PREMIÈRE PARTIE - ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Le budget 2020 de l'enseignement supérieur s'inscrit dans la continuité de la trajectoire haussière amorcée en loi de finances initiale (LFI) pour 2018 et poursuivie en LFI pour 2019. La dotation en crédits de paiement des programmes 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 251 « Vie étudiante » augmente de 242 millions d'euros ( + 1,49 % 2 ( * ) ) pour atteindre 16,5 milliards d'euros .

Votre rapporteur pour avis reconnaît cet effort budgétaire qui témoigne de l'importance accordée par le Gouvernement à un secteur stratégique pour l'économie de notre pays et la cohésion de notre société . L'enseignement supérieur forme en effet une part essentielle de notre jeunesse à l'acquisition d'un diplôme ouvrant les portes de la vie professionnelle. Il participe aussi, par son imbrication avec le monde de la recherche, à la diffusion de connaissances et au rayonnement de la science française dans le monde. Ce faisant, l'enseignement supérieur d'aujourd'hui conditionne le pays de demain, son dynamisme, la bonne santé de son économie et le degré de cohésion de son tissu social.

Ces effets multiplicateurs prouvent que l'enseignement supérieur ne doit pas être considéré comme une simple dépense, mais d'abord comme un investissement pour l'avenir . L'État doit donc être à la hauteur de l'enjeu. Or si le projet de loi de finances (PLF) pour 2020 apporte, pour la troisième année consécutive, un réel soutien à l'enseignement supérieur , ce n'est malheureusement pas dans des proportions qui permettent de faire face aux nombreux défis qui se posent à ce secteur. Votre rapporteur pour avis émettra donc un avis favorable à l'adoption de ce budget, tout en formulant plusieurs réserves .

Dans le cadre de l'examen des crédits consacrés à l'enseignement supérieur au sein de la Mires, il a souhaité cette année consacrer un développement particulier à la question des ressources propres des établissements , notamment celles issues du mécénat . À l'heure où l'investissement public n'est pas à la hauteur des besoins et où l'avenir des droits d'inscription est incertain, cette troisième source de financement mérite d'être explorée et encouragée.

I. UN BUDGET DE SOUTIEN À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR QUI MANQUE TOUTEFOIS D'AMBITION

A. DES MOYENS SUPPLÉMENTAIRES EN DEÇÀ DES BESOINS DE FINANCEMENT DES ÉTABLISSEMENTS

Dans le PLF pour 2020, le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » , qui représente 48 % du budget de la Mires et finance les établissements d'enseignement supérieur, progresse de 175,8 millions d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 1,29 % par rapport à la LFI 2019. Sa dotation s'établit à 13,7 milliards d'euros .

Les crédits nouveaux sont essentiellement destinés à financer la poursuite de la mise en oeuvre du « Plan Étudiants » et celle du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), la généralisation du « dialogue stratégique et de gestion », ainsi que la réforme des études de santé.

1. La poursuite de la mise en oeuvre du « Plan Étudiants »

Lancé le 30 octobre 2017 par le ministre de l'éducation nationale et la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, le « Plan Étudiants » vise à améliorer l'orientation des lycéens dans l'enseignement supérieur et à favoriser la réussite des étudiants en licence. Parmi ses principales mesures figurent :

- la procédure d'affectation dans l'enseignement supérieur Parcoursup , instaurée par la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants, dite « loi ORE » (cf. encadré ci-après) ;

- l'ouverture de places supplémentaires en licence pour tenir compte de l'évolution de la démographie étudiante et des tensions sur les effectifs existant dans certaines filières ;

- la mise en place de parcours de formation adaptés pour les bacheliers ayant reçu une réponse conditionnelle à la suite de leurs voeux d'affectation sur Parcoursup (dispositif dit des « Oui, si ») ;

- l'instauration de la licence dite « sur mesure » , c'est-à-dire personnalisée et modulable selon les besoins de chaque étudiant ;

- l'encouragement à de nouvelles formes de pédagogie comme la pédagogie par projet, la pédagogie inversée ou l'enseignement par les pairs.

