N° 140

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026,

TOME I

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

Par MM. Laurent DUPLOMB, Franck MENONVILLE
et Jean-Claude TISSOT,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente ; MM. Alain Chatillon, Daniel Gremillet, Mme Viviane Artigalas, MM. Franck Montaugé, Franck Menonville, Bernard Buis, Fabien Gay, Vincent Louault, Mme Antoinette Guhl, M. Philippe Grosvalet, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, M. Rémi Cardon, Mme Anne-Catherine Loisier, secrétaires ; Mmes Martine Berthet, Marie-Pierre Bessin-Guérin, MM. Yves Bleunven, Michel Bonnus, Denis Bouad, Jean-Marc Boyer, Jean-Luc Brault, Frédéric Buval, Henri Cabanel, Alain Cadec, Guislain Cambier, Mme Anne Chain-Larché, MM. Patrick Chaize, Patrick Chauvet, Pierre Cuypers, Daniel Fargeot, Gilbert Favreau, Mmes Amel Gacquerre, Marie-Lise Housseau, Annick Jacquemet, Micheline Jacques, MM. Yannick Jadot, Gérard Lahellec, Mmes Marianne Margaté, Pauline Martin, MM. Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Marc Séné, Lucien Stanzione, Jean-Claude Tissot.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180

Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026)

L'ESSENTIEL

Dans un contexte budgétaire plus contraint encore que celui de l'année précédente, et suivant l'avis majoritaire des rapporteurs pour avis Laurent Duplomb, Franck Menonville et Jean-Claude Tissot, la commission des affaires économiques propose l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar) et de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (Maafar), malgré une baisse des moyens de cette dernière, pour la seconde année consécutive, de l'ordre de 5 % en crédits de paiement (CP) et de 11,6 % en autorisations d'engagement (AE).

Face à l'augmentation, souvent dramatique, de la récurrence des crises en agriculture, les rapporteurs soulignent toutefois que la baisse des crédits de la mission ne saurait se poursuivre éternellement.

Au-delà des lignes budgétaires d'un ministère souvent qualifié, à raison, « de crise », ils réaffirment, comme l'année précédente, la nécessité de mieux « prévenir », les dépenses d'anticipation étant moins élevées que celles intervenant pour « guérir » et soutenir les filières qui doivent l'être.

À cette fin, ils proposent 8 amendements, pour un total de 60,5 M€, destinés essentiellement à soutenir les exploitations en difficulté, notamment par la prise en charge de cotisations, à soutenir les vétérinaires ruraux, maillon indispensable de la prévention et de la lutte contre les crises sanitaires, et enfin à poursuivre l'indispensable politique forestière de la Nation. Ils formulent en outre 7 recommandations.

Les rapporteurs porteront en outre, en leur nom personnel, certains amendements fiscaux visant essentiellement à soutenir les jeunes agriculteurs et à étendre le bénéfice de la dotation pour épargne de précaution aux aléas économiques.

I. BUDGET 2026 : MALGRÉ UNE BAISSE DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR LA SECONDE ANNÉE CONSÉCUTIVE, DES ENGAGEMENTS GOUVERNEMENTAUX GLOBALEMENT TENUS, ET DES RAPPORTEURS VIGILANTS

A. UN BUDGET DE NOUVEAU EN BAISSE, ESSENTIELLEMENT DU FAIT D'UN NOUVEL AFFAIBLISSEMENT DE LA PLANIFICATION ÉCOLOGIQUE

La Maafar comprend quatre programmes, dont les deux principaux affichent une baisse de leurs crédits.

Le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » (P149) est le principal programme de la mission, regroupant environ la moitié des crédits de celle-ci. Composé de huit actions, il supporte l'essentiel des interventions du ministère en faveur de l'agriculture. Ce programme affiche une baisse de 9 % de ses CP, essentiellement portée par la baisse de deux actions :

· « Gestion des crises et des aléas de la production agricole », qui voit ses CP diminuer de près de 110 M€ (- 49 %) ;

· « Planification écologique », qui perd près de 80 M€ (- 31 %).

Le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » (P206) représente un peu moins du quart des crédits. Composé de neuf actions, ses crédits sont pratiquement stables (- 2 %), mais affichent de forts mouvements entre actions et en particulier entre :

· l'action « Lutte contre les maladies animales, protection et bien-être animal », qui voit, fort logiquement, ses CP augmenter de près de 33 % (+ 41 M€) ;

· l'action « Planification écologique », qui voit ses CP diminuer de près de 59 % (- 60 M€).

Le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » (P215), qui regroupe quatre actions et qui vise à financer le fonctionnement du ministère et de ses services, notamment déconcentrés, voit quant à lui ses crédits légèrement augmenter (+ 2 %), avec, là aussi, un mouvement de balancier entre deux actions :

· l'action « Moyens de l'administration », qui augmente de près de 25 %, notamment en correction d'une erreur de crédits commise en loi de finances initiale (LFI) pour 2025 ;

· l'action « Moyens des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, des directions de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (et de la mer) », qui connait une baisse de près de 15 %.

Le programme 381 « Allègement du coût du travail en agriculture » (P381) n'est, quant à lui, pas pilotable, puisque destiné à financer le dispositif « Allègements du coût du travail en agriculture » (TODE-AG), défendu de longue date par les rapporteurs puisqu'indispensable au maintien de la compétitivité agricole.

Au total, la mission perd environ 551 M€ en AE (11,6 %) et 210 M€ en CP (5 %). Sur ces 210 M€, environ 139 sont portés par la baisse des crédits de la planification écologique, soit environ 66 % de l'effort total. Comme l'a indiqué la ministre de l'agriculture en audition le 19 novembre devant la commission des affaires économiques du Sénat, la situation budgétaire du pays implique de faire des choix. Les rapporteurs de la majorité sénatoriale, sans se réjouir de cette baisse, en comprennent les raisons, même s'ils proposeront certains ajustements (cf infra). Le rapporteur Jean-Claude Tissot souligne quant à lui que cette baisse intervient après un premier effondrement, en LFI pour 2025, des crédits de la planification écologique, mettant ainsi un coup d'arrêt à une ambition forte affichée en LFI pour 2024. Il souligne en outre que ce coup d'arrêt frappe également durement les mesures en faveur de la réduction de l'usage des produits phytopharmaceutiques et de l'aide pour les investissements matériels nécessaires à la transition agroécologique, comme en témoigne l'effondrement de l'action 9 du programme 206.

 

AE (M€)

CP (M€)

LFI 2023

3 883

3 858

PLF 2026

3 898

4 006

Variation

+ 0,39 %

+ 3,84 %

Au total, les crédits pour 2026 s'approchent des crédits votés en LFI pour 2023, année précédant l'augmentation significative des moyens alloués à la mission, notamment pour financer les actions de planification écologique. Les rapporteurs seront donc vigilants à l'évolution des crédits du projet de loi de finances (PLF) pour 2027, qui, à n'en pas douter, devra composer avec une situation tout aussi dégradée des finances publiques.

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