IV. DES PRÉVISIONS PRÉOCCUPANTES POUR LA PÉRIODE 2026-2029

A. DES PRÉVISIONS 2026-2029 LÉGÈREMENT MOINS DÉFAVORABLES QU'IL Y A UN AN MAIS UN DÉFICIT D'ENCORE 17,9 MILLIARDS D'EUROS EN 2029

Malgré un déficit plus élevé que prévu en 2025, à partir de 2026, le déficit serait nettement plus faible que celui prévu par la LFSS 2025, avec une révision à la baisse de 5,7 milliards d'euros en 2026 et 7,5 milliards d'euros en 2028. Cela résulterait notamment des mesures du PLFSS pour 2026.

Le déficit n'en resterait pas moins très éloigné de l'équilibre, à 17,5 milliards d'euros en 2026 et 17,9 milliards d'euros en 2029.

Solde réalisé des Robss et du FSV (2004-2029)
et prévisions successives (2024-2029)

(en milliards d'euros)

NB : Afin de faire apparaître l'effet du décalage de la réforme des retraites de 2023 et de son financement, on indique, s'agissant du PLFSS pour 2026, la trajectoire prévue par le texte déposé le 14 octobre, et celle prévue par le texte résultant de la lettre rectificative du 23 octobre.

Source : Lois de financement de la sécurité sociale 2006 à 2025, rapports à la CCSS, PLFSS pour 2026

B. DES PRÉVISIONS POURTANT OPTIMISTES

1. Les projections pour les différentes branches sont vraisemblables sous réserve que les hypothèses de croissance du PIB et de l'Ondam soient vérifiées

Les rapports à la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), rédigés par la direction de la sécurité sociale (DSS) sous la supervision d'un magistrat de la Cour des comptes, contribuent à la qualité des prévisions de la LFSS83(*).

Toutefois, le rapport à la CCSS ne comprend habituellement pas de prévisions à moyen terme. Ne pouvant, contrairement au Gouvernement, s'appuyer sur les caisses et la DSS, la commission, afin d'apprécier le réalisme des prévisions à moyen terme de l'annexe à la future LFSS, a réalisé des projections, sur la base d'hypothèses simples (cf. encadré).

Dans un premier scénario, elle a retenu les hypothèses de croissance du PIB et de l'Ondam du PLFSS. Les résultats sont proches de ceux du PLFSS. Cela confirme la cohérence de la prévision du PLFSS.

Comparaison de la programmation à moyen terme du PLFSS et des projections
de la commission, en retenant les hypothèses de croissance
du PIB et de l'Ondam du Gouvernement

(solde des Robss et du FSV, en milliards d'euros)

 

2024

2025

2026

2027

2028

2029

PLFSS pour 2026

- 15,3

- 23

- 17,5

- 16,8

- 16,6

- 17,9

Projections de la commission des affaires sociales

- 15,3

- 23,0

- 17,7

- 20,5

- 20,1

- 19,0

Écart

   

- 0,2

- 3,7

- 3,5

- 1,1

Robss : régimes obligatoires de base de sécurité sociale. FSV : Fonds de solidarité vieillesse.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Principales hypothèses retenues pour les projections de la commission

Dépenses de retraite : taux de croissance en volume correspondant aux projections du COR de juin 2025.

Élasticité des recettes au PIB en valeur : 0,9.

Mesures nouvelles sur les recettes : rapport à la CCSS d'octobre 2025 et annexe 3 du PLFSS pour 2026.

Mesures nouvelles sur les dépenses : annexe 3 du PLFSS pour 2026.

Croissance du PIB en volume : dans le scénario ci-avant, hypothèses du PLFSS (1 % en 2026, 1,2 % en 2027, 1,3 % en 2028 et en 2029) ; dans le scénario de la commission, 0,9 % en 2026 et 1 % ensuite.

Croissance de l'Ondam en valeur : dans le scénario ci-avant, hypothèses du PLFSS (1,6 % en 2026 et 2,9 % ensuite) ; dans le scénario de la commission, 2,5 % en 2026 puis 3,5 % par an.

CCSS : commission des comptes de la sécurité sociale. COR : Conseil d'orientation des retraites. Ondam : objectif national de dépenses d'assurance maladie. PLFSS : projet de loi de financement de la sécurité sociale.

2. Des hypothèses de croissance du PIB et de l'Ondam moins favorables pourraient conduire à un déficit de près de 30 milliards d'euros en 2029

Toutefois, les hypothèses de croissance du PIB et de l'Ondam du Gouvernement peuvent sembler optimistes.

