II. L'ÉMANCIPATION DU PÔLE UNIVERSITAIRE GUYANAIS : UNE DEMANDE ANCIENNE SUR FOND DE REVENDICATIONS IDENTITAIRES

A. UNE CRISE D'IDENTITÉ ET DE CROISSANCE, SANCTION DE RIVALITÉS HISTORIQUES EXACERBÉES ENTRE LES DIFFÉRENTS PÔLES

1. Une démographie guyanaise dynamique mais une jeunesse très insuffisamment formée
a) Une population active jeune et en très forte expansion, mais très peu qualifiée

En 2013, la population guyanaise était estimée à plus de 250 000 habitants, soit une augmentation de plus de 60 % en un peu moins de quinze ans. La Guyane s'impose comme l'un des départements français les plus jeunes, près d'un habitant sur deux ayant moins de 25 ans. Forte d'une croissance annuelle comprise entre 3,5 % et 4 %, la population guyanaise pourrait atteindre 425 000 habitants en 2030, selon les projections de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), et avoisiner 600 000 habitants dès 2040. Dans le même temps, les départements antillais se caractérisent par un fort ralentissement de leur croissance démographique et un phénomène de vieillissement de leur population, particulièrement accentué en Martinique.

Par ailleurs, alors que la population immigrée (régulière et clandestine) représente près de 40 % de la population guyanaise. Sur près de 38 000 clandestins, provenant principalement du Brésil, du Guyana, du Suriname et d'Haïti, un grand nombre ne maîtrisent pas la langue française.

Malgré une population active jeune et en forte expansion, le potentiel de développement économique de la Guyane est lourdement entravé par le manque de qualification de sa population. Les activités économiques du département sont très peu diversifiées et le tissu productif, agricole ou industriel, demeure réduit à sa portion congrue : on dénombre, au sein de la population active guyanaise, 40 % de fonctionnaires, 22 % de chômeurs, 15 % de titulaires du revenu de solidarité active (RSA), soit 77 % des 71 000 actifs guyanais ne participant pas directement à des activités de production industrielles ou agricoles.

b) Un enseignement secondaire et supérieur peu accessible et inadapté
(1) Seulement 10 % d'une classe d'âge titulaires du baccalauréat en Guyane

Comme le soulignait le professeur Jacques Blamont, lors de son audition par votre groupe de travail 49 ( * ) , seulement 37 % d'une classe d'âge terminent leurs études secondaires en Guyane, contre 70 % en France métropolitaine, et 53 % des jeunes entre 25 et 34 ans n'ont aucun diplôme , à comparer avec 19 % en France métropolitaine. 10 % des jeunes d'une classe d'âge sont titulaires du baccalauréat, 4 % atteignent le niveau bac+2 et 3 % le niveau bac+4. Dans ces conditions, le professeur Jacques Blamont estime que « la population est coupée de l'enseignement supérieur », en relevant que « les 4 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail n'arrivent pas à remplir le millier d'emplois qualifiés qui leur sont proposés ».

C'est la capacité même du territoire guyanais à accueillir ses jeunes dans le système scolaire qui est en jeu puisque, si pour l'année scolaire 2008-2009 70 000 élèves étaient scolarisés, 3 000 enfants entre 6 et 16 ans et 3 300 entre 3 et 5 ans ne l'ont pas été. La préscolarisation et l'accueil des enfants en maternelle en Guyane sont très insuffisants. La Guyane est le département français dont le taux de scolarisation des enfants âgés de deux à cinq ans est le plus faible, à 65,7 %. L'isolement des familles, l'éloignement des structures scolaires et une insuffisance des infrastructures de transport sur un territoire deux fois plus grand que la région Aquitaine (et presqu'aussi grand que le Portugal) sont particulièrement handicapants. Une grande partie des élèves guyanais sont contraints de se lever très tôt pour se rendre à l'école en pirogue et leur retour au foyer, au terme d'un parcours long et fatigant, ne facilite pas leur plein investissement dans les études. L'absence de structures d'accueil périscolaire ou parfois même de restauration scolaire conduit les élèves à se nourrir de façon aléatoire avec ce qu'ils peuvent emporter de chez eux.

