II. L'INTERDICTION DE VENTE DE TABAC AUX MINEURS : UNE MESURE QUI, EN DÉPIT D'UN VASTE DÉBAT SUR SON OPPORTUNITÉ ET SON EFFICACITÉ, PARAÎT DE NATURE À RENFORCER LA LUTTE CONTRE LE TABAGISME DANS NOTRE PAYS ET À LAQUELLE IL CONVIENT, DÈS LORS, DE DONNER FORCE DE LOI

A. UNE MESURE DONT L'OPPORTUNITÉ ET L'EFFICACITÉ FONT, AUJOURD'HUI ENCORE, L'OBJET D'UN VASTE DÉBAT

Le principe même de l'interdiction de la vente de tabac aux mineurs est loin de faire l'unanimité , tant en France qu'à l'étranger.

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce débat dépasse d'ailleurs les « clivages » habituels : certains experts, et non des moindres, de la lutte contre le tabagisme s'y déclarent ainsi opposés, alors que la plupart des grandes marques de tabac y sont, quant à elles, favorables.

Dans le cadre de ce débat, divers arguments sont avancés afin de mettre en doute l'utilité d'instaurer, dans notre pays, une interdiction de vente du tabac aux mineurs , et notamment :

- l'interdiction de vente de tabac aux mineurs renforcerait « l'attrait de l'interdit » , auquel sont particulièrement sensibles les adolescents, et peut les inciter, de ce fait, à fumer ;

- elle serait impossible à faire respecter, compte tenu des difficultés pratiques de sa mise en oeuvre (difficultés, sinon impossibilité, pour les débitants de tabac, de vérifier l'âge du mineur; effectifs limités des forces de l'ordre qui doivent, en outre, se consacrer à d'autres tâches...). Cette interdiction sera, dès lors, interprétée par les jeunes, au mieux comme une mesure purement symbolique, au pire comme une hypocrisie de la part des adultes (qui pourront, de leur côté, continuer à acheter librement leur tabac) ;

- elle serait inefficace , comme semble le démontrer l'évaluation, encore très parcellaire, des résultats des expériences étrangères ;

- elle pourrait être aisément contournée grâce à la complicité d'amis, de frères (ou de soeurs) plus âgés, voire des parents ;

- elle serait rendue obsolète par le progrès technique , des sites Internet, parfois implantés à l'étranger, pouvant désormais permettre aux jeunes d'acheter leurs cigarettes en dehors d'un débit de tabac ;

- elle favoriserait le développement de la contrebande, des trafics et de l'insécurité , notamment dans les zones urbaines sensibles (agressions ou cambriolages des débitants de tabac) ;

- elle « légitimerait », a contrario, la consommation de tabac par les adultes , ce qui expliquerait, notamment, le soutien de la plupart des industriels du tabac à l'interdiction de la vente de tabac aux mineurs (leur appui à cette interdiction leur permettant, en outre, de « redorer leur blason » à peu de frais auprès de l'opinion publique) ;

- elle compliquerait, enfin, la tâche des débitants de tabac, tout en les rendant seuls responsables des infractions éventuelles (il s'agit, en effet, d'une interdiction de vente , et non d'une interdiction de fumer qui serait applicable aux mineurs). Dans le cadre des travaux du groupe de travail sur l'interdiction de la vente du tabac aux mineurs de moins de 16 ans, la Confédération des débitants de tabac a donc fait part de « son extrême réserve à l'égard d'une loi répressive dont les buralistes seraient les seuls à subir les effets. »

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