Audition de
M. Pierre-Yves RÉBÉRIOUX,
délégué
général de la commission interministérielle
pour le
logement des populations immigrées
(CILPI)
(25 janvier 2006)
Présidence de M. Georges OTHILY, président
M. Georges Othily, président.- Monsieur le délégué général, nous vous remercions d'accepter d'être auditionné par la commission d'enquête sur l'immigration irrégulière, tant au niveau de la France hexagonale que de la France équinoxiale ou tropicale.
Conformément aux termes de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, M. Pierre-Yves Rébérioux prête serment
M. Georges Othily, président.- Acte est pris de votre serment. Nous vous écoutons.
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vais vous faire quelques remarques liminaires, tout d'abord sur les points dont j'ai à m'occuper dans ma fonction de délégué général de la Commission interministérielle pour le logement des populations immigrées (CILPI).
D'une part, par définition, cette commission s'occupe surtout de problèmes de logement, ce qui n'est pas en relation directe avec le concept d'immigration clandestine. D'autre part, quand on est confronté à ces sujets, c'est plutôt un résultat qu'un processus. J'emploierai donc plutôt, de ce point de vue, l'expression « sans-papiers », les situations auxquelles nous sommes confrontés, quand on y est confronté, résultant du fait que les gens ont un titre de séjour qui n'est pas en règle ou n'en ont pas, mais sans que nous ayons connaissance du processus par lequel ils ont pu arriver en France.
De façon générale, le principe global en ce qui concerne les personnes sans papiers en France, c'est qu'autant il y a un droit à l'hébergement qui est ouvert, de même qu'à la scolarisation des enfants ou à la santé, autant il n'y a pas directement un droit au logement. Cela implique clairement de faire la distinction entre ce qui relève du processus d'hébergement et ce qui relève du processus de logement social, le processus d'hébergement allant, en gros, des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) jusqu'aux centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), qui sont juridiquement des modalités spécifiques des CHRS.
Le principe selon lequel il faut avoir un titre de séjour en règle est, en ce qui concerne l'accès au parc locatif social, fondamental. En gros, il y a deux sujets à vérifier pour avoir accès au parc locatif social : d'une part, les conditions de ressources et, d'autre part, le fait que l'on est de nationalité française ou que l'on a un titre de séjour ouvrant l'éligibilité au parc social.
Dès que l'on passe au parc privé, cette distinction ferme sur le fait que des personnes dont le titre de séjour n'est pas en règle n'ont pas accès au logement est un concept beaucoup plus compliqué, notamment à travers les systèmes locatifs, qui prévoient qu'un bailleur privé n'a pas autorité pour aller vérifier les titres de séjour et leur régularité.
On peut aussi tomber sur des situations qui ont déjà pu vous être décrites et qui sont l'une des façons de devenir sans-papiers : une personne qui entre avec un titre de séjour en règle, qu'il soit de moins de trois mois pour visa touristique ou d'un an, et à laquelle un bailleur privé peut parfaitement louer un logement en toute bonne foi, par exemple si la personne lui montre un titre de séjour d'un an. Si ce titre n'est pas reconduit au bout de plusieurs mois, la personne devient un sans-papiers. Le bailleur n'est pas directement dans ce sujet ; il ne va pas se mettre à vérifier tous les ans la régularité du titre de séjour de ses locataires.
Nous pourrons aborder, si vous le souhaitez, l'aspect un peu particulier, sur lequel je n'ai pas de pleine compétence, des certificats d'accueil que les maires doivent valider ou refuser de valider quand il s'agit de personnes qui doivent venir en France munies d'un visa de moins de trois mois. Nous avons là un aspect d'articulation avec le logement qui est récent et nous n'avons pas encore une bonne distance sur ce sujet, mais je m'en mêle très peu dans mes fonctions.
En revanche, ce problème de présence significative de sans-papiers est fréquent dans la plupart des opérations que l'on regroupe sous l'appellation générale d'« éradication de l'habitat indigne », c'est-à-dire dès que l'on est confronté à des problèmes de squats et de bidonvilles, même s'il n'y en a plus beaucoup. On retombe assez souvent sur des populations dont une partie est sans papiers.
La question se pose aussi fréquemment pour une partie du public présent dans les foyers de travailleurs migrants, un sujet sur lequel la CILPI est fortement présente, mais que l'on connaît essentiellement sous la forme de la présence de sur-occupants. Dans un certain nombre de foyers, essentiellement en Ile-de-France, et quasiment nulle part ailleurs sur le territoire français, les foyers de travailleurs migrants qui reçoivent souvent à 100 % du public sub-saharien, essentiellement des populations de l'ouest du Mali, des Soninkés de la région de Kayes, connaissent des phénomènes de sur-occupation tout à fait significatif, puisqu'on peut aller jusqu'à un taux d'occupation de 300 %.