Les marges d'amélioration en matière de scolarisation des jeunes guyanais sont donc considérables. L'accent doit en particulier être mis sur le renforcement de l'accès de tous au système scolaire dès le plus jeune âge et le déploiement d'efforts pérennes pour l'apprentissage du français avec la prise en compte des langues étrangères, locales ou natives, dans l'enseignement à tous les niveaux. Pour mémoire, la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République prévoit notamment que « dans chaque académie peut être favorisé l'apprentissage des langues étrangères parlées dans les pays avec lesquels des accords de coopération régionale sont en vigueur » et qu' « outre les enseignements de langues qui leur sont dispensés, les élèves peuvent bénéficier d'une initiation à la diversité linguistique. Les langues parlées au sein des familles peuvent être utilisées à cette fin » (article L. 312-9-2 du code de l'éducation).

(2) Seulement 5 % d'une classe d'âge titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur en Guyane

Il est légitime qu'une région aspire à se doter d'une institution universitaire performante car elle est déterminante pour le progrès économique, social et culturel de sa population. Or, la situation de l'enseignement universitaire en Guyane est plus que préoccupante, caractérisée par une très faible capacité d'absorption des diplômés, avec un taux de chômage des jeunes de 41 % et un très faible taux d'accession des jeunes Guyanais aux études supérieures : seulement 5 % d'une classe d'âge, en Guyane, sont titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur. L'évaluation de l'UAG par l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES) en 2009 50 ( * ) n'a fait que confirmer des performances significativement en deçà des cibles nationales : en particulier, une très forte déperdition des étudiants en premier cycle 51 ( * ) , une cohérence scientifique globale insuffisante 52 ( * ) et des conditions de vie étudiante pénibles et inadaptées 53 ( * ) .

En dix ans, de 2003 à 2013, le nombre de bacheliers en Guyane a augmenté de plus de 128 %. Cependant, un écart de taux de réussite au baccalauréat 54 ( * ) de plus de 12 points avec la moyenne nationale subsiste en 2013. 2 476 étudiants étaient inscrits au pôle universitaire régional de la Guyane à la rentrée 2012, contre 1 371 en 2004 55 ( * ) , soit une progression de près de 81 %.

Dans le même temps, de 2004 à 2012, les effectifs étudiants inscrits au PUR de la Guadeloupe ont augmenté de 9,5 % et ceux inscrits au PUR de la Martinique ont diminué de 11,3 %. Globalement, les effectifs étudiants de l'UAG ont progressé de 9 % sur la même période.

Source : Université des Antilles et de la Guyane

On déduit ainsi, sur la période 2004-2012, que l'augmentation des effectifs étudiants de l'UAG (+ 1 074 étudiants) est principalement alimentée par la croissance du nombre d'étudiants en Guyane (+ 1 105 étudiants), les évolutions d'effectifs étudiants dans les Antilles se neutralisant (+ 502 étudiants en Guadeloupe et - 551 en Martinique).

Sur les 1 500 nouveaux bacheliers recensés en Guyane en 2009, le professeur Jacques Blamont indique que « 72 % ont décidé de poursuivre des études supérieures, 50 % en Guyane et 22 % en métropole ». Si le passeport mobilité permet aux bacheliers guyanais de suivre dans l'hexagone des formations supérieures qui ne seraient pas assurées en Guyane, la mobilité étudiante ne concerne qu'une partie limitée des jeunes Guyanais, réservée aux familles les plus aisées en mesure d'assumer le coût d'une installation en métropole. Il existe donc de fortes marges de progression pour les structures universitaires présentes en Guyane dans l'absorption des nouveaux effectifs bacheliers chaque année.

NOMBRE DE PASSEPORTS MOBILITÉ DÉLIVRÉS DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER EN 2012

Mesures

Réalisation au 31/12/12

Prévisionnel 2012

Taux de réalisation au 31/12/12

Nombre total (PME) (1)

11 629

9 250

125,72 %

Nombre Guadeloupe (1)

2 649

2 190

120,96 %

AE/CP (2) Guadeloupe

1 630 351

1 535 000

106,21 %

Nombre Guyane (1)

853

890

95,84 %

AE/CP (2) Guyane

433 973

500 000

86,79 %

Nombre Martinique (1)

2 434

1 930

126,11 %

AE/CP (2) Martinique

1 431 880

1 190 000

120,33 %

Nombre Mayotte (1)

3 017

2 395

125,97 %

AE/CP (2) Mayotte

5 104 676

5 965 000

85,58 %

Nombre Réunion (1)

