en 2021 et en 2022. Depuis 2024, il peut être utilisé pour payer les charges locatives incluant des frais d'énergie dans le parc HLM. Il appartient aux gestionnaires d'adhérer à ce dispositif.

Depuis le 1er février dernier, les tarifs réglementés de vente tarifs réglementés de vente (TRV) d'électricité bénéficient, à leur demande, à l'ensemble des TPE et structures assimilées sans condition de puissance souscrite. De nombreux consommateurs professionnels, y compris des collectivités et bailleurs sociaux, peuvent en bénéficier.

S'agissant enfin de la rénovation du parc social, les derniers décrets nécessaires à la mise en place du dispositif « Seconde vie » ont été pris en février, permettant de favoriser les réhabilitations lourdes.

Le Gouvernement reste mobilisé pour offrir des marges de manoeuvre aux bailleurs afin de rendre possibles des opérations de rénovation améliorant les conditions de vie.

M. Adel Ziane.  - Merci pour cette réponse. Il y a urgence pour nombre de nos concitoyens : nous serons donc très attentifs à l'ampleur des mesures prises et à leur mise en oeuvre. Nous espérons aussi que le Gouvernement soutiendra la proposition de loi de notre collègue Viviane Artigalas visant à instaurer une tarification spéciale de l'électricité pour les ménages modestes.

Réhabilitation des logements vides

M. Pierre-Jean Verzelen .  - Face à l'ampleur de la crise du logement et à la contrainte de réduction de l'artificialisation, la réhabilitation de l'existant devient essentielle.

Des dispositifs sont prévus, notamment pour transformer les bureaux en habitats, mais ils concernent plutôt le monde urbain. Or dans toutes nos communes rurales se trouvent des bâtisses à l'abandon, que l'on appelle le plus souvent des verrues, qui sont le fruit de conflits familiaux, d'indivisions ou de problèmes d'investissement. Les travaux nécessaires pour les réhabiliter sont tellement coûteux que personne ne veut les assumer, a fortiori si le logement se situe en périmètre classé.

Le Gouvernement discute-t-il avec les associations d'élus et les bailleurs de la possibilité d'orienter leurs investissements vers les logements existants plutôt que la construction ?

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - Le dispositif d'aide à la relance de la construction durable a été instauré par le Gouvernement dans le cadre du plan France Relance. Plus de 1 287 communes en ont bénéficié en 2021, pour un montant de 145 millions d'euros ayant bénéficié à 68 000 logements.

En 2022, le dispositif a été territorialisé, via les contrats de relance du logement signés entre les préfets et les communes volontaires. Il a bénéficié au total à près de 530 communes, pour un peu plus de 120 000 logements éligibles et 138 millions d'euros d'aide. Le nombre de logements touchés est donc en augmentation.

Lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, à la demande des parlementaires, le Premier ministre a ouvert une nouvelle aide de 100 millions d'euros aux maires bâtisseurs dans le cadre du fonds vert.

La lutte contre la vacance et la réhabilitation des logements sont des axes majeurs du plan France Ruralités depuis 2023. Une prime de sortie de vacance en milieu rural, de 5 000 euros par logement, a été créée, cumulable avec les aides de l'Anah et le dispositif Loc'Avantages. En 2024, 355 logements bénéficiant d'un montant total de subventions de travaux de 33 000 euros ont été rénovés et remis sur le marché locatif.

Le Gouvernement est donc pleinement mobilisé pour relancer la construction, réhabiliter et mieux rénover l'habitat en milieu rural.

Avenir du Fnap

M. Simon Uzenat .  - En juin 2024, 2,7 millions de demandes de logement social n'étaient pas pourvues. En Bretagne, plus de 100 000 ménages sont en attente d'un logement social, et les délais d'attribution vont de vingt mois à parfois plusieurs années. Entre 2016 et 2024, les agréments de logements sociaux ont diminué de 30,5 %. Or les moyens budgétaires relatifs au fonds national des aides à la pierre (Fnap) diminuent constamment depuis 2018 et une contribution exceptionnelle d'Action Logement a été temporairement instaurée en 2019.

Mais, comme le président d'Action Logement l'a rappelé en mai dernier lors de son audition devant notre commission des affaires économiques, le financement pérenne du Fnap qui devait être organisé par l'État et les bailleurs sociaux n'a jamais vu le jour.

Action Logement se retire à juste titre, n'étant ni l'État ni un outil de l'État. L'État manque à l'appel, alors que les bailleurs sociaux sont soumis à des ponctions lourdes, que leurs capacités d'investissement sont drastiquement amputées et que les collectivités locales continuent, elles, à intervenir, particulièrement dans le cadre de la délégation de compétence des aides à la pierre.

L'État doit assumer pleinement son rôle. Quelles sont les intentions du Gouvernement quant à l'avenir du Fnap et par quels moyens financiers compte-t-il répondre aux besoins de logement de nos concitoyens ?

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - La ministre du logement a suivi de près les travaux du groupe de travail constitué en décembre dernier sur l'initiative du président du conseil d'administration du Fnap pour réfléchir au financement du logement social, qui s'est réuni à plusieurs reprises entre janvier et avril, associant l'État, les bailleurs HLM, Action Logement, la Banque des Territoires, des représentants des collectivités locales et des parlementaires.

Les aides directes du Fnap favorisent les ménages les plus modestes, encouragent la sobriété foncière et embarquent les territoires dans une dynamique de production de logements sociaux. Le débat parlementaire autour du projet de loi de finances (PLF) pour 2026 sera l'occasion de rediscuter du financement du Fnap.

M. Simon Uzenat.  - Votre réponse, prévisible, est extrêmement décevante. Le 24 juin dernier, les élus locaux et représentants d'association ont quitté une réunion du comité régional de l'habitat et de l'hébergement de Bretagne, parce que l'État n'était pas au rendez-vous. Jean-Baptiste Blanc a dit que, à régime constant, le Fnap ne pourrait pas financer ses actions l'année prochaine. Il y a urgence : loger nos concitoyens, notamment les plus modestes, est une priorité absolue !