Pour vous donner un exemple, dans tel foyer de 300 chambres de 9 mètres carrés, on sait, par les consommations d'eau, que 900 personnes vivent sur le site. Cela fait plusieurs centaines de personnes surnuméraires. L'angle sous lequel nous abordons ce sujet à la CILPI est essentiellement dans les perspectives de traitement, c'est-à-dire de réhabilitation du foyer, mais le fait qu'il y ait un tel nombre de sur-occupants, soit 600, pose des problèmes considérables, sachant que, parmi eux, un certain nombre ont des titres de séjour en règle et peuvent même parfois être présents dans le foyer depuis fort longtemps, d'autres étant sans papiers.
Pour ma part, j'ai plutôt une connaissance opérationnelle à travers le phénomène de la sur-occupation dont une partie seulement correspond à des sans-papiers. Cela dit, on estime qu'en Ile-de-France, il doit y avoir environ 20.000 sur-occupants dans les foyers. Quel pourcentage avons-nous de personnes sans papiers dans cet ordre de grandeur, sachant qu'elles sont très centrées ethniquement (c'est une population très particulière) ? Ce que nous avons réussi à en connaître varie beaucoup selon les foyers à traiter. Dans certaines situations, il y avait 10 à 20 % des sur-occupants et dans d'autres, il y en avait plus de 50 %.
Je ne m'aventurerai donc pas à essayer de chiffrer, à travers un pourcentage que je validerais, un nombre de sans-papiers présents dans les foyers. Sur cet ensemble de 15.000 à 25.000 sur-occupants, il y a probablement une part significative (vous m'excuserez de ne pas être plus précis) mais, par définition, on ne fait jamais de liste de sans-papiers en matière d'accès au logement. En revanche, nous faisons une liste de résidents et, pour faire face au phénomène de sur-occupation, nous pouvons faire, dans le cadre du traitement de ces foyers, une liste de ceux des sur-occupants qui ont un titre de séjour en règle.
D'une certaine façon, on peut obtenir un résultat par soustraction. Entre le nombre total de personnes vivant sur le site dont on retire les résidents et les sur-occupants ayant un titre de séjour en règle, on peut avoir, dans certains cas, un ordre de grandeur des personnes sans papiers.
Je pense que nous reviendrons en détail sur ces questions, mais la CILPI est très centrée sur ces problèmes de foyers. Pour le reste, comme elle est également très centrée sur les problèmes de logement, elle intervient fort peu sur les modalités d'hébergement, par exemple dans les CADA. Dans un CADA, on est hébergé et il ne s'agit pas de l'ensemble des droits liés au concept de logements en France.
Le dernier point que je signalerai, dans le cadre de l'articulation entre l'accès à un logement autonome et le fait que, parfois, certaines personnes n'ont pas un titre de séjour en règle, c'est cette question complexe des ménages polygames. On peut se retrouver dans des situations qui sont pointues et que personne ne peut chiffrer de façon significative mais qui représentent quand même plusieurs milliers de ménages, essentiellement africains en Ile-de-France et parfois comoriens à Marseille.
En Ile-de-France, les personnes qui gèrent ces cas un par un sont régulièrement confrontées au fait qu'une partie d'entre elles ont un titre de séjour qui n'est pas en règle. L'une des difficultés du processus est d'arriver à régler cette situation, c'est-à-dire de régler à la fois le problème du titre de séjour, si c'est possible et si la préfecture le décide, et, ce qui est plus de ma compétence, l'accès au logement pour sortir de la situation de polygamie. En principe, en effet, la loi de 1993 interdit d'attribuer ou de renouveler un titre de séjour à des personnes vivant en France en situation de polygamie. En principe, les situations de polygamie devraient « produire » des sans-papiers puisqu'elles devraient, pour les personnes qui ont un titre de séjour en règle et qui vivent en situation de polygamie, se traduire par la suppression du titre de séjour, même si les choses sont en fait plus compliquées que cela.
Voilà les thèmes que je souhaitais traiter et dans lesquels nous pouvons rentrer plus précisément si vous le souhaitez. Ce sont des questions un peu pointues, mais, de façon générale, je suis professionnellement beaucoup plus des situations de logement que des situations d'hébergement.
