D. UNE REMONTÉE DES DÉPENSES IMMOBILIÈRES DU MINISTÈRE DE L'EUROPE ET DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
1. Le projet de loi de finances revient sur les économies réalisées en 2025 sur les dépenses immobilières
Au total, les dépenses immobilières, fonctionnement et investissement confondus, augmentent de 12,1 % par rapport à la loi de finances pour 2025. Le niveau de crédits proposé correspond en réalité à celui du projet de loi de finances pour 2025 initialement prévu par le Gouvernement, avant adoption d'un amendement gouvernemental de baisse des crédits au Sénat et application de nouvelles mesures d'économies par la commission mixte paritaire.
Les dépenses d'entretien et de maintenance immobilière en France, s'élèvent à 21,9 millions d'euros en AE et à 31,5 millions d'euros en CP. Certaines dépenses, comme les contrats de fourniture d'électricité et de gaz, sont également sensibles à l'inflation.
Les dépenses d'entretien lourd en France représentent, au sein de cette enveloppe, une dotation de 4,6 millions d'euros en AE et de 6,9 millions d'euros en CP, en hausse par rapport à l'année passée. Les principales opérations concerneront, à Paris, la poursuite de la rénovation d'une partie de l'hôtel du ministre (rénovation des cuisines et installation d'un transformateur électrique et d'un groupe électrogène) et la rénovation des archives et, à Nantes, la réfection des sites administratifs de Breil.
Évolution des dépenses immobilières inscrites sur le programme 105
(en millions d'euros et en crédits de paiement)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Concernant les dépenses d'entretien et de maintenance à l'étranger, le projet de loi de finances pour 2026 prévoit l'ouverture de 91,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 84,3 millions en crédits de paiement. En particulier, les crédits liés à l'entretien lourd représentent 49,4 millions d'euros en AE et 42,23 millions d'euros en CP, un montant supérieur de 10 millions d'euros à celui inscrit en loi de finances pour 2025. Ces nouvelles dépenses visent à assurer la réalisation de la fin du schéma directeur immobilier pluriannuel à l'étranger 2021-2025, qui comprend 215 projets structurants (contre seulement 30 en 2024).
Le rapporteur spécial, s'appuyant sur l'examen de l'exécution des exercices précédents, souligne le risque de sous-exécution de ces crédits au cours du prochain exercice.
À titre d'exemple, la Cour des comptes, dans sa note d'exécution budgétaire sur les crédits de la mission pour le budget 2024, notait que les dépenses immobilières étaient « sous-consommées de 15 % en AE et 41 % en CP. » Et ce, alors même que ces dépenses avaient fait l'objet d'annulations de crédits en cours d'année. Comme le relevait le contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) du ministère dans son rapport annuel relatif à l'exécution budgétaire et à la situation financière et comptable ministérielle de l'année 2024 : « ces annulations ont porté principalement sur l'entretien lourd en France et à l'étranger et ont entraîné le report à 2025 de plusieurs opérations programmées initialement cette année. Malgré ces annulations, aucune impasse n'a été constatée. Bien au contraire, on relève plutôt une marge sur les dépenses immobilières. »21(*) De même, au moment de l'examen de la loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024, le rapporteur spécial Nathalie Goulet avait souligné que la hausse brutale des crédits de la mission entraîne des difficultés sérieuses de décaissement pour le ministère22(*).