Financement du service public de la petite enfance

Mme Anne-Catherine Loisier .  - La loi de décembre 2023 pour le plein emploi a acté la création des services publics de la petite enfance, entrés en vigueur au 1er janvier 2025.

Les communes de plus de 3 500 habitants doivent donc désormais exercer tout ou partie des quatre compétences dévolues aux autorités organisatrices de l'accueil du jeune enfant. Une commune peut également transférer tout ou partie de ces compétences à l'EPCI.

Si l'article 17 de cette loi prévoit une compensation financière pour les entités concernées, rien de tel n'est prévu pour les communes de moins de 3 500 habitants ou les EPCI, même s'ils exercent ces mêmes compétences. Comment expliquer que des collectivités se trouvent ainsi exclues d'un financement alors qu'elles exercent les compétences correspondantes ? Pourquoi une intercommunalité de plus de 20 000 habitants exerçant des compétences d'accueil du jeune enfant ne serait-elle pas éligible aux financements d'État auxquels aurait droit une commune de plus de 10 000 habitants exerçant les mêmes compétences ?

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - Le législateur a choisi de réserver l'accompagnement financier du service public de la petite enfance aux communes de plus de 3 500 habitants. Cependant, la loi pour le plein emploi ne remet pas en cause les compétences exercées au niveau intercommunal. Les communes peuvent à tout moment transférer à un EPCI l'une des quatre compétences relevant de l'autorité organisatrice.

Dès lors, le droit commun s'applique en matière de financement des compétences, lequel peut s'opérer notamment via le mécanisme des attributions de compensation, assurant la neutralité budgétaire des transferts de charges entre l'intercommunalité et ses membres. En révisant librement ces attributions, les EPCI et leurs communes membres peuvent donc, s'ils le souhaitent, transférer le montant de l'accompagnement financier versé par l'État aux communes de plus de 3 500 habitants, à hauteur de 85,5 millions d'euros.

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Le problème de la possibilité pour les EPCI de percevoir l'aide de l'État demeure. Et le seuil de 3 500 habitants exclut, de fait, les communes rurales de cette aide, à laquelle auraient droit les communes plus urbanisées. Nous reviendrons sur ce sujet prochainement.

Moyens affectés à l'entretien des voiries communales

M. Hervé Reynaud .  - Les maires ruraux s'inquiètent de l'état souvent dégradé, voire dangereux, de leurs voiries, dont l'entretien est une compétence obligatoire des communes et doit s'effectuer, selon les normes techniques, tous les trente ans.

La commune nouvelle de Solore-en-Forez dispose de 42 kilomètres de voirie communale fortement dégradés. Or elle ne peut consacrer que 500 euros par kilomètre et par an à leur entretien, alors que le besoin réel est estimé à 120 000 euros par an. Ni la DGF ni la DETR ne suffisent. La suppression de la taxe d'habitation a encore réduit les capacités financières des petites communes.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour renforcer les moyens structurels des communes rurales ? Il y va de la sécurité des citoyens, de la survie et de l'attractivité de nos communes rurales.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville .  - La DGF de Solore-en-Forez s'élève en 2025 à 230 euros par habitant, soit 52 % de plus que la moyenne des communes de 500 à 1 000 habitants -  150 euros par habitant. Le Gouvernement est cependant conscient des difficultés financières et d'ingénierie des collectivités rurales. La DETR finance la réalisation des travaux de réfection de voirie. L'État soutient également les travaux de voirie des collectivités par la rétrocession d'une partie du produit des amendes de police de la circulation.

En 2025, près de 117 millions d'euros sont destinés à financer, sur appels à projets des conseils départementaux, des aménagements de voirie ou des travaux de sécurisation menés par les communes ou les groupements de moins de 10 000 habitants. Le conseil départemental de la Loire dispose ainsi de plus de 1 million d'euros - enveloppe en hausse de 11 % sur un an et de 72 % depuis 2022.

Par ailleurs, selon l'article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales, les départements et les régions peuvent accompagner les communes rurales dans le financement de projets dont elles assurent la maîtrise d'ouvrage.

Enfin, des financements européens peuvent être mobilisés au titre du Feader.

La plateforme Aides Territoires peut en outre aider les communes rurales dans leur recherche de financements.

M. Hervé Reynaud.  - Le prochain budget ne pourra pas faire l'impasse sur la question des financements de nos communes. Il y va de la libre administration de nos collectivités locales. Le conseil départemental de la Loire - où j'étais encore il y a peu chargé des finances - vient d'être désigné dans un rapport de la Cour des comptes parmi les douze départements les plus en difficulté financièrement, en raison de l'explosion des charges relatives aux solidarités humaines - plus de 30 millions d'euros en 2025.

Dispositif antigrêle

M. Hervé Gillé .  - Les épisodes de grêle, plus fréquents et violents avec le dérèglement climatique, causent d'importants dégâts, notamment agricoles. Des dispositifs de prévention comme les générateurs antigrêle portés par les associations départementales d'étude et de lutte contre les fléaux atmosphériques (Adelfa) sont essentiels. En Gironde, l'Adelfa 33, présidée par Dominique Fédieu, coordonne 139 générateurs.

Mais leur modèle économique est gravement fragilisé. Le département de la Gironde a récemment augmenté sa subvention à 55 000 euros pour 2025, effort notable dans un contexte budgétaire difficile et de grave crise viticole.

Si les collectivités, comme la région Nouvelle-Aquitaine, prennent leurs responsabilités, les compagnies d'assurance - pourtant bénéficiaires directs de la réduction des sinistres - ne participent toujours pas au financement.

Un comité de financeurs a été réuni sur l'initiative du préfet de région, sans assureurs ni parlementaires, pourtant directement concernés par la prévention.

Comment comptez-vous faire entrer les compagnies d'assurance dans le financement de ces dispositifs ?

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Genevard, qui défend au Parlement européen la position de la France sur le Mercosur.

