II. LE PROGRAMME 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE »

A. LES GRANDES LIGNES DU PROGRAMME EN 2014-2015

1. L'évolution des crédits

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit l'inscription dans ce programme de 222,5 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 270 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une baisse respective de 18 % et 4 % par rapport à 2014. En neutralisant les mesures de périmètre , cette baisse est encore plus forte puisqu'elle atteint -22 % pour les AE et -7 % pour les CP .

En effet, le périmètre de l'action 04 « Instruments de pilotage et d'études » évolue, puisqu'il est désormais le réceptacle de l'ensemble des dépenses support mutualisées du nouveau Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) : la finalisation de ce processus suppose le transfert des dépenses de fonctionnement courant et de la masse salariale des agents de l'ancienne Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé), qui figurait auparavant au programme 147 « Politique de la ville », soit un abondement budgétaire de 7,5 M€ .

ÉVOLUTION PLURIANNUELLE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 112

(EN MILLIONS D'EUROS)

Source : PLF 2015

Votre rapporteur déplore l'attrition continue des crédits de ce programme depuis dix ans . Entre 2006 et 2015, les autorisations d'engagement (AE) sont passées de 402 M€ à 222 M€, soit une baisse de près de 45 % . Les crédits de paiement suivent la même évolution, avec un décalage dans le temps : ils diminuent de 400 M€ en 2007 à 270 M€ en 2015 (-32 %).

ÉVOLUTION DÉTAILLÉE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 112 EN 2014-2015

LFI 2014

PLF 2015

Variation 2014/2015

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 01

Attractivité économique et compétitivité des territoires

110 385 765

106 533 765

88 920 810

95 576 267

-19%

-10%

Action 02

Développement solidaire et équilibré des territoires

124 430 785

139 459 583

89 495 000

130 892 971

-28%

-6%

Action 04

Instruments de pilotage et d'étude

35 106 097

35 106 097

44 111 362

44 111 362

26%

26%

Total

269 922 647

281 099 445

222 527 172

270 580 600

-18%

-4%

Source : PLF 2015

a) Détail par action

L' action 01 « Attractivité économique et compétitivité des territoires » regroupe 40 % des crédits du programme.

Relèvent notamment de cette action la politique des pôles de compétitivité et des grappes d'entreprises, l'accompagnement économique territorial des restructurations du ministère de la défense, les aides aux entreprises via la prime d'aménagement du territoire (PAT), la subvention à l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et le soutien à certaines grandes opérations d'aménagement ou d'urbanisme dans le cadre des contrats de plan État-région (comme la reconversion des anciens bassins miniers en Lorraine et Nord Pas-de Calais, l'opération « Euromed » de la métropole marseillaise ou la rénovation urbanistique du littoral en Languedoc-Roussillon).

Les crédits afférents diminuent de 19 % en autorisations d'engagement (AE), passant de 110,4 M€ en 2014 à 88,9 M€ pour 2015, et de 10 % en crédits de paiement (CP), passant de 106,5 M€ à 95,6 M€.

L' action 02 « Développement solidaire et équilibré des territoires » concentre 40,2 % des crédits du programme.

Relèvent notamment de cette action la mise en oeuvre des pôles d'excellence rurale (PER), l'amélioration de l'égalité d'accès des usagers aux services publics, l'amélioration de l'accès à l'offre de soins grâce aux maisons de santé, ainsi que la réalisation de projets territoriaux d'envergure (restauration du caractère maritime du Mont Saint-Michel, mise en valeur du littoral aquitain, valorisation et aménagement des sillons fluviaux, développement durable des massifs montagneux).

Les autorisations d'engagement sont en diminution de 28% pour cette action, passant de 124  M€ en 2014 à 89,5 M€ pour 2015, tandis que les crédits de paiement baissent de 6 %, passant de 139,5 M€ à 130,9 M€.

L' action 04 « Instruments de pilotage et d'études » (il n'y a plus d'action 3), qui représente 19,8 % des crédits du programme, regroupe les moyens de personnel, de fonctionnement et d'études de la Datar, ainsi que les moyens mis en oeuvre dans le cadre de l'assistance technique des programmes européens et de la coopération internationale.