En 2018, une enveloppe de 45,1 millions d'euros avait été consacrée à la première année de financement du « Plan Étudiants ». En 2019, la dotation dédiée à sa montée en charge était passée à 99,5 millions d'euros. Dans le PLF pour 2020 , 142,5 millions d'euros sont budgétés, soit une hausse de 43 millions d'euros par rapport à la LFI pour 2019. En cumulé sur ces trois années, l'effort financier s'élève à 287,1 millions d'euros , soit un peu plus de la moitié de l'objectif de 500 millions d'euros fixé pour 2022, dernière année de mise en oeuvre du Plan.

Les crédits supplémentaires prévus pour 2020 doivent être, pour l'essentiel, consacrés à l'ouverture de nouvelles places en licence , dont le nombre et la répartition seront décidés, au niveau académique, dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion entre les établissements et leur tutelle.

Si votre rapporteur pour avis salue l'augmentation , depuis 2018, des capacités d'accueil dans les filières en tension (près de 38 000 places créées en première et deuxième années des filières universitaires), il s'interroge sur la persistance de places vacantes dans certaines formations. Un travail fin et régulier du ministère, filière par filière, devrait permettre de supprimer les places qui ne trouvent pas preneurs et celles qui n'insèrent plus suffisamment leurs diplômés. Une telle démarche permettrait aussi d' afficher dans Parcoursup le nombre réel et sincère de places disponibles .

L'enveloppe consacrée au « Plan Étudiants » en 2020 financera également le développement des dispositifs « Oui, si » . À ce jour, il n'existe pas de recensement exhaustif des pratiques mises en place par les établissements pour accompagner les étudiants ayant fait l'objet d'une admission conditionnelle. Il semble que certains se soient investis plus vite que d'autres dans ce nouveau dispositif. Aussi, votre rapporteur pour avis estime qu' un travail d'harmonisation des pratiques et d'accompagnement des établissements est nécessaire. Le nouveau dialogue stratégique et de gestion pourrait en constituer le cadre.

Enfin, les crédits supplémentaires participeront au déploiement des « campus connectés ». En mai 2019, au lendemain du Grand débat national, la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche avait annoncé le lancement de cette initiative ayant pour ambition « de reconnecter à la formation des jeunes vivants dans des territoires isolés » et de leur permettre « de poursuivre leurs études dans un contexte sécurisant, avec un encadrement individualisé et sans être forcés à quitter leurs territoires d'origine » . Les 13 premiers campus connectés ont ouvert leurs portes à la rentrée 2019 dans plusieurs régions (Bretagne, Grand Est, Occitanie, Bourgogne Franche-Comté, Rhône-Alpes Auvergne et dans la région Sud). Dès janvier 2019, une deuxième vague de « territorialisation de l'enseignement supérieur » sera lancée afin de créer près d'une centaine de nouveaux campus.

Le bilan de la deuxième année de mise en oeuvre de Parcoursup
et la préparation de la troisième année

• L'année 2019 représentait la deuxième année de mise en oeuvre de Parcoursup. 1 500 nouvelles formations ont été introduites, dont les instituts de formation en soins infirmiers et les établissements de formation du travail social, portant le nombre de formations figurant sur la plateforme à plus de 14 000.

Pour cette édition, près de 900 000 candidats se sont inscrits et ont confirmé au moins un voeu, soit 10,6 % de plus qu'en 2018. Cette progression est due à la fois au nombre plus important de formations proposées, qui a créé une forme d'appel d'air, et à la croissance des effectifs d'étudiants.

En 2019, les candidats se sont vus proposer près de 2,9 millions de propositions d'admission , soit une hausse de 20 % par rapport à 2018. Le 14 septembre, date de fermeture effective de la plateforme, 92,5 % des néo-bacheliers avaient reçu au moins une proposition d'admission , tandis que 3,4 % n'avaient reçu que des réponses négatives et que 4,1 % avaient démissionné alors qu'ils avaient encore des propositions en attente.

L'application, cette année, d'une même méthode de calcul pour la fixation des quotas de boursiers semble avoir porté ses fruits comme l'atteste l'augmentation des pourcentages d'élèves boursiers dans des formations habituellement en retard sur ce sujet.

• Au-delà de ces chiffres encourageants, votre rapporteur pour avis juge , au terme des auditions qu'il a menées sur le projet de budget et de celles auxquelles il a participé sur le suivi de la mise en oeuvre de la loi ORE 3 ( * ) , que le bilan de cette deuxième année est globalement positif .