Le modèle Adelfa est fragilisé en Gironde. Les acteurs locaux doivent en redéfinir les bases pour garantir sa pérennité. L'État n'a pas de compétence ni de rôle financier direct sur ces dispositifs, mais il les suit avec attention.

Nous accompagnons les agriculteurs face au changement climatique via la réforme de l'assurance récolte, le financement de la recherche et de l'innovation pour améliorer la prévention contre les aléas climatiques ; et à hauteur de 1,8 milliard d'euros dans le cadre du plan France 2030.

L'implication des assureurs est une piste à explorer, mais qui relève d'une démarche volontaire. Elle suppose d'abord de disposer d'un socle fiable d'évaluation de l'efficacité des dispositifs existants.

M. Hervé Gillé.  - Le Gouvernement peut jouer un rôle actif pour favoriser la participation des assureurs, dans le cadre d'une négociation nationale. Ils sont directement bénéficiaires d'une politique préventive qu'ils ne contribuent pas à financer. Il existe aussi des leviers d'accompagnement, comme la défiscalisation, pour augmenter la cotisation des viticulteurs notamment. Merci de transmettre cette proposition à Mme la ministre.

Vacance des locaux agricoles

M. Olivier Paccaud .  - Il est fréquent qu'un agriculteur réside sur le lieu de son exploitation. Lorsque celle-ci cesse, le logement peut rester occupé, mais les bâtiments à vocation agricole restent parfois inemployés, voire abandonnés.

D'ici 2030, 50 % des agriculteurs en activité avant 2020 auront pris leur retraite. À Lamorlaye, dans l'Oise, le maire Nicolas Moula constate la vacance de nombreux box alors qu'une forte demande existe dans la filière hippique.

En l'état du droit, le maire ne peut qu'appliquer le droit pénal de l'urbanisme, ce qui s'avère complexe, inadapté et humainement délicat vis-à-vis d'anciens agriculteurs à peine retraités. Il s'agirait seulement de sanctionner et non d'encourager la mise à disposition ou la cession de ces locaux.

Ne faudrait-il donc pas créer un outil fiscal, inspiré de la taxe d'habitation sur les logements vacants, ciblant certains types de bâtiments, modulée selon la surface vacante, éventuellement dégressive ou assortie d'exonérations en cas de location partielle ?

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Si le logement peut rester occupé, les locaux agricoles doivent pouvoir bénéficier aux exploitants qui prennent la suite. Le maintien de leur vocation agricole est fondamental.

Les élus locaux peuvent déjà instaurer, en application de l'article 1639 A bis du code général des impôts, une taxe annuelle sur les friches commerciales, prévue par l'article 1530 du même code, pour les biens inoccupés depuis deux ans.

Par ailleurs, les documents d'urbanisme encadrent les changements de destination. La Safer dispose également d'outils pour maintenir ces biens au service de l'agriculture.

Dans les communes dotées d'un PLU, les bâtiments susceptibles d'un changement de destination doivent être précisément identifiés. Toute autorisation en zone agricole est soumise à l'avis conforme de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers et, en zone naturelle, à celui de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.

Depuis la loi du 16 juin 2025, il est possible de déroger au règlement du PLU pour autoriser le changement d'un bâtiment agricole en habitation, mais uniquement si le bâtiment est inoccupé depuis vingt ans. C'est une preuve de notre volonté de préserver la vocation agricole des bâtiments.

Chasse au gibier d'eau

M. Mickaël Vallet .  - Le 18 février dernier, j'ai interpellé le Gouvernement sur la surprise causée par les recommandations de la Commission européenne sur la chasse au gibier d'eau et regretté l'absence d'éclaircissement de Mme Gatel. J'avais prévenu que je reviendrais interroger le Gouvernement au deuxième semestre ; hélas, nous y sommes.

Le projet d'arrêté que la ministre chargée de la biodiversité a voulu soumettre au conseil national de la chasse et de la faune sauvage a provoqué une profonde indignation. Les chasseurs de gibier d'eau participent à la connaissance des espèces, à leur régulation, à l'entretien des zones humides, joyaux de la biodiversité française.

Vous avez l'occasion d'expliquer publiquement pourquoi un premier arrêté, jugé inapplicable par les principaux concernés, a été présenté, puis retiré, avant qu'un second soit proposé. Ce deuxième texte prend-il vraiment en compte les recommandations de la Fédération nationale des chasseurs ? Suffira-t-il à répondre aux exigences du groupe d'experts européens Nadeg ? Et, à l'approche de la réunion prévue cet automne, quelle position le Gouvernement défendra-t-il ?

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Mme Agnès Pannier-Runacher souhaite rectifier certaines erreurs. Le groupe scientifique mandaté par la Commission européenne a constaté un déclin des populations nicheuses et/ou hivernantes de plusieurs espèces migratrices. Les États membres doivent prendre des mesures dès la saison 2025-2026.

Début juillet, la Commission a recommandé à nouveau un moratoire pour quatre espèces et une réduction des prélèvements pour trois autres. Nous avons communiqué ces recommandations aux chasseurs. Mme Pannier-Runacher a proposé un moratoire temporaire sur une espèce, un quota pour une autre, et une réduction de quinze jours de chasse pour les cinq restantes.

Les chasseurs ont exprimé leurs réserves sur cette fermeture anticipée et proposé une alternative : des plafonds journaliers de prélèvements. Nous sommes satisfaits de l'accord trouvé ; il concilie les exigences de conservation avec une chasse durable et fondée sur la science. Le groupe scientifique rendra ses orientations à l'automne sur les quotas applicables à la saison 2025-2026.

M. Mickaël Vallet.  - Vous n'avez pas expliqué comment on peut soumettre un premier projet sans réelle concertation, provoquer un tollé, le retirer, puis en présenter un second... C'est un problème de méthode. Par ailleurs, la chasse est déjà durable : vous avez affaire à des gens sérieux. Pour la suite, concertez dès l'amont et reconnaissez pleinement l'apport de la chasse, notamment sur le plan social.