2 676

1 845

145,04 %

AE/CP (2) Réunion

1 635 356

1 010 000

161,92 %

Total AE/CP (2)

10 236 236

10 200 000

100,36 %

Source : Rapport d'activité de 2012 de la délégation régionale en Guyane
de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité

(1) Nombre total de mesures comprenant : les renouvellements et les 1 res demandes de PME (nouveaux bacheliers)

(2) AE : Autorisation d'engagement - CP : Crédit de paiement

CARACTÉRISTIQUES DES BÉNÉFICIAIRES DU PASSEPORT MOBILITÉ EN GUYANE EN 2011 ET 2012

PME

2011

2012

Nombre de bénéficiaires ( 1 res demandes + renouvellements )

914

853

Nombre de primo demandeurs ( nouveaux bacheliers )

450

Dont boursiers

61 %

Source : Rapport d'activité de 2012 de la délégation régionale en Guyane
de l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité

D'une manière générale, la mobilité des étudiants entre le pôle guyanais et les pôles antillais pâtit des coûts de déplacement et d'installation rédhibitoires , incitant dès lors les familles à envoyer leurs enfants poursuivre des études supérieures en métropole pour une dépense globale équivalente voire, parfois, moindre, en s'appuyant sur le dispositif du passeport mobilité... En effet, M. Éric Nabajoth soulignait, en 2006, que « la mobilité entre les pôles est quasi inexistante. S'il est vrai que l'État a mis en place le passeport mobilité, celui-ci a pour objectif principal de permettre aux jeunes de se déplacer vers le territoire métropolitain pour poursuivre leurs études. Certes, à la demande de l'UAG, des dispositions particulières ont été introduites : pas de passeport mobilité pour des études se faisant à l'UAG ; utilisation du passeport mobilité pour circuler sur le territoire de l'UAG. Il n'empêche que le fonctionnement de ce dispositif montre toute l'ingéniosité mise en oeuvre par les familles pour bénéficier du dispositif même lorsque les études envisagées se déroulent sur place » 56 ( * ) .

La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche estimait, dans un courrier en date du 15 novembre 2013 adressé au président de la délégation sénatoriale à l'outre-mer, M. Serge Larcher, que le PUR de la Guyane « traverse aujourd'hui une véritable crise d'identité et de croissance. Malgré la croissance rapide des effectifs étudiants, à peine 5 % de la jeunesse guyanaise y suit des études supérieures. Les conditions d'études et de vie sur le campus ne sont pas à la hauteur des ambitions légitimes de ce territoire. Cette situation ne date pas de la rentrée universitaire 2013. Elle est connue depuis de nombreuses années. Elle est très spécifique du pôle de Guyane et revêt un caractère exceptionnel ».

2. L'accentuation des rivalités entre pôles et des orientations de plus en plus divergentes
a) Des déséquilibres persistants dans la répartition des moyens entre pôles au détriment de la Guyane
(1) Une « sur-dotation » théorique justifiée par la configuration tripolaire et les contraintes géographiques et économiques de l'UAG

Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche indique qu'au regard du modèle théorique d'allocation des moyens entre les universités (le système de répartition des moyens à la performance et à l'activité, dénommé « SYMPA »), l'UAG peut être considérée, parmi les universités françaises, comme « sur-dotée » en crédits et en emplois, la dotation effectivement accordée par l'État étant supérieure à celle calculée par SYMPA. SYMPA est pour l'heure utilisé par les services du ministère comme un outil d'aide à la décision et ses résultats ne peuvent être envisagés que sur un plan purement théorique. La détermination de la dotation d'une université demeure arbitrée sur le plan politique, à l'issue de négociations et d'échanges entre l'administration centrale et les services de l'université, et tient compte d'un certain nombre de paramètres propres à l'établissement qui ne sont pas nécessairement pris en compte par le modèle théorique de calcul des dotations.

