VIII.  UN PROJET DE LOI AU CARACTÈRE IDÉOLOGIQUE EXACERBÉ QUI RENONCE À PRIVILÉGIER L'EMPLOI

A. LE SÉNAT, LORS DE LA DISCUSSION DE LA PREMIÈRE LOI " AUBRY ", S'ÉTAIT MONTRÉ FAVORABLE À UN DISPOSITIF SOUPLE ET NÉGOCIÉ DE RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

Au cours du débat qui devait mener à l'adoption de la loi du 13 juin 1998, la commission des Affaires sociales du Sénat avait souhaité corriger la démarche incertaine du Gouvernement et la Haute Assemblée avait bien voulu la suivre dans cette voie.

Dans sa majorité, la commission avait affirmé sa conviction qu'un dispositif général et autoritaire de réduction de la durée du travail n'aurait pas les effets escomptés sur l'emploi.

Elle avait observé qu'une comptabilité administrative des emplois créés grâce à l'engagement de fonds publics pourrait sans doute être tenue mais elle s'était interrogée sur les effets d'aubaine, les emplois détruits ou délocalisés.

Votre rapporteur avait affirmé sa conviction que " librement négociée, associée à une souplesse indispensable à la compétitivité de l'économie, la réduction du temps de travail pouvait sans doute créer des emplois ou en préserver dans certaines entreprises, en fonction du contexte qui était propre à chacune, contexte économique, contexte social, contexte psychologique également, c'est-à-dire volonté commune " 161( * ) .

Il avait rappelé que telle était la philosophie de la loi quinquennale de 1993, de l'accord de 1995 entre les partenaires sociaux ou enfin de la loi " de Robien " de 1996 et que telle devait être la ligne de conduite de la majorité sénatoriale.

La commission des Affaires sociales avait considéré que la flexibilité constituait bien souvent une contrainte pour le salarié qui ne pouvait être imposée. Votre rapporteur avait également déclaré que si la réduction du temps de travail pouvait permettre d'améliorer les conditions de travail et ainsi constituer un des éléments du " donnant-donnant " qui constituait la base de tout accord, de tout progrès social durable, la flexibilité pourrait ainsi être maîtrisée, négociée et finalement acceptée pour permettre, dans un esprit de responsabilité, de faire baisser le chômage.

Dans ces conditions, les propositions de la commission s'articulaient autour de cinq points :

- suppression de l'abaissement autoritaire de la durée légale du travail ;

- maintien d'un dispositif incitatif à la négociation sur l'aménagement et la réduction du temps de travail ;

- introduction d'un délai spécifique de négociation pour les entreprises de moins de cinquante salariés ;

- réaffirmation du principe de la compensation intégrale pour la sécurité sociale des exonérations de charges ;

- suppression des principaux obstacles introduits par le texte au développement du temps partiel.

En résumé, les propositions de la majorité de la commission des Affaires sociales lors du débat de 1998 sur la première loi Aubry visaient à faire en sorte que le projet de loi ne compromette ni le dialogue social, ni l'équilibre des comptes publics, mais parvienne à la fois à une réduction progressive du temps de travail effectif et à une amélioration durable de l'emploi.

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