Exécution des dépenses immobilières du programme 105
(en pourcentage)
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2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
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Immobilier en France - dépense de l'occupant |
98 % |
102 % |
103 % |
138 % |
129 % |
102 % |
|
Immobilier à l'étranger - dépenses de l'occupant |
112 % |
107 % |
99 % |
103 % |
111 % |
100 % |
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Immobilier en France - Loyer de la Courneuve |
100 % |
100 % |
101 % |
100 % |
101 % |
100 % |
|
Entretien lourd à l'étranger - dépenses du propriétaire |
107 % |
84 % |
87 % |
85 % |
92 % |
74 % |
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Entretien lourd en France - dépenses du propriétaire |
58 % |
67 % |
24 % |
16 % |
10 % |
31 % |
Source : commission des finances d'après les données transmises par la direction du budget
Dans le même sens, auditionnée par les rapporteurs spéciaux, la direction du budget a souligné que « l'analyse de l'exécution des dépenses immobilières par type fait apparaître une sous-exécution récurrente des dépenses d'entretien lourd en France et à l'étranger et au contraire une tendance à la sur-exécution des dépenses de l'occupant. »23(*)
2. Les dépenses de numérique s'inscrivent en hausse par rapport à l'exercice précédent
Les dépenses consacrées au numérique et à la télécommunication avaient connu une hausse significative entre 2023 et 2024, avant d'être ramenées à leur niveau de 2023 par la loi de finances pour 2025. Pour 2026, le présent projet de loi de finances entend revenir sur les économies opérées l'année passée, avec 60,5 millions d'euros en AE et 60 millions d'euros en CP, soit une progression de l'ordre de 9 %.
Il s'agit d'une hausse significative, qui constitue à la fois une augmentation par rapport à la loi de finances initiale pour 2025 mais également par rapport au projet de loi de finances pour 2025. Cette mesure nouvelle fait ainsi plus que revenir sur les mesures d'économies décidées par la commission mixte paritaire sur le budget 2025 (pour un montant de deux millions d'euros).
Cette augmentation viserait à poursuivre la modernisation du ministère, en application du plan de transformation numérique du Quai d'Orsay24(*). La hausse de crédits se répartit sur les dépenses liées à la sécurité informatique et l'hébergement des données. La direction du numérique entend également financer différents projets fondés sur l'intelligence artificielle.
3. Les dépenses de sécurité renouent avec leur dynamique haussière
En raison de la dégradation de l'environnement sécuritaire international et des menaces pesant sur certains postes, les crédits dédiés à la sécurité à l'étranger ont augmenté de moitié sur la période 2020-2025.
Les dépenses de sécurité engagées par le ministère à l'étranger sont de deux ordres :
- d'une part, les mesures visant à l'entretien des dispositifs existants et à leur maintien en condition opérationnelle. Il s'agit tout particulièrement des dépenses de gardiennage, poussée à la hausse par l'inflation soutenue dans certaines régions du monde, mais également le financement des dépenses de fonctionnement liées à l'entretien des mesures de sécurité passives (télésurveillance, dispositifs anti-intrusion...) et de l'acheminement des renforts de gendarmerie en cas de crise ;
- d'autre part, le financement d'investissements en matière de sécurité passive25(*) dont la répartition est déterminée en fonction du risque sécuritaire évalué par pays, selon une classification par catégorie de pays établie par le MEAE.
Évolution des dépenses de sécurité à l'étranger entre 2020 et 2026
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
Avec 66,7 millions d'euros en autorisations d'engagement (+ 8,1 % par rapport à 2025) et 70,1 millions d'euros en crédits de paiement (+ 7,7 % par rapport à 2025), les moyens consacrés à la sécurité à l'étranger renouent avec leur dynamique haussière amorcée en 2020. Cette augmentation de crédits de cinq millions d'euros permet au ministère de revenir sur la mesure d'économie, d'un montant identique, introduite par la commission mixte paritaire dans la loi de finances pour 2025, sans que la justification de ce retour en arrière soit clairement énoncée.
* 21 Rapport annuel du CBCM auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères relatif à l'exécution budgétaire et à la situation financière et comptable ministérielle de l'année 2024.
* 22 Rapport n° 743, tome II, annexe 1 (2024-2025) de Mme Nathalie Goulet et M. Rémi Féraud, déposé le 18 juin 2025, Action extérieure de l'État.
* 23 Réponses au questionnaire d'audition des rapporteurs spéciaux.
* 24 Ministère de l'Europe et des affaires étrangères, Plan de transformation numérique, 2021.
* 25 Les équipements de sécurité passive visent, par leur présence, à ralentir d'éventuels assaillants et à limiter la gravité des incidents.