ÉVOLUTION ENTRE 2012 ET 2013 DE LA DOTATION DE RÉFÉRENCE PAR RAPPORT
À LA DOTATION THÉORIQUE EN EMPLOIS ET CRÉDITS POUR L'UAG

2012

2013

Dotation de référence

Dotation théorique

Écart

Dotation de référence

Dotation théorique

Écart

Emplois

973

724

249

976

759

217

Crédits

17 266 651 €

14 643 914 €

2 622 737 €

16 881 708 €

14 841 482 €

2 040 226 €

Source : Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche

Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche explique que la « sur-dotation » relative de l'UAG par rapport à d'autres établissements d'enseignement supérieur peut résulter du fait que, pour une série de critères pris en compte par le modèle théorique de calcul de sa dotation, l'université affiche un décrochage vis-à-vis des moyennes nationales, un décrochage qui l'aurait donc de fait pénalisée dans le temps (sur le plan du calcul théorique) par rapport aux autres universités comparables :

- parmi les critères déterminant la part de la dotation en fonction de l'activité d'enseignement, un taux de présence aux examens inférieur à la moyenne nationale : il s'établit à 88,2 % pour l'UAG contre 89,3 % au niveau national ;

- parmi les critères déterminant la part de la dotation en fonction de la performance en matière d'enseignement, une valeur ajoutée réussite en licence 57 ( * ) très légèrement inférieure à la moyenne nationale (99,8 pour un indice en base 100 au niveau national) mais une valeur ajoutée réussite en DUT 58 ( * ) en décrochage préoccupant pour l'UAG par rapport à la moyenne nationale (89,2 pour un indice en base 100 au niveau national) ;

- parmi les critères déterminant la part de la dotation en fonction de la performance en matière de recherche, un taux d'enseignants-chercheurs produisants, de 52 % en 2014, inférieur de plus de 20 points à la moyenne nationale (77 % en 2014, contre 72 % en 2012), malgré une nette progression par rapport à 2012 (42 %).

Toutefois, on constate que la sur-dotation de l'université tend à s'estomper d'une année sur l'autre, en raison notamment de son amélioration en termes d'étudiants en master (présents et diplômés) et d'enseignants-chercheurs produisants. Le ratio dotation réelle/dotation théorique diminue ainsi en emplois (de 1,28 en 2013 à 1,22 en 2014) et en crédits (de 1,14 en 2013 à 1,10 en 2014).

Enfin, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche souligne que l'ensemble des universités ultramarines fait valoir que la spécificité ultramarine (coûts de fonctionnement et d'éloignement, d'autant plus importants pour une université tripolaire dont les sites ne peuvent être rejoints que par avion) n'est pas prise en compte dans SYMPA, ce que la commission de la culture, de l'éducation et de la communication avait effectivement relevé dans ses différents rapports sur l'allocation des moyens entre universités au cours des trois dernières années.

En ce qui concerne les emplois, il faut rappeler que le modèle SYMPA n'intègre pas le calcul de la masse salariale théorique. Des éléments particuliers aux départements d'outre-mer tels que l'indemnité vie chère ne pénalisent donc pas l'université quant aux résultats du modèle, puisqu'ils font l'objet d'un calcul extérieur au modèle.

En revanche, le ministère prend en compte la spécificité de l'établissement dans d'autres cadres, notamment au niveau de la part de la dotation attribuée sur la base du contrat liant l'établissement à l'État ou des compléments consentis afin de faciliter le passage de l'UAG aux responsabilités et compétences élargies (RCE) de la « loi LRU » (financement du glissement-vieillesse-technicité et mécanisme de compensation pour les établissements accueillant une forte proportion de boursiers 59 ( * ) de l'exonération de paiement des frais d'inscription).

La prise en compte de ces particularités justifie que les universités ultramarines, et tout particulièrement l'UAG en raison de son implantation sur trois départements séparés par la mer, bénéficient d'enveloppes complémentaires qui majorent la dotation qui leur aurait été attribuée théoriquement selon les calculs du modèle SYMPA.

Votre groupe de travail relève que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche a consenti, afin d'accompagner l'UAG dans son passage à l'autonomie, à un « bonus autonomie » significatif . Pour l'ensemble des universités françaises, ce bonus autonomie est composé d'un bonus indemnitaire de 200 000 euros a minima 60 ( * ) et d'un bonus à l'accompagnement en fonctionnement de 200 000 euros. Dans le cas de l'UAG, afin de prendre en compte sa spécificité ultramarine et tripolaire, une dotation de 500 000 euros supplémentaire a été allouée en 2012, dont 200 000 euros pour compenser les surcoûts liés à la tripolarité et 300 000 euros directement fléchés en faveur de projets liés au pôle guyanais.

