C. UNE PROPOSITION DE RÈGLEMENT RELATIF À L'ACTIVATION DE LA CLAUSE DE SAUVEGARDE EN MATIÈRE AGRICOLE DONT L'EFFECTIVITÉ EST SUJETTE À CAUTION

La clause de sauvegarde bilatérale figurant dans les deux accords (c'est-à-dire l'accord de partenariat et l'accord commercial intérimaire, cf. infra) permet le retrait temporaire des préférences tarifaires afin de contrer les éventuelles incidences négatives des réductions tarifaires, y compris pour les produits dont l'accès au marché est restreint par les limites contenues dans les contingents tarifaires.

La commission a décidé d'assortir ses propositions d'une proposition de règlement portant mise en oeuvre de la clause de sauvegarde bilatérale7(*) censée garantir la mise en oeuvre effective et en temps utile de cette clause pour les produits agricoles. Ce projet de texte comporte des dispositions spécifiques en ce qui concerne 23 produits agricoles sensibles énumérés à l'annexe du règlement, tels que la viande bovine, la volaille, le riz, le miel, les oeufs, l'ail, l'éthanol et le sucre (cf. tableau ci-après)

Dispositions spécifiques prévues par le projet de règlement portant mise en oeuvre de la clause de sauvegarde bilatérale.

Suivi renforcé

La Commission suivra systématiquement l'évolution du marché en ce qui concerne les importations de certains produits agricoles sensibles dans le cadre de l'accord. Sur la base de ces résultats, la Commission enverra au Conseil et au Parlement européen, tous les six mois, un rapport évaluant les incidences de ces importations sur les marchés de l'UE.

Ce suivi régulier et détaillé permettra de détecter tout risque à un stade précoce et d'agir rapidement pour remédier aux incidences négatives potentielles. Ces rapports portent sur le marché de l'Union et, le cas échéant, portent également sur la situation particulière dans un ou plusieurs États membres.

Éléments déclencheurs clairs

La Commission examinera en priorité les cas dans lesquels il y a une forte augmentation des importations ou une baisse des prix intérieurs concentrée dans un ou plusieurs États membres.

En règle générale, la Commission ouvrira une enquête si les prix à l'importation en provenance du Mercosur sont inférieurs d'au moins 10 % aux prix des produits identiques ou concurrents de l'UE et si elle constate : a) une augmentation de plus de 10 % des importations annuelles d'un produit en provenance du Mercosur à des conditions préférentielles ou b) une baisse de 10 % des prix à l'importation de ce produit en provenance du Mercosur, tous par rapport à l'année précédente. Si l'enquête conclut à l'existence d'un préjudice grave (ou d'une menace de préjudice grave), l'UE pourrait retirer temporairement les préférences tarifaires sur les produits causant un préjudice.

Réaction rapide

Dans le cadre de la proposition, la Commission s'engage à :

ouvrir sans délai une enquête à la demande d'un seul État membre lorsqu'il existe des motifs suffisants ;

activer des mesures de sauvegarde provisoires dans un délai maximal de 21 jours à compter de la réception de la demande dans les cas les plus urgents s'il existe un risque suffisant de préjudice ;

- l'objectif est de boucler les enquêtes complètes en 4 mois (beaucoup plus rapidement que les 12 mois autorisés par l'APEM).

Source : communiqué de presse de la Commission européenne du 8 octobre 2025

Si cette proposition de règlement renforce et clarifie les modalités de mise en oeuvre de la clause de sauvegarde en matière agricole, son effectivité est discutée par certaines fédérations professionnelles. L'AVEC, fédération des volailles, considère ainsi que cette clause est « illusoire et non-fonctionnelle » au regard « de la structuration actuelle des importations et de la mise en place progressive de nouveaux contingents tarifaires »8(*). La CIBE, qui représente les producteurs européens de betteraves sucrières, fait le même constat9(*). La coordination rurale rappelle quant à elle que la référence au prix « intérieur moyen pertinent de produits similaires ou directement concurrents » tend à lisser des « réalités nationales très contrastées ». Prenant l'exemple du prix du filet de poulet, elle estime qu'un écart de 10 % par rapport au prix moyen de l'UE nécessiterait une différence de 29 % par rapport au prix français10(*).


* 7 COM(2025) 639 final.

* 8 https://avec-poultry.eu/news/explaining-why-the-safeguard-clause-in-the-mercosur-agreement-fails-to-protect-the-eu-poultry-meat-sector/

* 9 https://www.cibe-europe.eu/Data/Files/198-25_CEFS-CIBE_Press_Release_Mercosur_BilateralSafeguards.pdf

* 10 https://www.coordinationrurale.fr/lactualite/infos-et-aides-agricoles/reglementation-et-controles/clauses-sauvegarde-ue-mercosur/

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