M. Georges Othily, président.- Merci. Je passe la parole à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur.- Vous avez dit tout à l'heure qu'en ce qui concerne les personnes en situation irrégulière ou supposées comme telles, vous disposiez d'une estimation dans le rapport entre les occupants déclarés et les consommations que vous pouviez constater, notamment d'eau. Pour autant, les gestionnaires de ces bâtiments, ceux qui travaillent au quotidien auprès de ces familles, sont-ils en capacité de voir ce qui se passe vraiment et de constater des situations irrégulières ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Tout d'abord, dans les foyers de travailleurs migrants, il n'y a que des hommes : il n'y a quasiment pas de familles, si ce n'est de façon exceptionnelle. Cela ne veut pas dire que certains des hommes qui, dans le foyer, se présentent comme isolés n'aient pas fait venir femmes et enfants, légalement ou non, avec ou sans titre de séjour, qui peuvent vivre parfois dans des conditions bizarres, parfois à la merci de marchands de sommeil manquant de délicatesse, dans des logements privés insalubres dans l'environnement du foyer. Autrement dit, il n'y a que des hommes, mais, le week-end, on constate qu'il y a hommes, femmes et enfants. Il y a donc probablement des relations avec l'environnement.
Il faut se rendre compte que les foyers de travailleurs migrants dont on parle concernent essentiellement 100 à 150 foyers franciliens sur un total de 240 qui existaient avant le début de la transformation des foyers en résidences sociales à partir de 1997-1998. C'est un phénomène qui se présente dans les deux tiers des foyers de travailleurs migrants franciliens.
Par conséquent, les gestionnaires ont perdu le pouvoir, si tant est qu'ils ne l'aient jamais eu. Je vous parle avec une certaine franchise et une certaine clarté sur ce point.
M. Philippe Dallier.- C'est ce que nous souhaitons.
M. Georges Othily, président.- Vous avez juré.
M. Pierre-Yves Riberioux.- Tout à fait. Je veux dire par là que ces structures ont servi à faire venir de la main-d'oeuvre immigrée africaine dans les années 60 et 70 et qu'à la différence des Maghrébins qui sont présents dans les foyers, ce mouvement migratoire continue de se produire. Il n'y a plus de demande de Maghrébins venant en France pour aller dans les foyers dans lesquels se trouvent à l'heure actuelle des Maghrébins, ce qui fait que, pour les foyers de Maghrébins, notre problème principal est le vieillissement, tandis que, dans les foyers africains, qui ont été conçus pour être à l'écart de la société française, il continue d'y avoir des flux d'arrivée, probablement de personnes sans papiers, et le contrôle est assuré essentiellement par des gestionnaires associatifs dans ces foyers. La Sonacotra, qui représente 55 % de l'ensemble du secteur, n'était pas propriétaire gestionnaire de ces foyers jusqu'à ces années récentes où, pour sortir des situations catastrophiques que l'on a pu constater, l'Etat et les élus locaux lui ont demandé d'intervenir pour en reprendre en charge un certain nombre.
Nous sommes donc dans une situation où le gestionnaire, sur le papier, a une liste de résidents, même si je suis un peu dubitatif sur la solidité de ces listes. Il faut savoir que, lorsque nous entamons le traitement d'un foyer, nous commençons par missionner une équipe, à travers ce qu'on appelle une maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS), pour mettre au net cette liste et avoir une vraie liste de résidents. En effet, nous nous rendons compte que des gens qui étaient en principe encore résidents, dans un certain nombre de cas, sont partis vivre ailleurs, sont partis en HLM, sont repartis au pays, peuvent être décédés, etc. Nous avons donc un travail d'accès à une gestion locative normale rien qu'en ce qui concerne les résidents.
Pour le reste, les gestionnaires voient passer beaucoup de gens et ils n'ont pas de personnel suffisant pour faire face à la situation qui les déborde. Ils savent simplement qu'il y a nettement plus de personnes : ils s'en rendent compte en gérance, en voyant le volume d'ordures, en voyant le nombre de matelas qu'ils trouvent dans les couloirs et qui ne devraient pas s'y trouver et essentiellement à travers les consommations d'eau. Notre indicateur sur ce point est clair : la moyenne nationale de consommation d'eau par jour et par résident en France est de 180 litres et quand on est dans des foyers où on dépasse les 300, voire 400 litres par jour, le signe est extrêmement évident. En divisant par 180 litres, on a le nombre de personnes vivant sur site que l'on peut comparer au nombre de lits et on a ainsi le nombre de sur-occupants. Encore une fois, sur-occupants et sans-papiers sont deux concepts différents : une partie des sur-occupants est sans papiers, mais une autre partie peut vivre depuis vingt ans dans le foyer.
Les gestionnaires ont largement perdu leur pouvoir d'attribution, si tant est qu'ils l'aient eu, jusqu'à ce que l'on ait exigé depuis quelques années de plus en plus de fermeté sur le sujet, fermeté qui doit reposer sur une mise au net au départ, afin de partir de vraies listes.