Cette campagne a été plus efficace que la précédente, d'abord par effet d'apprentissage, puis par le choix d'un calendrier plus resserré. Les difficultés de gestion, qui ont pu survenir, ont rapidement été traitées, sans conséquence notable sur le fonctionnement de la plateforme et le service rendu aux étudiants.

Néanmoins, plusieurs points techniques restent à améliorer :

- la date de fin de la procédure doit être réellement effective : prévue cette année le 19 juillet, elle a, dans les faits, été reportée au 14 septembre ;

- le vocabulaire utilisé par la plateforme mériterait d'être clarifié (par exemple, la notion de « rang limite d'appel ») ;

- un effort de formation des personnels chargés de l'utilisation de la plateforme dans les établissements (par exemple, les proviseurs), de même qu'un effort de simplification de la documentation, seraient nécessaires ;

- la plateforme doit s'adapter au calendrier particulier des formations en apprentissage ;

- les « attendus locaux » doivent être plus précis et plus lisibles pour les étudiants, ainsi qu'harmonisés sur l'ensemble du territoire.

À cette liste non exhaustive viennent s'ajouter des questions de fond. Sur la hiérarchisation des voeux , votre rapporteur pour avis estime qu'une opposition stricte à cette idée est contre-productive : l'absence totale de hiérarchisation provoque à un moment donné une congestion du système. Il serait plus pertinent de distinguer deux phases, une première sans hiérarchisation, une seconde avec hiérarchisation . La gestion des listes d'attente s'en trouverait plus efficace et plus transparente.

Sur les algorithmes locaux - expression qui peut prêter à confusion, laissant croire que la sélection des dossiers ne s'effectuerait qu'à travers l'application de formules mathématiques -, votre rapporteur pour avis ne souhaite pas un basculement vers un système entièrement automatisé : la part du traitement humain des dossiers doit rester prépondérante . En revanche, il estime que l'objectif de transparence doit passer par une amélioration de la qualité des « attendus locaux » et par leur harmonisation filière par filière.

L'année 2020 verra l'achèvement de l'intégration à Parcoursup de l'ensemble des formations reconnues par l'État . Il est prévu que plus de 600 formations dont les instituts d'études politiques, les écoles de commerce, les instituts de formation aux professions paramédicales et les écoles de formation aux métiers de la culture, rejoignent ainsi la plateforme. Le ministère a également annoncé l'arrivée d'un nouveau dispositif , Parcourplus , pour mieux accompagner les candidats en reprise d'études, lesquels se sont inscrits en nombre (plus de 100 000) en 2019.

Pour sa part, votre commission , dans le cadre du travail de suivi de Parcoursup mené par Jacques Grosperrin, formulera prochainement des recommandations d'amélioration du dispositif , notamment en matière de transparence.

2. La généralisation du dialogue stratégique et de gestion dont la réussite est conditionnée à plusieurs préalables

En 2018-2019, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a lancé, à titre expérimental auprès de dix établissements volontaires 4 ( * ) , une procédure d'échanges entre ces derniers et leur tutelle concernant leur budget et leurs projets stratégiques, en lien avec les priorités nationales fixées par le Gouvernement. Une dotation de 5 millions d'euros a été allouée à ces établissements expérimentateurs.

Pour l'année 2019-2020, cette procédure qualifiée de « dialogue stratégique et de gestion » est étendue à 70 universités et 10 écoles comptant plus de 2 500 étudiants. Elle vise à inciter les établissements à se doter d' une vision pluriannuelle de leur stratégie et de leurs moyens , en coopération avec l'ensemble des financeurs présents sur leur territoire, notamment les collectivités territoriales et les entreprises.

Cette démarche généralisée s'effectuera en deux temps :

- au cours du dernier trimestre 2019, un dialogue de gestion , conduit par les rectorats de région, portera sur la trajectoire financière et salariale des établissements, sur leurs perspectives en matière de capacités d'accueil et de déploiement des dispositifs de réussite prévue par la loi ORE ;

- au cours du premier semestre 2020, un dialogue stratégique , également conduit par le rectorat de région et associant les acteurs locaux, sera consacré à deux ou trois projets proposés par les établissements, si possible co-financés, et s'inscrivant dans le cadre des priorités gouvernementales.