ÉVOLUTION DES RESSOURCES DE L'UAG AU COURS DES QUATRE DERNIÈRES ANNÉES

Universités des Antilles et de la Guyane

2010

2011

2012

2013

I. SUBVENTIONS

Dotations État-MESR

27 314 299

24 054 602

24 439 115

90 238 040

Dotation État autres ministères :

167 000

267 019

180 356

473 225

Subventions opérateur public autre qu'ANR

145 373

Subventions collectivités territoriales

2 494 459

2 718 370

5 109 517

4 131 307

Subventions région

2 413 335

2 460 644

5 037 493

3 476 873

Dont Région Guadeloupe

1 196 695

1 220 848

2 204 528

1 184 317

Dont Région Guyane

1 205 890

229 416

711 677

309 000

Dont Région Martinique

10 750

1 010 380

2 121 288

1 983 556

Subvention département

9 100

239 566

72 024

58 000

Dont département Guadeloupe

6 000

147 500

3 393

921

Dont Département Guyane

24 166

53 142

35 759

Dont Département Martinique

3 100

67 900

15 489

21 320

Dont Communes

18 160

596 434

Dont Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI)

Subvention Union Européenne (FEDER, INTERREG notamment)

2 759 976

2 108 711

2 677 728

5 359 577

II. AUTRES RESSOURCES PROPRES

Droits d'inscription

2 886 997

2 461 251

2 976 774

2 143 699

Taxe d'apprentissage

288 229

285 344

374 117

321 910

Prestations au titre de la formation continue

68 022

359 600

238 972

176 017

Contrats de recherche hors ANR

Produits des accords et conventions à caractère industriel et commercial en particulier des contrats de recherche, d'essais, d'études, d'analyse, de conseils et d'expertises effectués pour le compte de tiers et prestations de services

Autres produits des activités d'édition

Produits des baux et locations commerciales, des autres activités commerciales

2 617 045

1 580 653

2 021 273

43 110

Source : Université des Antilles et de la Guyane

(2) Un sous-encadrement qualitatif pédagogique et administratif en Guyane

Conformément au principe d'autonomie financière et pédagogique des établissements d'enseignement supérieur, la répartition des moyens entre composantes et services est décidée au sein de l'université et non pas par l'État. L' allocation des moyens en emplois (plafond d'emplois financés par l'État) et en crédits (subvention pour charges de service public) est ainsi globalisée et versée par l'État à l'UAG, toutes composantes confondues.

Les services du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche indiquent qu'ils ne constatent pas, dans leur analyse, un sous-encadrement du pôle guyanais en emplois, à partir de comparaisons avec des établissements de taille similaire. Avec près de 2 500 étudiants, le pôle guyanais se situe à un niveau comparable à la Nouvelle-Calédonie (2 500 étudiants), la Polynésie Française (3 100 étudiants) ou encore, sur le territoire hexagonal, à Nîmes (3 400 étudiants) ou au Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Champollion à Albi (3 400 étudiants).

Un parangonnage entre les taux d'encadrement 61 ( * ) de ces entités situe à ce stade le pôle guyanais au même niveau que l'université de Nouvelle-Calédonie (soit un ratio de 7 postes pour 100 étudiants) et à un niveau plus favorable que la Polynésie française (5,7 postes pour 100 étudiants). Le parangonnage n'est pas réalisable pour les crédits, en raison du manque de données disponibles pour le pôle guyanais, mais il est utile de rappeler que les autres établissements comparables au pôle guyanais ne connaissent pas de difficultés financières particulières.

En revanche, le pôle guyanais semble caractérisé par une sous-dotation en qualification des postes, notamment en matière d' encadrement supérieur administratif , et, dans le champ académique, en professeurs des universités .

RÉPARTITION DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS ET ENSEIGNANTS ENTRE LES PUR DE L'UAG 62 ( * )