Reconnaissance de l'agriculture comme intérêt général majeur

M. Bruno Belin .  - La loi du 24 mars 2025 a rappelé que l'agriculture est d'intérêt général majeur. Et l'actualité est chargée pour le monde agricole : enjeux législatifs, économiques -  les moissons en cours  - , climatiques -  la question prégnante de l'eau. D'ailleurs, j'attends toujours que le Gouvernement définisse une stratégie claire, en associant parlementaires et élus locaux. Des pistes existent : le recours aux eaux grises, une tarification différenciée selon les usages, ou encore l'aide aux syndicats pour l'entretien des réseaux -  entre 20 % et 50 % des pertes d'eau sont liées à des réseaux défectueux. Il faut aussi avancer sur les réserves de substitution. C'est un débat sensible dans les territoires ; les préfets font au mieux, mais il est temps d'avoir une vraie stratégie.

Les agriculteurs que je rencontre dans la Vienne attendent des réponses. Il ne s'agit pas d'opposer biodiversité et agriculture ; il faut rassembler et convaincre. Le combat pour la biodiversité est légitime, celui pour l'eau aussi, mais la survie des agriculteurs doit être entendue. Le Gouvernement doit réaffirmer le soutien à l'agriculture, en tant que politique d'intérêt général majeur.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - La loi du 24 mars n'accorde pas à l'agriculture de primauté automatique sur d'autres objectifs d'intérêt général, comme la préservation de la biodiversité ou de la ressource en eau.

Les services d'Agnès Pannier-Runacher travaillent à mieux articuler ces enjeux avec les acteurs agricoles. Plusieurs chantiers sont en cours : création d'un régime de déclaration unique et d'un portail numérique dédiés à la protection des haies, paiements pour services environnementaux, entre autres.

Les agences de l'eau soutiennent de plus en plus les projets agricoles pour accompagner une gestion durable de la ressource, notamment dans les territoires où des déséquilibres apparaissent.

Les services du ministère améliorent la connaissance et la compréhension des règles environnementales et veillent à leur application et leur contrôle proportionnés. Chaque chantier fait l'objet d'instructions dédiées et d'une animation territoriale.

Tout cela s'inscrit dans la planification écologique en cours de territorialisation. L'objectif est clair : concilier ambition environnementale et souveraineté agricole, au plus près des réalités locales.

Conférence des Nations unies sur le financement du développement

M. Patrice Joly .  - L'aide publique au développement subit une baisse drastique à l'échelle internationale. La France a réduit la sienne de près de 2,3 milliards d'euros ces dernières années. Aux États-Unis, la diminution atteint 83 %. Pour l'USAID, cela pourrait signifier plus de 14 millions de morts d'ici à 2030, dont 4,5 millions d'enfants.

À Séville, lors de la conférence internationale sur le financement du développement, un plan global a été adopté : allégement du fardeau de la dette, investissements durables, mécanismes d'échange de dette, suspension de paiement en cas de crise, et taxes de solidarité sur les jets privés et les vols en première classe.

La conférence a envoyé un message clair : la réduction de l'aide ne peut être une réponse aux crises humanitaires, sanitaires, climatiques et migratoires. Seule la coopération multilatérale, adossée à une innovation financière, peut permettre d'agir.

Comment la France entend-elle traduire les engagements pris à Séville, notamment sur la conversion des dettes, les innovations fiscales, et la mobilisation des financements privés ?

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - La conférence de Séville s'est tenue dans un contexte difficile. Les besoins explosent, les ressources stagnent, les clivages nord-sud freinent l'action. Face à cela, le Président de la République a porté trois priorités.

D'abord, identifier et mobiliser de nouvelles ressources : les droits de tirage spéciaux et les taxes de solidarité figurent parmi les leviers. Ensuite, mieux utiliser l'argent public, notamment via les banques de développement et les institutions multilatérales, tout en attirant des financements privés. Enfin, promouvoir une logique partenariale avec les pays concernés à travers les plateformes pays, notamment sur la transition énergétique et la santé.

Tous les acteurs doivent travailler ensemble : États, bailleurs, investisseurs, société civile. Cette coordination est indispensable pour renforcer les systèmes de gouvernance et produire des résultats concrets.

Nous avons aussi lancé, avec huit autres pays européens, une coalition sur la taxation du transport aérien civil en vue de la COP30. Elle vise à harmoniser les systèmes existants et à convaincre d'autres pays d'instaurer une telle taxe pour mobiliser des financements, y compris pour la solidarité internationale.

M. Patrice Joly.  - Merci pour votre réponse. Je souscris à votre proposition de travail commun. Mais je tiens à rappeler que la baisse de notre aide alimente le repli populiste et les logiques nationalistes. Aucune crise mondiale - climat, migration, santé, sécurité - ne se résoudra à l'intérieur de nos seules frontières.

Annulation du conseil d'administration de l'AEFE

M. Jean-Luc Ruelle .  - J'ai été surpris, comme les 34 membres du conseil d'administration de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), d'apprendre mercredi 25 juin l'annulation de la réunion du conseil d'administration du lendemain !

Cet ajournement a été décidé par le ministre Laurent Saint-Martin, après l'ajout d'un point à l'ordre du jour, aux conséquences explosives, voire fatales pour certains établissements du réseau : le transfert aux établissements conventionnés du financement de la part patronale des pensions civiles des personnels détachés, jusqu'alors assurée au niveau central par l'AEFE.

Les pensions - près de 180 millions d'euros cette année - sont la cause principale du déficit structurel de l'agence. Reporter cette charge sur les établissements entraînerait des effets en cascade délétères : alourdissement des budgets locaux, risque de déconventionnements multiples avec substitution des professeurs formés en France par des emplois locaux, remise en question de l'existence d'un enseignement à la française.

C'est un choix politique déterminant pour l'avenir de notre réseau, l'éducation de nos enfants à l'étranger et la diffusion de nos valeurs à l'international.

Quels financements envisagez-vous, notamment dans le contrat d'objectifs et de moyens que nous attendons toujours, afin de ne pas exercer une pression intenable sur les établissements scolaires ?

