D. DES DÉPARTEMENTS PARTICULIÈREMENT TOUCHÉS PAR L'EFFET CISEAU

Si le tableau général dressé de la situation des finances publiques locales est morose, parmi les différentes strates de collectivités territoriales, la strate départementale est la plus exposée, confrontée à un effet ciseau, soit une hausse de ses charges de fonctionnement associée à une baisse de certains de ses produits.

En 2024, ses charges de fonctionnement s'élèvent à 66,2 milliards d'euros, en hausse de 3,4 %. Comme l'an passé, les dépenses sociales par nature (prestations sociales) ou par destination (personnels et achats associés) représentent plus des deux tiers des charges de fonctionnement des départements (69%), avec une hausse généralisée de ses différentes composantes :

Charges réelles de fonctionnement des départements par nature

(en milliards d'euros)

Source : Cour des comptes

La hausse des allocations individuelles de solidarité reflète aussi bien une évolution de la législation (revalorisation des prestations de revenu de solidarité active (RSA) au 1er avril 2024 ou du tarif plancher dans les services d'aide à domicile) qu'une progression du nombre de bénéficiaires (pour la prestation de compensation du handicap, il a connu une hausse de 100 000 personnes depuis 2018 pour atteindre 407 000 ; le nombre d'enfants confiés pour placement à l'aide sociale à l'enfance s'est accru de 18 % depuis 2018, atteignant plus de 220 000 en 2023).

La progression des produits réels de fonctionnement est moindre, ceux-ci atteignant 71,7 milliards d'euros en 2024 (+ 0,6 milliard d'euros). Cette hausse légère est toutefois trompeuse, portée par l'utilisation de réserves et le versement de fonds sauvegarde pour un montant cumulé de 0,7 milliard d'euros46(*). Si ces produits non récurrents n'étaient pas intervenus, les produits de fonctionnement des départements auraient légèrement reculé de 0,2 milliard d'euros en 2024 (soit - 0,3 %), sous l'effet principalement de la baisse des droits de mutation à titre obligatoire perçus par les départements.

DMTO perçus par les départements

(en milliards d'euros)

Source : Cour des comptes

Inévitablement, la faible progression des produits de fonctionnement associée à une hausse marquée des charges de fonctionnement se traduit par une chute de l'épargne brute des départements, qui ne s'élève plus qu'à 5,5 milliards d'euros en 2024, contre 7,1 milliards d'euros en 2023 et 11,4 milliards d'euros en 2022. La trajectoire est la même pour l'épargne nette, passée de 8,1 milliards d'euros en 2022 à 3,8 milliards d'euros en 2023 puis 2,3 milliards d'euros en 2024. Pour douze départements, l'épargne nette est négative en 2024, contre six en 2023 et deux en 2022 : sans les trois produits exceptionnels précédemment évoqués, vingt-deux départements auraient été concernés.

La dégradation d'ensemble de la situation financière des départements masque toutefois une grande hétérogénéité des situations, qui se voit notamment au niveau d'épargne brute dégagée (pour mémoire, le seuil d'alerte se situe à 7% des produits de fonctionnement) :

Taux d'épargne brute par département en 2024

(en % des produits réels de fonctionnement)

Source : Cour des comptes


* 45 Les principales mesures sont l'abondement des crédits alloués à la dotation titres sécurisés (DTS), de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales et l'abondement de la dotation générale de décentralisation (DGD).

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