En ce qui concerne la croissance du PIB :

- s'agissant de 2026, le HCFP, dans son avis du 9 octobre 2025 sur le PLF et le PLFSS, juge la prévision de croissance de 1 % optimiste, compte tenu de la réduction prévue du déficit des administrations publiques84(*). Par convention, la commission retient la moyenne des prévisions du consensus des conjoncturistes indiquée par l'avis du HCFP, soit 0,9 % ;

- s'agissant des années suivantes, le HCFP, dans son avis du 15 avril 2024 sur le rapport d'avancement annuel du plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT) 2025-2029, ne se prononce pas sur le scénario du Gouvernement85(*). Il souligne toutefois que l'estimation de la croissance potentielle du Gouvernement, de 1,2 % par an puis 1 % en 2029, « se situe plutôt dans le haut de la fourchette des estimations retenues par les organisations internationales et les organismes auditionnés par le Haut Conseil ». Par ailleurs, on observe que le scénario de croissance du PLFSS (1,2 % en 2027 et 1,3 % en 2028 et 2029) est légèrement supérieur à cette croissance potentielle. Par convention, la commission retient une hypothèse de croissance du PIB de 1 % par an de 2027 à 202986(*).

En ce qui concerne la croissance de l'Ondam, les mesures d'économie devant permettre de la ramener à 1,6 % en 2026 restent à confirmer, et celles devant permettre de la ramener à 2,9 % ensuite ne sont pas documentées. Le HCFP, dans son avis précité du 9 octobre 2025 sur le PLF et le PLFSS, s'interroge sur le réalisme des prévisions pour 2026 de dépenses sociales, et en particulier de dépenses de l'Ondam87(*). La commission retient une hypothèse conventionnelle de croissance de l'Ondam de 2,5 % en 2026 et 3,5 % ensuite (comme lors de l'examen des PLFSS 2024 et 2025).

Ces hypothèses moins optimistes conduisent à des résultats susbtantiellement différents de ceux du PLFSS, avec un déficit de plus de 30 milliards d'euros en 2029 (contre 17,9 milliards d'euros selon le PLFSS).

Comparaison de la programmation à moyen terme du PLFSS et des projections de la commission, en retenant des hypothèses de croissance du PIB et de l'Ondam moins favorables*

(solde des Robss et du FSV, en milliards d'euros)

 

2024

2025

2026

2027

2028

2029

PLFSS pour 2026

- 15,3

- 23

- 17,5

- 16,8

- 16,6

- 17,9

Projections de la commission des affaires sociales

- 15,3

- 23,0

- 20,6

- 26,1

- 29,1

- 31,6

Écart

   

- 3,1

- 9,3

- 12,5

- 13,7

* Hypothèse de croissance du PIB : 0,9 % en 2026, 1 % ensuite ; hypothèse de croissance de l'Ondam : 3,5 % par an.

Ondam : objectif national de dépenses d'assurance maladie. PIB : produit intérieur brut. Robss : régimes obligatoires de base de sécurité sociale. FSV : Fonds de solidarité vieillesse.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

Certes, les finances de la sécurité sociale sont très sensibles à divers aléas (cf. tableau ci-après). Ce scénario montre toutefois que sans mesure supplémentaire par rapport à celles déjà prévues, la situation pourrait être beaucoup plus dégradée que ce que suggère le PLFSS.

Sensibilité des prévisions à divers aléas

(en milliards d'euros)

 

Montant

Masse salariale du secteur privé : impact d'une hausse de 1 % du taux de croissance

2,53

Dépenses maladie : impact d'une hausse de 1 % dans le champ de l'Ondam

2,67

Inflation : impact (en année pleine) d'une hausse de 1 point du taux d'inflation sur la revalorisation légale des prestations

3,37

Consommation : impact d'une hausse de 1 % de la TVA

0,50

Source : Rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale, octobre 2025


* 83 Les prévisions des rapports d'automne ne prennent pas en compte les mesures prévues par le PLFSS. Celles-ci sont toutefois chiffrées dans l'annexe 3 au PLFSS.

* 84 « Pour 2026, le Haut Conseil considère que le scénario économique qui lui a été soumis repose sur des hypothèses optimistes, associant une consolidation budgétaire importante à une accélération de l'activité permise par une reprise de la demande privée. La prévision de croissance n'est que juste au-dessus de celles des organismes auditionnés par le Haut Conseil et du consensus des économistes (0,9 %). Mais par rapport à ces prévisions, le projet dont le HCFP a été saisi retient une orientation plus restrictive des finances publiques, qui pèserait donc davantage à court terme sur l'activité ».

* 85 Alors 1,4 % en 2027 et en 2028 et 1,2 % en 2029.

* 86 Ce scénario prudent peut se justifier par l'absence de consensus sur l'existence d'un écart de production en début de période (en 2026, il serait de - 1,1 point de PIB selon le Gouverment, mais nul selon la Commission européenne) et par l'hypothèse d'un effort substantiel de réduction du déficit public.

* 87 « Au global, la cible de dépenses sociales est très ambitieuse. Elle repose pour une part sur des mesures substantielles annoncées (notamment la hausse des franchises et le gel des prestations), et l'effet de mesures déjà en vigueur (réforme de l'assurance chômage, pour 1,0 milliard d'euros), mais est fragilisée par d'autres économies peu documentées sur le champ de l'Ondam (mesures d'efficience) et par des risques sur les autres prestations, notamment une dynamique moins baissière des indemnités de chômage. L'atteinte de cette cible exige au minimum une mise en oeuvre rapide de l'ensemble des mesures, ce qui est loin d'être acquis. »

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