COMPOSANTES

Effectifs étudiants 2012/2013

Agents cat A

Agents
cat B

Agents
cat C

TOTAL

GUADELOUPE

UFR sciences juridiques et économiques

2 060

1

6

1

8

UFR sciences exactes et naturelles

1 192

5

9

22

36

UFR sciences et techniques des activités physiques et sportives

423

2

3

5

UFR des sciences médicales des Antilles et de la Guyane

1 345

1

3

5

9

Département pluridisciplinaire de lettres et sciences humaines

377

1

2

3

Institut universitaire de technologie de Kourou

193

2

7

9

Institut universitaire de formation continue

189

3

2

6

11

IUFM

435

5

7

12

24

Doctorat

360

TOTAL GUADELOUPE

6 574

16

31

58

105

MARTINIQUE

Département scientifique inter-facultaire

383

4

4

UFR des sciences médicales des Antilles et de la Guyane

839

2

2

Faculté de droit et d'économie

1 432

1

5

15

21

UFR lettres et sciences humaines

1 357

1

3

19

23

Institut universitaire de technologie de Kourou

104

2

1

3

Institut universitaire de formation continue

110

2

2

IUFM

423

10

5

13

28

TOTAL MARTINIQUE

4 648

12

17

54

83

GUYANE

Institut d'enseignement supérieur

1 459

1

5

11

17

UFR des sciences médicales des Antilles et de la Guyane

142

1

1

Institut universitaire de technologie de Kourou

263

2

1

4

7

Institut universitaire de formation continue

367

2

2

IUFM

369

3

4

4

11

TOTAL GUYANE

2 600

7

10

21

38

TOTAL

13 822

35

58

133

226

Source : Université des Antilles et de la Guyane

COMPOSANTES

Effectifs étudiants 2012/2013

PUPH

MCPH

MCF

PR

PRAG

PRCE

PAST

ATER

AUTRES

TOTAL

GUADELOUPE

UFR sciences juridiques et économiques

2 060

25

6

0

2

4

2

1

40

UFR sciences exactes et naturelles

1 192

65

26

4

3

4

102

UFR sciences et techniques des activités physiques et sportives

423

8

2

8

2

1

21

UFR des sciences médicales des Antilles et de la Guyane

1 345

8

3

7

18

Département pluridisciplinaire de lettres et sciences humaines

377

6

1

3

4

14

Institut universitaire de technologie de Kourou

193

5

1

2

3

11

Institut universitaire de formation continue

189

1

1

IUFM

435

13

2

10

6

3

34

Doctorat

360

1

1

Service universitaire des activités physiques et sportives

TOTAL GUADELOUPE

6 574

8

3

122

38

28

14

7

11

11

242

MARTINIQUE

Département scientifique inter-facultaire

383

9

2

1

1

13

UFR des sciences médicales des Antilles et de la Guyane

839

9

2

1

7

19

Faculté de droit et d'économie

1 432

27

11

2

4

2

46

UFR lettres et sciences humaines

1 357

40

16

9

4

3

3

75

Institut universitaire de technologie de Kourou

104

5

2

1

1

9

Institut universitaire de formation continue

110

IUFM

423

10

1

10

9

1

4

35

Service universitaire des activités physiques et sportives

2

1

3

Service commun de la documentation

1

1

TOTAL MARTINIQUE

4 648

9

2

91

30

26

15

5

9

14

201

GUYANE

Institut d'enseignement supérieur

1 459

27

4

5

1

3

4

44

UFR des sciences médicales des Antilles et de la Guyane

142

3

1

2

6

Institut universitaire de technologie de Kourou

263

7

6

1

14

Institut universitaire de formation continue

367

1

1

IUFM

369

13

1

4

7

25

Service universitaire des activités physiques et sportives

1

1

TOTAL GUYANE

2 600

3

1

47

5

15

10

3

5

2

91

TOTAL

13 822

20

6

260

73

69

39

15

25

27

534

Source : Université des Antilles et de la Guyane

Mme Yolaine Tarade, responsable administrative du PUR de la Guyane, ayant rang d'adjointe au directeur général des services de l'UAG, a ainsi attiré l'attention de la délégation de votre groupe de travail sur deux problèmes majeurs pesant lourdement sur la gestion du pôle et sur la qualité de son enseignement et de son encadrement administratif :

- l'essentiel des services centraux étant regroupé au siège, en Guadeloupe, la Guyane ne s'est vue traditionnellement attribuer qu'un nombre très faible de postes d'encadrement administratif de rang A. Les équipes administratives du pôle guyanais, dans la perspective de sa transformation en université de plein exercice, doivent donc être considérablement renforcées dans leurs qualifications. À ce titre, le manque d'efforts en faveur de la formation des personnels d'encadrement administratif au PUR de la Guyane , est particulièrement préoccupant, alors qu'un accompagnement par l'Agence de mutualisation des universités et des établissements d'enseignement supérieur et de recherche (AMUE) pour la maîtrise des outils de pilotage et de gestion aurait été pertinent. La responsable administrative du pôle, présente sur le pôle depuis décembre 1986, indique n'avoir bénéficié de sa première formation en gestion des ressources humaines à l'extérieur de l'établissement qu'en 2013, pour l'utilisation du logiciel « HARPÈGE » 63 ( * ) ;