Chacune de ces étapes donnera lieu à un arbitrage par le ministère.

Dans le PLF pour 2020, une enveloppe de 50 millions d'euros est consacrée à ce dialogue, dont 15 millions exclusivement pour les projets stratégiques des établissements. Afin de donner à ces derniers plus de prévisibilité sur leurs dotations financières, le ministère a, cette année, avancé la date de pré-notification de l'essentiel de leurs crédits au mois d'octobre, au lieu du mois de décembre.

Votre rapporteur pour avis trouve intéressante cette démarche de rénovation du pilotage des établissements d'enseignement supérieur . Celle-ci avait d'ailleurs été préconisée par la Cour des comptes dans un rapport de juin 2015 commandé par la commission des finances du Sénat 5 ( * ) . Constatant que « contrairement aux opérateurs de l'État de droit commun, les universités ne bénéficient pas d'un processus annuel de dialogue de gestion avec l'administration centrale qui exerce leur tutelle », la Cour plaidait pour accorder « une place prépondérante au processus de contractualisation associé à un véritable dialogue de gestion entre le ministère et les établissements ». Cette nouvelle modalité d'allocation des moyens a le mérite de responsabiliser les établissements en les incitant à mieux définir leurs besoins, à élaborer des projets correspondant à leurs spécificités, à se rapprocher de leurs partenaires économiques et institutionnels locaux. Elle s'inscrit donc pleinement dans la dynamique d'autonomie lancée par la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités dite « loi LRU ».

Toutefois, votre rapporteur note que, pour le moment, ce dialogue peine à se traduire concrètement sur le terrain . Aussi, souhaite-t-il insister sur les préalables à la réussite d'une telle procédure : un véritable accompagnement des établissements dans l'appropriation de ce nouvel outil de pilotage, un souci constant d'information venant de leur tutelle, un engagement de l'État à prendre ses responsabilités dans le financement de l'évolution de la masse salariale (cf. II. A. 2.).

3. Une revalorisation indemnitaire insuffisante et une reconnaissance de l'investissement pédagogique des enseignants imprécise

Parmi les nouveaux moyens accordés l'année prochaine au programme 150, 50 millions d'euros sont destinés à la poursuite de la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), ainsi qu'à deux nouvelles mesures de reconnaissance de l'investissement pédagogique des enseignants.

Conclu en 2016 à la suite du vote de la loi de finances pour 2016, le PPCR a revu les principes de la politique de rémunération dans les trois fonctions publiques et restructuré les grilles de rémunération des corps et cadres d'emplois des catégories A, B et C. Sa mise en oeuvre, étalée de 2016 à 2020, vise à mieux reconnaître les qualifications des fonctionnaires et à leur garantir des carrières plus valorisantes.

Parallèlement à ce protocole, une concertation portant sur la reconnaissance de l'investissement pédagogique s'est déroulée en novembre 2018. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a rendu ses arbitrages en mars dernier et annoncé, d'une part, la mise en place d'un congé pour projet pédagogique , qui sera le pendant du congé pour recherche ou conversion thématique (CRCT) destiné - comme son nom l'indique - aux projets de recherche, d'autre part, l a création d'une prime de reconnaissance de l'investissement pédagogique . Interrogés par votre rapporteur pour avis, les services du ministère ont toutefois indiqué que les caractéristiques de cette prime, qui suscite beaucoup de scepticisme chez les organisations syndicales, n'étaient pas encore définies.

D'une manière générale, les représentants syndicaux, reçus par votre rapporteur pour avis, estiment que les sommes consacrées à la valorisation de la rémunération des enseignants sont nettement en deçà des besoins , leur évolution n'étant même pas indexée sur celle de l'inflation.

4. Une réforme des études de santé ambitieuse dont le déploiement suscite des inquiétudes

• La loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et la transformation du système de santé a procédé à une réforme structurelle des études de santé (médecine, pharmacie, maïeutique et odontologie).