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Le conseil d'administration de l'AEFE, reporté au 17 juillet, vise à l'adoption d'un budget rectificatif en déficit de 78 millions d'euros, après le vote en CMP d'une réduction de 20 millions d'euros des crédits du programme 185.

Les services centraux prévoient fin 2025 une trésorerie de 48 millions d'euros, soit moins d'un mois de paie pour l'AEFE - dont la masse salariale constitue 81 % du budget. L'AEFE a également dû absorber, depuis 2022, des mesures sur la rémunération des personnels détachés. Faute d'engager des réformes structurelles, elle risque de ne plus pouvoir payer les salaires de son personnel détaché dès 2026.

Une refonte du cadre d'action a été engagée, avec des concertations sur la faisabilité et la soutenabilité de certaines mesures, comme l'augmentation de la participation des établissements conventionnés à la rémunération des personnels résidents et détachés, par la révision de son assiette de calcul en y intégrant la pension civile. Cette piste doit être étudiée finement sur chaque territoire et mise en place progressivement, avant sa présentation au prochain conseil d'administration de l'AEFE. C'est le premier jalon d'un plan plus global de refondation de l'AEFE. Un groupe de travail se penchera dès la prochaine rentrée sur le développement d'un modèle soutenable et durable pour l'AEFE.

L'application d'un taux minimal d'incapacité de 50 % pour obtenir un AESH figure dans les instructions de l'AEFE depuis 2021. En 2024, 474 élèves ont bénéficié d'une prise en charge. Un groupe de travail spécifique sera mis en place dans le cadre de la Commission nationale des bourses.

Embargo commercial à l'égard de la Russie

M. François Bonneau .  - Les sanctions européennes à l'encontre de la Russie interdisent l'importation de produits russes, notamment dans la filière bois. Mais ces mesures sont régulièrement contournées : d'importantes quantités de bois d'origine russe, en particulier du bouleau, affluent sur le marché européen après avoir transité par des pays tiers comme le Kazakhstan ou la Turquie, où ces bois sont réétiquetés, exonérés de traçabilité et présentés comme des produits locaux.

Comment garantir un contrôle efficace des importations visées par l'embargo afin d'empêcher le contournement des sanctions ? Quels moyens sont prévus pour que nos services détectent le contournement de l'embargo, qui fragilise la crédibilité européenne en la matière ?

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux .  - La lutte contre le contournement des sanctions contre la Russie est une priorité partagée avec nos voisins européens et partenaires du G7. Elle est indispensable afin de priver la Russie d'équipements et de revenus pour sa guerre d'agression contre l'Ukraine. Elle est également essentielle pour nos acteurs économiques qui respectent les réglementations et s'adaptent au régime des sanctions susceptibles d'avoir un impact sur leur activité.

La Russie se sert d'intermédiaires et de sociétés écrans dans des pays tiers pour contourner nos sanctions, à l'importation comme à l'exportation. Avec l'Union européenne et le G7, nous luttons activement contre ce phénomène et réduisons progressivement ces flux illicites.

Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères sensibilise ces pays tiers sur les risques auxquels ils s'exposent. La direction générale du Trésor accompagne les opérateurs français dans la mise en oeuvre des sanctions. Elle transmet aux douanes les signalements qu'elle reçoit. La direction générale des douanes et des droits indirects analyse les flux commerciaux afin d'identifier les tendances de contournement et effectue des communications ciblées sur les restrictions visant les biens et technologies par l'intermédiaire de ses implantations locales.

M. François Bonneau.  - Merci pour ces éclaircissements. Je ne doute pas de la volonté du Gouvernement d'agir. Toutefois, de très nombreux industriels témoignent que les exportations russes continuent par l'intermédiaire de pays tiers. Lorsqu'un pays qui exporte peu un produit se met à en exporter beaucoup, il faut saisir les services et leur donner les moyens d'intervenir. En laissant cette situation perdurer, nous soutenons l'effort militaire russe en lui apportant des devises.

Fraude à la contribution sur les boissons sucrées

M. Dany Wattebled .  - La situation a empiré depuis ma précédente question en octobre 2023 sur la fraude massive à la taxe sur les boissons sucrées.

Depuis le 1er mars, le barème de cette taxe a été tellement alourdi qu'un camion de soda est désormais plus taxé qu'un camion de bière. Pourtant, les sodas circulent sous aucun contrôle : pas de traçabilité, pas de document d'accompagnement électronique (DAE), rien. Pendant ce temps, les boissons alcoolisées doivent circuler sous strict contrôle électronique via un DAE.

Résultat, une fraude bien huilée, organisée et massive, presque un carrousel de TVA. Des importateurs éphémères, insolvables, souvent établis à l'étranger, disparaissent sans payer la taxe. Les distributeurs ferment les yeux et l'on trouve en rayon des sodas très sucrés, vendus parfois moins cher que leur version zéro.

C'est une catastrophe pour la santé publique et pour les finances de l'État. Près d'un milliard d'euros par an échappent au fisc, 83 millions d'euros par mois ! Depuis octobre 2023, l'État a perdu 1,6 milliard d'euros, alors qu'il faut rétablir les comptes publics. Pendant ce temps, les entreprises qui respectent la loi sont pénalisées.

Nous connaissons les solutions : l'intégration des sodas dans le système DAE, la solidarité de paiement tout au long de la chaîne ou encore des contrôles ciblés sur les sociétés à risque. Pourquoi ne pas appliquer ces outils existant déjà pour d'autres produits ? Quand allez-vous mettre fin à cette fraude massive ? Il est temps d'agir.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire .  - La LFSS 2025 a renforcé la fiscalité des boissons sucrées en instaurant un barème à trois tranches progressives, rehaussé et incitatif, inspiré du modèle britannique, quatre fois plus efficace que le précédent barème indexé sur la teneur en sucre ajouté des boissons. Ce nouveau dispositif vise à encourager la reformulation des produits et à inciter les consommateurs à se reporter vers des boissons moins sucrées.