Un gestionnaire de foyer m'a résumé cela un jour de la façon suivante : « C'est bien nous qui attribuons : le comité de résidents vient nous dire : "M. X va partir, vous allez attribuer à M. Y" ; j'attribue donc à M. Y ». Sur le papier, le système d'attribution fonctionnait, mais sans que le gestionnaire ait un véritable contrôle et puisse exercer une politique. Il faut dire aussi que personne ne le lui demandait réellement. En ce qui concerne les responsabilités sur ce sujet, il y a celles des gestionnaires et celle des employeurs qui ont fait venir la population, mais aussi celle de l'Etat, qui a laissé se développer cette vie à l'écart et celle des élus locaux qui ne s'en sont pas mêlés. Je veux dire par là qu'il serait un peu facile de tout mettre sur le dos des seuls gestionnaires.
Notre objectif est d'en sortir en arrivant à voir clair là-dedans, notamment, à travers les MOUS, en dressant en complément de la liste des résidents (c'est-à-dire des personnes qui ont un contrat de résidence et donc un titre de séjour en règle) une liste complémentaire de personnes hébergées qui seront rattachées à tel ou tel résident qui, par définition, devraient être des personnes munies de titres de séjour en règle.
Ce sujet est en train de progresser, notamment à travers un amendement au projet de loi « Engagement national pour le logement », qui a été voté par le Sénat en première lecture fin novembre, si mes souvenirs sont exacts, et qui prévoit que l'on va définir et encadrer la situation des hébergés en logements foyers, mais cela ne pourra pas concerner des sans-papiers. Autrement dit, nous allons vers des formes de gestion qui seront plus claires juridiquement et que nous demanderons aux gestionnaires d'appliquer. Les gestionnaires distingueront nominativement dans cet ensemble de sur-occupants, d'une part, ceux qui ont un titre de séjour en règle et qui sont présents depuis quelques années en admettant qu'ils restent présents et en leur disant qu'on leur fournira à terme une solution de relogement, et, d'autre part, ceux parmi lesquels il y aura sûrement un nombre significatif de sans-papiers.
M. François-Noël Buffet, rapporteur.- Je voudrais revenir à ce que vous avez dit sur les situations de polygamie. Si j'ai bien compris, il y aurait une forme de régularisation, dans la mesure où on relogerait les gens dans des bâtiments ou des logements différents et où, finalement, on tolère ce genre de situation. Est-ce bien ce que vous vouliez dire ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Ce sujet de polygamie est tout sauf simple et vous m'excuserez de m'y arrêter quelques instants, étant entendu que je l'aborde essentiellement sous l'angle de l'accès au logement.
Le texte de base, c'est la loi Pasqua de 1993, un texte très bref qui précise que, pour des ménages vivant en situation de polygamie en France (sachant que s'il n'y a qu'une seule épouse présente en France, le problème n'en est pas un au point de vue du droit au titre de séjour), il ne pourra être ni attribué, ni renouvelé de carte de dix ans.
La sécheresse violente d'une application telle quelle de ce texte aurait pu entraîner des situations extrêmement difficiles. Vous avez par exemple de nombreux ménages qui, avant 1993, ont pu entrer de façon parfaitement régulière en France. Le problème se posant en principe au moment du renouvellement de la carte de dix ans, on a bâti un système d'attribution de titres de séjour temporaires d'un an pour donner le temps aux personnes de sortir de leur situation de polygamie, c'est-à-dire de permettre à l'une des deux épouses de sortir et d'avoir accès à un logement autonome. Cela fait que, juridiquement, il y a toujours polygamie mais non plus mode de vie polygamique. La carte de dix ans ne peut pas être attribuée, mais il est possible d'attribuer un titre de séjour d'un an.
La seule chose qui entraînerait la fin complète de la polygamie serait une procédure de divorce, mais je vous garantis que, pour obtenir des autorités maliennes des informations sur ce sujet, d'autant plus qu'elles sont fortement opposées à cette méchanceté de l'Etat français, ce n'est pas simple du tout !
M. François-Noël Buffet, rapporteur.- C'est donc la cohabitation qui n'existe plus.
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Exactement. Il y a bien quelques cas dans lesquels il y a eu des divorces, mais ils sont rares.
M. Georges Othily, président.- Sous quel régime étaient-ils mariés, français ou malien ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Malien pour l'essentiel, quasiment pour tous.
M. Georges Othily, président.- Ils sont reconnus en France ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Ils l'ont été jusqu'en 1993, mais je ne suis pas expert sur cet aspect des titres de séjour et j'avance avec une très grande prudence.
En revanche, il faut bien se rendre compte que nous avons affaire à des ménages dans lesquels, très souvent, chacune des deux femmes -voire des trois- a des enfants et que ces enfants sont souvent nés en France, ce qui ne facilite pas une posture qui consiste à dire qu'il suffit d'expulser. Nous sommes dans des situations qui sont familialement, socialement et juridiquement toujours très compliquées.