Les crédits sont en augmentation de 26 % pour cette action, aussi bien en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, mais cette hausse est essentiellement due à l'évolution du périmètre évoquée précédemment.

b) La situation financière du FNADT

Le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), créé par la loi n° 95-115 du 4 février 1995, est le bras armé du programme 112, dont il représente 80 % des crédits . Il regroupe des crédits d'intervention qui sont répartis en deux sections :

- une section générale , dont la gestion se fait au niveau national par décisions prises par le Premier ministre en comité interministériel. Elle a vocation à financer de grands projets , pour lesquels la subvention nécessaire est supérieure à 300 000 euros ;

- une section locale , divisée entre une section contractualisée dans le cadre des contrats de projets État-régions (CPER), et une section libre d'emploi dont les crédits sont délégués aux préfets de régions .

CRÉDITS DU FNADT (EN MILLIONS D'EUROS)

LFI 2014

PLF 2015

Variation 2014/2015

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Partie contractualisée (CPER)

118

121,9

100

110,12

-15%

-10%

FNADT non contractualisé

81,82

95,06

55,036

92,97

-33%

-2%

Total FNADT

199,8

217

155,04

203,09

-22%

-6%

Source : PLF 2015

En 2015, les crédits du FNADT diminuent fortement : -22 % en AE et -6 % en CP. La forte baisse des autorisations d'engagement est liée à trois phénomènes :

- l'enveloppe est calibrée sur les capacités réelles d'engagement de conventions de subvention au cours de la première année de lancement de la nouvelle génération de CPER (baisse des AE de 18 M€) ;

- l' expérimentation des centres-bourgs avait conduit à une augmentation exceptionnelle de 15M€ de l'enveloppe non contractualisée locale en 2014, qui n'est pas reconduite en 2015 (baisse des AE de 15 M€) ;

- l'achèvement de la 2 ème génération des pôles d'excellence rurale (PER) qui ne font pas l'objet de nouvelles autorisations d'engagement (baisse des AE de 8 M€).

AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT DU FNADT (EN MILLIONS D'EUROS)

Source : PLF 2015

Les perspectives à moyen terme du FNADT sont largement conditionnées par le rythme de montée en puissance des nouveaux contrats de plan État-régions (CPER) 2015-2020 : le triennal 2015-2017 annonce une augmentation des capacités d'engagement du FNADT, passant de 158 M€ en 2015 à 165 M€ en 2016 puis 179 M€ en 2017. Cependant, en raison de la forte diminution de la part non contractualisée , la capacité d'engagement du FNADT restera nettement inférieure en 2017 à son niveau de 2014.

Les crédits de paiement suivent la même tendance avec un décalage dans le temps, la baisse étant cependant moins marquée, en raison de la résorption parallèle des restes à payer . Ce processus engagé à la fin des années 2000 vise à résorber la dette exigible du FNADT : on est ainsi passé de 696 M€ de restes à payer fin 2009, à 565 M€ fin 2014, soit une réduction de 19 % en cinq ans .

CRÉDITS DE PAIEMENT DU FNADT (EN MILLIONS D'EUROS)

Source : PLF 2015

2. La création du Commissariat général à l'égalité des territoires

Afin de rompre avec une approche sectorielle des politiques territoriales et de privilégier une réflexion transversale , la mise en place du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) a été décidée à l'été 2013. Cette nouvelle structure, créée par le décret n° 2014-394 du 31 mars 2014, résulte de la fusion du Secrétariat général du Comité interministériel des villes (SG-CIV), de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé), et de la Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (Datar).

Trois motifs ont présidé à la création du CGET : la lutte contre les inégalités territoriales , la construction d'une politique globale des territoires atténuant la dichotomie classique entre milieux urbains et ruraux, la réconciliation entre décentralisation et politique des territoires en renforçant le dialogue entre les collectivités territoriales et l'État.