- la structure du personnel enseignant dans le PUR de la Guyane est particulièrement déséquilibrée, avec seulement neuf professeurs des universités selon le dernier recensement effectué par l'administration provisoire (quatre à l'IESG, un à l'ÉSPÉ, un à l'IUT et trois en médecine) et une forte proportion d'enseignants du second degré et de vacataires . La prévalence des enseignants vacataires pour certaines disciplines pose la question de la continuité des enseignements.

PLACE DES ENSEIGNANTS NON PERMANENTS AU SEIN DE CHAQUE PÔLE AU 31/12/2013

Pôles UAG

Répartition des enseignants

Enseignants chercheurs et second degré

Enseignants non permanents

Total général

% des non permanents

Pole 971

202

40

242

17 %

Pole 972

162

39

201

19 %

Pole 973

77

14

91

15 %

Source : Université des Antilles et de la Guyane

S'il apparaît, selon les données communiquées par l'UAG, que le pôle guyanais ne se distingue pas des pôles antillais par une proportion plus importante des personnels enseignants non permanents, il convient, en revanche, de noter que les enseignants du second degré sont sollicités de façon beaucoup plus significative en Guyane que dans les Antilles. Cette situation est particulièrement pénalisante pour la consolidation des capacités de recherche du pôle guyanais (les enseignants du second degré ne pouvant dispenser une formation à la recherche universitaire) et pour l'émergence d'un vivier d'enseignants-chercheurs guyanais. Ce cercle vicieux pèse lourdement sur les capacités de développement d'une recherche universitaire de haut niveau en Guyane.

PLACE DES ENSEIGNANTS DU SECOND DEGRÉ AU SEIN DE CHAQUE PÔLE AU 31/12/2013

Pôles UAG

Répartition des enseignants

Enseignants chercheurs

Enseignants second degré

Total général

% ensemble pour le second degré

Pole 971

160

42

202

21 %

Pole 972

121

41

162

25 %

Pole 973

52

25

77

32 %

Source : Université des Antilles et de la Guyane

On en déduit qu'il y a approximativement :

- en Guadeloupe : un enseignant du second degré pour quatre enseignants-chercheurs ;

- en Martinique : un enseignant du second degré pour trois enseignants-chercheurs ;

- en Guyane : un enseignant du second degré pour deux enseignants-chercheurs.

L'UAG analyse le poids plus important des enseignants du second degré en Guyane comme la conséquence de la pénurie dans ce territoire de postes d'enseignants-chercheurs et de la difficulté de recrutements d'enseignants-chercheurs prêts à s'installer en Guyane. Elle souligne que s'ajoute à la rareté du vivier d'enseignants-chercheurs en Guyane le fait que la Guyane attire généralement plus facilement des universitaires dans l'optique d'une recherche à temps plein, au sein des organismes de recherche dont les liens sont insuffisants avec l'université, que pour exercer le métier d'enseignant-chercheur.

b) Des évolutions institutionnelles et des positionnements géographiques de plus en plus distincts

Le positionnement géographique distinct des trois départements français d'Amérique conduit au sentiment d'une divergence qui ne cesse de se creuser entre les Antilles , historiquement tournées vers la Caraïbe , et la Guyane , dont l'affirmation identitaire repose sur un ancrage amazonien et sud-américain . Les stratégies de développement économique propres des collectivités territoriales partenaires incitent logiquement chaque pôle universitaire à vouloir réévaluer l'orientation de sa carte de formations et de ses projets de recherche en fonction des perspectives offertes par la coopération régionale avec les pays voisins . Le potentiel de recherche de la Guyane en lien avec l'Amazonie, notamment dans les domaines de l'environnement, de la biodiversité ou de l'épidémiologie (maladies tropicales), est encore très insuffisamment exploité. Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que les responsables universitaires et politiques locaux réclament une plus forte autonomie dans la définition de la politique d'enseignement supérieur et de recherche sur le pôle.