Cela implique un très gros accompagnement social et des gens capables de discuter. Pour le dire franchement, cela implique des travailleuses sociales, en l'occurrence des femmes, parlant le soninké, mais la capacité d'une femme arrivant de la campagne malienne sans parler français de discuter de choses telles que la décohabitation ou le divorce avec un fonctionnaire français de base n'est pas évidente. Nous sommes dans des sujets qui demandent un très gros accompagnement social et un espace de discussion. Nous essayons donc d'accompagner un processus de décohabitation et de faire en sorte qu'une des épouses quitte le foyer, mais il est maintenant décidé de ne pas continuer à faire ce qui avait été fait pendant quelques années et qui consistait, sous l'appellation de décohabitation, à mettre des gens dans deux logements côte à côte sur le même palier.
L'objectif que nous nous fixons (vous sentez que tout cela n'est pas facile) est d'obtenir une vraie décohabitation. Vous imaginez les discussions exaltantes qui peuvent avoir lieu avec des représentants du milieu malien, surtout des hommes, parce qu'un certain nombre de femmes ont plutôt envie d'entrer dans les détails de ce qui leur est proposé, si elles le comprennent, en se demandant quelle est la bonne distance, si l'étage en dessous peut convenir, etc. Cela dit, vous ne pouvez pas non plus interdire à un père d'aller voir ses enfants.
Cela implique toute une série de difficultés qui s'éloignent un peu de vos préoccupations, même s'il s'agit de populations qui sont soit sans papiers, soit qui peuvent le devenir du jour au lendemain. Il s'agit de faire comprendre à l'ensemble des acteurs qu'il faut changer de logique.
Je prends un exemple simple : le droit à l'APL et le droit à l'allocation de parents isolés (API). Nous sommes typiquement dans le droit à l'API et ses deux possibilités d'attribution : soit jusqu'à ce que le plus jeune des enfants ait atteint ses 3 ans, soit pendant un an suite à une séparation sous condition d'isolement, l'isolement n'étant pas le divorce dans la société française, sans quoi l'API ne servirait pas à grand chose pour toute une partie des femmes concernées. Cela implique de calculer les ressources de la femme pour connaître sa base ressources, en langage de Sécurité sociale, afin de calculer l'ouverture de son droit à l'APL, si on parvient à lui faire obtenir un logement HLM (puisque vous pouvez imaginer que c'est essentiellement dans des logements HLM que l'on peut trouver des solutions), même si les bailleurs se méfient du sujet, ce que l'on peut comprendre dans la mesure où ils ont eu aussi quelques expériences compliquées, ou afin de vérifier l'ouverture du droit à l'API.
Il est vrai que, dans la formule précédente, tant que l'on mettait les deux parties de l'ex-ménage dans des logements côte à côte, il était demandé aux CAF, et de façon sensée à mon avis, que ce soit pour le calcul de l'API, voire du RMI, ou pour le calcul de l'APL, d'intégrer le salaire du mari dans les ressources des deux ménages, sans quoi nous aurions été proche de l'escroquerie.
Cela étant, il faut comprendre que nous ne faisons plus cela maintenant. Or, pour arriver à faire prendre en charge des situations aussi compliquées que celles-là par les agents de base de la CAF qui moulinent massivement des dossiers (25 % des ménages français sont éligibles à l'APL, plus le RMI et l'API) et à leur faire prendre le virage sur des questions qui sont à chaque fois de la dentelle ou du cousu main, puisque ce sont des discussions au cas par cas, les difficultés sont grandes.
Je vous parle de difficultés d'accès au droit, mais c'est pour éviter que les personnes versent dans une situation de sans-papiers. Cependant, certaines d'entre elles peuvent être entrées sans papiers.
M. Georges Othily, président.- Pouvez-vous donner des chiffres concernant tous ces éléments ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Non. Je peux simplement vous dire qu'à mon sens, il y en a plusieurs milliers, essentiellement en Ile-de-France, ce qui représente du monde, parce qu'on peut raisonnablement multiplier le nombre de ménages par dix à quinze personnes en moyenne. Un ménage polygame fait déjà au moins trois personnes, un homme et deux femmes. Maintenant, si nous raisonnons sur dix à quinze personnes par ménage, cela veut dire que nous estimons que chaque femme a quatre, cinq ou six enfants, ce qui est une situation fréquente, le tout, je le répète sur plusieurs milliers de ménages.
Nous n'avons pas de moyens de recenser le nombre de ménages polygames, mais, encore une fois, de nombreux ménages polygames en France ont des titres de séjour en règle.