Si l'on ne peut encore dresser un bilan complet de la réforme, les encaissements ne révèlent pas l'existence d'un système de fraude à grande échelle. Le rendement de la taxe soda est en cohérence avec les annonces faites lors du vote de la LFSS. La DGFiP a augmenté ses contrôles sur les boissons non alcoolisées pour un rendement de 4 millions d'euros en 2024.

La fraude aux contributions sur les boissons est proche de celle rencontrée en matière de TVA, pour laquelle les services fiscaux ont déjà une expérience solide. La DGFiP s'appuie notamment sur son réseau d'assistance fiscale internationale pour lutter contre les fraudes les plus complexes. Dans le cadre du transfert de mission, certains outils spécifiquement douaniers, comme le DAE, n'ont pas été conservés. La DGFiP dispose d'autres outils de programmation et d'intelligence artificielle pour exploiter les nombreuses données dont une partie provient des douanes.

La solidarité de paiement semble difficile à mettre en oeuvre, car il n'existe pas d'obligation ni de possibilité pour les clients des importateurs défaillants de s'assurer du paiement effectif de la taxe par leur fournisseur.

Crise d'attractivité de la médecine du travail dans la fonction publique territoriale

Mme Frédérique Puissat .  - La fonction publique territoriale connaît une pénurie croissante de médecins du travail. Cette crise d'attractivité tient à plusieurs causes.

D'abord, la formation trop longue des médecins collaborateurs, réorganisée par la loi du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail : 300 heures de cours théoriques et stages pratiques sur deux ans en cycle 1, deux ans d'exercices encadrés de médecins collaborateurs en cycle 2, huit journées de regroupements pédagogiques, la réalisation d'un mémoire ainsi qu'une soutenance. Une fois la formation achevée, il faut effectuer deux CDD de trois ans chacun avant d'être embauché en CDI.

La visite d'information et de prévention (VIP), qui a lieu tous les deux ans pour les fonctionnaires territoriaux, suit une périodicité trop courte pour les centres de gestion, alors qu'elle est de cinq ans pour la fonction publique d'État.

Le Gouvernement va-t-il réduire la durée de formation, assouplir les règles conduisant à une embauche en CDI et aligner la périodicité des VIP sur celle de la fonction publique d'État ?

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire .  - La médecine de santé au travail rencontre des difficultés de démographie et d'attractivité.

Le ministère souhaite réduire la durée de la formation dans le cadre d'une révision ciblée du dispositif de reconversion des médecins voulant exercer en santé au travail, afin de capitaliser sur les compétences déjà acquises tout en garantissant un haut niveau de qualité dans l'accompagnement des agents et la prise de décision médicale. Cette orientation s'inscrit dans le respect des exigences posées par l'article R. 4623-25 du code du travail.

Le Gouvernement est conscient des enjeux liés à l'attractivité et à la rémunération des médecins de santé au travail. Nous voulons des parcours professionnels plus fluides, via la facilitation de passerelles de reconversion et l'amélioration des conditions d'exercice. Mais en raison du contexte budgétaire actuel, une revalorisation ne peut être envisagée.

Nous réfléchissons à mieux articuler les obligations réglementaires des VIP avec la réalité du terrain et sommes favorables à un alignement sur la fonction publique d'État, sauf pour les agents soumis à des expositions spécifiques.

Mme Frédérique Puissat.  - Merci pour ces avancées. Je remercie aussi les présidents des centres de gestion, notamment d'Isère, leurs administrateurs et leur personnel. Tout ce que nous ferons pour leur faciliter la tâche sera le bienvenu.

Exercice abusif du droit de grève dans la fonction publique

M. Stéphane Le Rudulier .  - J'appelle votre attention sur les effets potentiellement abusifs de certains préavis de grève dans la fonction publique territoriale. Plusieurs communes des Bouches-du-Rhône ont été confrontées récemment à des préavis de grève reconductible de plusieurs mois, voire années. Ces préavis, bien que légaux en apparence, créent une incertitude constante sur la continuité du service public et désorganisent les services. Ainsi, le préavis de grève de la CGT des Bouches-du-Rhône va du 1er mars 2025 au 17 mai 2027 et concerne l'ensemble des fonctionnaires, salariés et agents des collectivités du département.

Le droit de grève est garanti par la Constitution, mais la continuité du service public aussi. La proportionnalité entre la durée du préavis et les revendications syndicales pose question, tout comme le contrôle juridictionnel possible sur le caractère abusif d'un tel usage. Entendez-vous clarifier ce dernier point ? Comptez-vous mettre en place un accompagnement juridique renforcé pour les collectivités territoriales concernées ?

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire .  - Il faut en effet préserver un juste équilibre entre exercice du droit de grève et continuité du service public. L'impact des préavis de grève reconductible à durée étendue dans la fonction publique territoriale fait malheureusement trop souvent l'actualité et suscite l'incompréhension de nos concitoyens.

Le droit de grève a valeur constitutionnelle et s'applique à l'ensemble des agents publics. Il ne s'agit néanmoins pas d'un droit absolu : il doit s'exercer dans le respect de règles spécifiques édictées par le code général de la fonction publique, dont la précision des motifs de la grève ainsi que du lieu, de la date, de l'heure de début et de la durée, et l'obligation de négociation pendant la durée de préavis.

Bien que la réglementation en vigueur n'interdise pas le dépôt d'un préavis de longue durée, celui-ci peut engendrer une instabilité chronique qui affecte durablement la vie de nos concitoyens, met nos collectivités territoriales à rude épreuve et ternit l'image des services publics. C'est pourquoi, tout en réaffirmant son profond attachement au dialogue social et au droit de grève, le Gouvernement reste à l'écoute des propositions d'amélioration de l'équilibre existant.

M. Stéphane Le Rudulier.  - Merci. Les maires sont totalement désabusés. On peut s'interroger sur la nature de cette forme de syndicalisme, qui vise la paralysie des services publics locaux plutôt que la satisfaction de revendications.