Partant du constat que la sélection des candidats via la première année d'études communes aux études de santé (Paces) n'était pas satisfaisante tant sur le plan de l'organisation, de la pédagogie, du contenu des enseignements que sur le plan des résultats (taux d'échec important), cette réforme a pour objectif de diversifier les voies d'accès aux études de santé et donc les profils des étudiants recrutés .

Dans cette perspective, l'admission en deuxième et troisième années n'est plus ouverte aux seuls étudiants engagés dans des études de santé dès la première année , mais aussi à des candidats justifiant certains grades, titres ou diplômes.

Cette réforme met également fin au numerus clausus , fixé auparavant au niveau national par les ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé, en confiant aux universités la détermination des capacités d'accueil en deuxième et troisième années du premier cycle .

Dès la rentrée 2020 , la Paces et le numerus clausus disparaîtront donc au profit de trois nouveaux parcours pour accéder aux formations de santé, dont les modalités ont été précisées par un décret et un arrêté publiés au Journal officiel le 5 novembre 2019 6 ( * ) :

- une première année universitaire générale , nommée « portail santé », permettant aux étudiants d'accéder soit aux formations de médecine, de pharmacie, de maïeutique et d'odontologie, soit à d'autres formations conduisant à la délivrance d'un diplôme permettant l'exercice de la profession d'auxiliaire médical, soit encore à des formations conduisant à un diplôme national de licence. Des enseignements pluridisciplinaires doivent y être proposés afin de faciliter les réorientations ;

- une formation de premier cycle de l'enseignement supérieur conduisant à un diplôme national de licence, dans toute discipline au choix de l'étudiant, pourvu que cette formation comporte une « mineure santé » ;

- une formation conduisant à un titre ou diplôme d'État d'auxiliaire médical d'une durée de trois ans minimum.

Afin d'éviter la reconstitution de fait d'une filière unique d'accès aux études de santé, il est prévu que chacune de ces voies ne puisse offrir plus de 50 % des places en médecine.

La sélection pour l'entrée en deuxième ou en troisième année s'effectuera en deux temps :

- les notes obtenues par l'étudiant au cours de l'année « portail santé » ou pendant son année de licence classique permettront à certains d'être directement admis, la part de ces admissions directes ne pouvant excéder 50 % des places offertes ;

- les étudiants non admis par cette voie pourront subir des épreuves de sélection, dont au moins une épreuve orale. Au moins 30 % des places seront réservées à des étudiants ayant validé deux années d'études au moins.

Ces nouvelles modalités d'accès devront être mises en place par les universités pour la rentrée 2020 . Ces dernières disposeront toutefois de la possibilité de maintenir un régime dérogatoire en ne proposant qu'une seule voie d'accès pour cette rentrée uniquement. À titre transitoire également, la Paces sera maintenue en 2020-2021 pour les seuls étudiants redoublants, avec un numérus clausus .

Une marge de manoeuvre est laissée aux établissements pour organiser ces nouveaux parcours. Ils pourront notamment être amenés à conclure des conventions entre eux pour la constitution de « mineures santé » et permettre à des étudiants inscrits dans d'autres disciplines d'en suivre les enseignements.

• Votre rapporteur pour avis comprend la logique de diversification des profils qui sous-tend cette réforme, mais au regard de son caractère particulièrement ambitieux et complexe, ainsi que de son calendrier de mise en oeuvre très bref, il appelle à la vigilance sur quatre points.

Le premier est la question des moyens , qui est centrale. Une enveloppe principale de 6 millions d'euros , inscrite au programme 150, a d'ores et déjà été décaissée le 1 er octobre 2019. À celle-ci doit s'ajouter une enveloppe complémentaire de 10 millions d'euros , qui sera attribuée dans le cadre du nouveau dialogue stratégique et de gestion, sur la base des projets qui auront été présentés par les établissements. Un reliquat d' 1 million d'euros sera également accordé pour la révision des effectifs d'enseignants-chercheurs de santé. Au total, ce sont donc 17 millions d'euros qui seront alloués à cette réforme. Ce montant, dont les modalités d'attribution (pour l'enveloppe complémentaire) sont, à ce stade, insuffisamment précises, ne semble pas rassurer les universités qui alertent sur le risque d'une mise en place a minima faute de moyens suffisants . Devant votre commission, le Président de la Conférence des présidents d'université (CPU) 7 ( * ) a chiffré les besoins à 20 millions d'euros. Depuis, une nouvelle estimation à 30 millions d'euros a été avancée.