M. Bernard Frimat.- Sinon, il n'y a pas d'API ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Il ne peut pas y avoir d'API si la personne n'a pas un type de séjour lui permettant d'y être éligible. Dans bon nombre de cas, nous partons de situations où les trois époux ont un titre de séjour en règle, mais ce n'est pas le cas dans un certain nombre d'exemples. Dans l'application de la loi de 1993, il est prévu que l'épouse n° 1, non pas forcément dans l'ordre dans lequel le mari les a épousées mais dans l'ordre d'entrée en France, ne soit pas tenue pour responsable de la polygamie du mari et, par conséquent, s'il y a suppression du titre de séjour du mari, le sien est maintenu.
Si une femme est venue alors que son mari en a épousé une autre et a créé une situation de polygamie, il est difficile de lui faire « porter le chapeau » de cette situation.
M. Georges Othily, président.- Nous voudrions avoir une estimation.
M. Pierre-Yves Rébérioux.- L'ordre de grandeur est de 5.000 à 15.000 ménages polygames.
M. Georges Othily, président.- Sur toute la France ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Essentiellement en Ile-de-France. Il y a aussi le problème des Comoriens, mais il est limité à Marseille et il est très particulier. Si vous me demandez de parler de cela, vous allez me faire entrer dans une chose que je ne connais pas.
Cela dit, personne n'a de statistiques permettant de mesurer ce point. La loi de 1993 s'est accompagnée des aménagements qui ont été apportés par le ministère de l'intérieur. Si on supprime le titre de séjour de dix ans du jour au lendemain, cela veut dire que, du jour au lendemain, une personne qui peut être présente en France depuis vingt ans, qui a un emploi depuis vingt ans, qui reçoit une aide au logement et des allocations familiales depuis vingt ans se verrait supprimer d'un seul coup tout cela et devrait sortir du logement HLM qu'elle occupe. Vous sentez bien que ce n'est pas facile, sans compter une ribambelle d'enfants. Nous sommes sur des situations difficiles.
Nous constatons simplement qu'un certain nombre de renouvellements de titres de séjour de dix ans ont eu lieu en préfecture. Sinon, si on raisonnait mathématiquement, il ne devrait plus y en avoir dix ans après 1993.
M. Philippe Dallier.- J'ai un exemple, dans ma commune, d'un pavillon qui a été acquis par la Sonacotra il y a une quinzaine d'années pour y loger une famille malienne avec au moins deux épouses et dix ou douze gamins. Ces gens sont là depuis quinze ans sur la commune et il ne s'est jamais rien passé. Par conséquent, je pense que la loi de 1993 n'est pas appliquée, purement et simplement. J'ajoute qu'à partir du moment où les enfants sont nés en France, il n'y a rien à faire. A mon avis, la question se pose de cette manière plutôt qu'en faisant référence à une loi qui est inapplicable en tant que telle.
Cela étant dit, j'ai une question sur la responsabilisation des hébergeants. En effet, il y a le problème du travail clandestin pour les sans-papiers : le but de ceux qui sont ici pour des raisons économiques est de travailler, ils ont besoin de vivre sur place et il y a pour cela le travail clandestin. Nous avons bien vu combien il est nécessaire de responsabiliser et de pénaliser ceux qui les exploitent en les faisant travailler sans les déclarer.
Pour ce qui est des hébergeants, on sait que le certificat d'hébergement peut être obtenu, c'est-à-dire que le maire peut le signer, mais une fois que la personne est arrivée, lorsqu'elle vient avec un visa de trois mois, elle peut tout à fait rester sur le territoire. C'est ce qui se produit à mon avis dans 80 % des cas, si ce n'est plus, en termes d'immigration clandestine en métropole, sachant que la problématique est différente outre-mer. Soit ces gens restent chez la personne qui les a accueillis, soit ils disparaissent dans la nature.
Je voudrais donc savoir dans un premier temps si, d'après vous, il est possible de responsabiliser les hébergeants.
Deuxièmement, si la personne quitte le lieu premier sur lequel elle est arrivée, pensez-vous également qu'il est possible de pénaliser ceux qui louent des logements souvent indignes à des prix exorbitants tout en sachant que les gens qu'ils ont en face d'eux sont manifestement sans papiers et n'ont pas de fiche de paie ? Chacun connaît les difficultés de se loger aujourd'hui : un bailleur privé qui accepte de louer sans feuille de paie sait qu'il a nécessairement en face de lui un travailleur clandestin qui est donc probablement sans papiers. Pensez-vous que la responsabilisation de ces bailleurs peut être une solution au règlement des problèmes ?
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Votre question comporte deux aspects différents.
Le premier concerne la filière, dont je subodore comme vous, car je ne connais pas ces statistiques, que cela doit être un mode fréquent de passage du statut de personne en règle au statut de sans-papiers. Cela concerne aussi les déboutés du droit d'asile.