Violences contre les sapeurs-pompiers dans l'Oise

M. Édouard Courtial .  - Pas une semaine sans que des sapeurs-pompiers ne soient pris à partie. Dans l'Oise, depuis le début de l'année, une vingtaine d'entre eux ont déjà été victimes d'agressions verbales ou d'outrages. Alors qu'ils luttaient contre un feu, à Méru, le 10 février, des pompiers ont été la cible de projectiles. Dans la nuit du 31 mai au 1er juin, à Beauvais, un de leurs collègues a été frappé au visage par un homme alcoolisé qu'il venait de secourir.

De tels actes de barbarie sont devenus courants dans l'Oise, comme partout en France. Il est temps de faire cesser ces agressions inhumaines. Je veux dire ici aux pompiers tout mon respect et mon entière gratitude.

En 2017, le législateur a alourdi les peines applicables aux auteurs de violences envers les sapeurs-pompiers. En 2018, il a élargi l'expérimentation du port de caméras mobiles aux pompiers. La loi évolue, mais la violence ne diminue pas. En 2024, 602 pompiers ont été blessés sur l'ensemble du territoire français.

Comment enrayer cette spirale de la violence ?

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - Les agressions envers les sapeurs-pompiers, dont la vocation est de sauver au péril de leur vie, sont absolument intolérables. La réponse, notamment pénale, doit être dissuasive.

En 2024, 1 461 agressions de sapeurs-pompiers ont été rapportées ; dans trois quarts des cas, elles ont été perpétrées par les victimes que les pompiers venaient aider et dans la moitié des cas, alcool ou stupéfiants étaient en cause.

Des mesures opérationnelles de protection sont déjà engagées au plus près du terrain, notamment grâce à des protocoles opérationnels qui évoluent en permanence, sous la responsabilité des préfets de département. Un réseau national de référents sécurité et sûreté a été déployé. Le ministère de l'intérieur accompagne l'ensemble des directeurs des Sdis, notamment en incitant les sapeurs-pompiers à déposer plainte.

Le port de la caméra est très encouragé afin de mieux caractériser les infractions. Il est également possible, depuis mars 2024, d'en équiper les véhicules. Enfin, de nouvelles mesures opérationnelles sont actuellement étudiées par l'Observatoire national des violences envers les sapeurs-pompiers. Le Beauvau de la sécurité civile en a également débattu. Ces réflexions seront traduites dans un plan de lutte contre les violences.

Nous avons besoin d'une véritable révolution.

M. Édouard Courtial.  - Merci. Celui qui a forgé la devise des sapeurs-pompiers, « sauver ou périr », n'imaginait pas que l'on puisse périr sous les coups de projectiles malveillants.

Sapeurs-pompiers volontaires

M. Guillaume Chevrollier .  - Je rends hommage aux sapeurs-pompiers, professionnels comme volontaires, pour leur engagement remarquable. Ils interviennent chaque jour avec courage et dévouement.

Dans nos territoires ruraux, leur présence est d'autant plus cruciale qu'ils sont parfois les seuls à pouvoir intervenir rapidement.

En Mayenne, le centre d'incendie et de secours de Meslay-du-Maine a dû, malgré l'engagement de quarante sapeurs-pompiers volontaires, faire face à dix-sept départs non assurés depuis le début de l'année, faute d'effectifs disponibles. Des solutions locales existent, tel que le recentrage sur le secours à la personne, l'adaptation des plannings, le partenariat renforcé avec les communes ou les entreprises. Le Sdis de la Mayenne et le conseil départemental sont pleinement mobilisés, tout comme nos maires. Mais ces efforts trouvent vite leurs limites car les fermetures répétées des services des urgences contraignent les pompiers à conduire les victimes toujours plus loin. Les interventions peuvent durer jusqu'à trois heures, ce qui engendre fatigue et démobilisation et épuise les quotas de disponibilité mensuelle. S'y ajoute un surcoût logistique. En 2023, le Sdis a facturé 60 000 euros aux hôpitaux pour 495 transports détournés ; en 2024, la facture dépasse les 100 000 euros.

Les pompiers ne peuvent plus pallier seuls les failles de notre système de santé. Quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il prendre pour soutenir les Sdis ?

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - Les sapeurs-pompiers volontaires jouent un rôle essentiel. Leur engagement est croissant. Pour la première fois depuis dix-sept ans, en 2023, ils étaient plus de 200 000. En outre, leur durée moyenne d'activité ne cesse de progresser.

L'effort pour renforcer l'attractivité se poursuit. Un plan « volontariat » sera présenté cette année : il portera notamment sur les modalités d'engagement et sur les relations avec les employeurs.

Nous veillons aussi à la parution rapide du décret relatif aux trimestres de retraite supplémentaires accordés aux sapeurs-pompiers volontaires.

L'explosion de l'activité de secours aux personnes est due au vieillissement de la population et à la démographie sanitaire.

Nous voulons redonner aux Sdis la maîtrise de leur activité. En effet, les avancées de la loi Matras et de la réforme des transports ambulanciers n'ont pas permis d'endiguer la hausse d'activité.

L'État a soutenu, à hauteur de 150 millions d'euros, l'acquisition de moyens de lutte contre les feux de forêt et finance d'autres équipements.

Je compléterai ma réponse par écrit.

Concurrence déloyale des plateformes de VTC

M. Jacques Fernique .  - Les conditions de travail des chauffeurs de taxi se dégradent continuellement, notamment à cause de la concurrence déloyale des plateformes de VTC, dont les chauffeurs enfreignent régulièrement la réglementation sans être sanctionnés. Cela exacerbe les tensions : agressions, voitures endommagées et même brûlées dans le Bas-Rhin.

Pourtant, une loi encadre l'activité des chauffeurs de VTC. Elle leur impose de retourner à leur siège social entre chaque course et leur interdit de stationner ou de marauder aux abords des lieux stratégiques comme les gares. Or, ces dispositions sont largement bafouées.