Service du Premier ministre à vocation interministérielle , le CGET intervient, en lien avec les ministères concernés, sur des thématiques concrètes : l'éducation prioritaire ; la lutte contre les inégalités de tout ordre, les concentrations de pauvreté et les fractures économiques, sociales, numériques et territoriales ; le renforcement de la présence des services publics dans les quartiers de la politique de la ville et les espaces ruraux ; le développement des infrastructures et des transports pour désenclaver les territoires et permettre une plus grande mobilité de leurs habitants ; l'accès aux soins ; l'accès aux nouvelles technologies et le développement du haut et du très haut débit ; la transition écologique et énergétique.

Pour agir sur ces thématiques, le CGET pilote des politiques contractuelles à travers deux dispositifs d'intervention principaux : les nouveaux contrats de ville déployés en 2015 (dans le cadre du programme 147 « Politique de la ville » qui ne sera pas examiné ici) et la nouvelle génération de contrats de plan État-régions (CPER) pour la période 2015-2020.

Outre la politique contractuelle, l'action du CGET est accentuée par des dispositifs d'intervention spécifiques dans les territoires les plus fragilisés, comme la prime d'aménagement du territoire (PAT), l'accompagnement territorial du redéploiement des armées, le réseau de maisons de services au public, etc.

L'organisation du CGET s'articule autour de trois directions (direction de la ville et de la cohésion urbaine, direction des stratégies territoriales et direction du développement des capacités des territoires) et de trois missions transversales (contractualisation et partenariats territoriaux, affaires européennes, coordination de l'action interministérielle et sectorielle).

Le CGET assure également le secrétariat permanent de l'Observatoire des territoires , qui constitue, depuis 2004, le lieu de synthèse et de mise en perspective des informations, de plus en plus nombreuses, qui sont produites sur les territoires par les services de l'État, les collectivités territoriales et les organismes d'étude et de recherche. Son prochain rapport, qui paraîtra au début 2015, aura pour thème « qualité de vie, habitants, territoires ».

Le budget de fonctionnement courant du CGET est mutualisé au sein du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », d'où le transfert budgétaire des crédits auparavant affectés à l'ACSé dans le programme 147 « Politique de la ville », prévu dans ce PLF 2015. Des économies sont attendues sur la période 2015-2017, grâce aux gains de productivité générés par la fusion de trois administrations et au regroupement des agents sur un site unique à Saint Denis à la fin de l'année 2014. D'ores et déjà, les dépenses relatives au fonctionnement courant et à la masse salariale du CGET diminuent de 2,3 % entre 2014 et 2015, soit presque un million d'euros d'économies.

Votre rapporteur pour avis souhaite évidemment le succès de cette nouvelle structure, tout en relevant qu'elle ne constitue finalement que le plus récent épisode de la longue « errance administrative » de la Datar au cours des dernières décennies .

3. La nouvelle génération de contrats de plan État-région

La programmation des CPER 2007-2013 touche à sa fin. Fin 2013, le taux d'avancement est de 83,1 %, soit plus d'une année de retard par rapport à l'objectif initialement fixé pour les sept années d'exécution. Les CPER 2007-2013 ont donc été prolongés en 2014 , afin de permettre l'achèvement de certaines opérations en cours et la préparation des futurs contrats : leur taux d'avancement devrait finalement atteindre 89,5 % à la fin de l'année.

À noter, qu'en raison de la suspension de l'écotaxe à la fin 2013 et des incertitudes qui ont pesé sur les ressources de l'AFITF durant l'année 2014 , il n'y a eu aucun engagement supplémentaire sur l'axe transport pour l'année écoulée.

