Art. L. 461-4 du code
de l'action sociale et des familles :
Modalité de financement
des mesures exercées par les mandataires judiciaires à la
protection des majeurs
L'article L. 461-4 nouveau du code de l'action sociale et des familles définit les conditions de la rémunération des mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Il détermine également la personne à qui incombera le financement des mesures de protection prononcées par le juge. Il précise ainsi les dispositions de l'article 419 du code civil dans sa rédaction issue de l'article 5 du présent projet de loi.
• Les modalités de rémunération du mandataire judiciaire à la protection des majeurs
Contrairement aux mandataires non professionnels que sont les membres de la famille de la personne protégée, dont la fonction ne donne pas lieu à rémunération en application de l'article 419 du code civil, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs exercent leur mission à titre onéreux. Aux termes du dispositif proposé, la rémunération du MJPM comporte deux éléments :
- d'une part, une rémunération « de base » ;
- d'autre part, le cas échéant, une indemnité complémentaire . Cette faculté, prévue par le second alinéa de l'article L. 461-4, ne pourra intervenir qu' à titre exceptionnel, sur décision du juge , et sous réserve d'avoir recueilli l'avis du procureur de la République qui ne le liera cependant pas.
Quant au fond, l' octroi d'une telle indemnité ne pourra intervenir qu'à deux conditions .
Il conviendra en premier lieu que le mandataire soit contraint d'accomplir, dans le cadre de sa mission, des actes requis par l'exercice de la mesure de protection et impliquant des diligences particulièrement longues ou complexes.
En second lieu, il faudra que la « rémunération de base » s'avère manifestement insuffisante pour ce faire .
Afin d'encadrer les conditions d'octroi de cette rémunération complémentaire et éviter de trop grandes disparités dans la pratique judiciaire, l'Assemblée nationale a précisé, à l'initiative de sa commission des lois et de M. Maxime Gremetz mais contre l'avis du Gouvernement, que le juge devra fixer le montant de la rémunération complémentaire en application d'un « barème national », établi par décret.
Votre commission juge cette modification légitime dans la mesure où elle devrait permettre d'harmoniser le montant de ces rémunérations complémentaires.
• Le financement des mesures exécutées par le mandataire
L'article L. 461-4 nouveau du code de l'action sociale et des familles pose le principe du financement par la personne protégée elle-même du coût des mesures exercées par le MJPM . Toutefois, ce financement prendra en compte l'importance des ressources de la personne, ce qui conduira à moduler l'étendue de sa contribution au financement de la mesure, qui pourra être seulement partielle.
En revanche, lorsque le MJPM se voit allouer par le juge une indemnité complémentaire à sa rémunération de base compte tenu de diligences particulières, ce complément sera intégralement pris en charge par la personne protégée. Cette modalité spécifique de financement s'explique par le fait que ces diligences particulières n'interviendront, en pratique, qu'en raison de l'importance du patrimoine de la personne concernée.
Selon le texte proposé, à défaut pour la personne protégée, compte tenu de ses ressources, de pouvoir supporter intégralement ou partiellement le coût lié à sa prise en charge par un MJPM, ce coût sera pris en charge « dans les conditions fixées par les articles L. 361-1, L. 462-3 et L. 462-9 » du code de l'action sociale et des familles, tels que rédigés respectivement par les articles 12 et 14 du présent projet de loi. Ces dispositions définissent en effet, à titre général, les conditions du financement, par la collectivité publique, des mesures de protection, financement qui intervient dans des conditions différentes selon :
- la nature de la mesure prononcée à l'égard de la personne protégée ;
- la qualité du mandataire judiciaire à la protection des majeurs 138 ( * ) .
Dans sa version initiale, le texte du Gouvernement permettait aux collectivités ou organismes ayant financé les mesures de protection juridique d'exercer une action en récupération :
- soit contre la succession de la personne protégée qui a bénéficié de la mesure ;
- soit contre le donataire gratifié par la personne protégée.
Un tel recours, s'il est déjà prévu par l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles, était en revanche nouveau en ce qui concerne les régimes de protection juridique des majeurs. Il permettait néanmoins la récupération, par la collectivité nationale, d'une partie des sommes versées dans le cadre de la protection offerte à la personne.
Toutefois, à l'initiative de ses commissions des lois et des affaires culturelles, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse des députés tout en levant le gage, l'Assemblée nationale a supprimé ce recours en récupération, arguant que ce mécanisme était mal compris par la population et avait déjà été supprimé pour certaines prestations d'action sociale, telles que l'allocation personnalisée d'autonomie ou la prestation de compensation du handicap. Il est vrai que le montant qui devrait être récupéré par ce mécanisme est évalué par le Gouvernement à 10 millions d'euros, pour une dépense publique globale de près de 470 millions d'euros en 2009.
Si votre commission n'entend pas remettre en cause le principe même d'une solidarité nationale pour la prise en charge du coût des mesures de protection pour les personnes sans ressources ni patrimoine, elle est néanmoins favorable à ce que soit préservée la possibilité d'une récupération sur leur succession ou sur les donations et legs qu'elles auraient consenties après la mise en oeuvre de la mesure.
Elle vous soumet en conséquence un amendement rétablissant l'exercice d'une action en récupération, en le limitant, pour les donations, à celles faites après le jugement d'ouverture de la mesure de protection, et en l'étendant par ailleurs aux legs effectués par la personne protégée .
Le texte initial de cet article prévoyait également que ses modalités d'application devaient être définies par décret en Conseil d'Etat. L'Assemblée nationale a supprimé cette précision pour la transférer, sans en modifier la substance, à l'article L. 461-8 nouveau du code de l'action sociale et des familles.
* 138 Voir infra, le commentaire des articles 12 et 14 du présent projet de loi.