Je pense qu'il faudrait déjà disposer d'un peu de recul sur l'application des nouveaux textes sur le certificat d'hébergement qui confient au maire une responsabilité significative de validation ou de non-validation. En même temps, jusqu'où peut-on aller ? On tombera à chaque fois sur des hébergeants qui diront que la personne leur avait fait des promesses qu'elle n'a finalement pas tenues.
C'est un sujet qui n'est pas directement de ma compétence, mais sur lequel je pense qu'il faudrait déjà disposer d'un peu de recul. Il est possible que le ministère de l'intérieur en ait un peu, mais je n'ai jamais vu de remontées sur ce sujet et, encore une fois, cela ne porte que sur les visas touristiques de trois mois au maximum. Il y a un autre mode d'accession à la situation des sans-papiers : le fait de venir avec un visa d'un an qui rend les personnes directement éligibles au logement HLM et qui deviennent sans-papiers au bout d'un an si le titre de séjour n'est pas reconduit.
Sur ce premier sujet, on est franchement à l'extrême limite de mes compétences et, à mon avis, il serait déjà utile d'avoir un bilan des cas contentieux, des sujets sur lesquels ils portent et de la manière dont on peut peser à ce sujet, pour savoir si les maires remplissent cette fonction aisément ou non et s'il y a eu des refus ou non, c'est-à-dire si le dispositif législatif qui est prévu s'exerce librement ou si les certificats d'accueil sont attribués quasiment automatiquement. Je n'ai aucune vision sur ce sujet. C'est une vision de la préfecture, le maire agissant en tant qu'agent de l'Etat.
Quant au deuxième problème qui concerne les gens qui prospèrent sur le mal-logement des sans-papiers, nous sommes sur des sujets sur lesquels les modifications d'un certain nombre de textes permettant de lutter plus fermement contre l'habitat insalubre vont donner des moyens. Cependant, je ne mesure pas si ces textes permettent de frapper suffisamment fort sur ce qu'on appelle les marchands de sommeil. Il faut bien se rendre compte que cette appellation « marchands de sommeil » est toujours niée par la personne qui est en face. Il n'empêche que ce phénomène existe massivement et que le monde des sans-papiers (ou des Africains avec papiers, parce que des phénomènes de discrimination se manifestent aussi) alimente ces filières qui sont souvent animées par des compatriotes : les responsabilités ne sont pas toutes sur le dos des méchants Français d'origine, que cela passe par du locatif ou par de l'accession à la propriété, par exemple dans des copropriétés dégradées. Dans toute une partie des copropriétés dégradées, nous avons des situations de ce genre. Lorsqu'on achète de l'habitat fortement dégradé en copropriété et qu'on le revend, on peut obtenir une rentabilité nettement supérieure à un investissement immobilier ordinaire dans certains cas.
Un certain nombre de textes supplémentaires viennent d'être pris. L'une des données de base était la logique de la loi SRU consistant à dire que, dès qu'il y a un arrêté de péril ou d'insalubrité (ce sont généralement les deux procédures qui peuvent intervenir dans ce cas), il n'y aura plus rien à verser par l'occupant, quel que soit le titre au nom duquel il occupe son logement, et il n'y aura plus non plus de versement de l'aide au logement, puisque la critique qui était faite traditionnellement, c'est qu'à travers les aides au logement, on subventionnait les gens qui faisaient du profit sur l'insalubrité des logements dans lesquels ils logeaient des locataires ou des occupants variés.
Nous sommes sur des sujets qui, dès qu'ils montent en contentieux judiciaires, sont souvent compliqués parce qu'on se trouve face au droit de propriété. Il est vrai que l'articulation permanente entre les éléments liés au droit de propriété et le fait de taper sur des gens dont on sait qu'en tant que bailleurs, ils sont de parfaits profiteurs de la misère humaine et de l'existence de sans-papiers n'est pas une chose évidente : il est difficile de savoir en permanence où on doit mettre le curseur.
Cela dit, je ne suis pas très spécialisé sur ce sujet qui demande notamment une absorption des dernières ordonnances qui sont en train de sortir sur ces questions et dans lesquelles je ne me suis pas plongé.
M. Philippe Dallier.- J'ai encore une question qui est à la limite de notre sujet. Il s'agit des conditions requises en termes de logement pour le regroupement familial. Pour demander un regroupement familial, il faut 16 m² pour deux personnes et 9 m² de plus par personne supplémentaire. Cela fait qu'au bout du compte, ce qu'on ne tolère pas dans un logement social est admis pour un regroupement familial. Pensez-vous que c'est tenable ? Si on fait le compte, on peut demander un regroupement familial sur un deux-pièces de 50 m² pour cinq personnes alors qu'on n'attribuerait jamais un deux-pièces dans un logement social pour cinq personnes.