À des stratégies de développement distinctes, il faut également ajouter des évolutions institutionnelles divergentes qui, en redéfinissant les équilibres entre collectivités territoriales, pourront conduire à une accentuation des rivalités entre les trois pôles de l'UAG. En effet, à la suite de consultations référendaires organisées le 24 janvier 2010, la Martinique et la Guyane deviendront, aux termes de la loi organique n° 2011-883 du 27 juillet 2011 et de la loi n° 2011-884 du même jour, des collectivités uniques relevant de l'article 73 de la Constitution, exerçant les compétences dévolues aux départements d'outre-mer (DOM) et aux régions d'outre-mer (ROM) à compter de la première réunion de leur assemblée suivant leur première élection, c'est-à-dire en 2015. En revanche, la Guadeloupe s'était prononcée, le 7 décembre 2003, contre un projet de création d'une collectivité unique et a, dans le cadre des États généraux de l'outre-mer de 2009, sollicité un report des futures consultations populaires afin de se donner le temps de la réflexion dans l'élaboration de son projet d'évolution institutionnelle.


* 49 Audition du 4 mars 2014.

* 50 AERES, Rapport d'évaluation de l'Université des Antilles et de la Guyane , section des établissements, septembre 2009.

* 51 Pour l'année universitaire 2010-2011, seulement 28 % des nouveaux bacheliers inscrits en première année de licence (L1) poursuivent en L2 (ou à un niveau équivalent), près de 36 % redoublent, 1,5 % changent d'orientation et près de 35 % sortent de l'université.

* 52 Selon le rapport d'évaluation de l'AERES précité, « depuis trois ans [2006-2009] , le pilotage de la recherche a été un peu chaotique car trois équipes présidentielles se sont succédé » et ajoute que « au cours des années passées, l'UAG, université jeune, n'a pas vraiment été en mesure d'élaborer une véritable stratégie de recherche ».

* 53 Le rapport d'évaluation de l'AERES précité relève un « manque de moyens alloués à la vie étudiante » et un « manque de vie sur les campus imputable à l'absence de locaux mis à disposition pour pouvoir se réunir ».

* 54 Taux de réussite pour l'ensemble des baccalauréats : 87,2 % d'admis en France métropolitaine et 74,6 % en Guyane.

* 55 Il s'agit d'inscriptions principales qui ne tiennent pas compte des effectifs étudiants de 3 e cycle présents en Guyane qui sont inscrits, administrativement, en Guadeloupe (siège de l'école doctorale).

* 56 NABAJOTH, Éric, « Les défis de l'Université des Antilles et de la Guyane », in LUCAS, Raoul et RADOJCIC, Karin (sous la direction de), L'enseignement supérieur dans les régions ultrapériphériques (RUP) (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion) , Éditions Karthala, 2006, p. 209.

* 57 Le ministère est capable de simuler ce que serait la réussite des étudiants dans un établissement toutes choses égales par ailleurs, en neutralisant les effets liés à la structure des diplômés et à la structure socio-culturelle (les différents types de bac, obtention du bac en retard...), afin d'évaluer l'impact d'un établissement d'enseignement supérieur pour mieux faire réussir une population d'étudiants. Ceux des établissements qui ont une valeur ajoutée positive (en accueillant des étudiants potentiellement en difficulté scolaire en les faisant mieux réussir que d'autres établissements) sont récompensés par le modèle. Ce critère permet de valoriser l'image de l'université et est donc déterminant pour son attractivité.

* 58 Diplôme universitaire de technologie.

* 59 L'UAG compte 54 % d'étudiants boursiers, contre 36 % en moyenne en France.

* 60 Ou 10 % des primes de responsabilités pédagogiques (PRP) et des primes de charges administratives (PCA) et de l'indemnitaire IATOS.

* 61 Emplois de titulaires (stock vieilli pour les universités autonomes) rapportés aux effectifs étudiants.

* 62 Signification des sigles pour les personnels enseignants : professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PUPH), maîtres de conférences-praticiens hospitaliers (MCPH), maîtres de conférences (MCF), professeur agrégé (PRAG), professeur certifié (PRCE), professeur associé à temps partiel (PAST), attaché temporaire d'enseignement et de recherche (ATER).

* 63 « Harmonisation pour la gestion des personnels » : logiciel qui propose des modules de gestion des emplois, des postes, des carrières, des modalités de service, des congés, des fonctions professionnelles, électives et nominatives, des promotions...

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