Le deuxième sujet d'inquiétude de votre rapporteur pour avis a trait à la qualité des formations dispensées . Compte tenu de la marge de manoeuvre laissée aux établissements dans l'organisation des nouvelles filières, notamment des « mineures santé », des interrogations sur les contenus des enseignements et leur harmonisation d'un territoire à l'autre se posent. Il ne faudrait pas aboutir à la création d'un système à plusieurs vitesses, dans lequel une voie d'accès serait perçue comme plus efficiente qu'une autre et où d'importantes disparités territoriales seraient à déplorer.

Le troisième point de vigilance porte sur l'adéquation de cette réforme avec la situation des filières déjà sous tension . Ce sont en effet ces filières, comme les sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) ou la psychologie, qui pourraient plus naturellement assumer une « mineure santé ». En outre, un nombre important d'étudiants non retenus en études de santé risquent d'être réorientés vers des filières, dont beaucoup - comme le droit - peuvent difficilement augmenter leurs capacités d'accueil.

Enfin, le quatrième sujet d'alerte pointé par votre rapporteur pour avis est le degré d'appropriation de la réforme par les lycéens et étudiants . Au regard des changements majeurs qu'elle induit, un important effort de communication et d'accompagnement des jeunes est indispensable.

5. Un soutien timide aux établissements privés

En 2019, deux nouveaux établissements ont obtenu la qualification d'établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG), portant le nombre d'EESPIG à 61. Ces établissements assurent cette année la formation initiale d'environ 115 000 étudiants 8 ( * ) , soit 4,5 % des effectifs de l'enseignement supérieur 9 ( * ) .

La hausse très importante des effectifs accueillis en EESPIG depuis une dizaine d'années (+ 122 % entre 2008 et 2019), couplée à l'augmentation régulière du nombre d'établissements ayant obtenu la qualification EESPIG, provoque mécaniquement une baisse continue de la dotation de l'État par étudiant de l'enseignement supérieur privé : de 1 130 euros en moyenne en 2008, elle est passée à 625 euros en 2018.

L'augmentation, depuis 2018, de la subvention accordée aux EESPIG, après l'importante baisse enregistrée sous le précédent quinquennat, n'a cependant pas permis d'inverser cette tendance de fond puisque la dépense moyenne par étudiant de l'enseignement supérieur privé est de nouveau descendue à 596 euros en 2019 . Le soutien supplémentaire de 3 millions d'euros prévu dans le PLF pour 2020 , que votre rapporteur pour avis salue sur le principe , n'est toutefois pas d'ampleur à redresser la situation .

Il regrette également que les EESPIG soient doublement pénalisés par l'application d'un taux de mise en réserve des crédits bien supérieur (entre 7 et 8 %) à celui visant les autres actions du programme 150 (3 % maximum). Interrogés par votre rapporteur pour avis sur les raisons du maintien de ce taux particulier, les services du ministère de l'enseignement supérieur ont mis en avant un argument historique. Devant ce qui semble être un point de blocage, votre rapporteur pour avis demande à tout le moins un dégel intégral, en fin d'exercice, des crédits de la réserve qui n'auraient pas été utilisés dans le cadre de circonstances exceptionnelles .


* 2 À l'arrondi supérieur.

* 3 Travail de suivi assuré par Jacques Grosperrin.

* 4 Parmi lesquels les universités d'Aix-Marseille, La Rochelle, Montpellier, Reims, Strasbourg, les COMUE Paris Sciences et Lettres et Côte d'Azur, ainsi que Sciences Po Paris.

* 5 « L'autonomie financière des universités : une réforme à poursuivre », communication à la commission des finances du Sénat, juin 2015.

* 6 Décret n° 2019-1125 du 4 novembre 2019 relatif à l'accès aux formations de médecine, de pharmacie, d'odontologie et de maïeutique ; a rrêté du 4 novembre 2019 relatif à l'accès aux formations de médecine, de pharmacie, d'odontologie et de maïeutique.

* 7 Audition de Gilles Roussel du 9 octobre 2019.

* 8 Hors apprentissage et formation continue.

* 9 Hors apprentissage et formation continue.

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