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Il s'agit d'un sujet souvent souligné sur lequel un certain nombre de ménages immigrés se retrouvent pris dans une contradiction : pour faire venir leur famille, on leur demande de présenter un logement capable de contenir la famille et, pour avoir accès à un logement capable de contenir la famille, on leur demande que la famille soit présente. C'est un cercle vicieux qui n'est pas simple.
Cela dit, pour procéder à un regroupement familial, il faut pouvoir présenter une capacité d'accueillir le ménage en question. Par exemple, dans les foyers, ce sont des difficultés qui sont souvent rencontrées par des personnes qui peuvent vivre dans le foyer depuis vingt ou trente ans et qui, une fois la retraite arrivée, souhaitent faire venir leur épouse et peut-être même des enfants restés au Maghreb jusqu'alors. Cela n'est pas possible dans le foyer, où les tailles des chambres sont souvent minuscules (nous avons encore quelques milliers de chambre de 4,5 m² et des gens qui vivent dans cette superficie depuis 45 ans ; ce n'est pas un gros sujet d'interpellation parce que cela ne gêne pas trop dans la société française, mais c'est un fait) et, pour demander un logement social, on doit le faire à partir de la composition présente du ménage, c'est-à-dire une seule personne. C'est un problème compliqué.
Je ne sais pas comment le sujet que vous abordez est réglé par un certain nombre de commissions d'attribution, mais il est vrai que l'un des points sur lesquels sont fondées les craintes d'un certain nombre de bailleurs sociaux à l'égard de familles africaines concerne le fait d'attribuer un logement à un ménage d'une taille modeste, de deux à quatre personnes, et de se retrouver, à travers le regroupement familial ou l'hébergement d'amis (le sujet de la polygamie est très secondaire, les grandes familles n'étant heureusement pas toutes polygames), quelques années après, avec un nombre nettement supérieur de personnes hébergées dans le logement. En tant que maires, c'est un problème que vous devez connaître. Cela se traduit par une montée des demandes de logement adressées sur la commune, puisque les demandes se font à partir du lieu d'habitation.
Cette question de l'augmentation significative du nombre de personnes vivant dans un logement social par rapport au nombre de personnes pour lesquelles ce logement social a été attribué est une question compliquée et qui fait partie des sujets habituellement compliqués dans le monde des attributions de logements sociaux, mais je n'ai pas de solution toute faite à vous proposer là-dessus.
M. Philippe Dallier.- Ce n'était pas ma question. Je vous demandais si vous trouviez normal que, pour autoriser un regroupement familial, que ce soit dans un logement social et dans un logement locatif privé, les règles en termes de nombre de mètres carrés par personne soient bien inférieures à ce qu'elles sont pour attribuer un logement social. Avec moins de 50 m², on peut autoriser le regroupement familial de cinq personnes alors que l'on sait que cela posera des problèmes à tous les coups. Trouvez-vous cela logique ?
Je vois cela sur ma commune. Cela peut être bon dans les critères de ressources et dans les critères de surface, mais on sait tout de suite que l'on va créer une situation difficile. Il n'y a pas tellement de logique à cette situation.
M. Pierre-Yves Rébérioux.- Je n'ai pas de réponse précise et pointue à vous apporter, mais ces questions se posent régulièrement. L'entassement que l'on peut avoir dans les squats est étonnant. Il m'est arrivé de voir des squats où plus de vingt personnes étaient dans des deux-pièces. Les squats africains en Ile-de-France sont vraiment surprenants. Même quand on est un peu blindé dans le secteur, on tombe parfois sur des choses d'un autre âge et absolument étonnantes.
Moi-même, j'ai été confronté deux ou trois fois à un autre problème dans d'autres fonctions, notamment dans des commissions d'attribution : jusqu'où pousse-t-on l'accord entre la nature d'un logement et le nombre de personnes qui entrent, voire le nombre de personnes dont on craint qu'elles y soient encore deux ans après ? On retombe ici sur un autre aspect du sujet, qui ne relève pas du tout de l'immigration : le maintien de personnes isolées dans des logements qui étaient prévues pour six ou sept personnes quand le couple vivait avec cinq enfants alors que, vingt ans après, les cinq enfants étant partis vivre leur vie, il ne reste que deux personnes dans les 100 m².
L'articulation entre le nombre de personnes faisant partie d'un ménage auquel on attribue un logement et la superficie de ce logement est un problème compliqué de façon permanente. Vous sentez que je réponds très peu et mal, mais voilà la situation : nous sommes loin d'être sur un sujet qui ne concerne que les immigrés.
M. Georges Othily, président.- Nous vous remercions, monsieur Rébérioux, des renseignements que vous nous avez donnés.