EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI ORGANIQUE
TITRE PREMIER - DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article premier - Nomination et inamovibilité du Défenseur des droits

Cet article définit les conditions de nomination et établit l'inamovibilité du Défenseur des droits.

L'avant-dernier alinéa de l'article 71-1 de la Constitution dispose que « le Défenseur des droits est nommé par le Président de la République pour un mandat de six ans non renouvelable, après application de la procédure prévue au dernier alinéa de l'article 13 ».

La durée du mandat du Défenseur des droits sera donc identique à celle du mandat du Médiateur de la République. Le premier alinéa de l'article premier du projet de loi organique prévoit que le Défenseur des droits sera nommé par décret en conseil des ministres, comme l'était déjà le Médiateur de la République 16 ( * ) .

Conformément au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution, le Président de la République nommera le Défenseur des droits après avis des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat 17 ( * ) . Il ne pourra procéder à cette nomination si l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein de deux commissions.

Le second alinéa garantit par ailleurs l'inamovibilité du Défenseur, sur le modèle des dispositions applicables au Médiateur de la République. Ainsi, il ne pourrait être mis fin aux fonctions du Défenseur que sur sa demande ou, en cas d'empêchement, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.

Le décret n° 73-253 du 9 mars 1973 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur dispose qu'« il ne peut être mis fin aux fonctions du Médiateur avant l'expiration de leur durée normale qu'en cas d'empêchement constaté par un collège composé du vice-président du Conseil d'Etat, président, du premier président de la Cour de cassation et du premier président de la Cour des comptes » (article premier).

Il appartient au Président de la République de saisir ce collège, qui procède à toutes consultations et vérifications utiles à l'exécution de sa mission et ne peut prendre la décision constatant l'empêchement du Médiateur qu'à l'unanimité de ses membres. Ce dispositif paraît offrir des garanties suffisantes et pourrait donc être repris pour le Défenseur.

Votre commission a adopté l'article premier sans modification .

Article 2 - Indépendance et immunité

Cet article définit les garanties statutaires d'indépendance du Défenseur des droits, en reprenant des dispositions des articles premier et 3 de la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur.

Le premier alinéa de l'article 2 du projet de loi organique précise ainsi que, « dans l'exercice de ses attributions, le Défenseur ne reçoit d'instruction d'aucune autorité ».

Cette formulation, faisant référence aux actes non détachables de l'activité du Défenseur des droits, paraît plus claire et plus protectrice que la disposition applicable au Médiateur de la République, visant l'activité de ce dernier « dans la limite de ses attributions » (article premier de la loi du 3 janvier 1973).

Le second alinéa de l'article 2 assure l'immunité du Défenseur des droits dans l'exercice de ses fonctions. Il ne pourrait donc être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions qu'il émet ou des actes qu'il accomplit en tant que Défenseur des droits.

Ce régime d'immunité juridictionnelle est identique à celui que l'article 26 de la Constitution définit pour les membres du Parlement.

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur visant à conforter le statut du Défenseur des droits, en le qualifiant d'autorité indépendante et en précisant qu'il ne reçoit, dans l'exercice de ses attributions, aucune instruction, quelle que puisse être l'origine d'une telle instruction (autorité, personne, groupe de pression...).

Votre commission a adopté l'article 2 ainsi modifié .

Article 3 - Incompatibilités

Cet article définit le régime d'incompatibilité applicable au Défenseur des droits.

L'avant-dernier alinéa de l'article 71-1 de la Constitution dispose que les fonctions de Défenseur des droits sont incompatibles avec celles de membre du Gouvernement et de membre du Parlement ; il renvoie à la loi organique la fixation des autres incompatibilités.

Aussi le projet de loi organique prévoit-il un régime d'incompatibilités étendu. En effet, les fonctions de Défenseur des droits seraient incompatibles avec :

- les fonctions de membres du Conseil constitutionnel, de membre du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et de membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE) ;

- tout mandat électif ;

- tout autre fonction ou emploi public et toute activité professionnelle.

L'alinéa 2 de l'article 3 précise que la personne nommée Défenseur des droits, si elle était, au moment de sa nomination, membre du Gouvernement, du Parlement, du Conseil constitutionnel, du Conseil supérieur de la magistrature ou du CESE, ou titulaire d'un mandat électif, serait réputée avoir opté pour ses nouvelles fonctions si elle n'avait pas exprimé sa volonté contraire dans les huit jours suivant la publication de sa nomination.

Par ailleurs, la personne nommée Défenseur des droits devrait, si elle exerçait un mandat ou une fonction ou emploi public, ou toute autre activité professionnelle, cesser cette activité dans le délai d'un mois suivant la publication de sa nomination (quatrième alinéa).

Si l'activité visée concerne un emploi de fonctionnaire ou de magistrat, la personne est placée en position de détachement de plein droit pendant la durée du mandat de Défenseur et ne peut faire l'objet, pendant cette période, d'aucune promotion au choix.

Votre commission considère que le régime d'incompatibilité applicable au Défenseur doit porter explicitement sur tout mandat social qu'il pourrait détenir ou qui pourrait lui être proposé.

Aussi a-t-elle adopté un amendement de son rapporteur visant à préciser la rédaction des deux premiers alinéas de l'article 3 et à compléter le régime d'incompatibilité applicable au Défenseur des droits, en s'inspirant des dispositions des articles L.O. 145 et L.O. 146 du code électoral, relatifs aux incompatibilités auxquelles sont soumis les parlementaires.

Ainsi, la rédaction proposée par votre commission prévoit que les fonctions de Défenseur des droits sont incompatibles avec toute fonction de président et de membre de conseil d'administration, de président et de membre de directoire, de président et de membre de conseil de surveillance, et d'administrateur délégué dans toute société, entreprise ou établissement.

L'étendue des missions du Défenseur, et sa qualité d'autorité constitutionnelle, semblent en effet justifier qu'il soit soumis à un régime d'incompatibilité stricte, lui permettant d'éviter toute mise en cause de son indépendance.

Le régime d'inéligibilité et d'incompatibilité applicable
au Défenseur des droits et aux autorités qui lui seraient intégrées
selon le texte élaboré par la commission

Défenseur des droits

Médiateur de la République

Défenseur des enfants

CNDS

HALDE

Possibilité de conserver le mandat de député, sénateur ou député européen détenu au moment de la nomination

Non, obligation de choisir (incompatibilité avec tout mandat électif)

Oui

Oui

Oui

Oui

Possibilité de se présenter aux élections législatives, sénatoriales et européennes

Non

Non

Oui

Oui

Oui

En cas d'élection, possibilité de conserver les deux fonctions

Oui

Oui

Oui

Possibilité de conserver le mandat local détenu au moment de la nomination

Non (incompatibilité avec tout mandat électif)

Oui

Oui

Oui

Oui

Possibilité de se présenter à une élection locale

Non

Oui s'il exerçait un mandat local au moment
de sa nomination

Oui s'il exerçait un mandat local au moment de sa nomination

Oui, sans restriction

Oui, sans restriction

En cas d'élection, possibilité de conserver les deux fonctions

Oui

Oui

Oui

Oui

Votre commission a adopté l'article 3 ainsi modifié .

* 16 Article 2 de la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur.

* 17 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois par votre rapporteur sur le projet de loi organique relatif à l'application de l'article 13 de la Constitution, n° 141 (2009-2010) toujours en cours d'examen par le Parlement (consultable sur le site du Sénat : http://www.senat.fr/rap/l09-141/l09-141.html ).

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