MONTANTS EFFECTIVEMENT ENGAGÉS (EN MILLIONS D'EUROS) ET TAUX DE RÉALISATION DES CRÉDITS POUR LES CPER 2007-2014

Source : PLF 2015

En dépit d'une année de transition supplémentaire, la mise en place des nouveaux CPER 2015-2020 s'effectue avec du retard . Le calendrier de la réforme territoriale voulue par le Gouvernement a entraîné le report de la phase de négociation financière des contrats à l'automne 2014. Dans ce contexte, l'administration a confirmé à votre rapporteur que les arbitrages politiques définitifs sur la nouvelle génération de CPER seraient rendus avant la fin de l'année. En tout état de cause, la signature juridique de ces contrats ne pourra intervenir avant le mois de mars 2015 , à l'issue des consultations requises dans le cadre de l'évaluation stratégique et environnementale de ces documents.

Globalement, l'enveloppe de crédits de l'État disponible pour la contractualisation sur 2015-2020 enregistrera une légère baisse (12,5 Mds€ contre 12,75 Mds€ pour la génération précédente), sachant que cette prochaine programmation porte sur une durée de six ans. Le montant des crédits à la charge du FNADT s'élèvera à 735 millions d'euros sur l'ensemble de la période, dont 100 millions d'euros pour 2015. L'effort de redressement des comptes publics est pris en compte par le resserrement des priorités (sur l'emploi, la compétitivité, la transition écologique et énergétique et l'égalité des territoires) et une plus grande sélectivité des projets.

Les axes d'intervention des nouveaux CPER 2015-2020

Pour la métropole, cinq thématiques ont été définies : l'enseignement supérieur, la recherche et l'innovation ; l'innovation, les filières d'avenir et l'usine du futur ; la mobilité multimodale ; la couverture du territoire par le très haut débit et le développement des usages du numérique ; la transition écologique et énergétique.

Pour l'outre-mer, six thématiques ont été retenues : les infrastructures et services collectifs de base, la lutte contre la vulnérabilité des territoires et populations ; l'aménagement urbain durable ; la gestion des ressources énergétiques et environnementales ; le développement de la recherche et de l'innovation, les filières d'excellence ; la cohésion sociale et l'employabilité ; le développement économique durable.

Enfin, les contrats de plan comprendront un volet territorial portant sur des territoires à enjeux spécifiques.

Par ailleurs, l'élaboration de cette génération de contrats de plan s'inscrit dans une stratégie globale à l'horizon 2020, en cohérence avec la programmation des fonds européens 1 ( * ) . Elle aura également vocation à accompagner les évolutions annoncées par la réforme de l'organisation territoriale : une clause de révision des contrats a ainsi été introduite en 2016 , après les élections régionales.

Votre rapporteur s'étonne du décalage entre les ambitions affichées par le Gouvernement dans le cadre de la réforme territoriale , qui souhaite réduire le nombre des régions et renforcer leurs compétences, et le traitement réservé aux CPER, censés être la déclinaison financière de ce projet : les retards sont accumulés dans leur négociation et leur mise en oeuvre, la dotation de l'État est annoncée en baisse, et la mise en oeuvre du volet « mobilité » précarisée par les revirements successifs concernant les ressources de l'AFITF, dont 40% des crédits sont destinés aux CPER et aux programmes de modernisation des itinéraires routiers (PDMI).

Enfin, votre rapporteur dénonce l'effet d'optique consistant à affirmer que les crédits relatifs au CPER sont globalement maintenus : ce calcul n'inclut pas le choix du Gouvernement d'abandonner plusieurs dispositifs au profit de la contractualisation (pôles de compétitivité, pôles d'excellence rurale, maisons de santé pluriprofessionnelles), il convient donc d'y retrancher l'ensemble des crédits afférents qui ne seront pas reconduits.


* 1 L'année 2015 est la deuxième année de programmation des fonds européens pour la période 2014-2020, soit environ 14,5 Mds€ du fonds européen de développement régional (FEDER) et du fonds social européen (FSE). Gérés en quasi-totalité par les conseils régionaux, ces programmes devront concentrer les investissements qu'ils financent sur des projets mobilisateurs de croissance intelligente (innovation, PME, TIC), durable (énergies renouvelables, efficacité énergétique) et inclusive (emploi, formation, inclusion) dans les territoires afin d'atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020. Le CGET assure la coordination de ces actions au niveau national.

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