Les chauffeurs de taxi du Bas-Rhin ne demandent pas la suppression de la concurrence, ni même une nouvelle loi, mais des contrôles et des sanctions pour faire respecter les règles.

Les plateformes elles-mêmes incitent leurs chauffeurs à contourner les règles. Depuis les révélations des Uber files, nous savons comment le ministre de l'économie de l'époque, M. Macron, avait oeuvré complaisamment pour déréguler le marché.

Les mesures annoncées par le Gouvernement ne changeront pas la donne. Pourquoi se borner à sanctionner les chauffeurs ? Il faut cibler le fonctionnement des plateformes. Des solutions collectives existent. En Allemagne, par exemple, les VTC ne peuvent accepter de nouvelles courses tant qu'ils ne sont pas revenus à leur base. Pourquoi ce qui s'applique à Kehl ne pourrait pas s'appliquer à Strasbourg ?

Que compte faire le Gouvernement ?

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - La ministre du numérique travaille sur la régulation des plateformes.

Les forces de l'ordre mènent des opérations de surveillance et de contrôle. Leurs outils ont été renforcés. Une expérimentation de trois mois a été menée sur le ressort de douze tribunaux judiciaires. De nouveaux délits, tels que la prise en charge d'un client sur la voie ouverte sans justification, ont été généralisés depuis le 1er juillet.

Dans le Bas-Rhin, 17 infractions ont été relevées au premier trimestre de cette année. C'est probablement très inférieur à la réalité, mais cela montre un mouvement.

Dans l'agglomération parisienne, où la fraude est généralisée, l'unité de contrôle des transports de personnes joue un rôle central contre les taxis clandestins et le racolage. Pour renforcer la réponse pénale, un plan d'action a été mis en oeuvre par le préfet de police, en lien étroit avec la justice. Nous ciblons particulièrement les récidivistes du racolage.

Nous sommes parfaitement mobilisés contre ces infractions.

Bilan financier de la lutte contre l'immigration illégale à Mayotte

Mme Viviane Artigalas, en remplacement de M. Saïd Omar Oili .  - Veuillez excuser mon collègue Saïd Omar Oili, actuellement retenu par la CMP sur la loi de refondation de Mayotte.

Dans sa réponse à une question écrite sur l'opération Wuambushu en date du 26 juin 2025, le ministre de l'intérieur a rappelé les opérations menées en 2024 contre l'immigration clandestine à Mayotte, mais sans aucun bilan financier. Or les reconduites à la frontière ont diminué de 20 % par rapport à 2023.

Pour évaluer les politiques publiques, les parlementaires doivent pouvoir mettre les coûts en regard des résultats. Quel est le bilan financier de la lutte contre l'immigration illégale à Mayotte ?

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - La lutte contre l'immigration irrégulière à Mayotte émarge à plusieurs programmes budgétaires : « Police nationale », « Gendarmerie nationale », « Immigration et asile ». Les crédits de paiement dédiés à la lutte contre l'immigration clandestine à Mayotte sont passés de 9,5 millions d'euros en 2022 à 15 millions d'euros en 2024, soit une augmentation de 60 % en trois ans. Les dépenses de fonctionnement -  frais hôteliers, coût des centres de rétention administrative et des zones d'attente, interprétariat, entretien immobilier, accompagnement sanitaire  - sont passées de 4,5 millions d'euros en 2022 à 5,8 millions en 2024. Quant aux dépenses d'éloignement, elles sont passées de 4,5 millions d'euros en 2022 à 8,9 millions d'euros en 2024, en raison de l'intensification des mesures d'éloignement. Enfin en matière immobilière, l'année 2024 a été marquée par un engagement de plus de 5 millions d'euros pour la réalisation d'un nouveau local de rétention administrative de 48 places.

Relations des maires avec les services du renseignement territorial

M. Jean-Baptiste Blanc .  - Le 22 juin dernier, un drame a eu lieu dans le village de Goult, dans mon département de Vaucluse : une fusillade a causé la mort de deux personnes et en a blessé trois autres. Le couple ciblé par cette attaque à l'arme lourde venait de se marier et sortait de la salle des fêtes de la commune, louée pour l'occasion. Il s'agit probablement d'un règlement de comptes, le marié étant connu des services de police pour association de malfaiteurs et trafic de stupéfiants.

Le maire est responsable de la sécurité publique, mais manque d'informations sur la dangerosité des personnes. Ne faudrait-il pas autoriser les échanges entre maires et services du renseignement territorial en amont de l'octroi d'une salle municipale ? C'est une demande des élus. Les maires conserveraient bien entendu le caractère secret de ces informations. Qu'en pense le Gouvernement ?

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - Le drame du 22 juin 2025 est inacceptable. Le renforcement de la sécurité quotidienne des Français est une des priorités du ministre de l'intérieur.

La loi Narcotrafic du 13 juin 2025 - à laquelle le Sénat n'est pas étranger - renforce nos moyens d'action. Faire reculer la délinquance n'est pas que l'affaire de l'État : cela repose sur une dynamique collective, autour d'un continuum de sécurité, dont les maires sont un des acteurs essentiels.

Aux termes de la loi de 2007 relative à la prévention de la délinquance, les responsables locaux de la police ou de la gendarmerie nationales doivent informer le maire des infractions causant un trouble à l'ordre public sur le territoire communal et le maire peut solliciter le procureur de la République pour en connaître les suites judiciaires. En outre, les policiers municipaux disposent déjà d'un accès étendu aux fichiers de l'État.

Les agents du renseignement territorial entretiennent des relations suivies avec les élus locaux et les maires, sous réserve des dispositions légales et réglementaires - dont le secret de l'instruction, principe cardinal de notre procédure pénale.

Un travail sur votre proposition avec les ministères de l'intérieur et de la justice me semble essentiel, pour préserver la tranquillité de nos concitoyens et permettre aux élus locaux d'agir de manière préventive.

La séance est suspendue à midi et quart.

Présidence de Mme Anne Chain-Larché, vice-présidente

La séance reprend à 14 h 30.